M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Philippe Dominati, rapporteur de la commission spéciale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les ambitions et les lignes directrices du projet de loi venant d’être présentées, ainsi que le contexte économique dans lequel il s’inscrit, il m’appartient à présent de vous faire part de l’état d’esprit dans lequel a travaillé la commission spéciale depuis deux mois, et des raisons justifiant les principaux apports qu’elle vous suggère d’adopter.

Tout d’abord, pour la majorité de la commission, ce texte constitue une étape majeure qui va bien au-delà d’une simple transposition de directive. L’ambition est ici de rénover en profondeur le droit du crédit à la consommation et d’améliorer de manière substantielle les procédures de surendettement afin de mettre un terme à ce qu’on appelle le « malendettement ».

Plus de trente ans après la loi fondatrice qui a encadré l’octroi du crédit aux consommateurs, la loi Scrivener de 1978, vingt ans après celle, non moins essentielle, qui a instauré les mécanismes de prévention du surendettement, la loi Neiertz, il s’agit de poser les bases d’un droit nouveau, attaché à conforter le crédit tout en le rendant davantage responsable. Je souhaite, madame la ministre, que la loi auquel votre nom sera attaché devienne ainsi une nouvelle référence et que les outils qu’elle contient s’avèrent durablement efficaces.

En effet, ces vingt dernières années, nombre de modifications ponctuelles, d’inégale importance, ont été apportées par des lois différentes. Cela témoigne de la difficulté qu’il y a à trouver un point d’équilibre entre la nécessité de développer le crédit, pour permettre à nos concitoyens de consommer conformément à leurs besoins et à leurs capacités, et celle de protéger les ménages contre les risques d’un crédit mal maîtrisé.

Ce point d’équilibre, je pense que nous réussirons à l’atteindre à partir de votre texte, madame la ministre, mais grâce aussi aux améliorations que le Sénat et l'Assemblée nationale lui apporteront.

Il est important que la législation se stabilise pendant un long moment afin que les acteurs évoluent durablement dans un cadre clair, loyal et prévisible sur le moyen terme.

Il ne vous a pas échappé que cette ambition était commune aux différentes propositions de loi. Dans le cadre de mon travail de rapporteur, j’ai ainsi eu à examiner les préconisations du président Philippe Marini, de Mme Nicole Bricq, de M. Claude Biwer – l’une et l’autre étant d'ailleurs vice-présidents de la commission spéciale - de M. Charles Revet et de Mme Muguette Dini, cosignataire avec son président de groupe, M. Michel Mercier, d’une des cinq propositions de loi.

Certes, si les textes des uns et des autres pouvaient aborder des aspects parfois différents, tous visaient à renforcer les dispositions relatives à la publicité et à l’information de l’emprunteur, et la plupart soutenaient la création d’un fichier positif comme une nécessité.

À bien des égards, le projet de loi a apporté une première série de réponses et, dans mon rapport écrit, je me suis attaché à systématiquement les souligner. La commission spéciale a poursuivi sur ce chemin en intégrant d’autres préconisations des propositions de loi sénatoriales, sinon dans leur lettre du moins dans leur esprit, qu’il s’agisse du fichier positif, du taux de l’usure ou du microcrédit.

Il reste quelques points qu’il ne m’a pas semblé opportun de suggérer à la commission d’adopter, mais nous aurons l’occasion d’en débattre puisqu’ils font l’objet de plusieurs amendements.

Je peux affirmer sans crainte d’être contredit par les faits que le texte que nous examinons aujourd’hui doit tout autant au Gouvernement qu’à l’implication de nombreux collègues sénateurs, tant par leurs propositions de loi que par le travail qu’ils ont accompli au sein de notre commission spéciale, ce dont, naturellement, je me réjouis.

Avant d’aborder les apports de la commission, je souhaite tout d’abord saluer les dispositions initiales du projet de loi qui, sur plusieurs points, vont plus loin que la simple transposition d’une directive : il s’agit de donner du corps au concept de « crédit responsable » défendu par le Gouvernement.

S’agissant de la distribution du crédit, je citerai, à titre d’exemples, l’avertissement légal qui devra figurer sur les publicités, la consultation obligatoire du FICP, la fiche de dialogue, que vous avez évoquée, madame la ministre, l’obligation d’un amortissement minimum dans les échéances du crédit renouvelable, l’interdiction de subordonner les avantages d’une carte de fidélité à l’utilisation d’un crédit, ou encore le principe du « paiement comptant » pour les cartes mixtes, afin que le consommateur dise expressément s’il souhaite ou non payer à crédit quand il utilise sa carte.

Toutes ces mesures, en particulier les deux dernières, apportent, j’en suis profondément convaincu, de très sérieuses garanties pour un encadrement maîtrisé du crédit renouvelable, ce que nous souhaitons tous ici.

Le principe qui sous-tend la réforme du surendettement et du FICP est l’accélération des procédures.

Pour ce faire, le projet de loi vise d’abord à réduire les délais légaux d’examen par les commissions de surendettement, qu’il s’agisse de la recevabilité ou du traitement lui-même.

Ensuite, le texte tend à conférer directement aux commissions des pouvoirs qui relevaient jusqu’à présent du juge, partant du constat que 85 % à 90 % des préconisations des premières sont aujourd’hui homologuées par le second, et qu’en tout état de cause celui-ci est toujours susceptible d’intervenir à la demande d’une des parties.

Enfin, le Gouvernement propose de simplifier la procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, c’est-à-dire pour les cas où il n’y a aucun actif à réaliser.

Outre ces améliorations, il faut relever la suspension des procédures d’exécution à compter de la décision de recevabilité.

Sur tous ces points, monsieur le président, mes chers collègues, votre commission spéciale a exprimé son accord.

Il s’agit donc d’un bon projet de loi, comme l’atteste le fait que peu d’amendements remettant en cause son contenu ont été déposés.

Les quelques dispositions nouvelles que nous avons toutefois souhaité introduire visent à doter ce texte de toute la gamme des outils lui permettant de donner sa pleine mesure.

Au titre d’abord des compléments totalement nouveaux, je citerai la réforme du taux de l’usure, le principe de la création d’un fichier positif et le renforcement du microcrédit.

Sur le premier point, l’usure, ma position est claire : je m’étonne qu’avec l’Italie et la Belgique notre pays reste le dernier des grands États industrialisés à être soumis à une législation sur l’usure. Je ne souhaite évidemment pas que les gens empruntent à des taux d’intérêt très élevés ni que les banques fassent des profits colossaux sur le dos des petites gens, mais, dans une économie moderne, la régulation doit venir du marché, sous le contrôle d’organes chargés de veiller au respect des règles de la concurrence et, s’agissant des intérêts individuels, sous le contrôle du juge.

C’est ainsi qu’agissent la plupart de nos voisins. Si leurs taux jurisprudentiels de l’usure sont plus élevés que chez nous, et parfois de très loin, toutes les statistiques montrent que leurs taux d’intérêt moyens sont parfaitement comparables aux nôtres, quand ils ne sont pas plus bas, et que les personnes surendettées ne sont pas plus nombreuses qu’en France. Or, bien plus que le taux de l’usure, ce sont ces données-là qui importent.

Je rappelle que c’est au gouvernement de Michel Rocard que l’on doit la reconnaissance du rôle du marché dans la fixation du coût des prêts. La loi Neiertz a en effet modifié le mode de calcul du taux de l’usure : c’est à ce moment-là que la détermination administrée a été remplacée par le mécanisme actuel.

Cependant, si celui-ci ne fonctionne plus aujourd’hui, ce n’est pas, de mon point de vue, parce que l’on est allé trop loin, c’est, au contraire, parce que l’on n’a pas eu le courage de faire « le grand saut » et de supprimer purement et simplement le dispositif.

L’opinion n’étant pas encore mûre pour franchir cette étape, c’est donc vers l’adaptation du modèle que le Gouvernement envisage que je me suis tourné.

Le problème aujourd'hui tient à la segmentation du marché entre les établissements de crédit, spécialisés sur le crédit renouvelable, et les banques, qui se cantonnent plus particulièrement dans le crédit personnel affecté.

L’idée, commune au Gouvernement et à la commission spéciale, est d’introduire de la concurrence entre ces deux « business models » afin d’entraîner une fixation des taux en raison non pas de la catégorie du produit mais du montant du crédit.

L’article 1er A a donc pour objet, d'une part, de donner une base législative à cette transformation, d'autre part, d’autoriser une gestion administrée des taux sur deux ans au maximum afin que le changement de règle ne conduise pas à l’effondrement brutal du marché du crédit, enfin, d’instituer un comité ad hoc pour superviser la réforme et vérifier les conditions de constitution des marges des établissements de crédit.

Si cette nouvelle réforme se révèle un jour inadaptée, je pense qu’il conviendra enfin, puisque l’on aura tout essayé, de supprimer définitivement ce dispositif.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que, pour ce qui est des sociétés, ce mécanisme a été abandonné en deux étapes et que la réforme a permis, jusqu’à la crise apparue il y a un an, d’élargir l’accès des PME au crédit sans augmenter le coût moyen de celui-ci.

Le deuxième point que la commission spéciale a abordé est le fichier positif.

Pour être tout à fait franc, j’estime, à titre personnel, qu’il ne constitue pas l’outil efficace que certains attendent dans la lutte contre le surendettement. Lors d’un déplacement à Bruxelles, nous avons constaté qu’il suscitait une satisfaction unanime, mais cela ne m’a cependant pas totalement convaincu.

En effet, sur la base des informations recueillies, notamment le rapport 2008 de la Banque nationale de Belgique, la BNB, je me suis livré à quelques calculs et comparaisons que je vais vous livrer de manière synthétique.

Quand on veut créer un outil qui aura pour base au moins 15 millions et peut-être même 30 millions de personnes, il s’agit de se déterminer non pas en fonction de convictions, mais bien de faits, afin de s’assurer de la nécessité de constituer un tel fichier.

Tout d’abord, je voudrais rappeler que les statistiques belges couvrent la période 2003-2007, c’est-à-dire un cycle de crédit commun à toute l’Europe où le risque n’a jamais été aussi faible, la production jamais aussi forte, et les taux jamais aussi bas. On constate dans tous les pays, sur cette période, des résultats favorables, qui ne sont donc pas nécessairement liés à la création d’un tel fichier.

En France, nous pouvons indiquer que le nombre annuel de nouveaux inscrits au FICP a baissé de 65 % entre 2003 et 2007.

À l’inverse, savez-vous que, l’an dernier, le nombre des personnes surendettées a augmenté en Belgique de 8,8 %, quand la progression n’a été que de 3,1 % en France ?

Un dernier chiffre encore : les statistiques de la BNB indiquent que le taux de défaillance des crédits s’est réduit, entre 2003 et 2007, de 10 % à 15 % selon que l’on prend en compte les emprunteurs ou le montant des contrats.

Or, si l’on entre dans le détail, on constate que les défaillances des crédits immobiliers se sont réduites de 30 % quand, dans le même temps, celles qui concernent le crédit renouvelable ont augmenté de 9,7 %  ! Si la Centrale des crédits belge a effectivement sécurisé le crédit immobilier, elle ne l’a pas fait nécessairement pour le crédit renouvelable.

En quoi ces chiffres prouvent-ils l’intérêt d’un fichier positif pour éviter le surendettement ?

Transposons maintenant à notre situation les résultats obtenus en Belgique, en prenant à chaque fois les éléments les plus favorables, c’est-à-dire en estimant que notre fichier positif nous permettrait non seulement de faire aussi bien, mais même beaucoup mieux. Ainsi, pour les besoins de la démonstration, je me suis fondé sur une réduction de 20 % des incidents de crédit. J’ai par ailleurs supposé que ce taux de réduction s’appliquerait ipso facto à l’ensemble des personnes surendettées en estimant la proportion de celles qui sont victimes du crédit, et non des accidents de la vie, à 50 % et non à 13 %.

Si donc nous respectons ces proportions, compte tenu du fait que le stock des 730 000 personnes surendettées s’étale sur quatre ans, la prévention concernerait au mieux chaque année 18 000 personnes !

Il s’agit donc de constituer une centrale positive de 15 millions de personnes dans la base de données pour éventuellement prévenir le surendettement de 18 000 personnes par an. Avec cette proportion proche de 1 pour 1 000, je considère que l’efficacité d’un tel outil est relative.

En outre, cette évaluation ne tient pas compte du développement de certaines cartes bancaires, comme la carte « Double Action » que propose, par exemple, le Crédit Agricole, qui conduira donc à augmenter le nombre des personnes inscrites au fichier et, par conséquent, à rendre le ratio inférieur à 1 pour 1 000.

Permettez-moi à cet instant de quitter le domaine économique pour entrer dans le champ des libertés publiques. Est-il raisonnable et conforme à la loi Informatique et libertés de 1978, selon laquelle un fichier ne peut être autorisé que s’il constitue une solution pertinente, adéquate et non excessive au regard de la finalité qu’il poursuit, de créer un tel fichier pour un résultat aussi faible ? En mon âme et conscience, je pense que cette question nécessite un débat très approfondi. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)

En revanche, si un fichier positif est bien un outil de nature à renforcer la concurrence dans le secteur du crédit, à permettre l’arrivée de nouveaux entrants, à faire baisser les prix, donc à réduire l’exclusion du crédit dont souffriraient quelque 15 % de nos concitoyens, la perspective est tout autre.

Mes chers collègues, j’imagine que, comme moi, vous l’avez remarqué, les professionnels qui s’opposent de la manière la plus véhémente au fichier sont les principales banques et leurs filiales spécialisées. Ceux qui « tiennent » le marché ne veulent surtout pas d’un fichier, les autres le demandent au nom de la concurrence.

Dans cette optique, je deviens favorable à un fichier de ce type.

Si tel est l’objectif visé, le débat difficile engagé aujourd’hui par les Belges sur le point de savoir s’il faut enrichir leur centrale de données avec les autres créances de citoyens n’a pas lieu d’être : sur le marché du crédit, seul le crédit doit être enregistré.

Enfin, compte tenu de l’absence de consensus aujourd’hui dans notre pays sur cette question - nous avons pu tous en prendre conscience au cours des auditions -, la création, dès demain, d’un fichier dit « positif » serait inopportune. En effet, il existe nombre de problèmes techniques et de considérations de principe qui interdisent une mise en œuvre immédiate. Je n’en citerai qu’un exemple : la sécurité du système et la protection des données personnelles. En Belgique, elles sont assurées par le numéro unique dont dispose tout citoyen sur sa carte d’identité, qui est obligatoire. Rien de cela en France, car nous avons, au contraire, toujours évité d’avoir un numéro unique pour nos relations avec les administrations. Il ne s’agit pas seulement d’un détail technique, et il y en a de nombreux autres ! La loi belge du 10 août 2001, qui a créé la Centrale, comporte 34 articles et couvre trois pages du Moniteur officiel. C’est dire si le dispositif est complexe...

Pour toutes ces raisons, la commission spéciale a adopté les articles 27 bis et 33 A qui, combinés, posent le principe de la création d’un fichier positif à terme, mais donnent du temps à l’évaluation et à la concertation, afin de permettre de rapprocher suffisamment les points de vue entre les parties – aujourd’hui encore trop divisées –, de même qu’ils ménagent le temps de la réflexion sur la vraie finalité et les modalités d’utilisation de cet outil.

C’est dans cette optique qu’une commission temporaire réunissant toutes les parties prenantes, à l’instar du comité d’accompagnement créé en Belgique à la satisfaction de tous, travaillera à élaborer un projet permettant au Parlement de prendre les mesures qui lui sembleront s’imposer pour créer un fichier positif.

Troisième et dernier élément nouveau que la commission spéciale a introduit dans le projet de loi, l’article 18 bis vise à donner une définition du microcrédit social, beaucoup trop modeste aujourd'hui, afin d’en favoriser l’essor, et à permettre au Fonds de cohésion sociale de financer non seulement les garanties, mais également directement les dépenses d’accompagnement des bénéficiaires.

Madame la ministre, mes chers collègues, j’en viens maintenant aux compléments apportés au projet de loi lui-même.

La réflexion de la commission spéciale a essentiellement porté sur trois points : la « zone grise » entre le commerce et le crédit, qu’il fallait davantage clarifier, l’information et la protection du consommateur, qui devaient être renforcées, et le fonctionnement de la procédure de surendettement et du FICP, qui pouvait être amélioré.

En ce qui concerne les relations entre le commerce et le crédit, la commission a d’abord voulu assurer une meilleure confidentialité des opérations sur le lieu de vente, garantir la formation des personnels concernés et permettre un contrôle facile du respect de ces prescriptions par l’autorité administrative.

Ensuite, il a semblé indispensable d’assujettir clairement les nouvelles cartes bancaires et de crédit aux mêmes règles de paiement comptant que les cartes de fidélité auxquelles sont associées des fonctions de paiement et de crédit. À défaut, notre travail aurait été très largement vain : en effet, il y a plus de 50 millions de cartes bancaires en circulation dans notre pays !

En outre, la commission a introduit l’obligation d’offrir systématiquement au consommateur qui souhaite régler à crédit des achats dépassant une certaine somme une offre alternative de crédit amortissable lorsqu’on lui soumet une offre de crédit renouvelable. La commission a également tenu à améliorer le fonctionnement de la loi Chatel en interdisant aux établissements de crédit de s’appuyer sur une cotisation annuelle concernant une carte de fidélité pour ne pas clore au bout de trois ans un compte de crédit renouvelable inactif.

Enfin, à partir d’un amendement de notre collègue Claude Biwer, la commission a contraint le Gouvernement à moduler les durées de remboursement des crédits renouvelables selon leur montant, afin que les petits tirages, par exemple ceux qui sont inférieurs à 3 000 euros, soient remboursés plus rapidement que les utilisations plus élevées. De même, à partir d’un amendement de Michel Mercier, elle a supprimé la distinction entre l’offre sans agrément et l’offre avec faculté d’agréer, afin de rendre obligatoire en toutes circonstances l’accord exprès du prêteur.

Mes chers collègues, toutes ces dispositions vont renforcer le nouvel équilibre que nous souhaitons tous voir s’instaurer pour limiter le crédit renouvelable aux petits achats, sur des durées de remboursement limitées.

Concernant la protection et l’information du consommateur, la commission spéciale a d’abord voulu garantir que la fiche de dialogue ne pourra pas être utilisée par le prêteur à l’encontre de l’emprunteur si celui-ci commet des erreurs ou des omissions. Pour qu’elle soit éventuellement considérée comme probante, il faudra qu’elle soit assortie des justificatifs concernés. Cette solution, fondée sur la responsabilité du prêteur, a semblé préférable à celles qui imposent des obligations générales risquant sérieusement de mettre à mal le commerce et de gêner significativement un nombre considérable de nos concitoyens.

Par ailleurs, plusieurs propositions de nos collègues ont été intégrées au texte : je pense au complément apporté à la mention légale d’avertissement et à l’obligation de faire figurer celle-ci sur la fiche d’information, deux mesures suggérées par Muguette Dini, Claude Biwer et le groupe de l’Union centriste.

Je vise également les initiatives de Laurent Béteille et de Brigitte Bout conduisant, d’une part, à ce qu’un encadré récapitulatif des principales caractéristiques du contrat figure à la première page de celui-ci et, d’autre part, à ce que tout prêteur adresse, au moins une fois par an, un récapitulatif de l’état d’exécution des crédits.

Enfin, la commission spéciale a fortement complété le texte initial en matière de surendettement et de FICP. Sur mon initiative, elle a notamment amélioré le suivi social des personnes surendettées et rendu obligatoires le rapport annuel des commissions de surendettement et leur synthèse par la Banque de France, afin d’entraîner une harmonisation des pratiques sur tout le territoire.

Des amendements de Laurent Béteille et de Brigitte Bout ont permis de conférer le droit de vote à tous les membres de la commission de surendettement. Sur la proposition de Muguette Dini, la commission spéciale a étendu le reste à vivre aux frais de garde et de transport professionnel tandis que, sur celle de Nicole Bricq, elle a prévu la réouverture du droit au versement de l’APL en cas de recevabilité du dossier de surendettement.

En ce qui concerne le FICP, la commission spéciale a prévu la traçabilité des consultations du fichier réalisées par les établissements de crédit, afin de s’assurer qu’ils vérifient bien la solvabilité de l’emprunteur avant la conclusion du contrat. En outre, sur l’initiative de Brigitte Bout et de Laurent Béteille, elle a confirmé que l’inscription au FICP n’interdisait pas, en tant que telle, la délivrance d’un crédit.

Telles sont, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les principales améliorations que la commission spéciale a jugé utile d’apporter au texte du Gouvernement. Elles résultent d’un travail long de deux mois, scandé par six séries d’auditions et un déplacement à Bruxelles, qui a permis d’entendre 40 organismes, associations et experts, soit plus de 90 personnes au total.

Cette réflexion a été, me semble-t-il, très féconde pour faire émerger les solutions les plus adaptées tant aux contraintes dans lesquelles s’effectue cet exercice de transposition de la directive communautaire qu’aux objectifs politiques fixés par le Gouvernement. La commission spéciale a encore donné, la semaine dernière, un avis favorable à une douzaine de propositions émanant de nos collègues.

Réduire le malendettement en diminuant la part du crédit renouvelable au profit du crédit amortissable, améliorer les procédures de traitement du surendettement sont deux ambitions que nous partageons tous.

Même si certaines suggestions restent en discussion, car nous n’avons pas les mêmes appréciations sur leurs effets réels, nous nous entendons assez largement sur les points essentiels de ce texte, que nous avons examiné sous la bienveillante autorité de Philippe Marini, avec les collègues de tous les groupes, auxquels j’adresse mes remerciements pour le travail que nous avons accompli ensemble.

J’espère que ce projet de loi, qui touche à un sujet essentiel pour tous nos concitoyens, rencontrera un accueil favorable allant au-delà de la seule majorité gouvernementale. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. Philippe Marini, président de la commission spéciale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous attendions ce débat depuis un certain nombre de mois, mais entre-temps, nous n’avons pas chômé !

À titre liminaire, vous me permettrez de féliciter et de remercier notre excellent rapporteur, Philippe Dominati, et de vous suggérer de consulter, en tant que de besoin, son excellent rapport écrit,…

Mme Nicole Bricq. Faites-moi confiance !

M. Philippe Marini, président de la commission spéciale. … une véritable somme éclairant le contexte économique, juridique et politique dans lequel s’inscrit ce projet de loi.

Mes remerciements doivent être étendus à l’ensemble des membres de la commission spéciale. Beaucoup d’entre eux ont été très actifs et même positifs, quelle que soit leur appartenance politique. Je crois pouvoir dire que nous nous sommes efforcés, sans gommer, bien entendu, nos différences, de travailler ensemble pour relever le défi face à ce qui constitue une vraie question de société.

Cela étant dit, je tiens à faire remarquer que nous avons mené ce travail dans un contexte nouveau, puisque ce projet de loi est l’un des premiers à être examinés dans le cadre de la nouvelle procédure constitutionnelle, dont nous continuons, en quelque sorte, d’essuyer les plâtres. Cela nous a valu – sans doute est-ce un aspect très positif de la révision – de constituer la présente commission spéciale, afin de mieux coordonner nos positions.

Je remercie la conférence des présidents, qui a opté pour la constitution d’une commission spéciale ; de mon point de vue, cette solution répondait à une double nécessité, politique et technique.

C’était d’abord une nécessité politique : il était indispensable que les commissions des lois, des affaires économiques, des finances et des affaires sociales aient une approche commune, ce qui a été facilité par le « creuset » de la commission spéciale.

C’était aussi une nécessité technique : imaginez, mes chers collègues, une commission saisie au fond et trois commissions saisies pour avis avec pour impérieuse obligation de débattre en séance du texte de la première ! C’était priver d’efficience les démarches des rapporteurs pour avis.

Je crois pouvoir le dire sous le contrôle des autres membres, la commission spéciale fut une expérience tout à fait positive.

La commission spéciale s’est efforcée d’exercer toutes les responsabilités temporaires qui sont les siennes. Nous avons voulu jouer le jeu d’une élaboration collective en notre sein, et je voudrais tout particulièrement signaler l’épisode du débat d’orientation fort utile que nous avons eu.

Avant d’examiner le texte et les propositions d’amendement, nous avons en effet pris le temps nécessaire pour déterminer, ensemble, la méthode et les sujets qui allaient constituer en quelque sorte les nœuds de nos discussions, tout cela, bien évidemment, sans préjuger des opinions différentes qui fondent notre pluralisme.

Je tiens également à remercier Mme Christine Lagarde, qui a été présente tout au long de nos délibérations, du moins de celles qui ont abouti à la fixation du texte de la commission spéciale.

Certains d’entre nous, mes chers collègues, avaient pu, au moment de la révision constitutionnelle, émettre des doutes, manifester des préventions, formuler leurs préoccupations quant à la présence du Gouvernement au sein de la commission.

Je dois à la vérité de dire que Mme Christine Lagarde a été d’une aide précieuse. N’abusant jamais de la position éminente du Gouvernement, elle a laissé se développer le débat et est intervenue – qu’elle veuille bien m’autoriser à le dire – à bon escient pour répondre à nos questions et à nos demandes dans le cadre des responsabilités qui sont les siennes.

Mes chers collègues, ce texte est important. Aux trop nombreuses voix qui s’élèvent pour chercher à le minimiser, je tiens à répondre qu’il engage une véritable réforme. Même si vous l’avez présenté de manière modeste, madame le ministre, je répète, à la suite de M. le rapporteur, que ce projet de loi fait vraiment évoluer la situation sur plusieurs points clés. Trois maîtres mots me semblent d’ailleurs le caractériser : convergence, équilibre et urgence.

Tout d’abord, je tiens à faire état de la convergence qui a existé entre le travail du Gouvernement et celui des parlementaires.