modifications de la législation sur les centres de ressources biologiques

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Etienne, auteur de la question n° 571, adressée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Jean-Claude Etienne. Les médecins chercheurs en biologie et les industriels des entreprises pharmaceutiques et biotechnologiques sont de plus en plus confrontés aux problèmes pratiques et éthiques posés par la conservation et le stockage des échantillons biologiques humains.

Nous sommes plusieurs parlementaires de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques à avoir été saisis personnellement de cette question.

Tout récemment, un rapport de l’Académie nationale de médecine a souligné la nécessité d’adapter notre législation sur les centres de ressources biologiques.

Depuis ces dernières années, parallèlement à l’avancée des connaissances en génétique, de nombreuses collections d’échantillons biologiques humains ont été mises en place. L’activité de conservation, qui est un élément stratégique important pour la recherche en génétique et ses applications, ne cesse d’augmenter.

Les banques d’ADN humains sont nécessaires à la réalisation de diagnostics présymptomatiques et prénataux, aux études d’épidémiologie génétique et au développement de la pharmacogénomique.

Les centres de ressources biologiques, qui conservent ces éléments, sont les interfaces entre les prélèvements, sur des personnes vivantes ou décédées, et les équipes de recherche.

Par exemple, ils jouent un rôle de plus en plus important dans la recherche sur les maladies liées à l’âge, notamment les affections neurodégénératives. C’est d’ailleurs à eux que l’on doit les derniers progrès enregistrés en la matière.

Monsieur le secrétaire d’État, vous appartenez au comité de pilotage du Comité consultatif sur les ressources biologiques, dont la mission est de coordonner la politique nationale en matière d’accréditation et d’habilitation des centres de ressources biologiques.

Il devient nécessaire, me semble-t-il, à la veille de la deuxième révision des lois de bioéthique, de structurer les centres de ressources sur le plan national, de codifier leur mode de gouvernance, d’apprécier et de quantifier, autant que faire se peut, les projets scientifiques qu’ils nourrissent de leur matériel, dont ils ont la responsabilité en termes de conservation, et ainsi d’assurer leur place dans la dimension internationale des recherches, où notre pays est en pointe.

La proposition de loi relative aux recherches sur la personne, adoptée par l’Assemblée nationale le 22 janvier dernier et actuellement à l’étude au Sénat, est une approche augurant de certaines possibilités évolutives à ce sujet.

Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous apporter des précisions sur les intentions et les perspectives du Gouvernement, notamment de Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, sur cette question qui suscite l’interrogation de nombreux acteurs du monde de la recherche dans notre pays et en Europe ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser ma collègue Valérie Pécresse.

Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche a pris toute la mesure de l’importance des centres de ressources biologiques, rejoignant tout à fait les conclusions de l’Académie de médecine.

Ces centres figurent sur la feuille de route des infrastructures de recherche produite par le ministère.

Ce caractère de grande infrastructure de recherche se retrouve également à l’échelon européen, avec un important projet d’infrastructure européenne partagée, le BBMRI, ou Biobanking and Biomolecular Resources Research Infrastructure, permettant l’harmonisation des exigences réglementaires, l’optimisation de l’usage et du fonctionnement des biobanques, l’accès aux échantillons biologiques et aux données cliniques qui sont associées à travers les frontières.

À l’échelon national, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche s’est attaché à un meilleur pilotage des centres de ressources biologiques, les CRB. En 2007, il a restructuré – vous le savez, car vous suivez ces dossiers avec attention – le Comité consultatif sur les ressources biologiques, le CCRB, créé en 2001 à la suite des travaux de l’OCDE, qui ont d’ailleurs conduit à la définition des CRB qu’il coordonne.

Le CCRB a ainsi pris la suite d’actions incitatives lancées par le ministère et les organismes de recherche pour favoriser la structuration des centres de ressources biologiques au plan national.

À cet effet, le CCRB s’est doté d’un comité de pilotage réunissant les ministères concernés – ministère de la santé, ministère de la défense, ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, ministère des affaires étrangères et européennes, ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche –, ainsi que toutes les parties prenantes impliquées.

Les missions de ce comité sont la coordination de la politique nationale en matière d’accréditation et d’habilitation des centres de ressources biologiques, la réflexion prospective et l’élaboration de propositions visant à leur développement, la mise en œuvre d’une politique de soutien en leur faveur, en liaison avec le groupement d’intérêt scientifique « infrastructures en biologie, santé et agronomie », ou GIS IBISA, et la coordination des actions visant à augmenter la visibilité du dispositif national.

Concernant spécifiquement les ressources biologiques d’origine humaine, un effort important a été accompli, lequel a permis de soutenir de nombreux centres de ressources biologiques.

Parmi les actions incitatives dans le domaine de la santé, un appel d’offres porté par l’Agence nationale de la recherche et lancé en 2006 a permis de soutenir les centres de ressources biologiques, ou CRB, en particulier sur les aspects de la valorisation et de la certification. Depuis, le groupement d'intérêt scientifique Infrastructures en biologie, santé et agronomie, le GIS IBISA, coordonne les actions avec deux priorités : la première est de reconnaître et labelliser les CRB d’envergure nationale sur la base de critères relatifs, notamment, à leur importance stratégique, à leur mode de gouvernance, à l’existence d’un système d’information et d’une activité mesurable et à la qualité des projets scientifiques auxquels ils contribuent ; la seconde est de soutenir les CRB les plus performants par des appels d’offres, en favorisant leur participation à des réseaux nationaux ou internationaux.

En ce qui concerne le statut juridique des CRB, il s’agit non pas d’imposer un modèle unique, mais de tenir compte de la diversité des organismes qui les accueillent – vous le savez, un grand nombre sont hébergés par les CHU ou correspondent à des tumorothèques en liaison avec l’Institut national du cancer. Il faut noter, au-delà de l’harmonisation des structures juridiques, l’importance du bon fonctionnement des CRB selon les bonnes pratiques retenues au niveau international. La France est en pointe dans ce domaine pour avoir piloté le groupe de travail de l’OCDE sur les standards pour les collections de ressources biologiques. Une norme AFNOR, a d’ailleurs été publiée en juin 2008.

Quant au cadre législatif, il a évolué à la suite de la publication, en août 2007, du décret d’application de la loi de 2004 relative à la bioéthique. Ainsi, un nouveau régime s’applique désormais à la conservation des éléments humains utilisés à des fins de recherche. Il crée, pour tout organisme ou établissement préparant ou conservant des éléments biologiques issus du corps humain, l’obligation de déclarer cette activité si l’organisme utilise ces éléments à des fins de recherche scientifique propres, ou de solliciter une autorisation de préparation et de conservation si cette activité est effectuée à des fins de cession à un organisme tiers. Cette réglementation a donc des conséquences directes pour les CRB, qui doivent soit déclarer leur activité, soit disposer d’une autorisation pour la mener. L’intégralité de ce dispositif est placée sous la responsabilité du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. L’ensemble des procédures en ce domaine peut paraître complexe, comme le souligne le rapport de l’Académie nationale de médecine.

Dans cette recherche de simplification des procédures, une proposition de loi relative aux recherches sur la personne, dite loi Jardé, adoptée par l’Assemblée nationale le 22 janvier 2009, est actuellement à l’étude au Sénat. À l’occasion de l’examen de ce texte, le dispositif de déclaration des collections d’échantillons biologiques devrait être simplifié, comme le recommande le rapport de l’Académie. Ce rapport sera également pris en compte dans le cadre des réflexions en cours sur la révision des lois de bioéthique.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Etienne.

M. Jean-Claude Etienne. Je remercie M. le secrétaire d’État des précisions qu’il a bien voulu nous apporter, au moment même où, comme il l’a indiqué, le Sénat étudie la proposition de loi relative aux recherches sur la personne : la Haute Assemblée avait besoin de connaître les orientations que, sur ce sujet d’importance, le Gouvernement a retenues. Veiller à une gouvernance plus adaptée des centres de recherche, veiller à leur autonomie alors même que la plupart sont hébergés dans les CHU, voilà qui est de nature à compléter le dispositif adopté par l’Assemblée nationale et, ainsi, à mieux assurer le rayonnement et la disponibilité de ces centres de recherche pour nourrir les ressources de biotechnologie, pour lesquelles la France s’est placée jusque-là en pointe.

application de la TVA à 5,5 % aux travaux d’entretien des bâtiments communaux

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, auteur de la question n° 573, transmise à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.

Mme Nicole Bonnefoy. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question concerne les difficultés rencontrées par les petites communes pour l’entretien de leurs bâtiments communaux : mairies, écoles, églises et autres bâtiments du patrimoine, classés ou non. Ce sujet important, que tous les élus connaissent, touche à la sécurité, mais aussi au maintien et à la valorisation du patrimoine national.

Chaque année, les collectivités engagent des chantiers équivalant à 73 % de l’investissement public ; chaque année, cette commande publique assure près de 50 % du chiffre d’affaires des entreprises de travaux publics, alors que l’État, à lui seul, n’en réalise que 6 %. Les collectivités ont d’ailleurs été largement sollicitées par l’État dans le cadre du plan de relance.

Pour autant, ces collectivités doivent faire face à des difficultés financières dont l’État a la responsabilité : transferts de charges partiellement compensés, plafonnement des recettes fiscales, diminution des dotations. La situation est aggravée par la crise économique actuelle, qui fait chuter les recettes les plus dynamiques. En particulier, celles qui sont liées aux droits de mutation accusent un repli considérable.

C’est ainsi que les collectivités, principalement les plus petites, se trouvent actuellement dans l’incapacité de financer les travaux d’entretien de différents bâtiments communaux. De plus, et c’est là l’objet de ma question, ces travaux sont considérés, dans le plan comptable des communes, comme des dépenses de fonctionnement et se voient appliquer une TVA de 19,6 %. Celle-ci ne peut donc pas être récupérée par les communes, seule étant récupérable la TVA sur les investissements.

Les conséquences d’une telle situation sont souvent les mêmes pour des milliers de communes : recherche de subventions publiques, qui sont rares, surtout pour les bâtiments non classés ; fermeture programmée des bâtiments publics, monuments, églises, pour des raisons de sécurité, alors qu’ils font partie de notre patrimoine national ; abandon ou démolition des édifices si les subventions ne sont pas trouvées.

Monsieur le ministre, pour éviter cette situation et aider les communes, il existe une mesure simple qui serait facile à mettre en œuvre : étendre l’application de la TVA réduite à 5,5 % aux travaux indispensables à l’entretien des bâtiments communaux ou, au minimum, des bâtiments du patrimoine tels les églises, les mairies, les bâtiments scolaires. Seul l’État risquerait de perdre quelques recettes si cette mesure rencontrait le même succès que la TVA réduite à 5,5 % pour les logements.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, je vous remercie de bien vouloir me préciser la position du Gouvernement sur la mise en œuvre d’une telle mesure, mesure qui serait de toute évidence très bien accueillie par les petites communes et qui permettrait non seulement d’entretenir et de mettre en sécurité notre patrimoine, mais aussi de soutenir l’activité et l’emploi des entreprises artisanales locales, qui, généralement, effectuent ces travaux.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Madame la sénatrice, vous souhaitez que le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée, aujourd’hui réservé aux travaux d’amélioration, de transformation, d’aménagement et d’entretien portant sur les locaux à usage d’habitation achevés depuis plus de deux ans, puisse être également appliqué aux travaux d’entretien des bâtiments publics réalisés par les communes, notamment les petites communes.

Si je comprends votre souhait de voir ces bâtiments mieux entretenus, je ne peux y répondre favorablement par le biais d’une baisse du taux de TVA applicable aux travaux qui porteraient sur ces bâtiments.

En effet, la TVA est aujourd’hui un impôt harmonisé au sein de l’Union européenne. À ce titre, les modifications qui lui sont appliquées résultent, notamment, de directives européennes que chaque État se doit de transposer. Ainsi, le taux réduit applicable aux travaux dans les logements privés de plus de deux ans est le fruit de la transposition de la directive communautaire du 22 octobre 1999.

Cette directive, qui représente l’aboutissement des négociations sur le champ d’application des taux réduits de TVA dans l’Union européenne, autorise de façon pérenne les États membres à appliquer un taux réduit de TVA aux services à forte intensité de main-d’œuvre, au nombre desquels figurent les travaux de réparation et de rénovation de logements privés.

Bien qu’au cours de ces négociations plusieurs États membres aient émis des demandes concernant l’entretien des bâtiments publics, ces dernières ont finalement été écartées. Par conséquent, l’application du taux réduit à l’ensemble des locaux appartenant aux collectivités territoriales, y compris aux bâtiments administratifs ou à caractère patrimonial, irait au-delà du cadre offert par le droit communautaire. L’application d’un taux réduit de TVA n’est donc pas, pour l’heure, envisageable.

Pour autant, madame la sénatrice, cela ne signifie pas que nous ayons l’intention d’en rester là et, d’une certaine façon, je partage votre sentiment : il s’agit assurément de l’un des moyens d’accompagner les petites communes, dont je connais bien la situation, notamment les communes rurales, celles qui, souvent, disposent des marges de manœuvre les plus faibles alors que leur patrimoine est important : église classée, bâtiment historique…

Je rappelle que bien souvent, au-delà de l’État lui-même, dont l’action passe par les dotations d’équipement, ce sont les grandes collectivités, conseils généraux et conseils régionaux, qui accompagnent les petites communes en pareil cas. Certains départements interviennent à hauteur de 60 %, voire de 70 % de taux de subvention, parce qu’ils sont sensibles à un patrimoine qu’ils considèrent aussi comme le leur.

C’est donc de la solidarité de tous qu’il s’agit. À cet égard, on constate sur notre territoire des disparités liées au volontarisme variable des collectivités départementales et régionales en faveur de ces petites communes : la péréquation aussi joue son rôle. Quoi qu’il en soit, toutes les petites communes ne sont pas abandonnées, livrées à elles-mêmes.

Vous avez également fait référence, madame la sénatrice, au plan de relance, qui, selon vos propres termes, aurait amené l’État à « solliciter » les communes. Vous savez cependant que le plan de relance repose sur le volontariat des communes et qu’il permet à celles qui y ont souscrit de disposer de crédits de l’État, en même temps qu’il leur offre la possibilité, si leur investissement correspond à la moyenne des investissements qu’elles ont réalisés dans les quatre dernières années, de récupérer en un an deux ans de TVA.

Cette année, pour faire face à la crise, nous avons donc accéléré l’aide accordée par l’État et les grandes collectivités aux petites communes.

Pour autant, madame la sénatrice, nous n’excluons pas de réfléchir, avec d’autres pays de l’Union européenne, à l’opportunité d’aller vers une baisse de la TVA sur les investissements de ce type.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

La mesure en question ayant été adoptée pour les restaurateurs, il me semble en effet tout à fait possible de réfléchir à la façon dont elle pourrait être appliquée aux petites communes, voire aux moins petites.

Vous avez par ailleurs évoqué la solidarité entre les collectivités en matière de financement des projets des communes, en particulier des plus petites. Or, voilà quelques jours de cela, au cours du débat sur l’organisation et l’évolution des collectivités territoriales, j’ai entendu ici même le Gouvernement exprimer sa volonté de mettre un terme aux financements croisés : cela ne va pas dans le sens des propos que vous venez de tenir !

difficultés des industries graphiques et papetières

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 580, adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Mme Marie-France Beaufils. Vous le savez, monsieur le ministre chargé de l’industrie, le Gouvernement a désigné la filière du papier et des industries graphiques parmi les huit filières prioritaires de notre industrie.

La filière papetière française joue un rôle déterminant dans le développement de la forêt et de la filière bois. Elle participe à l’aménagement du territoire et contribue, pour une part, à la protection de l’environnement. Elle doit donc être considérée comme un secteur stratégique pour notre industrie.

Quant à la filière graphique, elle est l’un des supports indispensables à la culture, à l’information et à la communication, contribuant ainsi au développement non seulement démocratique, mais également économique de notre pays.

Des délocalisations se poursuivent actuellement non seulement vers l’Asie, mais aussi à l’intérieur de l’Europe, y compris parfois avec des financements européens, ce qui montre le manque de cohérence en la matière. Aujourd'hui, les carnets de commande sont en baisse constante.

Pour soutenir ces secteurs, des aides publiques sont prévues au titre du soutien à l’activité industrielle. Mais ce serait une bonne décision si les salariés eux-mêmes n’étaient pas oubliés de ces plans !

Dans de nombreuses entreprises, notamment dans l’entreprise Mame située à Tours, l’emploi est en cause, alors que, malheureusement, la charge de travail par salarié augmente sans cesse. Il n’y a toujours pas d’accord signé sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, alors que la loi en fait une obligation. Cette opacité alimente bien évidemment l’inquiétude des salariés pour leur avenir.

Comme le proposent les salariés, des solutions immédiates sont possibles, en mettant en place un plan de formation sécurité-emploi, en poursuivant la modernisation de l’outil de production, avec l’impression numérique, en développant la recherche en partenariat avec l’université de Tours. Ces propositions sont à mettre en synergie avec un vaste plan de maintien et de développement industriel en Touraine et sur l’ensemble de notre territoire.

Votre intérêt pour cette filière ne se matérialise que par des mesures d’exonération, qui ont jusqu’à ce jour fait preuve de leur totale inefficacité, comme le reconnaît d’ailleurs la Cour des comptes.

En effet, des exonérations sociales, de taxes ou d’aides financières directes sont attribuées sans exiger des entreprises une quelconque contrepartie sur l’emploi des salariés concernés. Je souhaiterais que de tels critères soient inscrits clairement dans les textes. Soumettre les différentes aides à des exigences en matière d’investissement industriel, de recherche et d’innovation serait de nature à favoriser l’emploi, la qualification des personnels et le développement durable. Il y a nécessité d’insuffler de nouveaux choix de stratégies industrielles. Un moratoire sur tous les licenciements en cours et prévus serait, me semble-t-il, la première décision urgente à prendre.

Une charte est en cours de rédaction. Où en est-on ? Monsieur le ministre, quelles dispositions comptez-vous prendre pour enrayer le déclin des industries graphiques et papetières, qui ont été pendant longtemps l’un des fleurons de notre industrie ?

Le président de la Confédération française de l’industrie des papiers, cartons et celluloses estime, dans son rapport annuel 2008 intitulé « Rapport développement durable », que, « pour permettre à l’industrie papetière française de valoriser ses atouts et de retrouver les conditions de son développement, au-delà d’un plan de soutien à court terme indispensable à la survie des secteurs les plus exposés, une véritable réflexion doit être menée afin de définir une politique papetière industrielle nationale dans un contexte européen et mondial. Cette politique devrait réaffirmer la volonté des pouvoirs publics de maintenir en France notre industrie indispensable au développement de l’économie nationale. »

Je fais miennes ces conclusions et vous demande, monsieur le ministre, quelles mesures vous allez prendre pour sortir ces deux secteurs du marasme dans lequel ils se trouvent.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Madame la sénatrice, vous avez appelé l’attention de Christine Lagarde sur la situation des industries graphiques et des industries papetières, notamment sur l’avenir de l’entreprise Mame située dans votre département.

Comme vous le savez, le secteur des industries graphiques a connu une érosion constante des volumes d’activité, des baisses de chiffre d’affaires et des prix et, par conséquence, une réduction du nombre des entreprises et des emplois.

Néanmoins, l’introduction des technologies numériques a permis l’ouverture de nouveaux marchés offrant des perspectives intéressantes pour les professions de ces filières.

Les industries papetières étant fortement concentrées et largement organisées autour de grands groupes, une nouvelle géographie mondiale du papier semble s’esquisser, dont les répercussions sur l’emploi se font sentir.

Cependant, ce secteur utilise des techniques performantes en constante évolution, employant de fait un personnel très qualifié.

De plus, les contraintes environnementales et les économies d’énergie incitent ces entreprises à développer de nouveaux produits et procédés de fabrication.

C’est à partir de ce double constat que les partenaires sociaux concernés, ainsi que les pouvoirs publics, se sont engagés dans un processus d’accompagnement collectif des entreprises graphiques et papetières, permettant le développement industriel des emplois et des qualifications en leur sein. Ce projet se traduira par une charte nationale de coopération, dont la finalisation est proche.

Sans attendre cette charte, les services du ministère de l’industrie ont mis en place depuis plusieurs années un certain nombre d’actions concrètes pour soutenir la compétitivité des entreprises dans ce secteur. Ils ont notamment participé à la réalisation d’un recueil des attentes et des besoins des acheteurs, d’imprimés à l’accompagnement à l’exportation d’imprimerie et à la réalisation de fiches métier. D’autres actions sont d’ores et déjà programmées, tel un projet d’actions collectives nationales sur le thème du développement durable en faveur d’une quinzaine d’imprimeurs.

Madame la sénatrice, vous avez enfin attiré l’attention du Gouvernement sur la situation de l’imprimerie Mame, appartenant au groupe Laski comptant aujourd'hui 500 emplois salariés, localisée à Tours, et qui travaille sur le segment du livre et emploie 200 personnes.

Après avoir rencontré des difficultés dès 2006 à la suite de lourds investissements, cette entreprise avait obtenu plusieurs marchés, tels que la réalisation de livres religieux et d’ouvrages sur le thème du développement durable. Or elle connaît aujourd'hui, dans le contexte de la crise économique, une baisse de ses commandes de l’ordre de 20 %. Elle vient d’ouvrir un guichet pour favoriser le départ d’une vingtaine de ses salariés. Par ailleurs, l’entreprise Mame, de même qu’une autre entreprise du groupe Laski, Gibert Clarey Imprimeurs, devrait déménager d’ici à la fin 2010 à Joué-lès-Tours, avec le soutien financier de l’agglomération tourangelle, ce qui devrait lui permettre d’organiser sa production dans des locaux fonctionnels et adaptés.

Madame la sénatrice, soyez-en certaine, les services de mon ministère suivent cette entreprise sur le plan local et se montrent attentifs aux modalités de réduction des effectifs et, d’une manière plus générale, à l’évolution de l’emploi et des besoins en formation qui y sont importants du fait même de la nécessité de reconvertir les personnels dont les métiers vont changer.

Je puis enfin vous assurer que notre mobilisation en faveur du soutien et du développement des industries papetières et graphiques et de leurs emplois ne fléchit pas. Il s’agit d’un travail qui s’inscrit dans la durée et nécessite l’adhésion de tous autour d’une vision sectorielle partagée, afin de faciliter la concentration des moyens pour maintenir et développer l’emploi et les compétences dans les secteurs concernés, optimiser les investissements financiers et conforter le positionnement et le développement industriel des filières sur le plan régional, national et international.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le ministre, je suis bien évidemment informée de l’évolution du dossier, mais l’entreprise Mame a subi quelques aléas. C’est effectivement la communauté d’agglomération de Tours qui va racheter l’ensemble de l’unité actuelle de l’entreprise, afin de lui donner les moyens de se réinstaller dans de bonnes conditions.

Mon souci porte sur l’emploi des salariés. J’ai voulu, ce matin, relayer leur demande en termes de formation. En effet, des plans de formation seraient nécessaires pour leur redonner des perspectives d’avenir. Ainsi que vous l’avez souligné, monsieur le ministre, les qualifications nécessaires aux salariés de ces filières ont beaucoup changé. Or il n’y a absolument aucune prospective dans ce domaine.

Certes, une charte est en cours d’élaboration, mais, plus concrètement, ces salariés devraient pouvoir sortir de cette situation par le haut en suivant des formations leur permettant de s’adapter aux nouvelles évolutions technologiques. En effet, ils souhaitent rester dans cette filière, car ils y trouvent un intérêt certain. Il importe de leur ouvrir des perspectives d’avenir, de leur garantir une certaine sécurité en termes de formation et d’emploi, ce qui, parallèlement, assurerait aux entreprises concernées une production de qualité leur permettant d’obtenir des marchés importants, condition elle-même nécessaire pour assurer leur avenir.

Je vous remercie de vos éléments de réponse, monsieur le ministre, mais j’espère obtenir rapidement des données plus précises sur la date de conclusion et de signature de la charte.