M. Didier Guillaume. Le texte de la commission prévoit que les modulations de péage doivent rester sans effet sur le montant total des recettes de l’exploitant, mesure prévue par l’article L. 119-6 du code de la voirie routière.

Mais cette mesure n’est pas totalement compatible avec ce que nous souhaitons, à savoir que les tarifs des autoroutes soient modulés en fonction des dommages causés à l’environnement. Certes, cela signifie que certains paieront plus que d’autres ; mais, si le montant total des recettes des sociétés concessionnaires n’est pas aménageable, les marges de manœuvre dont nous disposons en matière de modulation seront largement réduites.

C’est pourquoi cet amendement vise à ce que les modulations de péage soient fixées par les exploitants sur proposition de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, de sorte qu’elles permettent une gestion coordonnée des trafics à une large échelle.

En 2005, lors de la privatisation des autoroutes, le ministre de l’économie de l’époque, M. Thierry Breton, avait assuré que ce serait l’État, et non les sociétés d’autoroute, qui fixerait les prix des péages. L’État semblait alors en mesure d’imposer ses vues en cas de désaccord avec une société concessionnaire.

Mais la réalité est tout autre. Selon le rapport de la Cour des comptes de 2008, l’État n’a pas pris la précaution d’adapter les formules tarifaires au nouveau statut privé de ces entreprises.

Concrètement, les prix des péages n’ont plus rien à voir avec les investissements qu’ils sont censés couvrir ! Il arrive même qu’un automobiliste ait intérêt à parcourir plus de kilomètres pour acquitter un tarif moins élevé !

Il est temps d’essayer de mieux réguler les choses. Un décret en Conseil d’État précisera les conditions dans lesquelles l’Agence de financement des infrastructures de transport de France formule ses propositions ; mais, dans le cas d’une modulation nationale des péages, il faut absolument que nous puissions en partie avoir la main, et le fait que les prix des péages soient fixés sur proposition de l’AFITF nous semble une avancée.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. On ne peut pas trop demander à l’AFITF. Nombreux sont ceux qui souhaitent lui donner des missions essentielles, comme l’aide à l’évaluation des grands projets d’infrastructures, ou qui proposent des mesures de simplification pour accélérer la réalisation des travaux d’infrastructures, en oubliant que l’Agence ne dispose que de trois postes à temps plein.

En outre, l’État, au travers de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, doit jouer pleinement son rôle en matière de contrôle de l’activité des sociétés concessionnaires d’autoroutes sans se défausser sur d’autres institutions. C’est le rôle de l’État d’y veiller !

Je rappelle que la commission, à la suite notamment du rapport de la Cour des comptes, a prévu à l’article 21 du texte qu’elle a adopté que le Gouvernement doit remettre au Parlement un rapport annuel sur l’évolution des péages autoroutiers.

Nous avançons donc dans le bon sens, et c’est pourquoi, mon cher collègue, je vous invite à retirer votre amendement. À défaut, la commission émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Guillaume, l'amendement n° 60 est-il maintenu ?

M. Didier Guillaume. J’ai bien entendu M. le rapporteur. Nous avons, me semble-t-il, une volonté commune, qu’il faut vraiment mener jusqu’au bout. Je retire donc mon amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 60 est retiré.

L'amendement n° 61, présenté par MM. Collomb, Teston, Ries, Repentin, Raoul, Guillaume et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le I du texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 119-6 du code de la voirie routière par une phrase ainsi rédigée :

Les modulations de péages font l'objet d'une concertation avec les collectivités territoriales compétentes en matière de voirie et de transport.

La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. Cet amendement se situe dans le droit-fil de l’amendement précédent. La modulation des péages pourra se traduire par des reports de trafic sur d’autres voiries, qu’il s’agisse des routes nationales ou départementales.

Cet amendement, déposé sur l’initiative de Gérard Collomb, vise donc à une meilleure concertation avec les collectivités territoriales compétentes en matière de voirie et de transport, pour la mise en place des mesures d’accompagnement. Personne ne doit être lésé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Mon cher collègue, on ne sait pas quelles collectivités territoriales sont concernées. S’agit-il de toutes celles qui sont traversées par l’autoroute – la concertation serait alors très difficile à gérer ! –, des établissements publics de coopération intercommunale ou des départements ?

Si je prends l’exemple de la société ASF, ou Autoroutes du Sud de la France, qui gère 3 000 kilomètres d’autoroutes, il faudrait engager une concertation avec six régions, quarante départements et, bien sûr, plusieurs centaines de communes !

Par ailleurs, je rappelle que M. le ministre d’État s’est engagé auprès de la Cour des comptes à mettre en place un organisme consultatif comprenant des représentants des usagers des autoroutes pour s’exprimer, entre autres, sur la fixation des tarifs. Le décret d’application a été pris en août dernier pour satisfaire cette demande.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Il est mis en place !

M. Louis Nègre, rapporteur. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Guillaume, l’amendement est-il maintenu ?

M. Didier Guillaume. Oui, madame la présidente, et ce pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, les reports de trafic justifient cette disposition.

Ensuite, je maintiens cet amendement par homothétie des formes.

Lorsque notre collègue Claude Lise a présenté tout à l'heure l’amendement n° 683, M. le président de la commission et M. le secrétaire d’État s’en sont remis à la sagesse de la Haute Assemblée, qui l’a d’ailleurs adopté, au motif qu’il fallait engager une concertation. L’argumentation était fondée sur le fait que l’on ne pouvait pas prendre une telle décision car l’une des collectivités concernées n’était pas forcément en phase avec les autres. Or l’argument inverse nous est maintenant opposé !

Il ne s’agit pas ici, monsieur le rapporteur, de demander l’avis de chaque village traversé par une autoroute ! Il s’agit d’engager une concertation avec les gestionnaires des principaux réseaux de voiries que sont notamment les départements. En effet, les reports de trafic se feront surtout sur les routes nationales et les itinéraires bis empruntant des voies départementales.

C'est la raison pour laquelle nous maintenons cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 61.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 493 rectifié est présenté par Mme Laborde et MM. Tropeano, Vall et Milhau.

L'amendement n° 602 est présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger comme suit le début de la première phrase du II du texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 119-6 du code de la voirie routière :

Au plus tard le 31 décembre 2011, les péages...

L’amendement n° 493 rectifié n'est pas soutenu.

La parole est à M. Jacques Muller, pour présenter l’amendement n° 602.

M. Jacques Muller. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

Pour des raisons de cohérence et de lisibilité, il nous semble souhaitable de fixer une date commune pour la mise en œuvre de l’écotaxe et la modulation des péages.

En effet, l’écotaxe kilométrique s’appliquera à partir de 2011. Or, l’article 21 prévoit la modulation des nouveaux péages au plus tard le 1er janvier 2010, alors que le renouvellement des contrats de délégation de service public est prévu en 2018-2019.

C’est pourquoi nous demandons que tous les péages soient modulés à partir du 31 décembre 2011.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. L’article 21 du projet de loi transpose fidèlement le point 10 de l’article 1er de la directive du 17 mai 2006, qui indique très clairement que les États membres sont tenus de faire varier les taux de péage pour les poids lourds pour 2010 au plus tard ou, pour les contrats de concession en cours, lors de leur renouvellement. Il faut donc maintenir la date du 1er janvier 2010.

Dans ces conditions, mon cher collègue, la commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Muller, l'amendement n° 602 est-il maintenu ?

M. Jacques Muller. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 602 est retiré.

L'amendement n° 62, présenté par MM. Guillaume, Teston, Ries, Repentin, Raoul et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter la première phrase du II du texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 119-6 du code de la voirie routière par les mots :

, ainsi que du degré de dommages qu'il occasionne aux routes au sens de l'annexe IV de la directive

La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. La modulation des péages est susceptible d’avoir des conséquences sur d’autres voiries, qui peuvent se retrouver endommagées en raison des reports de trafic. Face à la recrudescence des travaux d’entretien à venir, il convient de prévoir les moyens financiers nécessaires. Des routes bien entretenues sont garantes de la sécurité de nos concitoyens.

En outre, cet amendement nous permettrait de nous mettre en conformité avec Bruxelles, en remplaçant la directive de 1999 par celle de 2006, plus adaptée à nos structures.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. La direction générale des infrastructures, des transports et de la mer s’inspire déjà de l’esprit des annexes III et IV, qui ne sont d’ailleurs qu’indicatives, pour conclure des contrats avec des sociétés concessionnaires d’autoroutes ou les renouveler.

En conséquence, mon cher collègue, la commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 62.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 63, présenté par MM. Guillaume, Teston, Ries, Repentin, Raoul et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après la première phrase du IV du texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 119-6 du code de la voirie routière, insérer une phrase ainsi rédigée :

Ils peuvent également être modulés à la hausse dans les zones de montagne et les espaces écologiques sensibles.

La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Tout d’abord, l’expression « modulation à la hausse » est source d’ambiguïté. Je vous rappelle, mes chers collègues, que toute modulation se fait à enveloppe constante. Il faudrait donc imaginer un péage moins élevé pour les poids lourds dans d’autres zones géographiques, ce qui aurait alors pour effet d’attirer ces camions dans ces dernières.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Absolument !

M. Louis Nègre, rapporteur. Ensuite, ce type de modulation n’est pas imposé par le droit communautaire. Il s’agit d’une simple faculté laissée à l’appréciation des États membres, comme l’indique le paragraphe 11 de l’article 7 de la directive Eurovignette.

Par ailleurs, cette possibilité étant extrêmement encadrée, il serait très difficile de mettre en œuvre une telle disposition qui ne peut être instituée que pour des projets très précis. Le projet de tunnel Lyon-Turin pourrait justifier l’application de cette disposition, mais on ne pourra pas le savoir avant 2012.

Par souci de simplicité, il convient, dans un premier temps, de se contenter de la taxe poids lourds. Si cette dernière ne s’applique pas, il est vrai, sur les autoroutes concédées, elle marque déjà un grand pas en avant dans la régulation du trafic de poids lourds.

En conséquence, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Guillaume, l'amendement n° 63 est-il maintenu ?

M. Didier Guillaume. Nous sommes sensibles à l’argumentation développée par M. le rapporteur. C’est pourquoi je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 63 est retiré.

L'amendement n° 64, présenté par MM. Teston, Ries, Repentin, Raoul, Guillaume et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 119-6 du code de la voirie routière par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Le produit des péages constituera une ressource de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France affectée en direction des modes les plus respectueux de l'environnement.

La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Cet amendement a pour objet de « coller » au mieux à la directive 2006/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2006 modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures, dont quelques dispositions ont été passées sous silence jusqu’à maintenant.

Je rappelle d’abord que nous avons toujours été favorables à l’instauration d’une taxe kilométrique, conformément à la directive-cadre. Toutefois, nous estimons – et nous l’avons déjà souligné lors des débats relatifs au Grenelle I – que les recettes de cette taxe doivent servir à alimenter le budget de l’AFITF pour financer les infrastructures alternatives à la route. Comment espérer financer les autoroutes ferroviaires promises dans le énième plan de mobilisation pour la relance du fret si ces recettes ne lui sont pas affectées ?

En effet, dans le schéma retenu par le Gouvernement, les ressources potentiellement dégagées par les recettes des péages risquent d’être inscrites au bilan des sociétés concessionnaires d’autoroutes !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Les auteurs de cet amendement ont sans doute commis une erreur de rédaction, car je ne suis pas bien certain de comprendre leur intention.

En effet, il est impossible d’attribuer le produit des péages à l’AFITF, car cela entraînerait automatiquement la faillite des sociétés concessionnaires d’autoroutes !

Par ailleurs, il est également impossible de flécher vers l’AFITF uniquement le surplus des recettes nées de la modulation, car la directive de 2006 et le projet de loi indiquent très clairement que la modulation se fait à enveloppe constante.

En conséquence, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Teston, l'amendement n° 64 est-il maintenu ?

M. Michel Teston. J’ai bien entendu les arguments de M. le rapporteur. Néanmoins, il nous paraît important que le Sénat se prononce sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 64.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 446, présenté par Mmes Schurch, Didier et Terrade, MM. Danglot, Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 119-6 du code de la voirie routière par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Dans des cas exceptionnels d'infrastructures situées dans des zones de montagne définies aux articles 3 et 4 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, une majoration est appliquée aux péages au sens de l'article 7 de la directive 1999/62/CE modifiée du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 1999 relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures.

La parole est à Mme Mireille Schurch.

Mme Mireille Schurch. L’engagement n° 45 du Grenelle prévoit d’augmenter, et non plus de moduler, le péage en fonction des spécificités du lieu où se trouve le tronçon routier. Certains tronçons routiers connaissent de graves problèmes : une congestion entravant la libre circulation des véhicules ou causant d’importants dommages environnementaux.

Nous demandons l’application des majorations de péage dans ces zones sensibles, et plus précisément dans les zones de montagne. La majoration prévue par la directive Eurovignette est encadrée. La directive autorise la majoration de péage dans des cas exceptionnels d’infrastructures situées en zone montagneuse afin de financer des projets prioritaires du réseau transeuropéen de transport. Ce « sur-péage » ne doit pas dépasser 15 % du tarif de base, mais peut atteindre 25 % si les recettes générées sont investies dans des sections transfrontalières des projets prioritaires sur le plan européen.

Dans le cas de projets transfrontaliers, l’application de la majoration est soumise à l’accord des États membres concernés. Sa création fait l’objet d’un accord de la Commission européenne, qui tient compte des répercussions négatives sur le développement économique de régions périphériques. La Commission peut alors rejeter les plans de tarification soumis par l’État membre concerné ou exiger la modification de ceux-ci, s’ils ne répondent pas aux critères retenus, notamment celui du développement économique.

Avec cet amendement, nous souhaitons apporter une protection particulière aux zones de montagne et garantir par là même leur développement économique.

Mme la présidente. Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 494 est présenté par Mme Laborde.

L'amendement n° 603 est présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L'amendement n° 827 est présenté par Mme Keller, MM. Le Grand, Grignon et Richert et Mme Sittler.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Compléter le texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 119-6 du code de la voirie routière par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Au plus tard le 1er janvier 2010, dans des cas exceptionnels d'infrastructures situées dans des zones de montagne définies aux articles 3 et 4 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985, une majoration est appliquée aux péages, au sens de l'article 7 de la directive 1999/62/CE modifiée du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 1999 relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures. »

L’amendement n° 494 n'est pas soutenu.

La parole est à M. Jacques Muller, pour présenter l'amendement n° 603.

M. Jacques Muller. Nous discutons de la majoration des péages en zone de montagne, tels que définis dans les articles 3 et 4 de la loi du 9 janvier 1985.

Il s’agit d’utiliser au mieux ce que nous permet de faire aujourd'hui la directive 1999/62/CE, c'est-à-dire augmenter les péages dans ces zones, et ce pour plusieurs raisons.

La première raison est d’ordre environnemental. Je ne la développerai pas, car il est évident que, dans les vallées encaissées, la pollution devient un problème de santé publique.

La deuxième raison est d’ordre social. Le cadre de vie se dégrade, et les conditions de vie deviennent infernales pour les habitants ; je peux en témoigner, car tel est le cas dans certaines vallées vosgiennes.

Enfin, la troisième raison est d’ordre économique. En effet, dans les vallées de montagne, le développement économique passe par la valorisation du milieu naturel, des paysages, du cadre de vie, que ces « couloirs à camions » détruisent.

Voilà pourquoi je vous propose de retenir cet amendement. Cette disposition nous permettra d’éviter la surexposition des vallées de montagne, d’augmenter sur ces secteurs-là le coût relatif de la route par rapport au rail et, enfin, de créer des recettes supplémentaires.

Nous sommes pleinement dans la logique du Grenelle, qui fait la synthèse entre l’environnement, le social et l’économique.

Mme la présidente. La parole est à Mme Fabienne Keller, pour présenter l'amendement n° 827.

Mme Fabienne Keller. Je reprendrai les arguments de Mme Mireille Schurch et de M. Jacques Muller pour présenter cet amendement, qui vise à transposer de manière plus volontariste la directive Eurovignette en instaurant des majorations de péage en zones sensibles.

Je rappelle que le terme « péage » s’entend ici, au sens de la directive de 1999, comme péage autoroutier et comme écoredevance ou, autrement dit, taxe poids lourds.

Il s’agit de favoriser les modes de transport alternatifs, et cette majoration, réservée à des sites particulièrement sensibles, vise à soutenir clairement le rail, notamment en zone de montagne.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Je ne serai pas disert, car l’argumentaire est quasiment le même que pour l’amendement n° 63. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la commission est défavorable à ces amendements.

Pour autant, monsieur le ministre, les interventions de nos collègues traduisent un réel souci. Il serait par conséquent opportun que vous puissiez nous apporter quelques explications supplémentaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Il est vrai que ces amendements posent un vrai problème.

Je rappelle que la France se bat au sein des instances européennes pour faire adopter la future directive, et ce depuis le début de la présidence française de l’Union.

La fin du grand débat électoral en République fédérale d’Allemagne va nous aider, au cours des semaines à venir, à débloquer une situation qui tenait sans doute à des considérations internes à différents pays, dont celui-là. Par conséquent, j’espère que nous avancerons plus rapidement sur la voie de l’adoption de cette nouvelle directive.

La directive Eurovignette prévoit la possibilité de mettre en place un surpéage dans les zones de montagne, à condition que son produit serve au financement de projets prioritaires d’intérêt européen.

En droit français, ce surpéage s’assimile à une taxe dont l’instauration suppose, conformément à l’article 34 de la Constitution, une définition précise par la loi, en l’occurrence la loi de finances. Votre amendement est donc juridiquement incorrect.

Le Gouvernement ne remet toutefois pas en cause l’utilité du surpéage dans certains cas. Je citerai l’exemple de la Suisse et des extraordinaires ouvrages qui sont en construction pour passer sous le Saint-Gothard, puis en amont et en aval de celui-ci, au nord et au sud.

Dans le cas particulier de la France, la possibilité de recours au surpéage a été évoquée à l’occasion du projet Lyon-Turin. Mais les modalités de sa mise en œuvre nécessitent un accord de la partie italienne qui n’a pas été finalisé à ce jour.

De plus, les pays de l’arc alpin réunis au sein du groupe de Zurich ont souhaité que ces mesures, qui ont une incidence sur les circulations dans le massif – un jour, la zone pyrénéenne sera peut-être aussi concernée –, fassent préalablement l’objet d’une concertation.

En attendant, si le Gouvernement est d’accord sur le principe, il est défavorable à ces amendements, car il est nécessaire de progresser avec la partie italienne. Le moment venu, la mesure sera prise par le biais d’un amendement gouvernemental à la loi de finances.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote sur l'amendement n° 446.

M. Jacques Muller. M. le rapporteur nous a expliqué que les argumentaires des trois amendements étaient quasiment les mêmes que celui de l’amendement n° 63. Or, son avis défavorable sur l’amendement n° 63 reposait sur le fait que l’expression « modulation à la hausse » était source d’ambiguïté. Dans le cas présent, il s’agit non d’une modulation, mais bien d’une majoration des péages !

M. le rapporteur avait également précisé, dans son avis sur l’amendement n° 63, qu’il s’agissait d’une simple faculté laissée à l’appréciation des États membres. Si tel est le cas, monsieur le rapporteur, saisissons-la !

Mme la présidente. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.

Mme Mireille Schurch. Puisque le Gouvernement est parfois prompt à appliquer les directives européennes, c’est le moment d’être volontariste et d’appliquer sans plus attendre certaines d’entre elles !

Nous sommes au cœur du sujet, puisque nous voulons vraiment un report modal afin d’éviter que ces zones de montagne ne soient toujours aussi pénalisées.

Par conséquent, affichons notre volonté à l’occasion de l’examen de ce projet de loi. Nous examinerons ensuite les applications concrètes. Le moment est en effet venu d’agir, et j’invite donc la Haute Assemblée à adopter ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 446.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 603 et 827.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 447, présenté par Mmes Schurch, Didier et Terrade, MM. Danglot, Le Cam et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 119-6 du code de la voirie routière par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Des droits régulateurs destinés spécifiquement à combattre soit la congestion du trafic liée à une période de la journée et à un lieu précis, soit les impacts environnementaux, notamment la dégradation de la qualité de l'air, sont perçus au sens de l'article 9 de la directive 1999/62/CE modifiée du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 1999 relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures.

La parole est à Mme Mireille Schurch.

Mme Mireille Schurch. Cet amendement vise à percevoir des recettes supplémentaires qui ne soient pas seulement liées au recouvrement des coûts d’infrastructures et qui permettent d’investir dans des projets contribuant à atténuer la congestion et les dommages environnementaux.

En effet, la directive Eurovignette prévoit les péages perçus au sens de l’article 7, paragraphes 9 et 10, et soumis au principe du « produit constant », les majorations de péages pour les zones sensibles et la perception de droits régulateurs au titre de l’article 9.

Le présent projet de loi transpose la modulation des péages en fonction des normes Euro, du moment de la journée, de la date et du jour de la semaine. Par conséquent, l’augmentation du tarif de péage pour certains usagers est compensée par un abaissement proportionnel pour d’autres catégories. Les recettes sont alors constantes, c’est-à-dire qu’elles prennent en compte le seul principe de recouvrement des coûts de construction, coûts d’infrastructures et de financement notamment.

Avec les droits régulateurs prévus pour prendre en compte « la congestion » et/ou « d’importants dommages environnementaux », il s’agit de percevoir des recettes supplémentaires, permettant un levier d’action complémentaire à la modulation des péages. Ces droits régulateurs permettent alors, selon les dispositions de l’article 9 de la directive, d’investir « dans des projets prioritaires d’intérêt européen [...] qui contribuent directement à atténuer la congestion ou les dommages environnementaux ».

C’est pour ce levier d’action complémentaire en faveur de l’environnement que nous vous demandons de voter cet amendement.