M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin.

Mme Maryvonne Blondin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, je m’exprimerai au nom de ma collègue Claire-Lise Campion, dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence.

C’est en période de crise, comme celle que nous traversons aujourd’hui, que la solidarité doit trouver toute sa signification.

Force est de constater, malheureusement, que les écarts entre les Français se creusent et que le nombre de nos concitoyens en situation d’exclusion ne cesse de progresser.

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », dont nous débattons ce soir, affiche certes un effort, au titre du RSA, mais essentiellement pour des mesures tournées vers l’emploi. Hélas, les crédits alloués au titre des programmes « Actions en faveur des familles vulnérables », « Égalité entre les hommes et les femmes » et « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales », auxquels je consacrerai mon intervention, ne connaissent pas, loin s’en faut, la même progression !

Une lecture plus approfondie de ce budget met en évidence le peu d’ambition du Gouvernement et son désengagement face à l’ampleur des enjeux.

Ainsi, alors que la Convention internationale des droits de l’enfant vient de fêter ses vingt ans, le programme qui regroupe les moyens de fonctionnement des administrations sanitaires et sociales permet d’identifier les faibles moyens dévolus au Défenseur des enfants : 3,18 millions d’euros. La raison en est certainement sa suppression programmée par le Gouvernement, et contre laquelle une très forte mobilisation s’est manifestée, et se manifeste encore aujourd’hui.

Ce nouveau « dérapage » ne va pas dans le sens d’une amélioration des droits de l’enfant. Quelle sera la visibilité de la mission d’un « adjoint » au Défenseur des droits ? Comment les modes d’intervention spécifiques pourront-ils être préservés ? Alors que cette institution, de par son indépendance, avait trouvé toute sa légitimité et sa crédibilité auprès des jeunes – plus de 20 000 requêtes ont été traitées depuis l’an 2000 ! –, vous anéantissez la confiance et le dialogue qui s’étaient instaurés.

La France a déjà été pointée du doigt, en mai 2009, par l’ONU, qui s’est inquiétée d’une régression en matière de droits des enfants, dans notre pays, au cours des dernières années : emprisonnement d’enfants de moins de treize ans, maintien d’enfants dans des centres de rétention, interdiction non effective des châtiments corporels.

Le bilan est donc peu glorieux pour un pays qui ne manque jamais de rappeler qu’il est la patrie des droits de l’homme.

La suppression de cette institution participe de la politique générale du Gouvernement à l’égard de la protection de l’enfance.

D’un côté, les conseils généraux sont reconnus par la loi de mars 2007 comme les chefs de file de la protection de l’enfance et sont incités par l’État à faire toujours plus. De l’autre, les récents projets gouvernementaux relatifs à la réforme des collectivités territoriales tendent à les asphyxier financièrement, en limitant drastiquement leur capacité à lever l’impôt ou en dérogeant aux engagements de l’État.

Nous avons évoqué l’insuffisance des crédits pour le Fonds national de financement de la protection de l’enfance. Le Premier ministre s’est expliqué sur ce désengagement : le Gouvernement voulait privilégier le financement des maisons départementales des personnes handicapées. En réalité, le désengagement de l’État auprès des MDPH est tout aussi réel. Comme l’a rappelé Annie Jarraud-Vergnolle, l’État leur doit 34,3 millions d’euros. Paul Blanc nous proposera d’y remédier en redéployant des crédits destinés au RSA : on déshabille Pierre pour habiller Paul ! Avouez que ce procédé n’a rien de satisfaisant !

Ce décalage entre les discours et la réalité est tout aussi sensible à la lecture du programme 106 « Actions en faveur des familles vulnérables », qui est consacré notamment au conseil conjugal et familial, à la médiation familiale, au soutien à la parentalité et au financement des maisons d’adolescents.

Ainsi, les crédits déconcentrés d’accompagnement des familles sont en diminution de 6,5 % et passent de 25 millions d’euros en 2007 à 12,6 millions d’euros pour 2010, alors que, dans ce domaine, la prévention auprès des familles est essentielle.

En 2009, une enveloppe de 2,5 millions d’euros était affectée à la création de 19 maisons des adolescents. Or le budget 2010 prévoit la réalisation de 25 nouvelles maisons, pour une enveloppe de 2 millions d’euros ! Quelle logique !

Enfin, comme l’a rappelé Mme Pasquet, on éprouve la même déconvenue s’agissant des réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents, les REAAP.

Le programme 137 « Égalité entre les hommes et les femmes » progresse de 1,3 % pour atteindre 29,5 millions d’euros. Il demeure cependant le programme le plus modeste de cette mission, alors qu’il concerne la moitié de notre société.

Cette augmentation est, au demeurant, largement insuffisante au regard des préconisations de la mission d’évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes. Par ailleurs, je ne vois pas comment elle permettra d’atteindre les objectifs annoncés récemment par le Gouvernement, à grands renforts d’annonces médiatiques.

Je ne reviendrai pas sur les nombreux points déjà évoqués par mes collègues. Contrairement à leur réputation, les femmes n’aiment pas répéter des propos qui ont déjà été tenus et qu’elles approuvent ! (Sourires.)

Je souhaite vous faire part de quelques réflexions personnelles.

Je regrette que le Gouvernement ne manifeste pas l’empressement dont il est coutumier pour prendre des mesures efficaces contre les entreprises qui pratiquent l’inégalité salariale, l’inégalité à l’embauche et l’inégalité en termes de promotion et de responsabilité professionnelle.

Je suis révoltée par l’attaque sournoise et anticonstitutionnelle du Gouvernement contre la parité dans les fonctions électives. Le mode d’élection des futurs conseillers territoriaux est, à cet égard, inacceptable. J’en appelle à vous toutes, mesdames, pour réagir très vivement auprès de vos groupes politiques respectifs !

Le Gouvernement annonce des modifications législatives dans le domaine de l’égalité entre les hommes et les femmes. Encore faut-il prévoir les moyens permettant de mettre en œuvre ces dispositions ! Au vu du montant des crédits consacrés à l’action 4, relative à l’articulation des temps de vie entre vie professionnelle et vie familiale – 160 000 euros !  –, on peut en douter !

Il est donc légitime de s’interroger, et de s’inquiéter de la réelle volonté du Gouvernement en la matière ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, malgré la crise, malgré le contexte économique difficile – Mme Henneron l’a rappelé –, malgré les contraintes budgétaires auxquelles nous sommes soumis, le projet de loi de finances que nous vous présentons montre que la France demeure fidèle à ses valeurs de solidarité et de générosité envers les plus fragiles d’entre nous.

Qu’il s’agisse de la politique familiale de notre pays ou de notre action envers les personnes handicapées, ou encore de notre ambition de promouvoir l’égalité, j’ai l’honneur d’avoir la charge d’un ministère qui témoigne jour après jour de l’engagement de l’ensemble du Gouvernement à protéger les plus faibles et à préparer la France de demain.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je répondrai tout d’abord aux observations que certains d’entre vous ont formulées sur le programme 157 « Handicap et dépendance », qui marque la volonté du Gouvernement d’accompagner les promesses du Président de la République et de garantir à tous nos concitoyens des réponses leur permettant de vivre dans la dignité.

Le budget consacré aux personnes handicapées, en hausse de 5,6 % par rapport à l’an dernier, s’élève à 9,1 milliards d’euros, alors que l’effort global fourni à leur égard s’établit à 39 milliards d'euros.

Pour ce qui concerne l’AAH, l’allocation aux adultes handicapés, les crédits inscrits s’élèvent à 6,5 milliards d'euros, soit une augmentation de 6,5 % par rapport à 2009.

Le Président de la République avait annoncé que l’AAH serait revalorisée tous les ans à partir de 2008 pour atteindre 25 % d’augmentation en 2012, ce qui représente un effort inédit et exceptionnel de 1,4 milliard d’euros sur l’ensemble de la période. Le présent projet de loi de finances consacre une nouvelle fois cette promesse : l’AAH sera augmentée de 4,4 % l’année prochaine, après l’avoir été de 9,7 % depuis 2008.

La commission des finances comme la commission des affaires sociales ont souligné que les prévisions du Gouvernement relatives aux dépenses consacrées à l’AAH étaient trop optimistes. Elles tiennent compte de l’évolution de l’emploi, des prévisions de croissance et des réformes que nous mettrons en œuvre en 2010. Concernant les dépenses engagées en 2009 au titre de l’AAH et de l’API supérieures aux prévisions, le projet de loi de finances rectificative pour 2009 en tient compte, afin d’éviter un alourdissement de la charge financière nette supportée par la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF.

Nous travaillons en effet à la concrétisation des promesses du Président de la République : le groupe d’experts missionné au sujet de l’employabilité des demandeurs d’AAH a, vous le savez, demandé une semaine supplémentaire pour mettre en forme son rapport. Je les recevrai dès la semaine prochaine, le 9 décembre exactement. Nous travaillons avec la CNAF et les services concernés pour mettre en œuvre la « trimestrialisation » et la simplification des modalités de cumul entre l’AAH et les revenus d’activité le plus tôt possible en 2010.

Aider les personnes handicapées à être pleinement des citoyens, c’est aussi leur offrir la possibilité d’intégrer une structure médicosociale d’aide par le travail.

Là encore, c’est l’engagement du Président de la République que nous mettons en œuvre. Madame Pasquet, 1 400 places en établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, seront créées l’année prochaine et nous assurerons le financement des 117 400 places créées à ce jour. Le budget de l’État finance également l’aide au poste pour garantir la rémunération des travailleurs en ESAT. Les crédits de cette action s’élèvent à 2,5 milliards d’euros – 1,4 milliard d’euros pour le financement des places d’ESAT et 1,1 milliard d’euros pour l’aide au poste – et sont en augmentation de 2 % par rapport à l’an dernier.

Pour ce qui concerne l’accès aux droits, le Gouvernement souhaite garantir aux maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, tous les moyens de fonctionnement qu’il apporte en qualité de membre du groupement d’intérêt public.

Ce sont d’abord des moyens financiers : le Gouvernement reconduit la dotation de 14 millions d’euros que l’État apporte chaque année. Le programme 157 prévoit 7,1 millions d’euros nécessaires à la compensation des postes de l’État qui n’ont pu être mis à disposition. Cela représente, madame Escoffier, une augmentation de 54 % de ces crédits.

Je rappelle, madame Jarraud-Vergnolle, qu’en 2009 nous avons délégué aux départements 16,8 millions d’euros pour assurer la compensation des postes vacants en MDPH.

Mme Maryvonne Blondin. Ce n’est pas suffisant !

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. Ces crédits se sont ajoutés aux crédits de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA : 45 millions d’euros de dotation pérenne de fonctionnement et 15 millions d’euros supplémentaires versés en 2009 en compensation des missions nouvelles des MDPH, sur l’AAH et la prestation de compensation pour les enfants.

Je vous confirme, messieurs Cazalet et Paul Blanc, que nous travaillons dans deux directions complémentaires : établir des règles de compensation pour 2010 claires, complètes et comprises de tous, et réaliser un état des lieux des engagements qui n’auraient pas été tenus par l’État vis-à-vis des conseils généraux pour le fonctionnement des MDPH. C’est dans ce sens que nous avons demandé qu’une mission d’appui associant l’Inspection générale des affaires sociales, l’Inspection générale de l’administration et l’Inspection générale de l’éducation nationale établisse un diagnostic partagé sur cette question.

Nous travaillons à l’élaboration d’une solution qui permette à l’avenir de garantir les moyens de l’État dans les MDPH et qui préserve la gouvernance locale de cette politique qui, je le rappelle, associe étroitement l’État, les conseils généraux, les caisses de sécurité sociale et les associations représentant les usagers.

Mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous ont abordé les orientations pour l’année 2010 du programme 137, qui a pour objet de faire coïncider l’égalité de droits, désormais acquise en France, avec l’égalité réelle. Avec des crédits s’élevant à 29,5 millions d’euros en 2010, en hausse de plus de 382 000 d’euros, ce programme permet de mettre en œuvre les politiques nécessaires à la reconnaissance des droits des femmes.

En matière d’égalité professionnelle, conformément aux engagements du chef de l’État, une discussion avec les partenaires sociaux membres de la Commission nationale de la négociation collective a été engagée sur la base d’un document d’orientation définissant les points que le Gouvernement souhaite voir traités en matière d’égalité professionnelle. Ces partenaires doivent remettre leurs conclusions prochainement.

La lutte contre les stéréotypes sera également poursuivie en renforçant les actions, en partenariat avec l’éducation nationale, pour responsabiliser les élèves au respect mutuel entre les sexes qui s’apprend dès le plus jeune âge. Cette problématique sera développée dans le cadre de la commission « Image de la femme dans les médias », afin de lutter contre les stéréotypes générés par les médias, notamment. Je sais, madame Printz, que cette problématique vous tient particulièrement à cœur, comme à Mme Dini et à l’ensemble des sénateurs présents ce soir.

Le volet concernant l’égalité en droit et en dignité porte prioritairement sur la mise en œuvre du second plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes.

À l’occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, le 25 novembre dernier, j’ai annoncé de nouvelles orientations du plan qui portent à la fois sur la protection des femmes victimes de violences, l’amélioration de la prévention de la récidive, une meilleure prise en charge des victimes et la poursuite de la sensibilisation de l’opinion publique. Le Premier ministre a désigné la lutte contre les violences faites aux femmes grande cause nationale 2010. Au cours de cette même année sera expérimenté le placement sous bracelet électronique, mesure qui, en matière de protection des femmes, donne des résultats extrêmement probants en Espagne.

Comme vous le soulignez, messieurs Cazalet et de Montgolfier, le Parlement a pu disposer cette année du document de politique transversale « Politique de l’égalité entre les hommes et les femmes » qui comprend vingt-cinq programmes. Ce document, perfectible, permet de mesurer l’action interministérielle en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes et vise, à terme, à améliorer le pilotage de cette politique.

Comme vous le soulignez, monsieur Paul Blanc, concernant les faibles montants des crédits des différentes actions du programme, il me semble effectivement pertinent de regrouper les actions, notamment celle qui a trait à l’égalité professionnelle et celle qui est relative à l’articulation des temps de vie.

Enfin, j’ai conscience que, actuellement, le programme se subdivise en un nombre sans doute excessif d’unités opérationnelles ; les 62 unités nuisent à sa transparence et à son efficacité. Je m’engage donc à lancer une concertation pour restructurer ce programme dès 2010.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je répondrai enfin à vos questions relatives au programme 106 « Actions en faveur des familles vulnérables », qui démontre à l’évidence le fort soutien que l’État apporte aux familles les plus fragiles. Ainsi, 14,6 millions d’euros sont consacrés à l’accompagnement des familles dans leur rôle de parents.

Je sais, madame la présidente Dini, votre attachement à l’aide à la parentalité. Je considère moi aussi que les actions en faveur des parents qui rencontrent des difficultés sont déterminantes. Ce sont de véritables actions de prévention qui permettent d’étayer la fonction parentale. J’ai, par ailleurs, obtenu, dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion que l’État a signé avec la CNAF pour 2009-2012, une augmentation des crédits de 15,5 %, soit 23 millions d'euros supplémentaires sur la période. Autrement dit, le budget passe de 30 millions d'euros à 53 millions d'euros, ce qui permet de réaliser plus de 6 000 actions. J’ajoute que le Premier ministre a décidé de créer le comité national de soutien à la parentalité. Je mettrai en œuvre cette structure, qui aura une déclinaison départementale, avec les caisses d’allocations familiales et les associations familiales, afin de démultiplier l’ensemble des actions d’aide à la parentalité. À travers ces mesures, je crois avoir ainsi répondu à vos interrogations sur ce sujet, mesdames, messieurs les sénateurs.

Je voudrais également évoquer les maisons des adolescents, créées afin d’offrir dans un lieu unique un ensemble de services aux adolescents et à leur famille, en fonction de leurs besoins, notamment en matière d’offre thérapeutique et d’aide au développement d’un projet de vie. À ce jour, 76 projets de maisons des adolescents ont été financés.

Par ailleurs, 164,2 millions d’euros sont destinés au soutien des familles monoparentales. J’attire votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur ce chiffre, qui mérite une précision importante. Je vous rappelle – Martin Hirsch fera sans doute de même – que l’allocation de parent isolé, l’API, a été intégrée dans le revenu de solidarité active, le RSA, généralisé au 1er juin 2009. L’API a donc été supprimée en tant que prestation distincte, ce qui explique la baisse des crédits inscrits sur cette action par comparaison à 2009.

Je précise également que les crédits inscrits en 2010 au titre de l’API couvrent les dépenses liées aux dispositions transitoires de la loi du 1er décembre 2008 généralisant le RSA : cela concerne le maintien de la législation sur l’API dans les départements d’outre mer, des primes forfaitaires aux bénéficiaires de l’API éligibles au mois de mai 2009, du RSA « expérimental » qui a été tenté dans une trentaine de départements, et des contrats aidés dont bénéficiaient les allocataires de l’API au mois de mai 2009 jusqu’à leur date d’expiration.

Enfin, 228,8 millions d’euros sont consacrés à la protection de l’enfance et des familles.

Monsieur Cazalet, vous avez posé la question du libellé du programme « Actions en faveur des familles vulnérables » en évoquant notamment les crédits inscrits pour la protection juridique des majeurs.

Il est vrai que, désormais, la part la plus importante de cette action – 222,2 millions d’euros – est consacrée au financement par l’État des mesures « lourdes », telles la tutelle, la curatelle, la mise sous sauvegarde de justice, en faveur des personnes vulnérables qui ne perçoivent pas de prestation sociale ou qui perçoivent une prestation sociale servie par le département, comme le RSA, l’APA, la PCH, la prestation de compensation du handicap.

Cela correspond à la réforme très attendue de la protection juridique et qui est entrée en vigueur au 1er janvier 2009. En 2010, l’État financera 190 000 mesures, soit 40 % du total des mesures de protection juridique des majeurs.

Cette action permet également de subventionner l’Agence française de l’adoption et, enfin, de contribuer au financement du GIPED, le groupement d’intérêt public « Enfance en danger », à hauteur de plus de 2,1 millions d’euros.

Je rappelle que ce groupement est chargé du service national d’accueil téléphonique de l’enfance en danger et de l’Observatoire national de l’enfance en danger. Le financement est à parité avec les conseils généraux et marque le volontarisme de l’ensemble du Gouvernement en faveur de la protection de l’enfance.

Messieurs Cazalet et de Mongolfier, je veux également répondre à votre interrogation sur le Fonds national de financement de la protection de l’enfance. Vous savez que le Président de la République a organisé, lors du vingtième anniversaire de la convention internationale des droits de l’enfant, le 20 novembre dernier, à l’Élysée, une rencontre avec l’ensemble des associations de protection de l’enfance représentatives. À cette occasion, il m’a confié la conduite d’états généraux de l’enfance que je mènerai dès le premier semestre 2010. Nous devrons examiner les mesures permettant d’atteindre les objectifs du fonds, dont la faisabilité s’était heurtée, je vous le rappelle, à d’importantes difficultés juridiques.

Ces états généraux auront pour objet d’améliorer l’ensemble des dispositifs de signalement, notamment la transmission de l’information avec les départements, afin d’éviter des cas dramatiques, comme celui de la petite Marina. Ils devront aussi aborder l’enfance fragilisée et l’enfance pauvre.

Je veux, pour terminer, dire quelques mots à propos du Défenseur des enfants. Ce qui importe, c’est la défense des droits des enfants. Les autres pays de l’Union européenne qui ont consacré, de manière constitutionnelle, cette défense ont permis des actions beaucoup plus efficaces. Je vous rappelle que la Défenseure des enfants, qui a produit de très bons rapports, n’avait aucun pouvoir d’injonction.

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. Le Gouvernement a l’intention de renforcer l’ensemble du dispositif consacré à la défense des droits des enfants en lui donnant une valeur constitutionnelle et opérationnelle. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à M. le haut-commissaire. (Applaudissements sur plusieurs travées de lUMP.)

M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d’abord rendre hommage aux rapporteurs, MM. Auguste Cazalet, Albéric de Montgolfier et Paul Blanc (Applaudissements sur les travées de lUMP), pour le soin avec lequel ils ont examiné ces crédits, en analysant à la fois leur montant et leur signification.

Si nous sommes là, aujourd’hui, pour défendre ce programme et ce budget, c’est parce que nous avons travaillé à une réforme, qui a trouvé ses sources ici, au Sénat.

M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Je me souviens du rapport de la Haute Assemblée sur les effets de seuil et les minima sociaux : il a été l’amorce de cette réforme qu’est le revenu de solidarité active, ou RSA.

Je me souviens également de m’être présenté devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour demander l’autorisation d’expérimenter le RSA, et certain d’entre vous l’ont fait. Monsieur le président de la commission des finances, également président du conseil général de la Mayenne, votre département a été l’un des premiers expérimentateurs. C’est d’ailleurs dans ce département que le Président de la République est venu annoncer la généralisation du RSA, ce qui nous a permis de revenir devant vous pour présenter un projet de loi, il y a un an.

M. Charles Pasqua. Très bien !

M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Ainsi, je me souviens, mesdames, messieurs les sénateurs, que, par les amendements que vous avez déposés sur ce texte, vous avez encouragé un financement solide du RSA, tant du côté des conseils généraux que du côté de l’État.

MM. Robert del Picchia et Charles Pasqua. Très bien !

M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Toutefois, certains d’entre vous avaient manifesté une inquiétude : ils se demandaient s’il y aurait assez d’argent,…

M. Charles Pasqua. Et voilà !

M. Martin Hirsch, haut-commissaire. … si les engagements seraient tenus et les promesses honorées, si la loyauté dont nous avons parlé ici – loyauté à l’égard des bénéficiaires d’abord, loyauté envers les conseils généraux ensuite – serait au rendez-vous.

M. Charles Pasqua. Bonne question !

M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Mesdames, messieurs les sénateurs, à travers la présentation de ces crédits, je suis venu vous confirmer que la loyauté est au rendez-vous, à tel point d’ailleurs que vous vous demandez si nous ne sommes pas un peu trop prudents !

M. Charles Pasqua. La commission des finances est ainsi !

M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Mais la prudence, dans cette matière sociale, en période de crise, devant l’inquiétude de nos concitoyens, devant celle des conseils généraux, peut parfois s’avérer essentielle. Je vais donc tenter de vous démontrer que la manière dont nous finançons le revenu de solidarité active permet de préserver l’avenir.

Je voudrais aussi remercier Mme Françoise Henneron, qui a montré en quoi le courage qu’avait démontré la majorité en s’engageant autour d’une telle réforme rendait cette réforme solide, tout comme Mme Anne-Marie Escoffier, qui a rappelé le caractère fondamental de la notion de retour à l’emploi dans notre dispositif.

Ainsi, quand nous avons généralisé le RSA, nous avons pu mesurer que le taux de retour à l’emploi dans les zones où nous l’expérimentions était supérieur au taux de retour à l’emploi de l’ancien RMI. (Mme Anne-Marie Escoffier opine.) Par ailleurs, dans les premiers mois, le montant moyen du RSA versé à des personnes déjà en activité s’est élevé à 187 euros par mois, ce qui montre que cette réforme était nécessaire. C’est un premier élément important à prendre en compte dans l’examen de l’évolution des dépenses du RSA.

L’an dernier, mesdames, messieurs les sénateurs, nous vous avions donné une estimation, pour ce RSA complémentaire, d’environ 110 euros venant s’ajouter mensuellement au salaire. Ce niveau s’est d’abord établi à 187 euros ; il est actuellement de 157 euros et nous pensons qu’il se stabilisera, comme d’ailleurs la direction générale du Trésor et de la politique économique nous encourage à le faire, autour de 130 euros par mois.

M. de Montgolfier, qui connaît bien ces sujets,…

M. Robert del Picchia. Il connaît bien tous les sujets !

M. Martin Hirsch, haut-commissaire. … a, avec le président Arthuis, fait le décompte des recettes et des dépenses. Ils en ont déduit, voilà quelques semaines, qu’il était sans doute possible de dégager 500 millions d’euros et de les transférer du RSA vers d’autres dépenses.

Nous évoquons ici une politique très dynamique. Permettez-moi simplement, mesdames, messieurs les sénateurs, de vous rappeler un chiffre : les dernières statistiques connues, celles du mois de septembre, font état de 78 000 nouveaux inscrits en un seul mois. Vous imaginez bien que, si ce rythme se maintient, nous compterons de nombreux allocataires du RSA !

Compte tenu du niveau actuel de montée en charge, nous prévoyons, pour l’année prochaine, une dépense de 2,6 milliards d’euros pour le RSA complémentaire.

Nous estimons que l’aide personnalisée de retour à l’emploi, celle qui donne le coup de pouce au moment de la reprise du travail, représentera 150 millions d’euros, que nous vous proposons d’individualiser.

Nous honorons notre promesse par rapport à tous les agents des caisses d’allocations familiales, dont vous vous étiez inquiétés, en versant 77 millions d’euros pour le fonctionnement. Nous espérons que celui-ci s’améliorera ; il y a, dans ce domaine également, des marges de progrès.

S’agissant du RSA jeunes – vous avez souligné qu’il était attendu, tout en vous demandant s’il serait suffisant –, nous y consacrerons 125 millions d’euros.

Bref, le total avoisine 2,95 milliards d’euros en 2010. Cela sera peut-être 50 millions d’euros de plus ou 50 millions d’euros de moins. Il s’agit néanmoins de l’ordre de grandeur le plus vraisemblable.

Face à ces dépenses, nous avons prévu une contribution sur les revenus financiers, qui, contrairement à ce que vous avez dit, madame Pasquet, touche ceux qui ont des patrimoines financiers élevés. Le livret A en est bien évidemment exonéré, pour ne donner que cet exemple. Cette contribution a résisté à la crise, mais en a subi les effets : elle rapporte moins. Elle devrait rapporter, en 2010, entre 1,1 milliard d’euros et 1,2 milliard d’euros.

La subvention que nous vous proposons d’inscrire s’élève à 1,674 milliard d’euros. L’Assemblée nationale a estimé que 82 millions d’euros pouvaient être enlevés au titre des annulations de crédits.

En incluant les reports de 2009, les recettes atteignent 3,182 milliards d’euros.

Avec, d’un côté, près de 3 milliards d’euros de dépenses et, de l’autre, près de 3,2 milliards d’euros de recettes, nous disposons d’une marge de sécurité d’environ 200 millions d’euros. Nous avons bien entendu les propositions qui ont été formulées, et les remarques selon lesquelles il serait raisonnable que cette marge se situe entre 200 millions d’euros et 300 millions d’euros : elle atteindrait précisément 230 millions d’euros !

Pourquoi cette marge de sécurité est-elle si importante ?

En cette période de crise, la situation varie à un rythme qui peut être très impressionnant. Dans un tel contexte, nous n’avons pas le droit de faire peser des inquiétudes sur nos concitoyens les plus modestes.

Nous devons également veiller à bien préserver le fonds, afin que l’État n’ait pas la tentation de demander plus aux départements, au motif qu’il n’y aurait pas assez d’argent sur ce fonds : par exemple, renoncer au fonds de mobilisation départementale pour l’insertion – pour notre part, nous espérons le maintenir à hauteur de 500 millions d’euros – ou financer la prime de Noël.

Nous ne voulons pas de cela ! Nous voulons maintenir un dispositif loyal !

Aussi, mesdames, messieurs les sénateurs, nous ne voulons pas nous retrouver, en cours d’année, parce que la crise aura été forte, parce que le recours au RSA aura été important, à devoir revenir devant vous pour demander une augmentation du taux de la taxe ou pour demander que les départements supportent plus de dépenses.

Sous le bénéfice de ces observations, nous souhaitons que les crédits qui vous sont proposés puissent être adoptés, et ce dans le même esprit que celui qui vous animait lorsque vous avez accepté de générer, accompagner, suivre et évaluer cette réforme, d’un œil que je sais toujours critique, au bon sens du terme, et bienveillant. L’idée de réconcilier la solidarité et le travail rejoint en effet une des plus hautes aspirations de votre assemblée. (Applaudissements sur les travées de lUMP et au banc des commissions. – Mmes Muguette Dini, Anne-Marie Escoffier et Raymonde Le Texier applaudissent également.)