M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

Je rappelle que les établissements du réseau sont aujourd’hui dirigés par les dirigeants d’entreprise en exercice, dans les conditions prévues aux articles L. 713-3 et L. 713-4 du code de commerce. Tout membre d’une chambre qui cesse de remplir ces conditions d’éligibilité doit présenter sa démission au préfet.

Nous ne devons pas revenir sur ce système tout à fait pertinent.

La présence de l’autorité de tutelle est assurée aux différentes instances de gouvernance auxquelles elle a accès de droit. Les personnels sont associés, par leurs représentants, à toutes les questions et décisions relatives à la politique du personnel.

Enfin, je ne vois pas au nom de quoi les élus de la République siégeraient dans les chambres de commerce et d’industrie. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.) Ils ne me semblent pas avoir plus vocation que les représentants de la tutelle à siéger dans les instances dirigeantes des chambres.

M. Gérard Le Cam. L’économie est une affaire publique, pas une affaire privée, monsieur le secrétaire d’État !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 94.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 95, présenté par MM. Vera et Billout, Mmes Labarre, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 13, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Par cet amendement, nous souhaitons revenir sur l’un des points problématiques de ce texte, à savoir la création d’un régime spécifique et dérogatoire en Île-de-France. Cette question a d’ailleurs suscité des débats importants lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, preuve de la précipitation que vous avez voulu imposer.

En effet, de manière autoritaire et sans concertation, vous prévoyez que les chambres départementales d’Île-de-France, qui perdent déjà, comme l’ensemble des chambres de commerce et d’industrie territoriales, leur autonomie stratégique et financière, ce que nous contestons par ailleurs, n’aient plus la personnalité juridique.

À juste titre, les présidents des CCI de l’Essonne et de la Seine-et-Marne se sont exprimés, estimant que, « à l’heure du projet de loi sur le Grand Paris », ils ont besoin « de préserver un développement équilibré dans le reste de la France ». Ils font valoir que l’Essonne et la Seine-et-Marne « sont économiquement proches à la fois de la région capitale et des régions voisines, » - il s’agit des régions Centre et Champagne-Ardenne – et que l’on doit « leur laisser les moyens d’exprimer la voix d’entreprises qui ont des besoins différents de celles de Paris et de la petite couronne ». Je partage bien évidemment ces préoccupations.

J’ai également écouté attentivement cet après-midi notre collègue Jean-Pierre Fourcade, qui considère que, pour les Hauts-de-Seine comme pour chacun des départements qui composent la CCI de Paris, une petite structure légère et souple suffirait.

Cette position se fonde sur un mode de fonctionnement historique de la CCI de Paris, avec des délégations qui n’ont jamais été dotées de la personnalité morale.

En revanche, mes chers collègues, comment ne pas comprendre que, pour une CCI comme celle de l’Essonne, qui dispose de longue date de la personnalité morale, avec une autonomie financière et stratégique, le passage à une simple délégation reviendrait à anéantir des années d’efforts et de travail au plus près des besoins des entreprises et des territoires essonniens ?

Chaque jour, je peux mesurer combien une CCI très impliquée localement, à la fois proche des petites entreprises et très engagée dans les grands pôles économiques du département, où se jouent des enjeux scientifiques et de recherche de dimension nationale, est un gage d’efficacité à moindre coût, et sans équivalent.

Aujourd’hui, on voudrait retirer aux chambres le statut d’établissement public tout en affirmant qu’elles peuvent faire exactement la même chose qu’un établissement public, et même davantage. C’est à n’y rien comprendre !

Pour notre part, nous pensons que la loi doit être rigoureuse. C’est pourquoi nous proposons de revenir par cet amendement sur la perte du statut juridique des chambres départementales en Île-de-France.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Cet amendement revient sur le principe d’un statut spécifique pour l’Île-de-France, dont il semble pourtant difficile de contester la nécessité.

La CCI de Paris reste en effet la première chambre de commerce et d’industrie de France, et de loin. La CCI Yvelines – Val-d’Oise se classe en deuxième position, celles de la Seine-et-Marne et de l’Essonne respectivement en sixième et en huitième position. Au regard du poids économique et du rayonnement international de ces chambres, le statut spécifique me semble pertinent.

Quant aux modalités de mise en place de ce statut spécifique, nous aurons l’occasion d’en débattre lors de l’examen de l’article 4 bis. Mais, à ce stade de la discussion, je ne peux pas accéder à votre demande de suppression du statut spécifique de la région d’Île-de-France.

En conséquence, l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Défavorable !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Si je comprends bien – comme nous allons avoir un débat sérieux sur cette question des chambres de l’Essonne et de la Seine-et-Marne, autant que les choses soient claires – cet amendement vise à revenir sur une situation qui, à un moment donné de l’histoire du réseau, a été librement consentie par les autres chambres. C’est cela qui nous gêne ici.

Nous voulons – nous le dirons lors de l’examen de l’article 4 bis – que les CCI de la Seine-et-Marne et de l’Essonne conservent la personnalité juridique, et nous ne transigerons pas sur ce point. Or, ici, on fait un paquet global de l’ensemble des chambres d’Île-de-France et l’on revient sur une situation née de l’histoire.

L’argumentation que nous avons en partie développée les uns et les autres tout à l’heure repose sur la libre organisation des chambres de commerce, principe que nous voudrions voir prévaloir également dans l’organisation territoriale des collectivités.

Voilà pourquoi nous ne voterons pas cet amendement, nous réservant de nous expliquer sur le fond de nos propositions plus tard, à l’article 4 bis.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Fourcade. Comme j’ai été cité, je veux ajouter mon grain de sel à ce débat ! (Sourires.)

Le système de la petite couronne fonctionne très bien, je l’ai expliqué tout à l’heure dans la discussion générale, et nous n’envisageons nullement de revenir sur ce point, ce à quoi nous contraindrait votre amendement, monsieur Vera. Il n’en est pas question, et les parlementaires des Hauts-de-Seine, du Val-de-Marne et de la Seine-Saint-Denis ne demandent pas la création d’une chambre territoriale nouvelle, avec des services et un certain nombre d’annexes. Par conséquent, les choses sont claires.

Quant au maintien de la personnalité morale, problème que nous évoquerons ce soir ou demain, ce qui m’importe, c’est non pas la qualification ou la personnalité morale, mais le fait de savoir si nous acceptons qu’il y ait, dans la région d’Île-de-France, une chambre régionale rassemblant la totalité des budgets et travaillant soit avec des délégations, soit avec des chambres de commerce ayant conservé leur personnalité, mais dans le cadre nouveau d’un système régionalisé, la recette fiscale étant régionalisée et la stratégie définie à l’échelon régional.

Nous verrons bien ensuite comment évolueront les différentes chambres de commerce.

M. le président. La parole est à M. Michel Houel, pour explication de vote.

M. Michel Houel. Le vrai débat, Mme Bricq et M. Fourcade l’ont rappelé, aura lieu à l’article 4 bis, avec l’examen des amendements nos 65, 90 rectifié bis et 104 rectifié. C’est alors que l’on abordera véritablement le problème de la spécificité des chambres de commerce de la Seine-et-Marne et de l’Essonne et que s’ouvrira le vrai débat sur la région d’Île-de-France.

M. le président. Monsieur Vera, l’amendement n° 95 est-il maintenu ?

M. Bernard Vera. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 95.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 92, présenté par Mme Terrade, M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Schurch et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Remplacer les mots :

Les chambres de commerce et d'industrie de région

par les mots :

Les établissements publics du réseau

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. Dans cet amendement, nous montrons notre opposition à la nouvelle architecture des réseaux consulaires mise en place par l’article 1er A, qui prévoit la mise sous tutelle des chambres de commerce et d’industrie territoriales.

En effet, le projet de loi permet aux CCI régionales de définir le budget des autres chambres territoriales.

Cette mise sous tutelle se traduit également, pour ces établissements, par un amoindrissement de leurs compétences et une diminution importante de leurs ressources.

On peut être critique sur la façon dont certaines CCI emploient l’argent public, mais la réalité est que les ressources des CCI ont baissé de 5 % dans la loi de finances pour 2010, et la coupe budgétaire initialement prévue était plus importante encore.

Nous souhaitons qu’il soit inscrit dans la loi que les établissements publics du réseau, et pas seulement les chambres de commerce et d’industrie régionales, bénéficient de l’ensemble des ressources, notamment des impositions de toute nature qui sont affectées par la loi.

M. le président. L'amendement n° 14 rectifié, présenté par Mme Khiari, MM. Bérit-Débat, Raoul et Marc, Mme Bricq, M. Daunis, Mme M. André, M. Sergent, Mme Ghali et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Après les mots :

de région

insérer les mots :

et les chambres de commerce et d'industrie territoriales

La parole est à M. François Marc.

M. François Marc. Avec cet amendement, nous abordons un point important de cette réforme des réseaux consulaires, celui du financement, par la fiscalité, des futures chambres de commerce et d’industrie de région et des CCI territoriales.

La volonté du Gouvernement est, on le sait, de régionaliser autant que faire se peut le réseau consulaire au détriment du réseau de proximité actuellement constitué par les chambres de commerce et d’industrie.

Deux arguments sont mis en avant : économie et efficacité. L’un et l’autre restent encore à prouver.

Je veux insister sur le fait que, dans la formulation retenue par ce projet de loi, toutes les ressources fiscales vont à la chambre régionale. Cela laisse clairement apparaître que l’on veut priver les chambres de commerce et d’industrie territoriales de toute autonomie fiscale.

Nous aborderons ce point plus en détail lors de l’examen de l’article 7 ter, qui précise le mode de répartition de la ressource fiscale. Sans donc ouvrir dès maintenant le débat sur ces modalités, il s’agit néanmoins d’acter le principe de l’autonomie fiscale des chambres de commerce et d’industrie territoriales.

De nombreux collègues ici soutiennent une répartition équilibrée de la ressource fiscale entre le niveau territorial et le niveau régional pour permettre à la fois aux CCI territoriales de mener en toute autonomie leurs missions de proximité et aux CCI de région de s’engager vers une plus grande mutualisation des services et des moyens financiers.

Il y a quelques mois, lors de l’examen de la loi de finances pour 2010 et à l’occasion de la suppression de la taxe professionnelle, nous avons été nombreux sur toutes les travées à nous opposer à la perte d’autonomie fiscale des collectivités territoriales. Nous avons plaidé en ce sens, mais nous n’avons visiblement pas été entendus quand on voit ce qu’il est advenu. C’est, nous semble-t-il, le signe d’un recul dangereux de la décentralisation.

Le sujet qui nous occupe aujourd’hui est en de nombreux points identique et, si l’on souhaite conserver demain un réseau consulaire fort et dynamique, il est indispensable de maintenir aujourd’hui, au profit des chambres les plus proches de nos territoires, une part d’autonomie fiscale. C’est l’objet de cet amendement.

Lorsque les CCI se sont prononcées en assemblée générale, elles ne pouvaient avoir connaissance de la suppression de la taxe professionnelle et de la création des nouveaux impôts locaux, puisqu’elles ont délibéré en novembre 2008 et en avril 2009. Depuis lors, la loi de finances a considérablement modifié l’architecture de la fiscalité locale. On ne peut donc être étonné de voir la position des CCI évoluer également ! D’ailleurs, le président de l’ACFCI lui-même n’est pas opposé aujourd’hui à un partage de la ressource fiscale entre le niveau régional et le niveau territorial.

Notre amendement est très simple : si l’on veut que les chambres territoriales conservent une part d’autonomie – c’est le propos que j’ai entendu sur toutes les travées tout à l’heure – il faut effectivement introduire cette correction dès l’article 1er A, article déterminant, et ajouter la précision que nous souhaitons introduire dans le texte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Je voudrais m’arrêter quelques instants sur ces deux amendements dans la mesure où cette question, parce qu’elle est en fait au cœur de la réforme, a vocation à revenir tout au long de cette séance. Sur l’ensemble des autres amendements qui sont à peu près de la même veine, je me contenterai de donner l’avis de la commission, qui est défavorable.

Ces amendements visent à prévoir que les chambres de commerce et d’industrie territoriales bénéficient, au même titre que les chambres de commerce et d’industrie de région, des impositions de toute nature qui leur sont affectées par la loi.

C’est remettre en cause l’essence même de la réforme, qui est de renforcer l’échelon régional du réseau – il devient le centre du pouvoir économique au sein des collectivités – en lui attribuant notamment l’affectation de la ressource fiscale.

Il ne faut pas perdre de vue l’objectif du texte, qui est celui d’une plus grande rationalisation et d’une plus grande mutualisation.

Tout à l’heure, dans la discussion générale, j’ai parlé de rationalisation, de cohérence mais aussi de proximité. Il s’agit d’un axe dont je ne dévierai pas, vous le verrez d’ailleurs lors de l’examen d’un certain nombre d’amendements sur lesquels j’émettrai un avis favorable.

Donc, mes chers collègues, rationalisation et cohérence, mais aussi proximité.

Par ailleurs, je tiens à ajouter que l’imposition affectée ne constitue en moyenne que la deuxième source de financement des CCI, puisqu’elle ne représente que 27 % du total des recettes des CCI, alors que 48 % de leurs ressources proviennent des prestations qu’elles offrent. Il faut toujours avoir ces chiffres en tête.

La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 92 et 14 rectifié.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable tant sur l’amendement n° 92 que sur l’amendement n° 14 rectifié, parce que ces amendements ne sont pas compatibles avec l’orientation de la réforme qui vous est proposée puisqu’ils remettraient en cause, s’ils étaient adoptés, l’une des mesures-clés du projet de loi : l’affectation des ressources fiscales au niveau régional.

Je citerai quelques chiffres pour que vous ayez vraiment les données en tête, mesdames, messieurs les sénateurs.

Sur l’ensemble des 4,4 milliards d’euros de ressources des chambres, les CCI territoriales continueront de disposer directement d’environ 3,2 milliards d’euros. Seule la part fiscale, l’impôt prélevé sur les entreprises, soit 1,2 milliard d’euros, sera mutualisée à l’échelon régional.

Mais tout n’est pas conservé au niveau régional, puisque les sommes collectées seront ensuite réparties entre les chambres de commerce et d’industrie territoriales, après prélèvement de la quote-part nécessaire au fonctionnement de la chambre de commerce et d’industrie régionale.

J’ai eu l’occasion de le dire lors de la discussion générale, près de 90 % des ressources seraient ainsi disponibles au niveau territorial, 10 % seulement restant au niveau de la chambre de commerce et d’industrie régionale.

Je rappelle, en outre, que les chambres de commerce et d’industrie territoriales élaboreront et voteront leur propre budget.

N’oublions pas que cette réforme doit permettre aux entreprises de disposer d’un meilleur service au meilleur coût, avec une baisse, en euros constants, d’environ 10 % des ressources fiscales. Il s’agit finalement de réduire d’environ 120 millions d’euros la fiscalité pesant sur les entreprises.

Je vous le dis tout net, sans mutualisation des ressources fiscales à l’échelon régional, qui représentent moins de 30 % des ressources des chambres – M. le rapporteur a parlé de 27 % – il serait illusoire d’espérer mutualiser les services généraux ou encore les missions que des chambres territoriales ne pourraient mener seules.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable sur les deux amendements.

M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.

M. François Marc. M. le secrétaire d’État cherche à nous faire croire que les chambres territoriales vont disposer en définitive de 90 % de la totalité des budgets.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Oui !

M. François Marc. J’attire son attention sur le fait que la commission des finances du Sénat a débusqué, dans le dispositif prévu, une énorme anomalie qui n’avait pas été anticipée, cela figure d’ailleurs dans le rapport pour avis.

En effet, les chambres territoriales, auxquelles on va donc attribuer une partie de la manne qui aura été collectée à l’échelon de la région, vont devoir la faire remonter vers les chambres régionales pour payer le personnel, puisque les salaires seront pris en charge par les chambres régionales. Et cela ne suffira même pas.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. De très peu !

M. François Marc. Par conséquent, monsieur le secrétaire d’État, ce chiffre de 90 % ne tient pas quand on raisonne à partir de la réalité de ce que seront les chambres territoriales.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Si !

M. François Marc. Le raisonnement tenait dans la mouture initiale, lorsque vous aviez enlevé la personnalité juridique aux chambres territoriales. Dans ce cas, on peut effectivement concevoir que celui qui prélève l’impôt est celui qui a la personnalité juridique, c’est-à-dire, en l’occurrence, la chambre régionale.

Mais vous restituez la personnalité juridique aux chambres territoriales.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Vous devriez être content !

M. François Marc. Dès lors, rien ne s’oppose à ce que, de nouveau, elles puissent prélever une part de la ressource fiscale !

Je terminerai en établissant un parallèle : si le Gouvernement applique demain les mêmes principes aux relations entre les régions et les départements, ceux-ci se verront privés de toute capacité de lever l’impôt. La démarche que vous suivez ici justifie pleinement nos craintes d’une centralisation régionale progressive et d’une suppression des départements. Votre logique a sa cohérence, mais exposez-la clairement ! Pour notre part, nous nous y opposons, en proposant en l’occurrence que les CCIT puissent continuer à percevoir une part de la recette fiscale.

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Effectivement, monsieur le secrétaire d’État, le taux de 90 % ne résiste pas à l’analyse.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Si ! Il résiste très bien !

M. Claude Bérit-Débat. Pas du tout ! Le rapporteur pour avis lui-même a pointé tout à l’heure une incohérence !

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. On peut être en désaccord !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. La commission des finances peut se tromper !

Mme Nicole Bricq. Elle sait compter, tout de même !

M. Claude Bérit-Débat. Qui financera la différence entre les 1,2 milliard d’euros de produit de la taxe pour frais de CCI et les 1,7 milliard d’euros de coûts salariaux ? Le taux de 90 % des ressources pour les CCIT ne tient pas !

Sans préjuger de l’issue de la discussion de l’article 7 ter, il convient à mon sens d’inscrire dès à présent à l’article 1er A le complément proposé, afin de permettre aux chambres de commerce et d’industrie territoriales de percevoir l’impôt. Sans entrer dans le détail du mécanisme, je rappellerai, après François Marc, que le président de l’Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie n’est pas opposé à une répartition de la ressource fiscale entre l’échelon régional et l’échelon territorial.

Nous proposerons donc notamment que le produit de la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises soit affecté aux chambres de commerce et d’industrie territoriales et que celles-ci puissent en outre fixer le taux de cette taxe, dans les limites déterminées par la loi. En effet, pour l’heure, il est prévu que ce taux sera fixé par la chambre de commerce et d’industrie de région : sous couvert de mutualisation, vous privez les chambres de commerce et d’industrie territoriales de leur autonomie financière, en inversant les prérogatives actuelles des deux échelons. Jusqu’ici, en effet, c’étaient les CCI départementales, qui demain deviendront « territoriales », qui levaient l’impôt, embauchaient et géraient le personnel, finançaient les CCI régionales, dont elles désignaient en outre les membres du conseil d’administration

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Elles continueront de les élire !

M. Claude Bérit-Débat. Aujourd’hui, vous inversez les relations entre les deux niveaux,…

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. C’est faux !

M. Claude Bérit-Débat. … si bien que les chambres de commerce et d’industrie territoriales se trouveront placées sous la tutelle des CCI de région.

Voilà ce que dénoncent ceux qui ne sont pas d’accord avec votre texte : ils sont beaucoup plus nombreux que ceux qui l’approuvent ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

M. Gérard Longuet. Nous sommes ici à front renversé : la majorité défend un principe de solidarité, de mutualisation, avec la perspective de permettre des économies d’échelle.

Héritage de l’histoire, les chambres de commerce et d’industrie de notre pays sont souvent, mais pas nécessairement, départementales. Cependant, le niveau régional se rattache à une notion qui devrait être chère à nos collègues de l’opposition : celle de solidarité, de péréquation,…

Mme Nicole Bricq. Vous l’avez supprimée pour les collectivités !

M. Gérard Longuet. … de mutualisation des moyens à l’échelle d’un espace économiquement plus homogène que ne l’est le territoire d’un département ou d’une partie de département.

M. Claude Bérit-Débat. Ce n’est pas un argument !

M. Gérard Longuet. Cela étant, monsieur le secrétaire d’État, nous aimerions tout de même savoir quelle est votre conception des relations entre les deux échelons en termes de répartition des crédits. En effet, s’il est exact que 70 % du budget des chambres de commerce et d’industrie territoriales procède de leur activité de prestataires de services, le solde proviendra de la répartition d’un impôt. Il n’est donc pas complètement anormal de s’interroger sur les clefs de cette répartition. Si ce point n’est pas éclairci, on court le risque de voir apparaître une tension permanente, sinon des conflits, entre des chambres de commerce et d’industrie territoriales mues par le désir ardent de servir leurs ressortissants et leur « maison mère » régionale. Un complément d’explication est donc nécessaire, en particulier pour mieux éclairer le jugement de ceux qui, comme moi, n’ont pas la même connaissance du dossier que nos collègues Gérard Cornu et Éric Doligé.

En tout état de cause, je voterai contre l’amendement présenté, car je fais le choix de la solidarité, de la mutualisation, des économies d’échelle.

M. Daniel Raoul. Il a tout compris !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je tiens tout d’abord à préciser que ce projet de loi n’est pas en rupture avec la loi Dutreil de 2006, mais s’inscrit au contraire dans sa continuité.

À l’époque, les réseaux consulaires souhaitaient une régionalisation, c’est-à-dire l’émergence d’une entité régionale à même d’élaborer, avec l’exécutif de la région, une vision stratégique du développement économique.

Le projet de loi qui vous est aujourd’hui soumis ne vient donc pas de nulle part. Il tire les leçons des difficultés rencontrées jusqu’à présent, malgré tous les efforts, pour mettre en place une telle régionalisation et constituer un véritable réseau, composé d’un échelon départemental ou infradépartemental, d’un échelon régional et d’un échelon national.

Telle était la philosophie de la réforme Dutreil, telle est aujourd’hui encore la philosophie du présent projet de loi, qui vise à remédier aux insuffisances passées en confiant aux CCIR la mission de percevoir l’impôt, pour donner une teneur concrète au fait régional. C’est un élément important, même si la fiscalité ne représente que 27 % de l’ensemble des ressources du réseau des chambres de commerce et d’industrie.

L’articulation entre les chambres de commerce et d’industrie territoriales et leur chambre de commerce et d’industrie de région sera assurée par l’élection, monsieur Longuet. Les CCIT éliront en effet leurs représentants à l’échelon régional : on retrouvera donc les mêmes acteurs dans les deux niveaux de structures, ce qui garantit que des territoires ne seront pas sacrifiés au nom de je ne sais quels intérêts. Ce fait n’a pas été suffisamment souligné.

Aujourd’hui, nous organisons la fiscalité de façon qu’elle soit à peu près identique à celle de 2009.

Mme Nicole Bricq. À peu près !...

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Peut-on imaginer qu’une chambre de commerce et d’industrie territoriale puisse voir son budget drastiquement réduit par une chambre de commerce et d’industrie de région au sein de laquelle elle sera représentée ?

La définition de la stratégie de développement économique posera le cadre en début de mandature. Ensuite, il est évident que les budgets affectés aux CCIT resteront à peu de choses près inchangés. Nos calculs, qui reposent sur l’analyse de la réalité actuelle, montrent que s’ajouteront aux 70 % de ressources directes des CCIT, qui resteront à leur discrétion, environ les deux tiers des ressources fiscales prélevées sur les entreprises, lesquelles représentent 27 % du total des recettes du réseau consulaire : on arrive bien au taux de 90 %. L’arithmétique est têtue !