Mme Annie David. Tant mieux !

M. Éric Woerth, ministre. Un site d’échange d’informations à ce sujet a également été mis en place.

La politique du Gouvernement est donc très axée sur la recherche de produits de substitution, même s’il est clair qu’il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine.

Comme vous le voyez, nous sommes extrêmement attentifs, et nous le demeurerons au cours des mois qui viennent, à la mise en œuvre des deux principaux volets de ce dossier.

Le premier volet, dont nous avons en fait peu parlé, est celui de la prévention. Notre objectif est bien de garantir un haut niveau de protection aux travailleurs encore exposés à l’amiante, même s’ils sont désormais peu nombreux. Le produit est interdit, mais un certain nombre de professionnels y demeurent exposés, essentiellement ceux qui travaillent dans le désamiantage ou dans la démolition. La mise en œuvre de ce volet fait partie des priorités du plan Santé au travail n° 2, que j’ai déjà évoqué à propos des CMR. L’inspection du travail est très mobilisée sur ce sujet.

Le second volet est celui de la réparation. Il faut évidemment assurer une juste réparation aux victimes en veillant au bon fonctionnement des différents dispositifs d’indemnisation en place. À cet égard, des évolutions sont possibles. J’ai demandé des rapports – leur date de parution est fixée – qui devraient nous permettre d’aller plus loin et d’avancer, notamment sur les problèmes liés à la différence d’approches entre les régimes.

La branche AT-MP a fait un effort financier de taille envers les victimes de l’amiante puisqu’elle a consacré une dotation cumulée de 5,3 milliards d’euros au FCAATA depuis sa création en 1999, une dotation de 6,2 milliards d’euros à la réparation des maladies professionnelles dues à l’amiante depuis 2000, ainsi qu’une dotation cumulée de 2,3 milliards d’euros au FIVA.

Certes, tous les problèmes ne sont pas réglés – des zones d’incertitude ou d’injustice demeurent, sur la liste des établissements ou sur l’accès individuel –, mais le dispositif est complet. Je pense que, aujourd'hui, la France peut s’enorgueillir d’avoir tenté de traiter ce problème extraordinairement difficile, même si, comme je l’ai indiqué tout au long de mon intervention, car j’en ai pleinement conscience, beaucoup reste à faire. (Applaudissements sur les travées de lUPM, de lUnion centriste, du RDSE et du groupe socialiste.)

M. le président. Je constate, en application de l’article 83 du règlement, que nous en avons terminé avec cette question orale. Je me permettrai d’ajouter que le débat a été très riche, à la mesure de l’importance du sujet.

7

Débat sur les conclusions de la mission commune d'information sur le traitement des déchets

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur les conclusions de la mission commune d’information sur le traitement des déchets.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Soulage, rapporteur de la mission commune d’information sur le traitement des déchets. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État chargée de l’écologie, mes chers collègues, la mission commune d’information sur le traitement des déchets, a été, il y a un an, la première mission créée en application du droit de tirage reconnu à chaque groupe politique par la réforme constitutionnelle.

J’ai demandé, au nom du groupe de l’Union centriste, la constitution de cette mission après avoir constaté sur le terrain que les débats du Grenelle de l’environnement et les modifications législatives qui les ont suivis avaient fait naître des doutes et des inquiétudes chez les élus locaux responsables de la gestion des déchets.

Ces élus sont aujourd’hui confrontés à plusieurs défis : l’obligation de renouvellement des sites existants, dans un contexte de rejet croissant de ceux-ci par les populations, et l’augmentation sensible du coût du traitement. Or la progression rapide de la dépense des collectivités dans le domaine des déchets devrait sans doute s’amplifier encore du fait des nouvelles contraintes imposées par la législation, qui incite à la mise en œuvre de techniques plus onéreuses.

C’est dans ce contexte que j’ai souhaité que le rapport de la mission soit avant tout un guide à la décision pour les élus locaux et qu’il mette en évidence les performances des différents procédés de traitement, sur les plans technique, environnemental et économique.

C’est également pour cette raison que le rapport n’aborde pas les questions de prévention et de recyclage des déchets. La mission a toutefois bien rappelé, en préambule, que « le meilleur déchet est celui que l’on ne produit pas » et que des efforts notables doivent être effectués pour atteindre les objectifs ambitieux du Grenelle en la matière.

Je laisserai à Dominique Braye, président de la mission commune d’information, le soin d’aborder les questions de TGAP, la taxe générale sur les activités polluantes, et je centrerai mon propos sur la valorisation organique des déchets et leur stockage.

La période actuelle est marquée par un engouement des exploitants, des élus et des pouvoirs publics pour les techniques permettant de valoriser la fraction organique des déchets. Cet engouement est lié notamment à deux facteurs. D’une part, le Grenelle de l’environnement a fixé des objectifs très élevés de valorisation organique des déchets. D’autre part, il est devenu quasiment impossible pour les élus de créer de nouveaux sites d’incinération ou de stockage, ce qui les conduit à chercher des modes de traitement alternatifs.

La mission a considéré que des techniques anciennes, comme le compostage, présentaient des atouts environnementaux certains pour un coût modéré, mais s’est interrogée sur l’intérêt de techniques nouvelles plus coûteuses, comme les installations de tri mécano-biologique et de méthanisation.

Pour ma part, au début de nos travaux, j’avais une préoccupation majeure, touchant au lien entre traitement des déchets et pollution des sols. À cet égard, le procédé du tri mécano-biologique, qui consiste à isoler mécaniquement la fraction organique des déchets pour la transformer en compost, me paraissait risqué aussi bien pour la qualité de nos sols que pour la sécurité de la chaîne alimentaire.

Les scientifiques que nous avons auditionnés et les comparaisons européennes nous ont permis de nous faire une idée assez précise sur ce point : nous avons, en France, une norme autorisant l’utilisation dans les sols agricoles de composts caractérisés par des teneurs en métaux et en inertes bien supérieures à celles qui sont acceptées par nombre de nos voisins européens. Issue d’un compromis social et non d’une analyse scientifique, cette norme est de nature à favoriser l’accumulation des métaux lourds et des inertes dans les sols dans des proportions trop importantes au regard des usages agricoles.

Il paraît donc raisonnable de penser que cette norme sera durcie dans les prochaines années, et il faut même sans doute le souhaiter. C’est en tout cas ce que nous ont laissé entendre les responsables européens.

En outre, la France est quasiment le seul pays européen à autoriser l’utilisation en agriculture de composts de bio-déchets non triés à la source. Certes, les techniques de tri mécanique se sont améliorées et permettent, dans des conditions très strictes, la production de composts dont la qualité est supérieure à la norme française. Pour autant, il existe un risque non négligeable que l’épandage de tels composts soit interdit à terme. Cette possibilité, même faible, pèse sur les installations de tri mécano-biologique. Pour ces raisons, la mission a conclu que les élus devaient les envisager avec une très grande prudence.

J’avais une seconde crainte, relative à l’engouement actuel pour la méthanisation. Cette technique est souvent envisagée du fait de l’impossibilité de créer de nouveaux sites de stockage ou d’incinération, comme ce fut notamment le cas à Montpellier. Il faut donc continuer, sur ce point, à faire œuvre de pédagogie, car la méthanisation, qui ne traite que la partie fermentescible, ne peut en aucun cas se substituer à l’incinération ou au stockage, seuls modes de traitement final des déchets.

Nous avons pu constater, à Lille, que la méthanisation sur biodéchets, couplée à l’existence d’un incinérateur, fonctionnait bien. Son coût élevé a toutefois conduit la mission à recommander son utilisation plutôt pour les grandes agglomérations, au-delà d’un certain tonnage de déchets. En effet, la collecte sélective de biodéchets reste une entreprise aléatoire puisque les quantités captées chez l’habitant sont très souvent inférieures aux prévisions et soumises, de surcroît, à des variations saisonnières importantes.

À cet égard, la mission s’est montrée réticente à l’idée d’une généralisation de la collecte séparée des biodéchets, difficilement acceptable en milieu très urbain et peu opérante en milieu très rural, où le compostage à domicile apparaît préférable. Les exemples de Stockholm et de Lille nous ont démontré toute l’importance de la collecte de gros producteurs. On a par exemple vu que, à Stockholm, la collecte des déchets chez les particuliers avait été pratiquement arrêtée et que, à Lille, elle était très peu importante.

Enfin, la méthanisation sur déchets ménagers non triés à la source pose encore aujourd’hui des difficultés techniques importantes et présente un rendement énergétique relativement faible. Ces inconvénients doivent en conséquence être soigneusement pesés au regard du coût important des installations nécessaires à la mise en œuvre de cette solution.

J’en viens au stockage, qui, comme chacun le sait, fait désormais l’objet d’une stratégie globale de réduction. Nous ne contestons naturellement pas cette trajectoire de baisse des quantités de déchets enfouies, mais nous estimons primordial de la poursuivre avec discernement et réalisme.

Le stockage des déchets pâtit souvent, dans l’opinion, d’une image négative : on assimile généralement les sites de stockage à des dépotoirs sources de fortes nuisances olfactives.

La mission s’est d’abord attachée à démontrer que le durcissement des normes de stockage avait considérablement réduit les risques de contamination des eaux ou des sols et que l’impact sanitaire de ces installations était limité.

Mais le véritable enjeu aujourd’hui est celui de la valorisation du biogaz et, plus globalement, de la limitation des émissions de gaz à effet de serre. Nous le rappelons dans le rapport : les expertises en cours ne permettent pas de trancher définitivement sur les mérites comparés de la valorisation en amont des déchets organiques ou de la valorisation en centre d’enfouissement du biogaz capté.

Compte tenu de ces incertitudes, il nous semble abusif de renoncer au stockage sans autre forme de procès pour se lancer dans des technologies non totalement éprouvées et coûteuses en investissements.

Nous considérons même que ce mode de traitement demeure pertinent, voire indispensable, notamment en milieu rural, sous réserve que le biogaz qui en est issu soit capté et valorisé de la façon la plus performante possible.

À cet égard, un déplacement de la mission dans le département du Tarn, cher à notre collègue Jean-Marc Pastor (Sourires.), nous a montré que l’exploitation des centres de stockage en mode bioréacteur constituait aujourd'hui l’expérience la plus concluante, et de loin, en matière de valorisation énergétique des déchets enfouis. (M. Jean-Marc Pastor applaudit.)

M. Roland Courteau. C’est une référence !

M. Daniel Soulage, rapporteur de la mission commune d’information. Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous nous donner votre sentiment sur tous ces points ?

J’ajoute un élément, sur lequel Dominique Braye reviendra dans quelques instants : pouvez-vous nous donner précisément votre position sur la proposition, que nous formulons dans le rapport, d’un moratoire sur la hausse de la TGAP tant qu’une évaluation de cette taxe n’a pas été réalisée ?

En conclusion, je voudrais me féliciter que le rapport de la mission ait été adopté à l'unanimité. L’objectif étant de réaliser un guide pour les élus locaux, nous devions pouvoir nous rejoindre, au-delà des clivages partisans.

Je remercie bien sûr tout d'abord Dominique Braye. Comme on dit en langage diplomatique, nous avons eu des discussions franches ! (Sourires.) Cette façon de procéder, qui nous convient très bien, nous a permis de nous accorder sur l’ensemble des orientations de ce rapport, qui constitue vraiment une œuvre commune.

Je remercie également tous mes collègues, qu’ils appartiennent à la majorité ou à l’opposition. Ils se sont beaucoup engagés et ont participé assidûment aux auditions et aux déplacements. Je salue tout particulièrement Jean-Marc Pastor, qui nous a accueillis dans le département dont il est l’élu, et Evelyne Didier, qui, au nom du groupe communiste, a souligné dans sa contribution annexée au rapport la qualité du travail que nous avions réalisé conjointement.

Enfin, j’adresse mes remerciements très sincères aux fonctionnaires du Sénat qui ont assuré le secrétariat de la mission : ils ont accompli un travail de qualité tout en faisant preuve d’une grande disponibilité. Ils nous ont permis de réaliser ce guide pour les élus, qui se veut pratique et opérationnel. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le président de la mission commune d’information.

M. Dominique Braye, président de la mission commune d’information sur le traitement des déchets. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission sur le traitement des déchets, que j’ai eu l’honneur de présider, a procédé à de nombreuses auditions et effectué plusieurs déplacements afin de rendre compte des réussites et des difficultés rencontrées par les collectivités locales comme par les exploitants dans la mise en œuvre des techniques de traitement des déchets ménagers, et cela tant en milieu urbain que dans les zones rurales.

Notre rapporteur, Daniel Soulage, que je tiens dès maintenant à saluer, ayant déjà exposé les objectifs et les conclusions générales de la mission, je centrerai mon propos sur l’incinération et sur les questions de fiscalité.

S’agissant de l’incinération, la mission a considéré que le Grenelle de l’environnement avait davantage contribué à perpétuer, voire à conforter le « tabou » entourant cette technologie qu’à le dissiper.

Soyons clairs : le principal handicap dont souffre encore l’incinération tient aux impacts sanitaires présumés des installations. Or, pendant qu’en France l’incinération paie encore les erreurs du passé, en Allemagne, en Suède, en Belgique, dans les principaux pays défenseurs de l’environnement, l’acceptation de ce mode de traitement fait désormais consensus.

Devant la persistance des discours alarmistes, nous avons montré en quoi les réglementations actuelles, qui figurent parmi les plus sévères en Europe, garantissent la maîtrise, confirmée par les études épidémiologiques les plus récentes, de l’impact sanitaire des installations.

Il y a donc loin du sentiment de risque sanitaire au danger réel, et tandis que le soupçon continue de peser sur l’incinération, d’autres risques potentiels associés à des équipements de grande consommation sont ignorés. Je pense, notamment, au cas de certaines chaudières à bois, qui émettent proportionnellement beaucoup plus de particules que les incinérateurs,…

M. Roland Courteau. Celles qui sont vétustes, oui !

M. Dominique Braye, président de la mission commune d’information. … et qui n’en bénéficient pas moins d’incitations fiscales importantes.

Quand les intervenants n’ont pas eu gain de cause, le débat se déplace sur le terrain des impacts environnementaux de l’incinération. Ainsi, les incinérateurs constitueraient des « aspirateurs à déchets », dont l’existence serait fatale au développement du tri et de la « valorisation matière ».

Mes chers collègues, ces arguments, vous le savez, ne résistent pas un instant à l’examen des faits. L’incinération ne s’oppose ni au tri ni au recyclage, tout simplement parce que les pays européens qui trient le plus sont également ceux qui incinèrent le plus.

Dans ces conditions, notre mission a souhaité non pas faire la promotion de l’incinération, mais la remettre, enfin, à sa juste place dans la hiérarchie européenne du traitement des déchets. Cette démarche implique d’y voir non pas seulement un mode de traitement des déchets, mais aussi et surtout un procédé de valorisation énergétique à promouvoir, dans le cadre des objectifs européens de production d’énergies renouvelables. Or tel n’est malheureusement pas le cas en France, y compris d'ailleurs chez les exploitants d’installations.

À l’étranger, c’est tout le contraire. Au Danemark, l’incinération des déchets ménagers est considérée comme une source d’énergie renouvelable et la population voit ces unités localisées en milieu urbain – j’insiste sur ce point, mes chers collègues – comme de simples chaufferies.

Notre principale recommandation consiste donc à ne plus considérer l’incinération comme un mauvais mode de traitement mais à saisir les opportunités offertes par cette technologie en matière de valorisation énergétique, à travers, par exemple, le développement des réseaux de chaleur.

Optimiser le recours à l’incinération implique également d’en finir avec un parc français d’unités disséminées et de taille modeste, qui n’ont économiquement aucun sens, nous le savons.

Enfin, l’opinion publique doit se réapproprier l’incinération – encore faudrait-il que tous les élus et les responsables concernés l’y aident, mais il ne faut pas désespérer !–, grâce à une information enfin objective et transparente, ainsi qu’à des procédures concertées et adéquates. Les projets ne seront jamais mieux conduits que s’ils reposent sur un conseil scientifique indépendant, de nature à contrer l’expertise autoproclamée de certaines organisations dont l’opposition à l’incinération tient essentiellement, pour ne pas dire uniquement, à l’idéologie.

De surcroît, cet effort de pédagogie et d’information doit être permanent, à travers, par exemple, la délégation aux associations environnementales de la responsabilité des contrôles des rejets des incinérateurs.

Pour conclure sur l’incinération, je rappellerai que l’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, s’est récemment alarmée de la possibilité d’un déficit de capacité de traitement à moyen terme dans certains départements si aucune nouvelle installation d’incinération ou de stockage ne voit le jour.

Madame la secrétaire d'État, quelles mesures pensez-vous pouvoir mettre en œuvre pour aider enfin les élus locaux à faire accepter ces projets et à réhabiliter l’image du stockage et de l’incinération aux yeux de nos concitoyens ? En effet, si les Français dénigrent ces techniques, c’est, beaucoup trop souvent, à cause de responsables politiques.

J’en viens à présent au levier fiscal, qui occupe une place essentielle dans la mise en œuvre du volet « déchets » du Grenelle, à travers notamment la TGAP, dont chacun sait ici qu’elle constitue un sujet épineux depuis sa réforme dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009 ; Daniel Soulage, les administrateurs de la commission des finances et moi-même en gardons d'ailleurs un souvenir impérissable !

Cette réforme a consisté à augmenter progressivement les tarifs pesant sur les installations de stockage et à créer une fraction de TGAP spécifique sur les installations d’incinération, dont le tarif doit également augmenter jusqu’en 2013.

Nous avons, au sujet de cette réforme, une double conviction.

La première est qu’elle obéit d’abord et même exclusivement à une logique de rendement puisque des objectifs ambitieux de réduction de la mise en décharge auraient pu être atteints aussi efficacement, sinon plus, à travers la diminution des tonnages autorisés par les arrêtés préfectoraux.

La seconde conviction est que les motivations profondes de l’extension de la TGAP à l’incinération sont peu claires – à moins qu’elles ne soient que trop, du moins pour ceux qui savent de quoi il retourne !

Il ressort en effet de façon tout à fait évidente de nos auditions que la création de cette fiscalité nouvelle a été concédée à certaines organisations non gouvernementales, auxquelles un moratoire total sur l’incinération avait par ailleurs été refusé. Ce faisant, la France a créé une TGAP sur l’incinération au moment où des pays exemplaires en matière de protection de l’environnement, comme la Suède, supprimaient la taxe carbone pesant sur les incinérateurs.

La mission n’entend pas remettre en cause ce dispositif, naturellement, mais elle estime indispensable de l’évaluer et de l’aménager.

Nous soutenons le principe d’une modulation des tarifs de la TGAP en fonction des performances environnementales, en particulier énergétiques, des installations. Toutefois, cette modulation doit être plus étendue et plus fine que dans le dispositif actuel. Madame la secrétaire d'État, nous avons beaucoup d’idées pertinentes à vous soumettre sur ce sujet, si vous êtes intéressée...

S’agissant de l’évaluation, il est prévu que soit remis au Parlement, avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2013, un rapport sur l’impact de la TGAP. Il nous est apparu indispensable que cette disposition fasse l’objet d’une application anticipée, et cela dès la fin de l’année 2011.

Mes chers collègues, la crise, qui pèse sur les budgets locaux comme sur le pouvoir d’achat des ménages, a sensiblement amplifié l’impact relatif de la TGAP et justifie cette anticipation.

Nous souhaitons également que l’augmentation des tarifs de cette taxe soit subordonnée à la réalisation de cette évaluation et aux résultats qu’elle mettrait en évidence.

Enfin, nous tenons à réaffirmer notre attachement au retour du produit de la TGAP à la politique des déchets, comme s’y est engagé le Gouvernement.

En revanche, nous sommes convaincus que le produit de cette taxe doit rester stable au cours des années à venir.

M. Gérard César. Très bien !

M. Dominique Braye, président de la mission commune d’information. Sous réserve de la clause d’évaluation que j’évoquais à l’instant, une réforme des tarifs pourrait donc s’opérer pour garantir un produit constant en volume par rapport à 2010 ou 2011.

En conclusion, je souhaite indiquer que les travaux de la mission se sont déroulés dans un excellent climat – je souscris tout à fait aux propos de notre rapporteur –, car tous les sénateurs visaient le même objectif : se faire l’idée la plus précise possible des différents modes de traitement pour créer ce guide d’aide à la décision des élus que souhaitait Daniel Soulage. D'ailleurs, l’adoption du rapport à l’unanimité montre, je crois, notre souci permanent d’objectivité.

À mon tour, je tiens d'ailleurs à remercier tous les membres de la mission, ainsi que tous les fonctionnaires qui nous ont aidés. Avant tout, je saluerai notre rapporteur Daniel Soulage, avec qui j’ai effectivement eu des « discussions franches »… Mais pouvait-il en aller autrement entre un vétérinaire et un agriculteur qui ont l’habitude de tenir le même langage ? (Sourires.) En outre, nous avions un même but : parvenir à une réalisation tangible et concrète, et non pas faire des discours qui plaisent à certains mais sont tout à fait inefficaces sur le terrain !

Je ne peux à cet égard que m’étonner de la réaction manifestée à la lecture de notre rapport par certaines associations. Que celles-ci n’en partagent pas toutes les conclusions me paraît tout à fait normal et, pour tout vous dire, mes chers collègues, le contraire m’aurait beaucoup étonné. Je me dois, en revanche, de faire litière de certaines contre-vérités, notamment celle qui consiste à dire que nous n’aurions pas interrogé ces associations sur la question de l’incinération.

Tous les sénateurs présents à l’audition des responsables de l’une de ces associations se souviennent que, en réponse à une question sur le stockage et l’incinération, il nous a été affirmé, d’un air un peu pincé, d'ailleurs, qu’il n’était pas question de choisir « entre la peste et le choléra ». (Sourires.)

Cette réponse ne serait qu’anecdotique, madame la secrétaire d'État, si les responsables de certaines de ces associations ne siégeaient pas dans ce qui constitue aujourd’hui une instance essentielle pour l’élaboration des politiques environnementales, à savoir le Comité national du développement durable et du Grenelle de l’environnement, ainsi d’ailleurs qu’au Conseil national des déchets, d’où on a exclu certains anciens membres pour permettre auxdits responsables d’y faire leur entrée !

Il est clair que l’étroite implication des associations dans les processus décisionnels – une innovation majeure du Grenelle de l’environnement – ne peut perdurer que si celles-ci font preuve d’un esprit de responsabilité, d’honnêteté et d’objectivité. Or ce n’est pas le cas de toutes.

Madame la secrétaire d'État, j’ajoute, à ce sujet, que la mission unanime souhaite instamment que, enfin, les scientifiques soient davantage associés à ces processus décisionnels, au titre de la société civile.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Dominique Braye, président de la mission commune d’information. Ces scientifiques sont laissés sur le côté depuis beaucoup trop longtemps. Il faut absolument les réintroduire dans l’élaboration des décisions.

M. Gérard César. Très bien !

M. Dominique Braye, président de la mission commune d’information. Sur l’ensemble de ces constats et de ces recommandations, nous recueillerons avec intérêt l’avis du Gouvernement.

Je profite enfin de l’occasion qui nous est donnée, madame la secrétaire d'État, pour vous demander, devant Gérard Miquel, de nous informer sur le récent rejet par la commission consultative d’agrément d’Éco-Emballages de l’enveloppe financière de 640 millions d’euros. Les élus contestent vivement, et à juste titre d’ailleurs, le montant de cette enveloppe : ils estiment qu’elle ne correspond pas à 80 % des coûts nets d’un service public « optimisé », terme que nous avons été contraints d’inscrire dans la loi, contre notre volonté, dois-je le préciser.

M. Gérard César. Tout à fait !

M. Dominique Braye, président de la mission commune d’information. Pouvez-vous nous indiquer votre position sur ce dossier très sensible pour les élus locaux, soumis à un coût de gestion des déchets sans cesse croissant et qui ne peuvent continuer à être les porteurs de mauvaises nouvelles auprès de leurs administrés ? (Très bien ! et applaudissements sur la plupart des travées.)

M. le président. La parole est à M. Jean Milhau.

M. Jean Milhau. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à adresser mes plus sincères félicitations à notre collègue Daniel Soulage pour l’excellent rapport qu’il nous a présenté. J’ai eu l’honneur de faire partie de cette mission commune d’information présidée par notre collègue Dominique Braye et je peux témoigner de l’important travail de terrain qui a été accompli. Depuis plusieurs mois, de nombreuses auditions ont été menées ; elles ont permis une analyse précise et pertinente du sujet.

J’espère que ce rapport constituera un élément de référence important pour les élus conduits à faire des choix en matière de gestion des déchets ménagers. C’est le but que nous nous sommes fixé.

Toutes les décisions en la matière sont fondamentales pour nos collectivités, notamment en raison des enjeux, économiques, financiers et environnementaux qu’elles sous-tendent. Il est donc essentiel qu’elles soient prises de la façon la plus éclairée possible.

C’est la raison pour laquelle, je tiens à le préciser, nous nous sommes concentrés sur le traitement des déchets ménagers banals, qui relèvent des compétences des collectivités territoriales, communes et établissements publics de coopération intercommunale.

Les incertitudes nombreuses inquiètent les élus locaux. Elles concernent en particulier la difficulté à atteindre les objectifs des Grenelle I et II dont nous sommes tous d’accord pour souligner l’importance. Pour autant, il nous faut être réalistes et constater que les collectivités ont la plus grande peine à se plier aux nouvelles prescriptions. Dans les faits, il y a loin de l’objectif aux réalités.

De la même façon, la hiérarchie européenne des modes de traitement, qui donne la priorité à la prévention et à la valorisation matière, est louable dans l’objectif qu’elle se fixe. Toutefois, il est évident que sa mise en pratique pose un certain nombre de problèmes sur le terrain.

Le choix entre les différents modes de traitement des ordures ménagères résiduelles constitue un enjeu majeur pour les élus.

Il existe plusieurs systèmes de traitement et il ne faut pas stigmatiser tel ou tel procédé. Tous ont leur place en fonction des conditions locales – zone rurale ou milieu urbain – et des quantités à traiter.

Le rapport a tendance à beaucoup mettre en valeur l’incinération, ...