Mme Marie-Thérèse Hermange. Tout ce qui est excessif est insignifiant !

Mme Marie-Christine Blandin. Et vous voulez continuer ?

C’est le passé qui vous inspire : vous rêvez de productivisme débridé dans un État dérégulé. C’est vous qui n’avez pas vu que le monde a changé. Pas un mot pour les pauvres, les chômeurs, les expulsés, les gens en difficulté.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Ce n’est pas possible d’entendre cela !

Mme Marie-Christine Blandin. Pas un mot pour les classes moyennes, qui voient avec effarement le maintien des privilèges des plus riches, qui, eux, ne travaillent pas et ne se lèvent pas tôt. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) Pas un mot pour la diversité culturelle, qui est notre richesse.

Il nous faut du lien : vous mettez les associations au pain sec.

Il nous faut de la solidarité : vous privatisez les dispositifs sociaux : hier la réalité de la retraite par répartition, demain la sécurité sociale ?

Mme Marie-Thérèse Hermange. Paroles, paroles !

M. le président. Je vous prie de conclure, madame Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le Premier ministre, les écologistes, en harmonie avec le groupe socialiste, voteront contre votre déclaration de politique générale, d’autant que les services rendus par la nature sont liquidés par le favoritisme du ministère de l’agriculture, complaisant avec les pesticides ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. –Protestations sur les travées de l’UMP.)

M. Jacques Blanc. Ces propos sont scandaleux !

M. le président. La parole est à M. Serge Larcher.

M. Serge Larcher. Monsieur le Premier ministre, j’ai écouté avec attention votre déclaration de politique générale et, à vrai dire, je n’ai rien entendu de nouveau. : ni pour les territoires de la République en général ni pour ceux de l’outre-mer en particulier.

Aussi, je m’efforcerai aujourd’hui d’être le porte-parole de l’outre-mer. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

M. Serge Larcher. Je m’y efforcerai, madame, même si, une fois encore, je crains que ce gouvernement, tellement semblable au précédent, ne soit également sourd et aveugle aux problèmes de cette France trop éloignée des cabinets parisiens.

Ce que nous, élus de l’outre-mer, n’avons de cesse d’attendre, c’est que le Gouvernement n’envisage pas nos pays comme des terres lointaines et exotiques, génératrices de charges pour la collectivité nationale.

Ce que nous voulons, c’est que vous compreniez réellement l’importance de leur singularité et de leurs apports spécifiques dans l’originalité de la construction du modèle français.

Ce que nous espérons, c’est que vous preniez enfin conscience que notre identité constitue non pas une menace, mais un atout pour la nation française et pour l’Europe. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Si j’insiste sur votre difficulté à comprendre l’outre-mer, c’est au regard de votre inaptitude à construire une vision et un dessein, à définir avec nous un projet pérenne, en vue du développement de ces territoires. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Or, ce projet est plus que jamais une urgence.

Les départements d’outre-mer cumulent un certain nombre de disparités économiques et sociales, et les inégalités avec la métropole demeurent importantes.

Je ne citerai que quelques chiffres.

La moitié des foyers dispose d’un revenu mensuel inférieur de 38 % à la moyenne nationale.

La proportion des personnes vivant sous le seuil de pauvreté est en progression et concerne un ménage sur cinq.

Le taux de chômage, deux à trois fois plus élevé dans nos régions que dans l’Hexagone, touche particulièrement les jeunes et s’établit pour ces derniers, en 2009, à environ 60 %.

La situation des seniors est également très préoccupante.

Ce sinistre tableau, largement aggravé par la sévérité de la crise mondiale, a eu un impact particulier dans nos régions déjà fragiles.

La mission commune d’information sur la situation des départements d’outre-mer, que j’ai eu l’honneur de présider, a mis l’accent sur les grands défis à relever pour et par les outre-mer. Elle a conclu sur cent propositions, dont s’est d’ailleurs largement inspiré le Conseil interministériel de l’outre-mer, le CIOM.

L’outre-mer est donc entendu, me direz-vous ! En apparence, oui. Mais le problème du rapport de l’État à l’outre-mer, ce n’est pas tant l’absence d’écoute : c’est l’inconstance !

Ainsi, en 2003, a été votée la loi Girardin, qui devait durer quinze ans.

Mme Lucette Michaux-Chevry. Vous ne l’avez pas votée ! (Mme Christiane Hummel applaudit.)

M. Serge Larcher. En 2008, cinq ans plus tard, le dispositif d’exonération des charges sociales et de défiscalisation est revu à la baisse, et ce sans évaluation préalable !

En 2009, la loi pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM, réécrit une nouvelle fois ces dispositifs. Et aujourd’hui, un an plus tard, ils sont remis en cause dans le projet de la loi de finances pour 2011, que nous examinons actuellement.

Il s’agit non plus de rabotage, monsieur le Premier ministre, madame la ministre de l’outre-mer, mais d’un véritable sabotage. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Je peux également citer l’exemple de la ligne budgétaire unique, la LBU, démantelée petit à petit alors qu’elle devait être sanctuarisée, le logement social demeurant l’une des priorités absolue pour les départements d’outre-mer.

Ce que nous demandons au Gouvernement, c’est que soit enfin mise en œuvre une politique lisible et, oserais-je dire, « durable » pour l’outre-mer, une politique qui ne place pas les acteurs, notamment les acteurs économiques, dans une situation d’insécurité juridique permanente.

D’ailleurs, ce sont souvent nos collectivités territoriales qui doivent pallier les insuffisances de l’État.

Ce que nous demandons au Gouvernement, c’est une politique prenant réellement en compte la caractéristique de la situation financière difficile de nos collectivités territoriales, qui est la faiblesse de la fiscalité locale directe eu égard à notre retard de développement.

Je tiens à rappeler ici que j’ai demandé que soient organisés des états généraux des finances locales dans nos régions, ce thème n’ayant pas été traité dans le cadre des états généraux de l’outre-mer.

J’attends une réponse du Gouvernement à ce sujet.

Nous serons également extrêmement vigilants quant à votre capacité à nous défendre ou non dans le cadre européen.

M. le président. Je vous prie de conclure, monsieur le sénateur.

M. Simon Sutour. M. Longuet, lui, a dépassé de deux minutes !

M. Serge Larcher. Dans le contexte actuel des accords andins et de l’ouverture intégrale du marché européen aux États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, les ACP, ce sont l’ensemble des productions agricoles des départements d’outre-mer qui sont menacées de disparition : la banane, le sucre, le rhum et le riz guyanais.

Pour conclure, monsieur le Premier ministre, j’ai dit ce que les outre-mer attendent, mais leurs élus, que je représente, et, au-delà, leurs populations ne peuvent accorder leur confiance à un gouvernement dont les orientations et les actes démontrent qu’il n’y a rien, en tout cas pas grand-chose, à espérer ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Le Sénat va procéder au vote sur la déclaration de politique générale du Gouvernement.

En application de l’article 39, alinéa 2, du règlement, le scrutin public est de droit.

En application de l’article 60 bis, alinéa 3, du règlement, il va être procédé à un scrutin public à la tribune, dans les conditions fixées par l’article 56 bis du règlement.

J’invite MM. Alain Dufaut et Daniel Raoul, secrétaires du Sénat, à superviser les opérations de vote.

Je vais tirer au sort la lettre par laquelle commencera l’appel nominal.

(Le sort désigne la lettre J.)

M. le président. Le scrutin sera clos quelques instants après la fin de l’appel nominal.

Le scrutin est ouvert.

Huissiers, veuillez commencer l’appel nominal.

(L’appel nominal a lieu.)

M. le président. Le premier appel nominal est terminé.

Il va être procédé à un nouvel appel nominal.

(Le nouvel appel nominal a lieu.)

M. le président. Plus personne ne demande à voter ?...

Le scrutin est clos.

J’invite MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 110 :

Nombre de votants 334
Nombre de suffrages exprimés 333
Majorité absolue des suffrages exprimés 167
Pour l’adoption 180
Contre 153

Le Sénat a approuvé la déclaration de politique générale du Gouvernement. (Mmes et MM. les sénateurs de lUMP se lèvent et applaudissent. – M. Aymeri de Montesquiou applaudit également.)

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Roland du Luart.)

PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

5

Démission d'un questeur du Sénat

M. le président. J’informe le Sénat que M. le président du Sénat a reçu une lettre, en date du 25 novembre 2010, par laquelle M. Philippe Richert, qui a été nommé, par décret du 14 novembre 2010, ministre chargé des collectivités territoriales, lui a fait connaître sa décision de se démettre de sa fonction de questeur du Sénat.

La conférence des présidents fixera la date à laquelle il sera procédé à son remplacement dans cette fonction.

6

Vote sur l'ensemble de la première partie (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2011
Deuxième partie

Loi de finances pour 2011

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2011
Action extérieure de l'État

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 110 rectifié, rapport n° 111).

Nous en sommes parvenus aux dispositions de la seconde partie du projet de loi de finances.

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

M. le président. Nous allons commencer l’examen des missions.

Action extérieure de l'État

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2011
Demande de priorité

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » (et article 67).

La parole est à M. le rapporteur spécial, éminent rapporteur spécial ! (Mme Nathalie Goulet applaudit.)

M. Jean-Pierre Plancade. Très éminent !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la commission des finances. Si j’avais encore des doutes sur ma qualité, je n’en ai plus ! (Sourires.)

Madame le ministre d’État, je veux vous dire le plaisir que j’ai à vous retrouver au banc du Gouvernement en tant que ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes…

Mme Nathalie Goulet. C’est vrai !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. … et l’honneur qui m’est fait de rapporter votre premier budget à ce titre. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.) Je crois que le Sénat partage ma satisfaction…

En ces temps de rigueur budgétaire, un premier regard sur les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » pourrait donner l’impression que le ministère des affaires étrangères et européennes est relativement privilégié, ce qui serait pour vous, madame le ministre d’État, une bonne chose.

En effet, à périmètre constant, les crédits de la mission progressent de 2,1 % en autorisations d’engagement, pour s’élever à 2,962 milliards d’euros, et de 3,7 % en crédits de paiement, pour atteindre 2,965 milliards d’euros.

Cependant, ce constat mérite d’être relativisé.

Tout d’abord, le Quai d’Orsay, qui a commencé à réduire ses effectifs dès 2006, soit trois ans avant l’application de la RGPP, la révision générale des politiques publiques, à l’ensemble des ministères, poursuit son effort en la matière. Pour l’année 2011, il sera dans la norme commune : avec 160 suppressions d’emplois, ce qui correspond à environ la moitié des départs en retraite prévus cette même année, soit 282 équivalents temps plein travaillés, dits emplois ETPT. Mais, bien que ce ministère ait déjà perdu 10 % de ses effectifs, il ne sera pas exonéré de la deuxième vague de la RGPP. Ainsi, il devra supprimer 450 nouveaux emplois sur les deux années 2012 et 2013.

Permettez au rapporteur spécial de la commission des finances de saluer une nouvelle fois la démarche du ministère et la volonté de rigueur qui l’anime depuis plusieurs années. Il y avait du chemin à parcourir, et un grand chemin a été parcouru.

Ces suppressions d’emplois se sont accompagnées d’importantes réorganisations, que j’ai déjà eu l’occasion de décrire devant vous. Mais, pour la seconde fois, je me demande néanmoins – je sais que vous serez attentive à cette observation, madame le ministre d’État – si nous n’allons pas bientôt atteindre les limites de l’exercice, voire si nous ne les avons déjà pas atteintes. Des marges de progression existent sans doute encore, peut-être au sein du réseau culturel, voire dans le réseau consulaire, certains postes pouvant être supprimés en ce qu’ils correspondent à une réalité qui est maintenant dépassée.

Cela dit, si l’on persistait en ce sens, la question du maintien de l’universalité du réseau, à laquelle vous connaissez tous, me semble-t-il, mon attachement, se posera inexorablement à moyen terme.

D’ailleurs, selon les informations qui m’ont été communiquées, si les réductions d’effectifs de la trentaine de « postes de présence diplomatique » sont sur le point d’être finalisées – l’effectif moyen de ces « ambassades » au format réduit se situe entre 11 et 12 ETPT –, la redéfinition des missions de ces postes n’est pas encore, à ma connaissance, intervenue. Or elle est essentielle. Il ne s’agirait pas d’avoir les mêmes objectifs et les mêmes ambitions et de vouloir offrir le même type de prestations qu’auparavant, simplement dégradées du fait de la diminution des emplois. Mieux vaut, madame le ministre d’État, analyser clairement la situation et redéfinir les missions de ces ambassades.

Sur les autres crédits du programme « politique » du ministère – programme 105, Action de la France en Europe et dans le monde –, le mouvement le plus notable – je tiens à le souligner pour m’en réjouir – concerne les participations de la France aux organisations internationales, OI, et aux opérations de maintien de la paix, OMP.

Les crédits affectés à ce titre passent de 738,6 millions d’euros en 2010 à 842,6 millions d’euros en 2011, soit une hausse de plus de 14 %, ce qui est significatif. La principale cause de ce « recalibrage » est la prise en compte d’un taux de change euro/dollar beaucoup plus réaliste : 1,35 dollar pour un euro au lieu de 1,56 dollar auparavant. Actuellement, l’euro doit fluctuer entre 1,35 et 1,42... J’ai assez insisté dans le passé sur la nécessité de présenter des chiffres sincères pour ne pas me féliciter de cette prise en compte du taux de change.

Toutefois, il s’agit là de crédits contraints, reflétant des obligations auxquelles la France ne saurait se soustraire et dont le Quai d’Orsay ne peut bien sûr disposer librement. Il ne faut donc pas que l’augmentation de ces crédits fausse la vision que nous avons des moyens du ministère.

En matière culturelle, plusieurs points sont à signaler que je veux rappeler, sans trop insister car j’ai eu l’occasion de le faire dans le passé.

En premier lieu, la maquette et le nom du programme 185 ont été modifiés. On parle non plus de Rayonnement culturel et scientifique, mais de Diplomatie culturelle et d’influence.

En outre, ce programme rassemble tous les crédits dédiés à cette politique, alors qu’auparavant seuls les crédits culturels destinés aux pays « OCDE » y figuraient, les actions conduites dans les pays en développement relevant alors du programme 209. Le nouveau découpage me paraît, je tiens à le dire, plus pertinent et je souscris à ce changement.

En termes opérationnels, l’année 2011 verra la mise en place concrète des deux établissements publics créés par la loi de juillet dernier relative à l’action extérieure de l’État.

Le premier d’entre eux est l’Institut français, qui succédera à CulturesFrance. Il y a eu dans cette assemblée des débats extrêmement importants, fructueux et riches que je n’ai pas besoin de rappeler.

J’ai depuis longtemps plaidé pour une réforme profonde de notre politique culturelle extérieure ; je ne peux donc que me féliciter de ce changement dans notre paysage administratif.

Néanmoins, comme pour toute réforme, la mise en œuvre effective est au moins aussi importante, sinon plus, que le cadre législatif que nous avons fixé ici.

En l’occurrence, je tiens à le rappeler, pour que la réforme produise son plein effet et pour que le nouvel Institut français ait donc réellement l’efficacité que nous attendons, madame le ministre d’État, il faut que votre ministère affirme et montre constamment son intérêt – ce dont je ne doute pas – et son engagement en faveur de cet institut.

Mais il faut aussi – c’est là l’originalité – que d’autres ministères s’engagent à vos côtés : je veux citer une nouvelle fois le ministère de la culture et, bien entendu, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ils ont déjà – je le sais car cela nous avait été dit par votre prédécesseur, madame le ministre d’État, et peut-être pourrez-vous nous le confirmer – marqué leur volonté d’avancer dans ce domaine-là en mettant à votre disposition un certain nombre d’emplois, de crédits aussi, ils sont décidés, semble-t-il, à sortir de leur magnifique isolement. Mais je souhaite que ce point-là soit affirmé, parce que c’est l’une des conditions du succès.

Je veux rappeler que le Sénat, unanime je crois, a souhaité le rattachement le plus rapide possible du réseau à la nouvelle agence.

Pour l’heure, la loi prévoit la mise en place de l’expérimentation, sur trois ans, d’un tel rattachement, dans une dizaine de pays, mais les volontaires étant plus nombreux que prévu, semble-t-il, l’expérimentation pourrait être menée dans un plus grand nombre de pays. Vous nous le confirmerez ou vous nous l’infirmerez, madame le ministre d’État.

Le second établissement public qui a été créé est CampusFrance, qui regroupera l’association Egide et l’actuel GIP CampusFrance.

Après l’audition organisée le 13 octobre dernier par la commission des finances, je me contenterai de souscrire une nouvelle fois aux recommandations de la Cour des comptes.

Dans l’immédiat, il convient d’assurer au mieux les conditions matérielles de la fusion, en particulier le choix du siège. Les relations financières de l’opérateur avec l’État devront ensuite être redéfinies dans un cadre conventionnel et de manière appropriée. Enfin, les tutelles de l’opérateur, qui ne devront être que deux – il avait été question d’une troisième tutelle, à laquelle, je le dis tout de suite, je ne suis pas pour ma part favorable –, devront apprendre à travailler ensemble sur un sujet d’importance qui est l’attractivité de notre enseignement supérieur. Madame le ministre d’État, permettez-moi d’appeler votre attention et votre vigilance sur ce dossier.

Je dois vous le dire, l’audition que nous avons faite des parties concernées par ce nouvel opérateur nous a démontré qu’il y avait beaucoup de chemin à parcourir, tellement il paraissait ignorer l’objectif que pourtant le Parlement avait clairement fixé. Mais je sais que votre vigilance et votre fermeté s’exerceront aussi dans ce domaine-là.

S’agissant de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, sa subvention reste fixée à 420,8 millions d’euros. Comme je l’ai détaillé dans mon rapport écrit, ce niveau, élevé dans l’absolu, ne permet pas à cet opérateur d’absorber une charge pour pensions civiles qui devrait passer de 142 millions d’euros à près de 160 millions d’euros en 2013.

En conséquence, une forte dynamisation des ressources propres, en particulier de la participation à la rémunération des résidents, en d’autres termes une contribution adossée aux frais de scolarité, paraît inéluctable.

En l’état actuel des estimations de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’accroissement devrait être de près de 24 %, ce qui représente un effort considérable en recettes et affecte la croissance de ladite recette à la couverture de la pension civile, au détriment d’autres besoins de dépenses de l’Agence, en particulier immobiliers. Il s’agit, je tiens à le dire, de besoins qui sont substantiels et qu’il convient évidemment de prendre en compte.

Nous aurons à examiner tout à l’heure un amendement de M. André Ferrand qui a été cosigné par un certain nombre de collègues et qui devrait nous permettre d’aborder la question de la capacité d’endettement de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger pour faire face à ses missions. Puisque l’État a confié à l’Agence la responsabilité de l’immobilier, il faut bien qu’elle puisse exercer sa mission. Cela exige quelques précautions ou quelques entorses à un principe auquel, en effet, nous tenons ; nous y reviendrons tout à l’heure.

À propos du programme 151, Français à l’étranger et affaires consulaires, je me contenterai de souligner la progression continue de la prise en charge des frais de scolarité, la PEC, et des bourses.

Le coût total devrait passer de 107 millions d’euros à 119 millions d’euros l’an prochain. Cette hausse continue, tirée notamment par la forte augmentation des frais pratiqués par les établissements, apparaît difficilement supportable dans un cadre budgétaire contraint.

Nous en reparlerons lors de la discussion des articles, tout comme nous évoquerons la prise en charge des adhésions dites « de troisième catégorie », dont peuvent bénéficier les plus défavorisés de nos compatriotes établis hors de France, à la Caisse des Français de l’étranger. C’est un sujet dont notre collègue Jean-Pierre Cantegrit nous parlera tout à l’heure. Les amendements nous donneront la possibilité de revenir sur toutes ces questions importantes.

Je terminerai cette présentation par quelques mots sur le programme 332, Présidence française du G20 et du G8, dont la création est proposée par le présent projet de loi de finances.

Comme son nom l’indique, ce programme doit permettre de retracer les dépenses engagées au titre de la préparation et de la tenue des sommets, sur le modèle de ce qui a été fait, au sein de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », pour la présidence française de l’Union européenne en 2008.

Hors dépenses de sécurité, qui resteront à la charge du ministère de l’intérieur, le budget prévu s’élève à 60 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 50 millions d’euros en crédits de paiement, ce qui semble raisonnable, voire ambitieux dans le sens de la rigueur ; on y reviendra peut-être.

Il s’agit d’un budget relativement modique et, madame le ministre d’État, la gestion du Quai d’Orsay devra être rigoureuse, afin de rester au sein de cette enveloppe.

Au terme de cette analyse, mes chers collègues, au nom de la commission des finances, je vous invite à adopter sans modification les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ». En revanche, je le dis tout de suite, je vous proposerai deux amendements sur les articles rattachés. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis.

M. André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, les principaux éléments de l’action diplomatique sont regroupés dans le programme 105, Action de la France en Europe et dans le monde. Il augmente de 6,6 % pour 2011. Cette progression est, pour l’essentiel, consacrée à un meilleur financement des opérations de maintien de la paix, OMP, menées dans le cadre des Nations unies. En effet, sur les 112,4 millions d’euros supplémentaires affectés à l’ensemble de ce programme, 80 millions leur sont consacrés.

L’an dernier, j’avais souligné combien la croissance des financements requis par ces opérations de maintien de la paix, comme par les contributions obligatoires dues aux organisations internationales, pesait sur les ressources du programme 105. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées se félicite d’une meilleure prévision budgétaire, dès la loi de finances initiale, du montant financier d’engagements auxquels la France ne peut se soustraire.

Je rappelle que la France participe, par l’envoi de personnels, à neuf des seize opérations de maintien de la paix déployées et qu’elle en est le cinquième contributeur, à hauteur de 7,5 % du financement.

Les contributions obligatoires et les opérations de maintien de la paix ont représenté, en 2009, 70 % de la consommation des crédits du programme 105, hors dépenses de personnel, avec une part respective de 36 % et de 34 %.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées se félicite également de la stabilisation des crédits d’intervention affectés à la coopération de sécurité et de défense, à 35 millions d’euros, alors qu’ils avaient été réduits en 2008 et 2009.

Les priorités géographiques de cette coopération sont, tout d’abord, et pour des raisons évidentes découlant de l’actualité récente, les pays de la zone sahélienne : Niger donc, Mauritanie et Mali.

Parmi les seize écoles militaires existant en Afrique, consacrées à la formation du maintien de la paix, la France soutient particulièrement celles qui sont installées au Mali, au Bénin et au Cameroun.

Il s’agit là d’une coopération de long terme, appuyant des écoles nationales, qui ont un rayonnement régional, et dont le coût est inférieur à la venue de stagiaires en France.

Les crédits affectés au programme 151, Français à l’étranger et affaires consulaires progressent de 5,4 %. L’offre d’un service public de qualité aux Français de l’étranger, qui regroupe l’action consulaire, progresse de 6,6 % et représente près de 54 % du montant total du programme. Ces sommes sont consacrées à l’accès aux services administratifs pour nos compatriotes de l’étranger, à l’aide sociale qui peut leur être apportée en cas de besoin et à l’animation du réseau consulaire, qui s’appuie, de façon croissante, sur nos consuls honoraires.

Vous trouverez dans mon rapport écrit une analyse de la restructuration de ce réseau consulaire, marquée par l’émergence de « pôles régionaux » ayant vocation à concentrer les tâches de gestion les plus lourdes.

C’est l’accès des élèves français au réseau de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, AEFE, qui bénéficie de la plus forte augmentation, avec 13,5 millions supplémentaires, soit une croissance de 13 %. L’élément problématique contenu dans cette action touche, vous le savez, à la prise en charge par l’État des frais de scolarité des élèves français des classes de lycée.

La commission des finances du Sénat a souhaité, dès l’origine, l’encadrement de cette mesure ; nous l’avons soutenue dans cette démarche.