M. le président. La parole est à M. Marc Laménie.

M. Marc Laménie. Madame la ministre, je vous remercie de vos informations. Vous avez insisté sur la notion d’éthique : les nombreux bénévoles membres des amicales de donneurs de sang, dont je suis un modeste porte-parole, sont légitimement préoccupés par cette dimension, mais vos propos et les engagements du Gouvernement devraient les rassurer pour l’avenir.

Nous sommes tous attachés au don de soi, au don pour les autres et au principe de gratuité. Je vous remercie donc de votre réponse.

exonération des heures supplémentaires des enseignants

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 1107, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.

M. Yves Détraigne. Je souhaite appeler attention du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative sur la rémunération des heures supplémentaires effectuées par les personnels enseignants pour le compte et à la demande des collectivités territoriales, ainsi que sur la mise en œuvre de leur défiscalisation.

En effet, la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA », et son décret d’application n° 2007-1430 du 4 octobre 2007 précisent que les heures supplémentaires effectuées, à la demande des collectivités territoriales, par les enseignants conformément au décret n° 82-979 du 19 novembre 1982 sur la surveillance, les études surveillées et l’enseignement entrent dans le champ de l’exonération.

En conséquence, l’exonération des charges – contribution sociale généralisée et contribution au remboursement de la dette sociale – doit être imputée sur la retenue pour pension, puisqu’il faut que l’URSSAF continue à encaisser les montants dus.

Sur le principe, il est donc demandé aux collectivités territoriales d’avancer ces sommes, qui doivent leur être remboursées, chaque trimestre, à compter de l’exercice 2010, par le ministère de l’éducation nationale, sur présentation d’états justificatifs.

Pour l’heure, il semblerait toutefois que ni les inspections d’académie ni les rectorats n’aient reçu d’instruction en ce sens de la part du ministère.

Ils ont au contraire reçu, le 19 juillet dernier, une circulaire du ministre chargé du budget, laquelle précise que « le remboursement est assuré par le ministre de tutelle […] pour les collectivités territoriales […] et par le ministère de rattachement du corps d’origine du fonctionnaire de l’État détaché exerçant pour tout ou partie de son activité au sein de la collectivité territoriale […] ».

Ainsi, il semblerait que le remboursement ne puisse concerner que les fonctionnaires de l’éducation nationale en détachement auprès des collectivités territoriales ou leurs établissements publics, et non les enseignants en activité à l’éducation nationale qui y font des heures supplémentaires.

Dans ces conditions, il est à craindre que beaucoup de collectivités cessent de recourir à des personnels enseignants pour assurer les activités périscolaires, ce qui ne manquerait pas de créer de nombreuses difficultés avec ces professionnels, voire d’entraîner la disparition des activités périscolaires que l’éducation nationale tend pourtant à encourager.

Je vous saurai donc gré, madame la ministre, de bien vouloir m’indiquer si M. le ministre de l’éducation nationale compte intervenir auprès de son collègue chargé du budget pour faire abroger la circulaire du 19 juillet dernier et la remplacer par une nouvelle circulaire conforme à l’esprit du décret de 1982. En attendant, je peux vous confirmer que les collectivités locales n’entendent pas faire l’avance des cotisations si elles n’ont pas la garantie de leur remboursement.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. Avant tout, monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, qui est retenu par d’autres obligations.

Vous attirez son attention sur les exonérations relatives aux heures supplémentaires versées aux enseignants, plus précisément aux heures qu’ils effectuent à la demande des collectivités territoriales à des fins diverses.

L’article 1er de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA », vise les agents publics qui voient l’essentiel de leurs heures supplémentaires bénéficier de l’exonération de l’impôt sur le revenu et d’une réduction de cotisations salariales de sécurité sociale. L’agent bénéficiaire perçoit le montant brut des heures supplémentaires effectuées et l’employeur continue de s’acquitter des cotisations sociales légales auprès des organismes sociaux.

De ce mécanisme résulte pour l’employeur une charge budgétaire supplémentaire, dont le financement et le circuit de compensation doivent être déterminés selon les cas.

Dans un premier cas – celui des personnels rémunérés sur budget ministériel et assurant des heures supplémentaires dans leur département ministériel d’origine –, les ministères employeurs ont bénéficié en 2008 et 2009 d’un remboursement a posteriori de cette charge supplémentaire à partir d’une provision suivie par le ministère chargé du budget. À compter de l’exercice 2010, le surcoût est, en revanche, financé directement sur les budgets ministériels. La mise en œuvre de ces dispositions de compensation ouvertes au budget du département de l’éducation nationale ne pose pas de problème particulier.

Dans un second cas – celui des personnels fonctionnaires de l’État détachés et exerçant tout ou partie de leur activité au sein des établissements publics de l’État, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics ainsi que des établissements hospitaliers ou médico-sociaux –, comme le prévoit une circulaire du ministre chargé du budget en date du 19 juillet 2010, la charge supplémentaire que représente l’acquittement des cotisations sociales doit être remboursée par le ministère de rattachement du corps d’origine du fonctionnaire concerné.

Monsieur le sénateur, aucun de ces deux dispositifs de financement et de compensation ne s’applique toutefois au cas particulier sur lequel vous interrogez le ministre de l’éducation nationale : celui des heures supplémentaires effectuées par une part importante des 300 000 instituteurs et professeurs des écoles françaises et payées par plusieurs milliers de communes.

En effet, ce sont principalement des enseignants du premier degré qui sont concernés par le versement de ces heures supplémentaires exonérées. Au-delà de leurs obligations professionnelles normales, ils assurent des heures de soutien scolaire pour le compte et à la demande des collectivités territoriales.

Au titre de ces activités, les enseignants ne sont en aucun cas détachés auprès des communes qui les emploient, les collectivités territoriales n’étant que leurs employeurs secondaires. En outre, les services de l’éducation nationale n’interviennent nullement dans la certification du service rendu à cette occasion ni dans la liquidation de ces heures, puisque les communes assurent, sur leur propre budget, le paiement direct aux agents des heures supplémentaires.

C’est en ce sens que le ministre de l’éducation nationale a récemment saisi le ministre en charge du budget afin que soit déterminée, en lien avec le ministre chargé des collectivités territoriales, la procédure budgétaire selon laquelle les collectivités seront remboursées, le cas échéant, du surcoût lié aux réductions de cotisations décidées dans le cadre de la loi TEPA.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que nous serons particulièrement attentifs à trouver une solution adaptée à cette question.

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Vous avez parfaitement ciblé le problème que je soulevais, madame la ministre, et je vous remercie de cette réponse extrêmement claire. Je la diffuserai aux collectivités territoriales, qui sont tout particulièrement concernées et qui s’interrogent sur ce sujet. J’ai bien noté que certains points étaient encore à régler et j’espère qu’ils le seront rapidement. En effet, nous arrivons à la fin de 2010 et ce dispositif était censé entrer en vigueur dès le début de cette année.

M. le président. Madame la ministre, je vous remercie d’avoir répondu ce matin à pas moins de huit questions ! (Sourires.)

problèmes de harcèlement moral dans les postes à l'étranger

M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage, auteur de la question n° 1106, adressée à Mme le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.

Mme Claudine Lepage. Depuis quelques années, les cas de harcèlement moral, qui se multiplient, sont dénoncés. Sont-ils les symptômes d’une époque, d’un malaise individuel ou général ? Les analyses divergent sur l’interprétation de cette forme inédite de violence.

Pour ma part, je remarque que plus de 50 % des plaintes pour harcèlement moral sont déposées par des membres de la fonction publique.

Dans une décision rendue le 12 mars dernier, le Conseil d’État a reconnu à une fonctionnaire victime de harcèlement moral le bénéfice de la protection fonctionnelle instituée par la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

Cette décision confirme la réponse ministérielle apportée, en juillet 2008, à une question écrite du sénateur Alain Gournac : « L’octroi de [cette] protection entraîne l’obligation pour l’administration, dès qu’elle a connaissance des faits de harcèlement, de mettre en œuvre, sans délai, tous les moyens de nature à faire cesser ces agissements. Dans ces conditions, il lui appartient d’engager des poursuites disciplinaires à l’encontre de l’auteur du harcèlement, de l’éloigner de l’agent victime et de rétablir l’agent dans ses droits […]. »

Mais qu’en est-il pour le fonctionnaire en poste à l’étranger ?

Des informations ou des témoignages que j’ai pu recueillir lors de mes visites aux communautés françaises de l’étranger montrent que celles-ci ne sont pas exemptes de cas de harcèlement moral. Pourquoi le seraient-elles, d’ailleurs ? Parfois, les conséquences sont gravissimes. Plusieurs suicides ou tentatives de suicide ont été constatés à travers le monde.

Nous nous devons de prendre conscience du handicap supplémentaire des agents en poste à l’étranger, à savoir leur éloignement géographique de la France – donc de leur administration de rattachement –, mais aussi, pour les petits postes d’une dizaine d’agents, l’isolement social et l’impression qu’ont les fonctionnaires de vivre en vase clos, loin de leurs familles et de leurs amis. Quand, en outre, ils résident dans un pays hostile, où règne l’insécurité, cela ne fait qu’ajouter à leur stress.

Les conflits entre agents ont toujours existé – on ne les a pas créés avec la révision générale des politiques publiques –, mais quand les suppressions de postes pleuvent, quand elles constituent une menace guettant chacun, la propension à l’affrontement augmente.

Dans ces conditions, quelle aide recevoir en cas de mal-être au travail, de souffrance, de harcèlement moral ?

Les différents cas de harcèlement moral constatés me semblent donc justifier la création d’un bureau de la médiation apte à répondre aux plaintes venues de tous les pays.

Ce bureau qui, dans une exigence de neutralité, rendrait compte, au sein du ministère, à la direction générale de l’administration – la DGA –, et non à la direction des ressources humaines, pourrait agir pour apaiser les conflits par le dialogue, le conseil, la médiation. Il pourrait mettre en contact les interlocuteurs, ou proposer une orientation vers un psychologue, voire vers un syndicat, apte à apporter son aide dans le cadre d’une action en justice, si celle-ci se révèle nécessaire.

Que pensez-vous, monsieur le ministre, de la création d’un tel bureau de la médiation, destiné tant à la résolution des conflits, quels qu’ils soient, qu’à la prévention du harcèlement – ce dernier débute souvent par une série de conflits qui ne se règlent pas et s’enveniment – et permettant aux protagonistes de retrouver un quotidien serein ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Wauquiez, ministre auprès de la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé des affaires européennes. Permettez-moi tout d’abord, madame la sénatrice, de vous remercier d’avoir posé cette question, qui aborde un sujet très important : les cas de harcèlement moral dans la fonction publique, plus particulièrement chez les fonctionnaires français à l’étranger.

Michèle Alliot-Marie, qui n’a pu être présente ce matin du fait d’un déplacement – je vous prie d’excuser son absence –, attache une très grande importance à la gestion des ressources humaines de son ministère, l’expatriation répétée des agents, comme vous l’avez indiqué, pouvant conduire à des situations humaines douloureuses.

Dans les situations décrites sous le terme générique de harcèlement moral, on peut effectivement trouver d’autres composantes – problèmes liés au stress, à la vie familiale, à la gestion des déplacements, aux difficultés à assurer au mieux ses missions dans un contexte évolutif. Ces difficultés peuvent être exacerbées dans une situation d’expatriation, la transplantation dans un nouveau pays ou une nouvelle culture venant s’ajouter au choc du nouveau poste.

Nos équipes de gestion des ressources humaines ont donc développé des outils particulièrement innovants, qui constituent l’une des particularités du ministère des affaires étrangères et européennes.

Tout d’abord, pour repérer les problèmes, il faut les connaître ! Une politique de prévention a été développée, reposant sur la formation des agents : gestion d’équipe, traitement du stress, préparation spécifique au départ dans les postes. Ces dispositifs, reliés à une évaluation « à 360 degrés » que le ministère des affaires étrangères et européennes est le seul à mettre en œuvre au sein de la fonction publique, sont autant d’outils visant à prévenir les situations problématiques, plutôt qu’à les corriger a posteriori.

En outre, lorsqu’une situation paraît préoccupante, l’inspection générale, qui dépend directement du ministre, dépêche une mission sur place. Nous nous appuyons également sur le travail d’un psychologue, rattaché à la direction des ressources humaines, qui se tient à l’écoute des agents et n’hésite pas à effectuer des missions sur le terrain.

Bien évidemment, si un comportement inacceptable est avéré, le ministère engage une procédure disciplinaire à l’encontre de l’agent fautif et l’autorité disciplinaire peut être amenée à prononcer une sanction. Je précise d’ailleurs que Michèle Alliot-Marie n’hésitera pas à intervenir dans des cas où le comportement fautif est constitutif d’un délit – c’est le cas du harcèlement moral –, le parquet pouvant même être saisi.

Enfin, un cadre a été mis en place pour le dialogue social dans les postes à l’étranger, en accord avec les organisations syndicales.

Quoi qu’il en soit, madame la sénatrice, vous avez raison : même si les situations de harcèlement moral restent – heureusement – très exceptionnelles, elles ne doivent pas être sous-estimées et méritent toutes une réponse. Dans ce domaine, c’est la tolérance zéro qui doit prévaloir !

M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage.

Mme Claudine Lepage. Les cas que nous évoquons ici, monsieur le ministre, sont effectivement très sensibles et difficiles à régler.

Parfois, pour les victimes, le plus grand ennemi est le silence. En effet, toutes n’ont pas d’interlocuteur. Voilà pourquoi l’idée d’un bureau de la médiation prenait, dans le contexte de l’expatriation, toute son importance.

Outre la question de la neutralité, indispensable aux victimes, il faut noter que les cas de harcèlement se multiplient parfois dans un même poste, provoquant une réaction en chaîne et une succession d’arrêts de travail, sans que l’administration réagisse, parce que, peut-être, elle n’est pas immédiatement consciente de ce qui se passe.

Par exemple, je suis le dossier d’un agent qui, plusieurs mois après l’arrêt sans motif de son contrat, à un mois de sa titularisation, n’a toujours pas obtenu réparation du préjudice subi. Dans un autre pays, le responsable harceleur a été rappelé à Paris huit mois après les faits…

Cela dit, monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je suis certaine que le ministère des affaires étrangères et européennes sera attentif à toutes ces situations douloureuses.

avenir des contrats aidés

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, auteur de la question n° 1086, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

M. Alain Fouché. Monsieur le ministre, je souhaite attirer l’attention de votre collègue Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé, sur la situation inquiétante des contrats d’accompagnement dans l’emploi – les CAE – et, plus généralement, des contrats aidés.

Voilà trois mois, le Gouvernement a décidé de mettre un terme au renouvellement des contrats aidés existants et à la signature de nouveaux contrats aidés.

Cette décision n’a pas été sans conséquences pour bon nombre de nos concitoyens, qui se sont retrouvés au chômage alors même que leur employeur avait la ferme volonté de prolonger leur contrat.

Les collectivités territoriales désirant poursuivre ces collaborations se sont, quant à elles, retrouvées dans l’obligation de se substituer à l’État, s’agissant du financement de ces projets.

Sont particulièrement concernés les demandeurs d’emploi, les jeunes et les personnes les plus fragiles, c’est-à-dire celles qui se trouvent en situation de réinsertion professionnelle.

Cette mesure avait permis aux collectivités, aux associations et aux entreprises, grâce aux aides précieuses de l’État, de recruter du personnel en vue d’une embauche définitive.

Si les financements ne peuvent s’inscrire dans la continuité, on peut s’interroger sur l’avenir de ce type de contrats et, plus globalement, sur celui des contrats aidés.

Monsieur le ministre, pouvez-vous m’indiquer quelles orientations prendra le Gouvernement sur ce sujet ? Êtes-vous en mesure de nous préciser si cette situation se reproduira en 2011 ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Wauquiez, ministre auprès de la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé, qui se trouve en déplacement et qui m’a demandé de le remplacer.

Je sais l’attention que vous portez à ces questions, qui sont à la croisée de deux de vos préoccupations : le rôle des collectivités locales, des mairies en particulier, en matière d’animation du territoire et les enjeux de cette politique en termes d’emploi. Ce sont des sujets que je connais un peu, ce qui me permettra de vous répondre directement.

Tout d’abord, en matière de contrats aidés, l’État a consenti, en 2010, l’effort le plus important de ces dix dernières années. Alors que la loi de finances prévoyait 410 000 contrats aidés, ce sont en fait plus de 520 000 contrats qui auront été conclus cette année avec l’État pour soutenir des collectivités locales, des associations et des chantiers d’insertion, afin que nous puissions, tous ensemble, relever le défi de l’emploi.

Toutefois, l’année 2010 a aussi été marquée par une surconsommation très importante des crédits qui avaient été consacrés à cette action par l’État. L’enveloppe initiale permettait de financer 400 000 contrats d’accès à l’emploi, ou CAE, et 120 000 contrats initiative emploi, ou CIE. Nous avons connu une surconsommation très importante, surtout à partir du mois de septembre dernier, avec un effet d’emballement. Il en est résulté que, au mois de novembre 2010, la totalité de l’enveloppe prévue pour l’année avait été consommée.

L’État n’a pas ménagé ses efforts, mais on ne peut pas laisser la machine s’emballer, au risque de devoir gérer des à-coups brutaux, ce que nous aurions dû faire en 2011 si nous n’avions pas tempéré la situation. Xavier Bertrand a donc été contraint de prendre des décisions de nature à calmer la machine à la fin de l’année 2010 et à permettre ainsi une transition qui soit la plus harmonieuse possible avec l’année 2011.

Monsieur le sénateur, dans un département que vous connaissez bien, la Vienne, près de 2 500 CAE ont été mobilisés, soit 55 % de plus qu’en 2008. Il a donc été décidé de prescrire des contrats aidés là où ils sont indispensables. Il s’agissait en priorité de ne pas suspendre les chantiers d’insertion, qui ont besoin de contrats aidés pour fonctionner, de porter une attention particulière aux auxiliaires de vie scolaire, notamment pour préserver la situation des enfants handicapés, laquelle fait également l’objet de vos préoccupations.

L’État pourra ainsi respecter ses engagements et reprendre la prescription de nouveaux contrats aidés dès le début de l’année 2011.

En résumé, nous financerons tous les contrats aidés qui ont été prévus et, à partir du tout début de l’année 2011, nous pourrons reprendre le mouvement de prescription qui permettra de relancer des contrats suspendus à la fin de l’année 2010.

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions, qui étaient indispensables et qui rassureront à la fois les collectivités et les associations. Votre action s’inscrit dans la continuité pour 2010 et dans la perspective d’une reprise pour 2011. Il était important de le rappeler, car cela ne correspond pas toujours ce que l’on peut entendre.

droit de recours des tiers en matière d'urbanisme

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle, auteur de la question n° 1100, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

M. Jean-Claude Carle. Je souhaitais appeler l’attention de M. le garde des sceaux sur la législation relative au droit de recours des tiers en matière d’urbanisme.

En effet, depuis plusieurs années, nous assistons à une multiplication impressionnante des recours à l’encontre de projets d’urbanisme. Si nombre de ces procédures semblent parfaitement justifiées, une certaine proportion d’entre elles paraît abusive. Notre législation se trouve donc détournée de sa finalité première.

Par ailleurs, cette hausse considérable des procédures n’a pas manqué de provoquer un engorgement des juridictions. Ainsi, le délai de jugement au tribunal administratif de Grenoble est aujourd’hui compris entre trois et quatre ans. En cas d’appel, puis de pourvoi en cassation, certains dossiers peuvent être pendants durant une période de dix ans, ce qui est très long. Et, dans l’intervalle, les projets d’urbanisme sont bien sûr à l’arrêt.

Il n’est en aucun cas question de remettre en cause le droit de recours des tiers en matière d’urbanisme. Il est vrai qu’une démocratie ne peut bien fonctionner sans la possibilité pour les citoyens de protéger leurs droits et leurs intérêts légitimes, c’est-à-dire sans droit de recours, mais l’abus ou le dévoiement de ce dernier doit être réprimé, et cela à la hauteur des préjudices subis par l’autre partie. Or il n’en est rien en France, où toute personne morale ou physique initiatrice d’un recours est à l’abri d’une sanction judiciaire, ce qui laisse la voie libre à des procédures abusives.

Il en va tout autrement chez nos voisins d’Europe du Nord, où il existe un droit de recours en matière d’urbanisme. Afin de prévenir les contentieux injustifiés, ces pays ont mis en œuvre plusieurs dispositions : le dépôt par l’auteur d’une procédure d’une caution financière préalable ; un examen rapide et rigoureux de la recevabilité du recours ; l’obligation d’un rendu de jugement dans des délais très courts ; des condamnations significatives pour les auteurs de recours reconnus comme abusifs.

En cette période d’incertitudes et de difficultés économiques, une plus grande efficacité de notre justice administrative permettrait de restaurer la confiance des porteurs de projets et garantirait la sauvegarde de nombreux emplois et entreprises.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, je souhaite savoir si le Gouvernement est disposé à faire évoluer notre législation.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur le sénateur, le législateur a toujours été soucieux de garantir la sécurité juridique des décisions prises en matière d’urbanisme, en raison de l’impact de celles-ci sur le plan économique, social ou environnemental.

Des conditions de recevabilité des recours propres au contentieux de l’urbanisme ont été introduites dans le code de l’urbanisme à cet effet. C’est ainsi que l’article L. 600-1 de ce code limite la possibilité d’invoquer devant le juge administratif, par voie d’exception, les vices de forme ou de procédure pouvant toucher certains documents d’urbanisme passé un délai de six mois à compter de la prise d’effet de l’acte en cause.

De même, l’article R. 600-1 prévoit une obligation de notification de certains recours à la charge du tiers requérant, au titulaire d’une autorisation et à l’auteur d’une décision d’urbanisme, sous peine d’irrecevabilité de la requête.

Par ailleurs, aux termes de l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme, l’action en démolition de l’immeuble fondée sur la violation des règles d’urbanisme ou des servitudes d’utilité publique ne peut être exercée par le tiers lésé que si le permis de construire a été annulé préalablement par le juge. Par conséquent, l’expiration du délai de recours pour excès de pouvoir, qui est en principe de deux mois, vient ici conditionner directement l’exercice de l’action en démolition, ce qui limite fortement les possibilités de recours.

Dans les hypothèses d’annulation du permis de construire par le juge administratif, il convient de souligner que le délai de prescription de l’action ouverte au tiers lésé a été réduit, par la loi no 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, de cinq à deux ans à compter de la décision définitive de la juridiction administrative ou de l’achèvement des travaux.

En outre, lorsqu’il se trouve en présence d’un recours qu’il estime abusif, le juge peut toujours faire application de l’article R. 741-12 du code de justice administrative, qui prévoit dans ce cas une amende de 3 000 euros. Il convient de rappeler, au demeurant, que les recours dirigés contre les autorisations d’urbanisme n’étant pas suspensifs, les projets contestés ne s’en trouvent aucunement bloqués.

L’ensemble de ce dispositif permet en l’état d’atteindre l’objectif de sécurité juridique précédemment évoqué. Il ne paraît donc pas nécessaire de le compléter, et ce notamment afin de ne pas porter atteinte de manière excessive au principe du droit au recours juridictionnel, protégé par l’article XVI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Au demeurant, d’autres dispositions procédurales, non spécifiques au contentieux de l’urbanisme, permettent un traitement rapide de certaines affaires et une mise en œuvre immédiate des décisions d’urbanisme : ainsi, les requêtes manifestement irrecevables peuvent être rejetées par simple ordonnance en application de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, de même que les requêtes qui ne comportent que des moyens inopérants.

Enfin, comme vous le savez, monsieur le sénateur, les délais de jugement des juridictions administratives ont été considérablement réduits dans la pratique. Toute priorité accordée au traitement d’un contentieux particulier entraînerait mécaniquement l’apparition d’un délai supplémentaire dans le traitement des autres contentieux, dont certains ne sont pas moins importants pour nos concitoyens.