restructuration des laboratoires de qualification biologique du don

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon, auteur de la question n° 1184, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé.

M. Francis Grignon. Madame la secrétaire d’État, la restructuration des laboratoires de qualification biologique du don, dits laboratoires QBD, a pour objectif le regroupement de l’activité de qualification des dons du sang sur quatre plateaux au lieu des quatorze laboratoires régionaux existants.

Concernant l’Alsace, ce projet comporte des risques en termes de disponibilité des produits puisque les échantillons prélevés à l’occasion des dons collectés dans cette région devront être acheminés en Haute-Savoie, à Metz-Tessy, soit à 550 kilomètres de Strasbourg.

La durée du trajet est estimée à cinq heures – hors « bouchons » ou intempéries –, auxquelles doivent être ajoutées huit heures d’analyses. Cela représente une forte augmentation du temps qui s’écoule avant la mise à disposition du produit. Or une poche de plaquettes doit être utilisée dans les cinq jours qui suivent le don.

Cette réforme aura également des conséquences en termes d’approvisionnement des hôpitaux alsaciens et donc, en fin de chaîne, pour les patients. L’augmentation des délais met en cause la qualité et la sécurité des produits sanguins.

Enfin, cette restructuration au niveau national a pour objectif d’aboutir à des coûts unitaires de QBD comparables à ceux de l’établissement régional le plus performant à l’échelle nationale, établissement qui n’est autre que l’établissement français du sang d’Alsace.

Madame la secrétaire d'État, pourquoi le Gouvernement impose-t-il à l’Alsace un changement d’organisation alors que son établissement français du sang est considéré comme un modèle pour fixer nos objectifs nationaux ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé. Monsieur le sénateur, vous avez appelé mon attention sur la restructuration des laboratoires de qualification biologique du don.

L’Établissement français du sang, EFS, a présenté un plan de mutualisation des plateaux de qualification biologique du don – plan prévu à l’article 12 du contrat d’objectifs et de performance signé le 2 septembre 2010 entre l’établissement et les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et du budget – le 10 novembre dernier au comité des directeurs et l’a transmis le même jour aux organisations syndicales siégeant au comité central d’établissement. Une première information officielle de ce dernier a eu lieu le 16 décembre suivant

Parmi la dizaine de plans d’action prévue par le contrat d’objectifs et de performance pour l’EFS, il s’agit du premier et du plus important. Ce contrat exige une réduction du coût du processus de qualification biologique du don de 15 % à son échéance. Les quatorze plateaux existants actuellement connaissent tous des organisations différentes et nécessitent des mesures d’harmonisation. Le coût de leur fonctionnement est connu ; il est d’autant plus élevé que le maillage territorial est important.

Le contrat d’objectifs et de performance ne définit pas le nombre de plateaux qui devront faire l’objet d’une mutualisation. L’EFS, après avoir mené une étude portant sur plusieurs scenarii prévoyant un nombre final de plateaux allant de trois à huit, a finalement retenu l’hypothèse du passage de quatorze à quatre plateaux interrégionaux.

Pour ce faire, un groupe de travail a œuvré jusqu’au mois de juillet 2010 ; des études complémentaires ont été rendues à la fin du mois suivant ; enfin, des propositions de localisations géographiques ont été faites au mois d’octobre dernier. Les localisations envisagées l’ont été en raison de leur intérêt logistique. Les régions retenues sont le Languedoc-Roussillon, avec Montpellier, le Nord, avec Lille, Rhône-Alpes, avec Annecy, Metz-Tessy, et Pays-de-Loire, avec Angers. Le premier regroupement sur Montpellier aura lieu en deux temps : la fermeture d’abord du plateau de Saint-Etienne, puis de celui de Marseille, au cours de cette année. Les autres regroupements se feront en 2012.

Le comité central d’établissement demandera à un cabinet d’experts de réaliser une expertise, avant que la position finale lui soit soumise au printemps 2011. Les localisations pressenties à l’heure actuelle ne sont donc pas complètement validées.

D’autres pays européens comparables à la France ont déjà fait l’expérience du regroupement de tels plateaux. Aucune difficulté particulière n’a été constatée lors de ces opérations, et la disponibilité des produits y est assurée sans problème.

Le projet actuel prend en compte la transmission des résultats dans les délais impartis, et les tubes doivent arriver au laboratoire interrégional dans un laps de temps ne pouvant excéder quatre heures. Même si dans quelques situations cette durée maximale est légèrement dépassée, il ne s’agit pas d’un facteur limitant. Dans tous les cas, il est prévu que les résultats soient transmis aux différents services de préparation au fur et à mesure de leur validation grâce au logiciel de laboratoire de qualification biologique du don. Les délais d’approvisionnement des hôpitaux alsaciens ne sont donc pas remis en cause ; ils resteront comparables à ceux que nous connaissons aujourd’hui.

Le fait que l’EFS-Alsace soit un modèle en matière de qualification biologique du don n’est pas contesté. Et c’est justement pour généraliser ces bonnes pratiques, monsieur le sénateur, que la mutualisation doit être opérée. La qualité et la sécurité des produits sanguins en seront renforcées.

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon.

M. Francis Grignon. Certes, Mme la secrétaire d’État, qui connaît très bien le dossier, a relaté avec force détails l’évolution du processus. Je suis cependant quelque peu déçu de constater que, bien que l’EFS-Alsace soit le meilleur, ma région doit se désengager en matière de don. Malgré toutes les concertations avec les syndicats, les directeurs, l’EFS précité m’a adressé un courrier dénonçant l’absence de logique dans le système envisagé.

approvisionnement et mise en œuvre des circuits courts

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly, auteur de la question n° 1151, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.

M. Gérard Bailly. Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur les possibilités de développement des circuits courts, plus particulièrement dans le domaine de l’agro-alimentaire.

La loi Grenelle 2 tout comme la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche ont attesté du bien-fondé et des aspects positifs de ce mode de commercialisation de proximité, pour ce qui concerne tant les économies de CO2 et les conditions de transport en cas de longues distances, que la valorisation des produits, plus attractifs pour les consommateurs et plus rémunérateurs pour les producteurs du fait des économies de manutention et de la limitation, voire de la suppression, des intermédiaires.

Si, aujourd’hui, des marchés existent – je pense notamment aux ventes à la ferme, où viennent s’approvisionner les consommateurs, ou aux marchés de produits régionaux, que nous connaissons tous –, ce mode de commercialisation, qui séduit de plus en plus les collectivités territoriales, ne répond pas aux exigences que ces dernières doivent respecter eu égard au code des marchés publics. Compte tenu de l’importance de la restauration collective dans les écoles ou les hôpitaux, il serait particulièrement utile que les collectivités qui le souhaitent puissent privilégier les circuits courts avec beaucoup plus de facilité.

Monsieur le ministre, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour favoriser le développement de ces circuits, qui rapprochent le producteur du consommateur et qui, de plus, répondent aux souhaits de nombreux élus et concitoyens, ce dont nous sommes tous conscients ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Besson, ministre auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. Monsieur le sénateur, je vous répondrai au nom de mon collègue Frédéric Lefebvre, qui est ce matin empêché.

L’article 53 du code des marchés publics consacre un droit de préférence, en cas d’équivalence d’offres, au profit des groupements de producteurs agricoles par rapport à d’autres catégories de candidats à un marché public. La loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010 prévoit que « l’État se donne pour objectif de recourir, pour l’approvisionnement de ses services de restauration collective, à des produits faisant l’objet de circuits courts de distribution, impliquant un exploitant agricole ou une organisation regroupant des exploitants agricoles. »

Cette orientation rejoint le souhait d’un nombre croissant de consommateurs de privilégier de plus en plus le lien direct avec les producteurs et, de ce fait, les achats de produits de saison disponibles localement.

Les ventes en circuits courts qui se développent rapidement en raison de la demande exprimée par les consommateurs présentent des formes variées, et les marchandises offertes ne se limitent pas aux fruits et légumes, mais concernent également des produits d’origine animale et des produits agricoles transformés.

Des travaux ont été engagés par le Gouvernement afin de favoriser et de définir cette nouvelle forme de commercialisation qu’est la vente directe. Ils visent à améliorer les connaissances sur les circuits courts et leur diffusion, à adapter la formation des agriculteurs, à favoriser l’installation de ces derniers en circuit court, et à améliorer l’organisation des circuits courts.

De son côté, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, a mis en place des enquêtes, afin d’inventorier ces formes de vente et de s’assurer que celles-ci sont en cohérence avec les règles de protection du consommateur existant dans le domaine économique, comme en matière de qualité et de sécurité des produits.

Pour ce qui concerne la restauration collective publique comme privée, l’approvisionnement en produits agricoles de proximité constitue un point fort du programme national pour l’alimentation. Cependant, ce critère de choix doit se faire dans le respect des règles du code des marchés publics et des principes fondamentaux qui régissent la commande publique, au premier rang desquels se situe l’égalité de traitement entre les candidats.

Ainsi, la proximité géographique d’une entreprise ne peut être intégrée au sein des critères de jugement des offres, car présentant un caractère discriminatoire, mais les préoccupations environnementales peuvent être dorénavant largement prises en compte dans la passation des marchés.

C’est donc dans le respect des principes édictés par la réglementation que ces formes de commercialisation pourront effectivement répondre aux attentes des consommateurs, des gestionnaires des collectivités, des exploitants agricoles et des fournisseurs.

Dès lors, le Gouvernement est engagé dans le développement et la valorisation des circuits courts, auxquels vous êtes attaché, monsieur Bailly, dans l’intérêt des consommateurs, de l’achat de proximité au bénéfice des collectivités et en raison des débouchés qu’ils constituent, en période de crise, pour le secteur agricole.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly.

M. Gérard Bailly. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse détaillée.

Néanmoins, comme un certain nombre de mes collègues, j’estime que le code des marchés publics devrait être modifié. Si, pour l’approvisionnement en produits frais des restaurants scolaires et des hôpitaux, une priorité peut être accordée à la proximité, c’est à égalité de prix.

Voilà peu de temps, j’ai interrogé sur ce sujet Michel Barnier, actuellement commissaire européen après avoir été ministre de l’environnement, puis de l’agriculture et de la pêche. Les circuits courts peuvent en effet concourir à la résolution des problèmes que l’on peut connaître dans les domaines agricole et environnemental. Ils permettent, notamment, d’être plus économe en CO2.

Pour que tel conseil général, tel conseil régional ou tel hôpital puisse y recourir, après avoir obtenu bien entendu des exploitations ou des groupements de producteurs en cause les garanties sanitaires adéquates, il serait nécessaire qu’intervienne un assouplissement des directives européennes et du code des marchés publics. Une telle démarche représenterait un réel progrès, souhaité par tout le monde.

démarchage téléphonique et droits du consommateur

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, auteur de la question n° 1190, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.

M. Jacques Mézard. Monsieur le ministre, je souhaite attirer l’attention sur la nécessité de renforcer les droits du consommateur en matière de démarchage téléphonique.

Aux termes de l’article 38 de la loi dite « Informatique et libertés » du 6 janvier 1978, toute personne physique « a le droit de s’opposer, sans frais, à ce que les données la concernant soient utilisées à des fins de prospection, notamment commerciale, par le responsable actuel du traitement ou celui d’un traitement ultérieur. »

Ce droit figure également dans le code des postes et des communications électroniques, dont l’article R. 10 dispose que toute personne qui en fait expressément la demande, peut s’opposer à l’utilisation de ses données personnelles lors d’opérations de prospection directe.

Face à des pratiques commerciales de plus en plus « agressives » de nombreuses sociétés de télémarketing qui n’hésitent pas à appeler les personnes plusieurs fois dans le même mois, et à des horaires inopportuns – en soirée ou le week-end –, et à un accroissement inquiétant des démarchages téléphoniques, il paraît nécessaire de renforcer les droits du citoyen, qui devrait pouvoir ne plus être importuné chez lui, contre son gré, et ne plus être assailli d’offres et d’informations commerciales diverses qu’il n’a pas sollicitées, et ce d’autant plus que les personnes âgées et vulnérables deviennent la cible privilégiée de ces démarchages proches du délit d’abus de faiblesse ; je pense, en particulier, aux nombreuses victimes de sociétés effectuant des travaux en vue de réaliser des économies d’énergie.

Il n’est pas juste qu’il incombe au citoyen de s’opposer expressément à ce que de telles données soient transmises à des sociétés et utilisées à des fins de télémarketing. Il serait bien plus logique et plus équitable que la législation prévoie, à l’inverse, que le citoyen consommateur doive donner expressément son accord pour que ses données personnelles puissent être utilisées à des fins commerciales, tels la prospection et le démarchage, et que, à défaut, ses données soient réputées strictement confidentielles et ne puissent en aucun cas servir à des fins commerciales.

À tout le moins, une information écrite rappelant les droits du consommateur à refuser le démarchage téléphonique devrait impérativement figurer sur chaque facture téléphonique.

Il paraît en effet indispensable, d’une part, de mieux protéger les consommateurs contre les pratiques agressives et abusives et, d’autre part, de faire en sorte que le droit à la tranquillité et à ne pas être importuné chez soi soit indéniablement reconnu et respecté.

Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre afin que les droits des consommateurs, en général, et leur droit à la tranquillité en particulier, soient respectés ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Besson, ministre auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. Monsieur le sénateur, de nouveau, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Frédéric Lefebvre, qui m’a chargé de vous transmettre sa réponse.

Vous soulignez la nécessité de renforcer les droits du consommateur en matière de démarchage téléphonique face au développement de pratiques commerciales de plus en plus agressives, notamment à l’égard de personnes vulnérables.

Le Gouvernement est très sensible à cette question. Des réponses existent déjà en la matière, mais les travaux se poursuivent.

Tout d’abord, aux termes de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, chaque citoyen dispose du droit de s’opposer à l’utilisation de ses données personnelles à des fins de prospection commerciale. La mise en œuvre de ce droit se traduit concrètement par l’obligation faite à tous les opérateurs de téléphonie de proposer à leurs abonnés de s’inscrire sur une liste d’opposition. Cette inscription signifie que les coordonnées téléphoniques des abonnés concernés ne doivent pas être communiquées à des entreprises commerciales en vue de réaliser de la prospection directe. Cependant, tous les fichiers utilisés dans des opérations de prospections ne sont pas issus de l’annuaire téléphonique, mais sont souvent constitués par les entreprises elles-mêmes.

C’est pourquoi, l’an dernier, le ministre en charge de la consommation a souhaité étendre le droit d’opposition aux fichiers constitués par les entreprises commerciales aux fins de prospection téléphonique. Un groupe de travail a été créé et les fédérations professionnelles représentatives du secteur ont accepté de mettre en place une liste d’opposition sur laquelle les consommateurs pourront s’inscrire facilement. La mise en place de cette liste d’opposition est prévue au premier semestre 2011 ; elle constituera une protection supplémentaire pour lutter contre les démarchages téléphoniques intrusifs.

S’agissant des pratiques commerciales agressives, je rappelle que la transposition de la directive du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales, réalisée dans le cadre de la loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, dite « loi Chatel », et de la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008, a considérablement renforcé la protection du consommateur contre les agissements abusifs de certaines entreprises commerciales.

Désormais, le code de la consommation interdit et sanctionne tant les pratiques commerciales trompeuses que les pratiques commerciales agressives. Ces nouvelles dispositions, assorties de peines délictuelles, viennent compléter les règles existant en matière d’abus de faiblesse et visent tous les procédés de vente, au titre desquels figurent les sollicitations par téléphone. J’ajoute que les agents de la direction générale de la concurrence, de consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, sont compétents pour la recherche et la poursuite de ces nouvelles infractions.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Monsieur le ministre, le problème tient surtout au fait que l’exercice du droit d’opposition est extrêmement marginal dans la pratique. Vous pouvez demander à nombre de nos concitoyens, y compris à certains de nos collègues élus, s’ils savent comment fonctionne le droit d’opposition en matière téléphonique : je pense que vous obtiendrez une réponse très largement négative. En effet, personne ne sait réellement comment utiliser ce droit d’opposition.

De plus, bien que le Gouvernement déclare poursuivre ses efforts dans le cadre de l’application du nouveau droit de la consommation, nous constatons, sur le terrain, que les services de la DGCCRF ont d’autres chats à fouetter et ne disposent pas de moyens suffisants pour poursuivre ces agissements. Aussi nos concitoyens sont-ils de plus en plus nombreux à subir un véritable harcèlement du fait de ces démarchages téléphoniques : il convient d’y mettre fin. La seule solution consiste à renverser le système, en interdisant les démarchages sauf si l’abonné a donné son accord préalable.

dysfonctionnement des services postaux d’anglet

M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, auteur de la question n° 1189, adressée à M. le ministre auprès de la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés des services de La Poste d’Anglet, dans les Pyrénées-Atlantiques.

Cette commune connaît en effet, de manière récurrente depuis deux ans, des problèmes importants de distribution du courrier. Force est de constater que les 40 000 habitants de la ville sont pénalisés par ces dysfonctionnements. Afin de mesurer l’ampleur de ce constat, il faut savoir que les Angloys se plaignent quotidiennement, par courrier, au téléphone ou de vive voix, des conséquences financières, juridiques et personnelles de ces retards de réception de courriers pouvant atteindre plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Ces derniers s’interrogent : doivent-ils payer les pénalités de retard exigées par les impôts ou l’URSSAF ? Comment gérer les problèmes notariaux ou bancaires qui font suite à ces retards ? Quand recevront-ils leur nouvelle carte de mutuelle indispensable au règlement de leurs soins médicaux ?

Les institutions publiques et républicaines subissent également les conséquences de ces dysfonctionnements. Ainsi, en mars 2010, Anglet a connu des défauts de distribution des documents de propagande relatifs aux élections régionales. Ce manquement à l’article R. 34 du code électoral, qui prévoit que les circulaires et bulletins de vote doivent être adressés « au plus tard le mercredi précédant le premier tour de scrutin », aurait pu justifier l’invalidation du scrutin. À l’approche de nouvelles élections et dans l’état actuel de la distribution, comment ne pas être inquiet ?

Le 16 octobre 2009, le Premier ministre affirmait, à juste titre, dans son courrier adressé aux maires : « Les Français, comme les élus, sont soucieux que les missions de service public de La Poste continuent à être pleinement assurées à l’avenir. » Tel n’est pas le cas à Anglet : sous prétexte de rentabilité économique, la réforme de La Poste a engendré des restructurations et des réductions de moyens humains qui pénalisent au quotidien les citoyens et la vie économique locale dans une ville au développement démographique constant – la population a augmenté de plus de 11 % en dix ans, sur un territoire de 2 693 hectares. Nous ne pouvons que constater et déplorer, tout comme l’ensemble de nos concitoyens, la réalité de l’affaiblissement et du démantèlement du service public postal. Après maints échanges restés sans effet entre la mairie d’Anglet et les directions locale, régionale et nationale de La Poste, des dizaines de milliers de courriers restent en attente de distribution ; les entreprises, les citoyens et la collectivité sont exaspérés de cet état de fait.

Aussi souhaiterais-je savoir, monsieur le ministre, qui va prendre en compte le préjudice subi par les usagers de La Poste, notamment les pénalités de retard sur les cotisations sociales ou fiscales ? Quels moyens seront mis en œuvre pour faire cesser ces dysfonctionnements récurrents ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Besson, ministre auprès de la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique. Madame la sénatrice, la loi du 9 février 2010 relative à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales et, plus récemment, la signature du contrat de présence postale territoriale ont conforté les missions de service public de cette grande entreprise publique qu’est La Poste.

L’enveloppe de soutien à la présence postale territoriale est ainsi passée de 135 millions d’euros à 170 millions d’euros pour développer les 17 000 points postaux répartis sur le territoire. Par ailleurs, grâce à l’augmentation de capital de 2,7 milliards d’euros qui vient d’être approuvée, La Poste va continuer de moderniser son réseau et pérenniser son activité. On ne saurait donc parler de « démantèlement du service public postal » !

La Poste est tenue de fournir, sur l’ensemble du territoire, une qualité de service répondant aux objectifs fixés dans le contrat de service public et régulièrement évalués. Ces objectifs portent, notamment, sur la rapidité et la fiabilité des prestations : on peut citer, par exemple, l’acheminement des lettres prioritaires le lendemain dans 85 % des cas. Dans le cadre de son autonomie de gestion, La Poste doit donc s’organiser pour respecter ces objectifs de qualité et répondre aux attentes de ses clients. Elle doit cependant s’adapter également à une très forte baisse du volume du courrier.

La nouvelle organisation mise en place le 4 novembre 2010 à Anglet, qui a été approuvée par 72 % des facteurs, avait pour objectif d’améliorer la régularité de la distribution du courrier, en privilégiant notamment le travail en équipe.

Le conflit social intervenu à la fin du mois de novembre 2010 a entraîné, temporairement, des perturbations dans la distribution du courrier. Toutefois, depuis la signature d’un protocole portant sur la mise en place de renforts et la constitution d’un dispositif d’observation avec les organisations syndicales, 99 % des tournées de distribution sont désormais effectuées normalement. Seuls deux secteurs ont continué à connaître des perturbations en décembre 2010 et en janvier 2011, en raison d’absences imprévisibles ; des moyens supplémentaires leur ont été affectés prioritairement, afin de ne pas pénaliser les populations concernées.

Depuis, je peux vous confirmer que la direction de La Poste a rencontré le maire d’Anglet afin de l’informer des efforts entrepris pour améliorer la distribution du courrier, distribution redevenue normale et régulière. Une attention particulière sera apportée à la prochaine distribution des plis électoraux ainsi qu’à l’information de la municipalité, grâce à la désignation d’un interlocuteur privilégié sur la plate-forme de distribution.

M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Monsieur le ministre, je vois que vous vous êtes renseigné sur les difficultés que rencontre Anglet avec ses services postaux, mais ces difficultés ne sont pas récentes, elles remontent à deux ans environ. La poste d’Anglet a effectivement fait l’objet d’une alerte de la part de la médecine du travail, car plusieurs tentatives de suicides sont survenues au sein de son personnel. La restructuration actuelle de La Poste n’a fait qu’aggraver les difficultés déjà existantes.

Par ailleurs, d’autres communes de notre département rencontrent les mêmes problèmes et sont pénalisées par la suppression de 20 % des effectifs globaux de La Poste au niveau du département des Pyrénées-Atlantiques, alors que la population de ce département augmente. Ces réductions d’effectifs ne sont pas compensées par une baisse du trafic postal. La situation se dégrade donc, la surcharge de travail et la recherche de gains de productivité entraînent un épuisement physique et psychologique des personnels, qui ne peuvent plus remplir correctement leur mission de service public. Les clients, entreprises, particuliers, collectivités locales, en subissent quotidiennement les conséquences.

En ma qualité d’adjoint au maire d’Anglet, je reçois régulièrement des récriminations d’entreprises et de particuliers, notamment de personnes âgées, qui ne reçoivent pas leur courrier dans des délais normaux. Ces problèmes persistent aujourd’hui, bien que la municipalité ait effectivement rencontré le directeur local de La Poste. Cependant, je puis vous assurer que tous les courriers que nous avions adressés au niveau régional et national sont restés sans réponse.

Le 16 octobre 2009, M. Fillon disait que le service postal devait continuer de remplir ses missions indispensables en matière d’aménagement du territoire et de lien social. Pourquoi ces déclarations ne sont-elles pas suivies d’effet, monsieur le ministre ? Pourquoi déstructurer une institution dont le maillage territorial constitue un point de repère essentiel dans nos communes, pour l’ensemble de nos concitoyens ?