M. Xavier Bertrand, ministre. Très bien !

Mme Christiane Kammermann. C’est ce qu’il a fait en 2009 ; la commission des affaires sociales du Sénat avait à l’époque énormément travaillé, y compris le dimanche ! Les deux assemblées se sont prononcées et ont voté.

La présente proposition de loi est une tentative purement politique de rééditer le débat parlementaire d’il y a deux ans,…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Votre comportement n’est-il pas politique ?

Mme Christiane Kammermann. … alors que nous pourrions travailler tous ensemble sur d’autres sujets aussi urgents.

C’est la raison pour laquelle je voterai la motion tendant à opposer la question préalable présentée par ma collègue Catherine Procaccia. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)

M. Xavier Bertrand, ministre. Je voudrais juste revenir sur les propos qu’a tenus M. Kerdraon.

On peut être combatif ; on peut être très ferme ; mais pourquoi être agressif ? (Vives protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous ne vous êtes pas entendu !

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur Kerdraon, vous avez parlé à mon égard de « suffisance », d’« arrogance », d’« attitude méprisante ».

Mme Éliane Assassi. C’est vous qui êtes agressif !

M. Xavier Bertrand, ministre. En introduction de mon propos, j’ai déclaré tout à l'heure à la tribune que l’on pouvait respecter les opinions d’autrui, même en ayant de très fermes désaccords sur le fond.

Monsieur le sénateur, où est l’arrogance ? Où est la suffisance ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elles sont chez vous !

M. Xavier Bertrand, ministre. N’est-il pas arrogant et suffisant pour un candidat socialiste de déclarer aujourd'hui : « Je ne suis pas un contre-président, je suis le prochain » ? (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

M. Ronan Kerdraon. Il le sera !

M. Xavier Bertrand, ministre. N’est-ce pas de l’arrogance et de la suffisance que de charger M. Fabius de mettre en place les cent premiers jours suivant l’élection présidentielle ?

Sachez que les Français détestent qu’on leur dise : « Circulez, il n’y a rien à voir : les élections sont faites ; les jeux sont faits ». (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)

M. Roger Karoutchi. Très bien !

M. Xavier Bertrand, ministre. Les Français n’aiment pas que l’on décide à leur place ! Vous devriez le savoir : les Français scrutent aujourd'hui tous les responsables politiques, quels qu’ils soient, en cherchant à voir si ceux qui sont au pouvoir les protègent pour sortir de la crise,…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils vous ont surtout assez vus !

M. Xavier Bertrand, ministre. … et si ceux qui sont dans l’opposition pourraient faire mieux.

M. Jean-Jacques Mirassou. Nous sommes hors sujet !

M. Xavier Bertrand, ministre. En réalité, non seulement vous n’avez pas aujourd'hui de proposition véritable, mais la présente proposition de loi est perçue comme un véritable danger, comme un véritable recul.

Vous avez évoqué 1981 : cela me permet de faire remarquer que le rêve que vous aviez alors promis n’a même pas duré deux ans, et la situation a été bien pire. (Très vives protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

M. Jean-Jacques Mirassou. Encore hors sujet !

M. Xavier Bertrand, ministre. En vérité, soit vous vivez dans un autre monde, soit vous connaissez la situation économique actuelle, et je ne doute pas que vous la connaissiez aussi bien que moi, mais, sans oser le dire,…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Sans oser dire qu’il faut travailler plus pour gagner moins ? Vous avez tout faux !

M. Xavier Bertrand, ministre. … vous savez pertinemment que, aujourd’hui, votre rêve ne durerait même pas huit jours ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Telle est la réalité ; elle est simple ! Mais, en attendant, les Français doivent savoir dès à présent que vos propositions constituent pour eux un véritable danger.

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.

Mme Isabelle Pasquet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je savais que la question du travail du dimanche nous passionnait, mais, pour être franche, je ne pensais pas qu’elle pouvait aller jusqu’à susciter des sentiments aussi proches de la haine ! (Exclamations sur les travées de lUMP.)

Mme Annie David, rapporteure. Elle a raison !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument ! C’est de la haine de classe !

Mme Isabelle Pasquet. Nous avons entendu le ministre, comme des membres du groupe UMP, notamment pour défendre la motion, dire des contrevérités auxquelles il nous faut maintenant répondre.

Tout d’abord, M. le ministre a pris prétexte de la rédaction initiale de notre proposition de loi – avant l’examen du texte en commission – pour tenter de discréditer son contenu.

Une telle manœuvre est inacceptable dans cette enceinte. À cet égard, je m’étonne, monsieur le ministre, que vous ne connaissiez pas mieux le mode de fonctionnement du Sénat et du Parlement ! (Rires et exclamations ironiques sur les travées de l’UMP.)

Certes, notre rédaction initiale faisait référence aux communes touristiques, au sens du code du tourisme. Notre rapporteure a, en commission, rectifié cette erreur rédactionnelle et le texte dont nous discutons aujourd'hui fait au final référence aux communes touristiques, au sens du code du travail.

Mme Annie David, rapporteure. En effet !

Mme Isabelle Pasquet. Cette correction est à l’honneur de notre rapporteure, et c’est l’objet même du travail en commission que de permettre l’amélioration d’une proposition de loi avant qu’elle soit examinée, en séance publique, par la Haute Assemblée.

M. Bruno Gilles. Il était temps !

Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le ministre, par cette manœuvre, vous n’avez cherché qu’à éviter de parler du fond. Cela ne nous a pas échappé, et cela n’échappera pas aux Français !

Vous avez également tenté de faire croire que le groupe communiste, républicain et citoyen était à l’initiative d’une mesure qui jouait contre les salariés. (Oui ! sur les travées de l’UMP.)

M. Xavier Bertrand, ministre. C’est le cas !

Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le ministre, pourriez-vous me dire combien d’emplois ont été créés par les nouveaux PUCE ? Je souhaiterais le savoir.

Mme Chantal Jouanno. Ce sont 10 000 emplois !

Mme Annie David, rapporteure. D’où tenez-vous ce chiffre ?

Mme Chantal Jouanno. C’est dans le rapport !

Mme Isabelle Pasquet. Je crois au contraire que les PUCE ont favorisé la précarité et la flexibilité de l’emploi, en multipliant les contrats à durée déterminée et les temps partiels. D'ailleurs, les trois organisations syndicales qui ont répondu à la sollicitation de notre rapporteure apportent tout leur soutien à cette proposition de loi.

Vous avez également affirmé que la loi Mallié permettait aux salariés travaillant le dimanche de bénéficier d’importantes contreparties.

Importantes, dites-vous ? Pour les caissières de Dia – ex-ED – à Albertville, le travail le dimanche ne rapporte que cinq euros de plus qu’une journée ordinaire…

Mme Annie David, rapporteure. C’est lamentable !

Mme Isabelle Pasquet. Est-ce cela que vous appelez une « contrepartie importante » ? Ce n’est même pas le prix d’un sandwich ?

Mme Éliane Assassi. C’est scandaleux !

Mme Isabelle Pasquet. Ce pourrait être risible si ce n’était pas si grave.

À Plan de Campagne, la contrepartie n’excède pas 25 % : le salaire n’est donc pas doublé, mais il a simplement été majoré au taux des heures supplémentaires.

M. Bruno Gilles. C’est faux ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Isabelle Pasquet. Monsieur Gilles, consultez l’accord relatif à Plan de Campagne !

M. Bruno Gilles. Je l’ai ; le voici ! (M. Bruno Gilles brandit un document.)

Mme Isabelle Pasquet. Lisez-le et vous constaterez que, pour les salariés, la seule vraie mesure protectrice, la seule vraie contrepartie importante, c’est ce que nous proposons : le doublement du salaire. (Protestations sur les travées de lUMP.)

D'ailleurs, je note que, si la loi doit impérativement permettre aux commerces situés dans une même rue de pouvoir ouvrir simultanément, vous faites bien peu de cas de la situation des salariés. Il vous indiffère que ceux qui travaillent dans des commerces situés du côté pair soient payés double, alors que ceux qui travaillent côté impair ne bénéficient d’aucune contrepartie. Ce qui compte pour vous, c’est moins l’égalité des salariés que l’égalité des commerçants !

Chers collègues du groupe UMP, les salariés seront heureux de voir le peu de cas que vous faites d’eux !

Par ailleurs, ils n’ignorent rien du sort que le Gouvernement leur réserve.

Vous avez déclaré que notre proposition de loi aurait pour effet de réduire leur pouvoir d’achat... Curieuse remarque de la part de ceux qui, à grands coups de franchises médicales, de forfaits hospitaliers, de hausse de la TVA, de taxation des contrats mutualistes et des indemnités journalières en cas d’accidents ou de maladie professionnelle, d’instauration de journée de carences supplémentaires, de déremboursements constants des médicaments pour les patients souffrant d’une affection de longue durée, ne cessent de porter atteinte au pouvoir d’achat des classes moyennes et populaires (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat applaudit.) et qui, dans le même temps, accordent 1,9 milliard d’euros aux riches contribuables imposables à l’ISF.

Voilà ce qui, chaque jour, fragilise le pouvoir d’achat !

M. François Calvet. La vérité vous rattrapera !

Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le ministre, vous dites que notre main a tremblé, puisque nous ne supprimons pas les PUCE existants. Mais qu’auriez vous dit si nous l’avions fait ? Vous nous auriez accusés d’être dogmatiques, d’entraîner la suppression de plusieurs centaines d’emplois. Justement, si nous ne supprimons pas les PUCE, c’est pour maintenir l’emploi et tenir compte des réalités locales.

Quant à la suppression de 250 000 emplois qu’induirait l’adoption de cette proposition de loi, je m’interroge : de quoi parle-t-on ? D’estimations qui, selon le rapport lui-même, sont floues ? D’emplois précaires, sous-payés, peu rémunérateurs ? De ces miettes d’emplois qui contribuent au précariat ? Est-ce ce que vous voulez pour les jeunes et les salariés de notre pays ?

Mes chers collègues, pour toutes ces raisons, nous voterons contre la motion. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Exclamations de surprise feinte sur les travées de l’UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre. (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.)

M. Xavier Bertrand, ministre. Il faut savoir ce que vous voulez ! Je vous réponds, puisque vous m’interpellez ! Et comme vous n’avez pas tout dit, je vais moi-même le faire.

Vous avez parlé de Dia à Albertville. La réalité est simple : un accord a été passé avec Dia.

Mme Isabelle Pasquet. Obtenu au bout de deux ans de conflit !

M. Xavier Bertrand, ministre. Cet accord prévoit une majoration de 30 % de la rémunération pour le travail du dimanche. Sauf qu’à chercher à donner des chiffres ridiculement bas, vous avez oublié de préciser l’essentiel : le dimanche, les employés de Dia à Albertville ne travaillent pas toute la journée, seulement le matin.

Mme Annie David, rapporteure. Heureusement !

M. Xavier Bertrand, ministre. Admettons que ces salariés soient à temps partiel et rémunérés au niveau du SMIC.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Alors, 30 % de la rémunération correspondent à cinq euros !

Mme Annie David, rapporteure. Tout à fait !

M. Xavier Bertrand, ministre. Madame la rapporteure, laissez-moi poursuivre mon explication.

Je me suis rendu à Albertville, où j’ai discuté avec les services de la direction générale du travail.

Mme Annie David, rapporteure. Vous avez refusé sur place de rencontrer les salariés ! (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Xavier Bertrand, ministre. Madame la présidente, sachez que je ne suis pas du genre à rester enfermé dans mon bureau ! Je me déplace dans les entreprises ou sur le terrain, et toute délégation souhaitant me rencontrer est reçue, soit par moi-même, soit par des membres de mon équipe. Je ne suis donc pas le bon client pour ce type de reproches !

Mme Annie David, rapporteure. C’est faux ! Vous avez refusé de rencontrer les salariés de Dia !

M. Xavier Bertrand, ministre. Une majoration de 30 % équivaut peut-être à un gain de cinq euros, mais tenons le raisonnement inverse : si votre texte est appliqué, vous pourrez toujours ridiculiser les cinq euros, mais les salariés concernés, eux, perdront trente-cinq euros par semaine !

Voilà la réalité, mais vous ne le dites pas ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.)

Mme Éliane Assassi. Augmentez les salaires ! Augmentez le SMIC !

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous m’avez interrogé sur le nombre de salariés concernés. Je ne cite pas des chiffres au hasard, ils figurent dans le rapport de Pierre Méhaignerie, au paragraphe intitulé « Les autorisations administratives accordées dans les PUCE ». Voici ce que l’on y lit : « Le nombre de salariés potentiellement concernés par les PUCE créés est estimé entre 9 000 et 10 000 salariés par la direction générale du travail, dont plus d’un millier travaille notamment dans le PUCE de Plan de Campagne ».

Mme Annie David, rapporteure. Il ne s’agit pas de créations d’emplois !

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous voulez des chiffres concrets et précis ? Les voilà ! Si votre proposition de loi était adoptée, Plan de Campagne serait rayé de la carte et ses emplois dominicaux supprimés ! Telle est la réalité des chiffres. (Applaudissements nourris sur les travées de lUMP. - M. Hervé Maurey applaudit également.)

Mme Isabelle Debré. Si vous aviez étudié le rapport, ma chère collègue, vous n’auriez pas eu à poser cette question !

Mme la présidente. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai constaté aujourd’hui qu’une certaine turbulence régnait dans cet hémicycle (Sourires.) J’ai pensé que cette situation était peut-être due au fait que certains découvrent, d’un côté, les délices de l’opposition (Ah ! sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.) et, de l’autre, les contraintes de la majorité ! (Ah ! sur les travées de lUMP.) Je ne sais pas si je parviendrai à ramener un brin de sérénité dans ce débat. (On en doute sur les travées de l’UMP.)

Cependant, je me permettrai d’observer modestement qu’il ne faudrait pas que notre assemblée devienne une Assemblée nationale bis ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.) On m’applaudit, mais personne ici n’a le monopole de la turbulence, mes chers collègues… (Sourires.)

La quasi-unanimité de notre groupe votera contre cette motion, parce qu’il nous semble que le travail parlementaire a été correctement réalisé. Le débat peut se poursuivre, c’est évident, mais chacun doit appréhender la situation d’une manière sereine.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, défendre la liberté de travailler le dimanche revient un peu à défendre la liberté du renard dans le poulailler ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)

Mme Annie David, rapporteure. Exactement !

M. François Fortassin. Par ailleurs, je dirai à notre collègue provençal qui a brandi des documents – l’origine régionale explique peut-être cette habitude ! –, que je détiens, moi aussi, des documents compromettants (M. François Fortassin brandit un dossier. – Rires sur un grand nombre de travées.), des documents qui prouvent, en particulier, que certains salariés, lorsqu’ils travaillent le dimanche, ne sont pas davantage payés qu’en semaine. Il faut aussi le dire ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)

M. Philippe Dallier. Il ne faut pas non plus généraliser !

M. François Fortassin. Enfin, gardons un peu de mesure ! Nous sommes tous responsables ! L’État n’est pas capable, sauf en période d’épidémie, d’imposer des gardes médicales, le dimanche, dans un certain nombre de régions qui constituent de véritables déserts médicaux, mais l’on ne verrait aucun problème à ce qu’il protège les vendeurs de casseroles ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.) Évitons donc d’aborder cette question sous un angle idéologique.

À titre personnel, même si je reconnais que l’on peut défendre de chaque côté de cet hémicycle des arguments valables, je serai toujours du côté des travailleurs, qui n’ont parfois pas le choix et sont même souvent assez mal traités ! (Bravo ! et applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix la motion n° 2, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet de la proposition de loi.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.

Je rappelle que la commission a émis un avis défavorable et le Gouvernement un avis favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 40 :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 343
Majorité absolue des suffrages exprimés 172
Pour l’adoption 166
Contre 177

Le Sénat n’a pas adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. François Trucy. J’espère que M. Guérini a bien voté !

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit heures.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour un rappel au règlement.

Question préalable
Dossier législatif : proposition de loi garantissant le droit au repos dominical
Demande de renvoi à la commission

Mme Isabelle Debré. Madame la présidente, avant la brève suspension de séance, j’ai demandé la parole pour un rappel au règlement, mais vous me l’avez refusée, alors qu’elle est de droit.

Je ne comprends pas ce refus, qui est contraire au règlement du Sénat.

Mme la présidente. Je ne vous avais pas entendue, ma chère collègue.

Mme Isabelle Debré. Dans ce rappel au règlement fondé sur les articles 36 et 40 du règlement, je tiens à relever un manque de respect à l’égard de M. le ministre, notamment.

Il s’agit pour nous non de faire de l’obstruction parlementaire mais de participer au débat !

En 2009, lorsque j’étais rapporteur de la proposition de loi qui devait devenir la loi dont nous parlons, jamais – je dis bien « jamais » –, il n’y a eu pareille ambiance au Sénat.

Il est vrai, madame le rapporteur, que vous n’avez prévu que deux heures pour examiner un texte d’une telle importance.

Mme Isabelle Debré. Souvenez-vous, mes chers collègues, que l’examen de la proposition de loi Mallié avait nécessité deux jours de débats, certes animés mais toujours dans le respect des personnes, ce que je ne retrouve pas aujourd’hui.

La gauche avait, à cette occasion, pris la parole à quatorze reprises sur les articles et avait formulé quatre-vingts explications de vote !

Jamais la majorité sénatoriale de l’époque ne s’est comportée comme la majorité sénatoriale aujourd’hui : c’est l’objet de mon rappel au règlement, madame la présidente. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUCR.)

Mme la présidente. Ma chère collègue, je vous donne acte de votre rappel au règlement.

Demande de renvoi à la commission

Rappel au règlement
Dossier législatif : proposition de loi garantissant le droit au repos dominical
Rappel au règlement (début)

Mme la présidente. Je suis saisie, par Mmes Debré, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel, Jouanno et Kammermann, MM. Laménie, Léonard, Lorrain, Milon et Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Villiers et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, d'une motion n° 1.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l'article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires sociales la proposition de loi garantissant le droit au repos dominical (n° 90, 2011-2012).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

Aucune explication de vote n’est admise.

La parole est à Mme Isabelle Debré, auteur de la motion.

Mme Isabelle Debré. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, le renvoi à la commission des affaires sociales me semble s’imposer, tant l’examen du texte s’est révélé insatisfaisant du fait de la précipitation qui a prévalu.

Je suis vraiment étonnée, pour ne pas dire choquée, du peu de cas qui a été fait des différents acteurs concernés par cette proposition de loi.

M. Didier Guillaume. Déjà dit !

Mme Isabelle Debré. Je songe, tout d’abord, aux partenaires sociaux. Ma collègue Catherine Procaccia a déjà rappelé que le « protocole Larcher » n’avait pas été respecté.

Mme Annie David, rapporteure. C’est faux !

M. Xavier Bertrand, ministre. Ce n’est pas bien !

Mme Annie David, rapporteure. Des mensonges répétés à tour de bras ne font pas une vérité !

Mme Isabelle Debré. Je précise que ce protocole, souhaité par le Gouvernement et par le président Larcher, a été approuvé par le bureau du Sénat le 16 décembre 2009. A ainsi été créée une procédure de concertation préalable des partenaires sociaux en cas d’examen par le Sénat de propositions de loi à caractère social. Je précise que c’est un protocole propre à la Haute Assemblée.

Ce qu’il faut retenir de la procédure, c’est que l’auteur de la proposition de loi avertit la conférence des présidents, puis fait parvenir son texte par courrier aux partenaires sociaux. Passé un délai de quinze jours, en l’absence de réponse des organisations représentatives, il peut, en conférence des présidents, solliciter l’inscription du texte à l’ordre du jour.

Au lieu de cela, Mme Borvo Cohen-Seat et son groupe ont obtenu l’inscription immédiate de la proposition de loi lors de la conférence des présidents du 19 octobre dernier, au mépris des règles que nous nous étions fixées.

M. Rémy Pointereau. Scandaleux !

Mme Isabelle Debré. Ce n’est que dans un second temps que les courriers ont été adressés aux partenaires sociaux. (Protestations sur les travées du groupe CRC.) Si le protocole avait été scrupuleusement respecté, le groupe CRC n’aurait pu que faire part de son souhait que le texte soit inscrit – je tiens à votre disposition les documents qui attestent mes propos.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je demande la parole.

Mme Isabelle Debré. À l’examen du compte rendu de la conférence des présidents de ce jour-là, nous pouvons constater – et, malheureusement, déplorer – que le président du Sénat cautionne cette méthode, expliquant que l’on pouvait prendre en considération – écoutez bien, mes chers collègues – « le fait que nous sommes dans une phase de transition ». (Exclamations sur les travées de lUMP.)

M. André Reichardt. Vraiment scandaleux !

Mme Isabelle Debré. De quelle transition parlons-nous : d’une transition vers moins de dialogue, vers moins de démocratie, vers plus de précipitation ? Est-ce cela, mes chers collègues, le nouveau Sénat ?

Mme Isabelle Debré. Ainsi, la gauche s’exempte, à peine élue, des règles qu’elle a toujours réclamées !

Le protocole Larcher n’a pas été respecté. L’envoi des courriers a eu lieu, certes, mais bien tardivement, ne permettant qu’à peu de partenaires sociaux de répondre.

La présidente de la commission des affaires sociales a admis, en commission, ne pas avoir reçu toutes les réponses, sans apparemment s’en inquiéter. Le fait que, je cite Mme David, « le dialogue avec les partenaires sociaux pourra naturellement se poursuivre tout au long de la navette parlementaire » semble lui être suffisant.

Il faut souligner que Mme David a également reconnu ne pas avoir eu le temps de procéder à des auditions, d’abord parce que l’inscription du texte à l’ordre du jour s’était présentée très rapidement, ensuite parce que les travaux entourant l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale ne l’avaient pas permis.

C’est, me semble-t-il, assez grave et surtout inattendu !

Lorsque l’on sait que le temps va manquer pour permettre à la commission de mener à bien ses travaux sur une proposition de loi – le PLFSS étant effectivement, ma chère collègue, un texte très lourd à examiner –, il me semble que le bon sens commande de reporter l’inscription du texte à un ordre du jour ultérieur.

M. François Calvet. Un dimanche ! (Sourires.)

Mme Isabelle Debré. Je citerai encore l’un des arguments de Mme le rapporteur lorsqu’elle a demandé l’inscription du texte à l’ordre du jour en conférence des présidents – je tiens le compte rendu à votre disposition.

Mme Annie David a fait valoir que la concertation – je dirais plutôt l’absence de concertation – était suffisante, puisque les travaux précédant l’adoption de la loi du 10 août 2009 avaient donné lieu à de « très larges concertations ». Selon elle, « les avis des uns et des autres » seraient donc largement connus. Il est vrai que, lorsque j’étais rapporteur, nous avons procédé à toutes les auditions, et que celles-ci étaient ouvertes, je tiens à le préciser.

Il me semble pourtant qu’il serait opportun d’avoir un nouvel éclairage des partenaires sociaux sur l’application de la loi du 10 août 2009.

Là est toute la question. Comment cela se passe-t-il aujourd’hui sur le terrain ? Quelles sont les impressions des salariés, des chefs d’entreprises, des consommateurs ? A-t-on assisté à la généralisation du travail le dimanche annoncée en 2009 ?

Je ferai en outre remarquer que notre commission a accueilli de nouveaux sénateurs, de toutes tendances politiques, depuis les débats de la loi du 10 août 2009. Vous n’êtes pas sans savoir que les élections sénatoriales ont particulièrement remanié la composition de notre commission et de notre hémicycle.

Nos collègues, nouveaux venus, auraient sans doute souhaité être davantage éclairés sur un sujet aussi important que celui du repos dominical et disposer de tous les éléments pour pouvoir se prononcer en toute connaissance de cause sur les avantages et les inconvénients de ce texte.

Le travail de la commission n’est pas le travail de son seul rapporteur. Je ne doute pas des connaissances de notre présidente sur le sujet de la loi du 10 août 2009 et de ses enjeux, mais il me semble que ce sont les membres de la commission qui adoptent le rapport.

Il y a lieu d’être surpris de la manière dont s’organise le travail parlementaire depuis l’arrivée de la nouvelle majorité au Sénat.

Manifestement, il fallait amener au plus vite le sujet du repos dominical sur le devant de la scène afin d’attirer les projecteurs sur la position de la gauche, à la veille de l’élection présidentielle, comme le soulignait très justement M. le ministre. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.)

Cette précipitation, que je dénonce, a valu à votre texte initial, madame le rapporteur, d’être parsemé de nombreuses erreurs, voire d’invraisemblances.