Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Elle nous engage tous !

M. François Sauvadet, ministre. …et qu’il nous fallait faire preuve, dans les temps difficiles que nous traversons, d’un grand esprit de responsabilité.

C’est pourquoi je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à voter les crédits qui vous sont proposés. En le faisant, vous soutiendriez, sinon le Gouvernement, du moins les efforts qui sont faits pour parvenir à la résorption des difficultés ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Alain Néri. Ne nous demandez tout de même pas l’impossible, monsieur le ministre !

(M. Charles Guené remplace Mme Bariza Khiari au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Charles Guené

vice-président

engagements financiers de l’état

Engagements financiers de l'État - Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux - Compte de concours financiers : Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics - Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2012
Article 34 et état D

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.

État B

(En euros)

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Engagements financiers de l’État

49 921 176 591

49 921 176 591

Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)

48 773 000 000

48 773 000 000

Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)

189 400 000

189 400 000

Épargne

773 776 591

773 776 591

Majoration de rentes

185 000 000

185 000 000

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Je souhaite, en cet instant, rappeler les positions qu’a arrêtées la commission des finances au sujet des crédits sur lesquels le Sénat va maintenant se prononcer.

La commission des finances s’est déclarée favorable aux crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », défavorable à ceux du compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », favorable à ceux du compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics » et défavorable à ceux du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».

À M. le ministre comme à nos collègues qui se sont exprimés, en particulier M. Dominati, je veux dire que nous sommes tenus par les engagements européens de la France. Il n’y a pas lieu à polémique.

Le candidat que je soutiens a défini une trajectoire de retour à l’équilibre budgétaire en 2017. Ce calendrier diffère de celui prévu dans le programme de stabilité que la France a adressé à la Commission européenne, lequel fixe à 2016 la date du retour à l’équilibre. En ce qui concerne la réduction des déficits, qui est le premier pas vers la stabilisation de la dette, ce candidat s’est engagé à ramener le déficit public à 3 % du PIB en 2013.

M. François Sauvadet, ministre. Mais qui est donc ce candidat que vous soutenez ? (Sourires.)

M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État ».

(Ces crédits sont adoptés.)

compte de concours financiers : accords monétaires internationaux

Article 32 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2012
Régimes sociaux et de retraite - Compte d'affectation spéciale : Pensions

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », figurant à l’état D.

État D

(En euros)

Mission

Autorisations

d’engagement

Crédits

de paiement

Accords monétaires internationaux

0

0

Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine

Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale

Relations avec l’Union des Comores

M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)

compte de concours financiers : avances à divers services de l’état ou organismes gérant des services publics

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », figurant à l’état D.

État D

(En euros)

Mission

Autorisations

d’engagement

Crédits

de paiement

Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

7 812 891 607

7 812 891 607

Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune

7 500 000 000

7 500 000 000

Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics

62 600 000

62 600 000

Avances à des services de l’État

250 291 607

250 291 607

M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Ces crédits sont adoptés.)

compte d’affectation spéciale : participations financières de l’état

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.

État D

(En euros)

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Participations financières de l’État

5 000 000 000

5 000 000 000

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

1 000 000 000

1 000 000 000

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

4 000 000 000

4 000 000 000

M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)

M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».

Régimes sociaux et de retraite

Compte d’affectation spéciale : Pensions

Article 34 et état D
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2012
Article 32 et état B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » (et articles 65 et 66), ainsi que du compte d’affectation spéciale « Pensions ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Francis Delattre, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il m’appartient de vous présenter les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d’affectation spéciale « Pensions » pour 2012.

Ils représentent des masses significatives du budget de l’État, en raison notamment du nombre de pensionnés de l’État : on en comptait 1,71 million au 31 décembre 2010.

La mission « Régimes sociaux et de retraite », tout d’abord, retrace les subventions d’équilibre versées par l’État à certains régimes spéciaux que nous connaissons bien, et depuis longtemps.

Les crédits inscrits pour 2012 s’élèvent à 6,6 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, soit une augmentation de 9,8 % par rapport à 2011.

Cette hausse s’explique par deux facteurs : d’une part, la baisse régulière du taux de couverture des prestations servies par les cotisations collectées par ces régimes, en raison notamment de leur fort déséquilibre démographique ; d’autre part, la disparition du dispositif de « surcompensation », bien connu des collectivités territoriales, dont certains régimes spéciaux étaient bénéficiaires.

Cette hausse des crédits n’était que partiellement prévue par la loi de programmation des finances publiques puisque les crédits demandés pour l’année à venir dépassent les plafonds de crédits fixés pour 2012, à savoir 130 millions d’euros.

S’il est vrai que la prévision des montants des subventions d’équilibre figurant dans cette mission est un exercice délicat, en particulier eu égard au caractère encore non stabilisé des comportements de départ à la retraite après les réformes de 2008 et de 2010, il serait souhaitable, à terme, de disposer d’une évaluation plus fine des crédits demandés.

De façon plus ponctuelle, je souhaiterais avoir des précisions sur la contribution exceptionnelle de 250 millions d’euros prévue en faveur du compte d’affection spéciale « Pensions ».

Ce compte a été institué par l’article 21 de la loi organique relative aux lois de finances, qui a prévu la mise en place, au 1er janvier 2006, d’un compte distinct du budget général de l’État pour retracer les opérations relatives aux pensions civiles et militaires de retraite des agents de l’État et aux avantages accessoires.

Au total, les crédits du compte d’affectation spéciale « Pensions » augmentent en 2012 de 2 milliards d’euros pour s’établir à 54,6 milliards d’euros, soit une hausse de 3,9 %. Il représente donc pour les futurs gouvernements un facteur de progression dynamique des dépenses budgétaires, et ce pour quelques années encore…

Le rapport écrit fournit des indications précieuses sur le « besoin de financement actualisé », c’est-à-dire les réserves qui seraient en théorie nécessaires aujourd’hui, en étant placées au taux d’intérêt du marché, pour faire face à l’ensemble des décaissements requis pour combler les déficits anticipés.

Sur la base d’un taux d’actualisation médian de 1,53 %, le besoin de financement, actualisé à dix ans, s’élève à 50 milliards d’euros. Évidemment, ces estimations sont très sensibles au taux d’actualisation retenu. Pouvez-nous nous dire, monsieur le ministre, pourquoi le taux d’actualisation médian retenu cette année ne s’élève qu’à 1,53 %, au lieu du taux de 1,63 % que prévoyait la loi de finances pour 2011 ?

Enfin, l’article 211 de la loi de finances initiale pour 2011 a procédé à la décristallisation des pensions des ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l’ancien empire colonial français. Pouvez-nous nous détailler, monsieur le ministre, les raisons pour lesquelles le ministère de la défense à dû procéder à des recrutements supplémentaires pour le traitement de ces dossiers ?

Le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l’État », qui retrace notamment les dépenses et recettes du fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État, se caractérise par un déficit démographique important.

La gestion des ouvriers d’État du ministère de la défense a donné lieu à un référé de la Cour des comptes en août 2011, laquelle appelle à une meilleure gestion prévisionnelle des ressources humaines, à une consolidation juridique de certaines primes et, surtout, à un arrêt des recrutements sous ce statut.

Aussi, monsieur le ministre, je vous poserai deux questions à ce sujet.

D’une part, les emplois à temps partiel suffisent-ils à expliquer la différence entre le nombre de cotisants à ce régime – plus de 34 000 – et les 25 000 équivalents temps plein relevés par la Cour des comptes ?

D’autre part, comment est opéré le suivi des heures supplémentaires qui entrent dans le calcul des droits à pension ?

En conclusion, comme le paiement des droits à pension constitue pour l’État une obligation irréfragable, la commission des finances, responsable et raisonnable, s’est prononcée à la quasi-unanimité en faveur de l’adoption des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d’affectation spéciale « Pensions », ainsi que des articles 65 et 66 rattachés à celui-ci.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis heureux d’avoir fait ma première intervention à la tribune du Sénat alors qu’un ancien collègue de l’Assemblée nationale occupait le banc du Gouvernement. (Sourires. – Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique. C’est aussi un honneur pour moi !

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Christiane Demontès, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Régimes sociaux et de retraite » regroupe la quasi-totalité des subventions de l’État aux régimes de retraite déficitaires. Celles-ci se concentrent sur quatre régimes principaux : les caisses de retraite de la SNCF, de la RATP, des marins et des mines.

Parmi les facteurs qui expliquent une progression des crédits proche de 10 % en 2012, plusieurs sont sans véritable lien avec l’évolution propre de ces régimes, comme l’a expliqué M. le rapporteur spécial.

La mission connaît en effet une modification significative de son périmètre, avec en particulier la création d’une ligne nouvelle de 250 millions d’euros, destinée à faciliter la gestion du compte d’affectation spéciale « Pensions » en ajustant ses ressources au regard du montant réel des cotisations versées par les ministères employeurs.

Par ailleurs, 2012 verra la disparition définitive de la compensation spécifique vieillesse, qui bénéficiait à plusieurs régimes financés par la mission. Les ressources correspondantes devront être remplacées à due concurrence par des crédits budgétaires.

Si l’on neutralise ces deux modifications par rapport à 2011, on constate qu’en dépit d’une légère diminution du nombre de pensionnés dans les régimes relevant de la mission, la contribution de l’État au titre des subventions d’équilibre continue à progresser du fait de la revalorisation des pensions, mais aussi de la diminution du nombre de cotisants.

Il existe toutefois des différences notables entre ces régimes subventionnés par l’État.

Certains n’ont plus ou pratiquement plus de cotisants. Ce sont des régimes fermés, voués à l’extinction à plus ou moins brève échéance et pour lesquels la solidarité constitue la seule source de financement possible.

Les régimes de la SNCF et de la RATP ont, pour leur part, été réformés en 2008, puis en 2011, dans la perspective d’un alignement avec la fonction publique.

Ce n’est le cas ni du régime des marins ni du régime des mineurs, en raison des fortes spécificités de ces professions, dans lesquelles les carrières sont généralement assez courtes.

Il faut d’ailleurs rappeler que la pénibilité des métiers est bien souvent à l’origine des règles particulières applicables aux régimes spéciaux. Même si les conditions de travail ont évolué, il s’agit d’une réalité sur laquelle on ne peut faire l’impasse, par exemple dans les services publics de transport, qui fonctionnent tous les jours de l’année, sur de grandes amplitudes horaires.

S’agissant des crédits dévolus aux différents régimes pour 2012, ils n’appellent pas de ma part d’observations particulières dans la mesure où ils découlent mécaniquement des évolutions démographiques.

Je souhaiterais néanmoins savoir si, à la suite de l’accélération du report de l’âge de la retraite décidée dans le dernier plan de rigueur, le Gouvernement envisage de remettre en cause le calendrier fixé par les décrets de mars dernier pour les affiliés aux régimes de la SNCF et de la RATP.

Par ailleurs, où en est la question de l’adossement de la caisse de retraite de la RATP au régime général, prévu par un décret de décembre 2005 ? Cette opération impliquerait le versement d’une soulte à la Caisse nationale d’assurance vieillesse afin d’en garantir la neutralité financière. A-t-on évalué les coûts correspondants ? Je m’étonne que le Gouvernement n’ait donné aucune précision sur sa volonté de procéder ou non à l’adossement, alors que le décret de 2005 est toujours en vigueur.

En conclusion, je rappellerai que les crédits de cette mission traduisent le concours de la solidarité nationale en faveur de régimes de retraite en fort déséquilibre démographique.

Cela me donne l’occasion de déplorer, comme nous l’avons fait lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, que le Gouvernement n’ait pas traité la question du déficit du régime des exploitants agricoles, dont l’origine est, elle aussi, strictement démographique.

La subvention de l’État a été supprimée en 2009, sans ressources de substitution d’un montant équivalent. Il faudra bien mettre en place une solution pérenne pour assurer l’équilibre de ce régime.

Sous réserve de cette remarque, la commission des affaires sociales, à l’instar de la commission des finances, a donné un avis favorable quant à l’adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

M. le président. Je rappelle au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n’appartenant à aucun groupe.

Je rappelle également que l’intervention générale vaut explication de vote sur les crédits.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat sur la question des régimes de retraite pris en charge par l’État et sur le compte d’affectation spéciale « Pensions » ne peut évidemment être tout à fait distingué de la situation faite aux agents publics en activité.

C’est aussi la situation des salariés ou ex-salariés dépendant des régimes des mines, des marins, de la SNCF, de la RATP, de la SEITA ou encore de l’ORTF qui est au cœur des crédits de la mission et des deux parties du compte d’affectation spéciale.

Nous ne pouvons que nous féliciter, au préalable, de l’augmentation des subventions d’équilibre versées par l’État aux régimes structurellement déficitaires compris dans le périmètre de la mission, notamment parce que cela signifie que ce n’est pas par le biais de la surcompensation entre régimes spéciaux que leur financement sera assuré.

À l’heure où l’on demande aux collectivités de contribuer à la réduction des déficits, je veux rappeler que, pendant vingt ans, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales a été, grâce à la surcompensation, l’un des outils de financement du déséquilibre structurel du régime des mines, de celui de la SNCF ou de celui des marins, comme d’ailleurs de nombreuses autres activités. La CNRACL a d’ailleurs obligé les collectivités à augmenter les taux de cotisation sans que les agents de la fonction publique territoriale en bénéficient. Puisqu’il est souvent question d’efforts, en voilà un qu’il ne faudrait pas oublier !

Nous avons suffisamment dit, tout au long de ces vingt années, qu’il nous paraissait anormal que des mesures relevant totalement de la solidarité nationale soient ainsi imputées aux collectivités locales pour ne pas nous satisfaire de la disparition de la surcompensation.

Pour autant, tout n’est pas réglé et la pression qui monte sur le compte d’affectation spéciale « Pensions » est là pour nous le rappeler. Sans surprise, le rythme de sa montée en charge est plus soutenu que celui des dépenses, d’autant qu’un certain nombre d’agents publics – et nous le comprenons parfaitement – ont hâté leur départ à la retraite, craignant à juste titre les conséquences de la dernière réforme des retraites. Ce point ressort d’ailleurs du rapport spécial.

Il est ainsi démontré que cette réforme, que nous avons combattue, porte atteinte au pouvoir d’achat des retraités. Ainsi, le rapport de notre collègue M. Delattre établit que le budget de l’État enregistrera en 2014 une économie de 800 millions d’euros du fait du recul de l’âge de départ à la retraite et de 600 millions d’euros du fait de la hausse du taux des cotisations.

S’il nous fallait une preuve supplémentaire pour établir que la réforme de 2008 était purement comptable, nous en trouverions ici la parfaite démonstration.

Le problème, c’est que cette évolution du compte « Pensions » va de pair avec deux autres mesures clefs de la politique menée par le Gouvernement : d’une part, le non-remplacement d’un départ en retraite sur deux dans la fonction publique, qui détériore gravement le ratio entre cotisants et retraités ; d’autre part, le gel du point d’indice des rémunérations.

Ainsi, l’État choisit d’abandonner une partie des recettes du compte d’affectation spéciale, quitte à rendre son équilibrage de plus en plus difficile.

Au reste, selon nous, ce n’est sûrement pas par une baisse régulière de la qualité des prestations fournies que l’on pourra compenser la croissance éventuelle des dépenses du compte « Pensions ». En effet, ce compte a également pour spécificité d’intégrer clairement une faible évolution du niveau des pensions attribuées. Nous ne pouvons pas approuver ce choix qui met en cause le pouvoir d’achat des pensionnés civils et militaires.

Malgré le point positif que constitue l’abandon de la surcompensation, notre groupe s’abstiendra lors du vote sur ces crédits.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.

Mme Anne-Marie Escoffier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les cinq petites minutes qui me sont allouées me suffiront pour commenter les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite », qui correspondent à des dépenses obligatoires sur lesquelles les leviers d’action sont faibles.

L’augmentation de 9,8 % en autorisations d’engagement et en crédits de paiement est structurelle en ce qu’elle est liée à la réduction du nombre de cotisants, à l’augmentation du montant des nouvelles pensions liquidées et à la disparition de la compensation spécifique entre régimes spéciaux, désormais prise en charge par l’État.

Je veux ici mettre l’accent sur le soulagement des bénéficiaires du régime des mines, qui, dans mon département, m’avaient exprimé leur vive inquiétude de voir leurs pensions relever à l’avenir du régime général des retraites. Pour un nombre de cotisants en constante diminution, une telle évolution aurait conduit à supprimer un avantage relevant de la stricte équité au regard de la pénibilité de leur métier. Monsieur le ministre, je tiens à vous témoigner toute ma satisfaction sur ce point.

En revanche, nous sommes nombreux à déplorer que la question du déficit du régime des exploitants agricoles n’ait pas été prise en compte. Depuis de nombreuses années, ce régime est confronté à des problèmes de financement structurels, liés notamment à son important déséquilibre démographique : le rapport entre cotisants et bénéficiaires est d’environ 1 à 3, avec près de 500 900 cotisants pour 1 625 160 bénéficiaires.

Depuis 2005, le fonds de financement des prestations sociales agricoles, le FFIPSA, a remplacé le budget annexe de ces mêmes prestations. En outre, la subvention d’équilibre automatique du budget de l’État a été supprimée, ce qui a engendré l’accumulation de lourds déficits.

Ainsi, il est prévisible que, malgré les mesures adoptées, la branche vieillesse de ce régime affichera un déficit de 1,4 milliard d’euros en 2012. De ce fait, le déficit cumulé de la branche devrait atteindre, en l’absence de mesures nouvelles, 5,2 milliards d’euros à la fin 2012.

Si le PLFSS pour 2012 procède à une reprise partielle de la dette de la branche vieillesse du régime des exploitants agricoles, le sort de ce régime reste très incertain. Monsieur le ministre, j’insiste sur ce point, car il s’agit d’une véritable difficulté dans nos départements agricoles.

Mme Christiane Demontès, rapporteur pour avis. Très bien !

M. François Sauvadet, ministre. C’est vrai !

Mme Anne-Marie Escoffier. Sous réserve de ces observations, les membres du groupe RDSE suivront l’avis de M. le rapporteur spécial et voteront ce budget. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi qu’au banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou.

M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen de la mission « Régimes sociaux et de retraite » du projet de loi de finances pour 2012 revêt un caractère particulier du fait de la décision du Gouvernement d’accélérer la mise en œuvre de la réforme des retraites, comme l’ont souligné les précédents orateurs.

Avant de revenir sur ce point, je présenterai brièvement les objectifs assignés à cette mission, par l’intermédiaire de laquelle l’État verse des subventions d’équilibre à certains régimes de retraite, principalement aux caisses de la SNCF, de la RATP, des marins et des mines.

En 2012, les crédits dévolus à cette mission s’élèveront à 6,6 milliards d’euros, soit une hausse de 50 % depuis 2005. La cause majeure de cette augmentation réside dans l’accroissement des déséquilibres démographiques qui déterminent mécaniquement les subventions d’équilibre versées par l’État.

Ainsi, cette mission ne peut qu’être analysée au regard de la réforme des retraites promulguée le 9 novembre 2010 et complétée par le plan de rigueur annoncé le 7 novembre dernier.

En effet, les régimes spéciaux de la SNCF et de la RATP se verront appliquer, à partir de 2017, les mesures d’âge prévues pour les autres régimes, notamment les dispositions relatives à la décote et à la surcote.

En revanche, étant donné les spécificités du métier de marin, le régime des marins n’est pas concerné par l’accélération de la réforme des retraites, qui, je le rappelle, n’a fait l’objet d’aucune concertation digne de ce nom avec les partenaires sociaux.

Globalement, cette mesure annoncée par le Premier ministre nous semble à la fois injuste et inefficace, alors que le taux d’emploi des 60-64 ans plafonne au niveau timide de 18,6 %. Monsieur le ministre, en prônant une telle politique, vous prenez le risque de plonger les seniors dans la logique mortifère du chômage et de l’assistanat.

Le véritable enjeu, c’est l’emploi des seniors. Dès 2005, le Conseil d’analyse économique le soulignait, expliquant que « la cessation précoce d’activité des seniors, c’est notre impossible pari, c’est notre mensonge à la jeunesse, c’est le point caché de notre consensus social ». Vu les difficultés actuelles, comment contredire cette analyse et, partant, cautionner votre réforme ?

Par ailleurs, je suis navré de constater que l’âge minimum d’entrée dans le dispositif de congé de fin d’activité pour les conducteurs routiers a été repoussé de 55 à 57 ans depuis le 1er juillet 2011. Une nouvelle fois, je ne peux que regretter les arbitrages auxquels a procédé le Gouvernement en matière de pénibilité, dans un métier où la pertinence de ce critère est incontestable.

Aussi, monsieur le ministre, je me permets de vous interpeller sur les conditions particulièrement restrictives imposées par les décrets d’application permettant de bénéficier de la retraite anticipée, qui illustrent de manière éclatante l’aspect particulièrement inique de cette réforme.

Enfin, le déséquilibre extrême entre cotisants et pensionnés au sein du régime des mines explique son extinction progressive. En 2010, le régime comptait 333 526 pensionnés pour seulement 6 091 cotisants. Le versement des cotisations ne couvrait ainsi que 2 % des prestations ; en d’autres termes, la solidarité nationale est devenue la seule source de financement possible.

Or c’est cette même solidarité, primordiale, à nos yeux, pour garantir la retraite de certains de nos concitoyens, et qui est du reste indissociable de notre modèle de protection sociale, que vous mettez à mal par le biais de vos réformes : monsieur le ministre, vous en organisez progressivement et insidieusement – voire méthodiquement – le démantèlement.

À l’heure où les effets de la crise se font de plus en plus cruellement sentir, sous l’effet conjugué de l’augmentation du chômage et de la régression du pouvoir d’achat, il eût été opportun d’assurer un financement pérenne de notre système de protection sociale, comme nous l’avons souligné lors de la discussion du PLFSS pour 2012. À notre sens, ce ne sont pas vos demi-mesures « court-termistes » qui en assureront la sauvegarde !

Comme le souligne le chef économiste adjoint de Natixis, qui ne peut être suspecté de partialité, dans un article paru dans le Monde du 22 novembre dernier, « les marchés, qui prêtent aux États, ne demandent pas du marketing – un plan tous les trois mois – mais une stratégie durable. (…) On ne distingue pas de stratégie de long terme dans les plans de rigueur actuels ».

C’est bien ce défaut de réflexion et cette absence de cap que nous critiquons avec vigueur. Pour ce qui nous concerne, nous refusons de nous engager dans cette voie qui aurait pour effet d’effriter davantage encore l’édifice de notre système de protection sociale.