M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel.

M. Jean-Marie Bockel. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants.

En France comme ailleurs, se sont produites ces dernières années un certain nombre de cyberattaques qui ont été tout à fait dévastatrices, même si l’on en a peu parlé. Ont ainsi été visés le ministère de l’économie et des finances l’an dernier, à la veille du G8-G20, le géant du nucléaire français Areva – cette attaque, sûrement de longue durée, a entraîné un pillage très important de la richesse de cette société –, mais aussi la présidence de la République et certains ministères, pour ne citer que quelques exemples qui concernent les intérêts vitaux de notre pays.

En outre, si l’on y réfléchit bien, on se rend compte que les cyberattaques sont le meilleur moyen de perturber gravement un pays comme le nôtre, notamment en paralysant les systèmes informatiques et Internet, le transport aérien et ferroviaire, le fonctionnement des hôpitaux et les réseaux d’eau et d’énergie, parce que, au fond, elles exigent peu d’organisation et sont assez faciles à mener.

Pour ne prendre que deux exemples d’attaques récentes très destructrices, j’évoquerai le virus Stuxnet, qui a littéralement mis hors d’usage mille centrifugeuses à la centrale nucléaire de Natanz en Iran, ou, plus récemment encore, les trente mille ordinateurs détruits chez le gérant pétrolier Saudi Aramco.

Vous le voyez, ces sujets ne relèvent pas du fantasme, d’autant que les intérêts vitaux visés, monsieur le ministre délégué, sont aussi d’ordre économique, car l’essentiel des pénétrations de réseaux constitue une entreprise d’espionnage massif de notre richesse industrielle. Or, en période de guerre économique, cela compte !

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a adopté à l’unanimité un certain nombre de propositions, comme autant de pistes d’action, qui ont bien sûr été soumises au Gouvernement. Nous attendons maintenant des réponses de votre part. En effet, par rapport à nos voisins, notamment les Britanniques et les Allemands, qui connaissent des enjeux de sécurité économique comparables, nous avons du retard.

À cet égard, l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, l’ANSSI, créée en 2009, qui est reconnue à l’échelon tant national qu’international pour sa compétence et qui est aux côtés des entreprises et des administrations attaquées, a besoin de voir ses moyens augmentés.

Nous attendons également que le monde économique et les administrations soient sensibilisés sur le sujet, pour qu’ils signalent les attaques et qu’ils puissent être aidés.

Vous le comprenez bien, c’est un enjeu économique, de sécurité, ayant également des répercussions sur la vie quotidienne de nos concitoyens.

Nous sommes en droit d’attendre, à l’instar de la Grande-Bretagne, de l’Allemagne et d’autres pays voisins, une prise en compte au plus haut niveau de l’État de cette réalité, une définition des priorités et des réponses qui s’imposent. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur plusieurs travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des anciens combattants.

M. Kader Arif, ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants. Monsieur Bockel, je tiens d’abord à vous faire part des excuses de M. le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, qui ne pouvait être parmi nous aujourd’hui.

Vous n’êtes pas sans savoir l’importance qu’il accorde à cette question. Il l’a d’ailleurs manifestée, voilà peu, en se rendant à Bruz, à côté de Rennes, pour visiter le centre technique de la direction générale de l’armement, la DGA.

La cyberdéfense est constituée de l’ensemble des moyens techniques et opérationnels visant à détecter, analyser et réagir aux attaques de nature informatique. La nature des systèmes visés est extrêmement variée, depuis les réseaux informatiques classiques jusqu’aux systèmes d’armes, en passant par les systèmes industriels. L’objectif de ces attaques, vous l’avez rappelé, peut être la recherche de renseignements, la neutralisation des systèmes ou encore la modification de l’information.

En la matière, l’organisation de l’État repose sur une étroite collaboration entre l’ANSSI, j’y reviendrai, et le ministère de la défense. La coordination technico-opérationnelle est cruciale et se traduit, pour le ministère de la défense, par une coopération très étroite entre la DGA et l’état-major des armées.

Nous renforçons actuellement la protection et la défense des systèmes d’information. La montée en puissance de l’ANSSI se manifestera par la création de soixante-cinq postes supplémentaires dès 2013, et se poursuivra.

Le prochain Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale devrait réserver une attention particulière à ces questions.

Plus particulièrement, au ministère de la défense, un officier général à la cyberdéfense a été désigné et une structure spécifique, le centre d’analyse en lutte informatique défensive, le CALID, a été mise en place. Ses effectifs vont passer de vingt à quarante personnes en 2013, ce qui lui permettra d’être opérationnel vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept.

En outre, un schéma directeur de la cybersécurité a été préparé. Il vise à renforcer ce domaine d’action de manière importante.

Nous avons ensuite nommé un fonctionnaire de la sécurité des systèmes d’information. Il est rattaché fonctionnellement au chef du cabinet militaire du ministre de la défense, ce qui est une garantie de la prise en compte, au bon niveau, de la question de la sécurité de nos systèmes d’information.

Enfin, la DGA, plus particulièrement son centre technique de Bruz, renforce l’expertise technique, déterminante pour la souveraineté de la France, par le recrutement planifié de deux cents personnes dans les trois années à venir.

Monsieur le sénateur, j’espère avoir répondu à vos interrogations. (M. Jean-Marie Bockel opine. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Yvon Collin applaudit également.)

emploi

M. le président. La parole est à M. Luc Carvounas.

M. Luc Carvounas. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Depuis seize mois consécutifs, les annonces de licenciements et les plans sociaux se succèdent et, malheureusement, les chiffres du chômage augmentent inexorablement.

La barre des trois millions de chômeurs est aujourd’hui dépassée.

Nous savions que la situation de notre pays était grave et n’avions pas sous-estimé les résultats catastrophiques de la politique menée par la droite pendant dix ans. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Michel Berson. Eh oui, il faut le rappeler !

M. Claude Bérit-Débat. Un million de chômeurs de plus en cinq ans !

M. Luc Carvounas. Ne vous énervez pas, chers collègues de la droite ! (Même mouvement.)

Dès sa formation, le Gouvernement a mis en place une stratégie globale de bataille pour l’emploi et a agi sur tous les fronts.

Il s’est tout d’abord attaqué aux urgences.

M. Luc Carvounas. Le ministre du redressement productif et, pour la filière agroalimentaire, le ministre de l’agriculture ont suivi au cas par cas les entreprises en difficulté ou en procédure de licenciement collectif. Un accompagnement et des réponses leur ont été apportés.

Le Gouvernement a aussi agi sur le court et le moyen terme (M. Alain Gournac s’exclame.), en maintenant et en augmentant les contrats aidés que l’ancienne majorité voulait supprimer.

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur. Voilà la vérité !

M. Luc Carvounas. Il l’a également fait en créant 150 000 emplois d’avenir pour les jeunes quittant le système scolaire sans formation.

M. Alain Gournac. Les heures supplémentaires, aussi !

Mme Isabelle Debré. Attendons le rapport Gallois !

M. Luc Carvounas. Le Gouvernement a agi, enfin, sur le long terme par des mesures en faveur de l’éducation, clef de la réussite.

M. Alain Gournac. Rapport Gallois !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Ils l’ont enterré !

M. Luc Carvounas. Aujourd’hui, l’accord des partenaires sociaux va rendre possible la mise en œuvre d’un engagement essentiel du Président de la République : les contrats de génération.

Ils permettront aux jeunes d’accéder à un premier emploi et aux seniors, trop souvent écartés prématurément du monde du travail, de conserver le leur, tout en transmettant leur savoir-faire et leur expérience.

Ces contrats constituent le troisième volet de la politique qui doit permettre d’inverser la courbe du chômage.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire plus en détail ce qu’il en est de ces différents dispositifs et du calendrier de leur mise en œuvre ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Éliane Assassi applaudit également.)

M. Alain Gournac. Le rapport Gallois !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l'apprentissage.

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargé de la formation professionnelle et de l'apprentissage. Monsieur Carvounas, vous me permettrez de répondre en lieu et place de Michel Sapin, retenu aujourd’hui par le forum des ministres du travail et de l’emploi.

Vous l’avez justement dit, la bataille de l’emploi est la priorité du Gouvernement, car le contexte économique et social l’exige. (Mme Isabelle Debré s’exclame.) Nous ne pouvons considérer comme inéluctable la situation que nous avons trouvée, avec plus de 10 % de la population active au chômage et plus de trois millions de chômeurs. Telle est la réalité que nous avons rencontrée en juin dernier ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Néri. Voilà votre œuvre !

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Nous avons également découvert que des plans sociaux avaient été habilement retardés. Ceux-ci vont, hélas ! encore augmenter le nombre de demandeurs d’emploi dans notre pays au cours des mois prochains. (Mêmes mouvements.)

M. Alain Gournac. Rapport Gallois !

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Monsieur le sénateur, nous enrayerons cette spirale de l’échec…

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. C’est vous qui êtes en échec depuis cinq mois !

M. Thierry Repentin, ministre délégué. … et nous ferons en sorte que, à la fin de l’année 2013, la courbe du chômage soit inversée. Telle est la feuille de route qui a été délivrée par le Président de la République. Celle-ci contient une double priorité, l’emploi et la jeunesse, pour que les nouvelles générations entrant dans le monde du travail ne le fassent pas au détriment de celles qui les précèdent.

La première traduction de cette double priorité, vous l’avez rappelé, est sur les rails : ce sont les 150 000 emplois d’avenir, validés hier par le Conseil constitutionnel. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.) À ce sujet, l’opposition oublie de dire qu’elle a essayé de faire censurer cette disposition, votée par la nouvelle majorité au bénéfice de la jeunesse de France. Ces premiers contrats emplois d’avenir seront signés dès le début du mois de novembre prochain, partout, dans tous les territoires de France, pour apporter une réponse aux jeunes qui sont sortis du système scolaire sans formation.

M. Jean Bizet. Ce n’est pas la bonne réponse !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Ce sont des vieilles recettes qui ne marchent pas !

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Ils se verront ainsi proposer un emploi et une formation.

La deuxième étape, ce seront les contrats de génération – 500 000 ! –, qui vous seront proposés dans un texte débattu au Parlement en janvier prochain, sur le contenu duquel nous sommes tombés d’accord vendredi dernier avec les partenaires sociaux. Fruit d’un travail négocié et du dialogue social renouvelé, ce contrat liera deux générations, les seniors et les juniors, par la transmission d’un savoir.

Enfin, dès la semaine dernière, 40 000 emplois aidés supplémentaires ont été dévolus aux préfets de vos départements respectifs pour accompagner celles et ceux qui sont durablement éloignés de l’emploi.

Vous le voyez, nous agissons de façon concrète, respectant en cela les engagements du Président de la République pris pendant la campagne pour l’élection présidentielle, car c’est sur ces bases que la France a voulu une nouvelle majorité. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur plusieurs travées du groupe écologiste. – M. Robert Hue applaudit également.)

aéroport notre-dame-des-landes

M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux.

Mme Corinne Bouchoux. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Elle porte sur une problématique de transport, mais qui pourrait avoir des conséquences beaucoup plus importantes. À cet égard, je voudrais rappeler que la solidarité n’exclut pas la franchise, la solidarité appelle la franchise.

Un événement est passé relativement inaperçu : la victoire dans une ville bourgeoise et industrielle, Stuttgart, capitale d’un Land allemand, d’un maire écologiste. Personne ne s’est interrogé sur ce qui a conduit cette ville à élire une personnalité de cette étiquette politique.

Sachez simplement que le transfert d’une gare existante, ultramoderne, a fait l’objet d’une polémique dans cette ville. Des personnes du troisième âge n’ayant jamais manifesté, mais aussi d’autres, qui avaient pris connaissance de ce dossier, s’y sont opposées, et ce pour trois raisons.

Tout d’abord, les lois sur l’eau étaient bafouées, le projet n’entrant pas dans le cadre de ce qu’exige le Land. Ensuite, les lois sur le respect de la biodiversité n’ont pas été respectées. Enfin, la consultation des usagers, prévue par la législation, n’a pas été menée à son terme.

M. Alain Gournac. Vous connaissez Mme Lamblin ?

Mme Corinne Bouchoux. Pour dire les choses autrement, nous avons depuis un certain temps – et c’est acté publiquement – un léger désaccord de fond sur un dossier.

M. Charles Revet. Ce n’est pas le premier !

Mme Corinne Bouchoux. N’ajoutons pas à ce désaccord de fond, qui résulte d’un point de vue différent, des problèmes de forme.

Nous ne sommes plus à l’ère de l’essence et du kérosène coûtant peu cher. Ce projet avait ses défenseurs voilà quelques années ; parmi nous, écologistes, il a de très nombreux adversaires, car il ne correspond plus à la réalité d’aujourd’hui.

Ma question est donc assez simple : pourquoi faire preuve d’autant de précipitation et de virulence, alors que tous les recours juridiques n’ont pas été à leur terme, à l’échelon tant national qu’international (M. Alain Gournac s’exclame.), et pourquoi mettre en œuvre les expulsions qui vont nécessairement avoir un coût – on a parlé de 500 millions d’euros, je ne sais pas si c’est vrai –, lequel va s’ajouter au coût du projet ?

Ce dossier n’est pas complètement tranché. Je voudrais très solennellement vous appeler à prendre garde que Notre-Dame-des-Landes ne soit pas comme un de ces nouveaux aéroports espagnols désertiques (Exclamations sur les travées de l'UMP.), où personne ne circule ni ne voyage.

Mes chers collègues, regardez ce qui se passe à Berlin : l’aéroport Willy-Brandt n’est toujours pas inauguré, alors que le projet n’avait pas soulevé de problème et avait fait l’objet d’un consensus. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice, le projet d’infrastructure auquel vous faites référence, l’aéroport Notre-Dame-des-Landes est un projet qui est somme toute ancien, puisque, engagé sous la maîtrise d’ouvrage de l’État en 2008, il est financé et porté de longue date par de nombreuses collectivités, à savoir les régions, des départements, des intercommunalités.

M. Gérard Larcher. Surtout M. Ayrault !

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Il s’agit non pas d’un nouvel aéroport, mais d’un transfert de l’aéroport de Nantes-Atlantique, également pour des raisons environnementales, qu’il convient de rappeler, tenant notamment à la proximité du centre-ville. Les conflits d’usage, les nuisances sonores ainsi que la qualité de l’air ont donc été pris en compte.

Un certain nombre de financements ont été mobilisés. Ce projet n’est pas aujourd’hui au début de sa réalisation, mais il est en phase de réalisation, puisque la déclaration d’utilité publique, purgée de tout recours, est maintenant applicable et opposable. Il appartient désormais aux juridictions concernées de statuer sur les derniers contentieux qui ont trait à la propriété et l’expropriation. D’ailleurs, dans la grande sagesse des acteurs de ce projet, il a été convenu d’attendre le résultat des recours en cassation contre des décisions relatives aux transferts de propriété.

L’État ainsi que les élus de Nantes Métropole et du conseil régional ont souhaité faire avancer ce dossier dans le respect des intérêts de la population, des agriculteurs et des communautés de communes concernées. Cette méthode est empreinte de concertation et de respect. C’est pourquoi le Gouvernement soutient les procédures engagées.

Vous avez fait référence aux enquêtes et aux procédures juridiques opposables. Certes, elles sont nombreuses. Il y a notamment les procédures d’enquête publique en cours au titre de la loi sur l’eau. Vous le savez, les infrastructures, en particulier de cette importance, peuvent avoir des incidences sur l’eau et les milieux aquatiques.

Aux termes du code de l’environnement, madame la sénatrice, sont requises des procédures spécifiques d’autorisation ou de déclaration. Ces projets doivent faire l’objet d’un arrêté préfectoral d’autorisation, et celui qui porte sur l’aéroport ne fait pas exception. Par ailleurs, il est nécessaire, pour le pétitionnaire, de délivrer un dossier complet, comportant étude d’impact, mesures compensatoires et mesures de préservation des écosystèmes aquatiques.

Voilà l’ensemble du dispositif. Il n’y a pas de volonté de se précipiter ou d’outrepasser les procédures. Un délai, un timing a été prévu, il est respecté (Mme Corinne Bouchoux hoche la tête.), et les procédures sont appliquées sous le contrôle des autorités juridictionnelles.

Je le répète une fois encore, faire rimer les enjeux d’aménagement du territoire, les enjeux économiques et le respect des intérêts de chacun est au cœur de nos préoccupations et de la procédure engagée, depuis 2008, par l’État ou en son nom, en collaboration avec les collectivités locales. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

déserts médicaux

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Le dimanche 21 octobre dernier, M. le Président de la République, François Hollande, clôturait le congrès de la Mutualité française en ces termes : « Aucun Français ne doit se trouver à plus de trente minutes de soins d’urgence […] Aucun instrument financier, si ingénieux soit-il, ne saurait remplacer une stratégie sanitaire ».

M. Guy Fischer. J’y étais et j’ai applaudi ces fermes propos.

M. Jean Bizet. Vous y avez cru ?

M. Guy Fischer. Toutefois, force est de constater (Ah ! sur plusieurs travées de l’UMP.) que les dégâts infligés à notre système de soins par le gouvernement précédent, via de véritables plans sociaux, des restructurations et des fermetures d’établissements diligentés par les ARS, les agences régionales de santé, sont considérables. Ils ne pourront être « réparés » que par une politique volontariste, engagée en urgence pour mettre fin aux déserts médicaux.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Il y a encore de l’argent pour les salles de shoot !

M. Guy Fischer. Je concentrerai mon propos sur les maternités de proximité.

Nous assistons à une véritable fracture sanitaire, à la suite de la fermeture des deux tiers de nos maternités au cours des trente dernières années. Le temps de quarante-cinq minutes retenu comme délai de référence en termes de sécurité pour la mère et l’enfant n’est plus respecté, ainsi que le souligne la Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité.

L’UFC-Que Choisir de mon département vient, à son tour, de m’alerter, en faisant le lien entre déserts médicaux et dépassements d’honoraires. Cette association de consommateurs souligne que, au-delà des déserts géographiques que sont les zones rurales et les quartiers populaires des grands ensembles, la pénurie de médecins ne pratiquant pas de dépassements d’honoraires accroît de façon dramatique l’inégalité dans l’accès aux soins.

Dans le Rhône, le pourcentage de la population vivant dans un désert médical gynécologique passe de 9 % à 99 % dès lors que seul est financièrement possible l’accès à un gynécologue proposant des tarifs sans dépassements d’honoraires.

Ainsi se conjuguent de façon dramatique fermetures de maternités et fracture entre les patientes.

Face à une telle pénurie, il faut agir, agir vite et sur deux leviers : décréter un arrêt immédiat des fermetures de maternités ; plafonner les dépassements d’honoraires en gynécologie, comme dans d’autres secteurs en grande tension.

Je souhaiterais donc connaître la position du Gouvernement sur cette urgence sanitaire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste. – M. Robert Tropeano applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la famille.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Marisol Touraine, retenue à l’Assemblée nationale dans le cadre du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Vous dites à quel point le précédent gouvernement a abîmé notre système de soins et vous avez raison. (Oui ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – Exclamations sur les travées de l’UMP.)

Il est utile de rappeler la multiplication des déremboursements de médicaments, l’augmentation continue du forfait hospitalier, la création du forfait sur les consultations médicales, les nouvelles taxes sur les mutuelles,…

M. François Grosdidier. Vous êtes en train de revenir sur tout cela. Abrogez tout !

M. Francis Delattre. Travaillez !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. … l’explosion du niveau des dépassements d’honoraires.

Effectivement, les assurés ont eu l’impression que leur couverture maladie se rétrécissait comme peau de chagrin.

Alors, c’est vrai, s’impose une réorganisation de notre système, pour permettre à tous l’accès aux soins. Conduite par Marisol Touraine, elle consistera, d’une part, à revaloriser les missions de l’hôpital public,…

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. … et, d’autre part, à veiller à une meilleure organisation de la médecine de proximité.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. En effet, il est temps de bâtir les parcours autour du patient et non plus des structures.

M. Alain Gournac. Bla-bla-bla !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Pour permettre à chaque Français de se soigner près de chez lui est engagé un combat contre les déserts médicaux,…

M. Alain Gournac. C’est de la bouillie !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. … que vous soulignez, monsieur Fischer.

Cela se traduit, très concrètement, par la création, dès 2013, de 200 postes de praticiens locaux de médecine générale.

M. Francis Delattre. Elle s’est trompée de paragraphe !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Vous avez raison de le rappeler, accéder à un médecin est parfois devenu un privilège ; cela doit redevenir un droit.

Il nous faudra évidemment aller plus loin sur ce sujet. Vous avez cité les propos du Président de la République, chaque Français doit pouvoir accéder en moins de trente minutes à des soins d’urgence. Il conviendra également de mettre en œuvre des mécanismes d’incitation et d’attractivité pour que les professionnels viennent s’installer dans les territoires sous-dotés.

Afin de faciliter la consultation d’un médecin de ville sera mise en œuvre une organisation en équipe, ce qui permettra d’accroître les horaires d’ouverture, de prendre en charge les demandes de soins dans des délais raisonnables et d’éviter ainsi tout passage inutile aux urgences.

M. Alain Gournac. Combien de pages encore ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. En plus de la lutte contre les déserts médicaux,…

M. Francis Delattre. Un désert intellectuel quand on vous entend !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. … il faudra, à terme, diminuer le reste à charge supporté par les familles. Les Français ne doivent plus renoncer à se soigner pour des raisons financières. Les Françaises ne doivent pas mettre en danger leur santé et leur grossesse pour des raisons financières.

M. Alain Gournac. Agissez !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous, qu’avez-vous fait ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. La négociation sur les dépassements d’honoraires qui s’est achevée cette semaine a abouti à un accord positif. Il concerne aussi la gynécologie et les Françaises en bénéficieront.

Vous le voyez, monsieur le sénateur,…

M. Alain Gournac. Tout va bien !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. … l’action du Gouvernement est résolue : lutte contre les déserts médicaux, d’un côté ; accord pour diminuer progressivement le reste à charge des familles, de l’autre. C’est ainsi que nous nous dirigeons vers le respect de l’égal accès aux soins pour tous. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – M. Guy Fischer applaudit également.)

M. Alain Gournac. Amateurisme !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Quelle réponse !

situation des départements

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido.

M. Bruno Sido. Ma question s’adressait à M. le Premier ministre. (Exclamations ironiques sur les travées de l’UMP.)

M. Alain Gournac. Il n’a pas passé une bonne nuit !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Il ne s’est pas remis de ce qui s’est passé hier !

M. François Grosdidier. Il apprend la Constitution !

M. Bruno Sido. Mme la ministre Marylise Lebranchu, ici présente, répondra à sa place.

Je souhaiterais évoquer la situation financière très difficile des départements,…