M. Jackie Pierre. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Lenoir. Je souhaite appuyer les propos tenus par le préopinant. Les arguments développés par M. Jean-Paul Emorine sont en effet particulièrement forts.

Nous sommes les uns et les autres associés à la gestion d’un territoire, souvent rural, et nous savons quelle part les chambres d’agriculture prennent à ce travail, notamment, cela a été dit, en ce qui concerne l’élaboration des schémas de cohérence territoriale. Ces missions ne relevaient pas des compétences des chambres d’agriculture il y a encore quelques années. Et je n’évoquerai pas le transfert des compétences de l’ADASEA, auquel j’ai déjà fait allusion !

Monsieur le ministre, vous ne nous avez pas répondu, ce qui m’a surpris. Mais je pense que votre argumentation aurait été la même que celle d’Harpagon dans L’Avare. Car, dès qu’il est question d’argent, on vous entend dire : « Ma cassette ! Ma cassette ! »

Permettez-moi de vous dire que, en la circonstance, il s’agit non pas de votre cassette, ni même du budget de l’État, mais de cotisations prélevées sur les agriculteurs. À cet égard, nous pouvons tous nous faire l’écho de ce que nous entendons dans nos départements : les chambres d’agriculture souhaitent très fortement disposer de moyens légèrement supérieurs.

Franchement, je trouve que l’obstination n’est pas de mise sur ce sujet. Pour ma part, je souhaite que l’on desserre un peu l’étau. Encore une fois, il s’agit non pas de prendre de l’argent dans votre cassette, monsieur le ministre, mais simplement de donner aux chambres d’agriculture les moyens consentis par les agriculteurs eux-mêmes.

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.

M. Yannick Botrel. Personne ne conteste l’utilité ou l’importance des chambres d’agriculture. Elles rendent de multiples services à la profession agricole. Toutefois, il me semble nécessaire de rappeler un certain nombre d’éléments.

Tout d’abord, je rappelle que, ces deux dernières années, la taxe perçue par les chambres d’agriculture a augmenté de 1,5 %, puis de 1,8 %, soit des hausses significatives. Pour justifier ces augmentations, les mêmes arguments que ceux qui sont développés aujourd'hui avaient été avancés.

Or le monde agricole a profondément changé. Je rappelle ainsi que le nombre d’agriculteurs est en décroissance constante. Pour ma part, je suis élu d’un département agricole qui, lorsque j’étais jeune conseiller général au début des années quatre-vingt-dix, comptait 16 000 agriculteurs. Aujourd'hui, il n’en compte plus que 7 000.

Ensuite, les chambres d’agriculture remplissent un certain nombre de missions à titre onéreux, ce qui est bien normal. À notre collègue qui a dit tout à l’heure que ce sont les propriétaires qui paient cette taxe, je rappelle que les agriculteurs dans leur ensemble ont fait face à un certain nombre de crises et qu’il n’est pas de mauvaise gestion pour les chambres d’agriculture de s’adapter au contexte que je viens de rappeler.

De mon point de vue, des efforts significatifs ont été accomplis les années précédentes. Je me rallie donc à la position de la commission et du Gouvernement : on peut parfois se contraindre à faire des efforts dans un contexte général qui n’est pas favorable à la profession agricole.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. On essaie de faire dériver les choses vers le débat « pour ou contre l’agriculture ». (Protestations sur les travées de l'UMP.) Là n’est évidemment pas le sujet !

En regardant la liste des amendements que nous allons examiner dans quelques instants, je sais que nous allons avoir la même demande en faveur des artisans, des chambres de commerce et d’industrie, etc. On voit bien quelle est la démarche de l’UMP !

M. Roger Karoutchi. Laquelle ? (Exclamations amusées sur de nombreuses travées. – Plusieurs sénateurs du groupe socialiste renchérissent.)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ne vous réjouissez pas trop vite !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je m’interroge donc sur la rationalité de la démarche de nos collègues de l’UMP. (Laquelle ? Laquelle ? sur les travées du groupe socialiste.)

Philippe Marini, s’exprimant à titre personnel, a défendu l’idée que la moindre niche devait être ramenée dans le droit commun. Dans cette optique, l’amendement relatif au CNC lui semblait légitime et rationnel.

Or, chers collègues de l’opposition, vous vous apprêtez maintenant à nous demander de créer des niches supplémentaires. De telles demandes sont inacceptables pour la commission des finances, qu’elles concernent les chambres d’agriculture, les chambres de métiers ou les chambres de commerce.

Je tenais à rappeler ce principe général, ce qui me permettra d’être plus bref lors de la présentation des prochains amendements : ce sera non, non et encore non à toute proposition de créer une nouvelle niche ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Jean-Claude Lenoir. Ce ne sont pas des niches !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Daniel Raoul. Laquelle ? Laquelle ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je ne comprends pas ces interjections… (Sourires.)

Mes chers collègues, ce type d’amendement, qui revient d’année en année, n’est pas original, et cela vaut également pour les chambres d’agriculture ou les chambres de métiers et de l’artisanat.

Dans mes fonctions précédentes, j’ai en général réagi comme l’actuel titulaire : j’ai toujours considéré que les membres d’une chambre consulaire devaient être responsables de leur gestion et contribuer volontairement au financement des frais généraux et des structures dont ils ont besoin. À titre personnel, je ne me suis jamais bien retrouvé dans un système de financement semi-administré qui fait que l’on ne sait pas très bien comment les responsabilités sont exercées.

Telles sont les raisons pour lesquelles je suivrai la commission des finances. Je demande donc à mes amis de bien vouloir en tenir compte.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-178 et I-188.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l'avis la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 42 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Majorité absolue des suffrages exprimés 172
Pour l’adoption 167
Contre 176

Le Sénat n’a pas adopté.

M. Daniel Raoul. Très bien !

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-386, présenté par M. Delahaye, Mme Létard, M. Détraigne, Mme Férat, M. Lasserre et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 13, tableau

Supprimer les deuxième, troisième et quatrième lignes.

II. – Alinéas 33 à 41

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. L’article 26 intègre dans le plafonnement des taxes affectées la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises, la CFE, perçue par les chambres de commerce et d’industrie ainsi que par les chambres régionales de métiers et de l’artisanat. Je tiens à préciser que, à la différence de ce que vient d’indiquer M. le rapporteur général, il ne s’agit pas d’une niche fiscale.

M. François Patriat. C’est quoi, alors ?

M. Vincent Delahaye. C’est une taxe additionnelle à la CFE.

Son plafonnement risque de remettre en cause l’accomplissement d’un certain nombre de missions de service public par ces organismes, lesquels ne peuvent être strictement assimilables à des opérateurs de l’État. Ils n’entrent pas dans le périmètre retenu dans le rapport du Conseil d’État relatif aux agences ni dans celui de l’Inspection générale des finances sur le même thème.

Je crains que cette disposition ne crée un effet de ciseaux particulièrement préjudiciable, eu égard aux perspectives économiques de l’année à venir. Les entreprises auront davantage besoin des services fournis par ces chambres. Dans le même temps, il va être demandé à ces dernières d’assurer un service équivalent, si ce n’est meilleur, avec moins de moyens, alors qu’elles interviennent dans des secteurs absolument vitaux pour l’économie française.

En outre, plafonner cette taxe, qui a déjà une structure complexe, ne ferait que rendre encore moins lisible son fonctionnement, à l’heure où nos concitoyens réclament davantage de transparence et de simplicité en matière fiscale.

M. le président. L’amendement n° I-248, présenté par MM. Adnot, Masson, Türk, Darniche et Bernard-Reymond, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 13, deuxième ligne du tableau

Supprimer cette ligne.

II. En conséquence, alinéa 12

Remplacer le chiffre :

quatre

par le chiffre :

trois

Cet amendement n’est pas soutenu.

L’amendement n° I-376, présenté par M. Delahaye et Mme Létard, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 13, tableau, dernière ligne

Supprimer cette ligne.

II. - Alinéas 33 à 41

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Cet amendement de repli ne vise que les chambres régionales de métiers et de l’artisanat. Son adoption démontrerait que la défense des PME et de l’artisanat est une priorité.

M. le président. L’amendement n° I-301, présenté par M. Reichardt, est ainsi libellé :

Alinéa 13, tableau, dernière ligne, dernière colonne

Remplacer le montant :

280 000

par le montant :

300 000

La parole est à M. André Reichardt.

M. André Reichardt. Le présent article inscrit la taxe pour frais de chambres de métiers et de l’artisanat dans le champ des ressources soumises à un plafond, en modifiant les conditions d’application de l’article 46 de la loi de finances pour 2012 et, en conséquence, les dispositions prévues par l’article 1601 du code général des impôts. En outre, il plafonne à 280 millions d’euros le rendement de la taxe additionnelle à la CFE affectée aux chambres de métiers et de l’artisanat, en application de l’article 1601 du code général des impôts et de l’article 3 de la loi du 16 juin 1948. Or l’évaluation prévisionnelle des recettes nettes pour les chambres de métiers et de l’artisanat est de 286 millions d’euros. Aucun élément du projet de loi de finances n’explique ce montant.

Ce dispositif et l’évaluation des recettes prévisionnelles n’ont fait l’objet d’aucune concertation préalable avec le réseau des chambres de métiers et de l’artisanat, alors qu’il est susceptible d’en affecter les ressources de manière significative, ainsi que l’a indiqué Vincent Delahaye.

Le montant prévisionnel n’intègre pas les dernières informations disponibles.

Si ce plafond était fixé par chaque loi de finances, il pénaliserait très fortement, à n’en pas douter, les chambres de métiers et de l’artisanat. Ces dernières n’auraient aucune visibilité pour établir leurs budgets prévisionnels, sauf à ce que ce plafond soit fixé pour plusieurs années, ce que, naturellement, celles-ci ne souhaitent pas, compte tenu de l’évolution de leurs charges.

De plus, les dispositions de cet article sont contradictoires avec les conditions d’application, telles que prévues par le même projet de loi, de l’article 1601 du code général des impôts. En effet, vous le savez, cet article intègre déjà une mesure de réduction progressive de plus de 10 % sur quatre ans. Cette réforme, d’ailleurs, a déjà eu un impact financier important sur l’ensemble des établissements du réseau.

Par ailleurs, le dispositif mis en place par l’article 26, de par sa complexité, porterait atteinte au principe de sécurité juridique – M. Delahaye a évoqué l’absence de lisibilité que son adoption impliquerait –, qui suppose qu’une disposition législative soit accessible et intelligible, conformément aux principes énoncés par les articles 4, 5, 6, 14 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

En conséquence, le présent amendement vise à porter le plafond de 280 millions d’euros à 300 millions d’euros.

Vous me permettrez de terminer cette intervention en vous disant que, moi non plus, je ne vois pas en quoi cet amendement contribuerait à créer une niche fiscale, puisque ce sont les entreprises membres des chambres de métier et de l’artisanat qui participent au dispositif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je serai bref, car j’ai déjà indiqué la position de la commission lorsque j’ai étendu mon propos aux chambres concernées par ces amendements.

Je tiens à le préciser, les niches dont je parlais il y a un instant sont des exceptions, revendiquées pour des catégories, opérateurs ou organismes publics spécifiques, et non des niches fiscales.

La commission des finances, ayant pour philosophie d’action la réduction des niches, des exceptions et des exonérations de toutes sortes, demande donc aux auteurs des amendements présentés de bien vouloir les retirer. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Tous les opérateurs de l’État et les organismes publics doivent participer à l’effort de maîtrise des dépenses publiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis identique à celui de la commission des finances.

Je souhaiterais éclairer la Haute Assemblée, en lui donnant un aperçu de l’évolution des taxes affectées.

Pour les chambres régionales de métiers et de l’artisanat, la croissance des taxes affectées s’est montée, en moyenne, à 4,7 % par an de 2001 à 2011. Les taxes affectées aux chambres de commerce et d’industrie, quant à elles, ont crû, en moyenne, de 2,5 % par an au cours des quatre dernières années.

Actuellement, les réseaux consulaires sont excédentaires. Ils ont dégagé un résultat net de 161 millions d’euros en 2011 et un bénéfice cumulé de 1 milliard d’euros depuis 2007. De plus, ils ne sont pas dépendants de la fiscalité affectée puisque celle-ci ne représente qu’un tiers de leurs ressources.

Ces éléments me semblent suffisamment parlants pour justifier le texte proposé par le Gouvernement. Chacun le sait, le retour à l’équilibre de nos finances publiques doit se faire par le concours de tous.

Il paraît tout à fait possible de demander cet effort aux chambres régionales de métiers et de l’artisanat ainsi qu’aux chambres de commerce et d’industrie, notamment au regard des chiffres que je viens d’indiquer.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-386.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-376.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-301.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les amendements nos I-93 et I-299 sont identiques.

L’amendement n° I-93 est présenté par M. Collin et Mme Keller.

L’amendement n° I-299 est présenté par MM. Peyronnet et Cambon, au nom de la commission des affaires étrangères.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéas 17 et 18

Supprimer ces alinéas.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État de la suppression du plafonnement de la part du produit de la taxe sur les transactions financières affectée au Fonds de solidarité pour le développement est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l’amendement n° I-93.

M. Yvon Collin. L’aide publique au développement requiert des ressources supplémentaires et stables, qui peuvent lui être apportées par ce qu’on a appelé les « financements innovants ».

La France a été en pointe sur le sujet, notamment grâce aux travaux du groupe de travail sur les nouvelles contributions financières internationales, présidé par Jean-Pierre Landau. Elle a mis en place, dès 2005, une taxe de solidarité sur les billets d’avion, dont le produit est affecté au Fonds de solidarité pour le développement, le FSD. Depuis son entrée en vigueur, cette taxe a permis de drainer 951 millions d’euros vers le financement de l’accès aux vaccins et aux médicaments.

S’inscrivant dans la lignée de ce dispositif, de nombreux acteurs du secteur ont souhaité qu’une part du produit de la taxe sur les transactions financières, la TFF, soit affectée à l’aide publique au développement. Le Président de la République lui-même s’est engagé, le 20 juin dernier, dans le cadre de la conférence des Nations unies sur le développement durable, ou « Rio+20 », à ce qu’une partie des revenus de cette taxe soit affectée au développement.

Nous l’avons bien noté, l’article 27 du présent projet de loi reprend cet engagement et prévoit l’affectation de 10 % du produit de la taxe au FSD, ce qui constitue une avancée importante, d’autant qu’elle est susceptible d’inspirer d’autres pays, notamment européens.

Toutefois, le présent article prévoit de plafonner à 60 millions d’euros la part du produit de la taxe affectée au FSD. Si le produit attendu est de 1,6 milliard d’euros, cela signifierait que seulement 3,75 % de ce montant profiterait effectivement au développement.

Fabienne Keller et moi-même avons donc déposé un amendement tendant à supprimer ce plafond, afin que la part affectée au FSD soit bien de 10 % du produit de la taxe, quel qu’en soit le montant. Jean-Claude Peyronnet et Christian Cambon ont déposé un amendement identique, dont l’esprit a très largement été évoqué, il y a un instant, par ce dernier.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour présenter l'amendement n° I-299.

M. Jean-Claude Peyronnet, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Cet amendement, cosigné par mon collègue et ami Christian Cambon, a été adopté à l’unanimité par la commission des affaires étrangères.

Lors du sommet de Rio, en juin dernier, le Président Hollande avait indiqué qu’il s’engageait à ce que « les recettes de cette taxe soient pour une grande partie reversées aux objectifs de développement ». On nous accordera que, « une grande partie », cela signifie au moins 50 % ; en appliquant 10 % à ce taux, on arrive donc à un total de 5 %. Or, comme vient de l’expliquer notre collègue Yvon Collin, nous nous situons à 3,75 % en raison du plafonnement. Ce pourcentage est insuffisant, même si l’on peut comprendre que la situation des finances publiques impose des contraintes.

Cela étant, vous en conviendrez, mes chers collègues, cette taxe est pleine de vertus. Non seulement elle crée des recettes nouvelles, mais elle met aussi en place un mécanisme qui a une portée quasi morale pourrait-on dire dans la mesure où celui-ci tend à faire financer les actions en faveur de pays ou de zones qui ne bénéficient pas de la mondialisation par ceux qui en profitent le plus, soit grâce aux transactions financières, soit grâce aux trafics aériens.

Nous regrettons donc le plafonnement. Sur la somme de 1,6 milliard d’euros attendue pour la taxe sur les transactions financières, seuls 60 millions d’euros seront effectivement affectés au FSD.

M. le ministre nous a expliqué un mécanisme extrêmement compliqué de compensations, de versements, distinguant crédits de paiement et autorisations d’engagement. Pour notre part, nous souhaitons un système très simple visant à mettre la loi de finances en conformité avec la promesse du Président de la République d’affecter 10 % du produit de la taxe sur les transactions financières à l’aide au développement.

M. le président. L'amendement n° I-309, présenté par Mme Ango Ela, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 18, tableau, dernière colonne

Remplacer le montant :

60 000

par le montant :

160 000

II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par l'augmentation du taux de la taxe mentionnée à l'article 235 ter ZD du code général des impôts.

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Je propose une autre solution : non pas déplafonner, mais augmenter le plafond à hauteur de 160 millions d’euros. Cette disposition permettrait tout simplement de répondre à l’engagement du Président de la République, du moins tel que nous, écologistes, l’avions compris, à savoir affecter 10 % de la taxe à l’aide au développement. Nous disons : chiche !

Il est évident que la France doit honorer la parole qu’elle a donnée officiellement. L’adoption de cet amendement permettrait au Parlement et au Gouvernement de reprendre à leur compte la promesse du Président de la République.

Cet amendement devrait également être voté par tous ceux qui prétendent que la France est « envahie » par des gens qui viennent chercher chez nous un bien-être qu’ils n’ont pas chez eux. Cette disposition est en effet un bon moyen de permettre une transition de ces pays vers le développement. Nous pourrions ainsi leur apporter une petite partie de ce confort chez eux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Le dispositif de la TTF, en faveur duquel la France s’est engagée relativement tôt dans le concert international, a été voté sous la mandature précédente, mais son taux a été doublé par le projet de loi de finances rectificative de juillet dernier. Cette taxe offre une ressource tout à fait nouvelle au budget de l’État, et la question a été posée de son utilisation.

L’article 27, que nous allons examiner tout à l’heure, prévoit d’affecter le produit de la taxe à l’aide au développement. Cet engagement du Président de la République, qui a marqué une avancée importante, incitera certains pays, notamment européens, à suivre cette voie. Nous pouvons donc d’ores et déjà être reconnaissants au Président Hollande d’avoir montré l’exemple en annonçant son intention de tendre vers un taux de l’ordre de 10 %. Le plafond devrait être amené à augmenter progressivement au cours des deux prochaines années pour atteindre 100 millions d’euros en 2014 et 160 millions d’euros en 2015.

Dans le projet de budget pour 2013, l’affectation du produit de la taxe est certes plafonnée à 60 millions d’euros. Cependant, nous savons qu’il y aura une montée en escalier en trois ans pour atteindre la somme que je viens de citer. Il me semble donc raisonnable de prendre acte de cette orientation et de nous en tenir là pour l’instant. Si nous suivions nos collègues, le coût serait de 100 millions d’euros supplémentaires. Or je crains que le contexte budgétaire ne permette pas d’aller aussi vite en besogne.

Je propose de rejeter les trois amendements, même si j’adhère à leur philosophie et si je reconnais la nécessité de faire monter l’aide au développement en puissance. Mais il faut aussi tenir compte de nos contraintes.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est d’un avis identique à celui de M. le rapporteur général.

Madame Lipietz, il est prévu 60 millions d’euros l’année prochaine, 100 millions d’euros la suivante et 160 millions d’euros celle d’après. Dans le courant du quinquennat, l’engagement du Président de la République sera donc bien tenu.

Je voudrais rappeler que la France, avec une aide aux pays en voie de développement estimée à 9,35 milliards d’euros en 2011, est le quatrième contributeur mondial en valeur absolue. L’aide fournie, rapportée à notre revenu national brut, nous place en réalité au deuxième rang des pays les plus industrialisés, juste après la Royaume-Uni, mais devant l’Allemagne.

Il me semble donc qu’il n’y a aucune honte à demander au Parlement d’affecter 60 millions d’euros du produit de la taxe sur les transactions financières à l’aide publique au développement. Nous nous inscrivons ainsi dans la tradition historique française en fournissant des moyens très élevés.

La parole du Président de la République sera respectée. À ceux qui en doutent, je donne naturellement rendez-vous dans deux ans.

Je pense ainsi avoir également répondu à l’amendement n° I-93 présenté par M. Collin et à l’amendement n° I-299 défendu par M. Peyronnet. Le Gouvernement est en effet défavorable à ces trois amendements.

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, pour explication de vote sur les amendements nos I-93 et I-299.

M. Christian Cambon. Nous sommes à un moment important de la discussion budgétaire, qui concerne la politique de la France en matière d’aide au développement.

Nous connaissons tous le contexte de la délibération qui a inspiré ces amendements. Sous tous les gouvernements, nous invoquons l’objectif de 0,7 % du PNB à consacrer, dans l’idéal, à l’aide au développement. Nous savons bien que la réalité est tout autre.

Nous intégrons, dans le chiffre de 9 milliards d’euros que vous venez d’évoquer, monsieur le ministre, des sommes qui ne devraient pas y figurer, je pense notamment aux frais d’écolage et à certaines dépenses en faveur des collectivités d’outre-mer. Vous savez très bien que nous n’arriverons pas à ce taux de 0,7 % qu’ont atteint les Anglais depuis déjà un certain temps.

Comme il y a, depuis maintenant deux ans, un consensus dans cette assemblée autour de la taxe sur les transactions financières, nous devons enfin mettre nos paroles en conformité avec nos actes. En d’autres termes, monsieur le ministre, nous ne pouvons pas prétendre faire appel à la logique comptable, puisque, en l’occurrence, il s’agit de recettes nouvelles, qui n’existaient donc pas dans le précédent budget. Nous pouvons donc envisager de faire un geste fort en faveur des pays en voie de développement.

D’ailleurs, cela a déjà été fait ! À cet égard, monsieur le rapporteur général, vous auriez pu souligner que cette initiative avait été prise sous le précédent quinquennat…

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je l’ai fait !

M. Christian Cambon. … et que mon collègue Jean-Claude Peyronnet et moi-même avions fait voter le principe de cette taxe, reprise du reste par Mme Bricq, au nom de la commission des finances, l’année dernière, sous la précédente majorité gouvernementale.

Il y a donc une continuité, et nous souhaitons aujourd’hui pouvoir marquer, par ce geste fort que représenterait l’adoption de ces amendements, la volonté de la France de rester en tête des pays contributeurs.

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, vous nous dites qu’il faut inciter les pays européens. Soit ! Mais, pour ce faire, il faut montrer nous-mêmes l’exemple. Il en fut ainsi avec l’instauration de l’euro prélevé sur les billets d’avion. Cette taxe, totalement indolore pour les usagers des transports aériens, produit des sommes considérables et a permis de vacciner et de soigner des dizaines de millions d’enfants dans les pays en voie de développement.

Le principe de la taxe sur les transactions financières est bon, à partir du moment où l’assiette est large et le taux minime. Mettons-la en œuvre sans la plafonner ni en limiter les effets en arguant de contraintes budgétaires.

Les déclarations du Président Hollande, que je salue, faisaient écho à celles du Président Sarkozy au G20 de Cannes. Mais il faut aller plus loin ! Le Sénat, toutes tendances confondues, peut s’illustrer en votant ces amendements et mettre enfin notre parole en conformité avec nos actes. Nombre de pays, notamment ceux du sud du Sahel, attendent tant de la France et de l’Europe. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)