Mme la présidente. L'amendement n° 274, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant l’alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… - Le VII de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« VII. - Lorsque l’employeur, durant l’année civile, n’a pas conclu d’accord salarial dans le cadre des obligations définies aux articles L. 2242-5 et L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code, la réduction est supprimée. »

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. La présentation de cet amendement me donne l’occasion d’évoquer la question de l’égalité professionnelle. Comme celui que vient de défendre Isabelle Pasquet, il vise à insérer un paragraphe dans le code de la sécurité sociale et à imposer, en quelque sorte, une obligation de résultat aux employeurs.

Je déplore que la question de l’égalité salariale n’ait pas figuré ni dans la feuille de route de la négociation ni dans le présent projet de loi et qu’elle ait été renvoyée à une autre négociation, toujours en cours elle, sur la qualité de vie au travail. Cette situation me rappelle d’autres négociations, qui, elles non plus, n’ont pas abouti. Je pense à celles qui sont relatives aux conditions de travail, qui ont suscité de nombreux débats, sans toutefois aboutir.

En l’espèce, l’impasse actuelle est choquante et contradictoire avec la politique portée depuis bientôt un an par la ministre des droits des femmes et avec certains propos du Président de la République. En effet, le 9 juillet dernier, lors de la conférence sociale, ce dernier, s’adressant aux partenaires sociaux, déclarait : « En ce qui concerne l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, trop de retards ont été accumulés. [...] Le droit à l’égalité existe, il faut l’appliquer. J’attends de vous [il s’adressait aux partenaires sociaux] des propositions précises, assorties d’un calendrier exigeant ». Je ne peux que souscrire à ces propos.

Par conséquent, ne pas avoir introduit cette dimension de « genre » lors de la négociation de l’ANI est aberrant tant les inégalités professionnelles perdurent.

À cet égard, au moment de la présentation du rapport annuel de la délégation aux droits des femmes, sa présidente, Brigitte Gonthier-Maurin, a bien décrit ce fait. Pour ne prendre qu’un exemple, en 2012, à emploi et compétences égales, les salaires des femmes étaient encore, en moyenne, inférieurs de 27 % à ceux des hommes.

Cette absence de prise en compte est pire encore s’agissant du temps partiel, quand on sait que celui-ci concerne à 82 % des femmes, chiffre qui dépasse les 90 % dans les secteurs de l’éducation, de la santé et de l’action sociale, observation qui rejoint celle de notre collègue Ronan Kerdraon.

Rappelons que cette dimension « genrée » ne figure pas non plus dans l’étude d’impact du projet de loi, et ce malgré l’engagement du Gouvernement de rendre systématiques les études d’impact « genrées » à propos de tous les projets de loi, engagement rappelé le 16 octobre dernier par la ministre des droits des femmes, Mme Najat Vallaud-Belkacem, lors de son audition par la délégation aux droits des femmes du Sénat.

Il est donc temps aujourd’hui de passer de l’égalité formelle à l’égalité réelle, pour reprendre la formule de notre collègue Catherine Génisson. C’est ce que je vous propose, mes chers collègues, par le biais de cet amendement, qui, je le répète, vise à imposer à l’employeur une obligation de résultat en matière d’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, assortie d’une menace réelle et dissuasive de sanction financière.

Outre ses effets positifs immédiats pour les comptes sociaux, cette disposition donnerait plus de poids à la négociation, notamment sur la question des écarts et des inégalités salariales, et aux actions des organisations syndicales contre le recours au temps partiel subi.

Mme la présidente. L'amendement n° 277, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant l’alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… - L’article L. 2242-5-1 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 2242-5-1. – Les entreprises d’au moins 20 salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l’employeur lorsqu’elles ne sont pas couvertes par un accord relatif à l’égalité salariale et professionnelle mentionné à l’article L. 2242-5. Les modalités de suivi de la réalisation des objectifs et des mesures de l’accord sont fixées par décret.

« Le montant de la pénalité prévue au premier alinéa du présent article est fixé au maximum à 5 % des rémunérations et gains au sens du premier alinéa de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et du premier alinéa de l’article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime versés aux travailleurs salariés ou assimilés au cours des périodes au titre desquelles l’entreprise n’est pas couverte par l’accord mentionné au premier alinéa du présent article. Le montant est fixé par l’autorité administrative, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État, en fonction des motifs de sa défaillance quant au respect des obligations fixées au même premier alinéa.

« Le produit de cette pénalité est affecté au fonds mentionné à l’article L. 135-1 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. Cet amendement tend à rédiger différemment l’article L. 2242-5-1 du code du travail et à augmenter significativement la pénalité due par les entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord relatif à l’égalité salariale et professionnelle entre les hommes et les femmes.

Comme vous le savez, mes chers collègues, les entreprises d’au moins cinquante salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l’employeur lorsqu’elles ne sont pas couvertes par un tel accord ou si celui-ci n’a pas mis en œuvre, de manière unilatérale, conformément aux dispositions introduites à l’occasion de la réforme des retraites, un plan d’action.

À vrai dire, ces mesures sont peu dissuasives. C’est sans doute la raison pour laquelle bon nombre d’employeurs préfèrent courir le risque de la sanction plutôt que d’appliquer la loi.

Qui plus est, nous regrettons que la pénalité financière dont il est question sanctionne le non-respect de l’obligation de négociation, alors qu’il aurait été beaucoup plus efficace de sanctionner le défaut d’accord.

Lors du débat sur les contrats de génération, à la demande du Gouvernement a été instauré un mécanisme judicieux, qui conditionne la distribution d’aide publique à la signature d’un accord entre partenaires sociaux, ou tout du moins à celle d’un procès-verbal de désaccord. Pourquoi ne pas envisager, dans le domaine de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, une disposition similaire ?

Qui plus est, nous ne pouvons accepter que l’employeur puisse se soustraire à ses obligations en élaborant seul, sans concertation, sans peut-être même une réelle volonté de réduire les inégalités salariales, un plan unilatéral. Nous contestons ce principe et, comme nous avons de la mémoire, nous ne souvenons que le groupe socialiste du Sénat en faisait tout autant en 2010.

Notre collègue Gisèle Printz affirmait alors, à raison : « En cas d’absence d’accord, ou de plan d’action, l’autorité administrative fixera le montant de la pénalité “en fonction des efforts constatés dans l’entreprise [...] ainsi que des motifs de sa défaillance.” On s’éloigne de la sanction automatique et donc de l’efficacité du dispositif. ». Et notre collègue Roland Courteau, également conscient de l’insuffisance de la mesure, exigeait en ces termes un durcissement : « Il faut absolument augmenter le montant de la pénalité en cas d’absence d’accord ou d’absence de plan d’action relatif à l’égalité salariale. »

Nous ne doutons donc pas un instant que l’amendement n° 277, dont les dispositions se placent dans la continuité des positions que nous avons défendues collectivement, à gauche, sera adopté.

Mme la présidente. L'amendement n° 664 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. Alinéas 1 à 4

Rédiger ainsi ces alinéas :

I. – Le chapitre Ier du titre IV du livre II de la deuxième partie du code du travail est complété par une section 5 ainsi rédigée :

« Section 5

« Temps partiel

« Art. L. 2241-13. – Les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels ouvrent une négociation sur les modalités d’organisation du temps partiel dès lors qu’au moins un tiers de l’effectif de la branche professionnelle occupe un emploi à temps partiel. 

II. Alinéa 35

Remplacer la référence :

L. 2241-6-1

par la référence :

L. 2241-13

La parole est à M. le ministre.

M. Michel Sapin, ministre. Les partenaires sociaux n’ont pas souhaité introduire une nouvelle négociation périodique obligatoire. Ils ont, en revanche, souhaité l’établissement d’un seuil d’effectif à temps partiel qui déclencherait l’obligation de négocier.

Cet amendement vise donc à revenir aux dispositions primitives.

Mme la présidente. L'amendement n° 288, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéas 4 et 5

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 2241-6-1. - Les entreprises dans lesquelles au moins un tiers de leur effectif occupe un emploi à temps partiel sont soumises à une majoration de 10 % des cotisations dues avant exonération prévue à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale par l’employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales pour l’ensemble de leurs salariés à temps partiel. »

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Les temps partiels, qui sont surtout imposés aux femmes, et la précarité qu’ils engendrent ne sont pas acceptables, plusieurs intervenantes et intervenants l’ont dit. La multiplication, depuis plusieurs décennies, des emplois à temps partiel nous conduit à poser clairement la question de l’utilité sociale de ces formes de contrats, de leurs effets sur la société et donc de l’opportunité de maintenir le cadre juridique actuel.

Nous considérons, pour notre part, que l’immense majorité de ces contrats ne répondent pas obligatoirement à des besoins spécifiques ni à une finalité industrielle précise, pas plus qu’à des impératifs présentés comme incontournables.

Aujourd’hui, le problème est qu’il n’existe aucun frein à ce que les employeurs fassent systématiquement primer l’intérêt de l’entreprise sur les droits des salariés. Ils sont donc libres de choisir les modes d’organisation de travail qui permettent de dégager le plus de marge bénéficiaire, y compris si cela suppose de faire pression sur les salaires. Je pense particulièrement, entre autres exemples, aux 900 000 caissières à temps partiel que compte notre pays, et qui vivent, ou plutôt survivent, avec des salaires inférieurs à 900 euros par mois.

En fait, on permet aux employeurs de faire de l’optimisation sociale sur le compte de notre système de protection sociale, et ce n’est pas admissible.

Les employeurs ont fait leurs comptes : il est plus rentable pour eux de recruter deux salariés à temps partiel qu’un salarié à temps plein. C’est plus rentable pour eux, mais pas pour la collectivité !

L’article L. 242-8 du code de la sécurité sociale prévoit en effet un abattement en faveur des salariés à temps partiel. Cet abattement d’assiette est destiné à compenser la différence entre le montant des cotisations dues au titre de chacun de ces salariés et le montant des cotisations qui seraient dues pour une durée de travail identique dans le cas où chacun d’eux travaillerait à temps complet.

La question à laquelle nous devons donc répondre est la suivante : les pouvoirs publics doivent-ils continuer à soutenir de tels contrats, qui, notre collègue Catherine Génisson l’a rappelé, constituent des discriminations indirectes à l’emploi à temps plein dans la mesure où l’immense majorité des temps partiels sont proposés aux femmes ? Au groupe CRC, nous répond par la négative. Nous affirmons même l’inverse !

Les emplois les plus précarisants, ceux qui provoquent le plus de maladies et de stress, qui plombent le plus les comptes sociaux et publics, doivent être taxés dans une proportion telle que les employeurs n’auraient plus d’intérêt à proposer de tels contrats.

Pour ce faire, nous proposons que les entreprises qui emploient plus d’un tiers de leurs effectifs à temps partiel se voient imposer une majoration de cotisation sociale – pour la part patronale, s’entend – de l’ordre de 10 %.

Mme la présidente. L'amendement n° 286, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

« Art. L. 2241-6-1. - Dans les trois mois qui suivent la promulgation de la présente loi, les organisations liées par une convention

La parole est à Mme Michelle Demessine.

Mme Michelle Demessine. Derrière les apparences d’un amendement rédactionnel, cet amendement soulève une question importante, celle du moment à partir duquel devraient débuter les négociations entre partenaires sociaux portant sur les modalités d’organisation du temps partiel.

En effet, en l’état, l’article 8 ne précise rien quant à cette date, laissant supposer que, dans le silence du texte, il appartiendra aux partenaires sociaux de proposer que cette négociation soit entamée. On peut d’ailleurs s’appuyer sur l’exemple de la négociation sur l’égalité salariale, que les employeurs boudent obstinément, tout « partenaires sociaux » qu’ils sont...

Lors de la discussion générale, beaucoup d’intervenants du groupe socialiste et M. le ministre lui-même ont dit qu’ils ne comprenaient pas la méfiance que nous pouvions nourrir sur ce texte et sur le patronat.

En réalité, il ne s’agit pas de méfiance, ni même de défiance, mais d’un constat. De manière empirique, nous avons constaté combien les employeurs pouvaient faire preuve d’imagination pour se soustraire à leurs obligations, y compris lorsque celles-ci se bornent à engager des négociations, alors même que lesdites négociations ne doivent pas obligatoirement déboucher sur un accord. Ne voulant pas noircir le tableau en multipliant les exemples, je me contenterai d’évoquer les obligations en matière de sécurité et de santé au travail, que les employeurs sont, là encore, loin de respecter.

Voyez-vous, mes chers collègues, ce n’est pas vouloir instaurer une société de défiance à l’égard de quiconque que de prévoir des obligations particulières pour celles et ceux qui sont placés dans une situation de donneur d’ordres. Les employeurs doivent se voir imposer un cadre minimum parce qu’ils ont des responsabilités économiques, sociales et sanitaires à l’égard des salariés.

Le discours qui prône le laisser-faire pour ne pas gêner, qui impose de ne pas intervenir pour ne pas freiner l’emploi, n’est pas sans nous rappeler le discours de celles et ceux qui, avant l’explosion de la crise financière, affirmaient tranquillement qu’il fallait libéraliser l’économie parce que les marchés se régulaient d’eux-mêmes. On voit aujourd'hui le résultat : il aura fallu que l’État intervienne pour sauver les banques !

Refuser de poser les cadres légaux des rapports entre salariés et employeurs, c’est accepter par avance que l’État soit contraint de jouer un rôle de pompier social, sans que les employeurs aient à supporter les conséquences de leurs actes.

Agir en amont, voilà notre ambition. Cet amendement s’inscrit dans cette logique en proposant que la négociation dont il est question débute dans les trois mois qui suivent la promulgation de la loi.

Mme la présidente. L'amendement n° 291, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

d’organisation du temps partiel

par les mots :

à mettre en œuvre afin de réduire le nombre de contrats à temps partiel

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Le temps partiel a explosé, passant de 8 % de l’emploi total il y a trente ans à près de 19 % aujourd’hui, soit plus de 4 millions de salariés. Parmi eux, 80 % sont des femmes. Ce pourcentage atteint jusqu’à 84 % dans la grande distribution, 87 % dans l’éducation, la santé et l’action sociale, 88 % dans le nettoyage, culminant à 93 % dans les activités financières. Au total, plus de 30 % des femmes sont employées à temps partiel, contre 7 % des hommes.

La part des embauches en contrat à durée déterminée n’a jamais été aussi forte. Selon une étude du ministère du travail publiée le 15 mars 2013, elle a atteint 81,7 % au troisième trimestre de 2012 dans les entreprises de plus de dix salariés. Ce niveau a grimpé de 0,7 point en un trimestre et de 3,3 points en un an. Trois contrats signés sur quatre sont des contrats à durée indéterminée ou des contrats intérimaires.

II y a un lien entre cette explosion du temps partiel et des contrats à durée déterminée et la hausse continue du chômage.

Les contrats précaires ont encore, avec ce texte, de beaux jours devant eux ! On ne peut pas lutter contre le chômage en organisant le temps partiel. Il faut lutter contre le chômage en favorisant l’insertion durable dans l’emploi et les temps pleins.

C’est pourquoi nous souhaitons qu’on se fixe un objectif de réduction plutôt que d’organisation du temps partiel, qu’on pourrait assimiler à de la précarité.

Les ouvrières et ouvriers et les employés subissent bien plus que d’autres cette précarité. Ils représentent près de 30 % des emplois précaires, alors qu’ils ne représentent que 10 % des emplois en temps plein. Ils subissent ainsi des horaires variables et irréguliers – tôt le matin, tard le soir, le week-end, avec de longues coupures dans la journée et des temps de transport importants –, des salaires bas, que ce soit au mois ou à l’heure – 11,20 euros en moyenne, contre 14,80 pour les temps plein – et un faible accès aux droits sociaux – assurance chômage, assurance maladie – et à la formation. Ils ont également peu de jours de congés pour se déconnecter de leur sort quotidien et, au final, ne bénéficient que de faibles pensions de retraite. C’est bien ce qu’on rassemble sous le vocable de « précarité ».

Mme la présidente. L'amendement n° 278, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après les mots :

modalités d’organisation

insérer les mots :

et de résorption

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. L’alinéa 4 de l’article 8 prévoit que « les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent pour négocier tous les trois ans sur les modalités d’organisation du temps partiel ».

Ainsi, les organisations syndicales, qui représentent les intérêts des salariés, ne pourraient exiger des employeurs l’ouverture de négociations qu’à la condition que ces dernières ne portent que sur l’organisation du temps partiel, c’est-à-dire sur les modalités de son application dans l’entreprise.

Cette disposition nous étonne dans la mesure où l’immense majorité des organisations syndicales, y compris celles qui ont signé l’accord, considèrent que le temps partiel est plus généralement subi que choisi et qu’il s’agit d’un mode d’organisation du travail qui répond plus aux exigences du patronat qu’aux besoins réels des salariés concernés.

De fait, cet article limite le champ de négociation à la question de l’organisation. Cela nous conduit à nous poser la question de l’utilité de la négociation. Il nous semble qu’elle doit avoir pour objet de permettre à l’ensemble des actrices et acteurs, c'est-à-dire aux employeurs et aux salariés, par le biais de leurs représentants, de chercher des points de compromis permettant de déboucher sur un accord.

Or cet alinéa limite déjà considérablement la portée de cet accord puisqu’il prive les syndicats du droit de faire porter la négociation sur ce qui nous paraît être au cœur des inégalités que subissent les femmes : l’existence même du temps partiel.

Bien entendu, l’organisation dans l’entreprise des temps partiels peut avoir des conséquences négatives sur la vie des salariées, notamment en termes de conciliation ou d’articulation entre une ou plusieurs activités professionnelles, d’une part, et la vie privée, d'autre part.

Ce qui est grave dans les contrats à temps partiel, ce ne sont pas tant leurs modalités pratiques que leurs conséquences directes sur le niveau et la qualité de vie des salariés. D’où cet amendement.

Comme nous n’avons pas la possibilité de nous expliquer sur les autres amendements, je veux simplement signaler à M. le ministre que, si son amendement n° 664 rectifié avait été mis aux voix séparément, le groupe CRC ne l’aurait pas voté.

En effet, monsieur le ministre, par cet amendement, vous revenez sur cet alinéa qui, déjà très restrictif de notre point de vue, permettait au moins que des négociations s’engagent tous les trois ans. Vous venez de nous dire que les partenaires sociaux ne voulaient pas s’engager dans cette voie. Or la rédaction actuelle du projet de loi résulte des conclusions auxquelles était arrivée notre commission. Je rappelle en effet que la disposition prévoyant des négociations tous les trois ans provient d’un amendement proposé par notre rapporteur et adopté en commission des affaires sociales, avec un vote unanime des commissaires de gauche.

Je trouve très dommage, monsieur le ministre, que vous reveniez sur les travaux de notre commission, surtout sur ce sujet de la négociation relative au temps partiel, sujet très important à nos yeux. Il est déjà fort regrettable que l’article ne prévoie qu’une négociation sur l’organisation des temps partiels. Si cet amendement est adopté, il n’y aura même plus la négociation triennale !

Mme la présidente. L'amendement n° 279 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

ou qu'un nombre de comités d'entreprise ou de comités d'hygiène, de sécurité et de santé au travail, déterminé par décret en fait la demande

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Cet amendement tend à modifier les conditions dans lesquelles s’engage la négociation triennale sur les modalités d’organisation du temps partiel dans l’entreprise.

L’alinéa 4 prévoit actuellement que cette négociation n’est ouverte qu’à la condition qu’au moins un tiers de l’effectif de la branche professionnelle occupe un emploi à temps partiel.

Cette disposition nous interpelle, car elle tend à faire croire qu’il n’y aurait pas lieu de chercher à encadrer les temps partiels, ni à les réduire, dès lors que moins d’un tiers des salariés seraient concernés par cette forme atypique et dérogatoire de contrat de travail.

Est-ce à dire que l’on peut se satisfaire qu’un tiers de la population travaille à temps partiel, qu’un tiers des salariés, principalement des femmes, soient contraints de vivre avec des revenus compris entre 600 et 900 euros ? Est-ce là la société que nous voulons construire pour nos enfants ? Une société dans laquelle, après tout, il serait admissible qu’un tiers des salariés ne puisse pas prétendre à la même vie que les autres…

Le temps partiel subi, qui représente tout de même l’immense majorité des cas, est un fléau. Un fléau, ça ne s’aménage pas, ça se combat !

C’est la raison pour laquelle nous proposons de compléter cet alinéa en précisant qu’il sera également possible d’ouvrir une négociation triennale sur les modalités d’organisation du temps partiel si un nombre de comités d’entreprise ou de comités d’hygiène, de sécurité et de santé au travail déterminé par décret en fait la demande.

Mme la présidente. L'amendement n° 287, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette négociation porte notamment sur la réduction dans les entreprises des inégalités sociales et salariales entre les femmes et les hommes.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Vous l’aurez compris, lutter contre la précarité et les inégalités salariales entre les femmes et les hommes constitue pour notre groupe une priorité fondamentale, car nous savons combien les femmes souffrent de cette situation. Elles en souffrent dans l’entreprise, étant presque dans l’impossibilité, compte tenu des difficultés qu’elles rencontrent, d’accéder aux postes à responsabilités ou de bénéficier d’une rémunération égale à celle des hommes. Mais elles en souffrent aussi dans leur vie privée, leur pouvoir d’achat étant amputé par les écarts de rémunération qu’elles subissent et par la persistance de la domination patriarcale.

Denise Comanne, militante de la cause des femmes et membre du Comité pour l’annulation de la dette du Tiers-Monde, a particulièrement bien mis en évidence le fait que la domination masculine ne se réduit pas à une somme de discriminations, mais constitue un système cohérent qui façonne tous les domaines de la vie, collective et individuelle. Comment nier que, du fait du modèle patriarcal, les tâches domestiques restent largement dévolues aux femmes ? Comment nier que les femmes sont victimes d’une surexploitation salariale, l’argument invoqué étant que leur travail serait moins productif que celui des hommes ?

En réalité, toutes les excuses sont bonnes pour que le système perdure, avec l’idée que les salaires des femmes ne sont au final que des salaires d’appoint.

C’est encore une manière de minorer l’apport des femmes au travail et à l’économie, ce qui revient à justifier un écart de salaire de l’ordre de 20 %, que nous n’acceptons pas et n’accepterons jamais.

Il est important de faire progresser les salaires des femmes, car on sait que, quand on tend vers l’égalité entre les femmes et les hommes, on fait progresser l’ensemble du monde du travail. C’est donc dans l’intérêt de toutes et de tous que nous vous proposons d’adopter cet amendement, qui prévoit que la négociation triennale devra aborder la question de la réduction des inégalités entre les femmes et les hommes.

Mme la présidente. L'amendement n° 289, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Dominique Watrin.