Mme Valérie Létard. Parmi les différents amendements déposés par notre groupe, celui-ci vise l’une des mesures sociales que nous souhaiterions voir mises en œuvre. Comme nous le rappelions lors de la discussion générale, nous avons cherché à présenter des propositions équilibrées entre la protection des consommateurs, notamment les plus fragiles d’entre eux, et le renforcement de la sécurité juridique des entreprises.

Les clients pauvres et modestes des fournisseurs de services essentiels, comme l’énergie, l’eau et les télécommunications, subissent souvent une « double peine » : plus ils sont pauvres, plus le service rendu leur coûte cher, relativement aux prix payés par les autres clients. Cette réalité économique a été démontrée par plusieurs études.

Les frais supplémentaires suscités par l’utilisation de moyens de paiement alternatifs au prélèvement automatique représentent une « double peine » vécue difficilement par les ménages précaires. En effet, le prélèvement automatique se généralise, mais il ne convient pas à des ménages ayant besoin de plus de souplesse pour gérer leur trésorerie ou se trouvant en interdit bancaire – un autre sujet de ce projet de loi –, donc privés de carte de paiement et de chéquiers. Leur situation socio-économique leur impose d’utiliser les espèces.

Or le mandat cash réalisé dans un bureau postal pour transférer des espèces coûte environ 7 euros. Si le fournisseur n’a pas conclu d’accord avec les services postaux, le mandat compte est facturé, quant à lui, environ 5 euros.

Deux mesures sont nécessaires pour supprimer cette pénalisation de la pauvreté : élargir aux fournisseurs d’eau et de télécommunications l’obligation de proposer, parmi les modes de paiement utilisables, le chèque et un moyen de paiement en espèces et rendre gratuite l’utilisation du mandat compte pour le paiement des factures d’énergie, d’eau, de téléphonie et d’accès à internet.

Vous le comprenez, monsieur le ministre, nous sommes ici au cœur des préoccupations auxquelles ce texte doit répondre. Alors que, nous le savons, le coût de l’énergie fait augmenter fortement le surendettement, une mesure de cette nature permettrait peut-être de réduire quelque peu ce type de difficultés.

M. le président. La parole est à Mme Delphine Bataille, pour présenter l’amendement n° 516.

Mme Delphine Bataille. Au travers de cet amendement identique à celui de ma collègue Valérie Létard, nous souhaitons faire en sorte que les fournisseurs de services de téléphonie, d’accès à internet, d’électricité, de gaz et d’eau proposent à leurs clients une solution de paiement adaptée à leur situation.

En effet, les personnes qui se trouvent en état de fragilité, eu égard notamment à leurs ressources, subissent une « double peine » du fait de la généralisation du virement comme mode de paiement, lequel se révèle parfois totalement inadapté aux moyens dont disposent nos concitoyens.

Par ailleurs, s’agissant de la fourniture d’énergie, l’amendement tend également à proposer un paiement gratuit par mandat compte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Fauconnier, rapporteur. De nombreux fournisseurs offrent déjà la possibilité de payer par mandat compte sans frais supplémentaires, soit à tous les consommateurs, soit à ceux qui bénéficient des tarifs sociaux. Ils peuvent conclure une convention en ce sens avec la poste.

Il paraît toutefois paradoxal de faire porter dans certains cas le coût de ce moyen de paiement sur le consommateur, alors que, bien souvent, celui-ci n’a pas la possibilité de recourir à un autre moyen de paiement.

Par conséquent, je demande l’avis du Gouvernement sur ce sujet délicat.

M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je prendrai un exemple, sans citer le nom d’une entreprise. Tout à l’heure, j’ai évoqué un grand équipementier et une grande marque d’électroménager, en citant des chiffres qui étaient des ordres de grandeur. Je précise d'ailleurs que je n’avais pas examiné le détail de la dernière communication financière de ces groupes !

Ces amendements identiques visent à insérer un article additionnel après l’article 9, afin que les fournisseurs d’électricité, de gaz naturel, de téléphonie, d’accès à internet, ainsi que les délégataires du service public de distribution d’eau et d’assainissement, proposent à leurs clients certains moyens de paiement : le chèque, les espèces et, gratuitement, le mandat compte.

Je rappelle tout d’abord que, en matière de moyens de paiement, les consommateurs bénéficient déjà d’un ensemble de règles protectrices, qui sont fixées par le code monétaire et financier. Outre l’encadrement très strict du paiement en espèce, ce code pose le principe de l’interdiction du surcharging, c'est-à-dire de l’application de frais supplémentaires pour l’utilisation d’un mode de paiement donné.

Par ailleurs, l’imposition d’un mode de paiement unique peut d’ores et déjà être appréhendée par le droit sous l’angle des clauses abusives, sur le fondement de plusieurs recommandations de la Commission des clauses abusives.

Sous réserve du respect de ces règles, les entreprises éditant des factures doivent bénéficier, à nos yeux, d’une certaine latitude pour promouvoir les modes de paiement les plus fiables et les moins coûteux.

Je prendrai un exemple : dans le domaine de la téléphonie, que vous évoquiez, un certain nombre de marques proposent un forfait à deux euros. Or l’ouverture d’un guichet dédié pour recueillir des paiements à deux euros occasionnera des frais qui vont paraître assez disproportionnés par rapport à l’objectif que vous cherchez à atteindre.

De plus, les frais concernant la collecte de ces paiements en espèces vont immanquablement être répercutés plus tard sur les prix payés par les consommateurs, ce qui me laisse à penser que l’impact de cette mesure pour ceux-ci pourrait finalement être négatif, outre les aspects pratiques de la mise en œuvre de ces paiements.

Je pense vous avoir donné suffisamment de garanties concernant l’état actuel du texte. C’est la raison pour laquelle j’émettrai un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Quel est à présent l’avis de la commission ?

M. Alain Fauconnier, rapporteur. La commission était plutôt favorable à ces amendements. Par conséquent, j’aurais tendance à ne pas suivre l’avis de M. le ministre.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Mme Valérie Létard. Monsieur le ministre, vous savez très bien que cette mesure a été fortement encouragée par l’ensemble du réseau associatif. Les grandes associations étaient très demandeuses, car elles accompagnent les nombreuses familles qui sont en situation de grande vulnérabilité, confrontées à des difficultés importantes et défavorisées par ce système.

Vous l’avez rappelé dans votre explication, et vous en avez bien conscience, il est possible de faire autrement. Les garanties que vous proposez sont insuffisantes. Sinon, ces associations n’accueilleraient pas autant de familles qui n’ont pu faire autrement que d’être redevables de ces cinq ou sept euros chaque fois qu’elles doivent procéder au paiement de leurs dettes ou de leur facture d’eau ou d’énergie.

Je reprends ma casquette d’élue locale pour insister sur ce point. J’ai des échanges réguliers avec les caisses d’allocations familiales sur les grands problèmes d’impayés et de surendettement. À l’heure actuelle, on constate une explosion des factures d’énergies chez les ménages fragiles. Cet élément supplémentaire ne fera qu’accentuer ce phénomène.

Il ne me semble pas du tout inutile de renforcer les modalités qui permettent de trouver des solutions en faveur de ces ménages modestes et des entreprises. Lorsque ces dernières leur adressent une facture, les dispositions qui sont certes en vigueur dans la loi sont très difficilement accessibles à ces particuliers.

M. le président. La parole est à M. Ladislas Poniatowski, pour explication de vote.

M. Ladislas Poniatowski. Monsieur le ministre, vous manquez de souplesse en permanence depuis le début de l’examen de ce texte ! (Non ! sur les travées du groupe socialiste.)

Je vous ai bien entendu au tout début du débat. Vous vous êtes félicité de nos discussions et avez affirmé les avoir attendues, d’autant que la variété des sujets le permet. Toutefois, si on calcule le nombre de fois où vous avez dit non à des amendements depuis le début de l’examen de ce texte, on s’aperçoit que la proportion est spectaculaire !

Mme Gisèle Printz. Pas plus que vous !

M. Ladislas Poniatowski. Je n’ai bien sûr pas de leçon à vous donner. Vous êtes responsable et, de ce fait, vous faites comme vous voulez et ferez ce que vous voudrez.

Vous le savez, dans le jeu parlementaire, le rôle d’un ministre est, de temps en temps, de mettre de la souplesse, d’apprécier, d’écouter.

Mme Gisèle Printz. Il le fait !

M. Ladislas Poniatowski. Or, permettez-moi de le souligner à l’occasion de l’examen de ces amendements, rien qu’en disant non, vous vous faites mal.

Il s’agit d’un véritable sujet, de situations que nous connaissons tous. Dans nos territoires, et le problème n’est pas rural ou urbain, nous connaissons des personnes concernées. Pourquoi ne pas faire preuve de souplesse dans ce cas de figure ?

Cessez d’écouter vos administrations ! Vivez, prenez un peu d’indépendance, soyez souple, surtout dans des cas comme celui-ci ! Bien sûr, nous allons voter ces amendements identiques, mais vous aurez compris que mon explication de vote était surtout un message que je voulais vous adresser.

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour explication de vote.

M. Yannick Vaugrenard. Je ne partage pas le pessimisme de M. Poniatowski. En revanche, je fais miens les propos de Valérie Létard et Delphine Bataille.

M. Ladislas Poniatowski. Je ne vois pas la différence !

M. Yannick Vaugrenard. Je suis actuellement chargé d’un rapport sur la pauvreté dans le cadre de la Délégation à la prospective, et il est tout à fait vrai que l’augmentation de la précarité énergétique, en particulier, est extrêmement forte aujourd’hui. Comme l’a rappelé tout à l’heure Martial Bourquin, la hausse du prix de la facture a été de 60 % ! De plus, les populations les plus vulnérables sont confrontées à des difficultés de paiement encore plus fortes.

Par conséquent, une adaptabilité s’impose manifestement à nous et doit être prise en compte par la puissance publique en général. Nous ne pouvons pas raisonner comme nous le faisions voilà seulement quatre ou cinq ans.

M. le président. La parole est à Mme Delphine Bataille, pour explication de vote.

Mme Delphine Bataille. J’allais proposer de rectifier mon amendement afin d’éliminer le paiement en espèces pour ce qui concerne les fournitures de téléphonie, d’accès à internet, d’eau et d’assainissement. Néanmoins, compte tenu de la pauvreté grandissante liée à la précarité énergétique subie par les ménages les plus modestes – M. Vaugrenard vient fort justement de le rappeler – et devant l’unanimité de nos collègues, je maintiens mon amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Vous m’avez stimulé, monsieur Poniatowski, mais je ne suis pas certain que ce soit forcément dans le sens que vous souhaitiez ! (Sourires.)

Je suis assez surpris de votre intervention.

Tout d’abord, la particularité du ministre est qu’il se trouve en permanence au banc, donc qu’il sait exactement à quoi il a dit non et à quoi il a dit oui. Vous n’avez peut-être pas pu être présent tout au long de la discussion de ce texte.

Hier, sur un amendement de Mme Lamure relatif à la tarification aéroportuaire, l’intention du Gouvernement n’était pas au départ de donner son accord, mais en discutant avec M. le rapporteur, nous avons trouvé un accord. Sur un amendement important, émanant de l’UMP et concernant la tarification à la minute dans les parkings, j’ai également décidé de donner un avis favorable.

M. Claude Dilain. Tout à fait !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je le rappelle parce nous pourrions émettre des avis favorables sur des amendements dont les dispositions ne laissent aucune trace. Or ceux-là auront incontestablement un impact sur le pouvoir d’achat des personnes qui paient des taxes aéroportuaires ou une heure de parking alors qu’elles ne sont restées que quinze minutes.

C’est pourquoi je suis assez surpris par votre réaction, monsieur Poniatowski. D’ailleurs, je le dis au passage, ceux qui pourraient me faire ce reproche appartiennent non à l’UMP, mais plutôt au groupe communiste, avec lequel, à ma connaissance, nous n’avons pas réussi à nous entendre – mais les débats ne sont pas terminés. Monsieur le sénateur, en formulant votre observation, vous étiez donc en quelque sorte le porte-parole du groupe communiste.

M. Ladislas Poniatowski. Je ne suis pas sûr que cela leur fasse plaisir ! (Sourires.)

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je veux insister sur un point : la discussion de ces amendements a lieu avant celle de l’amendement n° 517 de Mme Bataille tendant à insérer un article additionnel après l’article 9 et à prévoir qu’aucun des frais liés à un rejet de paiement ne puisse être imputé aux personnes se trouvant en état de fragilité, eu égard notamment à leurs ressources, par les fournisseurs de services de communication électronique, d’énergie ou autres.

En l’occurrence – je le dis d’avance –, le Gouvernement émettra un avis favorable sur cet amendement qui, lui, aura un impact sur le porte-monnaie des Français les plus vulnérables, contrairement aux amendements que vous défendez maintenant.

S’agissant de l’ouverture à plusieurs modes de paiement, je répondrai qu’elle existe déjà. De surcroît, il faut veiller à ne pas créer, en voulant offrir une palette de choix, des difficultés à un certain nombre d’entreprises. En effet, dès lors qu’on les contraint à accepter d’être payées en espèces alors qu’elles vendent des forfaits à deux euros, les modalités de cette obligation risquent d’être compliquées, par exemple dans des entreprises de téléphonie. Tout cela ne me paraît pas conforme à la réalité. (Mme Valérie Létard s’exclame.) J’essaie d’être pratique ! Attendons de voir comment tout cela va se passer.

J’ajoute que le public visé est le même que celui pour lequel la gauche a, dans la loi bancaire, plafonné les commissions d’interventions à quatre euros, avec un maximum de vingt euros par mois de frais perçus par les banques en cas de défaut ou d’incident de paiement. Cela arrive, hélas, en temps de crise, à bon nombre de Français.

Nous avons pris nos responsabilités, y compris en tordant un peu le bras des banques, et nous continuons. C’est la raison pour laquelle j’émettrai un avis favorable à l’amendement n° 517 de Mme Bataille.

Franchement, je le répète, j’ai essayé d’être le plus honnête possible dans mes argumentations, mais en l’espèce, je ne pense pas que les mesures proposées auront un impact sur les publics dont vous parlez ; elles présentent même plus d’inconvénients que d’avantages.

C’est la raison pour laquelle, monsieur Vaugrenard, madame Bataille, il est préférable d’adopter l’amendement suivant, pour lequel le Gouvernement donnera un avis favorable et qui visera à interdire à toute entreprise, en cas de défaut de paiement de l’un de ses clients, de prélever des frais supplémentaires. Cette disposition, elle, aura un impact concret sur la facture.

M. Ladislas Poniatowski. De deux euros !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je ne le crois pas, monsieur Poniatowski.

Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à ces amendements identiques, mais favorable à l’amendement suivant.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Monsieur le ministre, nous avons bien entendu votre plaidoyer. Vous essayez de remonter le courant et de convaincre une assemblée dont toutes les sensibilités se sont exprimées, car ses membres représentent les élus locaux et sont en contact quotidien avec ceux-ci pour les accompagner à lutter contre la précarité énergétique et les impayés de toute nature. Nous les recevons dans nos centres communaux d’action sociale et sommes amenés à traiter avec les associations afin de pallier ces difficultés.

Monsieur le ministre, pourquoi opposer des amendements qui sont tout à fait complémentaires au moment où les consommateurs les plus fragiles ont, plus que les autres, besoin de notre attention ? Pourquoi condamner une initiative provenant du réseau associatif, qui pratique cet accompagnement au quotidien, aux côtés des élus locaux ?

Certains n’ont plus de carte bancaire et de chéquier, à la suite d’accidents de la vie et non parce que ce sont de mauvais payeurs. Aidons-les et écoutons tous les élus qui, dans cet hémicycle, ont porté attention à ces situations. Ils savent que ces amendements sont frappés au coin du bon sens et que leur adoption ouvrira des solutions aux plus fragiles. Les dispositions de l’amendement que Mme Bataille défendra par la suite viendront utilement les compléter. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous cherchons tous des solutions pratiques. Et en l’occurrence, il n’y a pas, d’un côté, les sénateurs qui connaîtraient le monde réel grâce aux contacts noués avec les élus, et, de l’autre, les membres du Gouvernement, qui ne seraient élus de nulle part.

Pour ma part, je suis élu de Trappes : en matière de précarité énergétique, je vois à peu près de quoi l’on parle !

Vous prétendez que les amendements sont complémentaires, mais je sais très bien qui a soutenu l’amendement auquel nous sommes favorables : c’est une grande association, la Croix-Rouge, qui s’est beaucoup mobilisée à cet égard.

Il incombe au Gouvernement, qui essaie comme vous de prendre un peu de recul, de dire si une mesure est déjà satisfaite concernant les modes de paiement. Aujourd’hui, avoir un compte en banque est un droit, qui doit être assuré par la Banque de France. Je sais bien que ce n’est pas le cas partout, mais, en pratique, la liste de services que vous dressez sera extrêmement compliquée à organiser, sans parler de l’évolution des prestations et des tarifs.

Madame Létard, tout le monde croit connaître ces sujets, mais il faut aussi être conscient de l’abstraction et de l’éloignement du terrain qui entache parfois certaines propositions. L’amendement n° 517 de Mme Bataille est fort, mais les dispositions de ces deux amendements identiques me semblent plus compliquées à mettre en œuvre.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Je voudrais vous rassurer, monsieur le ministre : de nombreux élus qui siègent dans cette assemblée sont, tout comme vous…

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je suis content que vous le disiez maintenant !

Mme Valérie Létard. … des élus de territoires sensibles, connaissant de grandes difficultés, et ils ont un certain passé professionnel – pour ma part, j’étais assistante sociale, donc, croyez-moi, je sais ce que c’est que d’accompagner ce type de problèmes !

Je connais bien le sujet de la politique de la ville : je suis élue sur un territoire, le bassin minier du Nord, où vivent plus de 16 % de chômeurs. Donc croyez-moi quand je vous dis que la problématique de la précarité énergétique se trouve au cœur des difficultés rencontrées par la majeure partie des ménages modestes de notre pays.

Si je me permets d’insister, c’est parce que nous sommes confrontés à une montée extrêmement importante de ces difficultés sur le territoire du Nord-Pas-de-Calais. Soyez certain qu’il ne s’agit pas d’ennuyer le Gouvernement par plaisir, ni de défendre un amendement pour se réjouir ensuite d’avoir gagné s’il est adopté. Si j’insiste, c’est parce qu’il existe une réalité à laquelle nous sommes de plus en plus confrontés et sur laquelle les services sociaux, notamment ceux des conseils généraux, nous alertent avec insistance !

M. François Trucy. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Je veux simplement dire que je suis très sensible aux arguments de notre collègue Valérie Létard, que j’approuve entièrement. Je pense en outre que les deux amendements sont complémentaires et vont dans le bon sens. Par conséquent, en tant qu’écologiste, je les voterai tous les deux. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 382 rectifié bis et 516.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9.

L'amendement n° 517, présenté par Mme Bataille, M. Vaugrenard, Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après l’article L. 121-84-10 du code de la consommation, il est inséré un article L. 121-84-11 ainsi rédigé :

« Art. L. 121-84-1. - Aucun frais lié au rejet de paiement ne peut être imputé par un fournisseur de services de communications électroniques aux personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels qui se trouvent en état de fragilité eu égard notamment à leurs ressources. »

II. - « Après l’article L. 121-92 du même code, il est inséré un article L. 121-92-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 121-92-1. - Aucun frais lié au rejet de paiement ne peut être imputé par un fournisseur d’électricité et de gaz naturel aux personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels qui se trouvent en état de fragilité eu égard notamment à leurs ressources. »

III. - Après l’article L. 2224-12-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2224-12-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2224-12-2-1. - Aucun frais lié au rejet de paiement ne peut être imputé par les services d’eau potable et d’assainissement aux personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels qui se trouvent en état de fragilité eu égard notamment à leurs ressources.

« Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »

La parole est à Mme Delphine Bataille.

Mme Delphine Bataille. Monsieur le ministre, je prends acte de l’avis favorable que vous avez émis par anticipation sur cet amendement et je vous en remercie.

M. Ladislas Poniatowski. Cet amendement a déjà été débattu !

Mme Delphine Bataille. À mon sens, je le répète, le présent amendement et l’amendement n° 516 qui vient d’être adopté sont complémentaires. Ici encore, il est question des personnes en situation de fragilité qui subissent une « double peine » : plus elles sont pauvres, plus le service qui leur est fourni leur coûte cher en regard du prix dont s’acquittent les autres clients.

Les frais forfaitaires appliqués par un professionnel en cas de rejet de paiement par la banque constituent une charge supplémentaire pour un ménage déjà en difficulté et en situation de précarité.

C’est pourquoi cette disposition propose qu’aucun frais lié au rejet de paiement ne puisse être imputé à des personnes en situation de fragilité, notamment du fait de leurs faibles ressources. Comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre, c’est le sens de la mesure de plafonnement des frais qui a été retenue dans la loi de séparation et de régulation des activités bancaires. Cette exigence pourrait aujourd’hui s’appliquer aux fournisseurs de communications électroniques, d’énergie et d’eau potable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Fauconnier, rapporteur. La commission, qui était plutôt favorable à cette mesure, avait souhaité demander l’avis du Gouvernement. Celui-ci l’a déjà donné, et je me réjouis de la position de M. le ministre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je confirme mon avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 517.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9.

L'amendement n° 518, présenté par Mme Bataille, M. Vaugrenard, Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La mise en œuvre d’un système de prépaiement de l’électricité et du gaz naturel fait l’objet d’un rapport remis au Gouvernement et au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, élaboré par un comité chargé de préfigurer cette mise en œuvre et dont la composition est fixée par décret. Ce rapport précise les conditions dans lesquelles un système de prépaiement pourrait être mis en place sans pénaliser économiquement les consommateurs d’électricité et de gaz naturel qui en ont usage.

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Précarité énergétique – nous venons d’en parler – hausse permanente du coût de l’énergie : à l’évidence, certains ménages connaissent des difficultés croissantes à assumer les charges contraintes, en l’occurrence les factures d’électricité et de gaz.

Les compteurs à prépaiement visent à remédier à ce problème et existent déjà dans quelques pays de l’Union européenne, notamment au Royaume-Uni et en Belgique. Ces systèmes, nous dit-on, présentent un intérêt pour les consommateurs, mais ce point est à vérifier : il nous a donc paru important qu’une réflexion puisse être menée en France sur ce dispositif de prépaiement, afin d’en apprécier les avantages éventuels pour le consommateur, mais également d’en maîtriser les risques.

Tel est l’objet du présent amendement, qui vise donc à ouvrir une réflexion sur les conditions de mise en œuvre d’un tel système de prépaiement. Du reste, cette réflexion s’inscrirait dans le cadre du grand chantier engagé par le Gouvernement en matière de rénovation thermique des logements.

Il s’agit, je le répète, de vérifier si ces dispositifs offrent aux consommateurs de réels avantages, mais surtout d’en examiner les inconvénients. D’où notre proposition de créer un comité, dont la composition sera fixée par décret, chargé d’élaborer un rapport qui sera remis au Gouvernement ainsi qu’au Parlement dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Fauconnier, rapporteur. Il est certainement utile d’étudier la question du prépaiement, mais la rédaction de l’amendement présuppose la conclusion du rapport, puisqu’elle confie la rédaction de ce dernier à un comité de préfiguration.

La commission a donc souhaité demander l’avis du Gouvernement, afin que la question soit débattue en séance publique.

M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement propose de rectifier cet amendement. En effet, comme l’a précisé le rapporteur, cette disposition prévoit la rédaction d’un rapport et la création d’un comité de préfiguration, ce qui n’est pas très clair en termes de calendrier.

Aussi, je vous propose la rédaction suivante : « Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la mise en œuvre d'un système de prépaiement de l'électricité et du gaz naturel dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi. » La deuxième phrase de l’amendement, dans sa rédaction actuelle, resterait inchangée.

Sous réserve de cette rectification, le Gouvernement est favorable à votre proposition.

M. le président. Monsieur Courteau, acceptez-vous la rectification proposée par M. le ministre ?

M. Roland Courteau. Je l’approuve entièrement, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 518 rectifié, présenté par Mme Bataille, M. Vaugrenard, Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et apparentés, et qui est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la mise en œuvre d'un système de prépaiement de l'électricité et du gaz naturel dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi. Ce rapport précise les conditions dans lesquelles un système de prépaiement pourrait être mis en place sans pénaliser économiquement les consommateurs d’électricité et de gaz naturel qui en ont usage.

Quel est l’avis de la commission sur cet amendement rectifié ?

M. Alain Fauconnier, rapporteur. La commission est favorable à cette nouvelle rédaction.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 518 rectifié.

(L'amendement est adopté.)