M. Ronan Dantec. Il s’agit d’une demande ancienne des collectivités territoriales : aller plus loin dans le développement des énergies renouvelables et la maîtrise énergétique sur leur territoire.

Cette proposition a déjà été beaucoup travaillée. Elle a fait consensus dans le groupe de travail « gouvernance » du débat national sur la transition énergétique que j’avais l’honneur de présider. Les opérateurs, les entreprises, les collectivités : tout le monde était d’accord sur l’importance d’étendre le droit à l’expérimentation des collectivités territoriales aux domaines de l’efficacité énergétique et de la production d’énergie.

Le propos a aussi été repris par le Président de la République lui-même lors de la conférence environnementale. Le Premier ministre l’a ensuite confirmé le lendemain, en déclarant que les collectivités locales devaient avoir un droit d’expérimentation en matière d’efficacité énergétique et d’énergies renouvelables.

J’ajoute que le droit à l’expérimentation existe déjà dans les départements et régions d’outre-mer et permet clairement une plus grande efficacité des politiques publiques d’accompagnement de la transition énergétique. Le présent amendement vise à étendre ce droit à toutes les collectivités territoriales qui en feront la demande par une délibération motivée de leur assemblée délibérante.

Comme le prévoit le code général des collectivités territoriales, l’exercice de cette expérimentation sera précisé par décret et limité dans le temps, et fera l’objet d’un rapport d’évaluation du Gouvernement qui sera transmis au Parlement. Ce rapport est important également dans la perspective du projet de loi sur la transition énergétique. Je pense que les expériences qui remonteront du terrain éclaireront la manière dont nous pourrons reformuler le droit à l’expérimentation.

Au vu des consensus qui se sont exprimés (M. Jean-François Husson s’exclame.) et de la parole du Président de la République, nous avons intérêt à ouvrir dès aujourd'hui le droit à l’expérimentation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Dilain, rapporteur. Monsieur le sénateur, votre amendement couvre un champ législatif très important, puisqu’il concerne les énergies renouvelables et la maîtrise de la demande d’énergie. La commission estime que cet amendement trouverait mieux sa place dans le futur projet de loi relatif la transition énergétique.

En outre, nous nous demandons si votre proposition remplit les conditions qui permettent à la loi d’autoriser les communes à déroger à titre expérimental à certaines dispositions. À dire vrai, nous pensons que ces conditions ne sont pas remplies. Par conséquent, je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Je comprends le sens de votre amendement, monsieur Dantec. Vous avez opportunément rappelé la manière dont il a été élaboré. Cependant, comme l’a affirmé le Président de la République lors de la conférence environnementale, le projet de loi sur la transition énergétique sera l’un des grands textes du quinquennat. Les dispositions que vous proposez trouveront donc toute leur place dans la discussion de ce projet de loi.

Je fais preuve d’une certaine cohérence sur l’ensemble de ces sujets ; je l’ai indiqué à M. Labbé au cours de la discussion générale, et vous le verrez encore dans la suite du débat. Chaque sujet doit trouver sa place dans le texte qui lui convient : les questions agricoles trouveront leur place dans le projet de loi d’orientation agricole, les questions de consommation ont trouvé la leur dans le projet de loi relatif à la consommation, à travers la création d’un dispositif d’action de groupe, en ce qui concerne le logement. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

M. le président. Monsieur Ronan Dantec, l'amendement n° 714 est-il maintenu ?

M. Ronan Dantec. Non, je le retire, monsieur le président. (Ah ! et marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.) Néanmoins, je pense qu’il était possible de lancer dès maintenant l’expérimentation, car celle-ci aurait nourri le projet de loi sur la transition énergétique.

M. le président. L'amendement n° 714 est retiré.

L'amendement n° 721, présenté par MM. Labbé, Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 7 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant la fin de l’année 2014, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport évaluant le dispositif de défiscalisation prévu à l’article 199 sexvicies du code général des impôts, portant notamment sur le nombre de logements de chaque catégorie ayant bénéficié du dispositif.

La parole est à M. Joël Labbé.

MM. Michel Savin, Jean-François Husson et Daniel Dubois. Retirez-le tout de suite ! (Rires.)

M. Joël Labbé. Il s'agit d’une demande de rapport. Je sais que, dans notre commission, on n’aime pas beaucoup les rapports ; notre président Daniel Raoul nous le rappelle souvent.

M. Philippe Dallier. Les rapports, ça consomme du papier !

M. Joël Labbé. Cependant, certains rapports peuvent être nécessaires. Je demande un rapport sur le dispositif de défiscalisation « Censi-Bouvard », qui incite à la construction de logements meublés bien spécifiques : dans des résidences avec services pour personnes âgées ou handicapées, dans des résidences avec services pour étudiants et dans des établissements de santé, mais aussi dans des résidences de tourisme.

S’il vise à dénicher une niche fiscale, un rapport peut avoir une raison d’être, monsieur le président de la commission. La niche fiscale en question relevant de plusieurs domaines ministériels, son efficacité et son impact budgétaire ne sont pas évalués. Ce dispositif mérite qu’on s’y intéresse, afin de savoir s’il répond toujours à l’incitation qu’on a voulu créer et d’ajuster l’offre à la demande pour ces types de logement. Le rapport nous permettra de connaître plus précisément l’utilisation du dispositif « Censi-Bouvard » selon les types de logement. Je le répète, des résidences de tourisme sont concernées. (L’orateur se tourne vers les travées de l'UMP.) Et cet amendement, je ne le retirerai pas ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Dilain, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable au motif que cet amendement demande un rapport, sans se soucier du fond. Mais peut-être avons-nous eu tort. Je pense que Joël Labbé a raison de nous inviter à réfléchir sur le dispositif « Censi-Bouvard ». Cette niche devrait coûter près de 180 millions d'euros en 2014. Je suis obligé de rapporter l’avis de la commission, mais je tiens à dire très fortement que, à titre personnel, je voterai cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Je connais la position de la commission. Je sais aussi que, dans certains cas, il est plus confortable pour les ministres d’accepter des rapports plutôt que des amendements plus compliqués. Comme vous avez pu le constater, je n’ai pas choisi cette facilité. Cependant, il s’agit ici d’un cas très particulier et extrêmement ciblé.

Le dispositif « Censi-Bouvard » a été évalué par le comité d’évaluation des dépenses fiscales en 2011. Ce dernier concluait à une très faible efficacité du dispositif. Il me semble aujourd'hui nécessaire d’aller au fond des choses. Il faut approfondir l’évaluation du dispositif, notamment en distinguant son impact sur, d'une part, la réalisation de logements pour des étudiants, des personnes âgées ou des personnes handicapées, et, d'autre part, la réalisation de résidences de tourisme. Le dispositif « Censi-Bouvard » couvre en effet l’ensemble de ce champ. Il a fait l’objet d’une évaluation globale ; il faut désormais effectuer une évaluation sectorisée, par type de logement construit, afin de mesurer la pertinence du dispositif, qui, comme l’a souligné le rapporteur, est coûteux pour les finances publiques. Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 721.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7 bis.

Chapitre II

Mettre en place une garantie universelle des loyers

Articles additionnels après l’article 7 bis
Dossier législatif : projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové
Article 8 (interruption de la discussion)

Article 8

I. – Il est créé sous la dénomination de garantie universelle des loyers un dispositif ayant pour objet de couvrir, sous la forme d’un système d’aides, les bailleurs contre les risques d’impayés de loyer, afin de favoriser l’accès au logement et de prévenir les risques d’expulsion.

La garantie universelle des loyers s’applique aux contrats de location conclus à compter du 1er janvier 2016 et aux catégories de logements suivantes :

1° Logements à usage exclusif d’habitation constituant la résidence principale du preneur, tels que définis à l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 ;

2° Logements meublés constituant la résidence principale du preneur, tels que définis aux articles 25-2-1 et 25-2-2 de la même loi.

En sont exclus les contrats de location des logements appartenant ou gérés par les organismes mentionnés aux troisième et quatrième alinéas de l’article 41 ter de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l’investissement locatif, l’accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l’offre foncière, et faisant l’objet d’une convention passée en application des 2°, 3° et 5° de l’article L. 351-2 du code de la construction et de l’habitation.

Un décret précise le montant minimal d’impayés ouvrant droit à la garantie, le montant maximal de la garantie accordée pour un même logement en fonction de la localisation du logement et de sa catégorie, et la durée des versements. Le montant d’aide versée au titre de la garantie est réduit ou supprimé en cas de déclaration tardive par le bailleur des impayés de loyers ou si le bailleur fait preuve de négligence dans l’exercice de ses droits. Le décret définit également les mesures d’accompagnement social en faveur des locataires dont les impayés de loyer sont couverts par la garantie.

II. – (Non modifié) Il est créé, sous la forme d’un établissement public administratif de l’État, à une date fixée par décret et au plus tard le 1er octobre 2014, une Agence de la garantie universelle des loyers.

Cette agence est chargée :

1° De préfigurer et de mettre en place la garantie prévue au I ;

2° D’administrer, directement ou par l’intermédiaire d’opérateurs, et de contrôler le régime de garantie issu de cette préfiguration.

III. – (Non modifié) L’agence est dirigée par un conseil d’administration composé de cinq représentants de l’État, de deux représentants de l’Union des entreprises et des salariés pour le logement mentionnée à l’article L. 313-17 du code de la construction et de l’habitation et de deux personnalités qualifiées nommées en raison de leur compétence en matière de logement.

Le président du conseil d’administration est nommé par décret, pris sur le rapport du ministre chargé du logement.

Un comité d’orientation est chargé de faire toute proposition utile afin d’améliorer la gestion de la garantie universelle des loyers.

IV. – (Non modifié) Pour l’accomplissement de sa mission, l’Agence de la garantie universelle des loyers peut disposer des ressources suivantes :

1° Les contributions et subventions de l’État et de ses établissements publics, de l’Union européenne, des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics, de la participation des employeurs à l’effort de construction, ainsi que de toute autre personne morale publique ou privée ;

2° Les recettes fiscales affectées par la loi ;

3° Les emprunts et le produit des placements financiers qu’elle est autorisée à faire ;

4° Le produit des dons et legs ;

5° Les recettes accessoires, notamment la rémunération des services rendus aux tiers, dans des conditions fixées par le conseil d’administration ;

6° Toutes les ressources dont elle peut disposer en vertu des lois et règlements.

IV bis (nouveau). – Des organismes de toute nature sont agréés par l’Agence de la garantie universelle des loyers afin de vérifier le respect des conditions exigées pour bénéficier de la garantie universelle des loyers, de traiter les déclarations d’impayés présentées par les bailleurs, de s’assurer du versement en tiers payant au bailleur des allocations logement du locataire au premier impayé, de mettre en œuvre un plan de traitement social des impayés de loyers et d’accompagner le cas échéant les locataires dans la recherche d’un autre logement.

« Ces organismes sont soumis au respect d’un cahier des charges fixé par décret qui définit les services mis en œuvre pour le compte de l’Agence de la garantie universelle des loyers.

V. – Le début du g de l’article L. 313-3 du code de la construction et de l’habitation est ainsi rédigé :

« g) Au financement du dispositif prévu à l’article 8 de la loi n° … du … pour l’accès au logement et un urbanisme rénové et au versement de compensations… (le reste sans changement). »

M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l'article.

Mme Mireille Schurch. Le présent article est symbolique de ce projet de loi. Il permet la création d’une garantie universelle des loyers, la GUL. Le terme est encourageant, voire prometteur, puisque les sénateurs de mon groupe réclament depuis longtemps la création d’une « sécurité sociale du logement ».

Cependant, derrière le concept, la réalité de son fonctionnement nous pose plusieurs questions. Tout d'abord, la GUL ne s’appliquerait qu’à l’horizon 2016, c'est-à-dire dans trois ans. Ce délai nous semble long. Madame la ministre, vous avez été capable d’agir par voie d’ordonnance lorsque vous estimiez qu’il y avait urgence. Or il y a aujourd’hui urgence à sécuriser les relations entre les locataires et les bailleurs et à prévenir les impayés afin d’éviter les expulsions, qui sont trop nombreuses dans notre pays.

Ensuite, lorsqu’on fait le point sur les bénéfices de la GUL pour les différentes parties, force est de constater que cette garantie est déséquilibrée. Elle est censée poursuivre deux objectifs : il s’agit d'une part de favoriser l’accès au logement des locataires en supprimant la nécessité de fournir aux propriétaires la caution d’un ou plusieurs proches, et d'autre part d’améliorer la protection des propriétaires face aux impayés et aux locataires indélicats.

Concrètement, lorsque le locataire ne sera pas en mesure de payer son loyer, un organisme prendra le relais pour assurer le paiement du loyer au propriétaire. L’organisme, voire le Trésor public, pourra ensuite se retourner contre le locataire mauvais payeur. Quel sera donc le bénéfice pour les ménages fragiles, puisqu’ils financeront la GUL mais devront aussi s’acquitter de leurs impayés ? (M. Philippe Dallier s’exclame.) Nous ne sommes pas là dans une logique assurantielle.

Si la GUL est déséquilibrée, c’est aussi parce que son financement est réparti « de manière égale » entre les locataires et les bailleurs. Nous pensons que, in fine, le coût de la GUL risque de peser essentiellement sur les locataires, dans la mesure où, nous n’en doutons pas, cette garantie sera intégrée dans le prix du loyer. En pratique, il s’agit donc d’une caisse d’assurance pour les bailleurs face aux risques d’impayés, qui sera financée presque exclusivement par les locataires. Cela nous pose question.

Enfin, la GUL n’est que partielle, puisqu’elle ne s’applique qu’aux logements locatifs privés. Il y a là une difficulté majeure, car nombre d’expulsions s’opèrent aujourd’hui dans le parc social. Quelle garantie met-on en œuvre dans le parc public pour les locataires confrontés à des difficultés économiques ? Cette question n’est pas mineure. Elle est même fondamentale si nous avons une approche non pas résiduelle mais généraliste du logement social.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.

M. Roland Courteau. Cela a été dit et redit : au même titre que la santé, le logement est un bien de première nécessité et une dépense incontournable dans la vie du foyer. J’en veux pour preuve le fait que sa part dans le budget des ménages est loin d’être négligeable.

Quoi qu’il en soit, la capacité à se loger doit être donnée à tous. Se loger, c’est sécuriser sa situation. Il y a déjà bien trop de difficultés à surmonter : les accidents de la vie, les séparations, les divorces ou encore les pertes d’emploi. Il nous appartient – nos collègues Jean-Jacques Mirassou et Yannick Vaugrenard l’ont justement souligné – de ne pas ajouter l’angoisse de se trouver sans domicile aux aléas de la vie.

Les problèmes sont connus : soit il n’y a pas assez de logements, soit les propriétaires sont frileux à l’idée de mettre leurs biens sur le marché. S’ils se décident finalement à les louer, ils demandent bien souvent des garanties extravagantes.

Avec l’article 8, qui prévoit la mise en place de la garantie universelle des loyers, vous proposez, madame la ministre, un dispositif équilibré susceptible de bénéficier à la fois aux locataires et aux propriétaires. La GUL poursuit trois objectifs : sécuriser le propriétaire et élargir le parc, favoriser l’accès au logement et prévenir les expulsions. Ces trois objectifs sont majeurs. La GUL sera une grande conquête sociale.

Je commencerai par évoquer la sécurisation du propriétaire. On estime à plus de trois millions le nombre de logements laissés vacants en France parce que leurs propriétaires ne souhaitent pas les mettre sur le marché de la location. Les causes sont nombreuses : peur de l’impayé, peur de la dégradation ou encore peur de se retrouver dans une situation compliquée avec le locataire.

Que faire face à une telle situation ? Fallait-il ne rien faire ? Ce n’est pas parce que les dispositifs antérieurs n’ont pas incité, comme on l’aurait souhaité, les propriétaires à louer leurs logements vacants…

M. Michel Savin. Ce n’est pas vrai !

M. Roland Courteau. … que le politique ne doit plus avoir la volonté de trouver une solution à ce problème. Je reste persuadé que la GUL va redonner de la confiance aux propriétaires et les inciter à louer leurs logements vacants.

J’entends dire que certains locataires pourraient être tentés de ne pas payer, sachant que la garantie s’exercera, mais je rappelle que cette garantie s’appuie sur un dispositif de recouvrement des impayés par le Trésor public. Ce système devrait donc rassurer les propriétaires et inciter un nombre non négligeable d’entre eux à remettre leurs biens en location, ce qui diminuera le nombre de biens vacants. En somme, la GUL va mutualiser le risque et sécuriser véritablement le propriétaire sans pour autant déresponsabiliser les personnes.

M. Philippe Dallier. Ce n’est pas certain !

M. Roland Courteau. N’est-ce pas là une vraie bonne nouvelle, mes chers collègues ? (Si ! sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

Un sénateur du groupe UMP. On verra !

M. Roland Courteau. Le deuxième objectif – favoriser l’accès au logement – est tout aussi majeur. Madame la ministre, je ne peux que vous féliciter d’avoir conçu un système qui vise à endiguer le problème de l’inégalité entre les candidats à la location. Ce problème existe bel et bien et touche tous les milieux, toutes les catégories sociales et tous les âges. La GUL permettra de rétablir une certaine égalité entre les candidats à la location. Aujourd'hui, des candidats dont le niveau de revenu est équivalent n’ont pas les mêmes chances d’obtenir un logement selon qu’ils disposent ou non d’une bonne garantie.

Je souhaite également que la GUL incite certains bailleurs à se fonder sur des critères plus sociaux pour choisir les locataires. Elle devrait donc faire reculer la sélection pour l’accès au logement et donc favoriser des personnes dont le profil est peu sécurisant aux yeux des bailleurs. Je pense notamment aux jeunes, aux étudiants, aux personnes en CDD. En somme, la GUL devrait contribuer à lutter contre les discriminations.

Enfin, je souhaitais insister sur la prévention et la gestion des victimes d’expulsions. Le fonds de garantie va jouer un rôle de prévention et de suivi pour les personnes en situation de fragilité qui se retrouvent, de manière temporaire ou durable, dans l’incapacité d’honorer leur loyer.

Je le répète, la plupart des gens qui ne paient pas leur loyer ne le font pas de gaieté de cœur. Les prendre en charge le plus en amont possible est sans doute pour eux le meilleur moyen de trouver une solution, car un locataire dont la situation n’est pas stabilisée entame une véritable descente aux enfers. Il est donc impératif, comme tend à le prévoir l’article 8, d’accompagner les locataires.

Sécuriser le propriétaire et élargir le parc de logements, favoriser l’accès au logement du plus grand nombre et prévenir les expulsions : tels sont les trois grands objectifs proposés, et je les soutiendrai avec la plus grande détermination ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Michel Le Scouarnec applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Alain Néri, sur l'article.

M. Alain Néri. Nous sommes face à un enjeu essentiel : le droit au logement pour tous. Aucune espèce animale ne songe à renoncer à avoir qui un nid, qui un gîte, qui un terrier. Pourquoi l’homme devrait-il se priver d’un logement ?

Il s’agit donc d’un droit fondamental, qui conditionne l’accès à la liberté. Beaucoup de jeunes qui ont déjà du mal à trouver un emploi, donc à avoir des ressources stables, ont toutes les peines à quitter le giron familial pour prendre leur envol dans la vie, car ils n’ont pas la garantie d’avoir un logement.

À mon sens, une de nos missions principales est d’agir pour que les jeunes accèdent à la liberté et deviennent des citoyens à part entière.

Madame la ministre, je voudrais vous citer un exemple vécu dans ma permanence parlementaire. Un jour, une jeune fille que je connaissais depuis longtemps s’est mise à pleurer devant moi, car elle devait se séparer de son fiancé. Je lui ai répondu que je n’étais pas sûr que cette rupture relevait de ma compétence, mais elle m’a affirmé le contraire, cette séparation ayant été causée par la perte de leur emploi et donc de leurs ressources. Ne pouvant plus payer leur loyer, les deux jeunes gens étaient donc obligés de retourner vivre chez leurs parents. Je pense que nous devons lutter pour que ce genre d’histoire ne puisse plus exister…

Un sénateur du groupe UMP. Ça ne changera pas !

M. Alain Néri. … et pour que les jeunes trouvent leur place dans la société.

Pourquoi suis-je d’accord avec l’article 8 ? J’avais déposé voilà quelques années une proposition de loi sur les garanties universelles dans laquelle il était prévu que le propriétaire devait adhérer volontairement à ce dispositif. Ainsi, il pouvait louer son appartement en ayant l’assurance, d’une part, d’être payé et, d’autre part, de retrouver son logement en bon état.

J’avais pensé confier la gestion de cette garantie aux offices d’HLM, qui savent très bien faire cela. D’ailleurs, dans nos petites communes, lorsque nous avons un logement que nous ne sommes pas sûrs de pouvoir louer dans de bonnes conditions, nous nous tournons vers ces organismes pour leur demander de le gérer à notre place en nous garantissant le loyer, même si nous sommes obligés de participer aux frais de gestion, ce qui est bien normal.

Je suis donc tout à fait d’accord avec votre proposition. Les autres systèmes essayés dans le passé n’ayant pas vraiment marché, tentons l’expérience, madame la ministre !

Enfin, je me tourne vers nos amis de l’opposition qui nous accusent de ne pas construire assez de logements. Ils ont sûrement raison, bien qu’ils n’en aient pas construit davantage quand ils étaient aux responsabilités. (Si ! sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Claude Lenoir. Si, et j’en ai fait la démonstration !

M. Jean-François Husson. On ne peut pas laisser passer de pareils mensonges sans réagir !

M. Alain Néri. Monsieur Lenoir, quand vous prévoyez des crédits dans le budget 2013, les logements prévus ne sont disponibles qu’en 2015 ou en 2016. Or, en permettant de remettre sur le marché de la location des logements actuellement vacants, nous pourrons répondre très rapidement, c’est-à-dire dans un délai de trois, quatre, voire six mois au maximum, à la demande de logements de nos concitoyens,…

M. Philippe Dallier. Mais vous rêvez !

M. Alain Néri. … ce qui est tout de même intéressant.

M. Philippe Dallier. Quel est le rapport avec la GUL ?

M. Alain Néri. Vous nous dites que les propriétaires ne vont pas s’engager dans le processus à cause de la cotisation.

Écoutez, je ne sais pas comment se comportent les propriétaires ailleurs, mais en Auvergne, ils savent qu’un sou, c’est un sou – n’est-ce pas, monsieur Jarlier ? – et ils préféreront percevoir un loyer, même inférieur à ce qu’ils espéraient, plutôt que de ne rien toucher. Je ne connais personne qui refusera 350 euros avec garantie au motif qu’il aurait pu recevoir 500 euros sans garantie.

M. Jean-Claude Lenoir. Donc, ils vont augmenter le loyer à 500 euros !

M. Alain Néri. Je tiens aussi à répondre par avance à ceux qui affirmeront que certains seront enclins à ne plus payer leur loyer puisqu’ils seront assurés qu’on le fera à leur place.

À ceux-là, je dirai qu’il y a beaucoup de dignité chez nos concitoyens. Vous trouverez peut-être un ou deux mauvais exemples, mais la plupart des gens veulent payer leur loyer.

M. Alain Néri. Quand ils sont dans l’incapacité de le faire, ils le vivent comme un véritable drame psychologique et humain.

Soyez rassurés : ce n’est pas parce qu’il y aura cette garantie que les locataires vont s’empresser d’arrêter de payer.

M. Michel Savin. On verra !

M. Alain Néri. Ce n’est pas parce que les gens ont la sécurité sociale…

M. Hervé Marseille. Ça n’a rien à voir !

M. Alain Néri. … qu’ils se précipitent pour être malades !

M. Alain Fouché. Quel est le rapport ?

M. Alain Néri. Tout le monde préfère évidemment être en bonne santé !

Mme Élisabeth Lamure. Quel charabia !

M. Alain Néri. Madame la ministre, je soutiendrai avec force cet article 8,…

M. Alain Fouché. On a compris !

M. Alain Néri. … en vous adressant tous mes vœux pour que le dispositif fonctionne. Si parfois tel n’est pas le cas, nous pourrons revoir son fonctionnement par voie d’amendement à l’occasion de la discussion d’un prochain budget.

M. Michel Savin. Déjà ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Philippe Dallier. Vous êtes vraiment convaincu ! (Même mouvement.)

M. Alain Néri. En attendant, faisons en sorte de restaurer la dignité de ceux qui sont actuellement exclus du droit au logement. En effet, le droit au logement, c’est le droit d’exercer pleinement la citoyenneté. (Bravo ! et applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, sur l'article.

M. Jean-François Husson. Tout à l’heure, une de nos collègues s’était émue d’un tweet envoyé de manière anticipée à propos de l’adoption de l’article 1er. Madame la ministre, vous avez eu la courtoisie de reconnaître qu’il s’agissait d’une maladresse.

Pour ma part, j’ai devant moi une tablette numérique sur l’écran de laquelle je peux lire l’édition du journal Les Échos à paraître demain. Je suppose que vous y avez accès également.

M. Jean-Claude Lenoir. Aïe, Aïe, Aïe !

M. Jean-François Husson. Ce journal titre : « Loyers : nouveau coup dur pour la loi Duflot ».