M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.

Mme Laurence Cohen. Dans le droit fil de ce que vient de dire ma collègue Isabelle Pasquet, je voudrais à mon tour souligner que, bien qu’étant positif, cet article demeurera d’une portée assez limitée dans les faits, l’étude d’impact étant à cet égard particulièrement éclairante.

De surcroît, comme vient de le dire Mme Pasquet, nous sommes opposés au plafonnement à 1,5 SMIC : il a pour effet de sanctionner certaines catégories de salariés qui ne sont pas nécessairement les mieux rémunérés, comme les intermittents du spectacle ou les saisonniers.

En outre, le 11 septembre dernier, la direction juridique de la CNAV, la Caisse nationale d’assurance vieillesse, a, dans une note technique concernant ce projet de loi, précisé que l’application de cette mesure serait particulièrement complexe. Selon ses rédacteurs, « le plafonnement à 1,5 SMIC nécessite en effet de reconnaître les périodes réelles d’activité, au moins le mois et le salaire mensuel correspondant », ce qui n’est pas nécessairement le cas aujourd’hui.

Aussi, madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer les règles qui seront prévues pour rendre applicable cette disposition sans qu’elle entraîne de conséquences financières pour les assurés ?

Je vous remercie par avance de votre réponse.

M. le président. Je mets aux voix l'article 14.

(L'article 14 est adopté.)

Article 14
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Article 15

Articles additionnels après l'article 14

M. le président. L'amendement n° 183 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Gonthier-Maurin et Cukierman, M. Watrin, Mmes David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase de l’article L. 241-3-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :

1° Après le mot : « partiel », sont insérés les mots : « d’une durée inférieure à 24 heures hebdomadaires » ;

2° La seconde occurrence des mots : « peut être » est remplacée par le mot : « est ».

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. La loi dite « de sécurisation de l’emploi » a instauré une durée minimale de travail de 24 heures pour les temps partiels.

L’instauration d’un seuil horaire hebdomadaire minimal était louable, puisqu’il s’agissait de lutter contre la précarité des salariés. En effet, auparavant, la loi n’instaurait aucun seuil de durée minimale de temps de travail, mais seulement une durée maximale.

En adoptant une telle mesure, l’idée était de lutter contre les temps partiels courts subis, lesquels touchent particulièrement les femmes. Nous l’avons déjà dit, mais je le rappelle : 80 % des emplois à temps partiels sont occupés par des femmes, et deux tiers des femmes ont une activité à temps partiel, la plupart du temps subie.

Par cet amendement qui, s’il est voté, aura un impact certain en termes de cotisations de retraite, ce sont bien les femmes que nous souhaitons protéger.

Le problème, c’est que ce principe de temps de travail minimal est affirmé pour être immédiatement contredit. Il est en effet assorti de nombreuses dérogations qui rendent son application limitée et ses effets quasi inexistants.

Plusieurs dérogations sont ainsi prévues : des conventions ou des accords de branches peuvent y déroger ; l’emploi étudiant, le travail temporaire d’insertion, la demande écrite et motivée du salarié pour contraintes personnelles, ou le cumul d’activités atteignant 24 heures au total, avec toutes les possibilités de pression que cela laisse entrevoir.

Prenant acte de l’absence d’efficacité de ce dispositif, nous proposons de modifier l’article L. 241-3-1 du code de la sécurité sociale afin de tenir compte de tous les cas de temps partiel inférieurs à 24 heures.

Aux termes de notre amendement, « en cas d’emploi exercé à temps partiel » – et nous insérons ici la précision « d’une durée inférieure à 24 heures » –, « l’assiette des cotisations destinées à financer l’assurance vieillesse est obligatoirement maintenue à la hauteur du salaire correspondant à son activité exercée à temps plein. ». Il s’agirait ainsi non plus d’une possibilité, mais bien d’une obligation. La cotisation patronale vieillesse pour les emplois inférieurs à 24 heures serait alors équivalente à celle du SMIC.

Une telle disposition aurait le double avantage d’assurer aux femmes, particulièrement touchées par ces emplois précaires subis, un droit à la retraite effectif et de dissuader les employeurs de recourir au temps partiel via des mesures financières le rendant moins avantageux fiscalement.

Nous vous demandons donc de nous aider à réparer une injustice en votant cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christiane Demontès, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur les règles posées en matière de temps partiel.

Comme vous le savez, les partenaires sociaux ont débattu de cette question dans le cadre des négociations préalables à la conclusion de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier et leur position a été fidèlement retranscrite dans la loi relative à la sécurisation de l’emploi du mois de juin.

Comme il ne me semble pas nécessaire de rouvrir ici ce débat, l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 183 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 185 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Gonthier-Maurin et Cukierman, M. Watrin, Mmes David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 3 du chapitre 2 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 242-10-… ainsi rédigé :

« Art. L. 242-10-... – Les entreprises d’au moins vingt salariés et dont le nombre de salariés à temps partiel est au moins égal à 20 % du nombre total de salariés de l’entreprise sont soumises à une majoration de 10 % des cotisations dues par l’employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales pour l’ensemble de leurs salariés à temps partiel. »

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Par cet amendement, nous proposons de majorer de 10 % les cotisations sociales patronales des entreprises de plus de vingt salariés comptant dans leurs effectifs au moins 20 % de salariés à temps partiel. Nous entendons ainsi lutter contre le recours au temps partiel subi et inciter à l’accroissement de la durée d’activité.

La baisse du coût du travail via les exonérations de cotisations sociales patronales, qui a été le fil conducteur des politiques libérales de l’emploi, fait largement débat aujourd’hui. Son efficacité quantitative en matière de création d’emploi reste à chiffrer et à démontrer, tandis que son influence négative sur la qualité de l’emploi et l’effet de « trappe à bas salaires » sont, eux, avérés.

Une telle politique a un coût pour le budget de l’État et implique un manque à gagner pour la protection sociale qui se chiffre à plus de 30 milliards d’euros !

Il faut également noter que, parmi les salariés à temps partiel, 82 % sont des femmes. Or si, entre soixante et soixante-quatre ans, toutes les femmes n’ont pas liquidé leurs droits à pension, c’est parce que certaines attendent l’âge de soixante-cinq ans, bientôt soixante-sept ans, pour compenser les effets d’une carrière incomplète et accéder au bénéfice du taux plein pour le calcul de leur pension. C’est le cas de près de trois femmes sur dix dans la génération de 1938, contre un homme sur vingt.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christiane Demontès, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir de majorer de 10 % certaines cotisations sociales patronales dans les entreprises qui emploient plus de 20 % de salariés à temps partiel.

Pour les mêmes raisons que celles que j’ai invoquées contre l’amendement précédent, il ne me semble pas utile de rouvrir le débat sur le temps partiel dans ce texte sur les retraites.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 185 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels après l'article 14
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Article 16

Article 15

I. – À la fin de la seconde phrase des articles L. 351-1-1 et L. 634-3-2 et de la seconde phrase du II des articles L. 643-3 et L. 723-10-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « une partie des périodes de service national peut être réputée avoir donné lieu au versement de cotisations » sont remplacés par les mots : « peuvent être réputées avoir donné lieu au versement de cotisations certaines périodes d’assurance validées en application de l’article L. 351-3 ou de dispositions légales ou réglementaires ayant le même objet, applicables à des régimes obligatoires de base d’assurance vieillesse, selon les conditions propres à chacun de ces régimes ».

II. – L’article L. 732-18-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il indique notamment les modalités selon lesquelles peuvent être réputées avoir donné lieu au versement de cotisations une partie des périodes de service national et certaines périodes d’assurance validées en application de l’article L. 351-3 du code de la sécurité sociale ou de dispositions légales ou réglementaires ayant le même objet, applicables à des régimes obligatoires de base d’assurance vieillesse selon les conditions propres à chacun de ces régimes. »

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.

Mme Laurence Cohen. Le groupe CRC votera cet article 15 dans la mesure où il permet la prise en compte de l’ensemble de tous les trimestres de maternité.

Incontestablement, cette disposition contribue au rééquilibrage des droits au profit des femmes qui relèvent du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue. Cette faculté existait déjà, mais dans des proportions limitées, ce qui conduisait d’ailleurs à une certaine forme d’inégalité entre les femmes et les hommes, ces derniers pouvant bénéficier au final d’un plus grand nombre de trimestres réputés cotisés que les femmes.

Cette mesure s’inscrit clairement dans l’esprit de la recommandation de la délégation aux droits des femmes, à savoir renforcer les avantages liés à la maternité pour compenser réellement les conséquences de cette dernière.

Toutefois, nous regrettons qu’elle n’ait vocation à s’appliquer qu’aux assurés qui relèvent du dispositif de retraite anticipé pour carrière longue, c’est-à-dire aux seuls assurés qui ont commencé leur activité professionnelle à seize ans et qui réunissent la durée de cotisation requise pour le taux plein. Ce dernier critère est sans doute le plus complexe à satisfaire, excluant de fait plusieurs milliers de bénéficiaires potentiels.

Nous soutenons par exemple l’idée que le nombre de trimestres requis pour bénéficier de ce dispositif ne soit pas celui qui est en vigueur au jour de la demande des droits, mais celui qui est en vigueur au jour où le salarié a acquis son premier trimestre de cotisation. Cela aurait pour effet d’étendre le nombre de bénéficiaires, mais également, et nous y sommes attachés, comme vous le savez, de faire un geste fort à l’égard des assurés concernés en leur disant, en quelque sorte, que la nation respecte le pacte de confiance qui les a liés à elle au début de leur carrière.

Malgré ces réserves, nous voterons cet article, tout en espérant des évolutions ultérieures.

M. le président. L'amendement n° 291, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, M. Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.

M. Jean-Noël Cardoux. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 15. En effet, les précédentes réformes des retraites de 2003 et de 2010 ont déjà prévu des dispositions en faveur des carrières longues. Celles-ci ont donc déjà produit des effets qu’il convient de ne pas remettre en cause.

Cependant, en juillet 2012, pour faire suite aux promesses de campagne de l’actuel Président de la République, un décret a été pris qui, en élargissant les possibilités de départ en retraite anticipé, a dénaturé l’objectif initial. Je rappelle qu’il s’agissait de contrebalancer les mesures d’âge légal en faveur des personnes ayant commencé à travailler avant dix-huit ans.

Le Gouvernement a donc choisi de compenser l’augmentation mécanique des charges résultant du décret de juillet 2012 par une augmentation des cotisations des actifs et des employeurs. Si cette compensation n’était pas intervenue, nul doute que le déficit aurait été aggravé, déséquilibrant encore plus le système des retraites.

Nous étions opposés à ce décret de juillet 2012 et nous restons opposés à une augmentation continuelle des cotisations, ainsi que nous l’avons souligné à plusieurs reprises depuis le début de ce débat.

Puisque nous refusons toute réforme systémique, nous sommes sans cesse contraints de financer des promesses par des augmentations de cotisations, ce qui nous entraîne sur une pente dangereuse et manquant beaucoup de vertu !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christiane Demontès, rapporteur. Monsieur Cardoux, vous proposez de supprimer l’article 15 qui, je le rappelle, permet de prendre en compte deux trimestres de chômage supplémentaires et tous les trimestres de maternité dans le cadre du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue. Il n’est évidemment pas question de remettre en cause cette mesure d’équité.

La commission est donc défavorable à votre amendement, monsieur Cardoux.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable, pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

M. Gérard Longuet. Je souhaite défendre l’amendement qu’a présenté notre collègue Jean-Noël Cardoux.

Madame Demontès, vous nous expliquez que ce dispositif constitue une avancée. Oui, incontestablement, si l’on considère que le fait de dépenser de l’argent sans mettre en face des contreparties en termes de recettes est un progrès. Je m’étonne même que vous ne soyez pas allée plus loin !

Comme votre rapport l’établit très clairement, nous avons un système qui suscite virtuellement un solde négatif dont on sait qu’il atteindra, en 2019, 180 millions d’euros. Certes, au regard des déficits de la France, l’enjeu n’est pas considérable.

Voilà cependant exactement le type de mesure qui ouvre un droit et qui va, à juste titre, susciter des espoirs d’extension continue. En effet, vous le rappelez dans votre rapport, si l’âge moyen d’entrée dans la vie active est de vingt-trois ans en 2020, alors que le décret du 2 juillet 2012 retient, lui, l’âge de vingt ans, il est à peu près inévitable que le débat sera rouvert chaque année en vue de l’extension de ce dispositif de vingt ans à vingt-trois ans.

Lorsque nous avons introduit ce mécanisme, en 2003, il s’agissait de rendre hommage à la génération des trente glorieuses, à ceux qui avaient souvent commencé à travailler dès l’âge de quinze ans et qui donc étaient entrés très tôt dans la vie active.

Relever aujourd’hui le seuil à vingt ans n’a pas tout à fait le même sens : on peut considérer que les personnes ayant commencé à travailler avant cet âge ont pu bénéficier d’études supérieures, certes courtes, mais durant lesquelles elles ont eu l’occasion de se former - et à l’issue desquelles elles ont pu accéder à des responsabilités professionnelles supérieures -, à moins qu’elles n’aient fait le choix de retarder leur entrée dans la vie professionnelle.

L’effort que nous avions fait en 2003 pour ceux qui avaient travaillé longtemps et qui risquaient de se trouver privés, en dépit de leurs années de cotisations, du droit à la retraite, ce qui était le cas antérieurement, représentait un véritable progrès social. Nous avions jugé légitime de consentir un effort financier substantiel.

Aujourd’hui, vous déplacez le curseur. Entre nous, c’est une conséquence de l’ambiguïté des positions adoptées par le parti socialiste, à la veille de l’élection présidentielle de 2012, sur le retour ou non à la retraite à soixante ans. Je ne vous imposerai pas, madame le ministre, un rappel du débat de la semaine dernière, où j’avais eu plaisir à citer vos textes contradictoires sur le sujet. Je dirai simplement que, avec ce décret de juillet 2012, vous répondiez à une demande politique liée à la contradiction existant entre vos diverses prises de position pendant la campagne pour l’élection présidentielle, ce qui vous permet d’exciper d’un retour à la retraite à soixante ans.

En réalité, accorder ce droit à des personnes ayant commencé à travailler avant vingt ans n’a pas le même sens que le prévoir au bénéfice de ceux qui étaient entrés dans la vie active avant l’âge de seize ans ou de dix-sept ans. Désormais, il s’agira de jeunes adultes qui auront pu recevoir une formation professionnelle ; vous leur accordez un avantage, dont je comprends bien l’attrait et que personne ne contestera, mais qui porte en germe une déstabilisation du système.

C’est la raison pour laquelle, faute d’une réflexion d’ensemble sur les régimes de retraite, nous récusons cette disposition de circonstance, cette mesure de facilité destinée à produire un effet médiatique et non à répondre à un problème de fond, tout en créant une dépense virtuellement lourde pour l’équilibre global du système de retraites par répartition.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 291.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 15.

(L’article 15 est adopté.)

Article 15
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Article 16 bis (nouveau)

Article 16

I. – (Supprimé)

II. – Les articles L. 351-14-1, L. 634-2-2, L. 643-2 et L. 723-10-3 du code de la sécurité sociale sont ainsi modifiés :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

1° bis (nouveau) Au 1°, les mots : « et n’ayant pas donné lieu à affiliation à un régime d’assurance vieillesse » sont supprimés ;

2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :

« II. – Par dérogation aux conditions prévues au I, le montant du versement de cotisations prévu pour la prise en compte des périodes mentionnées au 1° du même I peut être abaissé par décret pour les périodes de formation initiale, dans des conditions et limites tenant notamment au délai de présentation de la demande, fixé à dix ans suivant la fin des études, et au nombre de trimestres éligibles à ce montant spécifique. »

II bis (nouveau) – L’article L. 351-14-1 du même code est complété par des III et IV ainsi rédigés :

« III. – Par dérogation aux conditions prévues au I, le montant du versement de cotisations prévu pour la prise en compte des années civiles mentionnées au 2° du même I, comprises entre le 1er janvier 1975 et le 31 décembre 1990 et au cours desquelles l’assuré a exercé une activité d’assistant maternel peut être abaissé par décret, dans des conditions et limites tenant notamment au nombre de trimestres éligibles à ce montant spécifique.

« IV. – Par dérogation aux conditions prévues au I, le montant du versement de cotisations prévu pour la prise en compte des années civiles mentionnées au 2° du même I au cours desquelles l’assuré était en situation d’apprentissage, au sens de l’article L. 6211-1 du code du travail, dans le cadre d’un contrat conclu entre le 1er juillet 1972 et le 31 décembre 2013 peut être abaissé, dans des conditions et limites tenant notamment au nombre de trimestres éligibles à ce montant spécifique, fixées par décret. »



III. – L’article L. 9 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi modifié :



1° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :



« Par dérogation aux conditions prévues au cinquième alinéa, le montant du versement de cotisations prévu au même alinéa peut être abaissé par décret pour les périodes de formation initiale, dans des conditions et limites tenant notamment au délai de présentation de la demande, fixé à dix ans suivant la fin des études, et au nombre de trimestres éligibles à ce montant spécifique. » ;



2° (nouveau) L’avant-dernier alinéa est supprimé.



IV. – L’article L. 732-27-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :



1° (nouveau) À la première phrase, les mots : « et n’ayant pas donné lieu à affiliation à un régime d’assurance vieillesse » sont supprimés ;



2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé : 



« Par dérogation aux conditions prévues au premier alinéa, le montant du versement de cotisations prévu au même alinéa peut être abaissé par décret pour les périodes de formation initiale, dans des conditions et limites tenant notamment au délai de présentation de la demande, fixé à dix ans suivant la fin des études, et au nombre de trimestres éligibles à ce montant spécifique. »



(nouveau). – Le début de l’article L. 173-7 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé : « Les versements mentionnés aux articles L. 351-14-1, L. 634-2-2, L. 643-2 et L. 723-10-3 du présent code, à l’article L. 732-27-1 du code rural et de la pêche maritime et à l’article L. 9 bis... (le reste sans changement). »

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l’article.

M. Dominique Watrin. Alors que de plus en plus de jeunes peinent à entrer sur le marché du travail et accumulent emplois précaires, études et périodes de chômage non indemnisé, cet article se limite à permettre aux jeunes, ou plutôt, devrais-je dire, aux jeunes dont les moyens financiers le leur permettront, le rachat dans des conditions strictement encadrées d’une partie de leurs années d’études.

Ainsi, si cet article devait être adopté, le rachat devrait être effectué dans un délai de dix ans suivant la fin des études, mais l’aide ne pourrait porter que sur quatre trimestres, au maximum.

Madame la ministre, vous mettez en avant le fait que le rachat se ferait à un tarif « préférentiel » plus favorable aux assurés les plus modestes, puisqu’il serait proportionnel aux revenus. Permettez-moi de dire que le fait d’inclure une forme de progressivité dans le tarif demandé ne constitue pas en soi une mesure de justice sociale. En effet, à l’inverse de notre système de protection sociale, où chacun cotise en fonction de ses ressources et perçoit en fonction de ses besoins, le mécanisme qui nous est proposé ici repose sur les seules facultés contributives des jeunes, c’est-à-dire leurs revenus.

Or les jeunes les plus modestes ont souvent dû, pour financer leurs études supérieures, souscrire des emprunts qui « plombent » considérablement leur pouvoir d’achat dans la durée. L’écart de pouvoir d’achat entre les plus modestes et les plus riches est, en réalité, bien supérieur à ce que l’on pourrait croire et, cela nous préoccupe, rares seront les jeunes qui pourront in fine bénéficier de cette mesure.

Dans une lettre qu’ils vous ont adressée en octobre dernier, l’Union nationale des étudiants de France, l’UNEF, et l’Union nationale lycéenne, l’UNL, rappelaient que le montant médian de l’épargne, à quarante-cinq ans, atteint difficilement 10 000 euros : pas de quoi financer en réalité le rachat des années d’études, voire d’en valider simplement une année ! Une étude d’impact semble avoir évalué à un niveau très bas le nombre potentiel de bénéficiaires de votre dispositif, madame la ministre, et cette situation n’est pas satisfaisante.

Par ailleurs, la mesure que vous proposez est beaucoup trop partielle, puisque ne pourraient être acquis au tarif préférentiel que quatre trimestres, soit bien peu par rapport à la durée réelle des études.

Cela étant dit, une question se pose de toute évidence, celle de la prise en compte des années d’études. Il s’agit d’une question majeure posée par les étudiants et par les jeunes eux-mêmes, indissociable selon nous de l’allongement de la durée de cotisation.

Depuis des années, le groupe CRC propose de créer, en faveur des jeunes et des étudiants, une « allocation d’autonomie jeunesse » leur permettant de gagner en autonomie. Dans le même temps, grâce à des mesures de financement ambitieuses, comme la taxation des revenus financiers, il serait possible de créer une véritable sécurisation des parcours professionnels, permettant d’acquérir les trimestres de cotisations de dix-huit ans jusqu’à soixante ans, que l’assuré concerné suive des études ou une formation, occupe un emploi ou en soit involontairement privé.

Ce projet de sécurité sociale professionnelle est au cœur de notre réflexion et de nos propositions. Nous ne disposerons évidemment pas du temps nécessaire pour développer ici notre argumentation.

Au nom de notre groupe, je tiens à déclarer que cet article 16 est trop éloigné de ces propositions et, surtout, des besoins et des attentes des jeunes et des étudiants. Nous ne validerons donc pas le principe du rachat des années d’études, auquel nous nous opposons depuis sa création, en 2003. En effet, ce système est en soi injuste et le restera, car il ne concerne qu’une minorité, ceux qui ont les moyens de racheter leurs années d’études. Il faut le rappeler, malgré le tarif préférentiel, ce dispositif ne restera accessible qu’à une minorité de jeunes.

Avec d’autres, car nous ne sommes pas isolés sur ce point, nous pensons qu’il est possible de valider ces années d’études, comme cela se fait pour le service militaire, le chômage ou la formation professionnelle.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous voterons contre l’article 16.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, sur l’article.

Mme Isabelle Pasquet. Les libéraux en tous genres ne cessent de dire qu’ils souhaitent réduire les déficits publics et sociaux. Cette réforme, parce qu’elle repose essentiellement sur des mesures financées par les salariés, contribue à cette réduction ; c’est un fait que nous dénonçons.

Cet article, bien que généreux en apparence, participe partiellement de la même démarche. En effet, plutôt que de permettre aux jeunes et aux étudiants d’acquérir gratuitement des trimestres de cotisations, grâce à des mécanismes redistributifs, par exemple, vous leur proposez de les racheter. Une somme de 5 000 euros ou de 7 000 euros, pour des jeunes à peine sortis des études, est loin d’être négligeable, avouez-le. D’ailleurs, le nombre de bénéficiaires escomptés demeure plus que limité, preuve, s’il en était besoin, de l’injustice du dispositif.

En outre, cet article participe à la réduction de la dette sociale en la transférant des comptes sociaux vers les assurés eux-mêmes, c’est-à-dire, en l’espèce, vers les étudiants. Cet article est une privatisation de la dette, un transfert vers les individus. Scandaleuse lorsqu’elle est publique, la dette serait donc vertueuse lorsqu’elle est privée et qu’elle permet aux établissements bancaires de réaliser de juteux bénéfices sur le compte de celles et ceux qui sont l’avenir de notre pays !

L’endettement des jeunes et des étudiants est déjà important et tend à progresser de manière continue. Selon la Fédération des associations générales étudiantes, la FAGE, 8 % de nos étudiants ont dû contracter un prêt étudiant pour assumer leur formation. Certes, nous n’en sommes pas au niveau américain ; pour autant, l’accroissement de la dette étudiante est si régulier en France qu’il en devient inquiétant.

Dès lors, on a du mal à percevoir comment les jeunes pourraient tout à la fois rembourser leurs crédits, commencer à s’installer dans la vie et racheter des années d’études, à moins de pouvoir compter sur les ressources des parents. Endettement d’un côté, soutien parental de l’autre : nous sommes loin, très loin du concept d’autonomie de la jeunesse que nous avions défendu ensemble, loin des principes d’égalité, de solidarité et de justice qui régissent notre système de protection sociale.

Pour toutes ces raisons, je le confirme, le groupe CRC votera contre cet article.