Mme Laurence Cohen. Si nous approuvons la contribution des laboratoires au titre des médicaments destinés au traitement de l’hépatite C, nous souhaiterions mettre en avant une mesure portée par de nombreuses associations comme TRT-5, SOS hépatites, Médecins du monde et d’autres : la licence d’office.

En effet, la contribution ne modifie pas le prix facial du traitement. Ainsi, les prescripteurs pourraient exclure certaines populations de l’accès au traitement, se sentant obligés de procéder à des « arbitrages » compte tenu du prix de vente du médicament. D’ores et déjà, la Haute Autorité de santé a proposé de limiter le nombre de bénéficiaires du traitement par Sovaldi en le réservant aux patients ayant atteint un stade très avancé de la maladie.

Or il est évident que plus le nombre de malades bénéficiant d’un traitement efficace sera élevé, plus la contamination sera ralentie, et les transformations en cirrhose ou en cancer, limitées. L’ensemble de la collectivité en sortirait gagnante, tant sur le plan humain que sur le plan financier. Citons à titre d’exemple la population carcérale, qui présente un taux de prévalence de l’hépatite C supérieur à la moyenne nationale : si les détenus ne sont pas soignés, notamment parce que la maladie n’est pas à un stade suffisamment avancé, le virus se propagera au sein d’une population souvent discriminée et le coût global supporté par la collectivité s’en trouvera d’autant plus élevé.

Contre ces dérives, il faut davantage de transparence dans la fixation des prix des médicaments et, surtout, une affirmation du pouvoir de l’État face à des laboratoires dont l’activité est le plus souvent guidée par des logiques de rentabilité financière.

Nous sommes ainsi face à nos responsabilités : soit nous acceptons les prix proposés par les industriels et nous reportons à quinze ou vingt ans l’éradication de la maladie, en en faisant porter les coûts sociaux et financiers de ce report sur les Françaises et les Français, qui en assument déjà beaucoup ; soit nous ne plions pas face aux laboratoires et nous éradiquons la maladie rapidement, en proposant à toutes et à tous un traitement adapté.

La licence d’office, prévue dans le code de la propriété intellectuelle, apparaît comme un procédé intéressant. Elle permet, si la santé publique l’exige, de contourner un brevet pour produire un générique, ce qui aurait en outre l’avantage de créer des emplois en France. Ce procédé a déjà été utilisé en Italie, en Allemagne ou au Royaume-Uni. Parfois, la seule menace de son utilisation a permis aux États d’obtenir des prix décents de la part des laboratoires. Cette disposition a été employée avec des effets très positifs au Brésil, face au VIH.

Dans un contexte où de nouveaux médicaments très spécifiques pour le traitement des cancers sont en passe d’être découverts, l’utilisation d’un tel procédé constituerait un signal fort adressé aux laboratoires et répondrait à une nécessité pour nos finances publiques. En effet, si les traitements extrêmement coûteux concernaient auparavant un nombre limité de malades, il en va différemment aujourd’hui, dès lors que les médicaments s’adressent aux personnes atteintes d’une hépatite ou d’un cancer.

Enfin, cette licence d’office peut également constituer un point d’appui important pour le Gouvernement qui, parfois, dans ces dossiers, peut se sentir un peu seul…

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il ne me semble pas qu’il soit dans la culture de notre pays de ne pas prescrire un médicament en raison de son coût. Avant même la fixation du prix, la Haute Autorité de santé a ouvert très largement le champ du recours au médicament contre l’hépatite C, faisant primer, conformément à sa mission, les considérations de santé sur les aspects budgétaires.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. L’avis du Gouvernement est également défavorable.

Madame la sénatrice, le dispositif de la licence d’office a été conçu il y a une vingtaine d’années, quand les trithérapies sont apparues pour soigner les malades atteints du VIH. Il n’a jamais été actionné en France. Il l’a été dans quelques pays européens, mais il s’agissait toujours de situations où le nombre de malades concernés était très limité.

L’application de ce dispositif, qui est inscrit dans le code de la propriété intellectuelle, relève non pas du ministère de la santé, ou de la sécurité sociale, mais du ministère de l’industrie.

Selon notre analyse, ce dispositif ne pourrait être éventuellement actionné qu’en cas d’échec des négociations avec le laboratoire, que la loi nous contraint, en tout état de cause, à mener à leur terme. Nous espérons qu’elles aboutiront avant la fin de l’année, même s’il est aujourd’hui trop tôt pour que je me prononce à cet égard.

Toutefois, si ces négociations devaient échouer, la licence d’office ne serait pas la seule option dont disposerait le Gouvernement. En effet, en l’absence d’accord satisfaisant, nous aurions la possibilité de fixer le prix du médicament de manière unilatérale.

À partir du moment où nous sommes engagés dans une négociation que nous espérons voir aboutir dans un délai raisonnable et où, le cas échéant, d’autres options pourraient être envisagées, il ne nous semble ni utile ni indiqué de recourir au mécanisme que vous évoquez.

Mme la présidente. Madame Cohen, l’amendement est-il maintenu ?

Mme Laurence Cohen. Oui, madame la présidente.

Je persiste à considérer, après avoir entendu les explications de Mme la ministre, que cette piste est intéressante. La loi produisant ses effets dans la durée, ouvrir cette possibilité, ce serait offrir au Gouvernement un point d’appui pour obtenir des laboratoires, dans le futur, des prix satisfaisants s’agissant d’autres traitements ou de vaccins.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 223.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 28, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéas 14 et 15

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 138-19-4. - Les entreprises redevables de la contribution qui, en application des articles L. 162-16-4 à L. 162-16-5 et L. 162-16-6, ont conclu avec le Comité économique des produits de santé, pour l’ensemble des médicaments de la liste mentionnée au second alinéa de l’article L. 138-19-1 qu’elles exploitent, une convention en cours de validité au 31 décembre de l’année civile au titre de laquelle la contribution est due et conforme aux modalités définies par un accord conclu, le cas échéant, en application du premier alinéa de l’article L. 162-17-4, peuvent signer avec le comité, avant le 31 janvier de l’année suivant l’année civile au titre de laquelle la contribution est due, un accord prévoyant le versement de remises à un des organismes mentionnés à l’article L. 213-1 désigné par le directeur de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale.

« Les entreprises exploitant les médicaments de la liste précitée bénéficiant d’une autorisation prévue à l’article L. 5121-12 du code de la santé publique ou pris en charge en application de l’article L. 162-16-5-2 du présent code, dont le syndicat représentatif est signataire de l’accord mentionné au premier alinéa de l’article L. 162-17-4, peuvent également signer avec le comité un accord prévoyant le versement de remises.

« Les remises mentionnées aux premier et deuxième alinéas sont déduites du montant de la contribution. Une entreprise signataire d’un accord mentionné aux premier et deuxième alinéas du présent article est exonérée de la contribution si les remises qu’elle verse sont supérieures ou égales à 90 % du montant dont elle serait redevable au titre de la contribution. »

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je prends en quelque sorte le relais de notre collègue Yves Daudigny lorsqu’il vous a interrogée, madame la ministre, sur l’articulation entre les remises et la contribution instituée par l’article 3.

Cet amendement tend à favoriser la déduction des remises de la contribution plutôt que la transformation de la contribution en remises. Vous allez me dire que nous jouons sur les mots, mais il m’apparaît nécessaire que vous éclairiez notre assemblée sur l’articulation entre ces mots, en dépassant la seule sémantique pour montrer comment cela peut fonctionner économiquement.

La rédaction de la commission me semble préférable. Il est plus juste et plus fort, à mon sens, de mettre en avant la contribution plutôt que la transformation de la contribution en remises.

Mme la présidente. L'amendement n° 143, présenté par MM. Gilles et Milon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mme Debré, M. Dériot, Mmes Deroche et Deseyne, MM. Dusserre et Forissier, Mmes Giudicelli, Gruny et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia et MM. D. Robert et Savary, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Remplacer le taux :

90 %

par le taux :

80 %

La parole est à M. Bruno Gilles.

M. Bruno Gilles. L’alinéa 15 de l’article 3 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale limite la capacité de négociation du CEPS. Nous pensons que le Gouvernement fait ainsi fi de la politique conventionnelle construite depuis vingt ans.

Pourtant, cette politique constitue la clef de voûte de l’attractivité de notre territoire. Elle a permis, certains l’ont rappelé, de localiser en France la production de médicaments, elle a été ainsi pourvoyeuse d’emplois dans beaucoup de régions et elle a fait de l’industrie pharmaceutique l’un des rares contributeurs positifs à la balance commerciale.

Par cet amendement, nous vous proposons donc, mes chers collègues, de refuser cette mesure remettant en cause la dynamique conventionnelle. C’est pourquoi il prévoit de respecter le strict dialogue conventionnel entre l’industrie pharmaceutique et les pouvoirs publics et d’aligner la prime conventionnelle sur ce qui est en vigueur pour toutes les autres pathologies.

Il vise en fait à mettre en cohérence les mécanismes de régulation spécifique – le taux W – et de régulation mutualisée – le taux L, créé à l’article 10 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 – et d’éviter que le taux de 90 % ne soit un frein au conventionnement. Il prévoit de le fixer à 80 %.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 143 ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement touche beaucoup plus que le nôtre au fond du dispositif, dans la mesure où il tend à fixer à 80 % du montant de la contribution instituée par l’article le montant des remises permettant une exonération de la contribution.

Comme l’a expliqué M. Gilles, ce seuil est identique à celui qui est fixé à l’article 10, réformant la clause de sauvegarde de l’ONDAM ; nous aurons l’occasion d’y revenir au cours du débat.

Le montant de la contribution instituée par l’article 3, dite « W », venant en diminution de celle de l’article 10, taux « L », cet amendement diminue l’effort contributif des entreprises distributrices de médicaments contre l’hépatite C, alors que la progression de leur chiffre d’affaires peut contribuer fortement au déclenchement du taux L, qui porte sur toutes les entreprises pharmaceutiques. Il s’agit donc d’une sorte de mutualisation de la fixation du prix.

Ainsi que je le soulignais tout à l’heure, tout cela serait sans doute plus facile à comprendre si nous pouvions projeter un tableau montrant l’articulation entre les remises et la contribution. Cela permettrait de mieux percevoir les enjeux du choix à opérer entre les deux taux proposés.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement sollicite le retrait de l’amendement n° 28, qui est satisfait par la rédaction du texte.

M. le rapporteur général souhaite avoir la certitude que le montant des remises conventionnelles versées par le laboratoire sera déduit de leur contribution. Or c’est précisément ce qui est prévu à l’alinéa 11 de l’article 3 : « La contribution due par chaque entreprise redevable est déterminée au prorata de son chiffre d’affaires calculé selon les modalités définies à l’article L. 138-19-2. Elle est minorée, le cas échéant, des remises versées au titre de l’article L. 138-19-4. » Il s’agit des remises versées dans le cadre de la régulation financière. L’amendement est donc satisfait.

Tout à l’heure, j’avais mal interprété l’interrogation de M. Daudigny, pensant qu’elle portait sur l’articulation entre le mécanisme de fixation du prix et le montant de la remise accordée par les laboratoires. Comme ce montant dépend d’une négociation actuellement en cours, je ne pouvais pas lui apporter de réponse. En fait, il exprimait, me semble-t-il, des préoccupations similaires à celles de la commission. Je le prie donc de bien vouloir m’excuser d’avoir mal compris son propos.

Par ailleurs, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 143.

En effet, nous discutons d’un mécanisme de régulation. Notre volonté est que, grâce aux négociations engagées, le dispositif n’entre pas en vigueur, du moins pour 2015. Plus l’élément incitatif sera fort, plus les négociations auront des chances d’aboutir favorablement et de déboucher sur une situation stable. À l’évidence, l’adoption de cet amendement aurait un coût pour nos finances en 2014 et en 2015.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° 28 est-il maintenu ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Non, je le retire, madame la présidente.

J’avais évidemment compris le mécanisme de déduction. Mais la difficulté portait sur la nature même des deux mesures : la contribution est une taxe ; ce n’est pas le cas des remises.

Cela étant, si Mme la ministre est certaine de pouvoir parfaitement maîtriser la négociation sur la base qui nous a été indiquée, il n’y a plus de problème.

Mme la présidente. L'amendement n° 28 est retiré.

La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote sur l’amendement n° 143.

M. Yves Daudigny. En vérité, madame la présidente, je souhaite surtout obtenir de Mme la ministre un éclaircissement.

Peut-on considérer que le laboratoire « échange » la contribution qu’il devrait payer une année contre une remise inscrite dans la durée ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je ne suis pas certaine de bien comprendre la question.

On calcule le produit de la taxe à verser, dont on déduit le montant des remises éventuelles. Le laboratoire ne paiera donc pas deux fois.

M. Yves Daudigny. J’ai bien compris ce point, madame la ministre. Mais la remise court-elle sur plusieurs années ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Non. Pour le moment, elle court sur une année, puisque la négociation vaut pour une année.

Au-delà de 2015, tout dépendra de notre capacité à trouver un accord sur la régulation de l’innovation, qui ne concernera pas seulement l’hépatite C.

Dans l’immédiat, la régulation exceptionnelle que nous mettons en place intervient seulement pour 2014 et 2015.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 143.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 183, présenté par MM. Gilles et Milon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mme Debré, M. Dériot, Mmes Deroche et Deseyne, MM. Dusserre et Forissier, Mmes Giudicelli, Gruny et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia et MM. D. Robert et Savary, est ainsi libellé :

Alinéa 26

1° Remplacer les années :

, 2015 et 2016

par l’année :

et 2015

2° Remplacer la date :

15 octobre 2016

par la date :

15 octobre 2015

La parole est à M. Bruno Gilles.

M. Bruno Gilles. Cet amendement s’inscrit dans la droite ligne de la discussion qui vient d’avoir lieu entre Mme la ministre et notre collègue Yves Daudigny.

La contribution « W » est un mécanisme ayant vocation à s’appliquer aux laboratoires pharmaceutiques développant des traitements contre l’hépatite C pour répondre à une situation d’urgence, comme l’a indiqué la ministre de la santé lors des débats à l’Assemblée nationale.

L’article 3 fixe les règles a posteriori pour 2014, avec une enveloppe fermée de 450 millions d’euros, en impose de nouvelles pour 2015, avec une enveloppe fixée à 700 millions d’euros, et évoque 2016, sans pour autant définir les règles.

Ce flou juridique risque de freiner le développement de nouveaux médicaments dans les laboratoires pharmaceutiques. Une fois de plus, notre pays sera sanctionné et privé des investissements nécessaires au développement des emplois à cause de l’illisibilité et de l’imprévisibilité des dispositifs prévus dans ce texte.

Le Gouvernement créé donc une nouvelle taxe – une de plus ! –, mais rien ne nous permet d’assurer le caractère exceptionnel de cette taxe.

Lors de la discussion à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a précisé oralement que la contribution ne s’appliquerait que pour 2014 et 2015.

Le présent amendement tend donc à rendre le texte de l’article conforme aux paroles du Gouvernement en enlevant toute mention de l’année 2016.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à supprimer la contribution sur le chiffre d’affaires des entreprises distributrices de médicaments contre l’hépatite C.

Le mécanisme prévu par le présent article est transitoire, ce que Mme la ministre a confirmé, et tend à peser sur la négociation en cours au sein du CEPS.

Toutefois, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Je comprends très bien l’interrogation de M. Gilles. Comme je viens de le rappeler, le dispositif que nous mettons en place est exceptionnel et transitoire ; il vaut pour l’année 2014 et pour l’année 2015.

Si le texte fait référence à l’année 2016, c’est avant tout pour des raisons strictement pratiques. L’élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 débutera au milieu de l’année 2015 ; nous ne serons pas encore, alors, en mesure d’évaluer un dispositif entré en application depuis seulement six mois et d’en tirer toutes les conséquences.

En outre, je le dis très clairement, nous avons besoin de faire pression dans la discussion qui va intervenir avec le CEPS dans le cadre de la renégociation de l’accord-cadre pour les années à venir.

Nous avons introduit toute une série de garde-fous pour prévoir que, dans notre esprit comme dans l’architecture d’ensemble du texte, le dispositif est dérogatoire. Mais nous ne pouvons pas prendre le risque de nous retrouver sans mécanisme de régulation à la fin de l’année 2015, avec des laboratoires persuadés qu’il n’y a plus d’encadrement et une flambée des prix à ce moment-là ou au cours de l’année 2016. Il faut sécuriser le dispositif.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.

M. Gilbert Barbier. Pour la clarté de nos débats, j’aimerais obtenir quelques précisions.

L’enveloppe normée de 450 millions d’euros pour l’année 2014 s’appliquera-t-elle seulement au Sovaldi ou à l’ensemble des médicaments ? Et comment sera-t-elle répartie entre les différents laboratoires ?

En effet, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, si le Sovaldi coûte environ 50 000 euros par patient, les deux molécules complémentaires, qui sont aussi nécessaires, coûtent entre 20 000 euros et 30 000 euros. Il est donc important de dire précisément en quoi consistera la régulation, plusieurs laboratoires pouvant fournir ces deux molécules.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le sénateur, je vous renvoie à l’alinéa 6 de l’article 3 : « La liste des médicaments mentionnés au premier alinéa du présent article est établie et publiée par la Haute Autorité de santé. Le cas échéant, cette liste est actualisée après chaque autorisation de mise sur le marché ou autorisation temporaire d’utilisation de médicaments qui en relèvent. » En clair, le mécanisme vaut pour un ensemble de traitements ou de médicaments dont la liste est établie par la Haute Autorité de santé.

Je précise en outre que le prix du médicament fixé aujourd'hui par le laboratoire n’est pas celui auquel nous souhaitons aboutir ; c’est simplement un prix « avant négociation ». Nous espérons bien que le coût pour la sécurité sociale, les établissements de santé et les patients – même si ce ne sont pas eux qui assurent le financement direct du système – sera réduit à l’issue du processus. Et, comme toujours dans ce type de négociation, le laboratoire reversera les sommes qu’il aura perçues en sus de celles qu’il aurait perçues en pratiquant le prix auquel la négociation aura permis d’aboutir.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 183.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 3
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015
Article additionnel après l'article 4

Article 4

Au II de l’article 63 de la loi n° 2013-1203 du 17 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014, le nombre : « 138 » est remplacé par le nombre : « 118 ».

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l’article.

M. Dominique Watrin. Madame la ministre, lors de la discussion de cet article à l’Assemblée nationale, vous avez justifié la baisse du montant de la dotation à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, l’ONIAM, « afin d’éviter que ses réserves ne soient excessives », raison pour laquelle vous réduisez son encours de précaution. Ces réserves sont donc jugées par vous abusives. Mais sur quels critères ?

On sait qu’à ce jour la commission d’experts a bouclé l’examen de 2 296 dossiers, sur un total de 8 500 demandes, selon le dernier bilan fourni par l’ONIAM. Il reste donc un peu plus de 6 200 dossiers à examiner. Comment pouvez-vous anticiper les indemnisations futures et déjà juger ces réserves excessives? Vous savez comme nous que, lorsqu’on assèche une dotation, on diminue d’autant les capacités d’intervention.

Laissez-moi vous rappeler le discours de la rapporteur pour avis de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur le PLFSS pour 2012 – donc sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy –, qui avait inauguré ce cycle de ponction du fonds de l’ONIAM en présentant un amendement en ce sens : « L’ONIAM, disposera à la fin de l’année 2011 de 41,8 millions d’euros de réserves sur son fonds de roulement. Dans le contexte des finances publiques que l’on connaît, il n’est pas possible de laisser un établissement public disposer d’un tel fonds de roulement. »

Ce qui est intéressant, c’est la réponse apportée à l’époque par le ministre du travail, Xavier Bertrand – ministre d’un gouvernement de droite –, puisqu’il avait lui-même émis de profonds doutes quant à la possibilité de ponctionner ce fonds : « Les dépenses de l’ONIAM sont des dépenses de guichet. Il ne dispose pas d’un stock qui serait en sommeil. […] Si vous réduisez sa dotation, vous risquez de causer un retard dans le versement des indemnités. L’argent de l’ONIAM, ce n’est pas de l’argent qui dort. La logique de la CNAM consiste peut-être à dire qu’il y a beaucoup d’argent dans ce fonds de roulement, mais la réalité, c’est que si vous réduisez la dotation de l’ONIAM de façon trop importante, vous prenez un risque pour l’indemnisation des victimes, un risque que je n’ai vraiment pas l’intention de courir, je le dis très clairement. Je ne me vois pas aller expliquer aux victimes qu’il y aura du retard […]. Je veux bien qu’on puisse se dire, à chaque fois, que l’on n’a pas besoin d’avoir des fonds de roulement trop importants. Peut-être. Mais il reste qu’ils doivent être suffisants. »

Madame la ministre, pourquoi, en définitive, courez-vous ce risque ?

Pour clore ce recueil de citations fort intéressantes, je vous citerai vous-même, lorsque vous avez, toujours à l’occasion de l’examen du PLFSS pour 2012, demandé le rejet de l’amendement présenté par la droite parlementaire en vue de ponctionner le fonds de roulement de l’ONIAM : « Le groupe SRC ne votera pas cet amendement pour deux raisons. Premièrement, nous considérons que c’est prendre un risque. Le ministre a posé des questions de bon sens. Nous n’avons pas d’éléments nous permettant de penser que les besoins auxquels l’ONIAM devra répondre connaîtraient une diminution telle que nous n’aurions pas besoin du fonds de roulement tel qu’il existe actuellement. Deuxièmement, je suis absolument sidérée par cette recherche d’économies de bouts de chandelle. C’est vraiment la course à l’échalote ! »

Eh bien, madame la ministre, l’argumentation que vous aviez employée à l’époque est tout à fait juste et nous la reprenons aujourd'hui à notre compte. C’est pourquoi nous souhaitons le rejet de cet article.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 4
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015
Article 5

Article additionnel après l'article 4

Mme la présidente. L'amendement n° 290, présenté par Mme Archimbaud et MM. Desessard, Gattolin et Placé, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Compte tenu des nombreuses alertes sanitaires concernant les vaccins Gardasil et Cervarix et des incertitudes concernant leur balance bénéfice-risque, il est mis fin à l’action 1.2 du plan cancer intitulée « Améliorer le taux de couverture de la vaccination par le vaccin antipapillomavirus en renforçant la mobilisation des médecins traitants et en diversifiant les accès, notamment avec gratuité, pour les jeunes filles concernées ». L’action 11.11, intitulée « Développer l’éducation à la santé en milieu scolaire », est adaptée en conséquence.

La parole est à Mme Aline Archimbaud.

Mme Aline Archimbaud. Cet amendement concerne une partie du plan cancer.

Le plan cancer 2014-2017, qui a été adopté au mois de février dernier, préconise, entre autres actions, d’« améliorer le taux de couverture de la vaccination par le vaccin antipapillomavirus ».

Plus d’une dizaine d’associations estiment le coût de cette mesure à 926 millions d'euros pour la sécurité sociale, en sus du coût des remboursements habituels des deux vaccins concernés.

Alors que le Gouvernement recherche plusieurs milliards d’économies, cette mesure interpelle, surtout lorsque l’on sait les doutes qui pèsent sur la balance bénéfice-risque de cette vaccination. L’Autriche a d'ailleurs refusé d’inclure ces vaccins dans le calendrier vaccinal, le Japon ne recommande plus cette vaccination et les contestations sont nombreuses dans d’autres pays, aux Pays-Bas, en Espagne, etc.

Les alertes sanitaires sur les vaccins Gardasil et Cervarix sont en effet nombreuses. Des effets indésirables graves leur sont imputés en France et à l’étranger : décès, convulsions, syncopes, syndromes de Guillain-Barré, paralysies faciales, embolies, etc.

Il contient de l’aluminium. Or la communauté scientifique reconnaît maintenant que cet aluminium peut migrer dans l’organisme et atteindre le cerveau, où il s’accumule.

De plus, des fragments d’ADN viral ont été retrouvés « collés » à l’aluminium dans le vaccin Gardasil par un chercheur nord-américain, le docteur Lee. Cette présence anormale a été confirmée par le professeur Belec, chef du laboratoire de virologie de l’hôpital européen Georges-Pompidou, lors d’un colloque organisé par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui s’est tenu le 22 mai 2014 à l’Assemblée nationale.

Des particules de papillomavirus ont d'ailleurs été découvertes dans le cerveau de deux jeunes filles décédées de vascularite juste après leur vaccination par le Gardasil.

L’efficacité de la vaccination contre le virus du papillome humain, VPH, en anglais HPV, Human papillomavirus, n’est, par ailleurs, pas démontrée. Ces vaccins ne protègent que contre deux à quatre souches de virus pour une durée non connue actuellement. Or plus de cent souches existent, dont dix-huit sont considérées comme présentant un haut risque oncogène. Je rappelle que le cancer du col de l’utérus représente 0,7 % de l’ensemble des décès par cancer, tous sexes confondus.

Ces vaccins pourraient, de surcroît, avoir un effet contraire au but recherché. Ainsi, le professeur Claude Béraud, ancien vice-président de la commission de transparence de l’Agence française du médicament, indique : « La vaccination pourrait induire une modification dans l’équilibre des souches virales, soit en favorisant le développement de souches résistantes, soit en accroissant la virulence de souches aujourd’hui inoffensives. »

Pour toutes ces raisons, il apparaît nécessaire de supprimer ce dispositif du plan cancer, ou plus exactement d’affecter les sommes prévues pour cette vaccination à d’autres actions du plan cancer. Ce serait d’autant plus opportun que le frottis cervico-utérin est efficace, qu’il reste le meilleur mode de prévention du cancer du col de l’utérus et que sa généralisation suffirait à réduire fortement le nombre de décès.

En conclusion, afin de prévenir les dérives dans le débat qui va suivre, je tiens à affirmer très clairement que cet amendement n’est pas un amendement contre la vaccination en général, qu’il ne vise pas non plus à retirer le Gardasil du marché ni à en arrêter l’utilisation. Il prévoit simplement de prendre, au vu des éléments troublants dont nous disposons, un temps supplémentaire de réflexion avant d’en intensifier l’usage et, encore une fois, d’affecter les sommes qui étaient prévues pour cette vaccination à d’autres parties du plan cancer.

Mme la présidente. Veuillez conclure, madame Archimbaud.

Mme Aline Archimbaud. Je vous remercie par avance, mes chers collègues, de ne pas caricaturer ma position afin que nous puissions débattre sereinement de cette question. Je sais qu’il est toujours difficile de l’aborder sans caricature.