M. Vincent Dubois. Je vous rejoins sur la baisse du SMA, mais vous devez aussi admettre que la baisse de la DGA pour la Polynésie française est importante. (M. Michel Vergoz s’exclame.)

Vous le savez, madame la ministre, aujourd’hui, le véritable souci des Polynésiens, c’est la misère qui touche la population, dont plus du quart vit au-dessous du seuil de pauvreté.

J’aimerais simplement rappeler, car mes collègues ne le savent peut-être pas, que, en Polynésie française, nous n’avons ni allocations chômage, ni RSA, ni allocation temporaire d’attente, l’ATA. Or je viens de constater, à l’occasion de la discussion des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », qu’une somme de 110 millions d’euros était affectée à l’ATA. Pour ce qui nous concerne, nous demandons simplement l’affectation de 20 millions d’euros pour combler le déficit du régime de solidarité de Polynésie française, le RSPF. Qu’est-ce que c’est, le RSPF ? C’est 83 euros par mois pour une personne sans revenu, avec un enfant à charge, tandis que l’ATA c’est quelque 340 euros par mois… pour des étrangers dans l’attente d’un travail.

Comprenez que je m’interroge légitimement sur l’étendue de la solidarité nationale,…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Vincent Dubois. … lorsqu’un Polynésien sans emploi ni revenu touche 83 euros par mois, alors qu’une personne qui n’est pas encore Française et qui n’a pas d’emploi touche 340 euros par mois…

C’est un sujet extrêmement sensible. En tout cas, avant de laisser éventuellement la parole à ma collègue Teura Iriti, je tiens à dire que nous sommes – malheureusement ! – pour cet article 57 bis, car, malgré la baisse que je viens d’évoquer, il nous accorde quand même une somme que nous ne pouvons refuser. Il s’agit donc d’un vote par dépit, mais nous demandons à nos collègues de nous soutenir en votant en faveur de cet article. (M. Hilarion Vendegou applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Michel Magras, sur l'article.

M. Michel Magras. Vous l’aurez compris, j’interviens sur cet article pour exprimer ce que je n’ai pas pu dire tout à l’heure. Je suis dans une situation particulièrement embarrassante, pour plusieurs raisons.

La première tient non pas au seul chapitre du rapport que j’ai eu l’honneur de présider, mais à la CNEPEOM tout entière, qui a proposé, s’agissant de la continuité territoriale, que l’ACT soit encadrée, car il devenait évident qu’on ne pouvait pas ouvrir un droit sans en fixer les règles d’encadrement. Nous avions proposé, à cette occasion, de trouver une recette à affecter pour que, à l’avenir, les utilisateurs sachent où se situent les limites.

La deuxième raison vient du fait que je préside, depuis peu, la délégation sénatoriale à l’outre-mer. Je ne peux pas prendre d’engagement au nom de mes collègues, mais, pour ma part, j’ai dit que j’étais très ouvert. Nous avons, le 9 décembre prochain, une réunion, au cours de laquelle nous établirons le programme. Il est clair que la question sera mise à l’ordre du jour et nous aurons peut-être à nous prononcer sur cette problématique afin de savoir quelle étude nous devons mener pour arriver à des résultats plus stables.

Enfin, troisième et dernière raison, nous vivons aujourd’hui une situation atypique. En effet, d’une manière générale, le budget de l’outre-mer a toujours fait au Sénat l’objet d’un consensus. Quel que soit le gouvernement, nous nous sommes toujours mis d’accord sur la mission « Outre-mer », dans la mesure où nous avons toujours été reconnaissants aux ministres qui se sont succédé de batailler dur pour défendre les intérêts de l’outre-mer face à un Gouvernement ou une France tout entière qui a besoin de réduire ses budgets et de faire des économies, d’aller dans le sens qui n’est celui dans lequel nous parvenons à aller puisque le budget de l’outre-mer est régulièrement en augmentation.

Je suis donc gêné par le fait que cette proposition aboutisse à un désaccord au sein des parlementaires ultramarins du Sénat, car nous n’y sommes pas habitués.

Pour ma part, si j’avais souhaité intervenir en explication de vote, c’était simplement pour proposer à mon collègue Didier Robert que son amendement puisse être considéré comme un amendement d’appel. Tel aurait pu être le cas si le Gouvernement nous avait demandé d’adopter les crédits en l’état en prenant l’engagement d’inclure dans le premier projet de loi de finances rectificative pour de 2015 un complément de financement correspondant à l’amendement.

Mais – vous avez entendu les propos que j’ai tenus à la tribune – je ne peux me résoudre à prendre sur le SMA, dont on sait tous qu’il est fondamental pour l’outre-mer, pour abonder la continuité territoriale.

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Trop tard, c’est déjà fait !

M. Michel Magras. Pour ces raisons, je faisais partie des frustrés quant à la manière dont s’est déroulée la fin de la discussion de l’amendement. Monsieur le président, vous aviez annoncé la règle ; à cet égard, je regrette de ne pas avoir été suffisamment attentif ou de ne pas avoir eu suffisamment de temps à la tribune pour exprimer ce point de vue. L’occasion venant de m’en être donnée, je me suis permis de le faire, vous voudrez bien m’en excuser.

M. le président. Je mets aux voix l'article 57 bis.

(L'article 57 bis est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Effectivement, nous avons assisté à une solution assez paradoxale. Je devrais me réjouir, puisque les crédits de la mission « Outre-mer » sont adoptés. Je dois dire que ce vote correspondrait à la tonalité des débats que nous avons eus. Les travaux menés en synergie avec les parlementaires de tous les groupes ont bien montré que nous étions en train de construire ensemble un budget qui nous semblait tout à fait positif pour les outre-mer.

Cependant, l’épisode de l’amendement est regrettable à mes yeux, car, manifestement, il s’agit d’une victoire à la Pyrrhus. Vous avez fait voter cet amendement avec une majorité qui existe mais qui est contraire à l’avis de la grande majorité des sénateurs qui ont participé au débat et qui sont ici présents. En l’occurrence, la procédure n’est donc pas vraiment satisfaisante pour la clarté de nos débats.

Bien évidemment, ce dossier va revenir devant l’Assemblée nationale, qui rétablira la situation. Toutefois, il aurait été préférable que le vote corresponde un peu mieux à la tonalité des expressions que nous avons entendues aujourd’hui, et dont je me félicite.

S’agissant de la Polynésie, je tiens à redire à M. Vincent Dubois ce que j’ai expliqué au début à Mme Teura Iriti. Si on avait appliqué la règle mathématique telle qu’elle résultait de la loi, la DGA étant assise sur la DGF, on aurait assisté à une diminution drastique, de l’ordre de 9 millions d’euros. On s’est battu pour que ça soit nettement moindre, puisque la diminution n’est que de 3 millions d’euros. Je considère donc que nous avons vraiment sauvegardé la situation de la Polynésie française.

Par ailleurs, comme vous le savez, nous discutons pour remettre sur pied le régime de solidarité, parce que, nous en sommes conscients, comme vous, la Polynésie, au-delà des cartes postales, est une terre où il y a beaucoup de pauvreté. Aussi, nous travaillons main dans la main pour essayer d’avancer. Je comprends que vous ayez une expression un peu vive, mais elle ne me semble pas correspondre à la réalité des efforts que fait ce gouvernement. En l’occurrence, celui-ci agit de manière assez paradoxale puisque nous essayons de remédier au fait que, la Polynésie étant désormais autonome, un certain nombre de mesures, y compris sociales, que nous mettons en œuvre ne s’y appliquent pas. C’est une réalité juridique. Nous essayons d’en pallier les conséquences, mais nous sommes face à une difficulté majeure que nous ne pouvons pas totalement surmonter.

En tout cas, sachez que, malgré ces propos qui me semblent vifs, nous continuerons à travailler ensemble pour essayer d’améliorer la situation des Polynésiens, notamment des plus modestes d’entre eux. (M. Vincent Dubois applaudit.)

M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Outre-mer ».

Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures trente, est reprise à vingt-deux heures trente.)

Article 57 bis (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2015
Article 59 septies (nouveau)

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l’Assemblée nationale.

Sécurités

Compte d’affectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurités » (et article 59 septies) et du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

La parole est à M. Philippe Dominati, rapporteur spécial.

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’intérieur, mes chers collègues, il y a plusieurs manières d’apprécier la politique de sécurité de l’État que retracent les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » : d’un point de vue strictement budgétaire et d’un point de vue davantage politique, en appréciant leurs résultats.

Sur le plan budgétaire, les crédits proposés au titre des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » s’élèvent à 17,76 milliards d’euros en crédits de paiement, en progression de 0,49 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2014. Cette hausse reflète pour partie les créations de postes, qui se poursuivent en 2015, à hauteur de 405 emplois, dont 243 pour la police et 162 pour la gendarmerie.

Par rapport aux autres pays de l’Union européenne, la France se situe dans la moyenne, avec un policier ou un gendarme pour 270 habitants. Selon les années, certaines missions pèsent cependant sur l’activité des policiers ou des gendarmes, comme l’établissement des procurations de vote, qui ont requis l’équivalent de 737 emplois équivalent temps plein en 2012. Or notre pays connaîtra deux élections en 2015.

Enfin, les transfèrements de détenus font l’objet de la reprise d’un processus de transfert entamé en 2012 entre le ministère de l’intérieur et le ministère de la justice et interrompu pour des raisons techniques. Ce transfert de compétences est nécessaire pour recentrer l’action des forces de sécurité sur leur cœur de métier.

S’agissant des postes pourvus, des écarts croissants sont observés entre les prévisions et les exécutions du plafond d’emplois de la gendarmerie nationale : la sous-exécution a atteint 1 810 emplois équivalent temps plein travaillé en 2013, soit 1,86 % des emplois du programme, ce qui traduit la difficulté des gestionnaires à appréhender les comportements individuels des agents, notamment les départs à la retraite. En conséquence, les effectifs de trop nombreuses brigades de gendarmerie sont aujourd’hui incomplets.

Concernant la masse salariale, la stabilisation des dépenses de personnel de la police nationale entre 2014 et 2015 s’explique par une surévaluation des crédits de titre 2 en loi de finances initiale pour 2014. À périmètre constant, les dépenses de personnel augmentent en réalité de 1,1 % par rapport à 2014. Pour la fin de la période couverte par le budget triennal, entre 2015 et 2017, la masse salariale devrait en revanche se stabiliser, sous l’effet d’un repyramidage et d’une baisse considérable des mesures catégorielles : de 20,88 millions d’euros en 2015, ces dernières chuteraient à 13,62 millions d’euros en 2016 et à moins de 1 million d’euros en 2017, soit un niveau historiquement bas. Une telle réduction des mesures catégorielles risque de poser un problème d’attractivité des métiers de la sécurité.

Une autre question récurrente est celle du stock d’heures supplémentaires du corps d’encadrement et d’application de la police nationale, estimé à 15 749 640 heures par le ministère de l’intérieur. La Cour des comptes a considéré que cette situation requérait la constitution d’une provision, dont elle a évalué le montant à 322 millions d’euros.

En investissement, je déplore que le rythme de renouvellement des flottes de véhicules entraîne leur vieillissement.

Si l’on considère à présent, d’un point de vue plus politique, les résultats de la politique de sécurité, force est de constater que les indicateurs de mission montrent une hausse généralisée de la délinquance en 2013.

L’évolution du nombre de crimes et délits en matière d’atteintes volontaires à l’intégrité physique des personnes constatés a augmenté l’an passé tant en zone police, de 1,29 %, qu’en zone gendarmerie, de 3,2 %. L’évolution des violences physiques non crapuleuses et des violences sexuelles a été en hausse de 1,1 % en 2013 en zone police et de 9,8 % en zone gendarmerie, au lieu d’une baisse de 9,2 % en 2012.

Le nombre de cambriolages a progressé de 7 %, tant en zone police qu’en zone gendarmerie, pour atteindre au total 390 000 en 2013. Le nombre de crimes et délits en matière d’atteintes aux biens constatés a augmenté en zone police de 2,7 % et en zone gendarmerie de 3,9 %.

Les résultats du premier semestre de 2014, détaillés dans le rapport spécial, sont contrastés.

De telles évolutions, en partie imputables à la situation économique, laisseront des traces durables sur le sentiment d’insécurité de nos concitoyens, même lorsque la situation s’améliorera, ce qui constitue un argument supplémentaire pour l’élaboration d’un indicateur sur le sentiment d’insécurité. En effet, il y a lieu de regretter que le sentiment d’insécurité ne soit toujours pas mesuré au sein du dispositif de performance. Dans les réponses au questionnaire budgétaire, la direction générale de la gendarmerie nationale a répondu que le calendrier des enquêtes conduites par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales ne permettait pas de les intégrer dans les documents budgétaires. Il est dommage que les données issues des outils statistiques pourtant disponibles ne puissent pas être recueillies ni valorisées en cohérence avec la démarche de performance qui sous-tend les politiques publiques depuis l’adoption de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Par ailleurs, un indicateur mesurant la part des activités dédiées à la prévention et à la répression par les forces de police pourrait utilement être construit à partir de recueils de données auprès des agents sur leurs activités. Ce pourrait être l’un des objectifs du nouveau service statistique ministériel de la sécurité intérieure, créé cette année.

Enfin, l’Assemblée nationale a adopté un nouvel article tendant à permettre aux collectivités territoriales de participer, jusqu’en 2017, au financement d’opérations immobilières de la police nationale, de la gendarmerie nationale et de la justice. Ces dispositions, initialement instituées jusqu’en 2007 par la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, avaient déjà été rétablies une première fois par la deuxième loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure entre 2011 et la fin de 2013. Il est donc proposé de rétablir une nouvelle fois ce dispositif, au regard de la nécessité de conduire des opérations d’investissement en partenariat avec les collectivités territoriales. Un tel article est nécessaire pour conduire à bien ces opérations.

Je tiens enfin à saluer le courage et l’engagement des forces de sécurité, dont j’ai pu rencontrer les syndicats, ainsi que les directeurs généraux de la police nationale et de la gendarmerie nationale. Mais la question des suicides est révélatrice d’un malaise : quelles sont les données actuelles, monsieur le ministre ? Quelles réponses le Gouvernement entend-il apporter ?

Je souhaite évoquer un dernier point, bien qu’il ne concerne pas directement les crédits de cette mission : le Gouvernement, par négligence, a paralysé l’action des forces de sécurité en supprimant toutes les écoutes légales. Il serait bon que vous nous apportiez un certain nombre de précisions.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d’adopter sans modification les crédits de la mission « Sécurités », qui concourt à la mise en œuvre d’une politique régalienne, et l’article 59 septies rattaché. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la politique de sécurité routière a porté ses fruits, puisque le nombre de tués et de blessés sur les routes françaises a fortement diminué de 2008 à 2013 : nous avons déploré 3 268 morts en 2012, et le Gouvernement entend passer sous la barre des 3 200 morts en 2015. Toutefois, il convient de ne jamais baisser la garde, car on relève une légère hausse du nombre de morts dans les huit premiers mois de 2014.

L’indicateur permettant de connaître l’évolution des facteurs de risques a disparu du projet annuel de performances, ce que je regrette, et les réponses au questionnaire budgétaire ne permettent pas de le remplacer.

Les dépenses inscrites sur le programme 207 « Sécurité et éducation routières » de la mission « Sécurités » restent stables, la forte diminution apparente étant due en fait à un transfert. En effet, à l’occasion du rattachement de la politique de sécurité et d’éducation routières au ministère de l’intérieur, l’ensemble des crédits et emplois correspondants sont transférés au programme 216. Les dépenses de personnel disparaissent ainsi du programme 207.

Le contexte des faibles taux d’intérêt permet de réduire la charge financière de l’État au titre du « permis à un euro par jour », dont la dotation diminue de 1 million d’euros. J’avais fait cette observation l’an dernier, et je constate qu’elle a été prise en compte cette année.

Enfin, une réforme du permis de conduire a été annoncée. J’y suis favorable sur le fond, mais je souhaite qu’elle se fasse à crédits constants, sans coût supplémentaire pour le budget de l’État.

En ce qui concerne le compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », le produit total des amendes de la circulation et du stationnement en 2014 devrait atteindre 1,671 milliard d’euros. Sur ce total, une somme de 1,377 milliard d’euros est inscrite en dépenses sur le compte.

Le Gouvernement prévoit la stabilisation du nombre de radars en 2015, soit à hauteur de 4 200, mais 253 d’entre eux seront remplacés, en particulier par des radars « chantier » et des radars « vitesse moyenne ». Le coût d’installation et de maintenance des radars s’établit à 117 millions d’euros, dont plus de 26 millions d’euros afin de remplacer les dispositifs anciens.

Je m’interroge néanmoins sur l’opportunité, dans le contexte budgétaire actuel, d’installer 40 nouveaux radars « vitesse moyenne », pour un coût unitaire de 167 000 euros, soit le triple d’un radar mobile-mobile par exemple, et 43 radars « chantier » pour un coût unitaire d’environ 200 000 euros. C’est pourquoi je proposerai un amendement tendant à réduire les nouvelles installations à 20 radars « vitesse moyenne » et 20 radars « chantier », soit une économie de 7,3 millions d’euros, cette économie pouvant augmenter d’autant le programme 754, « Contribution à l’équipement des collectivités territoriales pour l’amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières ».

La dotation affectée à l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions, l’ANTAI, diminue légèrement à 123,6 millions d’euros. Je vous proposerai d’adopter un amendement tendant à diminuer la subvention à l’ANTAI de 20 millions d’euros, afin de procéder à un prélèvement à due concurrence sur son fonds de roulement – nous avons beaucoup évoqué ce type d’opération pour d’autres organismes. Il me semble que ce fonds de roulement, dont le montant officiel n’a pu m’être communiqué à ce jour, dépasse le seuil prudentiel de 14,5 millions d’euros, même après un premier prélèvement au profit de l’Agence nationale des titres sécurisés.

En 2014, l’État dépensera 15,7 millions d’euros pour envoyer 17 millions de lettres simples informant du retrait ou de la restitution de points sur le permis de conduire. Or les automobilistes disposent aujourd’hui de moyens efficaces pour connaître leur nombre de points, même si leur efficacité peut être améliorée. Tel est le cas du site internet Télépoints, très fiable pour les permis de conduire obtenus à partir de 2013, mais un peu moins pour les permis antérieurs ; avec un mot de passe, son fonctionnement pourrait être très sérieusement amélioré.

En outre, le nombre de points retirés à chaque infraction est indiqué sur l’avis de contravention. Il est possible pour chacun de faire ses comptes très facilement. C’est pourquoi je vous proposerai, en vue de modifier le code de la route, deux amendements tendant à supprimer l’obligation d’envoyer des lettres simples à l’occasion du retrait ou de la restitution de points.

Le procès-verbal électronique, qui remplace le carnet à souches pour la constatation des infractions de la circulation et du stationnement routiers, est maintenant complètement déployé dans les forces de l’ordre au sein de l’État – plus de 15 600 outils de verbalisation électronique ont été répartis entre police nationale et gendarmerie nationale. Au 1er septembre 2014, 1 954 communes avaient fait le choix de doter leur police municipale du système de procès-verbal électronique, et ce nombre va bien sûr croissant. À cet égard, le fonds d’amorçage destiné à aider les communes à acquérir leurs équipements électroniques de verbalisation a été prorogé jusqu’en 2015 par la loi de finances pour 2014.

Il convient enfin de souligner que la mise en œuvre à compter du 1er janvier 2016 de la dépénalisation du stationnement payant, prévue par l’article 63 de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, modifiera profondément le périmètre du compte d’affectation spéciale sur le contrôle de la circulation et du stationnement routiers.

Sous réserve de l’adoption des amendements que je présenterai, qui ont reçu un avis favorable de la commission des finances, je propose d’adopter ces crédits.

M. le président. La parole est à M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial.

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits du programme « Sécurité civile » de la mission « Sécurités » ne couvrent qu’une partie des moyens dédiés à la sécurité civile. S’agissant des moyens de l’État, ils forment 48 % des crédits de paiement de la politique transversale de sécurité civile.

Par ailleurs, le budget total des services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, atteint 4,36 milliards d’euros dans les budgets primitifs pour 2014, soit cinq fois les crédits inscrits aux missions du budget de l’État. La politique de sécurité civile relève donc bien d’une responsabilité partagée. À cet égard, s’agissant de l’avenir des SDIS, vous avez confirmé, monsieur le ministre, lors du 121e congrès national des sapeurs-pompiers de France, le 4 octobre dernier, le rôle de l’échelon départemental, garant de la proximité, comme niveau d’organisation de la réponse opérationnelle. Peut-être pourriez-vous nous en dire davantage sur l’organisation future des SDIS et leurs perspectives de financement par l’État.

S’agissant du programme « Sécurité civile », les crédits de paiement proposés, à hauteur de 439,55 millions d’euros, sont en hausse de 0,6 % par rapport à 2014, sous l’effet d’une hausse des dépenses de personnel.

Le schéma d’emploi du programme traduit une diminution de 24 postes ou emplois équivalent temps plein. Malgré cette baisse, le projet de loi de finances propose une hausse de plus de 2 % des dépenses de personnel. En réalité, cette progression traduit la correction – attendue – d’une sous-budgétisation chronique des dépenses de personnel de la mission par rapport à l’exécution.

Cette année est marquée par la refonte et la simplification du dispositif de performance : cinq objectifs et neuf indicateurs sont proposés, au lieu de neuf objectifs et onze indicateurs dans le projet de loi de finances initiale pour 2014. Cette évolution tend à accroître la lisibilité des moyens dédiés à la politique de sécurité civile. Cependant, le changement d’indicateur mesurant la disponibilité des hélicoptères ne permet plus d’établir des comparaisons d’une année sur l’autre, alors qu’apparaissaient les conséquences néfastes du vieillissement de la flotte sur la performance. Avoir modifié cet indicateur apparaît comme une façon de « casser le thermomètre ».

S’agissant de la flotte d’aéronefs, le renouvellement de la composante aérienne de la sécurité civile, trop longtemps différé, devient urgent. Le remplacement des neuf Tracker, dédiés à l’attaque des feux naissants, est toujours prévu à l’horizon de 2020.

Dans les réponses au questionnaire budgétaire, vos services, monsieur le ministre, ont seulement indiqué que « la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, la DGSCGC, remettrait des propositions techniques pour le renouvellement de la composante Tracker, en étudiant différents modèles économiques – achat, location... ». Or, comme le reconnaît la DGSCGC, « la flotte d’avions d’investigation et de coordination Beechcraft 200 est vieillissante – âge moyen vingt-sept ans – et confrontée à des obsolescences », mais des réponses semblent en mesure d’être apportées à court et moyen terme puisque, toujours selon le ministère de l’intérieur, « dans le cadre du nouveau marché de maintien en condition opérationnelle, une rénovation avionique est prévue qui permettra de prolonger leur durée de vie. L’équipement de deux des trois avions de la flotte en moyens optroniques permettra de moderniser l’approche des missions d’investigation feux de forêt et de développer de nouvelles missions subsidiaires au profit du ministère de l’intérieur ».

Dans l’immédiat, ces choix engendrent des dépenses de maintenance accrues. Il serait donc utile d’effectuer des simulations sur les surcoûts liés au maintien de la flotte actuelle, en termes de maintenance et de révision des appareils, et le coût de l’acquisition de nouveaux appareils, au regard de l’obsolescence des appareils et de la nécessité d’assurer le plus haut niveau de sécurité des pilotes.

Il conviendrait aussi d’envisager de développer les mutualisations dans le recours aux appareils de la flotte des hélicoptères, au sein du même ministère, avec les forces de police et de gendarmerie, ou au niveau interministériel, par exemple avec les acteurs de la santé publique, en prenant bien sûr en compte les différences d’usage.

Il pourrait ainsi être envisagé une flotte nationale unique regroupant l’ensemble des hélicoptères actuels de la sécurité civile, de la gendarmerie et du SAMU, en définissant chaque année le crédit d’heures qui serait alloué pour chacune des missions, ainsi que de prédéfinir les règles de priorité d’emploi entre ces différents services. Cette disposition présenterait l’avantage d’une homogénéité du parc aérien et donc une économie du coût de sa maintenance, ainsi qu’une optimisation de l’emploi opérationnel des vecteurs aériens.

Je voudrais enfin dire un mot du développement du projet ANTARES – Adaptation nationale des transmissions aux risques et aux secours –, qui vise une meilleure interopérabilité des systèmes de communication des forces de sécurité. D’ici à 2018, le coût total d’investissement s’élèvera à 118,85 millions d’euros pour l’État. Le financement de l’investissement est partagé entre l’État, s’agissant du financement des infrastructures, et les SDIS, en ce qui concerne les postes mobiles et l’adaptation technique des dispositifs radio.

Au regard des investissements que doivent continuer à consentir les SDIS, il est regrettable que, depuis la loi de finances initiale pour 2013, il ne soit plus inscrit de crédits budgétaires en autorisations d’engagement au titre du Fonds d’aide à l’investissement instauré par l’article 129 de la loi de finances pour 2003, pour soutenir les SDIS dans leurs efforts d’investissement en équipements et en matériels. En effet, une partie importante des crédits du FAI concourait spécifiquement, depuis 2007, au financement du programme ANTARES.

En 2015 et 2016, le Gouvernement concentrera ses investissements sur la couverture par ANTARES de l’ensemble du territoire national, alors que le taux de couverture national du territoire, qui s’établirait à 95 %, pose toujours le problème de « zones blanches » non couvertes. Ce taux de couverture de 95 % correspond vraisemblablement aux résultats issus d’une modélisation de la couverture radio réalisée par l’emploi de modèles informatiques. Les mesures de couverture radio effectuées sur le terrain par certains SDIS font apparaître un taux de couverture du territoire sensiblement inférieur.

Il convient d’envisager des solutions techniques pour améliorer la couverture du territoire, tout en veillant à ce que leur coût ne soit pas excessif au regard de l’objectif poursuivi. À cette fin, je propose que soit créé un nouvel objectif de performance « Couverture optimale du territoire national par le réseau ANTARES en vue de la protection des populations », auquel serait associé un indicateur mesurant le pourcentage de la population couverte par le réseau, renseigné notamment par les résultats de mesures de couverture qui seraient réalisées sur le terrain.

Au final, et sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d’adopter sans modification les crédits de la mission « Sécurités », qui correspond à la mise en œuvre d’une politique régalienne, y compris en ce qui concerne la sécurité civile. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)