M. Ladislas Poniatowski, au nom de de la commission des affaires économiques. Monsieur Dantec, si vous en êtes d’accord, je veux retenir la suggestion de Valérie Létard.

Je propose, pour ce faire, que nous reprenions la formulation de l’amendement précédemment présenté par Élisabeth Lamure. Le premier alinéa de l’amendement de M. Dantec pourrait être ainsi rédigé : « À partir de 2030, les bâtiments privés résidentiels devront faire l’objet d’une rénovation énergétique à l’occasion d’une mutation, selon leur niveau de performance énergétique, si le calcul économique le permet. »

Cette modification a minima permettrait d’atténuer la brutalité de la mesure, sans rien changer aux autres dispositions de l’amendement, qui visent à confier à un décret en Conseil d'État le soin de préciser le calendrier progressif d’application de cette obligation, calendrier qui laisse quand même un certain laps de temps pour cette application, puisqu’il est étalé jusqu’en 2050.

En faisant cette proposition, Valérie Létard a parlé des personnes susceptibles de devoir quitter les logements concernés, notamment les personnes âgées. Toutefois, d’autres personnes, obligées de vendre leur bien en urgence, seront pénalisées : des salariés mutés, des chômeurs… Les cas de figure sont multiples. Nous les connaissons tous bien, grâce à nos bureaux d’aide sociale.

Mes chers collègues, la proposition que je pourrais formuler laisse du temps, tout en atténuant la mesure. Elle est simple !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Ségolène Royal, ministre. Je me rallie à la solution de compromis que vient de proposer M. le rapporteur.

Je me félicite de l’esprit de coconstruction dans lequel nous travaillons. Nous essayons tous d’être utiles à notre pays.

À cet égard, je pense qu’il faut, surtout, « positiver le discours ». En effet, si l’on commence par dresser la liste des obstacles ou des inconvénients, on ne s’engagera pas dans la transition énergétique…

Mme Ségolène Royal, ministre. … et il en découlera des difficultés sur le plan économique.

Plus les indicateurs sont clairs, plus le cadre est stabilisé pour les entreprises. C’est très important.

Cela étant, il faut fixer des échéances raisonnables – 2030 me semble en être une. Je dirai même qu’elle protège les propriétaires, en leur donnant une perspective – on sait très bien que, plus le temps passe, plus un logement mal isolé perd de sa valeur.

Fixer un objectif clair et prévoir, dans le même temps, les moyens financiers de l’accompagnement – à l’instar de ce que proposent les auteurs de l’amendement – obligera l’État à consacrer, tous les ans, les moyens nécessaires à l’Agence nationale de l’habitat, l’Anah.

En tant qu’élus locaux, vous savez que celle-ci est très efficace. Elle permet aux familles et aux personnes seules ayant des revenus modestes d’accéder aux travaux d’économie d’énergie au meilleur coût, les fait bénéficier d’un accompagnement ainsi que d’un contrôle sur les prix pratiqués par les entreprises. Cela a permis de rénover plusieurs dizaines de milliers de logements sur le territoire.

À cet égard, prévoir un accompagnement financier mettra l’État devant ses responsabilités, chaque année, au moment du vote du budget de l’Anah. Cela permet de fixer un objectif dont l’horizon – 2030 – est assez lointain pour protéger les propriétaires et, grâce à la proposition du rapporteur de la commission des affaires économiques, de faire face aux situations d’urgence que celui-ci a évoquées et que l’on pourra effectivement prendre en considération.

Je trouve que c’est un bon compromis. Il faut avancer par étapes, mais, en même temps, avancer avec détermination et clarté pour que le mouvement de la société aille bien dans le sens des économies d’énergie.

Au bout du compte, cette solution protège les consommateurs et les propriétaires, qui verront ainsi leurs biens revalorisés.

Mme la présidente. Monsieur Ronan Dantec, acceptez-vous de rectifier votre amendement ou préférez-vous qu’un sous-amendement soit déposé ?

M. Ronan Dantec. Compte tenu de ce que vient de dire Mme la ministre et des échanges que nous avons eus avec Mmes Létard et Lienemann, je rectifie mon amendement afin d’ajouter à la fin du premier alinéa les mots : « sous réserve de la mise à disposition des outils financiers adéquats ». Cela répond à mon avis totalement à la question.

Cela mettra aussi devant leurs responsabilités l’État, ainsi que Mme la ministre vient de l’indiquer – j’avoue que je n’espérais même pas une phrase aussi claire de la part de l’État –, mais également les collectivités et l’ensemble des autres acteurs qui ont vocation à accompagner les travaux de rénovation des logements.

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 719 rectifié, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, et ainsi libellé :

Après l'article 3 B

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À partir de 2030, les bâtiments privés résidentiels devront faire l’objet d’une rénovation énergétique à l’occasion d’une mutation, selon leur niveau de performance énergétique, sous réserve de la mise à disposition des outils financiers adéquats.

Un décret en Conseil d’État précisera le calendrier progressif d’application de cette obligation en fonction de la performance énergétique, étalé jusqu’en 2050.

La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons pris acte, avec beaucoup d’intérêt, des propos que Mme la ministre vient de tenir sur la recherche d’un compromis. On voit bien que, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, nous sommes tous attachés à ce que des efforts importants soient consentis en faveur de la rénovation des logements.

Nous connaissons les situations qui ont été décrites. De fait, dans nos communes, des bâtiments qui ne sont plus habités deviennent de vraies friches en cœur de bourg. Tout cela, bien entendu, doit être corrigé.

En même temps, nous avons bien entendu que certains ménages – il a notamment été question de personnes âgées – ne sont pas en mesure de participer au financement, qu’ils soient propriétaires ou locataires.

J’avais préparé mon discours avant que M. Dantec rectifie son amendement.

En fait, il faut distinguer deux points : d’une part, les possibilités des propriétaires ou des locataires – c'est de cette situation que tient compte la proposition du rapporteur, qui, s’inspirant de l’amendement précédent, suggère d’ajouter « si le calcul économique le permet » – et, d’autre part, les outils, notamment financiers, qu’il faut mettre en place.

En effet, le vrai problème, madame la ministre, c’est, d’abord, que les outils sont un peu disparates. Quelqu'un qui veut rénover son logement doit s’adresser à plusieurs guichets. De ce point de vue, l’Allemagne est un exemple intéressant : les procédures y sont beaucoup plus simples.

Surtout, il faut mettre en place des moyens financiers. De ce point de vue, l’Anah n’est pas en mesure aujourd'hui d’apporter des réponses aux personnes qui s’adressent à elles. Elle n’a pas assez d’argent. Cependant, nous avons bien entendu que le Gouvernement entendait bien lui donner les moyens nécessaires à ces rénovations. C’est un point très important.

J’en viens maintenant à la proposition de notre collègue Ronan Dantec. Elle ne recoupe pas tout à fait celle du rapporteur.

M. Ronan Dantec. C’est sur le second alinéa !

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. Si celle-ci demeure pertinente, je dois dire que la proposition de M. Dantec, qui consiste à prévoir la mise en place des outils financiers adéquats pour favoriser la rénovation des bâtiments, nous convient également.

Il me semble que les deux propositions permettent, ensemble, de couvrir l’intégralité des préoccupations qui ont été exprimées. Je me permets de le souligner !

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Monsieur le président de la commission, aux termes du second alinéa de l’amendement, « un décret en Conseil d’État précisera le calendrier progressif d’application de cette obligation en fonction de la performance énergétique, étalé jusqu’en 2050. » Autrement dit, la question du calcul économique devra déjà figurer dans le décret !

Votre préoccupation est donc satisfaite par l’amendement, extrêmement modéré pour ce qui concerne le calendrier couvert par le décret.

Il n'y a donc absolument pas besoin d’en alourdir la rédaction.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.

M. Gilbert Barbier. Je suis circonspect sur les modalités.

En effet, il est un autre problème, qui n’a pas encore été soulevé : celui du niveau de performance énergétique.

Pour avoir beaucoup d’expérience dans ce domaine, je peux vous dire que, selon le cabinet que vous choisissez, la performance énergétique peut varier dans des proportions assez considérables ! Certains vont être obligés de faire des travaux à partir de 2030, quand d’autres verront ces travaux repoussés jusqu’à 2050.

La situation est très compliquée.

Madame la ministre, il faudrait que nous puissions avoir des précisions sur les termes du décret qui sera pris en Conseil d'État. Peut-on en savoir plus dès aujourd'hui ? Quand ce décret paraîtra-t-il ? Rapidement ou dans quelques années ? L’imprécision est vraiment problématique. Nous sommes tous d’accord sur l’intention, qui est parfaitement louable, mais, en l’état actuel de la rédaction de l’amendement, il ne me semble pas pertinent d’obérer l’avenir à ce point. (M. Alain Gournac applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je pense que l’amendement de M. Dantec vise à faire la chasse aux passoires énergétiques dans le secteur privé.

Il faut savoir que, dans les centres-villes, beaucoup de logements sont des passoires énergétiques – les audits que nous réalisons le montrent.

Souvent, les personnes qui louent ces logements sont peu fortunées. Or elles se retrouvent avec des notes de chauffage et parfois des charges plus importantes que le loyer ! (Mme Valérie Létard opine.)

M. Alain Gournac. Qui va payer ?

M. Martial Bourquin. L’amendement de M. Dantec a le mérite de lutter contre ce phénomène.

Dès lors que sa rédaction vient d’être rectifiée de manière à en conditionner l’application à la « mise à disposition des outils financiers adéquats », en quoi serait-il gênant que le Parlement le vote ?

Son adoption permettrait la mise aux normes des logements concernés et la création de nombreux emplois dans le secteur du bâtiment. Nous montrerions aussi que nous sommes à l’écoute de nos concitoyens, qui ont parfois des surprises terribles au bout de quelques mois, surtout dans les départements comme le mien, où l’hiver peut être assez froid. Au reste, le dispositif retient l’horizon de 2030 !

Je pense vraiment que l’on ne devrait pas perdre trop de temps sur de telles questions, d’autant que Ronan Dantec a accepté de rectifier son amendement. Votons-le pour faire disparaître les passoires énergétiques de nos centres-villes !

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

M. Dominique de Legge. Je voudrais saluer l’effort des uns et des autres pour rechercher un consensus.

Cependant, nous sommes en train d’écrire la loi, or celle-ci est normative et non déclarative ; elle n’expose pas des intentions. (M. Ronan Dantec s’exclame.)

Que veut dire sur le plan juridique cette notion de « calcul économique » ? Qui va l’apprécier ?

M. Ronan Dantec. Ça, on ne l’a pas mis !

M. Dominique de Legge. Laissez-moi m’exprimer ! Monsieur Dantec, nous vous avons écouté ! Ayez la gentillesse de respecter ceux qui tentent de comprendre !

De même, comment doit-on comprendre la notion de « réserve » dans la formulation « sous réserve de la mise à disposition d’outils financiers adéquats » ? Qui appréciera cette adéquation ? Je voudrais le savoir ! En effet, le Gouvernement va bien évidemment affirmer que ces outils financiers sont adéquats, tandis que ceux qui devront faire des travaux considéreront que ces moyens sont insuffisants !

Hier, une nouvelle notion intéressante était apparue : « à l’horizon… ». (Sourires sur les travées de l'UMP.) Ce matin, nous ne parlons plus d’« horizon », mais de loi « déclarative », de « réserve », d’« intention »… J’entendais à l’instant notre excellent collègue Bourquin demander : « Qu’y a-t-il de gênant à voter cet amendement puisqu’on renvoie la question à 2030 ? » (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Martial Bourquin. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Dominique de Legge. C’est précisément parce qu’on renvoie à demain, parce qu’on n’a pas le courage de s’engager aujourd’hui, que je ne suis pas du tout d’accord avec cette façon d’écrire la loi. Vous m’excuserez de penser en juriste sur cette question, mais, encore une fois, la loi est normative, tandis que ce que nous sommes en train d’écrire n’est pas une loi, mais un salmigondis ! Nous essayons de nous donner bonne conscience à cet instant,…

M. Philippe Dallier. Comme d’habitude !

M. Dominique de Legge. … laissant à nos successeurs le soin de régler demain les difficultés, comme l’a si bien dit tout à l’heure M. Dallier ! De grâce, revenons à l’essentiel et essayons d’écrire quelque chose de simple ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.

M. Gérard Miquel. Si nous voulons atteindre les objectifs louables que nous nous fixons, nous devons faciliter les transactions. Or c’est là que se pose, à mes yeux, le principal problème : un certain nombre de propriétaires sont des personnes âgées, qui parfois vendent leur bien pour rejoindre un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, un EPHAD. Aujourd'hui, lorsqu’on souhaite vendre un bien, on est obligé de faire procéder à un certain nombre de diagnostics concernant notamment la performance énergétique, les termites, le plomb et l’amiante.

Il faut mettre en place un système qui permette de contrôler et d’évaluer assez précisément les travaux à réaliser dans un bâtiment. Ainsi, au moment de la transaction, le vendeur ne sera pas obligé de faire les travaux, mais, au contraire, l’acheteur saura qu’il a l’obligation d’y procéder, en bénéficiant d’un système d’aide approprié et lisible. Une telle disposition faciliterait grandement les transactions et nous permettrait d’atteindre les objectifs que nous nous fixons.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.

M. Alain Vasselle. Je m’exprimerai de manière très succincte. J’adhère tout à fait à ce qui a été exprimé à l’instant par mes collègues de l’Ille-et-Vilaine et du Lot. Cela étant, la rédaction du texte suscite l’incertitude et est trop vague. Selon moi, il n’est pas acceptable en l’état.

Comme Dominique de Legge le disait à l’instant même, il vaut mieux laisser le soin à nos successeurs de définir les modalités du dispositif. (Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.) C’est d’autant plus vrai que vous précisez que ces travaux devront être réalisés à l’occasion d’une mutation ; par conséquent, la question se posera de savoir si c’est le vendeur ou l’acheteur qui doit les faire. En outre, ajouter « sous réserve de la mise à disposition d’outils financiers adéquats » ne fait qu’augmenter la confusion. En effet, on ne sait pas du tout de quels outils financiers il s’agira, et de toute façon, vous trouverez toujours un propriétaire ou un acheteur pour considérer que les outils financiers ne lui permettent pas, au vu de sa capacité financière, de réaliser des travaux. Du reste, la question la plus importante sera de savoir quel sera le retour sur investissement des travaux d’économie d’énergie réalisés, car ce retour pourra rendre ces travaux acceptables et supportables pour qui les aura payés.

Selon moi, la sagesse voudrait que l’on reporte cette question à plus tard et que l’on ne vote pas une telle disposition, qui, comme l’a dit Dominique de Legge, n’a pas de caractère normatif.

Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Je crois que tout a été dit par les uns et par les autres. (Sourires sur les travées de l'UMP.) Quant à moi, je remarque qu’il y a en France quatre millions de ménages, soit huit millions de personnes, qui sont dans une situation de précarité énergétique. Il y a des millions de logements passoires. Des familles souffrent du froid.

Je me souviens d’une famille monoparentale : une femme célibataire vivant du RSA avec quatre enfants à charge…

M. Gérard Longuet. Et le père, que fait-il ? À moins qu’il ne s’agisse d’une immaculée conception…

M. Roland Courteau. Cette femme dépensait des sommes folles pour chauffer l’appartement de sa famille.

M. Jean Desessard. Voilà ! C’est à des situations comme celle-ci qu’il faut répondre !

M. Roland Courteau. Elle vivait, comme vous l’avez deviné, dans ce que l’on appelle un logement passoire, et le propriétaire persistait à ne pas vouloir réaliser de travaux de rénovation thermique !

M. Jean Desessard. Et voilà !

M. Roland Courteau. Il préférait encaisser les loyers, mais surtout ne pas bouger !

M. Didier Guillaume. Évidemment ! C’est ce que les gens vivent !

M. Roland Courteau. Nous connaissons des centaines, des milliers de situations comme celle-ci. Faut-il continuer de ne rien faire face à ces situations-là ? (Mme Sophie Primas s’exclame.)

M. Roland Courteau. Faut-il continuer de ne pas agir face à ces marchands de sommeil ? Les locataires continueront à payer, à dépenser des sommes folles, et à souffrir du froid ! (Mme Sophie Primas s’exclame de nouveau.)

Pour moi, il est indécent, au XXIe siècle, de laisser les familles vivre dans des logements passoires ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Michel Le Scouarnec applaudit également.) Je pense là tout particulièrement aux locataires. Les gens doivent avoir droit à un logement décent. C’est la raison pour laquelle nous voterons cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste ainsi que sur plusieurs travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Mme Valérie Létard. Je m’exprimerai très rapidement pour dire que l’amendement rectifié de M. Dantec me convient parfaitement. En effet, il vise à prendre en compte un élément qui est au cœur de mes préoccupations : nous devons déterminer un objectif et l’accompagner des moyens pour les plus précaires.

Je vous rappelle une dernière fois qu’aujourd’hui, en ce qui concerne le programme « Habiter mieux », l’Anah, avec la dotation 2015, ne fait que payer les dossiers que l’on a réalisés, instruits et autorisés en 2014, mais que l’on n’a pas pu payer faute de moyens. Il est donc absolument nécessaire d’augmenter les moyens !

Nous examinerons des amendements défendus et votés en commission des affaires économiques sur les certificats d’économie d’énergie qui apporteront des ressources et qui sont essentiels. Nous ne pouvons pas nous donner des objectifs sans déterminer aussi des moyens !

Le présent amendement pourra certes être amélioré dans le cadre de la fin du travail parlementaire, mais il instaure la discussion et institue un préalable essentiel : nous devons nous donner des objectifs ambitieux, à condition de donner les moyens adéquats pour les plus précaires. Ces moyens existent : il faut les flécher et bien choisir les objectifs ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe socialiste, ainsi que sur les travées du groupe écologiste. – M. Michel Le Scouarnec applaudit également.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques sur l’amendement n° 719 rectifié ?

M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Cette nouvelle rédaction ne nous suffit pas. Aussi, je dépose un sous-amendement visant à ajouter les mots : « si le calcul économique le permet ».

La rédaction serait donc désormais la suivante : « À partir de 2030, les bâtiments privés résidentiels devront faire l’objet d’une rénovation énergétique à l’occasion d’une mutation, selon leur niveau de performance énergétique, si le calcul économique le permet et sous réserve de la mise à disposition des outils financiers adéquats. »

Cette rédaction répond beaucoup plus précisément à l’intervention de Mme Valérie Létard et a recueilli un avis favorable du Gouvernement. Je le répète, la rectification proposée par M. Dantec ne suffit pas, car cette rectification et le sous-amendement ont deux objets bien différents.

Dans ces conditions, sous réserve de l’adoption de son sous-amendement, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 719 rectifié.

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un sous-amendement n° 963, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, et ainsi libellé :

Alinéa 3

Après les mots :

performance énergétique,

Insérer les mots :

si le calcul économique le permet

Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 963 et sur l’amendement n° 719 rectifié ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 719 rectifié sous-amendé par la commission. En effet, cette rédaction contraindra l’État à donner chaque année à l’Anah le budget dont elle a besoin… (Plusieurs sénateurs du groupe l'UMP sont dubitatifs et ironisent.)

M. Philippe Dallier. Alors ça…

Mme Ségolène Royal, ministre. … pour permettre aux propriétaires de faire des travaux d’isolation avant 2030. Les propriétaires auront donc quinze ans pour les mener à bien. Cette disposition protège les propriétaires parce que cela valorise leurs habitations. De toute façon, un jour ou l’autre, il faudra que les bâtiments soient isolés pour que l’on puisse procéder à une mutation, comme c’est le cas dans la plupart des autres pays européens.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 963.

M. Didier Guillaume. Nous ne sommes pas favorables au sous-amendement défendu par la commission.

M. Charles Revet. Dommage !

M. Didier Guillaume. Toutefois, si un consensus se dégage, nous nous y rallierons peut-être. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Nous y sommes opposés parce qu’il dénature l’objectif de l’amendement rectifié de M. Dantec.

M. Roland Courteau. Exactement !

M. Didier Guillaume. Notre éminent collègue M. Philippe Dallier et M. Dominique de Legge ont parlé de lois déclaratives. Heureusement qu’il y a des lois déclaratives !

M. Didier Guillaume. Je prends des exemples de lois que vous avez vous-mêmes présentées. Sans la loi Chirac sur le handicap, le processus n’aurait pas été lancé ! Certes, on n’a pas réussi à tout faire (Exclamations sur les travées de l'UMP.), bien sûr il n’y a pas assez d’argent, mais nous n’aurions pas progressé sur le sujet sans cette loi ! (M. Alain Gournac s’exclame.) Sans la loi DALO, nous n’aurions pas avancé pour le logement pour tous !

Des déclarations sont nécessaires ! Aujourd'hui, gouverner, c’est prévoir, c’est annoncer de grandes orientations (M. Alain Gournac s’exclame de nouveau.) et pas seulement dire que l’on va les mettre en œuvre à tel ou tel moment.

Quant à l’amendement tel qu’il était présenté, on verra bien où nous en serons en 2030 ! (Sourires sur quelques travées de l'UMP.) Il ne faut pas rire de cela ! L’objectif n’est pas d’attendre 2030, mais de procéder à ces travaux dès à présent là où c’est possible.

M. Roland Courteau l’a excellemment démontré : aujourd'hui, il y a des gens dans la misère !

M. Jean Desessard. Bien sûr !

M. Didier Guillaume. Ils vivent dans des logements indignes ! Il y a des marchands de sommeil ! Concernant l’isolation, il faut avancer. Un toit pour tous dans les meilleures conditions, c’est absolument indispensable !

Il est parfois nécessaire d’annoncer de grandes orientations politiques. Le Parlement comme le Gouvernement doivent impulser, fédérer, lancer de grandes orientations, alerter la population, interpeller nos concitoyens…

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Didier Guillaume. … pour leur dire que la situation est tellement grave que nous devons avancer dans cette direction ! Sans l’impulsion des gouvernements de droite comme de gauche et celle du Parlement, nous resterions souvent le pied à l’étrier : nous ne bougerions pas.

Nous savons que cet amendement est déclaratoire ! Nous revendiquons ce caractère déclaratoire de certaines lois, tandis que d’autres lois doivent être précises. Il faut impulser, aérer, indiquer le chemin ! C’était l’objet de cet amendement.

Il y a un accord entre le Gouvernement et la commission à propos de ce sous-amendement, soit ! Nous nous y rallierons. Cependant, la rédaction que propose la commission change partiellement le sens de l’amendement.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Didier Guillaume. En effet, d’après le sous-amendement, la décision sera prise individuellement, appartement par appartement, avec de grandes difficultés. En revanche, l’amendement rectifié établit un principe général. Du reste, la première rédaction nous plaisait beaucoup mieux. Il serait préférable de s’arrêter à cette première rédaction (M. Charles Revet s’exclame.) pour conserver une vraie déclaration d’intention qui incite un certain nombre de personnes et en particulier les marchands de sommeil à rénover les logements.

Si on ajoute le sous-amendement de la commission, nous entrons dans le détail d’un texte de loi qui concernerait 2030, alors que nous ne savons pas ce qui se passera à ce moment-là. Nous n’avons pas besoin de tant de précision ! Donnons des intentions fortes ! Parlons des familles comme celle qu’évoquait tout à l’heure notre éminent collègue M. Roland Courteau et que je ne connais pas. Des gens sont dans la misère ! Ils n’en peuvent plus ! Ils ont des factures énergétiques et des loyers qui absorbent tous leurs revenus et ils n’arrivent pas à faire manger leurs enfants ! (Mme Sophie Primas s’exclame.) Soucions-nous de leur situation ! Adressons-nous aussi à ces gens-là !

M. Alain Vasselle. Cela ne règle pas le problème !

M. Didier Guillaume. Il est certain que si l’on prend en considération l’économie de chaque logement, nous n’y arriverons pas ! Mes chers collègues, quand nos offices municipaux ou départementaux et nos offices publics d'aménagement et de construction, les OPAC, font des logements sociaux, très peu nombreux sont les logements équilibrés financièrement. En général, ils sont équilibrés dans les grandes villes. En revanche, quand l’OPAC prend en charge le logement et la rénovation dans des villages de 500 ou 1 000 habitants, les équilibres économiques sont absents.

Cependant, notre rôle d’hommes est de parler à l’humain, de faire du logement, de rénover et d’isoler là où il n’est pas rentable de le faire ! C’est aussi le rôle du public de faire cela. Si on se préoccupait uniquement de rentabilité, on ne ferait plus de logements sociaux pour les personnes âgées en zone rurale. Or c’est précisément ce que nous voulons faire.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Didier Guillaume. Je ne sais pas quelle sera l’issue de nos débats (M. Roland Courteau s’exclame.) mais notre intention était plutôt de nous en tenir aux fondamentaux : l’amendement n° 719 de M. Dantec, rectifié par Mme Létard, qui fixait de grands objectifs. S’ils veulent évoluer, nous les suivrons.

M. Charles Revet. Très bien !

M. Didier Guillaume. Quoi qu’il en soit, nous tenons à afficher des intentions fortes pour que la population les entende ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.