M. André Vallini, secrétaire d'État. La problématique est la même : il s’agit d’approfondir la démocratie locale, notamment dans les communes de 1 000 à 3 500 habitants, dont le mode de scrutin pour l’élection des conseillers municipaux a été modifié. Elles sont passées au scrutin de liste et à la proportionnelle, ce qui explique, monsieur Mézard, qu’il faille changer leurs règles de fonctionnement. Dorénavant, les candidats se présentent en liste complète. Exit le fameux panachage que nous avons connu durant de très nombreuses années.

Le Gouvernement, monsieur Mézard, croit plus que jamais à la commune, cellule de base de la démocratie, je l’ai encore rappelé ce matin. Vous oubliez systématiquement de souligner que la commune reste compétente en matière d’action sociale – j’insiste sur ce point, car ce n’est pas rien –, d’école, de sport et de culture. Mais la commune reste avant tout, à nos yeux, la cellule de base de la démocratie. Comme l’a souligné M. Kaltenbach, il faut que la démocratie puisse s’y épanouir complètement, et ce quelle que soit la taille de la commune.

Voilà pourquoi nous proposons des dispositions relatives à l’adoption d’un règlement intérieur, aux règles de convocation du conseil municipal et à la possibilité de poser des questions orales au maire.

La même logique s’impose aux EPCI à fiscalité propre puisque eux aussi ont vu leur mode de désignation modifié et que les conseillers communautaires sont désignés par fléchage sur les listes municipales.

Bien évidemment, se pose la question de la date d’application de ces mesures. Le Gouvernement propose 2020 pour laisser le temps aux communes de s’organiser. Est-ce trop ? C’est au Sénat de voir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Je l’ai annoncé voilà quelques instants, la commission a émis un avis favorable.

Je me permets néanmoins d’apporter une correction à vos propos, monsieur le secrétaire d'État : il ne s’agit pas d’un scrutin proportionnel, mais d’un scrutin de liste avec prime majoritaire. Si le scrutin était proportionnel, il n’y aurait pas deux tours…

M. André Vallini, secrétaire d'État. Au temps, pour moi !

M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach, pour explication de vote.

M. Philippe Kaltenbach. Cet amendement reprend le point le plus important de l’amendement défendu par M. Dantec, à savoir les règles de convocation du conseil municipal. C’est tout de même la moindre des choses qu’il y ait des délais de convocation ! Il prévoit en outre la possibilité de soumettre des questions orales, ce qui n’a rien d’exorbitant.

S’il faut fixer de telles règles, c’est parce qu’il existe malheureusement des blocages, même si cela n’arrive qu’une fois sur dix ou sur vingt. Il s’agit donc d’aplanir ces difficultés.

Certes, le bon sens voudrait que nous nous abstenions de poser des règles. Si nous proposons d’en instituer, c’est parce que c’est nécessaire, pour les cas, très minoritaires, où la démocratie n’est pas vraiment respectée.

Par ailleurs, ce n’est pas la mer à boire que d’adopter un règlement intérieur. Le règlement type de l’Association des maires de France est très bien réalisé !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Voilà !

M. Philippe Kaltenbach. Comme je l’ai indiqué tout à l'heure, monsieur le président, je souhaite toutefois déposer un sous-amendement afin d’avancer la date de prise d’effet de la mesure au 1er janvier 2017. Un délai d’un an et demi me paraît raisonnable. Cinq ans, c’est trop.

M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 814, présenté par M. Kaltenbach, et ainsi libellé :

Amendement n° 702

Alinéa 14

Rédiger ainsi cet alinéa

1er janvier 2017

Quel est l’avis de la commission sur ce sous-amendement ?

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Il ne s’agit certes pas d’une contrainte trop forte. Mais il ne faudrait pas qu’on vienne ensuite embêter les maires avec le contrôle de légalité en leur disant : « Attention, vous n’avez pas encore établi votre règlement intérieur… » (M. Philippe Kaltenbach s’exclame.)

Mais c’est comme cela que les choses se passent, monsieur Kaltenbach ! Vous devez le savoir : vous avez été élu local. Vous l’êtes même peut-être encore…

M. Philippe Kaltenbach. Dans l’opposition !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Et dans une grande ville ! Ça n’a évidemment rien à voir !

M. Alain Gournac. Nous n’avons pas la même histoire !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Nous allons vous inviter dans nos provinces, pour que vous compreniez comment les choses fonctionnent chez nous !

Ne brusquons rien en avançant la date de mise en application, d’autant que tout se passe bien.

M. Philippe Kaltenbach. Ce n’est pas vrai !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Mais si ! Qu’est-ce que vous racontez ? Vous connaissez des cas de litige ?... Sur quelle planète vivez-vous ?

M. Philippe Kaltenbach. Tout va bien, alors ?...

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Tout à fait ! Dans nos conseils municipaux, nous ne savons même pas ce que c’est qu’un Vert ! (Rires.) Des élus sont bien sûr de cette sensibilité politique, mais nos discussions se déroulent très bien, avec le moins de formalisme possible, et ce depuis des siècles !

La commission préfère donc s’en tenir à l’amendement du Gouvernement.

M. René Vandierendonck, corapporteur. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 814 ?

M. André Vallini, secrétaire d'État. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 814.

M. Jean-Claude Lenoir. Je partage le sentiment qui a été exprimé par M. le corapporteur concernant le formalisme qui tend à s’installer.

Bien sûr, je voterai sans aucune difficulté l’amendement qui nous est proposé. Après tout, il ne me semble pas anormal de poser un certain nombre de règles : il suffit de les respecter. Ce n’est pas le nombre de réunions du conseil municipal et d’actes produits par une petite commune qui peut poser le moindre problème.

Si j’ai souhaité prendre la parole, c’est parce que, monsieur le secrétaire d’État, vous avez ajouté, pour justifier votre amendement, un élément qui ne figurait pas dans son exposé des motifs : vous avez en effet évoqué la démocratie locale.

Franchement, nos élus locaux connaissent parfaitement la démocratie locale, parce qu’ils la pratiquent au quotidien !

M. Alain Gournac. Ils la vivent tous les jours.

M. Jean-Claude Lenoir. Dans les communes de moins de 3 500 habitants, on sait ce qu’est le respect des autres, le respect des règles, le respect de l’autorité.

Monsieur le secrétaire d'État, je voterai votre amendement. En revanche, de grâce, ne vous abritez pas derrière l’idée qu’il s’agit d’une façon de renforcer la démocratie locale. Si vous tenez vraiment à le faire, je pourrai vous désigner, en privé, quelques endroits où il existe à cet égard de grandes marges de progression…

M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote.

M. Christian Favier. Le groupe CRC votera l’amendement du Gouvernement, car il nous semble aller dans le bon sens. Faire en sorte qu’il y ait plus d’égalité, quelle que soit la taille de la commune, est un progrès en termes de démocratie. Nous soutiendrons également le sous-amendement n° 814.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Je ne voterai pas l’amendement du Gouvernement, non parce qu’il émane du Gouvernement – il lui arrive d’en proposer d’excellents ! –, mais parce que la démocratie ne se ramène pas à l’accumulation de règlements !

C’est pourtant ce à quoi nous assistons constamment. À force d’encadrer tout ce qui est fait dans ce pays et de pondre règlement sur règlement, vous allez finir par nous dire à quelle heure les conseils municipaux doivent se réunir et que, pour se « soulager », les élus ne pourront s’absenter qu’un quart d’heure ! (M. Alain Gournac s’esclaffe.)

Dans les petites communes, il est rare d’assister à des dénis de démocratie. Et si cela se produisait, un simple règlement, qui demeure sans effet sur le caractère des hommes, n’y changerait rien ! Qui plus est, on ne s’abrite pas derrière un règlement dans une commune de 1 000 ou de 1 500 habitants.

Que vous fixiez, pour les petites communes, le même délai de convocation du conseil municipal que pour les autres, c’est très bien. Pour le reste, nous ne sommes pas d’accord. Vous allez trop loin, et ça devient insupportable.

Je rappelle qu’il y a maintenant une charte : il a fallu faire dire à tous les élus de France qu’ils s’engageaient à ne pas voler, à ne pas « piquer dans la caisse » ! (M. Alain Gournac s’esclaffe.) Là, on a atteint le summum ! Vous rendez-vous compte du point auquel vous êtes arrivés !

Dans nombre de collectivités, là encore en fonction de seuils, on doit présenter des rapports sur l’eau, l’assainissement, les déchets, le développement durable…

M. Roger Karoutchi. Il a raison !

M. Jacques Mézard. Il faut remplir des pages et des pages, alors que pas un élu sur dix, voire sur cent, ne lit ces rapports !

M. Philippe Kaltenbach. Ce n’est pas vrai !

M. Jacques Mézard. Mais si, c’est la réalité ! C’est le vécu quotidien de presque tous ceux qui siègent ici, monsieur Kaltenbach ! Vous voyez les choses depuis Paris !

M. Jean-Claude Lenoir. Vision parisienne ! La France profonde est ailleurs !

M. Jacques Mézard. C’est votre volonté de tout encadrer, votre folie de réglementation qui tue ce pays !

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Je voterai le sous-amendement de M. Kaltenbach et l’amendement du Gouvernement.

Néanmoins, je reste bien un héritier de la gauche libertaire,…

M. Roger Karoutchi. Nous en sommes ravis !

M. Ronan Dantec. … et j’ai bien entendu la promotion de la démocratie directe qui vient d’être faite par M. Lenoir et par M. Mézard, après que M. Hyest nous eut fait part de sa vision utopique de l’harmonie municipale. (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Claude Lenoir. On comprend pourquoi vous n’avez pas beaucoup d’élus dans nos communes !

M. Ronan Dantec. Je suis bien l’héritier de cette pensée selon laquelle la démocratie doit pouvoir respirer. Mais, là, je me fais le défenseur des droits de l’opposition.

Je tenais à faire cette mise au point de manière qu’elle figure au compte rendu et qu’on ne puisse pas tirer des conclusions hâtives sur les positions idéologiques des uns et des autres.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 814.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 702.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 22 quater C, modifié.

(L'article 22 quater C est adopté.)

Article 22 quater C
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Article 22 quinquies

Article 22 quater

À la première phrase de l’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales, le nombre : « 3 500 » est remplacé par le nombre : « 1 000 ».

M. le président. L’amendement n° 538 rectifié n’est pas soutenu.

Je mets aux voix l'article 22 quater.

(L'article 22 quater est adopté.)

Article 22 quater
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Article 22 sexies

Article 22 quinquies

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Après le mot : « écrit, », la fin de la dernière phrase de l’article L. 2121-10 est ainsi rédigée : « au domicile des conseillers municipaux ou, s’ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée. » ;

2° (Supprimé)

3° L’article L. 2121-25 est ainsi rédigé :

« Art. L. 2121-25. – Dans un délai d’une semaine, le compte rendu de la séance du conseil municipal est affiché à la mairie et mis en ligne sur le site internet de la commune, lorsqu’il existe. »

M. le président. Les amendements nos 528 et 529 ne sont pas soutenus.

Je mets aux voix l'article 22 quinquies.

(L'article 22 quinquies est adopté.)

Article 22 quinquies
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Article 22 septies

Article 22 sexies

L’article L. 2321-5 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Les communes dont les habitants représentent, au titre d’une année, plus de 1 % des parturientes ou plus de 1 % des personnes décédées dans un établissement public de santé comportant une maternité et situé sur le territoire d’une autre commune comptant moins de 10 000 habitants contribuent financièrement aux dépenses exposées par cette autre commune pour la tenue de l’état civil et l’exercice des actes de police des funérailles si le rapport entre le nombre des naissances constatées dans cet établissement et la population de la commune d’implantation dépasse 30 %. » ;

2° Au dernier alinéa, après le mot : « concernées », sont insérés les mots : « sur leurs contributions respectives ou de création d’un service commun chargé de l’exercice de ces compétences ». – (Adopté.)

Article 22 sexies
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Article 22 octies (supprimé)

Article 22 septies

(Non modifié)

À la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 5731-3 du code général des collectivités territoriales, la référence : « L. 1115-4-1 et » est remplacée par la référence : « L. 1115-4 à ». – (Adopté.)

Article 22 septies
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Article 22 nonies (supprimé)

Article 22 octies

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 634, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Les métropoles, les communautés urbaines, les communautés d'agglomération et les communautés de communes sont administrées par un organe délibérant élu au suffrage universel direct, suivant des modalités particulières fixées par la loi avant le 1er janvier 2017.

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Il est intéressant, depuis une semaine que nous débattons, d’essayer de comprendre où veulent en venir les uns et les autres.

Je crois profondément à la commune, qui est, sur le plan culturel, profondément inscrite dans notre perception du territoire et dans notre vie collective.

M. Alain Gournac. Alors, défendez-la !

M. Ronan Dantec. Je sens poindre chez certains un léger pessimisme, voire un début de nostalgie, mais la commune n’est absolument pas menacée dans notre pays. C’est un espace parfaitement identifié, un espace de proximité, de solidarité.

La vraie menace qui pèse aujourd’hui est l’inégalité de traitement que ressentent nos compatriotes selon l’endroit où ils habitent.

Le bassin de vie qui s’est imposé est évidemment plus grand que celui qui prévalait sous la Révolution : depuis, on a inventé la voiture, des progrès de toutes sortes ont été accomplis, et l’on ne vit plus de la même manière. Ce bassin de vie doit être géré par une entité politique, qui, à peu de chose près, correspond à l’intercommunalité.

Mais le système actuel a pour conséquence que, dans ces intercommunalités, le débat sur les grands choix de l’intercommunalité au moment des élections municipales a généralement lieu, d’abord, pour ne pas dire exclusivement, dans la commune centre. Un certain nombre de communes périphériques membres de l’intercommunalité, notamment les plus petites, n’ont pas le même débat lors des élections municipales parce que le mode de scrutin ne crée pas l’égalité entre les citoyens.

Le scrutin direct pour l’intercommunalité est un enjeu démocratique fort, un enjeu de perception différente des espaces et de l’égalité républicaine. Cela n’empêchera pas la commune de continuer à exister comme espace de vie, comme espace démocratique, parce qu’elle est ancrée culturellement. Cependant, si l’on ne progresse pas sur le scrutin direct – et, à cet égard, l’Assemblée nationale avait quand même réalisé une avancée importante –, on continuera d’alimenter le sentiment de relégation. Tel est aujourd’hui l’enjeu du scrutin direct.

Aux quelques voix qui s’élèveront pour dire : « Halte là ! Vous voulez la disparition de la commune », je répondrai que ce n’est absolument pas le débat. C’est une manière de ne pas répondre à la vraie question, qui est celle de l’égalité des citoyens par rapport aux grands choix qui sont faits au sein de l’intercommunalité.

M. le président. L'amendement n° 757 rectifié, présenté par MM. Nègre et Revet, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le deuxième alinéa de l’article 54 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles est ainsi modifié :

1° Les mots : « Au vu du rapport sur le déroulement de l’élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires de 2014 déposé par le Gouvernement en application de l’article 48 de la présente loi, » sont supprimés ;

2° Le mois : « juin » est remplacé par le mois : « décembre » ;

3° Les mots : « d’une partie » sont remplacés par les mots : « de tout ou partie ».

La parole est à M. Louis Nègre.

M. Louis Nègre. En application de l’article 54 de la loi MAPTAM, les conseillers métropolitains seront élus au suffrage universel direct lors du prochain renouvellement général des conseils municipaux. Les modalités concrètes seront fixées par la loi électorale avant le 1er janvier 2017.

L’article 54 de la loi MAPTAM prévoit que cette loi doit se fonder sur un rapport d’évaluation des élections communautaires de 2014, qui n’a jamais été produit, ainsi que sur un rapport remis par le Gouvernement au Parlement avant le 30 juin 2015, afin de présenter les pistes envisageables.

Ce délai est extrêmement contraignant et, à ma connaissance, il n’a pas été tenu,…

M. René Vandierendonck, corapporteur. Il reste un mois !

M. Louis Nègre. … sauf si M. le secrétaire d’État nous annonce que la remise du rapport du Gouvernement au Parlement se fera bien avant le 30 juin prochain.

Cet amendement prévoit donc de repousser – là encore, soyons pragmatiques : ne fixons pas des ultimatums qu’on n’est pas capable de respecter ! – au 31 décembre 2015, soit de six mois, la remise de ce rapport, tout en élargissant son champ d’étude à l’élection de tout ou partie des conseillers métropolitains au suffrage universel direct.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René Vandierendonck, corapporteur. L’amendement de M. Dantec nous ramène à un débat que nous avions déjà eu au moment de l’examen de la loi MAPTAM. L’amendement de même nature qui avait alors été présenté avait été rejeté par le Sénat, sur avis défavorable de la commission des lois. Celle-ci le réitère aujourd'hui.

Permettez-moi, pour que les choses soient bien claires, de vous raconter une anecdote.

À la communauté urbaine de Lille, ce ne sont ni les Verts, ni le PS, ni l’UMP qui travaillent le plus. Le groupe qui travaille le plus, c’est celui qui fédère les maires des petites et moyennes communes. J’en veux pour preuve que, lorsque la loi Chevènement a été mise en œuvre, ils se sont réunis pour savoir quel serait le devenir de la communauté urbaine et ils sont arrivés à trois conclusions.

Premièrement, il faut sauvegarder ce qui fonde la légitimité, c’est-à-dire l’élection du maire au suffrage universel direct.

Deuxièmement, l’intercommunalité, c’est de la coopération entre les communes.

Troisièmement, si un autre mode de représentation, au sein de l’EPCI était un jour envisagé, on pourrait être amené à poser la question d’une sorte de « bicamérisme local », avec une assemblée des maires ou de leurs représentants fléchés par le suffrage et, éventuellement, une autre qui serait élue au suffrage universel direct.

Mais, depuis les travaux du comité Balladur, tout le monde mélange tout ! Prenez le problème comme vous voulez, et je proposerai au Conseil constitutionnel de l’examiner, mais une telle réforme nécessite une révision de la Constitution. Point barre !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Eh oui !

M. René Vandierendonck, corapporteur. Donc, ne nous engageons pas dans de faux débats, des débats de positionnement, qui ne sont que des leurres !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. André Vallini, secrétaire d'État. Sur cette question très sensible, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.

M. Yannick Botrel. L’instauration du suffrage universel direct pour la désignation des conseillers communautaires est un sujet récurrent en matière de gouvernance territoriale de la France.

De façon sous-jacente, il a été au cœur de nos débats dans ce projet de loi NOTRe à travers l’évocation de la place et de l’existence des communes, qu’une volonté gouvernementale plus ou moins occulte, ainsi que quelques-uns persistent à le dire, chercherait à faire disparaître…

La justification d’une telle disposition relative à cette désignation serait, selon d’autres, de nature à introduire davantage de démocratie dans cette sphère intercommunale.

J’observe que, désormais, des associations citoyennes et des particuliers posent ouvertement cette question, qui se rapporte aux responsabilités et à l’incidence fiscale et budgétaire de l’intercommunalité dans la vie publique. Une telle mesure contribuerait sans doute à rendre le fonctionnement de ces institutions moins abstrait qu’il ne le paraît actuellement aux yeux des citoyens.

Qu’on accepte cette idée ou qu’on la rejette, la question se posera dans l’avenir avec une acuité accrue.

Quel est le moment opportun pour engager le débat ? De mon point de vue, parce qu’il s’agit d’un débat de fond, au vrai sens du terme, il ne peut être question de le trancher en catimini, dans une sorte d’entre soi, sans approfondir la discussion ni examiner précisément chacun des arguments qu’un tel débat emporte. Et c’est justement parce que ce travail politique doit être précis, approfondi, que j’estime que le moment n’est pas venu.

Laissons aux intercommunalités le temps d’assimiler les modifications de périmètre et l’élargissement des compétences qui découleront du présent projet de loi.

Ce n’est donc pas sur l’éventuel bien-fondé de cet amendement à l’article 22 octies que je me prononce, mais sur son opportunité, aujourd’hui. Il s’agit non d’écarter le débat, mais de rechercher la cohérence.

À cet égard, les sénateurs socialistes estiment préférable que cette question soit dissociée du projet de loi NOTRe et fasse l’objet d’une discussion dédiée.

C’est pourquoi nous ne voterons pas cet amendement.

M. René Vandierendonck, corapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je souscris aux propos qui viennent d’être tenus.

Qui va-t-on voir quand il y a un problème ? On va voir le maire ! Avec son conseil municipal, il est véritablement le symbole, l’âme d’une organisation au niveau des communes. Par conséquent, cessons de vouloir détruire la commune !

Lors de la dernière campagne des élections départementales, nous avons pris la mesure du sentiment d’abandon éprouvé dans nos campagnes, un sentiment que vous ne feriez qu’accentuer en adoptant une telle disposition. (M. Ronan Dantec fait des signes de dénégation.)

Alors que nous sommes en train de revoir la coopération intercommunale, qui doit être un outil au service de nos concitoyens, destiné à faciliter certains investissements et l’offre de certains services publics que la commune ne peut assumer seule, ce n’est pas le moment de changer complètement la société. Car c’est un vrai fait sociétal !

En outre, je rejoins René Vandierendonck pour considérer que cela soulève un problème constitutionnel. La région, le département et la commune sont inscrits dans la Constitution !

Nous avons remis en cause ces périmètres. Nos concitoyens, qui se sentent déjà éloignés des centres de décision, vont élire le président d’une intercommunalité qui, avec le seuil de 20 000 habitants, va rassembler vingt, trente, quarante, cinquante, voire, dans des secteurs comme les miens, soixante ou soixante-dix communes ! Il n’y aura donc plus d’attaches dans un milieu rural déjà en grande difficulté.

C’est pourquoi la solution proposée est particulièrement mauvaise.

Je m’opposerai pour l’heure à cette idée, qui ne pourrait être mise en œuvre qu’à la condition que les intercommunalités aient les mêmes compétences. Or vous proposez d’élire des intercommunalités dotées de compétences différentes, puis de les marier, ce qui impliquera de retravailler leurs compétences. Ce type d’élection constitue donc aujourd'hui une duperie.

Une telle réforme ne peut s’envisager que si on l’accompagne d’une réflexion profonde sur l’aménagement du territoire et sur la répartition des compétences, mais de façon très fixe par rapport à la structure intercommunale.

Je pense que les esprits ne sont pas encore mûrs. Une telle réforme ne doit pas se faire au détour d’un amendement sur une loi de répartition des compétences. Elle doit être le fruit d’une réflexion partagée : nous devons trouver ensemble, droite et gauche confondues, la solution permettant une meilleure organisation.

Pour l’instant, il est préférable de rassurer nos concitoyens qui sont déjà confrontés à un certain nombre de difficultés.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Je suis atterré, non pas que cette idée soit émise – en démocratie, toutes les idées méritent d’être examinées –, mais qu’il y ait une volonté affirmée de remettre en cause des éléments fondamentaux résultant de la Constitution, comme René Vandierendonck l’a dit à très juste titre.

Aux termes de la Constitution, sont considérés comme collectivités territoriales la commune, le département et, depuis pas très longtemps, la région. À ma connaissance, les intercommunalités ne sont pas considérées comme des collectivités territoriales. Tel est le postulat de base. Aux termes de la loi Chevènement, les intercommunalités n’ont de compétences qu’en vertu de dispositions législatives leur transférant des compétences soit obligatoires soit optionnelles.

Il faut imaginer ce que donnerait en pratique l’élection de conseillers communautaires au suffrage universel si l’on restait dans le système actuel, sans réviser la Constitution, c'est-à-dire sans créer une quatrième « couche » : il y aurait, d’un côté, des exécutifs d’intercommunalité élus et, de l’autre, des maires et adjoints, également élus ; ce ne seraient pas forcément les mêmes personnes, et les uns et les autres auraient été élus, mais pas nécessairement pour faire les mêmes choses… En l’état, un tel système ne serait pas praticable !

Je veux dire à mes collègues socialistes que, si j’ai entendu la position de sagesse de notre collègue Yannick Botrel sur l’amendement de M. Dantec, je suis, avec mon groupe, en désaccord total avec le fond de son propos. Il a en effet indiqué que les sénateurs socialistes renonçaient à voter cet amendement pour une question d’opportunité, mais qu’ils approuvaient sur le fond la disposition votée par l’Assemblée nationale.

Je suis très content que cela ait été dit…

M. Philippe Kaltenbach. Il faut arrêter avec ça !

M. Jacques Mézard. … parce que cela confirme ce que je ne cesse de répéter ici depuis des jours : votre véritable objectif est bien la suppression des communes. C’est la réalité !

M. Alain Gournac. Mais oui !

M. Jacques Mézard. Bien sûr que si ! Je vous ai lu, hier, des extraits de plusieurs rapports dans lesquels il est dit que la clause de compétence générale doit être transférée aux intercommunalités et qu’il doit y avoir une élection au suffrage universel !

Si c’est ce que vous voulez, dites-le clairement ! Nous voterons et, ensuite, chacun respectera le vote majoritaire. Mais, je le redis, nous savons que c'est ce que vous voulez. Alors assumez-le !

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur.