Sommaire

Présidence de Mme Isabelle Debré

Secrétaires :

Mme Frédérique Espagnac, M. Bruno Gilles.

1. Procès-verbal

2. Candidatures à deux commissions mixtes paritaires

3. Demande d’inscription à l’ordre du jour d’une proposition de résolution européenne

4. Accord commercial Union européenne-Colombie et Pérou. – Adoption définitive en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale :

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du développement et de la francophonie

M. Jeanny Lorgeoux, rapporteur de la commission des affaires étrangères

Mme Leila Aïchi

M. André Trillard

Mme Nathalie Goulet

M. Michel Billout

Mme Hélène Conway-Mouret

Clôture de la discussion générale.

Adoption définitive de l’article unique du projet de loi dans le texte de la commission.

5. Conventions internationales. – Adoption en procédure d’examen simplifié de deux projets de loi dans les textes de la commission

Convention du Conseil de l’Europe relative à la contrefaçon des produits médicaux. – Adoption de l’article unique du projet de loi dans le texte de la commission.

Accord-cadre de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et la République des Philippines. – Adoption de l’article unique du projet de loi dans le texte de la commission.

6. Accord de coopération entre l’Union européenne et le Viêt Nam. – Adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale :

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du développement et de la francophonie

Mme Hélène Conway-Mouret, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Mme Leila Aïchi

M. Jean-Claude Requier

Mme Catherine Deroche

M. Michel Billout

M. Jeanny Lorgeoux

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État

Clôture de la discussion générale.

Adoption de l’article unique du projet de loi dans le texte de la commission.

7. Nomination de membres de deux commissions mixtes paritaires

8. Réutilisation des informations du secteur public. – Adoption des conclusions d’une commission mixte paritaire

Discussion générale :

M. Hugues Portelli, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification

M. Jean-Claude Requier

M. Claude Kern

M. Éric Bocquet

M. Jean-Pierre Sueur

Mme Corinne Bouchoux

Mme Jacky Deromedi

PRÉSIDENCE DE M. Hervé Marseille

Clôture de la discussion générale.

Texte élaboré par la commission mixte paritaire

Adoption définitive du projet de loi dans le texte de la commission mixte paritaire.

9. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de Mme Isabelle Debré

vice-présidente

Secrétaires :

Mme Frédérique Espagnac,

M. Bruno Gilles.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Candidatures à deux commissions mixtes paritaires

Mme la présidente. J’informe le Sénat que la commission des affaires sociales a procédé à la désignation des candidats qu’elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi créant de nouveaux droits pour les personnes malades en fin de vie.

Cette liste a été publiée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l’article 12 du règlement.

J’informe le Sénat que la commission des affaires sociales a procédé à la désignation des candidats qu’elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la protection de l’enfant.

Cette liste a été publiée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l’article 12 du règlement.

3

Demande d’inscription à l’ordre du jour d’une proposition de résolution européenne

Mme la présidente. Par lettre en date du 16 décembre 2015, Mme Éliane Assassi, présidente du groupe communiste, républicain et citoyen, a demandé l’inscription à l’ordre du jour de la proposition de résolution européenne sur les conséquences du traité transatlantique pour l’agriculture et l’aménagement du territoire.

Mme Nathalie Goulet. Très bonne idée !

Mme la présidente. Acte est donné de cette demande.

La conférence des présidents en sera saisie lors de sa prochaine réunion.

4

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord commercial entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la Colombie et le Pérou, d'autre part
Discussion générale (suite)

Accord commercial Union européenne-Colombie et Pérou

Adoption définitive en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord commercial entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la Colombie et le Pérou, d'autre part
Article unique (début)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification de l’accord commercial entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la Colombie et le Pérou, d’autre part (projet n° 692 [2014-2015], texte de la commission n° 236, rapport n° 235).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du développement et de la francophonie. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes réunis ce matin pour l’examen et le vote par votre assemblée du projet de loi autorisant la ratification de l’accord commercial avec la Colombie et le Pérou, signé le 26 juin 2012.

Cet accord est appliqué, à titre provisoire, depuis le 1er mars 2013 au Pérou et, depuis le 1er août 2013, en Colombie. Il permettra le développement des échanges commerciaux entre le territoire européen et ces pays de la communauté andine. Il prévoit, en effet, une diminution des droits de douane à l’entrée de nos territoires, mais aussi, pour les entreprises, une levée des obstacles réglementaires au commerce.

Les sensibilités particulières de chacune des parties n’ont pas été oubliées, avec notamment, pour préserver les intérêts de nos pays et territoires d’outre-mer, l’instauration d’un mécanisme de sauvegarde spécifique pour le commerce de la banane.

Le principal enjeu de cet accord est de consolider nos relations bilatérales, en ouvrant de nouveaux marchés.

Les entreprises françaises croient au potentiel de ces économies émergentes. Elles profiteront, de manière directe, de conditions d’investissement facilitées, ainsi que des avancées réglementaires permises par ces accords, mais aussi, par répercussion, de l’ouverture d’enceintes de dialogue régulier et de l’amélioration attendue de l’État de droit.

Permettez-moi d’ajouter que les droits de l’homme sont, pour chacun des accords examinés ce matin, un élément essentiel pour la France.

L’accord commercial signé avec la Colombie et le Pérou s’ouvre sur une clause permettant de suspendre l’application des dispositions de l’accord en cas de violation des droits de l’homme. En outre, il contient un chapitre dédié à la mise en œuvre des conventions internationales relatives aux droits du travail et à la protection de l’environnement.

Le Parlement européen avait, par ailleurs, demandé aux gouvernements colombien et péruvien de lui soumettre une feuille de route fixant des objectifs contraignants en matière de droits de l’homme et d’environnement, avant l’approbation de l’accord. Ces feuilles de route feront l’objet d’un suivi approfondi.

Cet accord fait ainsi partie des accords commerciaux de nouvelle génération, intégrant les questions commerciales aux problématiques du développement, afin de garantir un environnement stable aux échanges, dans la perspective d’un développement durable.

Mesdames, messieurs les sénateurs, en donnant votre accord à ce projet de loi, vous soutiendrez le développement de relations nouvelles avec la Colombie et le Pérou, au niveau de l’Union européenne, mais également sur le plan national, notamment pour nos entreprises. Ces pays l’appellent de leurs vœux. J’en appelle pour ma part à votre soutien.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jeanny Lorgeoux, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cet accord commercial, signé le 26 juin 2012 entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la Colombie et le Pérou, d’autre part, est présenté comme l’accord le plus substantiel jamais conclu par l’Union européenne avec des pays andins.

Il est le fruit d’une négociation, entamée en 2007, sur la base de l’accord-cadre de coopération, signé en avril 1993 par l’Union européenne avec la Communauté andine des nations, qui amorçait une nouvelle relation commerciale, tout en ménageant une place à la protection des droits de l’homme et au respect des principes démocratiques.

L’ensemble de l’accord est déjà appliqué, à titre provisoire, avec le Pérou depuis le 1er mars 2013 et, à l’exception de quatre articles, avec la Colombie depuis le 1er août 2013. Ainsi, la France, qui sera l’un des derniers États membres à le ratifier – il ne manque plus que quatre ratifications à ce jour –, bénéficie déjà des préférences commerciales et de la levée des obstacles non tarifaires aux échanges qu’il prévoit.

L’Union européenne et la France entretiennent des relations commerciales avec la Colombie et le Pérou, qui n’épuisent pas leur potentiel et ne pourront que croître et prospérer avec cet accord.

La Colombie est la troisième puissance économique d’Amérique du Sud, avec un produit intérieur brut de 400 milliards de dollars américains en 2014. Elle connaît une croissance soutenue depuis plusieurs années. L’Union européenne est son deuxième partenaire commercial, avec un volume des échanges d’un peu plus de 14 milliards d’euros en 2013. La même année, la France était son huitième pays fournisseur, avec une part de marché de 2,4 %, et le premier employeur étranger, avec 100 000 emplois.

Le Pérou est une économie de taille moyenne, avec un produit intérieur brut de 203 milliards de dollars américains, qui a connu une croissance forte entre 2006 et 2013 – quelque 6,8 % en moyenne annuelle – et moindre en 2014 – quelque 2,4 % – du fait de la baisse du prix des minerais. L’Union européenne est son troisième partenaire commercial et le premier investisseur étranger. Le volume des échanges entre l’Union et le Pérou a atteint 9 milliards d’euros en 2013. Avec environ 544 millions d’euros d’échanges commerciaux directs en 2014, la France est le 23e client et le 21e fournisseur du Pérou.

Cet accord commercial dit « de nouvelle génération » vise à libéraliser progressivement le commerce des biens et à favoriser l’intensification des échanges commerciaux dans un environnement stable et durable, en vue d’instaurer, à terme, une zone de libre-échange.

Son volet commercial est très proche de celui de l’accord d’association conclu entre l’Union européenne et l’Amérique centrale, que nous avons examiné l’an dernier et que la France a ratifié. L’Union européenne s’engage à ouvrir son marché aux exportateurs du Pérou et de la Colombie au travers de la libéralisation immédiate des produits industriels et de la pêche, notamment les crevettes.

En contrepartie, le Pérou et la Colombie éliminent respectivement 80 % et 65 % des droits de douane sur les importations de produits industriels européens, pour les supprimer totalement au bout de onze ans.

S’agissant des produits agricoles, les échanges sont plus ouverts que par le passé et des contingents tarifaires libres de droits ont été accordés de part et d’autre.

La commission s’est particulièrement penchée sur les dispositions relatives à la banane, qui est un produit sensible, à fort enjeu pour nos territoires d’outre-mer. Deux mécanismes de protection sont prévus : la clause de sauvegarde, d’une part, et le mécanisme de stabilisation, d’autre part. Selon le rapport annuel de décembre 2014 de la Commission européenne sur la mise en œuvre de cet accord, ces mécanismes n’ont pas été utilisés pour l’instant. Ils pourraient l’être à l’avenir, si le besoin s’en faisait sentir.

Cet accord est aussi un accord dit « de nouvelle génération », ce qui signifie qu’il couvre non seulement les sujets traditionnels du commerce international, mais aussi, plus succinctement, les questions relatives aux droits de l’homme et au développement durable. Il contient ainsi un chapitre « Commerce et développement durable ».

De ce fait, en cas de dégradation significative de la situation des droits de l’homme en Colombie et au Pérou – un sujet qui reste une préoccupation majeure de l’Union européenne –, l’accord pourrait être suspendu, notamment sur la base de l’article 1er relatif aux principes démocratiques et droits fondamentaux de l’homme.

La commission s’est naturellement intéressée de près aux conséquences potentielles sur l’environnement, notamment du fait des industries extractives minières présentes dans ces deux pays.

L’accord contient, dans son article 271, des obligations environnementales qui sont similaires à celles qui figurent dans les précédents accords de libre-échange signés par l’Union européenne. Il est à noter que la Colombie et le Pérou participent à l’initiative norvégienne sur la transparence des industries extractives, qui est une norme internationale pour la transparence de la gestion des revenus tirés des industries extractives comportant sept exigences.

Dans ces deux domaines, l’Union européenne et la France seront attentives au strict respect, par ces deux pays, des feuilles de route présentées par les gouvernements colombien et péruvien au Parlement européen en novembre 2012.

Quelles sont, enfin, les conséquences attendues de cet accord ? Celui-ci ne devrait pas remettre fondamentalement en cause la structure et le volume des échanges de biens entre les parties à l’accord, puisqu’il sécurise des « préférences commerciales » déjà accordées à la Colombie et au Pérou par l’Union européenne.

Compte tenu de la sensibilité du secteur laitier, le lait et le beurre sont exclus de la libéralisation pour la Colombie et libéralisés, sur une période comprise entre quinze et dix-sept ans, pour le Pérou. En 2015, la France et la Colombie ont signé un accord de coopération entre leurs ministères de l’agriculture, en vue d’aider la Colombie à restructurer, notamment, sa filière laitière.

Les grandes industries exportatrices de l’Union européenne du secteur des produits industriels et des produits de la pêche devraient, quant à elles, bénéficier d’économies de droits de douane pour un montant annuel de 250 millions d’euros, au plus tard dix ans après l’entrée en vigueur de l’accord.

S’agissant des produits agricoles, à la fin de la période de transition de dix-sept ans, on table sur environ 270 millions d’euros d’économies par an.

Depuis l’application provisoire de l’accord en 2013, la France enregistre d’ailleurs une forte augmentation de ses exportations de produits agroalimentaires : céréales, fruits et produits laitiers. J’ajouterai que, depuis 2013, quelque 92 indications géographiques européennes sont désormais protégées, dont 43 françaises.

En conclusion, et compte tenu de ces observations, nous recommandons l’adoption de ce projet de loi, car cet accord permet l’approfondissement du dialogue avec les pays d’Amérique latine en complétant les accords nous liant au Chili, au Mexique et au Brésil. Une clause d’adhésion ménage d’ailleurs aux autres pays membres de la Communauté andine des nations la possibilité de participer à l’accord, lorsqu’ils le jugeront opportun. L’Équateur a ainsi engagé des négociations commerciales avec l’Union européenne qui ont abouti à un accord, conclu en juillet 2014.

Pour l’ensemble de ces raisons, mes chers collègues, la commission des affaires étrangères vous demande d’adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC, ainsi que sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

Mme Nathalie Goulet. Remarquable !

Mme la présidente. La parole est à Mme Leila Aïchi.

Mme Leila Aïchi. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe écologiste ne nourrit aucune hostilité de principe à l’égard des accords commerciaux.

Bien au contraire, le commerce est, par excellence, un levier de développement et de rapprochement entre les peuples et les cultures. Toutefois, pour paraphraser et prolonger le concept bien connu décrit par Montesquieu, il nous semble que, pour être « doux », le commerce doit également être juste et équitable. C’est à l’aune de ces principes qu’il nous faut juger cet accord.

À cet égard, la méthode suivie est problématique. Cet accord n’a pas pu être conclu avec la Communauté andine des nations, compte tenu du refus de la Commission européenne d’adopter une approche différenciée. De plus, il limite très fortement, en son article 329, la marge de négociation des autres pays andins qui souhaiteraient accéder à l’accord. Il y a, vous en conviendrez, madame la secrétaire d’État, quelque paradoxe à voir l’Union européenne prendre ainsi le risque de saper l’intégration au sein de l’organisation régionale la plus ancienne d’Amérique du Sud !

Plus encore, le contenu de cet accord, dont l’essentiel fait l’objet d’une application provisoire depuis 2013, en fait un texte marqué du sceau d’un libre-échangisme peu soucieux de développement équitable ou durable. Les maigres garde-fous prévus ne nous semblent pas être en mesure de prévenir la mise en difficulté des secteurs agricoles péruvien et colombien, confrontés aux productions subventionnées de l’Union européenne. La filière équitable, qui est bien implantée et que cet accord ne prend pas en compte, pourrait ainsi être particulièrement fragilisée.

La libéralisation des marchés publics, dans le sens d’une égalité d’accès, va priver les pouvoirs adjudicateurs d’un outil essentiel de politique économique en faveur de leurs entreprises, notamment de leurs PME. De même, la libéralisation de nombreux secteurs des services risque de se révéler préjudiciable aux services publics, menaçant notamment la logique de péréquation qui est la leur et compromettant ainsi la poursuite d’une politique d’aménagement du territoire.

Les facilités ouvertes par cet accord entraîneront une augmentation des investissements dans les agrocarburants et l’exploitation minière, activités préjudiciables à l’environnement, mais aussi aux droits humains. Elles signifient en effet accaparements de terres et déplacements forcés, à l’encontre notamment des populations indigènes. On sait que le Pérou et la Colombie font souvent peu de cas de l’obligation de recueillir le consentement préalable des populations indigènes lors de ces opérations, en violation de la convention n° 169 de l’Organisation internationale du travail.

Cet accord suscite donc de fortes réserves de notre part. Pour autant, nous entendons les raisons plaidant en faveur de ce texte. Ainsi, il est certain qu’il vise à inciter les pays partenaires à une meilleure prise en compte des droits humains, ainsi que des standards sociaux et environnementaux. Par l’adoption d’une feuille de route précise, le Parlement européen a d’ailleurs entendu expliciter ce souhait. Il y a certes des insuffisances dans les garanties prévues, et les effets induits par cet accord contreviendront sans conteste à ces objectifs.

Il faut cependant avoir conscience que ces pays en fort développement sont en recherche de partenariats économiques. Il nous faut donc savoir y répondre, afin de garder une relation privilégiée avec eux. Ce faisant, nous pouvons aider à consolider des démocraties et des États de droit encore balbutiants avec une très forte marge de progression en la matière.

C’est donc parce qu’il est conscient de la nécessité d’entretenir le lien avec ces pays, mais très réservé sur les conséquences de cet accord que le groupe écologiste s’abstiendra sur ce projet de loi autorisant sa ratification.

Mme la présidente. La parole est à M. André Trillard.

M. André Trillard. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’accord commercial entre l’Union européenne, d’une part, et la Colombie et le Pérou, d’autre part, permettra l’instauration d’une zone de libre-échange. Au niveau national, cet accord comporte des clauses relatives à la coopération en matière de lutte contre le terrorisme et contre la prolifération d’armes de destruction massive. Dans le contexte géopolitique actuel, ces collaborations sont primordiales.

Le point essentiel de cet accord tient à la libéralisation des échanges entre l’Union et ces deux pays, ce dont nous nous réjouissons, car elle s’accompagnera d’une baisse des frais de douane, grâce à un « calendrier de démantèlement tarifaire », qui a été évoqué par notre excellent rapporteur.

Néanmoins, des questions demeurent. En particulier, au moment où les producteurs et exportateurs français doivent répondre à de nombreux critères et à une inflation de normes en tous genres, il ne faudrait pas que ces cahiers des charges se transforment en une concurrence déloyale.

Madame la secrétaire d’État, je pense que ce type de question devrait faire l’objet d’un débat plus large. Nous devrions travailler, par exemple, sur le thème suivant : « Quel respect des normes et par qui, dans les accords commerciaux européens ? » Le président de notre commission, Jean-Pierre Raffarin, a souligné la complexité de ce sujet.

J’estime que, au niveau européen, la France doit travailler à la préservation de ses intérêts en matière d’exportations.

Je pense à cet instant au secteur de la banane. Nous l’avons évoqué en commission, le secteur doit faire face à la « maladie de Panama ». Nous devons être attentifs aux besoins des producteurs de Martinique et de Guadeloupe. Plus généralement, nous devons agir pour favoriser l’exportation des produits agricoles français, car leur qualité est réelle et issue d’un savoir-faire qu’il faut préserver et valoriser. Oui, nous sommes loin des productions intensives, mais nous avons pour nous la sûreté alimentaire, ce qui n’est pas un détail.

En outre, je pense que les ratifications d’accords commerciaux ou d’association de pays tiers avec l’Union européenne devraient davantage nous mobiliser. La libéralisation des échanges, c’est bien, mais le respect de critères d’une concurrence équitable, c’est encore mieux !

Outre la question de l’accord commercial, il me semble important que l’Union européenne et à travers elle la France parviennent à s’inscrire dans une dynamique positive, non seulement en matière d’échanges, mais aussi en termes de positionnement stratégique global avec le Pérou, avec la Colombie et avec les autres pays andins. Il y va aussi de notre influence sur le continent sud-américain. C’est essentiel, et cet accord peut être l’occasion d’implantations industrielles nouvelles que nous devons encourager.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, le groupe Les Républicains votera en faveur de cet accord. Pour autant, ce vote positif s’accompagne d’une vigilance quant à la préservation de nos intérêts agricoles et industriels. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, après le rapport exceptionnellement complet de la commission des affaires étrangères, il me reste peu de choses à dire, sinon que mon groupe va évidemment voter en faveur de cet accord.

La concurrence en matière agricole, notamment s'agissant d’exportation de bananes, me passionne évidemment, mais j’observe que les articles 22 et 23 de l’accord comportent des dispositions relatives au terrorisme et, surtout, à la lutte contre le trafic de drogue.

Pour avoir présidé la commission d’enquête sénatoriale sur l’organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe et continuer à travailler sur le financement de ces réseaux, je tiens à insister, madame la secrétaire d’État, sur la porosité désormais avérée de tous les circuits financiers de délinquance, y compris ceux des cartels de la drogue, avec les circuits de financement du terrorisme. Nous retrouvons dans le Sinaï des représentants des cartels les plus connus, notamment ceux de Colombie. Nous ne concluons évidemment pas d’accord avec ces cartels, mais nous concluons un accord, du reste passionnant, avec le pays où ils sont implantés.

J’ai bien compris la totalité des dispositions de cet accord. Il est très important que l’Europe, dans sa politique de voisinage très étendu, s’intéresse à ces questions. En ce qui me concerne, le point le plus stratégique de cet accord concerne la lutte contre le terrorisme et les trafics de stupéfiants.

Je note aussi l’impérieuse nécessité du respect des droits de l’homme. Je regrette cependant que de tels impératifs ne soient pas insérés ni, en tout cas, appliqués dans les accords de la politique de voisinage avec Israël, ce qui rendrait service à la population palestinienne. La Palestine, vous le savez, madame la secrétaire d’État, n’est pas un territoire oublié, c’est un territoire disparu !

Je suis absolument ravie que nous mettions les droits de l’homme en exergue dans le cadre de nos échanges avec la Colombie et le Pérou, mais je crois qu’il ne faudrait pas donner l’impression d’appliquer un double standard dans nos relations avec d’autres pays qui ont signé des accords du même type, voire plus favorables, avec l’Union européenne.

Nous sommes favorables à l’extension de nos relations avec des pays qui sont, il faut l’avouer, un peu lointains et avec lesquels nous n’entretenons pas forcément des relations très suivies. De même, nous sommes favorables au développement des échanges agricoles et au renforcement de nos relations commerciales sous l’égide de l’Europe. Cependant, dans le contexte actuel, les dispositions majeures de cet accord sont bien les articles 22 et 23.

Je souhaite que cet accord puisse permettre aux autorités européennes d’avancer, notamment, dans la lutte contre le financement du terrorisme. En effet, les ministres européens se réunissent quotidiennement pour en discuter et l’Union européenne a adopté de nouvelles dispositions pour lutter contre ce financement : cet accord fait donc partie des moyens de lutte indirects contre le terrorisme, en particulier contre le phénomène très important du trafic de drogue – encore une fois, tous les rapports attestent que les cartels de la drogue sont liés aux groupes d’Al-Qaïda présents dans le Sinaï.

Je crois donc que cet accord est un bon accord, mais probablement pas pour les mêmes raisons qu’un certain nombre de mes collègues. En tout cas, ces dispositions des articles 22 et 23 représentent une avancée, et nous voterons donc en faveur de la ratification de cet accord, qui sera bon s’il est bien contrôlé et s’il permet de progresser dans la lutte contre le trafic de stupéfiants. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cet accord commercial, conclu par l’Union européenne avec la Colombie et le Pérou, se situe dans un contexte global de demande d’ouverture des marchés de la part des pays concernés, qui ont conclu, ces dernières années, des accords visant à favoriser les échanges économiques avec leurs principaux partenaires.

Cet accord commercial, qui a été signé le 26 juin 2012, est un accord mixte ou, selon l’expression consacrée, « de nouvelle génération », c’est-à-dire qu’il porte à la fois sur des matières relevant de la compétence exclusive de l’Union européenne et sur des domaines relevant de la compétence des États membres, puisqu’il concerne aussi bien les droits de l’homme, le droit du travail, le climat et le développement durable, ou bien encore la non-prolifération des armes de destruction massive.

C’est ainsi que le Parlement européen avait demandé aux gouvernements colombien et péruvien qu’ils lui soumettent chacun une « feuille de route » qui fixerait des objectifs contraignants en matière de droits de l’homme et de développement, avec des garanties en matière sociale, avant même l’approbation de l’accord en 2012.

Ces cadres font depuis lors l’objet d’une évaluation régulière, mais, comme le faisait remarquer notre collègue Nathalie Goulet, je ne connais pas beaucoup d’accords suspendus pour le non-respect des droits de l’homme.

Il faut enfin relever, pour s’en étonner, que l’ensemble de l’accord, à l’exception de quatre articles, est déjà appliqué, à titre provisoire, avec le Pérou depuis le 1er mars 2013 et avec la Colombie depuis le 1er août 2013. Ainsi, bien que nous soyons l’un des derniers États membres à ratifier cet accord, nous bénéficions déjà des préférences commerciales et de la levée des obstacles dits « non tarifaires » aux échanges avec ces deux pays.

Je voudrais, à ce propos, insister sur la nécessité d’une procédure de ratification plus rapide par le Parlement des traités internationaux que notre pays a signés depuis plusieurs années, faute de quoi ces discussions parlementaires n’ont guère de sens. C’est la raison pour laquelle notre groupe a considéré qu’il fallait prendre le temps d’examiner cet accord en séance publique, car, à y regarder de plus près, on voit bien que, s’il est très exigeant envers la Colombie et le Pérou sur certains points, il est profondément déséquilibré sur d’autres.

Au détriment de ces deux pays, dont la structure économique est faible par rapport à celles des pays européens, je mentionnerai notamment le démantèlement douanier, mais également la levée des obstacles normatifs aux échanges, la libéralisation du marché des services et l’ouverture des marchés publics. Dans le même ordre d’idée, à l’issue d’une période de transition, les échanges de produits industriels et de produits de la pêche seront, eux aussi, progressivement déréglementés.

Le secteur agricole ne sera pas épargné lui non plus, puisque ce marché sera largement ouvert, sauf, toutefois, pour quelques produits de base comme le riz, le maïs, la viande de porc et les volailles. De la même façon, il est à craindre que le secteur laitier local souffre particulièrement avec la concurrence des produits laitiers européens, hautement subventionnés.

En outre, la production industrielle intensive d’huile de palme, de sucre de canne et d’autres matières premières destinées aux agrocarburants modifiera automatiquement le mode d’utilisation des sols, ce qui affaiblira les petits producteurs des communautés originaires, les obligeant par là même à des déplacements forcés. Or vous le savez, il s’agit d’une question particulièrement sensible dans cette région du monde.

Au total, la souveraineté et la sécurité alimentaire de ces pays seront gravement menacées.

Enfin, ces accords ne peuvent que renforcer la tendance de ces pays à pratiquer une extraction minière débridée et à les cantonner dans un simple rôle d’exportateurs de matières premières. Venant s’ajouter aux souffrances subies par les communautés originaires et les paysans de ces pays, de telles politiques industrielles auront de lourdes conséquences environnementales et sociales, qui sont d’ores et déjà mesurables.

Je n’ai pas voulu brosser un tableau apocalyptique de l’avenir que connaîtraient ces pays avec ce type d’accords commerciaux, mais, simplement, au-delà de la présentation idyllique qui en est souvent faite, en montrer certains dangers. J’ai aussi tenté d’attirer votre attention, mes chers collègues, sur les risques de déstabilisation de sociétés qui ne connaissent pas le même niveau de développement que les nôtres, comme l’exemple tunisien nous l’a montré.

Pour ces raisons, le groupe CRC votera contre ce projet de loi de ratification. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre rapporteur a souligné à juste titre les enjeux et atouts de cet accord de libre-échange, cet ALE, qui a été conclu entre l’Union européenne, la Colombie et le Pérou en 2012.

Nous connaissons les inquiétudes, qui ont été exprimées tout au long des négociations, et encore récemment, à l’égard de cet ALE, sur les questions de droits de l’homme, des droits sociaux et des droits environnementaux.

Cet accord de libre-échange est le premier à inclure un chapitre dédié au développement durable. Son caractère perfectible a pourtant bien été un sujet de préoccupation au moment de sa négociation, les normes sociales et environnementales ne devant être appliquées qu’en fonction des capacités techniques et financières des deux États concernés. Et c’est bien sous l’impulsion des socialistes que le Parlement européen a voulu répondre à ces inquiétudes avec l’adoption d’une résolution le 13 juin 2012, laquelle a enjoint la Colombie et le Pérou de définir une feuille de route visant à garantir la protection des droits du travail, de l’environnement et des droits de l’homme comme condition préalable à l’entrée en vigueur de tout accord commercial.

Ainsi, des actions concrètes en faveur du droit du travail ont été prévues, tout comme un recensement des organes responsables de la défense de l’environnement. De même, une clause permet de suspendre l’accord en cas de violation des droits de l’homme.

Le travail de suivi sur cet ALE a été engagé, mais nous n’en sommes qu’au début. C’est la raison pour laquelle nous choisissons, pour notre part, de voir le verre à moitié plein. Je pense que, aujourd’hui, nous abordons une nouvelle phase dans la conception des politiques commerciales. Depuis plusieurs années, les socialistes, au côté du Gouvernement, défendent le principe du « juste échange », de la réciprocité, d’une stratégie commerciale responsable.

Les négociations actuelles du partenariat transatlantique sont également révélatrices de cette évolution. La France a obtenu gain de cause en matière d’arbitrage et ajouté l’équité et la justice commerciale au rang des valeurs non négociables. Ces accords doivent donc être considérés comme des instruments de progrès.

Les accords commerciaux européens de nouvelle génération sont une occasion de porter ces principes, de renforcer nos liens non seulement avec les gouvernements, mais surtout avec les syndicats et d’autres représentants de la société civile de ces pays.

Les nouvelles stratégies commerciales présentées ces dernières semaines par la Commission européenne comme par la France sont fidèles à cette évolution : le respect des valeurs telles que le développement durable, les droits de l’homme, le commerce équitable et la lutte contre la corruption est clairement devenu un préalable, tout comme la défense du modèle social et réglementaire européen.

La nouvelle politique commerciale de la Commission tend aujourd’hui à énoncer clairement ces exigences avec l’inclusion dans les accords commerciaux de règles obligeant les futurs partenaires à mettre en œuvre des dispositions consacrées aux normes fondamentales du droit du travail, telles que le droit d’organisation des travailleurs, l’abolition du travail des enfants, ou encore de normes plus strictes en matière d’environnement.

La commissaire européenne chargée de la politique commerciale, Cécilia Malmström a, le 10 décembre dernier, « enfoncé le clou », en insistant sur la nécessité de faire des accords de libre-échange un outil puissant de lutte contre la corruption et de promotion de la bonne gouvernance, rappelant que la corruption est au cœur du problème du développement : elle constitue « un fléau pour l’économie et les sociétés du monde et elle nous empêche d’éradiquer la pauvreté, de protéger notre environnement et de conduire le développement durable ».

Les négociations qui sont conduites actuellement pour un partenariat transatlantique peuvent également favoriser cette évolution. Le travail engagé par la France au niveau européen dans le cadre de ces négociations va également dans le sens de la primauté des valeurs économiques, sociales, environnementales et sociétales qui sont considérées aujourd’hui comme non négociables.

Les discussions actuelles menées dans le cadre de l’OMC sur les biens environnementaux peuvent être considérées comme un signe tangible de cette évolution, d’autant qu’elles auraient de réelles chances d’aboutir.

Les lignes sont en train de bouger, j’en suis convaincue, en faveur de stratégies commerciales plus responsables. Nous saluons enfin la publication, sur l’initiative du secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, Matthias Fekl, du rapport sur la stratégie du commerce extérieur de la France et la politique commerciale européenne, qui insiste en particulier sur la nécessité de faire en sorte que les accords commerciaux restent « vivants, au travers de l’entretien d’un dialogue régulier de toutes les parties prenantes et grâce à une évaluation ex post des accords en vigueur. »

Mes chers collègues, considérons-nous comme étant interpellés directement par cette exigence. Nous avons aujourd’hui la possibilité d’être mieux associés aux accords en cours de négociation, à leur suivi, ainsi qu’à leur mise en œuvre.

Le combat que le Gouvernement a mené au niveau européen pour une plus grande transparence des négociations commerciales favorise aujourd’hui une meilleure association des parlementaires nationaux et européens. Saisissons-nous de cette occasion, car nous avons un rôle à jouer pour la préservation et la promotion des valeurs qui sont les nôtres, et assurons donc ensemble la vigilance nécessaire. C’est non seulement notre droit, mais aussi notre responsabilité.

Vous l’avez compris, le groupe socialiste et républicain soutiendra la ratification de cet accord. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

Projet de loi autorisant la ratification de l'accord commercial entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la Colombie et le Pérou, d'autre part

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord commercial entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la Colombie et le Pérou, d'autre part
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée la ratification de l'accord commercial signé entre l'union européenne et ses États membres, d'une part, et la Colombie et le Pérou, d'autre part (ensemble quatorze annexes), signé à Bruxelles le 26 juin 2012, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté définitivement.)

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord commercial entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la Colombie et le Pérou, d'autre part
 

5

Conventions internationales

Adoption en procédure d’examen simplifié de deux projets de loi dans les textes de la commission

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen de deux projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.

Pour ces deux projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

Projet de loi autorisant la ratification de la convention du conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de la convention du Conseil de l'Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention du Conseil de l'Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique, signée à Moscou le 28 octobre 2011, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant la ratification de la convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique (projet n° 210 [2014-2015], texte de la commission n° 238, rapport n° 237).

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de la convention du Conseil de l'Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique
 

(Le projet de loi est adopté.)

Projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République des Philippines, d'autre part

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République des Philippines, d'autre part
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée la ratification de l'accord-cadre de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République des Philippines, d'autre part, signé à Phnom Penh le 11 juillet 2012, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant la ratification de l’accord-cadre de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République des Philippines, d’autre part (projet n° 551 [2014-2015], texte de la commission n° 241, rapport n° 239).

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.

(Le projet de loi est adopté.)

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République des Philippines, d'autre part
 

6

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d'autre part
Discussion générale (suite)

Accord de coopération entre l’Union européenne et le Viêt Nam

Adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d'autre part
Article unique (début)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant la ratification de l’accord-cadre global de partenariat entre et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d’autre part (projet n° 414 [2014-2015], texte de la commission n° 240, rapport n° 239).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du développement et de la francophonie. Madame la présidente, madame la rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l’accord-cadre global de partenariat et de coopération avec le Viêt Nam, signé en 2012, renouvelle la relation entre l’Union européenne et le Viêt Nam, et offre un cadre nouveau pour l’approfondissement des relations entre l’Union européenne et ce pays en élargissant le champ de coopération.

L’UE s’engage ainsi avec le Viêt Nam à renforcer le dialogue et la coopération sur de nombreux enjeux politiques, économiques et sectoriels. À titre d’exemple, les accords évoquent la coopération en matière de lutte contre le terrorisme ou contre la criminalité transnationale, la protection de l’environnement ou la coopération sur les secteurs de la santé et de l’éducation.

Cet accord contribuera ainsi au renforcement des coopérations linguistiques, universitaires et scientifiques que la France mène depuis plusieurs années au niveau bilatéral avec ce pays.

Au-delà de notre histoire commune, il faut également se souvenir que la France a été, au début des années quatre-vingt-dix, l’un des premiers partenaires étrangers à soutenir l’ouverture et le développement du Viêt Nam.

Nous avons mis en œuvre ensemble des programmes universitaires d’excellence, qui participent à la formation de l’élite vietnamienne de demain. Des projets de coopération tels que l’université franco-vietnamienne des sciences et technologies d’Hanoï et le centre franco-vietnamien de gestion sont des références reconnues, que nous devons continuer de soutenir.

En parallèle, la France accueille chaque année 7 000 étudiants vietnamiens. C’est, après la chinoise, la deuxième communauté étudiante asiatique en France.

Au cours des vingt dernières années, le Viêt Nam a également confirmé son ancrage au sein de la famille de la Francophonie. Environ 600 000 locuteurs du français sont recensés aujourd’hui au Viêt Nam, en partie grâce aux efforts de la France et de l’OIF, l’organisation internationale de la francophonie, pour promouvoir l’enseignement du français. Des formations universitaires d’excellence, notamment en gestion, en sciences et en technologies sont également dispensées en français. De même, quelque 3 000 médecins vietnamiens ont accompli une partie de leur formation en France au cours des vingt dernières années.

L’un des enjeux de cet accord pour la France est ainsi de fournir un cadre plus large et plus ambitieux aux coopérations que nous menons déjà depuis plusieurs années au niveau bilatéral avec le Viêt Nam.

Dans ce cadre renouvelé, l’UE pourra par la suite adopter des accords sectoriels plus précis avec cet État. Cet accord ouvre notamment la voie à la signature d’accords de libre-échange avec l’un des pays les plus dynamiques du continent asiatique, dont la croissance est aujourd'hui supérieure à 6 %. L’Union européenne vient ainsi de conclure les négociations de l’ALE UE-Viêt Nam, qui devrait être signé en 2016. Il ouvrira, pour nos entreprises, de nouveaux marchés prometteurs.

Les enjeux sont ici également importants pour la France, la priorité étant de rééquilibrer nos échanges économiques bilatéraux, qui ne sont pas à la hauteur, comme nous l’avons souvent dit, de la qualité des relations politiques et de coopération que nous avons avec ce pays : plus de 2 milliards d’euros de déficit sur 3,8 milliards d’euros d’échanges.

De nombreuses entreprises françaises – plus de 300 aujourd’hui – sont déjà solidement implantées au Viêt Nam, ou elles ont obtenu de beaux succès. Je pense à Airbus, Alstom, Casino et d’autres. Elles ont l’ambition d’y investir et d’y développer des projets dans la durée.

L’accord de partenariat avec le Viêt Nam réaffirme enfin la place centrale des droits de l’homme dans la relation UE-Viêt Nam. Il entérine notamment le rôle du dialogue annuel sur les droits de l’homme, que l’UE entretient avec le Viêt Nam depuis plus de dix ans maintenant.

Ce dialogue permet d’aborder, et je sais que vous y tenez, les questions relatives aux libertés d’expression et d’information, y compris sur Internet, qui demeurent très encadrées au Viêt Nam.

La situation des personnes détenues pour des activités pacifiques qui relèvent des libertés d’expression et d’opinion est également abordée de manière précise dans ce cadre. La dernière session du dialogue UE-Viêt Nam sur les droits de l’homme a eu lieu au début de 2015, et chacun aura pu prendre connaissance de ce rapport.

En parallèle, la France appelle régulièrement le Viêt Nam à respecter ses engagements internationaux, notamment ceux qui ont été pris au titre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Nous continuerons à nous mobiliser sur cette question.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous appelle à soutenir cet accord-cadre, dont l’objectif est de développer une relation globale avec le Viêt Nam dans le champ tant politique qu’économique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Hélène Conway-Mouret, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le projet de loi autorisant la ratification de l’accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d’autre part.

Cet accord s’inscrit dans une dynamique de développement d’une relation globale entre l’Union européenne et les États membres fondateurs de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est, ou ASEAN, dynamique engagée en 2004.

Sur la base d’une autorisation du Conseil donnée en mai 2007, la Commission européenne a conduit, sans d’ailleurs rencontrer de difficultés particulières, les négociations qui ont abouti à la signature de cet accord en juin 2012. Il s’agit du deuxième accord de partenariat et de coopération conclu avec un pays de l’ASEAN. Le premier, signé en 2009 avec l’Indonésie, est entré en vigueur le 1er mai 2014.

Cet accord se substitue au cadre juridique actuel, constitué par l’accord de coopération de 1995 et l’accord CEE-ASEAN de 1980, qui avait été étendu au Viêt Nam en 1999. Il traduit la volonté de l’Union européenne de renforcer la relation bilatérale dans de nombreux domaines. Il traduit aussi l’intérêt que manifeste le Viêt Nam au développement d’une relation complète avec l’UE, conformément à sa stratégie de multiplication des partenariats, notamment afin de contrebalancer l’influence économique et politique croissante de la Chine dans la région.

Cet accord-cadre, peu contraignant – il faut le dire –, marque essentiellement une volonté politique des parties de s’engager dans une relation globale qui ne se limite pas à la seule dimension économique et commerciale. L’Union européenne entend être perçue non seulement comme un acteur économique, mais aussi comme un acteur politique et de sécurité.

Cet accord a pour objet de renforcer le dialogue et la coopération sectorielle entre l’UE et le Viêt Nam, notamment sur les questions de commerce et d’investissement, de justice et de sécurité, de migration, d’économie et de développement. Il comprend en outre des clauses politiques usuelles pour l’Union européenne sur les droits de l’homme, la Cour pénale internationale, les armes de destruction massive, les armes légères et de petits calibres et, enfin, la lutte contre le terrorisme.

Le présent accord a aussi vocation à ouvrir des coopérations qui se concrétiseront dans des accords sectoriels. Les principes qu’il établit dans les domaines du commerce et de l’investissement doivent servir de point de départ à la négociation d’un accord de libre-échange ALE.

Cette négociation a commencé en 2012 ; la Commission européenne et le Viêt Nam ont annoncé, en août dernier, avoir trouvé un accord de principe qui comprendrait des dispositions ambitieuses en matière de démantèlement tarifaire, ce qui pourrait permettre à l’UE, comme à la France, de mieux profiter des opportunités commerciales du Viêt Nam et de résorber leur déficit commercial respectif. L’accord devrait également inclure la reconnaissance et la protection sur le marché vietnamien de 169 produits alimentaires et boissons d’origine géographique spécifique, en vue, notamment, d’empêcher l’utilisation abusive de l’appellation « Champagne » au Viêt Nam.

Cet accord de libre-échange devrait être signé prochainement. En effet, les deux parties considèrent qu’un accord politique global a été trouvé. Il ne reste donc plus que d’ultimes réglages techniques à négocier.

Si l’accord de libre-échange annoncé semble globalement satisfaisant, nous avons toutefois été alertés par nos collègues de la délégation à l’outre-mer sur le plafond d’exportation de sucre roux accordé par l’Union européenne au Viêt Nam.

Si ce plafond est trop élevé, il risque de porter, à court terme, un coup fatal à l’économie des outre-mer et, en particulier, de la Réunion. Nous y serons attentifs lors de la ratification de cet accord de libre-échange, qui, je le rappelle, n’a pas encore été signé. Je sais que le Gouvernement est mobilisé sur cette question en vue d’obtenir une distinction entre les sucres spéciaux et les autres sucres ; je l’invite, au nom de notre commission, à faire preuve de la plus grande détermination dans les négociations.

M. Jeanny Lorgeoux. Très bien !

Mme Hélène Conway-Mouret, rapporteur. Pour reprendre les termes du rapport d’information publié par notre commission en 2014, Reprendre pied en Asie du Sud-Est, cette région du monde est « une aire au succès économique retentissant, bientôt comparable en taille au marché européen » et qui pourrait bien être demain « le nouveau centre économique du monde ». Ainsi, en 2013, le PIB cumulé de l’ASEAN atteignait quelque 2 500 milliards de dollars, et la croissance moyenne des pays constituant cette association régionale s’établissait à 5,1 %.

Le Viêt Nam, qui compte 90 millions d’habitants, est l’un des principaux marchés de l’Asie du Sud-Est. Son PNB a été multiplié par cinq en quinze ans, et il connaît toujours une croissance soutenue, de 5,9 % en 2014.

À cet égard, je vous rappelle que la France et le Viêt Nam ont signé, en 2013, une déclaration de partenariat stratégique qui vise à renforcer leur relation bilatérale dans tous les domaines, en particulier la politique, la défense, l’économie, l’éducation et la culture. La signature de cette déclaration a été suivie par la célébration du quarantième anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques, dans le cadre de l’année France-Viêt Nam 2013-2014.

Les échanges commerciaux entre les deux pays atteignaient 3,8 milliards d’euros en 2014. Nos exportations sont composées de ventes aéronautiques, pour 20 %, ainsi que de produits pharmaceutiques et agroalimentaires, ces derniers se heurtant pourtant à des barrières tarifaires et non tarifaires. On voit bien tout le potentiel inexploité de cette relation et combien il est important de la relancer. Nos importations, qui s’élevaient à 3 milliards d’euros en 2014, sont essentiellement constituées de produits informatiques, électroniques et optiques fabriqués par de grands groupes asiatiques et, dans une moindre mesure, de textile, d’habillement, de cuir, ainsi que de chaussures.

La France est le second investisseur européen au Viêt Nam. Les investissements directs à l’étranger français dans ce pays – environ 3 milliards d’euros en stock – se concentrent dans les technologies de l’information et de la communication, les services, les infrastructures, l’industrie manufacturière et l’agroalimentaire. Au total, plus de 200 implantations françaises y sont recensées.

Dans la grande distribution, le premier employeur est français ; il compte 8 000 employés. La recherche est présente, comme vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d'État, dans les 150 universités et 300 instituts de recherche. Des étudiants et jeunes diplômés français arrivent en grand nombre et viennent grossir temporairement notre communauté française, déjà forte de plus de 9 000 personnes. L’engagement de la France est également fort en matière d’aide au développement.

En conclusion et sous le bénéfice de ces observations, je recommande l’adoption de ce projet de loi, d’autant que la France fait partie des derniers États membres de l’UE à ne pas avoir encore ratifié cet accord de partenariat et de coopération. Il semble tout à fait indispensable que la France apporte son soutien à ce projet de développement d’une relation globale de l’Union européenne avec le Viêt Nam, qui ne peut que se révéler profitable pour chacune des parties, parallèlement à la poursuite du dialogue annuel sur les droits de l’homme entamé par l’UE en 2003.

C’est pourquoi, mes chers collègues, la commission vous demande d’adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Leila Aïchi.

Mme Leila Aïchi. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, madame la rapporteur, mes chers collègues, cet accord a une résonance plus particulière pour la France que pour nos partenaires européens, compte tenu des liens historiques qui unissent notre pays au Viêt Nam.

Nous partageons en effet une partie de notre histoire, une période certes douloureuse, mais qui a désormais laissé place à un dialogue de qualité. En témoigne bien évidemment l’appartenance du Viêt Nam à l’Organisation internationale de la francophonie depuis 1970. Plus récemment, la déclaration de partenariat stratégique que nos deux pays ont signée le 25 septembre 2013, qui vise à renforcer notre relation bilatérale dans de nombreux domaines, en atteste également.

Le présent accord-cadre s’inscrit dans le cadre de la stratégie de l’Union européenne consistant à conclure des accords de ce type avec les pays de l’ASEAN. Cette stratégie nous semble bienvenue : elle permet en effet de faire quelque peu contrepoids à l’influence économique et diplomatique chinoise en Asie du Sud-Est.

Comme les autres accords de ce type, il s’agit d’un texte peu contraignant visant à poser les jalons d’une coopération globale, qui dépasse le seul cadre économique et commercial et a vocation à être concrétisée par des accords sectoriels.

L’article 1er de cet accord souligne l’engagement des parties en faveur des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit. Si le contenu de cet article est bien évidemment positif, sa portée ne doit néanmoins pas être exagérée, au vu du caractère autoritaire du régime vietnamien.

Certes, l’article 57 permet de prendre des mesures en cas de « violations substantielles » de ces principes, mais les autorités vietnamiennes commettent de telles violations de manière quotidienne. La qualité de notre relation avec le Viêt Nam ne doit pas nous empêcher d’être lucides sur la réalité de son régime politique. De fait, ces stipulations sont donc tout au plus incitatives ; il est même à craindre, malheureusement, qu’elles ne restent purement incantatoires.

Au demeurant, ce texte offre un socle de coopération sur une grande variété de sujets qui sont par nature transnationaux et d’intérêt essentiel, comme la lutte contre le terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive ou encore le développement durable et la protection de l’environnement. Il appartiendra donc aux parties de faire en sorte que cet accord ne reste pas au stade de la déclaration d’intention ; elles devront aussi se saisir des possibilités ouvertes, afin de permettre à ce texte de déployer toutes ses potentialités. L’étendue et le détail des coopérations envisagées laissent augurer, le cas échéant, des avancées réelles, notamment en matière de protection de l’environnement.

En elles-mêmes, les stipulations de ce texte sont donc positives. Il ne faut toutefois pas oublier qu’elles constituent un préalable à la négociation d’un accord de libre-échange. L’accord de principe qui a été trouvé à ce sujet en août 2015 entre la Commission européenne et le Viêt Nam semble relever d’un libéralisme économique peu soucieux de développement équitable et durable.

La vigilance s’impose donc quant à cet accord de libre-échange. Dans l’hypothèse où il serait reconnu comme mixte, ce qui rendrait obligatoire une ratification par les Parlements des États membres, le groupe écologiste du Sénat aurait à cœur de défendre les impératifs du développement durable et partagé.

Ces remarques formulées, le groupe écologiste votera néanmoins en faveur du projet de loi portant ratification de cet accord.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les deux accords-cadres de partenariat et de coopération dont nous autorisons aujourd’hui la ratification intéressent l’Asie du Sud-Est, une zone d’expansion économique aux opportunités toujours croissantes.

Ce n’est plus à démontrer : cette région est la quatrième puissance mondiale et l’Union européenne a tout intérêt à y nouer des liens porteurs d’échanges économiques et politiques denses. L’accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et le Viêt Nam, ainsi que l’accord-cadre entre l’Union européenne et les Philippines visent à répondre à cette ambition, qui s’exerce – il faut bien le dire – dans un contexte de rivalités.

En effet, face au partenaire obligé qu’est la Chine, au poids toujours central du Japon et à la volonté des États-Unis de pivoter vers l’Asie, l’Union européenne doit renforcer sa relation bilatérale avec chacun des pays d’Asie du Sud-Est. Un accord-cadre avec l’Indonésie est entré en vigueur en 2014 : poursuivons donc ce mouvement !

La France a tout à gagner du développement économique de ces pays. Celui-ci peut permettre de sortir d’une logique d’aide au développement au profit d’un partenariat économique renforcé. Le Viêt Nam est en effet devenu un pays à revenu intermédiaire. Je n’entends pas mettre des conditions à notre aide au développement ; néanmoins, que la France soit le deuxième donateur bilatéral pourrait laisser penser que des entreprises françaises ont un rôle à jouer dans les projets que nous finançons, ce qui n’est pourtant pas souvent le cas. Le métro de Hanoï est en chantier : espérons que nos entreprises y soient présentes !

Je souhaiterais aussi rappeler, madame la secrétaire d'État, que les standards de production dans les pays d’Asie créent des distorsions de concurrence. Or, en marge de ces accords-cadres, un accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Viêt Nam se négocie actuellement. À cet égard, nos élus d’outre-mer s’inquiètent de la question du sucre roux, dont la production dans nos territoires pourrait être menacée par la filière vietnamienne. Soyons donc vigilants !

Le caractère global de l’accord m’invite à faire une autre observation. Nous savons que l’Asie du Sud-Est est en proie à de nombreux trafics, tels que la traite des personnes ou encore la contrefaçon, qui se développe. Par conséquent, il est également nécessaire d’approfondir la coopération en matière de sécurité et de justice.

Si cet accord-cadre est, par nature, peu contraignant, il invite toutefois l’Union européenne à renforcer le dialogue sur ces sujets. C’est important ; gardons en effet à l’esprit que, si la région est avant tout perçue comme un pôle d’attractivité économique, elle ne manquera pas demain de s’affirmer également sur la scène diplomatique, sous réserve qu’elle se déleste de la forte influence chinoise.

Mes chers collègues, le RDSE est naturellement favorable à ces deux accords, qui permettront à l’Union européenne, donc à la France, de regarder davantage vers le Pacifique et le grand large !

M. Jeanny Lorgeoux. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Deroche.

Mme Catherine Deroche. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ce matin, nous devons nous prononcer sur la ratification de l’accord-cadre de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et la République socialiste du Viêt Nam.

Cet accord, signé en juin 2012, cherche à élargir les domaines de coopération entre l’Union européenne et le Viêt Nam, afin de dépasser la simple dimension économique qui prévalait jusque-là. Il comprend 8 chapitres, soit 65 articles qui définissent les principes fondamentaux des relations bilatérales et le cadre d’une coopération globale qui va du développement à la défense de la sécurité internationale, en passant par les échanges économiques ou la coopération judiciaire.

Les autorités vietnamiennes accordent beaucoup d’importance à cet accord, comme a pu me le dire M. Duong Chi Dung, sous-ministre des affaires étrangères de la République socialiste du Viêt Nam, le 15 octobre dernier, lors de sa visite au Sénat.

Cet accord est aussi une chance pour la France. Les liens tissés par l’histoire, ainsi que le degré élevé de notre coopération, font de la France un partenaire privilégié du Viêt Nam. Le rythme des visites à haut niveau témoigne de la vigueur de nos relations. Ainsi, il y a à peine quelques jours, M. Nguyen Tan Dung, Premier ministre de la République socialiste du Viet Nam, était reçu par le président du Sénat à l’occasion d’un entretien auquel j’ai pu être associée.

La France et le Viêt Nam fournissent de nombreux et bons exemples de coopérations, dans des secteurs très divers, tels que l’économie, la culture, l’enseignement, l’industrie, la lutte contre le réchauffement climatique. Le groupe d’amitié que j’ai l’honneur de présider, à la suite du président Poncelet, se veut le garant de la poursuite et de l’intensification de ces coopérations.

Dès septembre 2013, la France et le Viêt Nam ont signé une déclaration commune sur le partenariat stratégique, afin de renforcer la relation entre nos deux pays dans toutes ses composantes. En effet, pour vivante et dense qu’elle soit, notre relation bilatérale est appelée à évoluer à la faveur des transformations rapides que connaît actuellement le Viêt Nam, notamment dans le champ de l’économie, pour passer d’une logique d’aide au développement à une logique de partenariat renforcé.

En tant que présidente du groupe d’amitié France-Viêt Nam au Sénat, je me réjouis de cette ratification. Je souhaite que le Sénat l’approuve à l’unanimité, afin de témoigner à nos amis vietnamiens notre soutien infaillible et notre volonté de faire vivre la singularité des relations franco-vietnamiennes au sein de l’Union européenne.

Avant de conclure, je salue la présence dans les tribunes de M. le ministre-conseiller Nguyen Manh Thang, en compagnie de notre ancienne collègue Hélène Luc.

Vous l’aurez compris mes chers collègues, notre groupe votera en faveur de cet accord. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les accords-cadres avec le Viêt Nam et les Philippines que nous sommes invités à ratifier ce matin sont à resituer dans le mouvement de développement d’une relation globale entre l’Union européenne et les États membres fondateurs de l’Association des Nations d’Asie du Sud-Est, mouvement qui a été engagé il y a plus de dix ans.

L’Union européenne ne veut pas se contenter d’être uniquement considérée comme un acteur économique ; elle souhaite, tout comme notre pays, jouer également un rôle politique et de sécurité dans cette région du monde.

C’est la raison pour laquelle ce type d’accords de partenariat et de coopération se présente sous la forme d’accords-cadres, juridiquement peu contraignants, qui reposent essentiellement sur des déclarations d’intention. Ce cadre de coopération global couvre les questions aussi bien économiques que sociales et politiques, de justice et de sécurité, de migration, d’économie et de développement. Il comprend en outre les clauses politiques de l’Union européenne, avec leurs critères sur les droits de l’homme, la Cour pénale internationale, les armes de destruction massive, les armes légères et de petits calibres, ou bien encore la lutte contre le terrorisme.

Je relèverai tout d’abord que des négociations menées à partir de novembre 2007 avec le Viêt Nam ont abouti à la signature de cet accord en juin 2012.

Cet accord-cadre, très général à ce stade, prend en compte les intérêts bien compris de chacun, en ce sens qu’il traduit la volonté de l’Union européenne et de la France de renforcer la relation bilatérale dans les domaines du commerce, de l’économie, de la politique et du développement. À cet égard, nous savons combien l’influence économique de l’Union européenne et de la France dans cette région du monde est faible par rapport à celle d’autres pays comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande, qui jouent un rôle important à côté des États-Unis.

C’est pourquoi, avec ce type d’accord, nous devrions mieux faire fructifier le capital de sympathie dont nous disposons encore au Viêt Nam et mieux utiliser la dimension culturelle que porte l’Organisation internationale de la francophonie.

Cet accord répond également à la volonté du Viêt Nam, qui mène une politique de développement des partenariats pour contrebalancer l’influence économique et politique croissante, notamment, de la Chine en Asie du Sud-Est.

Je voudrais par ailleurs souligner, pour m’en féliciter, que notre pays sait aussi soigner ses relations bilatérales avec ce pays ami, puisque nous avons signé, en 2013, une déclaration de partenariat stratégique qui vise à renforcer nos liens, que ceux-ci soient politiques, militaires, économiques, culturels ou éducatifs.

Les enjeux économiques de ces accords de partenariat et de coopération avec l’Asie du Sud-Est, plus précisément avec le Viêt Nam, sont aussi très importants. Je ne rappellerai pas le volume et la qualité de nos échanges avec ce pays ; ils sont fort bien décrits dans l’excellent rapport de notre collègue Hélène Conway-Mouret. Toutefois, il faut bien prendre la mesure de cet accord, et voir au-delà, car son objectif est bien de concrétiser par la suite nos liens de coopération par des accords sectoriels.

Il faut également relever que les principes qu’il établit dans le domaine du commerce et de l’investissement ont servi de base aux négociations d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Viêt Nam. Celui-ci fera l’objet d’un autre débat, et nous devrons être vigilants aux risques de déséquilibres qu’il peut provoquer dans certains secteurs économiques, dont ceux de nos départements d’outre-mer.

Finalement, au nom de notre longue et parfois douloureuse histoire commune, je me félicite tout particulièrement de l’accord avec le Viêt Nam qu’il nous est proposé de ratifier aujourd’hui, bien que tardivement.

De nombreux indicateurs nous montrent que les choses sont en bonne voie. Je pense à une récente rencontre entre les autorités françaises, le président du Sénat et le Premier ministre du Viêt Nam, au cours de laquelle le principe d’un forum avec les PME a été acté, ou bien encore aux trois visites de notre ministre des affaires étrangères dans ce pays. Néanmoins, s’il m’est permis une suggestion, une visite du Président de la République au Viêt Nam, comme cela a été fait aux Philippines, pourrait parachever ces gestes forts.

Tout cela est donc très prometteur pour le développement économique et social de ces pays. Puisque ce texte est porteur d’avenir pour le Viêt Nam, comme pour les Philippines et les pays membres de l’Union européenne, le groupe CRC votera le projet de loi de ratification de ces accords-cadres. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jeanny Lorgeoux.

M. Jeanny Lorgeoux. Madame la présidente, je voterai naturellement en faveur de cette convention qui, à tous égards, est excellente.

Néanmoins, permettez-moi d’émettre un léger bémol et d’inviter le Gouvernement à exhorter, de manière tenace, les négociateurs bruxellois pour que les sucres roux soient exclus de la négociation de la convention d’application.

Il ne s’agit pas de causer un déplaisir à nos amis vietnamiens, mais la situation est la suivante : les conditions climatiques du Viêt Nam et l’ardeur de nos amis vietnamiens font que, très rapidement, cette production, même limitée à un quota de 20 000 tonnes, peut fleurir et prospérer. Or les négociateurs bruxellois oublient parfois que la Réunion, la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane sont aussi la France. Dans ces départements d’outre-mer, les sucres roux sont vitaux pour l’économie et l’emploi.

Il est encore temps de voir ce segment de négociation, qui n’est en rien attentatoire à une convention-cadre par ailleurs excellente à tous égards.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État. Permettez-moi, madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, de saluer à mon tour la délégation vietnamienne qui est présente dans ces tribunes aujourd’hui. Je serai à sa disposition dans quelques minutes.

Je souhaite répondre à tous ceux qui, aujourd’hui, ont le souci des répercussions de ces accords de libre-échange sur l’ensemble des outre-mer. Vous avez raison, mesdames, messieurs les sénateurs, les outre-mer, c’est aussi la France. Vous comprendrez d'ailleurs combien j’y suis attachée, étant moi-même originaire de l’outre-mer, plus précisément de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Je puis vous assurer que le Gouvernement est extrêmement vigilant, dans toutes les négociations commerciales, à ce que la sensibilité des régions ultrapériphériques soit toujours prise en compte. Nous parlions précédemment de la question des accords avec le Pérou et la Colombie. Dans ce cadre, nous avons été extrêmement attentifs à ce que l’on appelle la « sensibilité de la banane ».

Sur cet accord, nous sommes attentifs aux sucres spéciaux de la Réunion, qui constituent une part importante de l’économie de cette île. Là encore, nous avons été vigilants. Outre moi-même, trois membres du Gouvernement sont engagés sur ces questions : le ministre de l’agriculture, M. Le Foll, la ministre des outre-mer, Mme Pau-Langevin, et le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, M. Fekl, qui, à plusieurs reprises, a formulé des propositions sur ces sujets. Il a notamment proposé de séparer les sucres roux des autres sucres, plus largement des sucres spéciaux, en prévoyant des contingents.

C’est un aspect important, que vous avez souligné à juste titre, mesdames, messieurs les sénateurs, mais sachez que le Gouvernement est attentif à ces questions, tout en s’attachant à renforcer les partenariats économiques avec les pays qui sont nos amis.

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

Projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d'autre part

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d'autre part
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée la ratification de l'accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d'autre part (ensemble une annexe), signé à Bruxelles le 27 juin 2012, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

Mme la présidente. Je constate que le projet de loi a été adopté à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d'autre part
 

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Nomination de membres de deux commissions mixtes paritaires

Mme la présidente. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi créant de nouveaux droits pour les personnes malades en fin de vie.

La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été publiée conformément à l’article 12 du règlement.

Je n’ai reçu aucune opposition.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Alain Milon, Gérard Dériot, François Pillet, Jean-Pierre Godefroy et Georges Labazée, Mmes Françoise Gatel et Annie David ;

Suppléants : M. Michel Amiel, Mmes Chantal Deseyne, Catherine Génisson, Brigitte Micouleau, Patricia Morhet-Richaud, Stéphanie Riocreux et M. Gérard Roche.

Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la protection de l’enfant.

La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été publiée conformément à l’article 12 du règlement.

Je n’ai reçu aucune opposition.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :

Titulaires : M. Alain Milon, Mme Michelle Meunier, MM. Jean-Noël Cardoux, François Pillet, Mmes Claire-Lise Campion, Élisabeth Doineau et Laurence Cohen ;

Suppléants : M. Olivier Cigolotti, Mmes Corinne Féret, Corinne Imbert, Hermeline Malherbe, MM. Jean-Marie Morisset, Philippe Mouiller, Jean-Louis Tourenne.

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Dossier législatif : projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public
Discussion générale (suite)

Réutilisation des informations du secteur public

Adoption des conclusions d’une commission mixte paritaire

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public
Article 1er B

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public (texte de la commission n° 189, rapport n° 188).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

M. Hugues Portelli, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la commission mixte paritaire est parvenue assez rapidement à un accord sur les conclusions restant en discussion de ce projet de loi. La commission des lois du Sénat a noué en amont des contacts réguliers avec le rapporteur de l’Assemblée nationale pour balayer les différents points sur lesquels des désaccords subsistaient entre les deux assemblées.

Le Sénat et l’Assemblée nationale étaient d’accord sur l’essentiel, mais divergeaient sur l’interprétation d’une disposition figurant à l’article 1er du texte et relative à la possibilité pour les établissements d’enseignement et de recherche de déroger aux règles en matière de réutilisation des informations publiques.

Le Sénat estimait en effet qu’il existait un risque pour les chercheurs de voir leurs travaux préparatoires, ainsi que les données qu’ils élaborent à cet effet, réutilisés et rendus publics, alors même que leurs recherches n’étaient pas achevées. C’est la raison pour laquelle il lui semblait préférable de maintenir en l’état l’article 11 de la loi portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, dite « loi CADA ».

Dans le même registre, le Sénat considérait que les établissements publics de recherche risquaient de voir leurs droits de propriété industrielle mis en cause. C’est la raison pour laquelle la Haute Assemblée préférait maintenir le texte initial.

Toutefois, après un certain nombre d’échanges avec le rapporteur de l’Assemblée nationale sur ce texte, il appert que ce danger ne serait pas aussi évident. Néanmoins, malgré l’adoption de l’article 1er dans la rédaction de l'Assemblée nationale – c’est le point d’accord qui a été trouvé –, il faudra rappeler que la suppression du régime de réutilisation dérogatoire ne met nullement en cause les deux principes que je viens de mentionner.

Pour le reste, nous sommes parvenus à une rédaction commune, qui reprend tantôt le texte de l’Assemblée nationale, tantôt celui du Sénat.

Madame la secrétaire d’État, j’insiste sur le fait que la commission mixte paritaire s’est mis d’accord sur le cas des collectivités d’outre-mer, notamment Wallis-et-Futuna. Il est bon de ne pas porter atteinte outre mesure à leurs statuts respectifs.

Sur certains points, un statu quo a été trouvé. Néanmoins, il nous faudra revenir rapidement sur ces questions, puisque le projet de loi pour une République numérique sera prochainement inscrit à l’ordre du jour des travaux du Sénat, après avoir été examiné par l’Assemblée nationale. Nous aurons alors l’occasion de proposer des avancées sur le principe de la gratuité.

À chaque jour suffit sa peine. L’essentiel aujourd'hui, c’est de transposer une directive européenne, qui devrait être en vigueur depuis plus de six mois. Rattrapons notre retard. Nous aurons toujours le temps d’aller de l’avant, voire de prendre de l’avance, une fois que nous aurons respecté nos obligations vis-à-vis de nos partenaires de l’Union européenne. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC. – Mme Corinne Bouchoux applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, votre rapporteur a dit l’essentiel. Il s’agit en effet de transposer la directive européenne PSI – public sector information – du 26 juin 2013. Les débats parlementaires attestent la volonté toujours réaffirmée du Gouvernement, aidé en cela par la commission des lois du Sénat, de ne pas surtransposer les directives européennes.

Monsieur le rapporteur, je tiens à vous remercier du travail que vous avez accompli sur ce texte. Vous avez toujours manifesté le souci de faire preuve de rigueur et d’aller au fond des choses, mais aussi la volonté de mener l’exercice à son terme en aboutissant à un accord avec l'Assemblée nationale, ce que je tiens à souligner.

Je remercie également Jean-Pierre Sueur d’avoir éclairé les débats de ses analyses.

M. Jean-Claude Requier. Il est toujours éclairant ! (Sourires.)

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Son apport a été important et ses contributions nous ont permis d’avancer.

Monsieur le rapporteur, vous l’avez souligné, la commission mixte paritaire a été conclusive : chaque assemblée a fait un pas vers l’autre. Sur la question des établissements de recherche et d’enseignement supérieur, au terme de la navette parlementaire et de la commission mixte paritaire, nous sommes parvenus au compromis que vous avez mentionné.

Je retiens de votre propos que le Sénat était ressorti rassuré des échanges en commission mixte paritaire sur la situation des établissements publics d’enseignement supérieur. Pour autant, vous souhaitez qu’il soit rappelé qu’ils ne sont pas en cause et que la vigilance du Gouvernement devra rester forte à l’avenir, notamment en ce qui concerne les futurs travaux de recherche. Il me semble avoir déjà apporté des garanties sur ce point lors des débats au Sénat. Je vous confirme que c’est bien l’interprétation du Gouvernement et que vous pouvez compter sur sa vigilance.

Sur le respect du statut des collectivités d’outre-mer, monsieur le rapporteur, j’ai également entendu votre appel.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens aussi à saluer les contributions de chacun d’entre vous lors des débats. La question des redevances a été évoquée, ainsi qu’à l’Assemblée nationale. Vous vous souvenez que le Gouvernement avait souhaité aller plus loin que la transposition de la directive européenne en posant le principe de gratuité, les redevances étant l’exception.

Sur les redevances, un débat a été ouvert à l’Assemblée nationale, puis repris au Sénat, mais le Gouvernement n’a pas souhaité leur élargissement. Corinne Bouchoux a demandé, dans les mêmes termes qu’à l’Assemblée nationale, la suppression des redevances, notamment pour les services publics, alors que le Gouvernement a souhaité les protéger à travers les recettes qu’ils perçoivent. Je vous confirme une nouvelle fois que, sur ce point, à la suite du débat à l’Assemblée nationale, un travail s’est engagé pour revoir le modèle économique. Il se poursuit.

M. le rapporteur l’a mentionné : le projet de loi pour une République numérique défendu par Axelle Lemaire a été présenté en conseil des ministres mercredi 9 décembre dernier. Ce texte doit être examiné à l’Assemblée nationale. Lorsqu’il sera en discussion au Sénat, mesdames, messieurs les sénateurs, vous aurez l’occasion de reprendre un certain nombre de points qui ont été évoqués à l’occasion de la transposition de cette directive européenne, mais au-delà du cadre de laquelle vous avez eu la sagesse, comme l’Assemblée nationale, de ne pas aller ; j’en remercie une fois encore la commission des lois du Sénat.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le rapporteur, vous le savez, l’essentiel était de transposer cette directive, de ne pas surtransposer et de réserver les points sur lesquels vous souhaiterez avancer à d’autres débats. De cela, une fois encore, je vous remercie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à la fin de l’année 2014, la France s’est classée à la troisième place mondiale pour l’ouverture et la réutilisation des données publiques.

Cela s’explique par différentes initiatives, notamment la mise à disposition des bases LEGI par la Direction de l’information légale et administrative, la DILA, le passage en licence ouverte de certaines données de l’Institut national de l’information géographique et forestière, l’IGN, la fourniture de l’ensemble des résultats électoraux en un point unique par le ministère de l’intérieur, ou encore la mise à disposition en 2014 par La Poste de la base nationale officielle des codes postaux à des fins de géolocalisation.

La stratégie française d’ouverture des données publiques fait vivre le droit de regard du citoyen sur ses représentants et sur l’action de l’administration, conformément à l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. »

L’administration s’ouvre à la transparence, à rebours du credo administratif ancien du secret, qui était à l’origine de tensions renouvelées entre l’administration et son administré. Il faut rappeler que le dogme du secret pouvait gêner la bonne compréhension des décisions prises par l’administration dans l’exercice des prérogatives de puissance publique. Il pouvait même parfois sembler faciliter l’arbitraire.

Nous saluons par conséquent l’accord trouvé par la commission mixte paritaire sur le présent texte, qui prolonge et approfondit le mouvement de modernisation nécessaire et inéluctable de l’administration, commencé dans les années soixante-dix. Que de chemin parcouru depuis la reconnaissance d’un droit d’accès aux documents administratifs avec l’adoption de la loi du 17 juillet 1978, du principe de motivation des actes administratifs avec la loi du 11 juillet 1979, sans parler de la création de la Commission d’accès aux documents administratifs, de celle de la mission Etalab et du portail www.data.gouv.fr en 2011 !

Plus récemment encore, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », a renforcé les exigences de transparence des données des collectivités territoriales : ces dernières, lorsqu’elles comptent plus de 3 500 habitants, ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, doivent rendre accessibles en ligne les informations publiques.

L’Europe a accompagné ce mouvement. Le texte que nous examinons aujourd’hui transpose la directive du 26 juin 2013, qui a pour objet de faciliter la réutilisation des informations du secteur public en harmonisant les politiques des États membres et en supprimant les obstacles tarifaires et administratifs.

L’accès aux données publiques doit être le plus large possible. Le texte renforce cette exigence en consacrant le principe de gratuité de la réutilisation des informations publiques, sous certaines réserves, ainsi qu’en soumettant au droit commun la réutilisation des informations publiques des établissements et institutions d’enseignement et de recherche, ainsi que des établissements culturels, y compris universitaires, musées et archives.

Le renforcement de l’open data ne va bien évidemment pas sans restrictions légitimes. Il doit d’abord respecter la protection des données personnelles. Nous avons déposé un amendement en ce sens, visant à prévenir toute revente sans consentement préalable des données personnelles détenues par la préfecture et dont la protection relève de l’ordre public. Il a été considéré comme un cavalier législatif.

Le risque est pourtant grand de porter atteinte à la vie privée de milliers de citoyens, qui peuvent être la cible d’opérations commerciales parfois très agressives. L’information est le nerf du commerce, donc celui de la guerre ! Il est à craindre que d’autres données personnelles conservées par l’État puissent demain faire l’objet d’un commerce.

Ce principe de gratuité et d’ouverture de l’information au secteur public doit par ailleurs être concilié avec la compensation des coûts marginaux de reproduction, de mise à disposition et de diffusion des données pour l’administration, qui peut faire l’usage de redevances de réutilisation. Sont également admises des dérogations pour les organismes du secteur public qui ont besoin de recettes pour couvrir une part substantielle des coûts liés à leur mission de service public ou des coûts de collecte, production, reproduction ou diffusion des documents, tout en permettant un retour sur investissement raisonnable.

À ce titre, d’utiles garde-fous sont prévus par le texte : la licence joue un rôle pédagogique non négligeable, conforté par le projet de loi, de même que les accords d’exclusivité, dont la durée peut atteindre dix ans.

Toutefois, la discussion n’a pas permis d’établir une règle claire pour le montant des redevances, par un plafond général pour le montant total de l’ensemble des redevances pouvant être perçues auprès de tous les réutilisateurs et un plafond particulier pour le montant maximum pouvant être perçu annuellement auprès de chaque réutilisateur.

Si des administrations jalouses de leurs prérogatives fixent des montants de redevances rédhibitoires, alors nous n’aurons que peu avancé dans ce domaine. Nous espérons donc que l’examen futur du projet de loi pour une République numérique, qui a déjà été évoqué ici, nous permettra d’approfondir et même d’innover s’agissant des pistes de croissance portées par cette nouvelle technologie, qui transcende l’ensemble de notre société. Outre les enjeux démocratiques de l’open data, la facilitation de la réutilisation de données publiques doit permettre de créer à l’avenir des activités et services nouveaux.

Par le présent projet de loi, nous améliorons sensiblement les relations entre le public et l’administration, qui seront d’ailleurs régies, dès le 1er janvier 2016, par un code spécifique, et nous créons de la croissance.

Dans ces conditions, le groupe du RDSE apportera son soutien unanime à ce texte attendu. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste et de l'UDI-UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Kern.

M. Claude Kern. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à titre liminaire, je me félicite que le dernier texte examiné par le Sénat avant la suspension des travaux législatifs pour les fêtes de fin d’année soit un projet de loi issu d’une commission mixte paritaire.

Nous avons pendant trop longtemps connu un Sénat qui ne parvenait plus à jouer l’intégralité de son rôle de législateur. Aussi, je pense que nous pouvons à juste titre relever le caractère symbolique de cette séance publique.

Sur le fond, le projet de loi est ni plus ni moins un mince extrait du projet de loi pour la République numérique que nous devrions examiner dans les prochains mois. C’est dû à la nécessité de transposer à temps la directive de 2013 relative à la réutilisation des informations du secteur public, dite « directive ISP ». Sans vouloir jouer les trouble-fête, je rappelle que cette transposition aurait dû être effective à la date où le présent texte a été déposé à l’Assemblée nationale.

En tant que membre de la commission des affaires européennes, je ne peux que constater, non sans regrets, que nous peinons encore à respecter les délais de transposition des directives. Le Conseil d’État a pourtant fait beaucoup en la matière pour conduire le législateur à prendre la totalité de ses responsabilités, de même que le Gouvernement, en organisant des transpositions par paquets dans des textes dédiés aux diverses dispositions relatives au droit de l’Union européenne.

En dépit de ces méthodes, finalement assez récentes, le cas de ce projet de loi démontre qu’il est nécessaire d’aller encore un peu plus loin et de poursuivre notre travail de réflexion méthodologique en la matière.

Le présent projet de loi modifie plusieurs dispositions de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, dite « loi CADA », qui avait à l’époque marqué les esprits par son souci affirmé de garantir un minimum de transparence dans le fonctionnement de notre administration. Il ne s’agissait pas encore de faire de l’administration une « maison de verre », mais d’affirmer la liberté d’accès des citoyens aux documents administratifs.

Ce texte de référence n’a cessé d’évoluer en faveur d’un accès toujours plus étendu à ces informations. Les dispositions de ce projet de loi s’inscrivent dans cet historique et élargissent le champ de la loi de 1978 aux documents détenus par les opérateurs culturels. Elles portent également sur le traitement des demandes de réutilisation des informations publiques, ainsi que sur les redevances et accords d’exclusivité attachés à cette réutilisation.

La législation française satisfait d’ores et déjà en grande partie aux modifications demandées par la directive de 2013. En effet, la France appartient aux nations les plus avancées en matière d’open data. Toutefois, il était nécessaire de revenir sur le champ des données réutilisables, la révision périodique des accords d’exclusivité et les principes de tarification de la réutilisation des données publiques.

L’article 2 avait suscité en première lecture au Sénat un certain nombre d’interrogations. L’élargissement du champ des éléments constitutifs des accords passés pour la numérisation des ressources culturelles doit en effet être porté à la connaissance du public, ce qui n’allait pas sans poser des difficultés. Ces dernières étaient non seulement juridiques, s’agissant du respect du secret des affaires, mais aussi économiques, dans la mesure où cette disposition risquait d’être préjudiciable au développement indispensable de ce type de partenariat.

Il n’y avait donc pas nécessairement de désaccord politique de fond. Il y avait plus un dialogue sur l’endroit où il fallait placer le curseur entre le droit à l’accès et la nécessité du secret. Cette problématique n’était pas étrangère au Sénat, qui avait mené, en 2014, une importante mission d’information sur ces sujets, sous la présidence de notre ancien collègue Jean-Jacques Hyest.

Comme l’a dit mon collègue Loïc Hervé, rapporteur pour avis au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, le libre accès renforcera l’efficacité de l’action publique ; il dynamisera la croissance économique et la création de valeur en permettant la circulation de l’information. Notre pays doit conserver son niveau d’exigence en la matière et même faire un pas en avant en inscrivant dans la loi le principe de la gratuité de la réutilisation des données publiques, qui est réaffirmé par le présent texte.

La réunion de la commission mixte paritaire a permis d’établir un point d’équilibre entre députés et sénateurs dans un esprit qui semble avoir été ouvert et constructif. Le Sénat a pu légitimement faire valoir les qualités de la rédaction qu’il a proposée en nouvelle lecture, de telle sorte que nous allons pouvoir clore nos travaux sur une double satisfaction : la navette a été conduite à son terme et nos engagements européens ont été respectés.

Pour toutes ces raisons, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe de l’UDI-UC votera en faveur de l’adoption des conclusions de la CMP.

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je profite du temps de parole qui m’est octroyé pour vous souhaiter de belles fêtes de fin d’année, ainsi qu’à l’ensemble du personnel du Sénat, et formuler le vœu que nous connaissions, tous, une bien meilleure année 2016. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme nous sommes entrés dans la société de l’information tous azimuts et multisupport, il nous faudrait légiférer au plus tôt afin d’assurer cette belle opportunité universelle que représentent effectivement l’ouverture des données publiques et leur réutilisation.

La directive de juin 2013 que le texte transpose vise un patrimoine tout à fait particulier, celui des établissements universitaires. On notera immédiatement que la directive continue de maintenir dans le champ de la discrétion absolue les données qui mettraient en question le fameux, trop fameux, et trop facilement défendu « secret des affaires ». Ce qui est ici visé, c’est le patrimoine documentaire public, qui, jusqu’à présent, échappait aux règles de réutilisation découlant de la directive précédente.

Les défenseurs du texte nous diront évidemment, dans un bel ensemble, que la transposition de la directive constitue une avancée et une forme de garantie, l’harmonisation du traitement des données et des patrimoines ainsi ouverts suffisant à assurer celle-ci, mais il nous faut bel et bien revenir à l’essentiel du débat.

Alors que l’on pouvait penser l’ouverture des données aux seules fins d’enseignement et de partage du savoir pour les nouvelles générations d’étudiants, de chercheurs et de doctorants, notamment, l’objectif est bien différent aujourd'hui, car transposer une directive est une chose, regarder comment les choses peuvent être vécues et mises en œuvre en est une autre.

N’oublions pas la première donnée : qui dit donnée publique dit production et collecte par un service de caractère public. Les économistes férus de libéralisme, si souvent enclins à condamner la dépense publique, découvrent donc à cette occasion que l’emploi public et l’activité des fonctionnaires sont aussi producteurs de valeur ajoutée.

Il ne peut en effet y avoir de stratégie marketing pour les entreprises commerciales sans outil statistique public, lequel produit des quantités d’informations sociologiques, économiques et autres permettant de définir des cibles, des panels, des échantillons. Sans les résultats du recensement général de la population, que seraient par exemple les instituts de sondage, faiseurs d’opinions et producteurs de prévisions autoréalisatrices ?

Cela dit, il semble bien que la directive et le projet de loi tombent à point nommé.

D’une part, le travail de numérisation des données publiques est une tâche de longue haleine qui fait partie, de manière à la fois volontaire en intentions et dérisoire en moyens, des priorités affichées du ministère de la culture. Il suffit pour s’en convaincre de lire les attendus du budget de 2016 en la matière, qui accorde, dans un contexte fortement contraint, priorité à l’entretien et à la préservation du patrimoine monumental et de notre patrimoine « immatériel », produit du travail patient de milliers de chercheurs, d’étudiants, de muséographes et d’archivistes.

D’autre part, la loi relative aux libertés et responsabilités des universités faisant pleinement ses ravages dans la communauté universitaire, il est évident que la tentation est grande de voir certains établissements essayer de trouver, avec la perception de redevances d’usage sur la réutilisation des données qu’ils possèdent et/ou ont produit, les moyens financiers dont la contraction des dotations annuelles les prive désormais.

De fait, il nous semble que deux écueils principaux doivent être évités dans ce texte.

Le premier, c’est celui de l’excès d’une marchandisation des données par la voie de la sous-traitance de la numérisation à quelque opérateur privé attentif et vigilant, qui ne manquera pas de se faire accorder une exclusivité lui permettant de tirer parti de ressources financières couvrant largement ses coûts de production des données réutilisables. À ce propos, nous estimons que les dispositions de l’article 2 sont par trop favorables aux opérateurs de numérisation et qu’elles dénaturent le caractère public des données ouvertes.

Le second écueil, c’est celui du niveau des redevances. Nous comprenons fort bien que les redevances permettent une juste rémunération des coûts de production, mais la fixation de leur montant doit être transparente dans tous les cas de figure, qu’elles soient perçues par un établissement public ou par un opérateur privé.

À ce titre, il est évident que toutes les universités ne jouent pas dans la même division. La faiblesse des moyens des unes ou des autres appelle une forme de mutualisation et de coopération qui devrait, à notre sens, procéder de l’existence et de l’activité d’une plateforme publique de numérisation permettant, à moindre coût, de répondre à la demande en matière d’information et de transmission de données.

Nous ne voudrions pas que se reproduise, dans le cadre de l’une de ces exclusivités à la durée pour le moins significative, l’affaire des photos du livre anniversaire de la réouverture du musée de l’Homme. Cet établissement muséographique captivant et original a dû acquitter des droits pour reproduire une partie de ses propres collections !

Nous sommes clairement partisans de l’ouverture au domaine public des données dont disposent nos établissements publics culturels et universitaires, ne serait-ce que pour l’usage que peuvent en faire les étudiants et chercheurs, ou les visiteurs dans le cas des musées, mais cela doit se faire dans un cadre préservé des dérives d’une pure et stricte logique commerciale. Cela implique une volonté et des moyens financiers nouveaux qui semblent ne pas être au rendez-vous aujourd'hui, même après la navette, même après le travail de la commission mixte paritaire.

De fait, nous ne pourrons apporter notre soutien à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, vous me permettrez tout d’abord de féliciter chaleureusement Hugues Portelli, notre rapporteur, ainsi que Luc Belot, rapporteur pour l’Assemblée nationale, qui ont eu la sagesse, au terme d’un dialogue approfondi, de proposer à la commission mixte paritaire, qui les a suivis, un accord que je crois très positif.

Je me réjouis également que nous transposions un texte européen en nous tenant, cette fois-ci, à son objet. La missive que nous a envoyée le Conseil constitutionnel au mois d’août dernier, au cœur de l’été, a peut-être suscité quelques frustrations, puisqu’un véritable troupeau de « cavaliers » se trouvait, en quelque sorte, trucidé. Toutefois, à quelque chose malheur est bon…

J’en profite d’ailleurs pour répéter ce que nous avons déjà souligné dans le rapport pour avis de la commission des lois sur les pouvoirs publics : nous saluons l’action qui a été celle de Jean-Louis Debré à la tête du Conseil constitutionnel.

Le Conseil constitutionnel a fait preuve d’une grande rigueur. La conséquence sera que nous ne céderons plus à la facilité d’ajouter des amendements aux textes de transposition, mais qu’il y aura peut-être davantage de textes à étudier, puisqu’il faudra faire des propositions de loi.

J’en viens au texte qui nous réunit. J’évoquerai deux mots que nous entendons sans cesse : « transparence » et « communication ».

La transparence peut et doit être une bonne chose, s’agissant par exemple du financement de la vie politique, mais elle comporte des limites, et le législateur a raison d’être très vigilant quant à la protection de la vie privée et des données personnelles.

La communication est un concept – quoique je ne sache pas si ce dernier terme convient vraiment – qui revient toujours. Je connais même des politiques qui engagent des experts en communication pour faire passer leurs messages avant même de se demander s’ils ont un message à délivrer…

Il finit par y avoir une tyrannie de la communication. Or si chacun, dans la sphère politique, se réveille chaque matin en se demandant : « Que vais-je faire pour ressembler à l’idée que je me fais de ce qu’attend l’opinion d’après les sondages ? », il est probable que le discours politique perdra de son sens, que de nombreux discours se ressembleront et que l’on en arrivera à une sorte de vacuité. Peut-être y a-t-il là matière à réflexion : la politique, n’est-ce pas d’abord des idées et des projets, davantage que de la communication ?

Toutefois, le présent projet de loi est important, parce qu’il prévoit de partager non pas la communication, mais l’information, la science, la culture, les données utiles pour que chacun puisse en bénéficier.

À cet égard, je me réjouis vraiment, je le redis à notre ami Hugues Portelli, des accords qui ont été trouvés sur deux points : d’abord de l’accord sur la licence, y compris lorsqu’il n’y a pas de redevance – un sujet dont nous reparlerons à la faveur de l’examen du projet de loi sur la République numérique – ; ensuite, et surtout, de l’accord qui touche le monde de l’université et de la recherche.

Je vais répéter ici ce qui a été dit par plusieurs de mes collègues, particulièrement par notre rapporteur, afin qu’il n’y ait aucune sorte d’ambiguïté : il est non seulement normal, mais naturel et nécessaire que les données, les articles et les recherches scientifiques puissent être partagés.

D’ailleurs, lorsque l’on écrit un article scientifique, on le présente devant la communauté des chercheurs du monde entier ; on doit fournir le corpus, les données, la méthode appliquée et annoncer les résultats, de telle manière que, dans la communauté scientifique, chacun puisse analyser le texte et, éventuellement, le critiquer, ou même le contredire, de sorte que la science progresse.

La communication est donc nécessaire et elle constitue un progrès. C’est ce que le présent projet de loi affirme au nom de la France, et c’est fort bien, tant pour notre République et son rayonnement que pour le progrès de la science et des connaissances.

Cependant, il y a deux limites.

Premièrement, tout travail qui n’est pas achevé n’a pas vocation à être communiqué. On ne communique pas des brouillons ! Le texte n’existe pas tant qu’il n’est pas définitif. C’est exactement comme les projets de loi que vous préparez, madame la secrétaire d'État : tant qu’ils ne sont pas publiés, ils n’ont pas d’existence. Communiquer des projets pourrait entraîner des dommages, et on ne les communique donc pas.

Deuxièmement, il est clair, et M. Portelli l’a souligné, qu’il ne doit pas être fait obstacle au respect de la propriété intellectuelle, de la propriété commerciale et de la propriété industrielle. Les revues scientifiques, lorsqu’elles publient des articles, versent des droits d’auteur et, vous le savez, elles ont de grandes difficultés à continuer à vivre en raison de la facilité qu’il y a à faire des photocopies.

Un des problèmes majeurs qu’il nous faudra aborder lors de l’examen du projet de loi numérique est ainsi lié au fait que, selon certains, l’économie numérique serait antinomique du respect du droit d’auteur ou de la propriété intellectuelle, attitude qui peut menacer la culture et l’action des créateurs, des chercheurs, des écrivains, de tous ceux qui contribuent au progrès.

Je vais essayer de répondre au vœu de Mme la présidente et de plusieurs d’entre vous, mes chers collègues, en me joignant aux propos qu’a tenus Claude Kern tout à l'heure à propos des personnels du Sénat, qui travaillent beaucoup et qui méritent d’être salués en ce dernier débat de l’année.

J’ajouterai une mention particulière. C’est avec grand plaisir que j’ai lu dans le compte rendu de la dernière réunion du bureau du Sénat que M. Jean-Léonce Dupont, qui a été chargé de rédiger un rapport sur la manière de rendre compte de nos débats, proposait de maintenir les deux comptes rendus existants, auxquels nous sommes profondément attachés : l’intégral, qui permet de disposer de la totalité de ce qui est dit dans cet hémicycle, et l’analytique, qui apporte un « plus » considérable : outre qu’il nous rappelle parfois qu’il est possible d’en dire davantage en moins de mots, il est un outil extrêmement précieux pour suivre l’activité du Sénat.

Jean-Léonce Dupont a souligné que ces deux comptes rendus seraient maintenus et que de nouvelles initiatives permettraient de mieux communiquer sur notre action au Sénat. Je m’en réjouis profondément.

Madame la présidente, je ne vais pas utiliser les quatorze minutes de temps de parole qui m’étaient imparties, mais je serais ingrat de terminer mon intervention sans saluer l’action de Mme la secrétaire d'État. Chère Clotilde Valter, vous avez suivi ce texte avec l’intérêt et le sérieux que vous mettez dans l’exercice de votre mission ; je veux, à mon tour, vous en remercier. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux.

Mme Corinne Bouchoux. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, des champs nouveaux sont ouverts grâce à la transposition de la directive du 26 juin 2013 non seulement au contrôle citoyen, qui s’exerce grâce à chacun et grâce aux journalistes et aux associations, mais également au développement de services innovants, à partir de la réutilisation de données publiques par tout un ensemble d’acteurs, collectivités locales, établissements culturels, entreprises privées, etc.

Le projet de loi qui nous réunit nous permet d’avancer, puisqu’il pose le principe de la gratuité de ces informations, mais il contient aussi de nombreuses exceptions, notamment avec la possibilité des redevances, que nous aimerions voir disparaître à terme. Nous progressons à petits pas, madame la secrétaire d'État : nous espérons que, à l’avenir, ces pas seront un peu plus toniques…

S’agissant de la méthode, nous avons procédé par saucissonnage en trois morceaux. Si nous pouvions essayer de traiter en un tout cohérent les différents aspects d’un même problème – dans le cas d’espèce, l’open data –, il nous semble que cela pourrait être de nature à rassembler les membres de différentes commissions et à permettre un débat intéressant. Toutefois, il fallait parer au plus pressé, et nous le comprenons bien.

Le Gouvernement a fait le choix d’affirmer le principe de la gratuité. Vous avez expliqué, madame la secrétaire d'État, les raisons pour lesquelles nous ne sommes pas allés plus loin en matière de redevances. Nous rappelons que nous souhaitons une réflexion sur ce sujet, notamment à l’occasion des textes de loi annoncés et que nous présenteront Mme Lemaire et M. Macron.

Nous avions proposé, comme d’autres d’ailleurs, un mécanisme qui aurait pu être appelé « premium » et qui aurait permis une entrée progressive dans la gratuité. Vous nous avez demandé du temps ; nous vous faisons confiance, madame la secrétaire d'État, mais nous souhaitons vivement que ce mode d’accès « premium » puisse au moins être étudié et que sa faisabilité soit mise à l’épreuve des faits.

Nous sommes satisfaits du travail de tous les rapporteurs concernant l’obligation d’un décret pour réguler le principe – ou l’exception – des redevances. Cela a permis d’améliorer sensiblement le texte sur ce point, et nous remercions la commission mixte paritaire d’avoir maintenu cette disposition.

Le principe d’une révision tous les cinq ans des informations ou catégories d’informations soumises à redevances a également été conservé, ce qui va dans la bonne direction. Il limite à cinq ans la portée des décrets, afin d’assurer une transposition à la fois suffisamment progressive et suffisamment rapide.

L’impossibilité de mettre en place des redevances si un droit d’exclusivité a déjà été accordé pour les mêmes données est conservée, et nous nous en réjouissions.

Le seul bémol sur lequel je veux revenir concerne notre amendement, dont les dispositions permettaient de définir ce qu’est un fichier « aisément réutilisable ». Nous avions inscrit dans la loi la précision suivante : « c’est-à-dire lisible par une machine et pouvant être exploité par un système de traitement automatisé ». La commission mixte paritaire a apporté une simplification rédactionnelle en supprimant une partie de la définition qui, selon nous, la rendait plus sûre, mais peut-être avions-nous tort.

Comme le soulignait le rapport Refonder le droit à l’information publique à l’heure du numérique : un enjeu citoyen, une opportunité stratégique de la mission commune d’information présidée par Jean-Jacques Hyest, d’une manière générale, la réutilisation des données publiques est facilitée lorsque les formats sont lisibles et permettent à une machine d’assurer un très grand nombre de traitements avec une application.

Or les données ouvertes par l’administration le sont parfois sous un format nécessitant des mises à jour qui sont coûteuses ou techniquement complexes. Les données sont alors effectivement mises en ligne et consultables, mais elles ne sont pas réutilisables. À notre avis, c’est l’une des limites du dispositif que nous avons adopté.

Beaucoup reste à faire pour préparer la France aux enjeux du numérique et créer une véritable culture de la donnée publique au sein des administrations. Nous espérons, madame la secrétaire d'État, que la sensibilisation et la formation des administrations et des agents publics aux enjeux d’intérêt général de l’open data ne seront pas mises de côté. Le succès de la démarche d’ouverture des données publiques en dépend.

L’open data est non pas une punition, mais une opportunité pour l’administration de mieux communiquer en interne et d’être mieux comprise à l’extérieur. C’est donc une chance sur le plan démocratique, ainsi que sur le plan économique. Nous espérons ainsi que des dispositions spécifiques dans le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires permettront d’insister davantage sur la formation des fonctionnaires à l’open data et donc de progresser plus rapidement dans cette voie.

Le projet de loi pour une République numérique est très attendu. Il permettra, nous l’espérons, d’aller plus loin que le présent projet de loi.

Nous remercions tous ceux qui ont contribué à ce débat d’une grande qualité, notamment Éric Bocquet, qui a attiré notre attention sur les vraies limites de l’open data : oui, l’open data, c’est la transparence, oui, ce sont des marchés pour demain, mais, attention, il faut agir avec prudence et discernement.

Mes chers collègues, ce texte démontre que nous pouvons ne pas être en désaccord sur tout et faire usage d’une intelligence collective avec de la bonne volonté !

Pour finir, je remercie les « petites mains » sans qui nous ne pourrions pas fournir un travail de cette qualité ; je veux parler de nos collaborateurs parlementaires. Je salue également tous les personnels du Sénat.

À tous, je souhaite de bonnes fêtes de fin d’année. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacky Deromedi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Jacky Deromedi. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, après les textes sur la dématérialisation du Journal officiel, c’est un nouveau texte consensuel qui nous est soumis : le projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public.

Ce texte se situe dans un ensemble cohérent tant à l’échelon européen qu’en droit interne. Il marque une étape importante dans la politique d’open data, d’ouverture et de diffusion des données publiques. Il transpose d’abord la directive européenne du 26 juin 2013. Ce processus sera prolongé par l’examen en janvier prochain du projet de loi pour une République numérique et du projet de loi sur les nouvelles opportunités économiques, dit NOÉ.

Nos deux assemblées ont amélioré le texte, dans le strict respect de la directive européenne.

Le libre accès est important pour le développement de notre économie et de notre culture. Rappelons que la France est classée à la troisième place mondiale pour l’open data par une association internationale indépendante et à la quatrième place par l’Organisation des Nations unies.

Le projet de loi qui nous est soumis inscrit donc dans notre droit le principe de la gratuité de la réutilisation des données publiques.

L’importante question des redevances doit faire l’objet d’un nouvel examen dans le cadre du projet de loi pour une République numérique.

Sur les autres sujets – protection des travaux de recherche, mise à disposition sous forme électronique, licences obligatoires ou facultatives –, la commission mixte paritaire est parvenue à un accord, à la suite d’échanges que le rapporteur de l’Assemblée a qualifiés de « conviviaux et fructueux ». C’est heureux, car l’accord n’était pas garanti il y a quelques jours.

L’article 11 de la loi portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, dite loi CADA, autorisait les établissements et institutions d’enseignement et de recherche, ainsi que les organismes culturels, à instaurer un régime dérogatoire pour la réutilisation de leurs informations publiques. L’Assemblée nationale avait proposé d’abroger cette disposition. C’est cette solution que la commission mixte paritaire a retenue.

Certains pourront le regretter en raison des charges qui pèsent sur les établissements et institutions d’enseignement et de recherche concernés. Toutefois, comme l’a souligné le rapporteur de l’Assemblée nationale, à l’heure où la réutilisation des données publiques devient un enjeu économique et social essentiel, il a paru justifié à l’Assemblée nationale et à la commission mixte paritaire de faire entrer ces établissements dans le droit commun de la loi CADA.

Des garanties sont apportées à titre de dispositions transitoires : cette mesure n’aura pas pour effet de rendre communicables ni réutilisables les informations ou documents de recherche inachevés. En outre, les informations sur lesquelles les établissements ou institutions d’enseignement et de recherche détiennent un droit de propriété industrielle ne seront communicables qu’aux intéressés pour ne pas porter atteinte au secret en matière commerciale et industrielle.

S’agissant de la limitation à dix ans de la durée des accords d’exclusivité – sauf pour les besoins de la numérisation culturelle –, c’est encore la version du Sénat qui a été retenue en visant également les avenants à ces accords.

La possibilité d’établir des licences dans le cas où la réutilisation se fait à titre gratuit constitue une avancée.

Comme pour les lois sur la dématérialisation du Journal officiel, notre groupe apportera ses suffrages à ce texte utile pour le rayonnement de la France au plan international. Notre pays avance ainsi dans la voie de l’adaptation de sa législation à la modernité. (Applaudissements.)

(M. Hervé Marseille remplace Mme Isabelle Debré au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Hervé Marseille

vice-président

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat, lorsqu’il examine après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :

projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public

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Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public
Article 1er

Article 1er B

Le premier alinéa de l’article 10 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Lorsqu’elles sont mises à disposition sous forme électronique, ces informations le sont, si possible, dans un standard ouvert et aisément réutilisable, c’est-à-dire lisible par une machine. »

Article 1er B
Dossier législatif : projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public
Article 2

Article 1er

L’article 11 de la même loi est abrogé.

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public
Article 3

Article 2

Le second alinéa de l’article 14 de la même loi est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Lorsqu’un tel droit est accordé, la période d’exclusivité ne peut dépasser dix ans. Le bien-fondé de l’octroi d’un droit d’exclusivité fait l’objet d’un réexamen périodique au moins tous les trois ans.

« Lorsqu’un droit d’exclusivité est accordé pour les besoins de la numérisation de ressources culturelles, la période d’exclusivité peut, par dérogation, être supérieure à dix ans, sans dépasser quinze ans. Elle doit faire l’objet d’un réexamen au cours de la onzième année et ensuite, le cas échéant, lors de la treizième année.

« Les deuxième et troisième alinéas ne s’appliquent pas aux accords conclus entre personnes publiques dans le cadre de leurs missions de service public sur le fondement de dispositions législatives ou réglementaires, dans le respect du droit de la concurrence. Ceux-ci doivent faire l’objet d’un réexamen au cours de la onzième année et ensuite, le cas échéant, tous les sept ans.

« Une copie des ressources numérisées et des données associées est remise gratuitement, dans un standard ouvert et librement réutilisable, aux administrations mentionnées à l’article 1er qui ont accordé le droit d’exclusivité.

« Les accords d’exclusivité et leurs avenants sont transparents et rendus publics sous forme électronique. »

Article 2
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Article 4

Article 3

L’article 15 de la même loi est ainsi rédigé :

« Art. 15. – I. – La réutilisation d’informations publiques est gratuite. Toutefois, les administrations mentionnées à l’article 1er peuvent établir une redevance de réutilisation lorsqu’elles sont tenues de couvrir par des recettes propres une part substantielle des coûts liés à l’accomplissement de leurs missions de service public.

« Le produit total du montant de cette redevance, évalué sur une période comptable appropriée, ne dépasse pas le montant total des coûts liés à la collecte, à la production, à la mise à la disposition du public ou à la diffusion de leurs informations publiques.

« Une redevance de réutilisation ne peut être établie pour des informations qui ont fait précédemment l’objet d’un accord d’exclusivité prévu à l’article 14.

« II. – La réutilisation peut également donner lieu au versement d’une redevance lorsqu’elle porte sur des informations issues des opérations de numérisation des fonds et des collections des bibliothèques, y compris des bibliothèques universitaires, des musées et des archives, et, le cas échéant, sur des informations qui y sont associées lorsque ces dernières sont commercialisées conjointement. Le produit total du montant de cette redevance, évalué sur une période comptable appropriée, ne dépasse pas le montant total des coûts de collecte, de production, de mise à disposition ou de diffusion, de conservation de leurs informations et d’acquisition des droits de propriété intellectuelle.

« III. – Le montant des redevances mentionnées aux I et II est fixé selon des critères objectifs, transparents, vérifiables et non discriminatoires. Ce montant est révisé au moins tous les cinq ans.

« Les modalités de fixation de ces redevances sont fixées par décret en Conseil d’État, après avis de l’autorité compétente. Ce décret fixe la liste des catégories d’administrations qui sont autorisées, en raison de la nature de leur activité et des conditions de leur financement, à établir des redevances en application du I. La liste des catégories d’administrations est révisée tous les cinq ans.

« Lorsqu’il est envisagé de soumettre au paiement d’une redevance la réutilisation d’informations publiques contenues dans des documents produits ou reçus par l’État, la liste de ces informations ou catégories d’informations est préalablement fixée par décret, après avis de l’autorité compétente. La même procédure est applicable aux établissements publics de l’État à caractère administratif. La liste des informations ou catégories d’informations est révisée tous les cinq ans. »

Article 3
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Article 5

Article 4

L’article 16 de la même loi est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« La réutilisation d’informations publiques peut donner lieu à l’établissement d’une licence. Cette licence est obligatoire lorsque la réutilisation est soumise au paiement d’une redevance. » ;

 Au troisième alinéa, les mots : « le cas échéant » sont supprimés.

Article 4
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Article 7

Article 5

Le second alinéa de l’article 17 de la même loi est ainsi rédigé :

« Les conditions de réutilisation des informations publiques ainsi que, le cas échéant, le montant des redevances et les bases de calcul retenues pour la fixation de ce montant sont rendus publics, dans un standard ouvert, par les administrations mentionnées à l’article 1er qui les ont produites ou reçues. »

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Article 5
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Article 8

Article 7

La présente loi est applicable :

1° En Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, aux informations figurant dans des documents produits ou reçus par l’État, ses établissements publics, les communes et leurs établissements publics, les personnes publiques créées par l’État ou les personnes privées chargées par l’État d’une mission de service public ;

2° Aux îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Article 7
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Article 9 (début)

Article 8

I. – Les accords d’exclusivité existants qui relèvent des exceptions prévues aux premier, troisième et quatrième alinéas de l’article 14 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal sont mis en conformité avec les dispositions du même article 14, dans sa rédaction résultant de la présente loi, lors de leur premier réexamen suivant la promulgation de la même loi. Sans préjudice de l’article 12 de l’ordonnance n° 2005-650 du 6 juin 2005 relative à la liberté d’accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques, les accords d’exclusivité existants qui ne relèvent pas de l’exception prévue au premier alinéa dudit article 14 prennent fin à l’échéance du contrat et, au plus tard, à la seconde date mentionnée au 4 de l’article 11 de la directive 2003/98/CE du Parlement européen et du Conseil, du 17 novembre 2003, concernant la réutilisation des informations du secteur public.

II. – Les licences en cours et tout acte réglementaire ou contractuel en vigueur fixant les conditions de réutilisation des informations publiques à la date d’entrée en vigueur de la présente loi sont mis en conformité avec l’article 15 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 précitée, dans sa rédaction résultant de la présente loi, au plus tard le premier jour du douzième mois suivant celui de sa promulgation.

Article 8
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Article 9 (fin)

Article 9

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnance toutes mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour modifier et compléter le code des relations entre le public et l’administration, afin de codifier, à droit constant, les articles 10 à 19 et 25 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 précitée dans sa rédaction issue de la présente loi.

L’ordonnance est prise dans un délai de quatre mois à compter de la promulgation de la présente loi.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...

Le vote est réservé.

Personne ne demande la parole pour explication de vote sur l’ensemble du texte ?...

Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble du projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

Article 9 (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public
 

9

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 12 janvier 2016 :

À quatorze heures trente :

Débat sur le thème « Les incidences du crédit d'impôt recherche sur la situation de l'emploi et de la recherche dans notre pays ».

Débat sur le thème « La forêt française en questions ».

À dix-sept heures trente et, éventuellement, le soir :

Proposition de loi constitutionnelle relative à la compensation de toute aggravation par la loi des charges et contraintes applicables aux collectivités territoriales (n° 197, 2015-2016) ;

Rapport de M. Jean-Pierre Vial, fait au nom de la commission des lois (n° 264, 2015-2016) ;

Texte de la commission (n° 265, 2015-2016).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures trente-cinq.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART