M. Yves Rome. Je retire mon amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L'amendement n° 417 est retiré.

L'amendement n° 436, présenté par M. Sido, est ainsi libellé :

Alinéa 28, deuxième phrase

Remplacer les mots :

aux fins

par le mot :

afin

La parole est à M. Bruno Sido.

M. Bruno Sido. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?

M. Bruno Sido, rapporteur pour avis. La commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 436.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 39, modifié.

(L'article 39 est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures trente.

Nous avons examiné 53 amendements ce matin ; il en reste 69.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures quinze, est reprise à quinze heures trente.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une République numérique.

Nous poursuivons la discussion du texte de la commission.

Article 39
Dossier législatif : projet de loi pour une République numérique
Article additionnel avant l’article 40 AA

Articles additionnels après l’article 39

Mme la présidente. L’amendement n° 517 rectifié, présenté par MM. Requier, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Vall et Guérini, est ainsi libellé :

Après l’article 39

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l’article L. 35-2 du code des postes et des communications électroniques est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Pour la ou les composantes de raccordement à un réseau fixe ouvert au public défini à l’article L. 35-1, ils comportent les éléments permettant d’apprécier la maintenance préventive et curative des infrastructures et réseaux utilisés. »

La parole est à M. Guillaume Arnell.

M. Guillaume Arnell. Aux termes de l’article L. 35-2 du code des postes et des communications électroniques, les opérateurs chargés de fournir le service universel sur l’ensemble du territoire sont désignés « à l’issue d’appels à candidatures portant sur les conditions techniques et financières ainsi que, le cas échéant, le coût net de fourniture de ces prestations ».

Les auteurs de cet amendement proposent que la procédure intègre également des éléments d’appréciation de la maintenance préventive et curative des réseaux fixes que les candidats sont en mesure d’assurer. En effet, le maintien des infrastructures étant essentiel pour la qualité du service, il convient de tenir compte des moyens que l’on compte employer pour y veiller.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?

M. Bruno Sido, rapporteur pour avis. Comme je l’ai déjà fait observer avant la suspension méridienne, la mise à disposition d’éléments d’appréciation de la maintenance préventive et curative du réseau de service universel, certes capitale, est déjà prévue au sein du rapport sur l’état du réseau. Il nous paraît donc que l’amendement est satisfait en pratique. Dans ces conditions, j’en sollicite le retrait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Je souscris à l’avis du rapporteur pour avis.

Mme la présidente. Monsieur Arnell, l’amendement n° 517 rectifié est-il maintenu ?

M. Guillaume Arnell. Non, madame la présidente, je le retire.

Mme la présidente. L’amendement n° 517 rectifié est retiré.

L’amendement n° 546 rectifié, présenté par MM. Requier, Bertrand, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Vall, est ainsi libellé :

A. – Après l’article 39

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre V du titre II du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un article L. 1425-… ainsi rédigé :

« Art. L. 1425-…. – I. – Les centres ruraux d’excellence numérique sont constitués afin de permettre le regroupement en territoire rural d’entreprises, de chercheurs, de travailleurs indépendants ou de salariés en situation de télétravail dont l’activité nécessite l’accès à un réseau de communication électronique à très haut débit et qui ont vocation à travailler en synergie. Ils sont établis dans les zones de revitalisation rurale, définies à l’article 1465 A du code général des impôts, dans des périmètres non ou mal desservis par les réseaux de communication électronique à très haut débit et à très faible densité démographique.

« II. – a) Un centre rural d’excellence numérique peut-être établi à l’initiative d’un pôle d’équilibre territorial et rural, sur proposition d’une commune, d’un groupement communal ou à l’issue d’une pétition.

« b) La désignation d’un centre rural d’excellence numérique tient compte des schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique existants, définis par l’article L. 1425-2 du présent code.

« III. – En cas d’insuffisance d’initiatives privées pour permettre l’établissement et l’exploitation du réseau de communication à très haut débit jusqu’à un centre rural d’excellence numérique ainsi désigné, un réseau d’initiative publique peut s’y substituer, dans les conditions prévues à l’article L. 1425-1.

« IV. – La désignation d’un centre rural d’excellence numérique peut être assortie de la désignation d’une zone de recherche et de développement telle que définie par l’article 24 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »

B. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigé :

Section 3

Centres ruraux d’excellence numérique

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Cet amendement traduit une intention très chère aux sénateurs du groupe du RDSE, et qu’ils ont régulièrement réaffirmée : associer les zones les plus enclavées de notre territoire à la transition numérique.

Voilà plusieurs années que l’accompagnement politique de la révolution numérique en France ignore encore les territoires ruraux et insulaires, alors même que les nouveaux moyens de communication deviennent incontournables non seulement dans les rapports entre personnes privées, mais aussi dans les relations entre les administrés et les administrations.

Face au maillage inégal de ces nouveaux réseaux de communication, fruit, pour l’essentiel, de logiques concurrentielles propres aux opérateurs de télécommunications, nous avons imaginé un moyen d’inciter positivement ces opérateurs à s’intéresser aux territoires ruraux, en s’appuyant sur les outils juridiques existants.

Les territoires ruraux et insulaires ont tous les atouts pour devenir, eux aussi, des lieux de l’innovation numérique. D’abord, il y fait bon vivre ; ceux qu’on appelle les néoruraux l’ont bien compris. Ensuite, le secteur numérique ne demande pas d’investissements massifs : seulement la possibilité de se connecter à un réseau de très haut débit et des idées novatrices, ce dont la population de notre pays ne manque pas.

Dans ce contexte, nous proposons d’inscrire dans la loi la possibilité pour les nouveaux pôles d’équilibre territoriaux et ruraux de créer ce que nous suggérons d’appeler des centres ruraux d’excellence numérique, ou CREN.

Les centres désignés auraient vocation à devenir des micropôles de compétitivité réunissant différents acteurs du secteur des nouvelles technologies de l’information et de la communication aspirant à vivre dans un cadre rural. Ils faciliteraient le développement du maillage numérique du territoire en devenant des points nodaux et en rendant le développement du réseau de très haut débit attractif pour les opérateurs privés par l’implantation de petites entreprises innovantes.

Nous avons également été soucieux d’utiliser les instruments fiscaux existants, puisque les CREN seraient institués sur les portions les plus isolées des zones de revitalisation rurale et pourraient éventuellement bénéficier du statut de zone de recherche et de développement.

Je signale d’ores et déjà, madame la présidente, que l’amendement n° 547 rectifié vise à opérer une coordination avec l’amendement n° 546 rectifié, au cas où celui-ci serait adopté.

Mme la présidente. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 547 rectifié, présenté par MM. Requier, Bertrand, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Vall, et ainsi libellé :

A. - Après l’article 39

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa du I de l’article L. 5741-2 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« Le projet de territoire définit les conditions du développement économique, écologique, culturel et social dans le périmètre du pôle d'équilibre territorial et rural. Il précise les actions en matière de développement économique, d'aménagement de l'espace et de promotion de la transition écologique qui sont conduites par les établissements publics de coopération intercommunale ou, en leur nom et pour leur compte, par le pôle d'équilibre territorial et rural. Il désigne au sein de son périmètre les pôles ruraux d’excellence numérique. Il doit être compatible avec les schémas de cohérence territoriale applicables dans le périmètre du pôle. Il peut comporter des dispositions relatives à toute autre question d'intérêt territorial. »

B. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Section 3

Centres ruraux d'excellence numérique

Cet amendement a été précédemment défendu.

Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur ces deux amendements ?

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis. L’amendement n° 546 rectifié vise à prévoir dans le code général des collectivités territoriales la possibilité pour les pôles d’équilibre territoriaux et ruraux de créer des centres ruraux d’excellence numérique, des pôles numériques qui permettraient de développer des clusters d’entreprises dans le secteur du numérique ou des activités de télétravail. Un mécanisme spécifique est prévu en cas de défaillance de l’initiative privée. Par ailleurs, un centre rural d’excellence numérique pourrait constituer une zone de recherche et de développement au sens des pôles de compétitivité.

Si je souscris à l’esprit de l’amendement, qui consiste à faire du numérique un outil de développement des territoires ruraux, j’estime que le dispositif proposé est complexe, sans compter que ses effets sur les finances publiques sont incertains, vu qu’une zone de recherche et de développement s’accompagne d’avantages fiscaux pour les entreprises qui y sont installées.

J’ajoute que, à la faveur des compétences des collectivités territoriales, des espaces numériques peuvent déjà être mis en place. Leur développement pourra être accru dans le cadre des stratégies de développement des usages et des services numériques.

En ce qui concerne le raccordement au très haut débit, rien n’empêche un réseau d’initiative publique de donner la priorité à un site de ce type. Le plan France très haut débit prévoit d’ailleurs un subventionnement spécifique pour le raccordement des sites prioritaires.

Enfin, plusieurs pôles de compétitivité existent déjà dans le domaine des technologies du numérique.

Pour ces raisons, il ne nous semble pas nécessaire d’introduire dans la loi un mécanisme aussi complexe que celui proposé par les auteurs de l’amendement n° 546 rectifié. Je sollicite donc le retrait de celui-ci ; j’y serai défavorable s’il est maintenu. L’avis est identique sur l’amendement n° 547 rectifié.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Il est identique à celui du rapporteur pour avis sur les deux amendements.

Je considère que les outils actuels permettent d’atteindre l’objectif d’excellence numérique dans la ruralité, ce qui est une nécessité pour construire vraiment la République numérique.

Au cours de chacun de mes nombreux déplacements dans notre pays, j’ai constaté la même dynamique dans les zones rurales : grâce au numérique, elles recèlent un formidable potentiel non seulement pour le développement économique, mais aussi pour les services publics, l’économie de proximité et l’attractivité des territoires à l’égard tant des touristes et des entreprises que des familles désireuses de s’y installer.

Madame la sénatrice, je souscris donc tout à fait à votre constat. Simplement, j’estime que, dans le secteur privé comme dans le secteur public, les outils dont nous disposons actuellement permettent d’atteindre l’objectif, à condition, certes, de les mobiliser davantage que nous ne le faisons.

Pour ce qui est du secteur privé, je songe, par exemple, à La start-up est dans le pré, une initiative visant à accompagner l’essor des entreprises innovantes implantées en zone rurale, avec ce mot d’ordre : la campagne connectée, c’est comme la ville connectée ! En vérité, il ne faut pas opposer l’une à l’autre, mais employer tous les outils existants pour que la campagne connectée soit aussi attractive que les villes.

En Bretagne, où je me suis rendue tout récemment, j’ai découvert à Malestroit un incubateur de start-up ; je pense aussi à Kerys, une entreprise de Châteaulin qui développe des systèmes d’information pour l’agroalimentaire. Je pourrais prendre une infinité d’autres exemples.

Par ailleurs, nous avons lancé l’appel à projets pour les French Tech thématiques, en vue de démontrer que la French Tech n’est pas réservée aux grandes métropoles, mais qu’il existe à la campagne des écosystèmes d’innovation à fort potentiel de développement et qui méritent d’être soutenus.

S’agissant du secteur public, nous disposons déjà des maisons de services au public, des Fab Labs ruraux et des télécentres, mis en cohérence dans un schéma national des services numériques établi par l’Agence du numérique. Si l’on ajoute à cela l’article 35 du projet de loi, tous les moyens existent pour accompagner l’essor du numérique au service des communautés d’innovation dans les campagnes. Soyez certaine, madame la sénatrice, que je continuerai à travailler en ce sens, avec mon collègue Jean-Michel Baylet.

Mme la présidente. Madame Laborde, les amendements nos 546 rectifié et 547 rectifié sont-ils maintenus ?

Mme Françoise Laborde. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 546 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 547 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 88 rectifié, présenté par M. de Nicolaÿ, Mme Cayeux, M. Pellevat, Mme Lamure et MM. Bignon, Vasselle, Husson, Gremillet, Perrin, Raison, Chasseing, Savin et Rapin, n’est pas soutenu.

Chapitre II

Facilitation des usages

Articles additionnels après l’article 39
Dossier législatif : projet de loi pour une République numérique
Article 40 AA (Texte non modifié par la commission)

Article additionnel avant l’article 40 AA

Mme la présidente. L’amendement n° 419 rectifié, présenté par Mme Garriaud-Maylam, MM. Charon et del Picchia, Mme Deromedi, MM. Doligé, Joyandet et Husson, Mme Kammermann, MM. Laufoaulu, Masclet et Perrin, Mme Procaccia et MM. Raison et Rapin, est ainsi libellé :

Avant l'article 40 AA

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 3 de la loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique est ainsi modifié :

1° Sont ajoutés les mots : « ou hors de France » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les professionnels commercialisant des livres numériques ne peuvent ni exiger de leurs acheteurs qu’ils règlent avec une carte bancaire française, ni limiter la possibilité d’achat aux clients dont l’adresse IP est située en France. »

La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de la culture ?

Mme Colette Mélot, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Cet amendement vise à rendre la loi du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique applicable aux achats réalisés depuis l’étranger sur les plateformes françaises.

Madame Garriaud-Maylam, vous avez présenté un amendement ayant le même objet au cours de l’examen en séance publique de la proposition de loi tendant à encadrer la vente à distance des livres, dite « proposition de loi Amazon ». Il vous a été répondu à l’époque, tant par la rapporteur de notre commission, Bariza Khiari, que par la ministre de la culture, Aurélie Filippeti, que la loi du 26 mai 2011 étant d’application territoriale, il serait particulièrement curieux qu’elle fasse l’objet d’exceptions en fonction de la nationalité des consommateurs.

Outre qu’il serait difficile à appliquer, un dispositif dérogatoire n’aurait que peu d’effets sur l’activité des plateformes françaises de vente de livres numériques, la clientèle dont il est question ne représentant qu’une très faible part de leur chiffre d’affaires.

S’il est exact que des difficultés existent dans certains pays en ce qui concerne la disponibilité d’ouvrages en langue française, le présent amendement ne constitue en aucun cas une réponse adéquate vis-à-vis de nos compatriotes vivant à l’étranger.

De fait, l’accessibilité des livres à l’étranger se heurte à plusieurs obstacles : les éditeurs ne bénéficient pas toujours des droits d’exploitation mondiaux leur permettant de diffuser leurs livres ailleurs que sur le territoire national ; des difficultés d’ordre technique se posent également, les vendeurs devant payer les taxes afférentes à la transaction dans le pays de l’acheteur.

Dès lors, la commission de la culture a émis un avis défavorable sur votre amendement. Peut-être pourrai-je, à titre personnel, m’en remettre à la sagesse du Sénat, mais je souhaite d’abord entendre l’avis de Mme la secrétaire d’État.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Je vous remercie, madame Garriaud-Maylam, d’avoir appelé mon attention sur cette question, car, grâce à vous, j’ai débroussaillé l’état du droit pour en comprendre les tenants et aboutissants.

Je vous confirme l’engagement du Gouvernement pour accompagner l’essor de la langue et de la culture françaises à l’étranger, qui suppose, bien entendu, la disponibilité des livres numériques pour les acheteurs situés à l’étranger. Cette disponibilité, importante d’un point de vue commercial pour les éditeurs français, l’est aussi du point de vue culturel pour le rayonnement de la francophonie, les acheteurs dont il est question n’étant pas seulement français, mais également francophones ; elle est essentielle aussi pour les familles qui souhaitent accéder à des contenus littéraires en français depuis l’étranger, notamment pour leurs enfants.

À la suite des premières questions posées au Gouvernement sur ce sujet, un groupe de travail a été mis en place au sein du ministère de la culture, destiné à identifier les freins à une meilleure diffusion des livres français à l’étranger.

Par ailleurs, le Bureau international de l’édition française a établi à la fin de 2015 un rapport, que je vous invite à consulter, dont il ressort que les obstacles à la disponibilité des livres en français sont peu liés à la question des droits d’auteur, dans la mesure où la plupart des éditeurs français disposent de droits d’exploitation mondiaux ; voilà donc une difficulté qui ne se pose pas. Ce rapport fait apparaître que les axes d’amélioration concernent surtout les pratiques commerciales des opérateurs de vente ou de revente, des intermédiaires que sont les plateformes numériques : du fait de leurs systèmes d’information, ceux-ci ont parfois des difficultés à gérer des transactions à distance de livres électroniques réalisées depuis l’étranger au moyen de cartes bancaires étrangères, parce qu’ils sont tenus de collecter la TVA sur le territoire français. À la vérité, les difficultés sont donc surtout d’ordre technique et opérationnel, liées à la collecte de la TVA.

Il semble que rien dans la législation actuelle ne limite la vente de livres numériques depuis l’étranger à l’étranger. Il n’y a donc pas de contrariété entre le droit français et la directive européenne applicable dans ce domaine. Au reste, vous expliquez vous-même, dans l’objet de votre amendement, que les freins sont d’ordre commercial. C’est aussi ce que je constate : il existe aujourd’hui plusieurs start-up qui, au moyen des outils numériques, vendent des livres numériques français à l’étranger, par exemple, Feedbooks.

Madame la sénatrice, vous proposez de modifier l’article 3 de la loi du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique, afin que celle-ci soit rendue applicable à l’étranger. Cette opération reviendrait à appliquer le prix unique du livre à des acheteurs situés à l’étranger, donc à donner à une législation franco-française une application mondiale. Vous comprendrez que la territorialité de la loi française s’y oppose, d’autant qu’il ne s’agit pas d’une disposition d’ordre public. De fait, l’acheteur situé à l’étranger comme la plateforme, qui, elle aussi, peut être domiciliée à l’étranger ou de nationalité étrangère, n’ont pas forcément de liens directs avec le territoire national.

À ce stade, je suggère que le Gouvernement poursuive son engagement résolu à Bruxelles en ce qui concerne la directive relative au droit d’auteur, en vue de lever les obstacles qui continuent de se manifester sous la forme du geoblocking. Je suis convaincue que cette action, inscrite à l’agenda prioritaire de la Commission européenne, permettra de débloquer les freins que vous déplorez.

En outre, je continuerai, avec la ministre de la culture, à accompagner les éditeurs, car il s’agit principalement, je crois, de leur apporter une aide opérationnelle pour leur permettre d’accepter des transactions financières réalisées depuis l’étranger. Madame Garriaud-Maylam, je m’engage auprès de vous à poursuivre ce travail de concert avec ma collègue.

Mme la présidente. Madame Garriaud-Maylam, l’amendement n° 419 rectifié est-il maintenu ?

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je remercie Mme la secrétaire d’État pour ses propos, qui prouvent qu’elle a compris l’enjeu de la disposition que je propose, mais je tiens à revenir sur les obstacles qui ont été évoqués.

Mon amendement vise la portabilité des services de contenu en ligne, en l’occurrence des livres numériques. Le fait est que la plupart des éditeurs refusent les achats réalisés depuis une adresse IP localisée à l’étranger ou ne permettent le paiement qu’avec une carte bancaire française.

Voilà des années que je soulève le problème au Sénat, par le biais tant de questions écrites et orales que d’amendements d’appel. Ainsi, comme Mme la rapporteur pour avis l’a rappelé, j’ai présenté en 2014 un amendement d’appel ayant le même objet que celui-ci, avant de le retirer. Aujourd’hui, je crois qu’il est temps d’aller au-delà des déclarations de bonnes intentions et de remplir vraiment notre rôle de législateur.

Mes chers collègues, il s’agit d’un sujet de très grande importance, non seulement pour les Français de l’étranger, mais aussi pour tous les francophones et francophiles du monde. Il faut tout de même rappeler que nombre de pays ne disposent pas de la moindre librairie française, même des pays francophones comme Madagascar ! Sans parler des pays anglophones, où l’on ne peut même pas avoir accès à un livre en français sur une plateforme numérique.

Cette situation, discriminatoire envers les Français de l’étranger, contrevient aux principes fondamentaux de notre droit, ainsi que du droit européen ; à cet égard, je rappelle que la directive européenne 2006/123/CE interdit, en son article 20, les discriminations fondées sur la nationalité ou sur le lieu de résidence au sein du marché intérieur européen. Elle est aussi aberrante par rapport à la notion d’exception culturelle française et totalement contradictoire avec nos ambitions en matière de développement de la francophonie : comment prétendre au marché de 700 millions de francophones à l’horizon de 2050 si nous ne sommes pas même capables d’offrir aux enfants francophones, ou qui souhaiteraient le devenir, la possibilité de lire des livres en français ?

Les arguments qui m’ont été opposés me semblent peu recevables. En particulier, on m’objecte que la demande de livres numériques en français serait faible sur les plateformes : comment en serait-il autrement, puisque, précisément, les Français et les francophones savent qu’ils ne peuvent pas acheter de livres en français par ce moyen ?

Mme la présidente. Votre temps de parole est écoulé, ma chère collègue.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je vous serais reconnaissante, madame la présidente, de m’accorder quelques instants supplémentaires, car l’enjeu est considérable.

Mme Éliane Assassi. Il ne fallait pas voter la dernière révision du règlement !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Un règlement européen est en cours d’élaboration et un rapport a été établi. C’est ce qu’on répond toujours à mes questions écrites : un rapport est en cours de préparation.

Mme la présidente. Ma chère collègue, il vous faut conclure.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. À une collègue qui a posé la même question en 2014, on a assuré qu’un rapport serait établi au début de 2015. Or le ministère des affaires étrangères, que j’ai interrogé, m’a répondu qu’il n’avait pas du tout travaillé sur la question du livre numérique !

Mme la présidente. Veuillez conclure maintenant, ma chère collègue !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je suis disposée à accepter un sous-amendement, mais je ne retirerai pas mon amendement, car c’est une question de principe !

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Pour avoir été députée, je comprends l’exaspération du parlementaire à qui l’on oppose une réponse administrative et technocratique…