Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Pillet, rapporteur. L’amendement n° 72 tend à supprimer les deux seuls ajouts de la commission au texte de l'Assemblée nationale. Il est en effet indispensable de permettre aux juridictions de déduire du non-respect de la procédure de signalement l’absence de bonne foi d’une personne effectuant un signalement. S’il n’y a aucune sanction, quel intérêt y a-t-il à prévoir une procédure ?

Par ailleurs, il apparaît nécessaire de préciser les critères d’appréciation de la légitimité de la divulgation au public d’une information secrète protégée par la loi, afin d’aider les juridictions qui seront amenées à trancher cette question. La commission des lois a retenu quatre critères : l’intérêt prépondérant du public à connaître de cette information, le caractère authentique de l’information, les risques de dommages causés par sa publicité, la motivation de la personne révélant l’information. Ces critères nous paraissent équilibrés.

Le législateur doit assumer sa compétence, toute sa compétence, et ne pas laisser les juridictions, mais aussi les lanceurs d’alerte, face au vide des textes.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

De même, elle est défavorable à l’amendement n° 116.

L’intérêt du public est certes une définition claire, mais l’intérêt prépondérant du public est une notion encore plus claire et plus précise. Il serait abusif de dire, comme vous le sous-entendez, chère collègue, que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme n’a pas restreint la liberté de communication. Elle a au contraire posé des limites dans le cadre de son contrôle de proportionnalité. Les critères que la commission a retenus sont tout à fait compatibles avec sa jurisprudence.

L’amendement n° 117 vise à substituer au terme « authentique » le mot « vraisemblable » pour qualifier le caractère de l’information, le caractère authentique de l’information étant apprécié par le juge. Je ne suis pas sûr que le caractère vraisemblable d’une information suffise à justifier la divulgation de celle-ci au public. Imagine-t-on lancer une rumeur totalement infondée, mais vraisemblable, et être ensuite entièrement exonéré de poursuite en responsabilité ? Si cet amendement était adopté, il dénaturerait complètement le dispositif de protection des lanceurs d’alerte que nous sommes en train d’instaurer.

La commission émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 72, qui vise à revenir au texte de l'Assemblée nationale.

Il s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 116.

Enfin, il émet un avis défavorable sur l’amendement n° 117, pour les raisons qui ont été avancées par M. le rapporteur.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 72.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 116.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 117.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 73, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette procédure de recueil des signalements est mise en place par accord, négocié dans l’entreprise ou au niveau de la branche avec les organisations syndicales représentatives.

La parole est à M. Patrick Abate.

M. Patrick Abate. Je pense que cet amendement, qui vise à favoriser le dialogue social au plus près du terrain, dialogue auquel nous sommes tous attachés, ne pourra recueillir qu’un avis favorable du Gouvernement et de la commission et qu’il sera adopté.

Dans le double souci de sensibiliser tous les acteurs sociaux à la nécessité de protéger les lanceurs d’alerte et de mettre en place une procédure de recueil des signalements des alertes au plus près des réalités et des spécificités de chaque secteur d’activité, il convient de décider que cette procédure sera négociée par accord de branche ou, à défaut, par accord d’entreprise.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Pillet, rapporteur. Je tiens à vous rassurer, cher collègue : il est évident que les procédures de recueil seront négociées avec les organisations syndicales représentatives.

Néanmoins, je ne suis pas sûr que l’accord de branche soit le niveau le plus approprié. En effet, dans une même branche, certaines entreprises ont d’ores et déjà choisi d’avoir recours à des prestataires extérieurs, mais d’autres pourraient opter pour un référent en interne.

En l’espèce, il est inutile de préciser que ces procédures interviendront par accord. Je vous rappelle qu’un décret en Conseil d’État fixera les modalités de ces procédures et qu’il respectera nécessairement l’article L. 1 du code du travail qui pose l’obligation d’une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives à l’échelon national et interprofessionnel.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Les personnes concernées par cet amendement auraient des statuts très différents. Certaines relèveraient évidemment du secteur privé, mais d’autres de la fonction publique. Or cet amendement ne peut s’appliquer à la fonction publique. Il pose donc un problème de rédaction et de cohérence.

Par ailleurs, comme vient de le dire M. le rapporteur, des négociations et des concertations seront évidemment nécessaires s’agissant des personnels de statut privé.

Pour ces raisons, je vous invite, monsieur le sénateur, à retirer votre amendement.

Mme la présidente. Monsieur Abate, l'amendement n° 73 est-il maintenu ?

M. Patrick Abate. Dans la mesure où cet amendement ne peut s’appliquer aux fonctionnaires et où un décret en Conseil d’État fixera les modalités des procédures de recueil des signalements des alertes, je retire cet amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 73 est retiré.

Je mets aux voix l'article 6 C.

(L'article 6 C est adopté.)

Article 6 C
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Article 6 E

Article 6 D

(Non modifié)

I. – Les procédures mises en œuvre pour recueillir les signalements, dans les conditions mentionnées à l’article 6 C, garantissent une stricte confidentialité de l’identité des auteurs du signalement, des personnes visées par celui-ci et des informations recueillies par l’ensemble des destinataires du signalement.

Les éléments de nature à identifier le lanceur d’alerte ne peuvent être divulgués, sauf à l’autorité judiciaire, qu’avec le consentement de celui-ci.

Les éléments de nature à identifier la personne mise en cause par un signalement ne peuvent être divulgués, sauf à l’autorité judiciaire, qu’une fois établi le caractère fondé de l’alerte.

II. – (Non modifié) – (Adopté.)

Article 6 D
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Article 6 FA

Article 6 E

I. – L’article L. 1132-3-3 du code du travail est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation professionnelle, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir signalé une alerte dans le respect des articles 6 A à 6 C de la loi n° … du … relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. » ;

2° La première phrase du second alinéa est ainsi rédigée :

« En cas de litige relatif à l’application des premier et deuxième alinéas, dès lors que la personne présente des éléments de fait qui permettent de présumer qu’elle a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime, ou qu’elle a signalé une alerte dans le respect des articles 6 A à 6 C de la loi n° … du … précitée, il incombe à la partie défenderesse, au vu des éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l’intéressé. »

II. – (Non modifié)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 134 rectifié, présenté par MM. Collin, Amiel, Arnell, Castelli, Esnol et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard et Requier, est ainsi libellé :

Alinéa 6, troisième alinéa du II (non modifié)

Remplacer les références :

des articles 6 A à 6 C

par les références :

des articles 6 A et 6 B et du I de l’article 6 C

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Cet amendement vise à préciser l’articulation de la nouvelle procédure de lancement d’alerte, telle que prévue à l’article 6 C du présent projet de loi, et de la procédure propre à la fonction publique, modifiée pour la dernière fois par la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

Sans rouvrir les débats que nous avons eus au printemps dernier, la loi prévoit déjà plusieurs dispositions protectrices pour les fonctionnaires qui auraient connaissance de crimes, délits ou conflits d’intérêts et qui se trouveraient dans l’impossibilité de recourir au juge, comme le dispose l’article 40 du code de procédure pénale.

À condition de respecter l’obligation de recourir à l’autorité judiciaire ou à la voie hiérarchique, en concertation avec un « référent déontologue », ces fonctionnaires peuvent bénéficier de garanties relatives à leur évolution de carrière, afin de ne pas subir de sanctions en raison de leur signalement.

Outre la volonté de laisser le temps à ces dispositions spécifiques de prendre effet – l’encre de la loi du 20 avril dernier n’est pas encore tout à fait sèche ! –, il s’agit également de prendre en compte les sujétions particulières qui pèsent sur les services publics, et de ne pas compromettre l’efficacité de l’action administrative.

Enfin, cet amendement a pour objet de reprendre la rédaction de l’article 6 G tel qu’adopté en deuxième lecture par l’Assemblée nationale pour les personnels militaires, afin d’adopter une procédure d’alerte comparable, aucun motif ne pouvant, sur ce sujet, justifier une différence de traitement entre les personnels civils et militaires.

Mme la présidente. L'amendement n° 68, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Au premier alinéa de l’article 6 ter A de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, après le mot : « administratives, » sont insérés les mots : « ou, en dernier ressort, à un journaliste au sens de l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ».

La parole est à M. Patrick Abate.

M. Patrick Abate. Cet amendement porte sur la protection des lanceurs d’alerte, en coordination avec l’article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983.

Cet article a été modifié par l’article 4 de la loi du 20 avril 2016 qui a ajouté à son premier alinéa la référence aux seules « autorités judiciaires ou administratives » pour les destinataires d’une alerte formulée par un fonctionnaire.

La référence aux journalistes a été omise alors même qu’elle a été introduite au premier alinéa des articles L. 1351-1 et L. 5312-4-2 du code de la santé publique, au premier alinéa de l’article L. 1161-1 du code du travail, au premier alinéa de l’article 226-10 du code pénal et au premier alinéa de l’article 25 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, au cours de l’examen de la proposition de loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias définitivement adoptée le 6 octobre dernier.

Cet amendement vise donc à réparer cet oubli en alignant le régime de protection des lanceurs d’alerte prévu dans la loi du 13 juillet 1983 s’agissant des fonctionnaires sur les autres. À défaut, les lanceurs d’alerte de la fonction publique ne bénéficieraient pas de la protection due au statut de lanceurs d’alerte s’ils témoignent auprès de journalistes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Pillet, rapporteur. Je m’interroge sur l’objet de l’amendement n° 134 rectifié, tout d’abord, dont je ne suis pas sûr qu’il corresponde véritablement au dispositif présenté : de quel droit les fonctionnaires seraient-ils exempts de la procédure générale relative aux lanceurs d’alerte ? Certes, ceux-ci font l’objet d’une protection particulière. Il est vrai que les lanceurs d’alerte sont protégés depuis déjà bien longtemps, de manière parcellaire, dans différents textes. Ce projet de loi n’innove pas dans la protection qu’il accorde. Il a cependant pour ambition d’unifier le régime et de prévoir une procédure unique.

Sur le fond, ensuite, le dispositif de cet amendement ne vise pas à empêcher l’application aux fonctionnaires de la protection réservée aux lanceurs d’alerte. Il semble néanmoins sous-entendre que les fonctionnaires ne pourraient pas rendre directement publique une alerte sans avoir alerté au préalable leur supérieur hiérarchique.

Or le dispositif proposé ne permettrait pas un tel effet. Face à cette ambiguïté, la commission des lois a décidé de solliciter l’avis du Gouvernement.

Pour ce qui est de l’amendement n° 68, mon cher collègue, vous avez parfaitement raison sur le fond. C’est tellement vrai que cet amendement est en réalité satisfait.

L’article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983 est bien modifié par le II de l’article 6 E, que nous examinons. Ce dernier renvoie aux articles 6 A à 6 C du présent projet de loi qui autorisent, sous certaines conditions, la révélation d’alerte au public. La divulgation au public inclut bien évidemment la révélation à des journalistes, sans qu’il soit nécessaire de le préciser.

Cette notion n’a pas été omise et les coordinations entre les deux textes ont bien été prises en compte dans le présent projet de loi. C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Je me permets de commencer par l’amendement n° 68, les préoccupations de Mme Assassi et de son groupe étant effectivement déjà prises en compte par ailleurs. Cet amendement est superfétatoire, au bon sens du terme : il est satisfait par d’autres dispositions.

S'agissant de l’amendement n° 134 rectifié, les choses sont un peu plus compliquées, et je balance entre deux préoccupations.

La première est celle de la stabilité du droit. La loi du 20 avril 2016 à laquelle vous faites référence, madame Laborde, commence à peine à être mise en œuvre et les décrets d’application de certaines de ses dispositions ne sont peut-être même pas encore pris. Il est toujours de mauvaise méthode de modifier un texte qui vient d’être adopté.

La seconde préoccupation a été exprimée. L’objet du texte dont nous discutons est d’unifier les modalités de protection, d’expression et d’alerte de l’ensemble des lanceurs d’alerte, et je ne vois pas de raison d’opérer des différences de principe entre la manière de faire dans le privé et dans le public. C’est différent pour les militaires, pour lesquels une question très particulière est posée.

C'est la raison pour laquelle je suis partagé : je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 134 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Madame Assassi, l'amendement n° 68 est-il maintenu ?

Mme Éliane Assassi. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 68 est retiré.

Je mets aux voix l'article 6 E.

(L'article 6 E est adopté.)

Article 6 E
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Article 6 FB

Article 6 FA

(Pour coordination)

(Non modifié)

Après l’article L. 911-1 du code de justice administrative, il est inséré un article L. 911-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 911-1-1. – Lorsqu’il est fait application de l’article L. 911-1, la juridiction peut prescrire de réintégrer toute personne ayant fait l’objet d’un licenciement, d’un non-renouvellement de son contrat ou d’une révocation en méconnaissance du deuxième alinéa de l’article L. 4122-4 du code de la défense, du deuxième alinéa de l’article L. 1132-3-3 du code du travail ou du deuxième alinéa de l’article 6 ter A de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, y compris lorsque cette personne était liée par une relation à durée déterminée avec la personne morale de droit public ou l’organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public. » – (Adopté.)

Article 6 FA
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Article 6 FC (supprimé)

Article 6 FB

(Supprimé)

Article 6 FB
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Article 6 F

Article 6 FC

(Supprimé)

Mme la présidente. L'amendement n° 75, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Toute personne qui fait obstacle, de quelque façon que ce soit, à la transmission d’un signalement aux personnes et organismes mentionnés aux deux premiers alinéas de l’article 6 C de la présente loi est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

Lorsque l’infraction définie au présent I est commise en bande organisée et avec violence, cette peine est portée à trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

II. – Lorsque le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction est saisi d’une plainte pour diffamation contre un lanceur d’alerte, le montant de l’amende civile qui peut être prononcée dans les conditions prévues aux articles 177-2 et 212-2 du code de procédure pénale est porté à 30 000 €.

La parole est à M. Patrick Abate.

M. Patrick Abate. Cet amendement vise à protéger les lanceurs d’alerte en cas de plainte infondée à leur encontre pour diffamation. Il convient également de prévoir une aggravation de la peine en cas d’intimidation menée en bande organisée, notamment par le biais de tiers.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Pillet, rapporteur. Ces dispositions ont été supprimées par la commission pour deux raisons.

D’une part, les dispositions relatives au délit d’obstacle sont satisfaites par l’article 431-1 du code pénal qui sanctionne le fait d’entraver de manière concertée l’exercice de la liberté d’expression. De plus, la rédaction proposée, non codifiée, ne semble pas répondre aux exigences de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen sur la nécessité des peines, ainsi qu’à celles qu’a dégagées le Conseil constitutionnel sur la nécessaire clarté et la précision de la loi pénale.

D’autre part, l’augmentation du montant de l’amende civile, qui ne paraît pas nécessaire, semble excessivement dissuasive pour les personnes visées par une révélation portant atteinte à leur vie privée. Obtenir une condamnation pour diffamation est d’ores et déjà très difficile. Il est inutile d’augmenter les amendes civiles pour dissuader davantage les victimes de porter plainte.

Il s’agit de trouver l’équilibre entre ces différentes libertés, si j’ose dire, ce qui est toujours difficile. Quoi qu’il en soit, pour ces deux raisons, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 75.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 6 FC demeure supprimé.

Article 6 FC (supprimé)
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Article 6 G (Texte non modifié par la commission)

Article 6 F

(Supprimé)

Article 6 F
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Article 8

Article 6 G

(Non modifié)

I. – Après le premier alinéa de l’article L. 4122-4 du code de la défense, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Aucun militaire ne peut être sanctionné ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir signalé une alerte dans le respect des articles 6 A et 6 B et du I de l’article 6 C de la loi n° … du … relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. »

II. – Les articles L. 1351-1 et L. 5312-4-2 du code de la santé publique sont abrogés.

III. – (Supprimé)

IV. – Les articles L. 1161-1 et L. 4133-5 du code du travail sont abrogés.

V. – (Supprimé)

VI. – L’article 1er, les 3° et 4° de l’article 2 et l’article 12 de la loi n° 2013-316 du 16 avril 2013 relative à l’indépendance de l’expertise en matière de santé et d’environnement et à la protection des lanceurs d’alerte sont abrogés.

VII et VIII. – (Non modifiés)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 118, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

VI. – L’article 12 de la loi n° 2013-316 du 16 avril 2013 relative à l’indépendance de l’expertise en matière de santé et d’environnement et à la protection des lanceurs d’alerte est abrogé.

L'amendement n° 119, présenté par Mmes Blandin, Aïchi, Archimbaud, Benbassa et Bouchoux, MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé, Poher et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Supprimer la référence :

L’article 1er,

L'amendement n° 120, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Supprimer les références :

, les 3° et 4° de l’article 2

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. L'amendement n° 118 est important pour nous. Le véritable coup de balai que donne ce texte à la loi de 2013 adoptée sur mon initiative pourrait avoir le mérite de simplifier le code, ce que nous souhaitons tous. Il est d'ailleurs juste d’abroger l’article 12 de ladite loi, par exemple.

Mais ceux qui ont procédé à cela ne mesurent pas leur force. Monsieur le ministre, je fais amende honorable : lors de la discussion générale, je vous ciblais comme le coupable de toute la démolition de mon texte. Je reconnais que les initiatives de l’Assemblée nationale y ont été pour beaucoup. Toutefois, en lisant le compte rendu, j’ai tout de même constaté que vous aviez donné des avis favorables.

Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le ministre, en balayant l’article 1er et les 3° et 4° de l’article 2 de la loi susvisée, vous éradiquez des mesures indispensables que le Conseil d’État – vous l’appelez de vos vœux quand cela vous arrange – avait pourtant jugées utiles et bienvenues dans son rapport.

Tout d’abord, l’article 1er n’est ni redondant ni contradictoire : il est sectoriel, adapté au sujet qu’il vise, et son maintien n’enlève rien à votre texte. M. Abate a retiré son amendement relatif aux délais ; je m’apprêtais à intervenir parce qu’il n’est pas juste d’instaurer des délais. On ne traite pas une fuite de mercure à la même vitesse qu’une fuite fiscale ! Il y a donc un problème.

Ensuite, les 3° et 4° de l’article 2 définissent les missions de la Commission nationale de la déontologie et des alertes. La composition de cette commission a été publiée au Journal officiel le 10 octobre dernier, voilà à peine quelques semaines, et le 3 novembre, au Sénat, vous lui coupez les jambes !

Un décret de la loi de 2013 prévoit – écoutez bien ! – la liste des établissements devant tenir un registre d’alerte. Il est écrit qu’ils devront le tenir six mois après que la commission aura défini les « éléments portés auxdits registres ». Et que faites-vous ? Vous abrogez la mission de définition de ces éléments ! Ce n’est pas beau, ça ?...

Les registres d’alerte doivent être tenus dans les six mois par les établissements, mais seulement lorsqu’ils ont à leur disposition les critères. La Commission doit définir les critères, mais vous abrogez la mission, tranquillement !

M. Jean Desessard. Où est la logique ?

Mme Marie-Christine Blandin. On jette l’alerte à la poubelle, avec votre mécanisme !

Votre dévoué rapporteur à l’Assemblée nationale, monsieur le ministre, M. Denaja, a eu pour toute explication à ce sabotage : « coordination », et vous avez dit : « Même avis. » S'agissant de coordination, une assemblée clairsemée comme celle-ci a estimé qu’elle pouvait lever la main. Eh bien, aujourd'hui, plus personne ne pourra dire qu’il ne savait pas en quoi consiste la suppression des 3° et 4° de l’article 2 et de l’article 1er de la loi de 2013 !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Pillet, rapporteur. Ma chère collègue, vous proposez par ces amendements de ne pas supprimer certaines dispositions de la loi qui porte à juste titre votre nom. J’avais défendu votre position en première lecture en retenant cet équilibre : une définition très restrictive de l’alerte et la possibilité d’aller plus loin dans certains domaines sectoriels, dont l’environnement et la santé.

L’Assemblée nationale, quant à elle, tient à deux choses : une définition unique et un régime unique à tous les lanceurs d’alerte. J’ai donc modifié très légèrement la définition du lanceur d’alerte et accepté le principe d’un régime unifié, plus lisible pour les citoyens. C’est en cela que le Sénat aussi, de temps en temps, peut prendre en compte les avis et les réflexions de l’Assemblée nationale, l’inverse étant également souhaité.

Les suppressions opérées ne doivent pas être perçues comme une remise en cause des termes de votre loi. Au contraire, vous avez été précurseur en ce domaine. Néanmoins, il est plus raisonnable aujourd’hui de suivre le dispositif proposé par l’Assemblée nationale qui n’ôte pas l’efficacité du vôtre et donne une unité à l’ensemble.

C'est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur ces trois amendements, sans pour autant renier la position que j’avais adoptée lors de la première lecture.