M. le président. L'amendement n° 75 rectifié bis, présenté par MM. Guillaume, Courteau et Bérit-Débat, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin, Duran, Montaugé et Tissot, Mmes Préville et Cartron, M. Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Remplacer les mots :

ou d’un dysfonctionnement des ouvrages

par les mots :

sur des ouvrages de la partie marine

II. – Alinéa 16, première phrase

remplacer les mots :

ou dysfonctionnements des ouvrages

par les mots :

sur des ouvrages de la partie marine

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. La commission des affaires économiques a modifié la rédaction de cet article introduit par le Gouvernement à l’Assemblée nationale. Elle a notamment étendu l’indemnisation du producteur aux avaries ou aux dysfonctionnements survenant sur l’ensemble du réseau d’évacuation, non pas seulement sur la partie marine.

Cet amendement vise à rétablir le texte adopté par les députés en supprimant l’extension au réseau terrestre du régime d’indemnisation pour les parcs d’énergie marine renouvelable, prévu initialement pour couvrir les seuls risques d’avarie sur la partie marine du raccordement.

En effet, si la spécificité du milieu marin et les contraintes pesant sur toute opération en mer – aléas météorologiques, disponibilité des matériels et des bateaux – justifient que la collectivité assume le risque représenté par des délais de réparation de plusieurs mois, afin de réduire les coûts liés et le coût final du projet supporté par les consommateurs – c’est l’objet même de la réforme proposée par le Gouvernement et RTE –, il n’en va pas de même pour le réseau terrestre.

La partie terrestre du raccordement pour les énergies renouvelables en mer est en effet semblable à tout raccordement de site de production terrestre, techniquement comme en termes de risques d’avarie. Dès lors, comment justifier que les producteurs d’énergie en mer soient automatiquement indemnisés en cas d’avarie sur leur raccordement terrestre, alors qu’aucun autre site de production terrestre ne bénéficierait du même avantage ? En effet, l’indemnisation des producteurs à terre, toutes énergies confondues, demeurerait subordonnée à la démonstration d’une faute de RTE, conformément aux cahiers des charges du réseau public de transport.

En application du principe d’égalité des usagers du service public, une telle différence de traitement doit être justifiée par des critères objectifs, en lien direct avec l’objet de la disposition législative.

Les modifications adoptées en commission comportent ainsi un risque sérieux de voir contesté l’ensemble du régime applicable au réseau d’évacuation terrestre, quel que soit le site de production – nucléaire, hydraulique, etc. –, d’autant que plusieurs producteurs disposent de sites de production en mer et à terre.

Un tel risque de contagion à tous les raccordements terrestres de sites de production d’énergie doit en tout état de cause être soumis à l’appréciation de la CRE, compte tenu de son impact sur les charges relevant du tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité, le TURPE, et donc sur la facture des consommateurs d’énergie. Tel ne sera pas le cas si le dispositif reste limité à l’indemnisation des avaries sur la partie marine du réseau, ce que justifie pleinement la complexité des réparations en mer et des facteurs exogènes pesant sur celles-ci.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur deux ajustements opérés par la commission, consistant à étendre l’indemnisation du producteur, d’une part, aux dysfonctionnements qui viendraient limiter sa production, et, d’autre part, à l’ensemble du réseau d’évacuation, au lieu de la seule partie marine de ce réseau.

Les auteurs de l’amendement centrent leur argumentation sur cette seconde précision et craignent un « risque de contagion à tous les raccordements terrestres ». Ils s’interrogent même sur le respect du principe d’égalité par cette disposition.

Je rappellerai que ces modifications sont justifiées par le fait que les conséquences économiques d’une indisponibilité du réseau, qu’elle soit liée à sa partie marine ou à sa partie terrestre, sont identiques pour le producteur. J’ajoute que les risques sur la partie terrestre sont bien mieux maîtrisables – et maîtrisés – par RTE.

Ces dérogations ne sauraient par ailleurs servir d’argument aux producteurs d’énergies renouvelables terrestres pour demander à bénéficier d’un régime équivalent, puisque leur justification tient uniquement au fait d’évacuer la production d’installations implantées en mer ; il n’y a donc pas de « risque de contagion ».

Les auteurs de cet amendement n’ignorent pas que les énergies marines renouvelables bénéficient déjà, depuis la loi Autoconsommation, d’un régime dérogatoire du droit commun. Il n’y a pas là de rupture d’égalité puisque l’on traite bien différemment deux situations objectivement différentes, entre les installations terrestres, d’un côté, et les installations marines, de l’autre, dont le réseau d’évacuation aboutit nécessairement à terre.

C’est par ailleurs la logique même du nouveau système proposé que de « dérisquer » les projets pour faciliter leur réalisation. Nous allons donc au bout de cette logique.

Enfin, je rappellerai que le nouveau régime a pour autre avantage de consacrer le monopole de raccordement en mer du gestionnaire du réseau de transport.

L’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Hulot, ministre d'État. Monsieur le sénateur, la situation du raccordement en mer sera totalement différente de ce qu’elle est à terre : le raccordement se fait alors dans le cadre d’un contrat de producteur avec RTE, et non sous l’autorité de ce dernier. De notre point de vue, il n’y a donc pas de risque de contagion.

Je rappelle que, dans le nouveau cadre du raccordement des installations d’énergie renouvelable en mer, l’ensemble de ce raccordement est réalisé par le gestionnaire du réseau de transport. Les conséquences d’une défaillance sont les mêmes qu’il s’agisse de la partie marine ou de la partie terrestre. Aussi considérons-nous qu’il n’y a pas lieu de restreindre le régime d’indemnisation à la partie marine.

Pour cette raison, le Gouvernement est défavorable à votre amendement, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Je veux apporter mon soutien à l’analyse de Mme la rapporteur.

L’adoption de cet amendement ajouterait une insécurité juridique. En effet, en cas de dysfonctionnement du câble, il faudra déterminer si c’est sa partie immergée ou sa partie émergée qui est affectée. Et quid si c’est l’ensemble du câble qui connaît des dysfonctionnements ? Faudra-t-il tenir compte de la marée ?

Pour m’être intéressé à un tel câble qui émerge à Saint-Nazaire, j’estime qu’il faut considérer l’équipement comme un ensemble, sans chercher à distinguer entre partie marine et partie terrestre.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Je ne suis pas convaincu par ces arguments. Si cette disposition était maintenue, elle remettrait en cause l’ensemble du système en vigueur en France depuis des décennies pour l’évacuation de l’ensemble des sites de production d’électricité terrestre, quels que soient l’énergie concernée, son mode de financement et son amortissement.

Imaginons l’incidence d’une telle mesure – parce qu’il y aura bien contagion – pour l’évacuation des sites de production hydraulique en montagne, difficiles d’accès en raison de l’enneigement et dont l’indisponibilité en cas d’avarie peut durer plusieurs mois. Imaginons les montants en jeu s’agissant du réseau d’évacuation des centrales nucléaires, pour lesquelles le coût de la journée d’indisponibilité se chiffre en millions d’euros.

Je maintiens cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Les deux exemples que vient de prendre Roland Courteau sont significatifs et devraient nous inciter à voter son amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 75 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 81 rectifié, présenté par MM. Dantec, Labbé, Requier, Guérini, Vall et Castelli, Mme Costes, MM. Menonville, Gabouty et Gold et Mme M. Carrère, est ainsi libellé :

Alinéa 13, seconde phrase

Supprimer les mots :

ainsi que le plafond

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Le nouvel alinéa introduit à l’article L. 342-3 du code de l’énergie instaure le paiement d’une indemnité en cas de retard du raccordement au réseau d’électricité d’une installation de production d’énergie renouvelable en mer.

Cette indemnité couvrira une grande diversité de situations. Dans certains cas, le retard sera imputable non pas au gestionnaire de réseau, mais à des causes purement extérieures, et un plafonnement de l’indemnité peut alors se justifier. Dans d’autres cas, la responsabilité du gestionnaire de réseau sera pleinement engagée et, dans ces conditions, l’indemnité devrait couvrir la totalité du préjudice subi par le producteur.

Cet amendement vise donc à supprimer l’introduction d’un plafonnement de l’indemnité dans la loi, pour renvoyer à un décret la détermination des modalités de calcul, qui devront tenir compte de la diversité des situations et des responsabilités.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Le nouveau cadre de régulation des raccordements d’éoliennes en mer déroge déjà largement au droit commun dans un sens favorable aux producteurs et contribue à réduire très fortement leurs risques, ce qui devrait d’ailleurs faire baisser le coût global pour la collectivité.

Déplafonner totalement ces indemnités remettrait en cause l’équilibre trouvé entre l’intérêt des producteurs et celui des consommateurs, qui me paraît satisfaisant.

J’ajoute qu’en intégrant les cas de dysfonctionnements et en visant la totalité du réseau d’évacuation, notre commission a déjà considérablement amélioré le texte du point de vue des producteurs.

L’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Hulot, ministre d'État. Monsieur le sénateur, l’indemnité qui est due par le gestionnaire de réseau doit nécessairement être plafonnée, sauf à exposer celui-ci à un risque qui pourrait mettre en péril sa pérennité, et donc l’exercice de sa mission de service public. Le plafond sera déterminé par voie réglementaire.

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. Ronan Dantec. Je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 81 rectifié est retiré.

L'amendement n° 82, présenté par MM. Dantec et Labbé, est ainsi libellé :

Alinéa 14, deuxième et troisième phrases

Supprimer ces phrases.

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Dans le projet de cahier des charges, objet du dialogue concurrentiel actuellement ouvert, il est demandé au lauréat de constituer, au moment de l’attribution du projet, des garanties bancaires qui seront exécutées en cas de défaillance de sa part. Du fait de leur montant significatif, elles permettront de compenser l’État pour les sommes et démarches engagées en cas d’abandon du projet. Tout cela est logique et habituel.

L’ajout d’une garantie supplémentaire émise par le lauréat afin de garantir les coûts engagés pour le raccordement en cas de défaillance crée une accumulation d’engagements et de risques peu cohérente avec le but visé, à savoir la baisse des prix de l’électricité.

Ce risque supplémentaire pour le lauréat est par ailleurs difficilement quantifiable par ce dernier, dans la mesure où il n’exerce aucun contrôle sur le programme d’études et de travaux de RTE, et donc sur les coûts internes et externes engagés par le gestionnaire du réseau de transport. Décorréler les travaux de RTE de ceux du lauréat est d’ailleurs l’un des objectifs du nouveau dispositif. Il vise à permettre à RTE de progresser en amont du calendrier du projet, afin de limiter son risque de retard.

À titre de comparaison, dans le schéma allemand, dans lequel les risques et les coûts du raccordement sont transférés au gestionnaire de réseau, le lauréat ne fournit aucune garantie spécifique en relation avec cet aspect du projet, la garantie générale constituée par lui au titre de l’appel d’offres étant considérée comme suffisante.

J’entends ce que disait à l’instant Roland Courteau sur la nécessité de maîtriser les coûts et de ne pas faire peser sur le gestionnaire de réseau des charges d’un montant exagéré, mais le développement de l’éolien offshore est un énorme enjeu et fait, je crois, consensus. À Saint-Nazaire vient ainsi d’être inaugurée la première éolienne flottante. Par conséquent, ne pénalisons pas notre propre filière de l’éolien offshore au regard de ce qui se pratique ailleurs en Europe, d’autant qu’elle est en pointe, contrairement à d’autres.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Telle que proposée, la suppression des coûts mis à la charge des producteurs comporterait un risque de déresponsabilisation de ceux-ci. Ces derniers doivent en effet assumer les conséquences financières des coûts supplémentaires qui résulteraient soit de leur initiative, soit de leur défaillance. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Hulot, ministre d'État. Monsieur le sénateur, ce débat a lieu d’être. La collectivité, qui prend déjà en charge les coûts de raccordement, ne peut pas, de notre point de vue, assumer tous les risques. J’estime que le lauréat doit, en cas d’abandon du projet, supporter les coûts afférents.

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 82.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5 bis.

(L'article 5 bis est adopté.)

Article 5 bis
Dossier législatif : projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement
Article additionnel après l'article 5 ter A

Article 5 ter A (nouveau)

Le titre IV du livre III du code de l’énergie est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

« CHAPITRE V

« Les réseaux intérieurs des bâtiments

« Art. L. 345-1. – Les réseaux intérieurs sont les installations intérieures d’électricité à haute ou basse tension des bâtiments définis à l’article L. 345-2 lorsqu’elles ne constituent pas un réseau public de distribution d’électricité tel que défini au dernier alinéa du IV de l’article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales ni un réseau fermé de distribution d’électricité tel que défini à l’article L. 344-1 du présent code.

« Art. L. 345-2. – Les réseaux intérieurs peuvent être installés dans les immeubles de bureaux qui appartiennent à un propriétaire unique.

« Ne peuvent être qualifiées de réseaux intérieurs les installations électriques alimentant :

« 1° Un ou plusieurs logements ;

« 2° Plusieurs bâtiments non contigus ou parties distinctes non contiguës d’un même bâtiment ;

« 3° Un bâtiment appartenant à plusieurs propriétaires.

« Art. L. 345-3. – Le raccordement d’un utilisateur à un réseau intérieur d’un bâtiment ne peut faire obstacle à l’exercice par un consommateur des droits relatifs au libre choix de son fournisseur prévus à l’article L. 331-1.

« Ce raccordement ne peut pas non plus faire obstacle aux droits de participation au mécanisme d’effacements de consommation mentionné à l’article L. 321-15-1.

« Art. L. 345-4. – Le raccordement d’un utilisateur à un réseau intérieur d’un bâtiment ne peut faire obstacle à l’exercice par un producteur du droit de bénéficier de l’obligation d’achat mentionnée à l’article L. 314-1, des garanties d’origine pour la quantité d’électricité produite mentionnées à l’article L. 314-14, du complément de rémunération mentionné à l’article L. 314-18 ou du droit de vendre sa production à un tiers.

« Art. L. 345-5. – Pour l’application des articles L. 345-3 et L. 345-4, un dispositif de décompte de la consommation ou de la production d’électricité est installé par le gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité.

« Le tarif de la prestation de décompte du gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité est défini dans les tarifs des prestations annexes réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de réseaux mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 341-3.

« Art. L. 345-6. – Les réseaux intérieurs des bâtiments doivent satisfaire aux conditions techniques et de sécurité fixées dans les normes applicables aux installations électriques intérieures.

« Art. L. 345-7. – Le propriétaire d’un réseau intérieur tel que défini à l’article L. 345-1 peut abandonner ses droits sur ledit réseau en vue de son intégration au réseau public de distribution auquel il est raccordé, après remise en état à ses frais, pour satisfaire aux conditions techniques et de sécurité prises en application de l’article L. 323-12. À l’occasion d’une division ou d’une vente partielle de l’immeuble visé au premier alinéa de l’article L. 345-2, il y est obligé, sous la même condition de remise en état à ses frais, et le gestionnaire du réseau auquel il est raccordé est tenu de l’accepter. »

M. le président. L'amendement n° 5 rectifié ter, présenté par MM. Mouiller et Chaize, Mme Estrosi Sassone, MM. Frassa, Lefèvre, Rapin, Cambon, Chatillon, Poniatowski, Cuypers, Perrin et Raison, Mmes Canayer, Férat et Gruny, MM. Priou, Carle, Mandelli et Morisset, Mme Billon, M. Paccaud, Mmes Sollogoub, Bories et Keller et MM. D. Dubois et Mayet, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les réseaux électriques intérieurs des immeubles de bureaux.

Ce rapport examine l’opportunité de créer une nouvelle catégorie de réseau d’électricité qui pourrait être installée dans des immeubles de bureaux appartenant à un propriétaire unique, en lieu et place du réseau public de distribution d’électricité tel que fixé au troisième alinéa du IV de l’article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales ou d’un réseau fermé de distribution d’électricité tel que précisé à l’article L. 344-1 du code de l’énergie.

Il analyse les impacts sur la péréquation tarifaire, la fiscalité et la conformité au droit européen. Il propose toutes modifications législatives et réglementaires pertinentes pour préciser le régime juridique, les obligations en termes de conditions techniques et de sécurité fixées dans les normes applicables aux installations électriques intérieures, les conditions d’abandon en vue de son intégration au réseau public de distribution par un propriétaire de réseau intérieur avec remise en état ainsi que les conditions d’exercice par un consommateur raccordé à un réseau intérieur des droits relatifs au libre choix de son fournisseur prévus à l’article L. 331-1 du code de l’énergie.

La parole est à M. Pierre Cuypers.

M. Pierre Cuypers. Les consommateurs raccordés à des réseaux intérieurs ne contribueraient pas à la péréquation nationale des tarifs, base de la solidarité entre territoires urbains et ruraux. Le développement de tels réseaux fragiliserait ainsi la péréquation tarifaire et créerait une rupture d’égalité entre les consommateurs reliés à ces réseaux et les autres. C’est pourquoi ils doivent être limités aux situations strictement nécessaires. Celles-ci sont déjà prises en compte aux articles L. 344-1 et suivants du code de l’énergie relatifs aux réseaux fermés de distribution, qui peuvent répondre, sous conditions, aux situations de ports, d’aéroports, de sites industriels et commerciaux, de bâtiments à usage tertiaire.

Ainsi, la création d’une troisième catégorie de réseaux pour des immeubles de bureaux nécessite une analyse de sa compatibilité avec la directive européenne 2009/72/CE du 13 juillet 2009, qui n’en prévoit que deux afin de garantir le bon fonctionnement du marché intérieur et les droits des consommateurs : la catégorie générale, qui comprend en France les réseaux publics exploités par Enedis et les entreprises locales de distribution, et la catégorie des réseaux fermés.

La création d’une troisième catégorie de réseaux peut avoir une incidence sur les taxes et contributions assises sur les consommations : la contribution au service public de l’électricité, ou CSPE, la taxe sur la consommation finale d’électricité, ou TCFE, et la TVA.

Pour mémoire, les articles L. 315-2 et suivants du code de l’énergie définissent le cadre de l’autoconsommation collective pour les consommateurs raccordés au réseau public. La création de cette nouvelle catégorie mettrait le réseau public au service de l’autoconsommation, aussi bien individuelle que collective.

Il est donc proposé de surseoir à la création de cette troisième catégorie de réseaux afin d’en étudier au préalable l’impact sur la péréquation tarifaire et les recettes fiscales, la conformité au droit européen et les conditions juridiques, techniques, financières et d’accès au marché de l’électricité applicables à de tels réseaux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Cet amendement, déjà présenté et rejeté en commission, tend à remplacer les dispositions relatives aux réseaux intérieurs par la remise d’un rapport sur ces mêmes réseaux.

Le texte adopté par notre commission répond aux craintes exprimées par ses auteurs en limitant strictement cette notion aux seuls immeubles de bureaux et aux bâtiments et parties de bâtiments contigus, ce qui préserve la péréquation tarifaire.

S’agissant de la conformité au droit européen, lequel ne connaît, il est vrai, que deux types de réseaux – publics ou privés – de distribution, les réseaux intérieurs créés ici sont non pas des réseaux de distribution à proprement parler, mais des branchements intérieurs mutualisés desservant plusieurs utilisateurs, à l’instar des colonnes montantes dans les immeubles d’habitation.

L’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Hulot, ministre d'État. Le projet de loi crée effectivement la notion de réseaux intérieurs pour les seuls immeubles de bureaux. Il n’est pas forcément nécessaire de faire un rapport sur le sujet. Je propose que le comité du système de distribution publique d’électricité, qui est chargé d’étudier les coûts et est présidé d’ailleurs par le sénateur Ladislas Poniatowski, se saisisse du sujet et fasse un bilan de la mise en œuvre de cet article du projet de loi. Je ne doute pas qu’il vous associera à ses travaux.

Cet amendement n’est pas nécessaire de notre point de vue et nous y sommes donc défavorables.

M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour explication de vote.

M. Pierre Cuypers. Nous retirons l’amendement.

M. le président. L'amendement n° 5 rectifié ter est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 83, présenté par MM. Dantec et Labbé, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 5 à 9

Remplacer ces alinéas par six alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 345-2. – Les réseaux intérieurs peuvent notamment être installés dans :

« 1° La partie commune des bâtiments à usage principal d’habitation groupant au moins deux logements ;

« 2° Les bâtiments à usage principal industriel ou tertiaire ;

« 3° Les bâtiments accueillant un service public ;

« 4° Les bâtiments constituant un ensemble commercial au sens de l’article L. 752-3 du code de commerce.

« Ne peuvent être qualifiés de réseaux intérieurs les installations électriques alimentant des logements ou alimentant plusieurs bâtiments reliés entre eux par des ouvrages qui empruntent ou surplombent le domaine public.

II. – Alinéas 13 à 16

Rédiger ainsi ces alinéas :

« Art. L. 345-5. – Pour l’application des articles L. 345-3 et L. 345-4, un dispositif de décompte de la consommation ou de la production d’électricité est installé.

« Si ce dispositif est installé par le gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité, le tarif de la prestation de décompte est défini dans les tarifs des prestations annexes.

« Art. L. 345-6. – Les réseaux intérieurs des bâtiments doivent satisfaire aux conditions techniques et de sécurité fixées dans les normes applicables aux installations électriques intérieures en basse tension.

« Art. L. 345-7. – Le propriétaire d’un réseau intérieur tel que défini à l’article L. 345-1 peut abandonner ses droits sur ledit réseau en vue de son intégration au réseau public de distribution auquel il est raccordé. »

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Cet amendement et le suivant relèvent de la même philosophie.

Le texte issu des travaux de la commission des affaires économiques du Sénat dénote une vision restrictive des réseaux intérieurs. Il est donc proposé d’élargir le champ de sa définition des réseaux intérieurs aux parties communes des immeubles d’habitation, aux bâtiments publics, tertiaires ou industriels, dans la mesure où le réseau intérieur ne surplombe pas ou n’emprunte pas le réseau public de distribution.

Je suis moi aussi extrêmement attentif à ce que l’on maintienne une solidarité en matière de distribution. En effet, lorsque des batteries performantes seront disponibles, beaucoup d’acteurs pourraient se débrancher du réseau et ne plus participer à la solidarité. C’est une des grandes questions que nous aurons à traiter à l’avenir, mais elle n’est nullement liée à celle de l’autoconsommation. Ne confondons pas autoconsommation et production avec stockage : dans le cas de l’autoconsommation, globalement, les acteurs demeurent reliés au réseau de distribution afin de pouvoir faire face aux fluctuations de leurs besoins ; il faut la favoriser, car elle permet une plus grande maîtrise de notre système électrique.

La définition des réseaux intérieurs que nous proposons permettra plus aisément, à l’échelle d’un bâtiment, la réalisation d’opérations d’autoconsommation d’électricité issue d’énergie renouvelable produite sur site au sein d’un réseau n’empruntant pas le réseau public de distribution. Elle permettra aussi de lever les difficultés juridiques que pose la rédaction adoptée par la commission, qui restreint ces réseaux à la propriété unique du bâtiment sans régler le litige pouvant survenir lors de l’aliénation d’une partie de ce dernier. Elle permettra enfin de laisser le libre choix de la norme applicable au réseau intérieur selon que le propriétaire envisage une cession au gestionnaire de réseau ou non.