M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léconomie et des finances. Monsieur le sénateur, ce que nous souhaitons avant tout, c’est faire valoir les atouts de la France et de l’Europe en matière d’intelligence artificielle et l’excellence de la recherche française dans les domaines scientifiques et technologiques – les mathématiques, l’informatique, les sciences des données –, qui est internationalement reconnue et qui attire les grands groupes internationaux venant implanter en France des centres de R&D.

Le Gouvernement a mis en place de nombreuses actions de soutien en faveur de la R&D, d’une part, et de l’émergence et du développement des start-up, d’autre part. Au sein du fonds pour l’innovation de rupture, il y aura un compartiment dédié au financement de projets dits de « deep tech », dont une partie sera consacrée à l’intelligence artificielle. Il s’agit vraiment d’initiatives qui doivent être pilotées et recentrées, et non d’un saupoudrage ou d’un redéploiement de façade. Il y a donc une véritable volonté d’aligner les moyens avec les enjeux.

Je rappelle aussi que la France compte de grandes entreprises de services dans le numérique, qui vont être clés pour mener à bien cette stratégie – Capgemini, Atos ou encore Sopra Steria –, et ces entreprises investissent dans les technologies d’intelligence artificielle.

Enfin, de très grands groupes français utilisateurs de technologies sont aussi des références dans leur secteur et deviendront, si j’ose dire, les donneurs d’ordre sur certaines solutions, sur certaines plateformes d’intelligence artificielle.

Il y a donc beaucoup d’éléments exploitables pour faire en sorte que l’on joue pleinement notre partition dans ces enjeux de l’innovation et de l’intelligence artificielle.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour la réplique.

M. Stéphane Piednoir. Je veux simplement souligner que vous n’avez pas répondu à ma question sur la revalorisation des salaires des chercheurs en tout début de carrière, madame la secrétaire d’État. C’est un élément essentiel et, je le répète, on sait que c’est par ce levier socio-économique que tout commence ; donc, je renouvelle mon appel sur ce point précis.

M. le président. Pour conclure ce débat, la parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux me réjouir de la qualité des débats – tant de la pertinence des questions que de la justesse des réponses. Vous avez constaté, madame la secrétaire d’État, que, sur ce sujet bien particulier, le Sénat a marqué son ADN ; cette chambre à une culture d’avenir, et la digitalisation de l’économie et l’intelligence artificielle ne lui sont pas étrangères.

Je rappelle que, le 21 juin prochain, nous assisterons à la restitution d’un rapport spécifique sur l’intelligence artificielle, sur les supercalculateurs, que nous vous transmettrons. Sans doute examinerons-nous aussi une proposition de résolution, que nous aimerions vous faire partager le moment venu.

Il me semble très clair que cette évolution de l’économie et de la compétitivité de l’Union européenne marquera le développement du marché unique, un des grands joyaux de la création de l’Union européenne. Il y a, au travers de cette évolution, une très belle attractivité de l’Europe, que nous devons entretenir.

À propos de marché unique, je veux souligner notre grande vigilance dans le dossier du Brexit – nos amis Britanniques doivent en être bien conscients – sur les propositions qui émaneront tant des analyses de Theresa May, relatives à un partenariat douanier, que de celles des « Brexiters » qui appellent plutôt à un arrangement douanier simplifié. Ne nous laissons pas abuser par la sémantique anglo-saxonne !

Le marché unique européen est quelque chose que nous devons protéger avec la plus grande vigilance, parce que c’est notre atout dans la compétition internationale. C’est également notre atout dans le cadre des négociations commerciales internationales. Je déplore d’ailleurs la crispation et le protectionnisme américains ; je souhaiterais que l’on en revienne à l’esprit du multilatéralisme et de l’Organisation mondiale du commerce.

Ce débat vient donc à point nommé, au moment où le Président Trump a eu la position que vous savez vis-à-vis de l’Iran. En effet, le Sénat, au travers de notre collègue Philippe Bonnecarrère, avait beaucoup travaillé sur le concept d’extraterritorialité des lois américaines. Depuis 1996, l’Union européenne est dotée des mêmes outils pour faire valoir l’extraterritorialité des lois européennes ; simplement, il n’y a pas de volonté politique de notre principal partenaire, l’Allemagne, en la matière. Nous devons mettre en place cette extraterritorialité des lois européennes, non pas pour assouvir une quelconque vengeance, mais tout simplement parce que l’Union européenne doit, au travers de cela, marquer sa puissance.

Enfin, nous souhaiterions mettre en place de nouveaux grands projets, sur les modèles d’Airbus et d’Ariane. La reconquête industrielle et l’emploi dans l’Union européenne passent donc par la refonte de la politique de concurrence, qui a été pensée, imaginée et écrite dans les années soixante – depuis cette époque, le monde a changé, mais pas la politique européenne de concurrence.

Je conclus en indiquant que, pour arriver à tout cela, le couple franco-allemand est absolument indispensable. Nous avons travaillé avec le Bundesrat et mon homologue dans cette chambre est venu récemment au Sénat pour participer à une réunion conjointe sur la numérisation et l’intelligence artificielle.

Je note que l’achat d’un prochain supercalculateur de nouvelle génération sera, compte tenu des coûts, une œuvre collective et sans doute franco-allemande. Néanmoins, là encore, je veux souligner l’importance de ce qu’on appelle les coopérations renforcées ; on ne peut pas marcher à vingt-sept d’un seul pas. Si quelques pays, notamment la France et l’Allemagne, peuvent avancer et montrer le chemin à d’autres États, nous aurons été dans l’esprit européen.

Je signale en outre que ce sera seulement à la fin de cette année, après pratiquement deux décennies de travail, que nous aurons enfin mis en place le brevet communautaire. Sans la coopération renforcée, nous n’aurions pas pu le faire ; c’est donc absolument essentiel.

Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de vous être intégrée dans ce débat sur la compétitivité, l’intelligence artificielle et la digitalisation de l’économie, dans le cadre de questions européennes. Je suis persuadé que nous aurons d’autres travaux à mener ensemble ; j’ai échangé quelques mots en aparté avec votre directeur de cabinet, la liste – ma liste en tout cas – est longue.

M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur l’Union européenne face aux défis de la compétitivité, de l’innovation, du numérique et de l’intelligence artificielle.

8

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 15 mai 2018 :

À quatorze heures trente : débat sur « les infrastructures routières à la suite de la présentation du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures du 1er février 2018 ».

À seize heures quarante-cinq : questions d’actualité au Gouvernement.

À dix-huit heures : proposition de résolution, présentée en application de l’article 34-1 de la Constitution, invitant le Gouvernement à prendre en compte la situation des « Américains accidentels » concernés par le Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA) (n° 64, 2017-2018).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-sept heures quarante-cinq.)

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD