Mme la présidente. La parole est à M. Martial Bourquin, sur l’article.

M. Martial Bourquin. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais que l’on comprenne bien le sens de cet article. Nous devons tous, collectivités, EPCI, État, donner l’exemple pour nos centres-villes, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Nous avons une responsabilité collective dans leur fragilisation. Si nous voulons les revitaliser, nous devons donc changer complètement nos comportements.

L’une des difficultés majeures de nos centres-villes et de nos centres-bourgs, c’est leur abandon par les services publics qui prend une dimension extrêmement préoccupante. Il faut arrêter cette fuite en avant !

Nous proposons quatre mesures pour les services existants. La première, c’est l’obligation d’informer les élus d’un périmètre « OSER » des projets de transfert des services publics.

La deuxième obligation, c’est de justifier de l’impossibilité de maintenir le service en centre-ville.

La troisième obligation, c’est la possibilité pour la commune victime du transfert d’exprimer son refus, ce qui ouvre une phase de dialogue avec l’autorité responsable du service public.

La quatrième mesure, si ce dialogue est infructueux, c’est la possibilité pour la commune de récupérer les locaux désertés, à l’euro symbolique.

Pour les services publics à venir, nous proposons d’encourager les maisons et les pôles de santé ainsi que les maisons de service public à s’installer dans les centres-villes et les centres-bourgs. C’est le contraire de la pratique actuelle, ces services étant souvent délocalisés en périphérie.

Pour cela, les aides à l’installation ne doivent pas servir d’accord. Surtout, il faut montrer qu’il existe des impossibilités. La culture de la périphérie a gagné l’État et souvent les collectivités territoriales. On a vu des services publics, notamment les perceptions, mais aussi bien d’autres, quitter les centres-villes pour se regrouper en périphérie.

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Martial Bourquin. Nous le savons tous, le départ en périphérie du généraliste ou du pharmacien signe le début de la désertification d’un centre-ville.

Mes chers collègues, voilà pourquoi cet article 5 est très important. Il faut que les choses changent de ce point de vue, et l’État doit montrer l’exemple !

Mme la présidente. L’amendement n° 48 rectifié bis, présenté par MM. Raison, Bas, Milon, Mouiller, Dallier et Longuet, Mme Vullien, MM. D. Laurent, Mizzon et Paccaud, Mme Gatel, MM. H. Leroy et Bascher, Mme Puissat, MM. Reichardt, Joyandet et Perrin, Mme Joissains, M. Dufaut, Mme Bonfanti-Dossat, M. Danesi, Mmes Deromedi, Chain-Larché, Eustache-Brinio, Imbert et Thomas, MM. de Nicolaÿ et Chaize, Mme Raimond-Pavero, MM. Longeot, Savary et Meurant, Mme Dumas, M. Vial, Mme Duranton, M. Panunzi, Mme Vermeillet, M. Morisset, Mmes Loisier et Sollogoub, M. Henno, Mmes Micouleau et Gruny, M. Chatillon, Mme Morhet-Richaud, M. Babary, Mme de Cidrac, M. Revet, Mmes Garriaud-Maylam et Lopez, MM. L. Hervé, Détraigne, Cuypers et Bonne, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. B. Fournier, Pierre et Genest, Mmes Chauvin et Canayer, MM. Bonhomme, Mandelli et Priou, Mmes Deroche et Férat, M. JM. Boyer, Mme AM. Bertrand, MM. Mayet, Cigolotti et Savin, Mme Berthet et MM. Daubresse et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« IV. – Lorsqu’il existe un ou plusieurs locaux laissés vacants dans le périmètre d’une opération de sauvegarde économique et de redynamisation, consécutivement à la fermeture ou au déplacement d’un service mentionné au I antérieurs à la délibération instituant ce périmètre, le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont est membre la commune peut proposer à l’État, à la collectivité territoriale, à l’établissement public de coopération intercommunale ou à l’organisme chargé d’une mission de service public la conclusion d’une convention de mise à disposition des locaux laissés vacants dont ils sont propriétaires. Ils disposent d’un délai de trois mois pour y répondre.

« Le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont est membre la commune peut demander toute information complémentaire au représentant de l’État dans le département ou à l’autorité exécutive de la collectivité territoriale, de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou de l’organisme chargé d’une mission de service public, relative à l’état et à l’utilisation envisagée des locaux laissés vacants dont ils en sont propriétaires. Ils disposent d’un délai d’un mois pour la communiquer. »

La parole est à Mme Anne Chain-Larché.

Mme Anne Chain-Larché. Chacun l’aura compris, cet amendement se justifie par son texte même. Il s’agit de limiter le développement de certaines friches et de faire en sorte d’assurer un turn-over suffisamment rapide en termes de récupération de bâtiments laissés vacants.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Moga, rapporteur. Les auteurs de l’amendement s’inspirent d’une expérience réussie en Suisse, afin de favoriser, dans une gare qui a fermé, l’installation d’un commerçant.

La commission trouve l’idée intéressante : son avis est favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est absolument en phase avec l’objectif visé dans cet amendement. Il considère que la réaffectation de locaux vacants est bien évidemment à encourager.

En revanche, on me signale que cette mesure ne relève pas de la loi. Je vous invite donc, madame la sénatrice, à vous rapprocher des services de mon collègue Jacques Mézard, afin de voir comment travailler sur un support adéquat pour ce genre de mesure.

Pour l’heure, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. J’ai trouvé les précédents propos de M. Bourquin empreints de vérité et tout à fait intéressants. À voir ce qui se passe dans les départements, je voudrais que le Gouvernement donne quelques consignes aux agences régionales de santé, les ARS, pour éviter de voir toutes ces pharmacies déménager et se retrouver adossées à des supermarchés, car c’est ce qui fait aussi que les centres-villes se vident.

Il s’agit là d’un très bon amendement. Partout, depuis un certain nombre d’années, la SNCF a laissé pourrir la situation et des gares se dégrader totalement, faute de les avoir vendues. Il y a bien eu, sous la précédente majorité, une loi portée par une ministre écologiste pour que la SNCF vende des terrains et des immeubles. Mais il est déjà trop tard, nombre d’entre eux ont été laissés à l’abandon, alors qu’ils étaient vendables, ce qui a fait perdre beaucoup d’argent.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.

M. Patrice Joly. Cet amendement est tout à fait bienvenu pour donner la main aux élus locaux dans ces démarches relatives au patrimoine appartenant à l’État.

Président d’un département pendant sept ans, je n’ai jamais réussi à faire décroiser les propriétés départementales et de l’État : les services du département occupaient des locaux appartenant à l’État, et réciproquement. Je n’avais pas l’initiative pour ce faire et les simples suggestions que j’ai pu formuler n’ont pas suffi pour avancer. Cela a conduit à une très mauvaise gestion patrimoniale, du point de vue à la fois de l’État et de la collectivité que je représentais.

Dès lors, je serai favorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour explication de vote.

Mme Anne Chain-Larché. Madame la secrétaire d’État, peu nous importe les supports. Par cet amendement, nous défendons l’idée de laisser beaucoup plus de souplesse, d’élasticité, de facilité aux élus. Si vous connaissez le visage de ces territoires malheureusement oubliés, constellés de friches, qu’elles soient agricoles, artisanales, commerciales, vous savez à quel point il nous faut être réactifs. Nous verrons ultérieurement comment adapter le dispositif.

En attendant, je maintiens cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. Cet amendement est le bienvenu. À Audincourt, pour réhabiliter l’ancienne gare et les nombreux hectares alentour, situés quasiment en centre-ville, il a fallu treize années d’efforts, alors que, au début du processus, ils auraient pu être vendus à des prix faramineux.

Voilà pourquoi la proposition qui nous est faite va dans le bon sens. Lorsque les locaux sont dans le périmètre « OSER », il doit y avoir une négociation immédiate, afin de faire en sorte que ces friches soient vendues à un prix raisonnable aux collectivités. Dans la mesure du possible, la cession devrait même presque prendre la forme d’un legs lorsqu’il s’agit d’une opération de logement social, comme cela avait été prévu sous le précédent quinquennat.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sonia de la Provôté, pour explication de vote.

Mme Sonia de la Provôté. Ce qui vient d’être dit est parfaitement juste. L’amendement peut, certes, être amélioré, mais son adoption nous donnera les premières clés et de réels moyens pour pouvoir discuter de façon plus efficace avec l’État.

Il est des situations dans lesquelles nous nous retrouvons souvent quelque peu démunis, il faut bien le dire. Elles durent parfois plusieurs années. Des friches naissent ainsi de la disparition de services publics, voire parapublics. Dans les cœurs de ville OSER, puisqu’il s’agit de remettre les choses en perspective avec cette proposition de loi, il est à mon sens possible de favoriser une relation particulière avec l’État.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 48 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 5, modifié.

(Larticle 5 est adopté.)

Chapitre III

Réduire le coût des normes en centre-ville

Article 5
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Article 7

Article 6

Expérimentation tendant à déroger à lapplication de certaines normes dans les périmètres des opérations OSER

I. – À titre expérimental et pendant une durée maximale de cinq ans à compter de l’accord du représentant de l’État dans le département, le maire d’une commune dont le centre-ville ou le centre-bourg fait l’objet d’une opération de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnée à l’article 1er de la loi n° … du … portant pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs peut demander au représentant de l’État dans le département à déroger à certaines normes qui imposent la réalisation de prestations ou de travaux nécessitant la mise en œuvre de moyens matériels, techniques ou financiers disproportionnés compte tenu de la nature ou de la configuration des lieux, des besoins à satisfaire localement ou de ses capacités financières.

II. – L’expérimentation définie au I ne s’applique pas lorsque sont en cause des dispositions réglementaires transposant des mesures internationales ou communautaires à caractère obligatoire, des normes de sécurité ou organisant les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti.

III. – La demande précitée mentionne les dispositions réglementaires concernées, les prestations ou travaux nécessités pour leur application, les difficultés particulières engendrées et les mesures de substitution proposées pour mettre en application les dispositions législatives concernées.

IV. – Le représentant de l’État dans le département dispose d’un délai d’un mois à compter de sa saisine pour accepter ou non, par arrêté motivé, la demande formulée au I. En cas de silence du représentant de l’État dans le département, il est réputé avoir donné son accord.

V. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article.

Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.

M. Fabien Gay. L’article 6 propose une expérimentation visant à alléger le poids des normes dans les centres-villes et centres-bourgs intégrés à un périmètre OSER.

Le paragraphe I prévoit, à titre expérimental et pendant une durée de cinq ans, la possibilité de demander au préfet de déroger à certaines normes qui alourdissent de façon disproportionnée la réalisation de travaux de redynamisation d’un centre-ville.

Le paragraphe II exclut du champ de la dérogation plusieurs catégories de normes : les dispositions réglementaires transposant des mesures internationales ou communautaires, les normes de sécurité ou celles qui organisent les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti.

Nous estimons que cette exclusion n’est pas suffisante, puisqu’il pourra ainsi être dérogé aux règles d’accessibilité et aux règles environnementales, comme le confirme l’exposé des motifs.

Alors que la France s’est engagée dans une démarche environnementale forte par la signature des accords de Paris, afin de limiter les émissions de gaz à effet de serre, nous considérons que cet article envoie un bien mauvais signal. La préservation de la nature est un objectif impérieux, qui ne mérite aucune transgression, y compris au nom de la simplification et de travaux de redynamisation.

Sur le fond, nous ne partageons pas l’idée que la norme est une contrainte à la libération des énergies. À nos yeux, il s’agit bien d’un outil de protection de l’intérêt général, ce qui explique qu’il est du ressort de la puissance publique de définir ces normes. Bref, la question pour nous est non pas tellement de savoir s’il faut les supprimer ou les écarter, mais bien d’évaluer leur utilité en fonction de l’intérêt général à protéger.

Sans remettre en cause le droit d’expérimentation, qui ouvre des possibilités intéressantes pour les collectivités, nous considérons que les objectifs affichés de simplification cachent en réalité une ambition plus pernicieuse de déréglementation.

C’est pour ces raisons que nous ne voterons pas cet article.

Mme la présidente. L’amendement n° 20 rectifié ter, présenté par Mme Férat, M. Bonnecarrère, Mme Goy-Chavent, MM. Kern et Henno, Mmes N. Goulet et Loisier, M. Canevet, Mmes Vullien et Doineau, MM. Savary, L. Hervé et Détraigne, Mme Gatel, M. Delcros, Mme Morin-Desailly, M. Leleux et Mme de la Provôté, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 4

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les normes relatives au patrimoine sont exclues de ces dérogations. Elles sont encadrées par l’article 7 de la présente loi.

La parole est à Mme Sonia de la Provôté.

Mme Sonia de la Provôté. Il convient d’exclure les normes relatives au patrimoine des dérogations prévues à l’article 6. À la suite de l’avancement des discussions sur l’article 7, un terrain d’accord a pu y être trouvé, sans préjuger le débat à venir, ces mêmes normes étant désormais encadrées à cet endroit du texte.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Moga, rapporteur. Cet amendement vise à opérer un renvoi à l’article 7. Il serait nécessaire de le rendre plus précis, mais j’émets un avis de sagesse.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est favorable aux expérimentations permettant de tenir compte de situations spécifiques ou de besoins particuliers d’innovation. La démarche expérimentale a été relancée en mai dernier par le Premier ministre, dans le cadre du dispositif France Expérimentation. Les activités commerciales et artisanales ont besoin de souplesse et d’agilité pour assurer leur développement, en particulier dans le cœur des villes moyennes.

Cependant, le champ de telles expérimentations doit être précisément défini, pour éviter que des règles impératives portant sur des domaines sensibles, comme l’hygiène ou la sécurité, ne soient levées. Je demanderai donc à la Commission de concertation du commerce de faire des propositions sur ce sujet, afin que le Gouvernement puisse revenir ensuite vers le Parlement avec une liste de domaines précis d’expérimentations possibles en la matière.

En l’état, toutefois, l’article 6 et cet amendement ne peuvent être pleinement soutenus par le Gouvernement, qui en demande donc le retrait.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Leleux. Je m’exprimerai à titre personnel, étant cosignataire de cet amendement. Il est apparu à un certain nombre d’entre nous, notamment à Mme Férat, qu’il y avait une contradiction avec les dispositions de l’article 7, dont on aurait pu croire, à lire l’article 6, qu’elles n’avaient pas de réalité. La rédaction de l’amendement méritera d’être légèrement modifiée, pour qu’il y soit fait référence non pas explicitement à l’article 7, mais plutôt aux articles du code du patrimoine qui y figurent.

Cela étant, je préfère qu’il soit dès à présent adopté, afin d’éviter toute ambiguïté entre ces articles 6 et 7.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.

M. Xavier Iacovelli. Nous sommes évidemment favorables à cet amendement, car nous nous sommes toujours opposés, pour le coup, aux possibilités de dérogations en matière de protection du patrimoine.

L’amendement aurait pu être plus précis et viser spécifiquement les monuments historiques classés, voire inscrits, mais une telle précision pourrait tout aussi bien trouver sa place à l’article 7. Nous soutiendrons donc cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. La seule préoccupation que je souhaite exprimer a trait au rôle des architectes des bâtiments de France.

Madame la secrétaire d’État, il va falloir vraiment se pencher sur les missions qui leur sont assignées, tant ils passent une grande partie de leur temps à multiplier les tracasseries et à bloquer des dossiers. Leurs pouvoirs sont beaucoup trop importants : limitons-les et transférons-en un certain nombre aux maires.

Pour illustrer les trop nombreuses incohérences constatées dans les communes, imaginez qu’un premier architecte des bâtiments de France arrive sur les lieux et dise : « Je veux des tuiles. » Eh bien, un autre pourrait très bien venir par la suite et objecter : « Pas de tuiles, c’est interdit, je veux de la tôle. » C’est un État dans l’État, sur lequel le préfet n’a aucun moyen de contrôle et ne peut rien dire. (Murmures sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Il faut vraiment que tout cela change. Et j’ai bien raison de le penser ! (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 20 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6, modifié.

(Larticle 6 est adopté.)

Article 6
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Article 8

Article 7

Institution dune procédure visant à simplifier la prise en compte des protections patrimoniales dans le périmètre des opérations OSER

I. – Les ministres chargés de l’urbanisme et du patrimoine fixent les objectifs et les orientations applicables par les architectes des Bâtiments de France dans les périmètres des opérations de sauvegarde économique et de redynamisation. Ces objectifs et orientations tiennent compte de la situation économique et financière des collectivités intéressées, des enjeux de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine ainsi que des besoins locaux en matière de construction et de rénovation de logements, d’implantation, d’amélioration, de transformation, d’aménagement et d’entretien des locaux commerciaux et artisanaux. Ils peuvent comporter des éléments différenciés selon le tissu urbain et le patrimoine des territoires. Ils sont transmis aux architectes des Bâtiments de France territorialement compétents ainsi qu’aux représentants de l’État dans les régions et dans les départements, qui veillent à leur mise en œuvre.

II. – Lorsque le périmètre de l’opération de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnée à l’article 1er de la loi n° … du … portant pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs comprend des immeubles ou ensembles d’immeubles protégés au titre des abords ou des sites patrimoniaux remarquables, la décision d’engager l’opération est précédée de la consultation de l’architecte des Bâtiments de France. Il dispose d’un délai d’un mois à compter de sa saisine pour porter à la connaissance du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale les servitudes d’utilité publique et les dispositions des documents d’urbanisme instituées dans un but de protection, de conservation et de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine sur ledit périmètre.

L’architecte des Bâtiments de France est associé à l’élaboration de la convention relative à l’opération de sauvegarde économique et de redynamisation.

III. – L’autorisation de travaux prévue au titre des abords ou des sites patrimoniaux remarquables tient compte des nécessités de la revitalisation de l’habitat et des activités et de la situation économique et sociale dans le périmètre de l’opération de sauvegarde économique et de redynamisation, ainsi que des capacités financières des collectivités intéressées.

IV. – (Supprimé)

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, sur l’article.

M. Max Brisson. Cet article 7, qui donne lieu à tant de demandes de parole, a suscité de nombreux échanges et j’ai moi-même eu l’occasion d’exprimer mon point de vue au sein de la commission de la culture. Le texte qui nous est maintenant proposé est l’aboutissement de la recherche d’un équilibre dont je me réjouis.

Je tiens à saluer le travail fait conjointement pour parvenir à un consensus par la présidente de la commission, Catherine Morin-Desailly, le rapporteur pour avis, Jean-Pierre Leleux, et les auteurs de la proposition de loi. Ce ne fut pas simple, tant ces sujets relèvent d’opinions et d’expériences locales divergentes.

Je veux cependant indiquer ce qui a motivé ma position. Comme tout le monde, je crois que le patrimoine hérité doit être protégé, préservé. Ce n’est d’ailleurs pas un sujet. Après des années au cours desquelles beaucoup fut détruit ou défiguré, notre pays a élaboré un cadre législatif et réglementaire protecteur, que nombre de pays nous envient et que d’autres devraient nous envier. Le Sénat a d’ailleurs récemment pris sa part en la matière.

Notons cependant, pour tordre le cou à ce lieu commun sur les erreurs des élus, que ce fut souvent sur l’initiative de l’État, soucieux à une époque d’hygiène et de sécurité publique, mais aussi victime de la tyrannie de la modernité, que furent menées dans notre pays quelques hérésies destructrices au XIXsiècle et dans la première moitié du XXsiècle.

Les mentalités ont changé, et je tiens donc à insister sur un point : nous devons donner plus de latitude aux élus locaux et leur faire confiance ; ils doivent pouvoir faire preuve d’imagination, être force de proposition, voire déroger à des cadres, qui, du fait des procédures, s’inscrivent dans des calendriers qui ne sont plus en phase avec l’urgence née de la désertification des centres-villes et des centres-bourgs.

Il est parfois craint que, en laissant de la liberté aux élus, des erreurs irréparables ne soient commises. Je ne le crois pas. En revanche, je suis persuadé que la dévitalisation des centres est le plus grand danger à terme qui pèse sur le patrimoine. Comme je le disais hier, quand les hommes s’en vont, les pierres finissent toujours par tomber, et les meilleurs règlements n’y changeront rien.

L’enjeu est donc bien de renverser cette tendance à la désertification des centres-villes et des centres-bourgs. C’est bien là le plus grand péril qui guette notre patrimoine. Et la meilleure réponse, c’est bien le retour des habitants. Il faut donc, certes, un cadre conservateur et exigeant : il existe, et personne ne souhaite sa remise en cause. Mais il faut aussi, dans la concertation et dans un esprit contractuel, laisser aux élus une capacité de discernement et d’adaptation. Bref, il faut leur faire confiance !

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, sur l’article.

Mme Catherine Morin-Desailly. « Aucun pays au monde ne possède un patrimoine aussi riche et divers que la France. Autant de témoignages de chaque époque laissés par les femmes et les hommes qui ont vécu ici, de la préhistoire à nos jours. Le patrimoine se construit au quotidien. Et il se préserve sans relâche contre les agressions. » C’est par ces mots que M. Martin Malvy, président de Sites et Cités remarquables de France, a ouvert, voilà moins de deux ans, son rapport remis au ministère chargé des affaires étrangères et consacré au rôle des patrimoines dans l’attractivité touristique de notre pays.

Il est vrai que les règles en matière de protection patrimoniale peuvent paraître exigeantes. Mais c’est aussi grâce à ces règles que, au cours des décennies qui viennent de s’écouler, nous avons pu sauver un patrimoine inestimable pour nos villes, pour certains de nos villages et pour nos petites cités de caractère.

Voilà renforcée l’idée que le patrimoine est l’un des grands atouts de notre pays, qui, par chance, d’ailleurs, mes chers collègues, est largement réparti dans nos territoires. Ce sont des milliers d’entreprises, vous le savez, des dizaines de milliers d’emplois comme de nombreux savoir-faire qui en dépendent. Aussi, capitaliser sur les atouts culturels architecturaux et historiques des centres-villes représente, certes, un investissement initial, mais se révèle par la suite très positif, d’abord, pour la qualité de vie et l’environnement, ensuite, pour l’attractivité et le rayonnement de nos territoires.

C’est la raison pour laquelle, me semble-t-il, au travers de cette réflexion sur la revitalisation des centres-bourgs et des centres-villes, il nous faut aider, encourager nos élus locaux à capitaliser sur ce patrimoine. C’est bien ce qu’affirmait notre ancien collègue Yves Dauge dans les différents rapports qu’il a pu publier.

Je sais que cet article 7 a suscité de nombreux débats. Ceux-ci sont à la mesure de l’attachement que nous avons tous pour nos territoires. Nous portons les mêmes objectifs. Les discussions des dernières semaines ont été constructives, et je voudrais saluer les deux auteurs de la proposition de loi, ainsi que le rapporteur, Jean-Pierre Moga, et le rapporteur pour avis de la commission de la culture, Jean-Pierre Leleux.

Les discussions ont permis d’avancer vers une rédaction qui constitue un point d’équilibre entre deux enjeux essentiels : celui de rénover ou de moderniser, et celui de préserver le patrimoine. Loin de s’opposer, au contraire, ces enjeux se rejoignent pour mettre en lumière cette dynamique de revitalisation bénéfique non seulement à l’économie, mais aussi à la culture. Les débats depuis hier l’ont montré, nous avons été nombreux à nous préoccuper de l’avenir, qui d’un cinéma, qui d’une librairie.