Article 78
Dossier législatif : proposition de loi visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Vote sur l’ensemble

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. le rapporteur.

M. Loïc Hervé, rapporteur. Je voudrais tout d’abord remercier le Gouvernement d’avoir attiré l’attention des préfets sur la nécessité de faire en sorte que les parlementaires puissent participer effectivement aux réunions les plus importantes organisées par l’État dans les départements et jouer ainsi leur rôle d’acteurs locaux. Le ministre d’État, ministre de l’intérieur leur a adressé une lettre en ce sens, de même que le président du Sénat. Je sais que vous-même, monsieur le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, êtes très sensible à cette question très importante. Ce texte a souvent permis un échange entre les parlementaires et les représentants de l’État dans les territoires.

Par ailleurs, je vous invite à la vigilance, mes chers collègues, lorsque l’on vous proposera de créer de nouveaux organismes où seront appelés à siéger des parlementaires. Nous avons voulu, voilà quelque temps, créer un Conseil national consultatif des cultes où auraient siégé deux députés et deux sénateurs. Pour ma part, je m’y suis opposé résolument. Il peut être légitime de vouloir créer un nouvel organisme, mais gardons-nous de multiplier les comités Théodule. Il y va du bon fonctionnement du Parlement, a fortiori si la réduction du nombre de parlementaires est finalement décidée. Pour siéger à la CNIL tous les jeudis matins, je puis vous assurer que c’est assez astreignant.

Je remercie l’ensemble des orateurs et me réjouis que le vote de cette proposition de loi se présente sous les meilleurs auspices.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble de la proposition de loi visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination.

(La proposition de loi est adoptée définitivement.)

M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.)

PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination
 

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Lutte contre les rodéos motorisés

Adoption définitive en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

 
Dossier législatif : proposition de loi renforçant la lutte contre les rodéos motorisés
Article 1er (Texte non modifié par la commission)

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, renforçant la lutte contre les rodéos motorisés (proposition n° 641, texte de la commission n° 674, rapport n° 673).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le texte que nous allons étudier ensemble est un modèle de coproduction législative, dans l’élaboration duquel chacun des acteurs a joué pleinement son rôle : à l’Assemblée nationale, les groupes LaREM, Modem et Les Républicains, au Sénat, M. Delahaye, Mme la rapporteur Eustache-Brinio et le président Bas, ont fait en sorte que soit apportée, au travers de ce texte, une réponse rapide à un fléau qui empoisonne la vie de nos concitoyens.

Les rodéos motorisés se déroulent désormais sur l’ensemble de notre territoire, faisant fi de la préservation de l’espace public, de la sécurité de nos concitoyens, de la tranquillité de nos quartiers. Leurs acteurs vont parfois jusqu’à provoquer nos forces de l’ordre.

En effet, cantonné d’abord aux zones périurbaines, ce phénomène touche maintenant tout le territoire et n’épargne plus nos villes, petites et moyennes, ni nos villages dans les territoires ruraux.

J’ai déjà eu l’occasion de le dire, l’année passée, près de 9 000 faits de ce type ont été constatés par nos forces de police et près de 7 000 par nos forces de gendarmerie.

Il était donc urgent d’unir nos efforts pour faire cesser dans les plus brefs délais cet état de fait qui, avec les beaux jours, ne fait qu’empirer.

C’est, semble-t-il, animée de cette volonté que la commission des lois du Sénat, qui s’est réunie mercredi dernier, a adopté sans modification la proposition de loi renforçant la lutte contre les rodéos motorisés. Je tiens à l’en remercier et à saluer le travail de Mme la rapporteur, qui a permis d’atteindre ce résultat.

Ce vote conforme en commission manifeste le large consensus qui domine depuis le début des travaux parlementaires. En effet, sans faire la genèse complète de ce texte, je me dois d’insister sur le rôle des sénateurs qui, par la voix de Vincent Delahaye, ont saisi le ministère de ce sujet afin de travailler avec lui, en amont des discussions parlementaires.

Je souhaite également insister sur le rôle des députés, notamment des groupes LaREM, Modem et Les Républicains, qui, autour de Natalia Pouzyreff, Bruno Studer, Mireille Clapot, Naïma Moutchou, Jean-Noël Barrot, Aude Luquet et Robin Reda, ont œuvré de concert avec mes services.

M. Jean-Pierre Sueur. C’est un vrai palmarès !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Quand les gens travaillent efficacement, je les cite ! Tout cela a été très anticipé.

Le ministère de l’intérieur, mais aussi le ministère de la justice, ont beaucoup travaillé sur ce sujet. Mme la garde des sceaux y a été très attentive.

Par le passé, nombre de propositions de loi sur cette thématique n’ont pas abouti, pour des raisons diverses, sans doute techniques, tant il était difficile de trouver des rédactions ne prêtant pas à confusion, suffisamment explicites et d’une grande rigueur d’un point de vue juridique.

C’est pourquoi il est important de souligner que le texte que vous examinez aujourd’hui, résultat d’une collaboration constructive, représente à l’heure actuelle une réponse solide et viable pour mettre un terme à ces rodéos, car elle offre un cadre légal adapté et dissuasif.

Ce cadre comprend une définition du délit de rodéo motorisé et prévoit des peines significatives. En effet, la peine initiale encourue est d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende, ce qui permet le placement en garde à vue du mis en cause et son éventuelle comparution immédiate devant l’autorité judiciaire.

Les discussions à l’Assemblée nationale ont conduit à l’ajout de deux situations d’aggravation : la conduite sous l’emprise de produits stupéfiants ou d’un état alcoolique ou sans être titulaire d’un permis de conduire.

L’incitation ou l’organisation de manifestations, notamment via les réseaux sociaux, au cours desquelles sont constatés des rodéos motorisés sont également réprimées par ce texte.

Surtout, la proposition de loi prévoit la confiscation obligatoire par le juge du véhicule ayant servi à commettre l’infraction. Une telle mesure sera d’autant plus efficace si elle est précédée d’une immobilisation administrative, c’est-à-dire d’une mise en fourrière.

Enfin, les travaux de l’Assemblée nationale ont permis d’ajouter des dispositions spécifiques pour nos départements et territoires d’outre-mer, qui, comme la métropole, se trouvent confrontés à ce phénomène, avec parfois une particulière acuité.

Toutes ces dispositions apportent des réponses complémentaires, mais ne sauraient suffire. En effet, lors de nos échanges, vous avez insisté pour que ce texte s’accompagne de directives précises à l’adresse des services de police et de gendarmerie.

Je vous confirme donc aujourd’hui que mon cabinet et mes services sont déjà à l’œuvre pour que, dès l’adoption, que j’espère conforme, de ce texte, des directives et circulaires soient immédiatement adressées aux préfets de département.

Il leur sera notamment demandé de mettre en place une stratégie locale avec des actions coordonnées en lien avec les directeurs territoriaux et départementaux de la sécurité publique et les commandants de groupement de la gendarmerie départementale.

Pour que chacun comprenne que c’est le Gouvernement tout entier qui est à la tâche pour mettre un terme à ces agissements, je vous informe que ma collègue garde des sceaux fera de même et adressera dans les plus brefs délais une circulaire aux procureurs de la République, pour que police et justice œuvrent main dans la main.

Le Gouvernement accompagnera aussi cette proposition de loi en matière réglementaire. Il veillera ainsi à améliorer dans les meilleurs délais l’efficacité du fichier de déclaration d’identification de certains engins motorisés, le fichier DICEM. Dix ans après sa création, un renforcement de ses dispositions est nécessaire en vue d’en améliorer l’efficacité en matière de lutte contre les rodéos, avec notamment un meilleur traçage de la provenance du véhicule.

D’autres pistes sont à l’étude, comme exiger la présentation d’une licence sportive ou d’une attestation professionnelle lors de l’achat de véhicules non réceptionnés, c’est-à-dire non conformes aux formalités administratives, afin d’en éviter la prolifération, ou encore autoriser les polices municipales à accéder directement au fichier DICEM, sans intervention de policiers ou de gendarmes.

Je tiens enfin à préciser que l’avancée pénale que représente cette proposition de loi figurera parmi les priorités d’action de la police de sécurité du quotidien, dont l’un des principes fondamentaux est la coopération avec tous les acteurs locaux.

En effet, s’il me paraît essentiel de travailler en lien avec les procureurs de la République, une solution efficace sur le terrain ne saurait se passer de la contribution de nos maires et élus locaux, souvent bien informés et concernés au premier chef par ces rodéos, qui mettent à mal la paix et la tranquillité de leurs administrés. C’est pourquoi ils seront intégrés dans les stratégies locales de sécurité et pourront améliorer les synergies, notamment avec les policiers municipaux, souvent déjà très engagés sur le sujet. Ils pourront également contribuer à optimiser le recours aux dispositifs de vidéoprotection, afin de faciliter l’identification des auteurs et d’accroître ainsi la réponse pénale.

Toutefois, je dois le dire, ces initiatives opérationnelles ne seront efficaces que si elles sont complétées par des mesures d’éducation et de prévention, qui devront être conduites avec l’ensemble des acteurs associatifs et des partenaires locaux. Je pense notamment à des aménagements urbains, à la mise en place d’une signalisation dissuasive et, surtout, à des actions de sensibilisation en direction des plus jeunes.

Enfin, je souhaite évoquer la condition sine qua non de la réussite de toute politique publique de sécurité, à savoir la mobilisation de moyens suffisants. C’est une priorité de ce quinquennat portée par le ministre d’État, ministre de l’intérieur, et un engagement de campagne du Président de la République.

C’est pourquoi la lutte contre les rodéos motorisés s’inscrira pleinement, je l’ai dit, dans les missions de la police de sécurité du quotidien, dont la mise en place se traduit par un renforcement des moyens mis à la disposition des forces de l’ordre.

Ainsi, 10 000 postes seront créés, durant le quinquennat, dans la police et dans la gendarmerie. Les moyens matériels seront accrus, avec une enveloppe annuelle de l’ordre de 250 millions d’euros allouée au renouvellement et à la montée en gamme des équipements. Les moyens numériques seront également augmentés, avec notamment l’acquisition de caméras mobiles et un objectif de 110 000 tablettes déployées d’ici à 2019, qui permettront aux policiers et gendarmes d’accéder à tous les fichiers. Ils gagneront ainsi un temps précieux qu’ils pourront consacrer à l’enquête ou à la présence sur le terrain.

J’ajoute, pour conclure, que le projet de loi visant à une simplification de la procédure pénale, tant attendue par nos forces de l’ordre, sera présenté au Parlement à l’automne, afin que policiers et gendarmes puissent se consacrer à leur cœur de métier, à savoir la présence sur le terrain, au plus près de nos concitoyens.

Vous l’aurez compris, le Gouvernement ne peut que soutenir cette proposition de loi. Il engagera tous les moyens en son pouvoir pour que, partout sur notre territoire, la tranquillité puisse être restaurée et l’État de droit respecté. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, chers collègues, nous sommes saisis aujourd’hui d’une proposition de loi visant à renforcer la lutte contre les rodéos motorisés, qui a été déposée par M. Richard Ferrand et plusieurs députés en mai dernier et adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture le 4 juillet dernier.

Une proposition de loi comportant des dispositions quasiment identiques avait été déposée parallèlement au Sénat par notre collègue Vincent Delahaye et des sénateurs issus de plusieurs groupes politiques de notre assemblée, ce qui est symbolique du large consensus existant sur cette question.

Je ne doute d’ailleurs pas que nous réussirons aujourd’hui, comme cela a été le cas en commission la semaine dernière, à trouver un accord sur cette problématique, qui constitue un enjeu important à la fois d’ordre public et de qualité de vie pour certains de nos concitoyens.

Les rodéos motorisés constituent en effet, depuis quelques années, un véritable fléau dans certains quartiers. Outre la nuisance sonore importante qu’ils génèrent pour les riverains, les rodéos constituent l’une des formes les plus nuisibles et les plus dangereuses de la délinquance routière. Plusieurs faits dramatiques l’ont malheureusement démontré. En cet instant, j’ai une pensée pour une petite fille prénommée Élisa.

Le phénomène n’est pas isolé. Il connaît même une progression inquiétante depuis quelques années. Alors que les rodéos se pratiquaient à l’origine surtout dans les zones urbaines, le phénomène s’étend de plus en plus aux périphéries des villes, ainsi qu’aux zones rurales, pour l’heure dans une moindre mesure.

Selon les données qui m’ont été communiquées, 8 700 rodéos ont été constatés par les forces de police sur le territoire national au cours de l’année 2017. En zone gendarmerie, 6 614 interventions pour des rodéos motorisés ont été réalisées en 2017, contre 5 335 en 2016, soit une augmentation de près de 24 % en un an !

Pour lutter contre ce phénomène en pleine expansion, notre arsenal législatif se révèle, dans la pratique, bien pauvre. Il serait erroné de dire que rien n’existe, mais les outils dont nous disposons actuellement sont soit difficiles à mettre en œuvre, soit insuffisamment dissuasifs.

Il est ainsi possible de retenir à l’encontre des auteurs de rodéos la mise en danger de la vie d’autrui. Ce délit, qui est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende, demeure toutefois extrêmement malaisé à mettre en œuvre dans la pratique.

Il est difficile à caractériser pour les forces de l’ordre, qui peinent à prouver l’existence d’un risque réel et immédiat pour la sécurité d’autrui. Un juge reconnaîtrait-il l’existence d’un risque qualifié pour autrui s’agissant de runs organisés de nuit, sur un parking, alors qu’aucun piéton ne circulait sur la voie publique ? C’est peu probable. Or de telles pratiques n’en sont pas moins dangereuses et source d’importantes nuisances.

Les auteurs des rodéos sont donc, dans la majeure partie des cas, punis par de simples contraventions, par exemple pour absence de casque ou circulation à vitesse excessive. Mais ces sanctions sont peu dissuasives et ne permettent pas de sanctionner les comportements à la hauteur du risque qu’ils engendrent.

Ces raisons ont conduit plusieurs de nos collègues députés et sénateurs à déposer, au cours des dernières années, des propositions de loi visant à renforcer les outils juridiques de lutte contre les rodéos. Aucune n’a toutefois abouti à ce jour, malgré les fortes attentes des élus locaux, en particulier des maires, qui sont, chaque jour, confrontés à ces comportements très dangereux.

Dans la continuité de ces initiatives, la proposition de loi dont nous sommes saisis vise à apporter une réponse spécifique et efficace à la problématique des rodéos motorisés.

Le dispositif prévu s’articule, comme vous l’avez rappelé madame la ministre, en trois volets.

En premier lieu, la proposition de loi crée un délit spécifique de participation aux rodéos motorisés. Ce délit serait sanctionné d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende, peines pouvant être portées à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende, en cas de cumul de circonstances aggravantes.

La création d’un délit autonome présente un intérêt réel : cela permettra en effet de réprimer de façon expresse la participation aux rodéos, tout en prévoyant des peines très dissuasives.

Le fait de réprimer les rodéos en matière correctionnelle permettra en outre aux forces de l’ordre de bénéficier de nouveaux outils d’enquête et de placer les individus interpellés en garde à vue.

En deuxième lieu, le texte vise à mieux réprimer l’organisation et la promotion des rodéos motorisés – les réseaux sociaux jouent un rôle en la matière –, ainsi que l’incitation directe à y participer, qui seraient punies de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. Il s’agit de prévenir l’organisation des rodéos motorisés.

En dernier lieu, plusieurs peines complémentaires seraient encourues par les auteurs du délit de participation à un rodéo. Je souhaiterais souligner l’intérêt que présente, à cet égard, la confiscation obligatoire du véhicule, à laquelle le juge pourra certes déroger, mais uniquement par une décision motivée : il s’agit d’un véritable levier de la lutte contre la récidive.

Lors de l’examen de la proposition de loi en commission, le 18 juillet, un très large accord s’est dégagé entre les commissaires, tous groupes politiques confondus, sur la nécessité d’apporter une réponse rapide à ce fléau. Les délits prévus pour renforcer la répression à l’encontre des individus organisant des rodéos ou y participant paraissent facilement caractérisables, ce qui est une garantie de l’opérationnalité et de l’efficacité du dispositif.

Le seul débat qui s’est tenu sur ce texte a porté sur le niveau des peines encourues ; certains de mes collègues y reviendront peut-être. Il ne fait aucun doute que les peines prévues par la proposition de loi sont élevées. La gravité des faits et le danger représenté par les rodéos pour nos concitoyens sont toutefois apparus de nature à justifier pleinement l’application de peines lourdes, comme c’est d’ailleurs le cas pour d’autres infractions au code de la route.

Qui plus est, je rappelle qu’il reviendra au juge d’appliquer avec discernement, au cas par cas, ces dispositions législatives et d’adapter les peines aux circonstances de l’infraction.

C’est pourquoi la commission des lois, soucieuse de permettre une entrée en vigueur rapide de ces dispositions, a adopté la proposition de loi sans y apporter de modification.

Il serait toutefois naïf de croire que cette évolution législative, bien qu’indispensable, sera suffisante pour éradiquer le phénomène. Les forces de l’ordre rencontrent en effet des difficultés pour interpeller les individus, qui prennent généralement la fuite dans des conditions particulièrement dangereuses. Il m’a d’ailleurs été rapporté que les policiers et les gendarmes avaient jusqu’à présent pour consigne de ne pas poursuivre les individus en fuite, pour des raisons de sécurité.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur. Or, sans interpellation, l’action du législateur restera lettre morte. C’est pourquoi cette proposition de loi devra être accompagnée – je me tourne vers vous, madame la ministre – d’’une véritable réflexion sur les moyens de renforcer l’interpellation des individus concernés. Je pense notamment au recours à la vidéoprotection, qui permet d’interpeller a posteriori les individus participant à un rodéo, ou encore à la modernisation des équipements mis à la disposition des forces de l’ordre.

Plusieurs autres mesures relevant du niveau réglementaire pourraient également être prises par le Gouvernement pour compléter les moyens de lutte contre les rodéos. Je me contenterai de mentionner la nécessité de durcir la réglementation concernant l’acquisition et la mise en circulation des véhicules dits « non soumis à réception », qui, bien qu’ils ne soient pas autorisés à circuler sur la voie publique, sont généralement utilisés lors des rodéos.

Madame la ministre, vous serait-il possible de nous indiquer si des réflexions sont en cours au ministère de l’intérieur sur ces sujets ou si des évolutions ont déjà été engagées ? Vous avez déjà abordé rapidement ce sujet.

Sans vouloir présumer de la suite des débats, je pense qu’une très large majorité de notre assemblée devrait se prononcer en faveur de ce texte. Nous souhaiterions avoir la certitude que l’action du législateur produira de réels effets sur le terrain ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « exaspération », c’est le mot qui revient constamment dans la bouche des maires et de nos concitoyens qui subissent les nuisances liées aux rodéos motorisés.

Cette exaspération tient à des questions de sécurité sur la voie publique et de nuisances sonores, qu’il ne faut pas sous-estimer. Dans le département du Loiret, nous avons été saisis de ces sujets dans plusieurs communes, notamment à Sully-sur-Loire et à Fleury-les-Aubrais. Mon collègue Jean-Noël Cardoux apportera des précisions sur ce point, les témoignages vivants étant particulièrement éclairants pour justifier les textes de loi.

Madame la ministre, vous avez eu raison d’insister sur l’accord unanime qui s’est fait jour à l’Assemblée nationale, ainsi que sur le large consensus qui s’est dégagé parmi les sénateurs, très attachés à l’intérêt public. J’ajouterai que nous sommes capables d’organiser des commissions d’enquête parlementaires, dans un climat où chacune et chacun apporte sa contribution pour établir la vérité, mettre en lumière les dysfonctionnements et proposer des mesures. Nous ne sommes pas un tribunal, mais notre rôle est d’accomplir une mission de service public. Ceux qui méconnaissent l’utilité du Sénat pourraient peut-être y réfléchir, monsieur le président de la commission des lois.

Mes chers collègues, le texte dont l’examen nous rassemble aujourd’hui était nécessaire. Il permet tout d’abord de définir enfin les rodéos motorisés : il s’agit du « fait d’adopter, au moyen d’un véhicule terrestre à moteur, une conduite répétant de façon intentionnelle des manœuvres constituant des violations d’obligations particulières de sécurité ou de prudence, prévues par les dispositions législatives et réglementaires du code de la route, dans des conditions qui compromettent la sécurité des usagers de la route ou qui troublent la tranquillité publique ». Ces agissements seront punis « d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ».

Cette définition est très claire : il doit y avoir intentionnalité, violation du code de la route, atteintes à la sécurité des usagers ou à la tranquillité publique.

Ce délit appelle une sanction ; cela va sans dire, mais il est parfois utile de le rappeler pour nos concitoyens. Il s’agit d’une sanction maximale : le juge portera son appréciation au regard des faits dont il aura eu connaissance.

Madame la rapporteur, vous avez décliné, à juste titre, ce qui figure dans cette proposition de loi. Vous avez mentionné, tout d’abord, que les peines seront alourdies si les faits sont commis en réunion, ou encore sous l’emprise d’alcool ou de stupéfiants.

Une peine spécifique est par ailleurs instituée – c’est très important, mes chers collègues – pour réprimer l’incitation à ces rodéos motorisés ou leur organisation. Dans la plupart des cas, l’incitation comme l’organisation s’effectuent par le biais de ce qu’on appelle les « réseaux sociaux » ; permettez-moi d’ailleurs de faire remarquer que ceux-ci ne sont pas toujours très sociaux ! L’anonymat ne peut pas être toléré en cette matière : il importe vraiment que les personnes qui incitent et qui organisent puissent être sanctionnées.

La proposition de loi prévoit en outre sept peines complémentaires, qui sont justes : la confiscation du véhicule ; la suspension du permis de conduire pour trois ans ; l’annulation dudit permis, avec impossibilité de le repasser pendant trois ans ; les travaux d’intérêt général, dont Mme la rapporteur a mentionné dans son rapport qu’ils seront très utiles à l’encontre de certains de nos jeunes concitoyens ; les jours-amendes ; l’interdiction de conduire des véhicules à moteur pendant cinq ans ; enfin, des stages de prévention. Tout cela est très bon et nécessaire : il fallait que les sanctions applicables à ce délit spécifique fussent déterminées.

Je terminerai mon propos, madame la rapporteur, en reprenant certaines des propositions que vous avez faites à juste titre.

Tout d’abord il m’apparaît nécessaire que l’on puisse utiliser la vidéo pour la mise en œuvre de ce texte. Il sera sans doute nécessaire, madame la ministre, d’adopter quelques dispositions réglementaires à cet égard.

Pour les forces de police et de gendarmerie, atteindre les contrevenants, les dépasser, les arrêter et les interpeller est une tâche ardue, difficile et parfois impossible pour des raisons de sécurité évidentes. Le recours à la vidéo serait donc très utile, d’autant que nombre des véhicules utilisés pour ces rodéos ont été volés et que leur plaque minéralogique a été changée.

Il est tout aussi certain qu’il faudra des moyens supplémentaires, madame la ministre. Ils seront nécessaires pour élucider l’affaire et pour découvrir qui possède le véhicule que l’on va confisquer.

En effet, ce texte comporte une clause utile, qui empêche la confiscation d’un véhicule qui aurait été volé et dont le propriétaire n’est donc pour rien dans son utilisation au sein d’un rodéo. Il faudra donc retrouver tant le propriétaire du véhicule que le responsable de son utilisation, ce qui peut être encore compliqué par le changement de la plaque minéralogique. Il faudra donc de nouveaux moyens pour la police et la gendarmerie, comme les organisations professionnelles de la police n’ont pas manqué de nous le signaler.

Enfin, madame la ministre, il faudra à l’évidence faire œuvre de prévention. La sanction est indispensable, mais la prévention est utile.

Nous ne manquions pas d’idées – vous nous connaissez, madame la ministre – pour déposer des amendements. Nous aimons le faire ; c’est un peu notre travail. Pourtant, nous avons réfréné notre ardeur.