Mme Céline Brulin. Peu de chance qu’ils aient le temps d’échanger avec les parents à la grille de l’école ou d’assumer les tâches multiples qui contribuent à la réussite des enfants dans des établissements XXL ou multi-sites.

Mais surtout, au prétexte d’un vague intérêt pédagogique, on pourrait rationaliser, mutualiser, regrouper les écoles avec des conséquences graves : de gros établissements éloignés des familles portant le coup de grâce aux écoles rurales.

Les fermetures de classes, injustifiées, qui se multiplient dans nos territoires et conduisent à des effectifs surchargés ne suffisent-elles donc plus ? Vous faut-il passer à la vitesse supérieure ? Ce n’est pas ce que veulent nos concitoyens !

Faut-il que vous soyez sourd pour ne pas entendre la demande de proximité qui s’exprime comme jamais dans le pays, grand débat ou pas ?

Monsieur le ministre, ma question est donc simple : renoncerez-vous à la création de ces établissements publics des savoirs fondamentaux, qui n’ont d’ailleurs fait l’objet d’aucune concertation ni avec la communauté éducative ni avec les associations de maires, pourtant concernées au premier chef ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain. – M. Joël Labbé applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Céline Brulin, je vous remercie de votre question, qui me donne l’occasion d’apporter quelques éléments de clarification et peut-être de vous rassurer.

Mme Laurence Cohen. Ça va être difficile…

M. Martial Bourquin. Ne vous exprimez pas ainsi, monsieur le ministre !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Votre question comporte un certain nombre d’éléments qui ne sont pas exacts. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Tout d’abord, permettez-moi de vous livrer les chiffres, de la mobilisation puisque je viens de les recevoir : elle s’élève à 7,8 % en moyenne dans le premier et le second degrés, et à 14,8 % dans le premier degré, soit dix points de moins que la grève du 25 mars dernier. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. Rachid Temal. Et alors ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je prends bien évidemment cette mobilisation au sérieux. Néanmoins, le débat d’idées doit se faire autour de choses réelles !

Je reviendrai sur la création d’établissements publics des savoirs fondamentaux. Il s’agit d’un point parmi d’autres de la loi. Vous ne devez pas ignorer que cette loi a une dimension sociale très accentuée (Murmures sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.), avec des mesures que votre parti politique soutient depuis très longtemps sans jamais avoir pu les mettre en œuvre : je pense à l’instruction obligatoire à trois ans. En faisant même un peu d’archéologie politique, on s’aperçoit qu’après la guerre votre parti était assez favorable à l’idée d’une école permettant de mieux lier le primaire et le collège.

Je l’ai souligné, la mise en place d’un établissement public des savoirs fondamentaux n’a rien d’obligatoire. Il s’agit d’une option. Elle nécessitera l’accord non seulement du conseil des écoles – c’est-à-dire des principaux intéressés – et du collège, mais aussi des élus locaux. J’aurai l’occasion de le redire devant vous en mai prochain, quand la Haute Assemblée examinera ce texte.

Vous me dites que cette disposition n’a fait l’objet d’aucune discussion en amont. Or cela fait des dizaines d’années qu’elle est dans le débat public. Je m’étonne aussi que l’on me reproche de jouer le jeu du débat parlementaire : nous avons pris un amendement de l’Assemblée nationale, nous en prendrons certainement d’autres du Sénat. Nous améliorerons ainsi certainement le texte et j’imagine mal que vous puissiez nous le reprocher.

Je voudrais enfin insister sur la dimension sociale de ce projet de loi. Cette mesure, dont je suis prêt à discuter, est faite non pas pour abîmer les écoles rurales ni affaiblir les directeurs, mais pour les renforcer et les unes et les autres.

M. le président. Il faut conclure !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. L’objectif d’élévation du niveau général et de justice sociale est au cœur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Olivier Cadic applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.

Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, vous venez de lancer un appel à la mobilisation, je pense qu’il sera entendu ! (Marques dapprobations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain – Protestations sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. Martial Bourquin. Elle a raison !

Mme Céline Brulin. Nous avons l’expérience sur le terrain de volontariat qui n’a de volontariat que le nom, puisqu’il n’est pas rare qu’une DETR soit attribuée moyennant une fusion d’écoles ou un regroupement.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Céline Brulin. Nous ne croirons que ce que nous verrons : attendons le travail du Sénat ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

morts dans la rue

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Yannick Vaugrenard. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mardi dernier, le 2 avril, un hommage était rendu à Paris aux morts de la rue. Chez nous, en France, en 2018, 566 sans-domicile sont morts dans la rue. Ils étaient 511 l’année précédente.

Ils avaient en moyenne 48 ans ; treize d’entre eux étaient mineurs, dont cinq avaient moins de 5 ans, deux entre 5 et 9 ans et six entre 15 et 18 ans.

Ils sont morts, trop souvent dans l’indifférence, sur la voie publique, dans des abris de fortune – parking, cage d’escalier, cabane de chantier… –, parfois dans un lieu de soins ou une structure d’hébergement.

Ils ne font que trop rarement la une de l’actualité, mais c’est la cruelle réalité d’aujourd’hui, dans notre France, pays des droits de l’homme ou, comme Robert Badinter le précisait, « plutôt la France de la Déclaration des droits de l’homme ».

La responsabilité est collective. Elle perdure depuis déjà de trop longues années. Et ce qu’il y a de scandaleux dans le scandale, c’est qu’on s’y habitue.

Madame la ministre, un véritable plan d’extrême urgence s’avère indispensable pour ne pas avoir à constater, dans un an, la triste réalité des chiffres de 2018.

Permettez-moi, mes chers collègues, de m’adresser à nous tous également. Notre Haute Assemblée peut aussi avoir la noble ambition d’être le porte-voix de ces sans-voix. C’est une ambition à porter, un défi à relever.

À ce moment de mon propos, je veux remercier le travail remarquable de l’ensemble des associations caritatives et humanitaires pour leur attention scrupuleuse et leur indispensable action. Sans elles, notre pays connaîtrait un véritable raz-de-marée de la misère.

Notre illustre prédécesseur Victor Hugo écrivait : « L’homme est fait non pas pour traîner des chaînes, mais pour ouvrir des ailes. » Brisons, mes chers collègues, les chaînes de l’indifférence et écoutons respectueusement le silence de ces 566 sans-abris qui nous ont quittés l’an passé. (Applaudissements prolongés sur lensemble des travées.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de la ville et du logement.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Monsieur le sénateur, je voudrais tout d’abord saluer vos propos. La rue tue : elle tue l’hiver et elle tue l’été – elle tue peut-être même davantage en été.

Comme vous l’avez souligné, cette situation dure depuis de nombreuses années dans notre pays. Au moment où je vous parle, des milliers de personnes dorment dans la rue. (Exclamations sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. Julien Denormandie, ministre. Nous nous sommes certainement beaucoup trop habitués à voir des femmes et des enfants y dormir.

Que faisons-nous ? Nous agissons avec beaucoup d’humilité et de détermination. Nous avons ouvert, depuis mai 2017, plus de 15 000 places d’hébergement d’urgence supplémentaires.

Aujourd’hui, le dispositif qui se trouve sous ma responsabilité est l’équivalent de la ville du Mans ou de celle de Brest. Et pourtant, des personnes sont encore à la rue. Il faut leur permettre de sortir durablement de la pauvreté.

Tel est le sens de la politique du Logement d’abord que nous avons mise en place. L’année dernière, elle nous a permis, avec l’aide de la Fondation Abbé Pierre, de faire sortir 70 000 personnes de la rue, d’abris de fortune ou de logements qui n’étaient pas dignes – 70 000 !

Il faut continuer avec énormément de détermination. Victor Hugo écrivait aussi, dans une de ses correspondances : « Pour moi, l’idée de nation se dissout dans l’idée d’humanité. » La grandeur d’une nation se mesure à cette humanité, à cette solidarité qu’elle est capable d’octroyer aux plus fragiles.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que nous continuerons d’agir non seulement avec beaucoup de force et d’humilité, mais surtout avec détermination face au sans-abrisme. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe Union Centriste.)

taxe d’habitation

M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Daniel Laurent. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, d’ici à la fin du quinquennat, plus personne ne paiera la taxe d’habitation, sans augmentation d’impôt, a martelé le Président de la République.

Depuis cette annonce, non concertée, les élus attendent vos propositions, le dégrèvement étant, pour l’heure, financé par du déficit et, donc, par de la dette.

En octobre dernier, on « balançait » son maire avec mépris. Quelques semaines plus tard, les élus de proximité étaient devenus le rempart de notre démocratie, un pilier sur lequel le Gouvernement souhaitait s’appuyer.

Alors que les communes votent aujourd’hui leur budget, et à moins d’un an des municipales, les élus ont besoin de lisibilité, de stabilité et de confiance sur l’évolution de leurs ressources pour programmer leurs projets.

La chose est d’autant moins aisée que les annonces ont précédé la réflexion sur la fiscalité et sur le financement des collectivités et que, en novembre dernier, la fronde de nos concitoyens a conduit le Gouvernement à prendre des mesures d’urgence d’un montant de 10 milliards d’euros – sans compter celles à venir –, obérant quelque peu vos projections financières – nous savons ce qu’il advint de la fiscalité écologique qui devait venir au secours du financement du dégrèvement…

Le ministre de l’action et des comptes publics a indiqué à l’Assemblée nationale que la suppression de la taxe habitation pour tous était confirmée, hors résidences secondaires. Quid des logements vacants et des bases locatives ?

Il a également souligné que la taxe serait compensée à 100 %, mais sans dire comment – dégrèvement, compensation, remplacement… ? Tout cela est bien flou.

Il a enfin déclaré qu’elle le serait « sans doute » dans la loi de finances pour 2020. Encore une fois, c’est flou…

En revanche, ce qui est clair, c’est que le coût pour l’État de l’ensemble des dégrèvements, à compter de 2020, devrait s’élever à plus 20 milliards d’euros par an.

Ma question est simple : comment envisagez-vous de financer votre réforme, dans le respect de la libre administration des collectivités, aucune de vos hypothèses n’ayant jusqu’alors tenu la corde ?

Pour conclure, monsieur le Premier ministre, je ferai miens les propos de notre président, Gérard Larcher : « On ne redressera pas notre pays sans les élus et les territoires. » Ne l’oubliez pas ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Je vous remercie, monsieur le sénateur Daniel Laurent, d’évoquer le sujet important de la réforme de la taxe d’habitation, annoncée par le Président de la République alors qu’il était encore candidat.

La suppression de cette taxe, qui constitue une ressource substantielle pour les collectivités, permettra de rendre une part tout aussi substantielle de pouvoir d’achat à l’ensemble des contribuables français.

Je vous confirme que, d’ici à 2022, nous souhaitons effectivement supprimer la taxe d’habitation pour l’ensemble des résidences principales, et non pour les résidences secondaires, comme nous l’avons dit depuis le début.

Nous veillerons à ce que l’intégralité des recettes perçues par les collectivités, communes et intercommunalités soit compensée.

Je veux aussi apporter une précision quant au calendrier de mise en œuvre de cette réforme.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. L’intensité des concertations, voire parfois les divergences d’approche de telle ou telle strate de collectivités territoriales sur le remplacement de la taxe d’habitation, nous amèneront, Jacqueline Gourault, Sébastien Lecornu, Gérald Darmanin et moi-même, à rouvrir prochainement une concertation avec les associations d’élus, les représentants et les parlementaires.

Dans l’idéal, nous aurions souhaité discuter de cette réforme dans le cadre d’un projet de loi de finances rectificative, à l’été 2019. En réalité, eu égard à l’intensité de ces relations, nous devons nous montrer plus raisonnables. Je pense que nous traiterons de cette question lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2020. Ainsi, l’ensemble des candidats et des candidates aux élections municipales sauront dans quel cadre financier inscrire leur action et élaborer leurs programmes.

Il s’agit d’une réforme importante, monsieur le sénateur, dont les enjeux sont majeurs. Nous travaillerons à la compensation des recettes pour les collectivités, sans créer d’impôts nouveaux, en dégageant les économies nécessaires.

En cela, nous sommes fidèles à l’engagement du Président de la République de donner aux communes, aux intercommunalités et, plus largement, à toutes les collectivités territoriales, des ressources justes et pérennes ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)

Mme Sophie Primas. Chiche !

affectation des fonctionnaires ultramarins

M. le président. La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Joël Labbé applaudit également.)

Mme Nassimah Dindar. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics, plus particulièrement chargé de la fonction publique.

En 2018, j’alertais par courrier M le ministre de l’intérieur sur la non-application du critère des centres d’intérêt matériels et moraux, dits CIMM, dans les règles de mutation de la police nationale.

Le 5 février dernier, je recevais une réponse m’indiquant qu’il avait été « demandé au préfet, directeur général de la police nationale, de faire procéder à un examen attentif de ma demande ».

Le Conseil d’État a été, semble-t-il, plus prompt que les services de l’intérieur en apportant une réponse définitive à ma question. Dans un arrêt du 18 mars dernier, il donne raison à un fonctionnaire du corps de la police nationale qui contestait la circulaire du ministre de l’intérieur sur les mouvements de mutation des agents du corps d’encadrement et d’application de la police nationale.

Cet arrêt est sans ambiguïté : dès l’application de la loi, l’administration doit tenir compte des CIMM dans l’examen des demandes de mutation.

Monsieur le secrétaire d’État, cet arrêt du Conseil d’État s’applique à l’ensemble de la fonction publique, dans l’ensemble des territoires ultramarins, où la non-prise en compte des CIMM est quasi généralisée.

Nous, parlementaires, députés et sénateurs, sommes régulièrement sollicités par des fonctionnaires ultramarins considérant que leur demande d’affectation dans leur territoire d’origine a été injustement refusée, qu’il s’agisse de la police nationale, de l’administration pénitentiaire ou de l’éducation nationale.

Aussi, je vous demande si les décisions d’affectation des fonctionnaires ultramarins pour l’année 2019 vont bien être revues par l’ensemble des administrations en prenant en compte l’arrêt du Conseil d’État du 18 mars dernier. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Joël Labbé applaudit également)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Madame la sénatrice, votre question porte sur les centres d’intérêts matériels et moraux et, plus précisément, sur la priorité légale d’affectation dont bénéficient les fonctionnaires d’origine ultramarine dès lors qu’ils peuvent justifier de ce centre d’intérêt matériel et moral en outre-mer.

Il s’agit d’une notion récente : jusqu’en 2017, son application était extrêmement disparate, voire inexistante dans un certain nombre de corps. Depuis la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, dite loi ÉROM, cette disposition a une valeur légale et s’applique à tous les fonctionnaires, quel que soit leur corps, quel que soit leur établissement d’origine et quelle que soit leur catégorie hiérarchique. Cette disposition législative a vocation à s’appliquer absolument partout.

Le Premier ministre s’étant engagé, en septembre 2018, à procéder à une évaluation de ce dispositif, nous avons pu vérifier et observer un certain nombre de situations.

À ce stade, 11 % du volume total des demandes de mutation était accompagné de la demande de reconnaissance d’un centre d’intérêt matériel et moral.

En 2018, 25 % des mutations vers les territoires d’outre-mer ont été effectuées en application de cette priorité légale d’affectation, liée à la justification d’un CIMM.

Enfin, 75 % des demandes de mutation vers les outre-mer au titre de cette justification ont été acceptées, à savoir 734 dossiers sur 971.

L’arrêt du Conseil d’État du 18 mars dernier, que vous avez rappelé, a souligné que cette disposition de la loi ÉROM était d’application immédiate et qu’elle concernait l’intégralité des corps.

L’ensemble des ministres et l’ensemble des responsables d’administration veilleront à ce que cette disposition soit parfaitement respectée.

Nous avons à vérifier cette application, mais nous avons aussi à avoir en tête que les critères qui permettent de justifier d’un CIMM sont arrêtés par la jurisprudence. Peut-être devrons-nous y travailler.

Au-delà des mutations qui permettent le retour vers les territoires ultramarins, nous travaillons aussi à la mise en place de concours nationaux à affectation locale, de manière à rendre possible l’adaptation des politiques de recrutement aux besoins des territoires. Prochainement, un décret sera soumis à la concertation, avant de passer en Conseil d’État. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour la réplique.

Mme Nassimah Dindar. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Toutefois, vous ne m’avez pas donné entière satisfaction.

Comme vous le savez, la loi ÉROM date de 2017. Les fonctionnaires qui ont travaillé un certain nombre d’années sur le territoire hexagonal demandent souvent à se rapprocher d’un membre de leur famille, parfois vieillissant.

Dans d’autres cas, ils sont eux-mêmes en grande difficulté psychologique,…

M. le président. Il faut conclure !

Mme Nassimah Dindar. … voire en arrêt maladie.

Je vous demande de veiller à l’application de cette disposition au nom de tous les fonctionnaires ultramarins ayant fait une demande de mutation cette année. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – Mme Pascale Gruny et M. Alain Joyandet applaudissent également.)

ehpad

M. le président. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. Guillaume Arnell. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Madame la ministre, je regrette d’avoir à vous poser la même question que ma collègue, mais il me semblait important, au travers de ce choix, d’exprimer aussi la solidarité des outre-mer. Vous pourrez ainsi nous apporter des compléments à votre précédente réponse.

Le week-end dernier, non loin de Toulouse, une vingtaine de résidents de l’Ehpad La Chêneraie auraient été victimes d’une grave intoxication alimentaire : 17 d’entre eux ont été hospitalisés, et 5 ont perdu la vie.

Au-delà de la colère légitime des familles et des proches, nous ne pouvons rester insensibles à ce drame, comme s’il s’agissait d’un simple fait divers.

Madame la ministre, vous êtes à la tête d’un grand ministère, avec d’énormes responsabilités, et vous avez notamment la charge de protéger les publics vulnérables.

Nous ne mettons nullement en cause votre implication au quotidien pour remplir au mieux vos missions : vous le faites avec conviction, confiance et rigueur. Mais un tel drame interroge forcément l’opinion publique et les parlementaires, car nous sommes nombreux à compter un ou plusieurs Ehpad dans nos territoires.

Avec toutes les réserves d’usage, une enquête étant en cours, pouvez-vous nous éclairer sur l’état d’avancement des investigations ? D’après les dernières informations parues dans la presse aujourd’hui, les personnes seraient pour la plupart décédées par étouffement consécutif aux vomissements.

Par ailleurs, quelles actions le Gouvernement envisage-t-il pour rassurer les parents et les pensionnaires en Ehpad afin de garantir une meilleure sécurité et une meilleure surveillance de ces résidents ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Guillaume Arnell, vous avez bien évidemment raison : il nous faut faire toute la lumière sur cette affaire pour en tirer les leçons et garantir à nos concitoyens que les personnes âgées, et plus généralement les personnes vulnérables, placées dans le secteur médico-social bénéficient de toutes les garanties nécessaires en matière de chaîne alimentaire.

Je tiens à rappeler l’engagement du Gouvernement sur un grand plan dédié à la prise en charge des personnes âgées et de la dépendance, que nous proposons de traduire par une loi d’ici à la fin de l’année.

En ce qui concerne l’Ehpad La Chêneraie, que j’ai eu l’occasion de visiter mardi, l’enquête nous distille au fur et à mesure un certain nombre d’informations. Tant qu’elle ne sera pas close, je ne pourrai commenter les propos du procureur.

Nous n’avons pas encore la garantie de disposer de la totalité des informations nécessaires pour décider, le cas échéant, d’éventuelles mesures correctives.

Un travail est en cours sur la chaîne alimentaire. La Haute Autorité de santé a déjà publié des recommandations, qui doivent être mises en œuvre dans tous les Ehpad et dans l’ensemble du secteur médico-social.

Ces recommandations, qui sont en train d’être renouvelées, servent normalement au référentiel de visite des établissements, lesquels font tous l’objet de contrôles réguliers par des organismes certifiés.

L’Ehpad La Chêneraie avait ainsi été contrôlé le 19 février dernier, sans qu’aucun dysfonctionnement soit relevé. Toutefois, cela ne signifie pas dire qu’il n’y en ait pas eu le jour du drame.

En ce qui concerne le grand plan de la dépendance, il est évident que nous devons mettre un accent particulier – nous l’avons dit – sur les métiers, sur le nombre d’aidants auprès des personnes âgées, mais également sur les problèmes de bientraitance.

Le rapport de M. Denis Piveteau souligne la nécessité de mieux former les professionnels et de leur donner des outils pour être bien-traitants auprès des plus vulnérables.

Nous sommes totalement engagés pour travailler à une feuille de route qui s’inscrira dans la loi. C’est une nécessité. Nous devons rassurer et les Français et tous les proches des personnes aujourd’hui hébergées dans ces établissements. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour la réplique.

M. Guillaume Arnell. Je vous remercie de toutes ces précisions, madame la ministre. S’il est vrai que le risque zéro n’existe pas, nous devons tout faire pour éviter de tels drames et, surtout, tout mettre en œuvre pour que les pensionnaires des Ehpad soient encore mieux accompagnés et encadrés. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – Mme Françoise Ramond et M. Marc Laménie applaudissent également.)

déserts médicaux

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Jean-Luc Fichet. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Madame la ministre, la France réalise des efforts importants pour assurer une formation d’excellence à nos futurs médecins et ainsi garantir la qualité des soins dispensés à nos compatriotes.

Ce sont les établissements d’enseignement supérieur publics qui réalisent logiquement cette formation. Elle est donc légitimement gratuite.

Le coût moyen de formation d’un étudiant est estimé à environ 150 000 euros sur toute la durée de son cursus. L’État et les collectivités investissent ensuite massivement pour inciter les médecins à s’installer dans les territoires qui en ont le plus besoin.

L’an passé, je vous avais demandé un état des lieux de l’ensemble de ces dispositions et de leurs coûts pour la puissance publique, sans jamais avoir obtenu de réponse.

Madame la ministre, comment expliquer à nos concitoyens et aux élus locaux que nous n’arrivions pas, avec autant d’investissement, à doter les territoires ruraux, mais aussi périurbains sensibles, de médecins en nombre suffisant ?

À Morlaix, à une heure du CHU de Brest, comment comprendre que le service de cardiologie de l’hôpital public ait fermé ses portes, faute de cardiologue, alors que la clinique privée de la ville a opportunément développé son offre de consultations cardiologiques ?

Comment expliquer qu’on laisse s’installer des médecins dans des zones déjà sur-dotées sans utiliser le levier du déconventionnement ? Comment expliquer que, malgré toutes les mesures incitatives, nous n’arrivions pas à les faire s’installer là où il y a un réel besoin ?

Madame la ministre, ma question est simple : allez-vous rendre public le coût de l’ensemble des dispositifs d’aides à l’installation des médecins ? Allez-vous décider de déconventionner les médecins qui s’installeraient en zones denses et prendre des mesures coercitives à leur encontre pour qu’ils s’installent dans les zones sous-dotées ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Loïc Hervé applaudit également.)