M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour la réplique.

Mme Agnès Canayer. L’objectif est en effet la préservation de l’environnement des communes littorales –nous sommes tous d’accord là-dessus. Mais il importe aujourd’hui de prendre en compte certaines spécificités et l’impossibilité, pour les agriculteurs, qui jouent un rôle important dans la protection de l’environnement et de notre littoral – les prés consacrés à l’élevage permettent par exemple de lutter contre le ruissellement –, de pratiquer des activités pourtant essentielles – le confinement l’a montré –, telles que la vente directe, au motif qu’elles n’entrent pas dans la catégorie des activités « nécessaires », malgré leur lien fort avec l’agriculture.

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Agnès Canayer. Nous vous demandons donc, madame la ministre, de prendre en compte ces spécificités locales et l’avis des élus locaux.

inclusion numérique

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, auteur de la question n° 1228, transmise à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

M. Jean-Marie Mizzon. La Haute Assemblée, qui a particulièrement à cœur la défense des territoires, vient de se saisir d’une question d’importance pour ces derniers : celle de l’inclusion numérique, décrétée urgence nationale et voulue pour l’ensemble du pays.

Le Sénat a constitué, le 13 mai dernier, une mission d’information, que j’ai l’honneur de présider, sur la lutte contre l’illectronisme, handicap invisible s’il en est et assez répandu en France à l’aube du XXIe siècle. De fait, selon les chiffres du syndicat de la presse sociale, 12 % des Français, c’est-à-dire près de 6 millions de personnes, ne « surfent » jamais sur la Toile, et 23 % de nos concitoyens déclarent se sentir « mal à l’aise avec le numérique ».

Contre toute attente, les personnes âgées ne sont pas les seules concernées par cet illectronisme numérique. Toutes les classes d’âge, tous les milieux sociaux et, surtout, toutes les régions, urbaines comme rurales, sont concernés.

Aussi, et parce que cette situation peut conduire nombre de Français à renoncer à leurs droits ou, pis encore, provoquer une exclusion sociale totalement inadmissible dans notre République, il convient de veiller à un juste équilibre dans les moyens mobilisés pour remédier à ce problème.

Pour l’heure, en attendant que l’accès de tous aux sites web et l’utilisation par tous d’internet deviennent une réalité, et parce que les services publics, de plus en plus dématérialisés, doivent demeurer accessibles par tous les moyens à tous les Français, en particulier dans les zones rurales et les petites villes, est-il prévu, madame la ministre, que l’indulgence prévale quant à certaines démarches administratives obligatoires ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville. Monsieur le sénateur, 14 millions de Français sont éloignés du numérique. Comme vous l’avez indiqué à juste titre, les personnes âgées sont loin d’être les seules concernées.

Pour ces Français, la fracture est d’abord territoriale : 50 % des non-internautes résident dans des communes de moins de 20 000 habitants. Les niveaux d’études et de revenus sont également des facteurs déterminants d’inégalité. Le confinement a mis en lumière l’urgence qu’il y a à agir.

En 2018, le Gouvernement a lancé une stratégie nationale pour un numérique inclusif, après une concertation avec les associations de collectivités territoriales et les grands opérateurs de service public. L’objectif est, premièrement, de consolider une offre de médiation numérique de proximité pour tous nos concitoyens, afin qu’ils puissent être accompagnés partout dans la réalisation de leurs démarches en ligne, et, deuxièmement, de permettre à chacun d’acquérir des compétences numériques de base utiles pour apprendre, échanger, trouver un nouveau travail.

L’inclusion numérique est désormais une priorité gouvernementale, au nom de l’égalité des territoires et des citoyens.

Deux dispositifs de la stratégie nationale pour un numérique inclusif concourent à apporter une solution au problème que vous soulevez.

L’une des solutions qui ont émergé est le pass numérique, qui permet de financer des ateliers de médiation numérique contribuant à l’autonomie des publics éloignés de l’outil numérique.

Après avoir mobilisé 10 millions d’euros en 2019, l’Agence nationale de la cohésion des territoires mobilisera 30 millions d’euros, avec le concours du plan d’investissement dans les compétences et celui des collectivités locales, pour favoriser le déploiement du pass numérique.

Autre dispositif sur lequel le Gouvernement travaille depuis plusieurs mois : le service numérique Aidants connect. Cette solution a été développée au sein de l’incubateur des territoires de la nouvelle Agence nationale de la cohésion des territoires.

Les aidants numériques ont besoin d’être sécurisés juridiquement dans l’accompagnement de publics en difficulté, notamment lorsqu’ils réalisent des démarches administratives en ligne pour le compte d’usagers. À cette fin, le dispositif Aidants connect permet à un aidant professionnel de réaliser, via une connexion sécurisée, des démarches administratives en ligne à la place d’une personne qui ne parvient pas à les faire seule. Ce service permettra notamment aux agents des 544 maisons France services, aux secrétaires de mairie ou aux agents publics d’accueil d’apporter une réponse et un suivi sécurisés aux personnes éloignées du numérique.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.

M. Jean-Marie Mizzon. Madame la ministre, vous dites que la lutte contre l’illectronisme est une priorité.

J’observe que les acteurs publics multiplient les documents de planification, que les schémas succèdent aux schémas, mais que sur le terrain, ma foi, nombre d’initiatives manquent singulièrement de coordination, de professionnalisme et d’ambitions.

Les acteurs se sentent délaissés. Il faudrait des moyens appropriés pour former 13 à 14 millions de personnes au numérique. Cela ne se fait certes pas d’un seul coup de baguette magique, mais il faut des moyens dédiés.

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Jean-Marie Mizzon. Or rien n’est fait en ce sens.

montant différencié de la dotation globale de fonctionnement par habitant

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, auteur de la question n° 1239, transmise à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

M. Olivier Paccaud. « Liberté, égalité, fraternité », telle est la devise de la République, une et indivisible. Or, dans la réalité, cet idéal reste verbal et s’évanouit lors de la répartition des dotations de l’État entre les villes et les campagnes.

Ainsi, lorsqu’une commune de moins de 500 habitants bénéficie d’une dotation globale de fonctionnement, ou DGF, calculée sur une base personnelle de 64,46 euros, une ville dont la population dépasse 200 000 habitants reçoit 128,93 euros par personne. Est-ce juste ?

Cette différence, une véritable iniquité, est justifiée par vos services au nom des « charges de centralité » que doivent assumer les territoires plus peuplés, qui accueillent plus de services administratifs et commerciaux.

Certes, les ruraux viennent chercher à la ville les services qu’ils n’ont pas, ou surtout plus, chez eux. Mais n’oublions pas que la loi du nombre aboutit pratiquement toujours à des coûts moyens d’investissement bien inférieurs en zone urbaine.

Raccorder les 150 logements de l’immeuble d’un quartier au réseau d’assainissement d’une grande ville se révèle ainsi souvent moins onéreux qu’installer l’assainissement dans un hameau de 10 maisons. Cette problématique est d’ailleurs valable pour tous les réseaux : eau, électricité, téléphonie, fibre. Péréquation rime ainsi avec illusion en matière de soutien d’État aux territoires.

Si les habitants des campagnes sont égaux devant l’impôt avec les urbains, ils ne le sont pas en termes de retour fiscal et d’offre de services. Les ruraux sont donc de bons contribuables, mais des citoyens de seconde zone. Au pays de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, est-ce cohérent et acceptable ?

En respectant la logique de votre administration, ne faudrait-il pas que l’impôt sur le revenu varie en fonction du lieu de résidence, puisque les habitants en milieu rural utilisent bien moins de services publics de proximité, faute de disponibilité ?

Au nom de la solidarité nationale et de la justice territoriale, quand le Gouvernement révisera-t-il son algorithme, en apportant plus d’équité et de bon sens dans le calcul de la dotation globale de fonctionnement ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur la question de l’emploi d’un coefficient variant de 1 à 2 au sein de la dotation forfaitaire des communes.

La question consiste à déterminer comment rendre compte, objectivement, des charges supportées par une commune dans son attribution de DGF. L’analyse économétrique conclut que les charges croissent avec la population. C’est ce qui explique pourquoi, au sein de la dotation forfaitaire, le gain d’un habitant conduit à un gain de dotation forfaitaire variant de 64 euros à 129 euros.

Cet écart n’est pas apparu par hasard : il est fondé sur des travaux scientifiques conduits par des universitaires et plusieurs fois actualisés et confirmés. Le Gouvernement a publié un rapport détaillé sur la question l’année dernière, rappelant l’ensemble de ces analyses.

Pour vous en convaincre davantage, monsieur le sénateur, je vais prendre deux exemples, qui, j’en suis certaine, vous parleront.

Est-ce que l’on peut dire que, par habitant, le niveau des charges contraintes supportées par la commune de Compiègne, soit un peu plus de 41 000 habitants, est le même que celui de communes voisines de 500 ou de 1 000 habitants ? Objectivement, la réponse est non, car il n’est tout simplement pas imaginable de ne pas prendre en compte les coûts, réels et objectifs, induits par la démographie dans la répartition des concours financiers de l’État.

Par ailleurs, ce coefficient n’est qu’un critère parmi d’autres. Vous avez dû consulter la répartition de la DGF 2020 pour un certain nombre de communes de votre département de l’Oise. Vous avez dû constater que le niveau de la DGF totale ne varie pas du simple au double selon la population d’une commune, preuve que bien d’autres critères sont pris en compte et tendent à assurer, concrètement, une répartition équitable des concours de l’État. C’est le cas, par exemple, dans la dotation de solidarité rurale, la DSR.

Depuis 2017, le montant global de la DGF a été stabilisé, et la DSR a crû de 90 millions d’euros par an chaque année. De même, la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, a atteint depuis 2018 un niveau de plus de 1 milliard d’euros par an, soit un seuil jamais atteint par le passé.

Enfin, nous avons lancé l’agenda rural, issu d’un travail de terrain, et ses nombreuses mesures en faveur de la ruralité et des habitants comme de ses élus.

Au regard de ces éléments, vous voyez bien, monsieur le sénateur, que le Gouvernement ne se désintéresse pas du tout de la question de la ruralité.

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour la réplique.

M. Olivier Paccaud. Certes, le Gouvernement ne se désintéresse pas de la ruralité, j’en suis conscient. Néanmoins ce mode de calcul ne convient pas aux ruraux.

Il existe une véritable ségrégation – je pèse mes mots –, qui s’illustre par ce chiffre qui va de 1 à 2. Ce n’est pas la DSR qui le comblera, même si les maires qui bénéficient d’un peu de DETR ou DSR en sont satisfaits. Il convient de faire des calculs un peu plus justes !

conséquences du brexit sur les retraites et les contributions sociales des français résidant au royaume-uni

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteure de la question n° 1140, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le ministre, depuis l’annonce du retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne, nos concitoyens vivant au Royaume-Uni s’inquiètent de la situation fiscale, alors que la période de transition durera encore jusqu’au 31 décembre 2020.

Lors de son audition au Sénat, Michel Barnier, chef de la Task Force pour la finalisation de l’accord, n’a rien caché des difficultés rencontrées pour arriver à un accord global avec le Royaume-Uni. Ma question a trait à la situation fiscale de nos compatriotes.

Au début de l’année 2020, lors d’un déplacement en Écosse, nos compatriotes ont abordé les sujets qui les préoccupent au cours d’une réunion publique. La question des retraites pour ceux qui cotisent au Royaume-Uni a été prégnante. Ils craignent, en effet, que leurs trimestres ne soient plus reconnus suivant l’accord négocié. Il me paraît important, alors que les négociations sont en cours, d’attirer votre attention et celle de notre négociateur sur ce point. Quelle est votre mobilisation ?

Au lendemain de la période de transition, les Français vivant au Royaume-Uni seront considérés comme résidant hors de l’espace économique européen. Seront-ils alors de nouveau assujettis au prélèvement de la contribution sociale généralisée, la CSG, et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la CRDS ?

Hors Union européenne, nos compatriotes ne bénéficient toujours pas de cette exonération malgré les nombreuses oppositions à la mise en place de cette mesure injuste. Je pense, notamment, à une pétition lancée à la fin de 2018 par les conseillers consulaires.

Ces Français continuent d’être soumis à ces cotisations sans bénéficier d’aucune couverture sociale, de retraite ou de chômage. Il s’agit d’une discrimination et d’une véritable injustice au regard du principe d’égalité devant l’impôt.

Il est donc urgent dès maintenant de penser l’après-Brexit. Pouvez-vous nous rassurer sur l’engagement du ministère sur ces deux points ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et de lattractivité. Madame la sénatrice Conway-Mouret, je vous remercie de cette question importante pour nos compatriotes résidant au Royaume-Uni. Vous pouvez d’ailleurs compter sur la mobilisation du ministère de l’Europe et des affaires étrangères pour les accompagner dans cette période chargée d’interrogations concernant le Brexit.

L’accord de retrait entre l’Union européenne et le Royaume-Uni assure un maintien des droits acquis par les assurés ayant exercé leur mobilité avant la fin de la période de transition – le 31 décembre 2020 –, en ce qui concerne la totalisation des périodes pour la retraite et l’exportation des pensions de retraite dans les deux sens. C’est-à-dire que, en vertu de l’accord de retrait, ces droits acquis avant la fin de la période de transition ne pourront être remis en cause.

En effet, les périodes d’activité des assurés français ayant travaillé au Royaume-Uni, réalisées avant la fin de la période de transition, seront prises en compte dans le cadre de l’ouverture et du calcul des droits à la retraite en France et au Royaume-Uni – même après la fin de la période de transition –, en application des règles de coordination de sécurité sociale des règlements européens qui continuent à s’appliquer.

Les retraites britanniques et françaises continueront également à être versées à l’assuré selon le principe de « l’exportabilité », comme le prévoient les règles de coordination de sécurité sociale des règlements européens.

Dès lors que l’assuré percevait déjà une pension avant la fin de la période de transition, celle-ci continuera à lui être versée dans son État de résidence. Ses soins de santé continueront à être pris en charge selon les règles de la coordination de sécurité sociale.

Ainsi, et même après la fin de la période de transition, la France continuera à exporter les pensions des retraités d’un régime français, quel que soit leur lieu de résidence.

S’agissant en revanche des personnes qui exercent leur mobilité entre le Royaume-Uni et la France après la période de transition, la situation demeure incertaine et dépendra de la négociation de la relation future entre l’Union européenne et le Royaume-Uni.

Vous le savez, des négociations sont en cours pour parvenir à un accord régissant cette relation après le 31 décembre 2020. Le mandat de négociation de l’Union européenne sur la relation future prévoit bien – c’est l’article 58 – que « le partenariat envisagé devrait traiter la question de la coordination en matière de sécurité sociale ». Les dispositions qui seront adoptées et les droits qui en découleront dépendront donc du résultat des négociations.

Nous devons nous préparer à la possibilité d’un no deal – il est important de l’avoir en tête – à l’issue de la période de transition. Dans cette hypothèse, le Gouvernement sera habilité à prendre par ordonnances des mesures nécessaires à la préservation de la situation des ressortissants britanniques résidant en France ou exerçant une activité, mais ces mesures seront soumises à une stricte réciprocité ; elles ne pourront donc être mises en œuvre que si les autorités britanniques assurent les mêmes droits aux ressortissants français au Royaume-Uni.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour la réplique.

Mme Hélène Conway-Mouret. Il est en effet très important de clarifier la situation de Français qui sont très inquiets, mais aussi, bien sûr, celle de tous les résidents britanniques sur notre sol.

Je regrette néanmoins que vous n’ayez pas abordé la deuxième partie de ma question, qui concernait la CSG et la CRDS. Les ressortissants français au Royaume-Uni s’interrogent très légitimement : seront-ils de nouveau assujettis à ces cotisations ?

Malheureusement ou heureusement pour les Français résidant hors de France, la Cour de justice de l’Union européenne a rendu un jugement en 2015, qui condamne la France sur l’imposition de ces cotisations. Il serait utile que le Gouvernement clarifie également ce point.

brexit et saisonniers britanniques

M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, auteure de la question n° 1256, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Mme Martine Berthet. Le département de la Savoie est très dépendant du tourisme, hiver comme été. Les citoyens britanniques représentent une large part des touristes de nos stations ; de même pour les salariés de même provenance qui accompagnent ces voyageurs et renforcent les équipes en place pour un accueil adéquat.

Les tour-opérateurs qui organisent ces voyages en France sont aujourd’hui inquiets, car à l’issue de la période transitoire le 31 décembre 2020 le Royaume-Uni quittera l’Union européenne. Les contours de cette sortie restent encore flous.

Deux cas de figure se présentent à eux : soit les saisonniers britanniques sont recrutés par une entité française avec un contrat de droit français avant le 3 décembre 2020, et ils ne savent pas si après cette date le contrat, même antérieur, sera toujours valable et si les saisonniers auront besoin d’une autorisation de travail pour terminer la saison sur le territoire national ; soit, dans l’hypothèse où la qualité de travailleur détaché est validée, même postérieurement au 31 décembre 2020 entre nos deux pays, ils ne savent pas non plus s’il sera nécessaire d’obtenir une autorisation de travail pour terminer ce contrat.

Par ailleurs, monsieur le ministre, même si ce point ne vous concerne pas directement, je souhaite profiter de cette question orale pour alerter le Gouvernement sur le fait qu’Eurostar a annoncé que ses trains ne rejoindraient plus les destinations de montagnes du département comme ils le faisaient de Londres vers Moûtiers, Aime-la-Plagne ou Bourg-Saint-Maurice pour déverser les flots de touristes britanniques au pied des stations de montagne les plus renommées au monde.

Une telle décision aurait un impact considérable non seulement sur le tourisme, mais aussi sur le bilan carbone de ces déplacements, la seule possibilité restant alors l’acheminement par avion jusqu’à l’aéroport de Chambéry-Voglans, puis par bus.

Ces contraintes constituent des freins à l’essor économique, voire à la reprise économique et à l’emploi dans les territoires de montagne et de notre pays tout entier. En effet, elles risquent de décourager de nombreux touristes, des tour-opérateurs et des travailleurs britanniques.

Aussi, j’aimerais, monsieur le ministre, que le Gouvernement apporte par ses réponses une meilleure visibilité à l’ensemble des entreprises de l’économie touristique de montagne, à leurs saisonniers et aux élus.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et de lattractivité. Je suis conscient de l’importance de la clientèle britannique pour notre industrie touristique, en particulier en Savoie, et du rôle des saisonniers britanniques pour l’accueil de ces touristes.

C’est pourquoi nous sommes très attentifs aux conséquences du retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne sur la filière tourisme en Savoie, qu’il s’agisse des conditions d’emploi des saisonniers britanniques, des conditions de séjour des touristes britanniques ou de la connectivité ferroviaire.

Sur ce dernier volet, j’ai constaté comme vous qu’Eurostar avait décidé de ne pas assurer le service à destination des Alpes cet hiver.

Il faut rappeler que la crise du covid-19 a eu un impact particulièrement fort sur Eurostar du fait de sa nature d’opérateur transfrontalier. L’incertitude liée à l’évolution de la situation sanitaire ne leur permet pas non plus d’envisager un retour rapide de la demande.

C’est dans ce contexte difficile qu’Eurostar a prévu un plan d’économies drastique, ainsi qu’une réduction de sa flotte, donc de son plan de transport, en se concentrant sur les principaux itinéraires. Avec Jean-Yves Le Drian et Jean-Baptiste Djebbari, je serai vigilant pour qu’Eurostar travaille avec les élus, les associations et la SNCF sur la connectivité de la destination Savoie. C’est fondamental, comme vous l’avez très justement rappelé.

S’agissant des conditions de séjour des touristes britanniques en France, l’accord de retrait, entré en vigueur le 1er février dernier, garantit les droits liés au séjour des ressortissants britanniques. Pendant la période de transition, qui devrait en principe s’achever le 31 décembre, le voyageur britannique doit être muni d’un passeport ou d’une carte nationale d’identité en cours de validité. Aucun visa n’est nécessaire.

S’agissant des conditions d’emploi des travailleurs saisonniers britanniques, pendant la période de transition, la réglementation européenne relative au détachement des travailleurs reste applicable. La possibilité de poursuivre les détachements en cours à l’issue de la période de transition dépendra de la conclusion d’un nouvel accord portant sur la relation future, faute de quoi ils prendront fin au 31 décembre 2020.

En l’absence d’accord à l’issue de la période de transition, nous serons tenus d’appliquer les dispositions de droit commun régissant les conditions dans lesquelles des ressortissants de pays tiers peuvent entrer ou séjourner dans l’Union européenne en tant que travailleurs saisonniers. C’est la directive de 2014 relative aux ressortissants britanniques.

Comme vous, je regrette cette incertitude, mais elle n’est que le reflet de celle, plus générale, pesant sur nos relations futures avec le Royaume-Uni. Il faut continuer de se préparer aux conséquences d’un éventuel no deal à la fin de 2020, car ce scénario ne peut être exclu. Je rappelle d’ailleurs qu’il affecterait bien plus le Royaume-Uni que les pays de l’Union européenne.

Le travail de préparation s’intensifie au niveau national et à l’échelon européen. Nous ne manquerons pas de revenir vers vous pour vous indiquer où en sont les négociations.

M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour la réplique.

Mme Martine Berthet. Je vous remercie de vos réponses, monsieur le ministre. Je vous rappelle cependant l’urgence de la situation, puisque les contrats de travail devaient être conclus au mois de décembre et les recrutements se faire dès le mois de septembre.

hausse du coût de la vie en guadeloupe et dans les outre-mer

M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, auteur de la question n° 1216, transmise à M. le ministre des outre-mer.

M. Dominique Théophile. La crise sanitaire et économique que nous traversons participe, partout en France, à l’augmentation des prix à la consommation. C’est vrai dans l’Hexagone. C’est particulièrement visible dans les outre-mer. Cette situation est évidemment difficile à accepter pour nos compatriotes ultramarins.

Tout d’abord, parce que la pauvreté et le chômage y sont plus élevés qu’ailleurs. En Guadeloupe, pour ne prendre que cet exemple, un tiers de la population – c’est-à-dire près de 135 000 personnes – vit au-dessous du seuil de pauvreté.

Ensuite, parce que les écarts de prix constatés avec l’Hexagone sont particulièrement importants, en raison de l’éloignement, bien sûr, et des frais de transport que la distance provoque, en raison aussi d’un manque criant de concurrence dans le secteur de la grande distribution.

Le code de commerce autorise pourtant le Gouvernement, en Guadeloupe et dans certains territoires d’outre-mer, à réglementer, voire à encadrer, le prix de vente de produits de première nécessité et de consommation courante.

L’article L. 410-2 du même code autorise d’ailleurs le Gouvernement à arrêter « des mesures temporaires motivées par une situation de crise, par des circonstances exceptionnelles ou par une calamité publique ».

Ma question, monsieur le ministre, est la suivante : quelles mesures entendez-vous prendre dans les outre-mer pour contenir rapidement une hausse des prix aux effets potentiellement dévastateurs ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur Dominique Théophile, je vous remercie de cette question, qui, une fois de plus, marque votre engagement personnel pour la Guadeloupe, mais aussi pour tous les territoires d’outre-mer.

Le sujet de la lutte contre la vie chère en outre-mer est un sujet d’engagement constant de l’État, qui a profondément rénové, ces dix dernières années, le cadre juridique pour disposer d’outils efficaces : avec les lois de régulation économique outre-mer en 2012 et la programmation relative à l’égalité réelle outre-mer en 2017.

Parmi les mesures en place, on peut souligner les accords de modération des prix, ou « bouclier qualité-prix », renforcé en 2020 par la création de trois catégories de produits assorties chacune d’un prix maximal, notamment pour les produits alimentaires, les produits d’hygiène et les produits pour la petite enfance.

On peut également souligner la création des observatoires des prix, des marges et des revenus, dont les moyens ont été doublés en 2019 à 600 000 euros et reconduits pour 2020. Des référents « vie chère » ont également été nommés au sein des directions des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte), pour assister les observatoires en 2020.

Enfin, il faut relever la nomination d’un délégué interministériel à la concurrence outre-mer en décembre 2018.

Pour parfaire le cadre juridique, un pouvoir d’injonction structurelle de l’Autorité de la concurrence a été créé. Il s’agit d’une avancée très attendue.

Il ne serait pas juste de dire que la lutte contre la vie chère a été mise entre parenthèses pendant la crise sanitaire. Plusieurs enquêtes d’observation des prix des fruits et légumes ont été menées par les Direccte sur les marchés de gros et de détail pendant le confinement. Aucune tension inflationniste particulière n’a été constatée.

Différents décrets ont été pris, afin de réglementer les prix des masques et les gels hydroalcooliques en métropole, dans les départements-régions d’outre-mer, les DROM, les trois Saintes et à Wallis-et-Futuna. De plus, les produits nécessaires à la lutte contre la covid-19 ont fait l’objet d’une exonération d’octroi de mer sanitaire.

Enfin, l’enjeu de la lutte contre la vie chère en outre-mer aura toute sa place dans le cadre du plan de relance économique, cela va sans dire. En effet, si le renforcement des mesures de contrôle doit être poursuivi, il est également essentiel d’accompagner la concurrence dans ces marchés et l’arrivée ou le développement de nouveaux acteurs économiques.

Le plan de relance comprendra différentes mesures de financement des entreprises. Je veillerai personnellement, avec le ministre de l’économie, des finances et de la relance, à ce qu’elles renforcent la production locale et la concurrence, qui, parce qu’elles sont parfois défaillantes dans ces territoires, conduisent à des prix très élevés. Les outils d’intervention financiers de Bpifrance devront notamment avoir cet objectif. Je pense que le e-commerce nous offre, à cet égard, des occasions qu’il faut accompagner.

En tout cas, monsieur le sénateur, c’est un sujet auquel j’associerai étroitement les parlementaires.