compte rendu intégral

Présidence de M. Georges Patient

vice-président

Secrétaires :

Mme Esther Benbassa,

Mme Corinne Imbert.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

amélioration de la prise en charge financière des appareils de communication alternative améliorée

M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, auteure de la question n° 1758, transmise à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.

Mme Jocelyne Guidez. J’attire l’attention de Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, sur le refus des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) de prendre en charge financièrement des outils de communication alternative améliorée (CAA) aidant les personnes touchées par des troubles de langage.

En effet, de nombreux enfants et adultes affectés de troubles complexes de communication n’ont pas accès à la CAA. Divers témoignages des besoins rapportés par des familles ou des enfants, voire des adultes, atteints du syndrome de Rett, par exemple, mettent en évidence le manque de moyens en matière de CAA. Ces derniers ne peuvent bénéficier que de deux séances d’une durée de quarante-cinq minutes d’orthophonie par semaine.

Les demandes des familles auprès des MDPH concernant cet outil de communication sont très souvent refusées par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Celle-ci s’appuie sur le fait que la CAA devrait être accompagnée par des professionnels lors des séances d’orthophonie.

L’enjeu est pourtant important. S’exprimer, pouvoir communiquer, c’est un droit. Plaider pour la CAA pour tous, c’est défendre le droit de communication pour tous.

Qu’ils soient enfants, adolescents ou adultes, les individus atteints de troubles du langage ont besoin d’un outil de communication pour exister, faire entendre leur voix et se faire comprendre.

N’importe qui d’entre nous peut potentiellement être un futur utilisateur de la CAA, du fait d’accidents, de maladies ou du vieillissement. Afin de construire une réelle société inclusive, il est urgent de changer cette situation, de faire bouger les lignes. Il est essentiel que les MDPH cessent de refuser le financement de la CAA, en invoquant des arguments totalement infondés qui ne tiennent compte ni des connaissances scientifiques récentes sur le mode d’apprentissage par la modélisation au quotidien ni de la nécessité de l’utilisation précoce des outils de communication.

Quelles mesures immédiates prévoyez-vous, madame la secrétaire d’État, afin de mettre fin à ces refus de prise en charge financière de la CAA par les MDPH, qui vont à l’encontre de la Convention internationale relative aux droits des personnes handicapées ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire dÉtat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice, je connais votre implication sur ces sujets. La technologie, c’est indéniable, doit être en effet au service de l’autonomie. L’amélioration de ces accès aux aides techniques est l’une des priorités de l’action du Gouvernement pour permettre le plein accès à l’autonomie des personnes.

Le dernier comité interministériel du handicap, qui s’est tenu sous l’égide du Premier ministre le 5 juillet dernier, a été l’occasion de rappeler les nombreuses avancées qui ont fait suite à la remise, à l’automne dernier, du rapport de Philippe Denormandie et Cécile Chevalier portant précisément sur l’accès à ces aides techniques et sur leur compensation.

Il s’agit d’assurer une meilleure information, de renforcer l’évaluation et l’accompagnement depuis la prescription jusqu’à l’utilisation des aides techniques, tout en réduisant le reste à charge des familles.

Quant à l’accès aux outils de CAA, sur lequel vous appelez mon attention, c’est un élément essentiel pour assurer l’autonomie et la qualité de vie des personnes entravées dans leur communication.

L’accès à ces aides à la communication s’effectue dans le cadre du volet aide technique de la prestation de compensation du handicap (PCH). La majorité des aides à la communication alternative sont ainsi financées à hauteur de 75 % de leur prix d’achat et peuvent être attribuées par les CDAPH au sein des maisons du handicap.

Il s’agit là d’une question d’équité territoriale car, en la matière, les inégalités sont encore très importantes. Nous devons donc apporter de nombreuses améliorations. C’est la raison pour laquelle, lors du comité interministériel du handicap, j’ai annoncé l’ambition de généraliser la démarche de CAA afin que chaque personne, quel que soit son handicap, son âge ou son lieu de vie, puisse bénéficier d’un moyen de communication.

Cette ambition se décline autour de plusieurs volets.

Pour permettre une meilleure identification des besoins, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), qui assure le renforcement de la formation dans les MDPH et les établissements médico-sociaux, diffusera à la fin de l’année un cahier pédagogique sur la communication des personnes, notamment pour les personnes polyhandicapées.

Pour permettre une meilleure appropriation du matériel, un travail sera engagé très prochainement afin que des pôles ressources soient déployés dans les territoires, en s’appuyant sur ce qui existe déjà pour d’autres aides techniques. Ces pôles permettront aux personnes handicapées et à leur entourage d’essayer des matériels et de bénéficier de temps d’apprentissage.

Enfin, pour réduire le reste à charge, nous travaillerons dès la rentrée de 2021 avec la CNSA, les professionnels des MDPH et les représentants des structures médico-sociales sur la révision des conditions de financement via la PCH.

Nous devons aussi changer les pratiques et passer de la possession à l’usage, en développant par exemple l’offre de location des aides techniques à la CAA, en complément de l’offre actuelle, très centrée sur la vente.

Vous l’aurez compris, ces travaux seront engagés dès septembre et je ne manquerai pas de vous tenir informée de la suite qui leur sera donnée.

M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour la réplique.

Mme Jocelyne Guidez. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. En effet, les inégalités sont aujourd’hui beaucoup trop nombreuses. Je connais bien le syndrome de Rett, mais – et vous avez raison – il faut aussi prendre en compte d’autres facteurs, comme le vieillissement.

Les limites et contraintes que rencontrent les personnes concernées sont diverses : un changement d’établissement entraînant une rupture dans l’apprentissage ; des difficultés d’accès aux outils pour les familles ; la réticence des soignants à engager la démarche. Tout cela est donc très complexe et constitue autant de freins à lever pour basculer pleinement dans la CAA.

En outre, 78 % des professionnels déplorent le manque de temps pour s’atteler au sujet et 65 % estiment disposer d’une formation insuffisante aux outils.

mise en œuvre d’un droit effectif à une place en établissement médico-social pour les jeunes en situation de handicap

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, auteure de la question n° 1644, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.

Mme Laure Darcos. Madame la secrétaire d’État, ils se prénomment Lucas, Zinedine ou encore Camille : tous trois sont des enfants autistes. Ils vivent dans mon département, l’Essonne, au sein de familles aimantes et attentionnées. Pourtant, ce sont des êtres invisibles, sans aucune solution d’accompagnement, que les institutions ont oubliés.

Pour leurs parents, la vie de tous les jours est difficile, qui se partage entre les rendez-vous chez les spécialistes : orthophoniste, psychomotricien, kinésithérapeute, psychologue, pédopsychiatre. Leur disponibilité pour leur enfant est admirable ; elle implique souvent des sacrifices professionnels et met entre parenthèses toute vie sociale. Dans un huis clos étouffant, ils sont confinés malgré eux.

Le manque de places dans les établissements médico-sociaux est terriblement criant. Pourtant, l’espoir est venu de la cinquième conférence nationale du handicap, qui s’est tenue le 11 février 2020. Elle s’est en effet conclue sur l’engagement à accélérer le déploiement de solutions nouvelles et de proximité pour les personnes ayant les besoins les plus soutenus.

En d’autres termes, il s’agit de mettre fin à ces départs contraints vers la Belgique qui déchirent les familles et obligent à des déplacements incessants, source de stress et de dépenses supplémentaires dont elles n’ont pas besoin.

Ce sont 1 000 places qui doivent être créées dans trois régions prioritaires : l’Île-de-France, les Hauts-de-France et le Grand Est, en plus des 2 500 déjà programmées pour 2021 et 2022 sur l’ensemble du territoire.

L’instruction budgétaire du 5 juin 2020 a prévu une autorisation d’engagement de 90 millions d’euros sur trois ans, au bénéfice des autorités régionales de santé (ARS) les plus concernées par ces départs.

Alors que les besoins à satisfaire sont nombreux, comme en témoignent les listes d’attente pour obtenir une place en établissement médico-social, je souhaiterais, madame la secrétaire d’État, que vous me précisiez les modalités de répartition de cette enveloppe budgétaire, la nature des projets susceptibles de bénéficier des crédits déployés, ainsi que le nombre de places nouvelles qui seront créées en Île-de-France, et en Essonne en particulier, au bénéfice des enfants handicapés et de leurs familles.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire dÉtat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice, comme vous le rappelez, éviter les départs subis en Belgique est un engagement de la conférence nationale du handicap du 11 février 2020. Cette ambition, nous la portons conjointement avec les départements et, bien sûr, les associations de personnes en situation de handicap.

La mobilisation de tous est nécessaire parce que c’est une inconditionnalité d’accompagnement que nous devons à ces enfants, à ces adultes. Surtout, cette mobilisation relève d’une responsabilité collective.

Afin de se doter des moyens à la hauteur de notre ambition, vous l’avez rappelé, 90 millions d’euros ont été déployés à partir de 2021, et sur trois ans, pour la création de solutions d’accompagnement à destination des adultes et, du coup, pour libérer des places pour les enfants – je vous le rappelle, en France, nous disposons de près de 6 000 places « Creton ».

C’est ainsi que les trois régions les plus concernées – Île-de-France, Hauts-de-France et Grand Est – déploieront ces 90 millions d’euros pour 1 000 places.

S’agissant plus précisément du territoire francilien, 51 millions d’euros sont alloués à l’ARS d’Île-de-France. Celle-ci a d’ores et déjà retenu des projets permettant d’emblée de renforcer l’offre de services, par exemple les pôles de compétences et de prestations externalisées (PCPE), qui permettent d’accompagner les familles et les enfants, et de financer ainsi 45 places en établissement d’accueil médicalisé dès 2021.

En mars 2021, l’ARS a lancé un plan d’ampleur pour sélectionner, dans chaque département, des solutions en établissement pour adultes, avec ou sans hébergement. Il s’agit notamment de mieux répondre aux situations complexes, à ceux dont les besoins sont les plus soutenus, comme vous l’avez très justement dit, par exemple les personnes présentant des troubles du neurodéveloppement ou une épilepsie sévère, mais aussi de permettre le développement de solutions inclusives comme les services d’accompagnement médico-social pour adultes handicapés (Samsah) ou les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad).

Les associations gestionnaires d’établissements et services peuvent déposer leur projet jusqu’à la fin de septembre 2021. Ces projets seront sélectionnés à la fin de l’année.

Les projets à émergence rapide seront priorisés afin d’assurer une réponse effective la plus rapide possible.

Le département de l’Essonne bénéficiera donc d’une augmentation de l’offre pour adultes dans le cadre de ce plan d’environ 3,5 millions d’euros.

Au-delà de ce plan de prévention des départs en Belgique d’ici à 2022, 944 solutions nouvelles d’accompagnement – 298 pour les enfants et 646 pour les adultes – sont d’ores et déjà programmées pour l’Île-de-France, dont 181 pour l’Essonne.

Le déploiement de ces solutions se veut inclusif et s’attachera à reconnaître la compétence et le projet de vie des personnes en situation de handicap, surtout pour favoriser l’émergence de cette société inclusive à laquelle je suis extrêmement sensible. Ayant pu constater le rapatriement de certaines personnes de Belgique, je sais qu’il nous faut rapprocher les familles et maintenir ce lien de proximité si important.

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour la réplique.

Mme Laure Darcos. Madame la secrétaire d’État, vous mesurez bien l’urgence de la situation. Ces familles sont éreintées et les enfants livrés à eux-mêmes, faute de solution d’accompagnement dans ces structures spécialisées. Elles ont besoin de visibilité à court terme et d’un puissant engagement des administrations. Le conseil de départemental de l’Essonne, dont je suis également élue, sera à vos côtés. Toutes ces familles comptent vraiment sur vous.

places disponibles en institut médico-éducatif

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, auteur de la question n° 1737, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.

M. Jean-Luc Fichet. Madame la secrétaire d’État, j’ai récemment reçu à ma permanence finistérienne un collectif de parents d’enfants en situation de handicap, des parents qui ont toutes les peines du monde à les inscrire en institut médico-éducatif (IME).

La situation est de plus en plus préoccupante, malgré les annonces d’ouverture de places supplémentaires. Si, en matière d’accueil des enfants et adultes en situation de handicap, la logique inclusive est, de mon point de vue, indispensable, il n’en reste pas moins qu’elle ne peut répondre à l’ensemble des difficultés des familles.

Dans le Finistère, le manque de places d’accueil en IME est criant et intimement lié au manque de places en foyers de vie, en maisons d’accueil spécialisées (MAS) ou même dans les structures pour adultes que sont les établissements et services d’aide par le travail (ÉSAT). Il en résulte que de jeunes adultes sont maintenus en IME et que les enfants devant s’y inscrire pour la première fois sont sur une liste d’attente interminable.

Les familles savent que le temps de la décision et de la création est long. Toutefois, elles ne comprennent pas pourquoi des mesures urgentes en matière d’accueil ne pourraient pas être prises pour éviter de longues années d’épuisement des parents, et pour stabiliser l’éducation et la stimulation des enfants qui ont besoin d’une place en IME.

Les parents en appellent à ce que, en plus des dispositions prises afin d’augmenter le nombre de places, des mesures urgentes puissent être annoncées, notamment pour la création de nouveaux IME dans les territoires.

Madame la secrétaire d’État, vous l’aurez compris, il est plus que temps de répondre à cette grande détresse des enfants et des adultes en situation de handicap et de leurs familles.

Comment comptez-vous agir dans les délais les plus brefs afin que chacun d’entre eux bénéficie d’une prise en charge de qualité en matière de soutien, d’éducation et de formation, ce qui est un droit ? Comment allez-vous répondre à l’urgence que j’exprime en leur nom afin d’autoriser à nouveau un avenir plus paisible pour les familles, et la construction de projets de vie pour chacun des jeunes concernés ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire dÉtat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur, comme vous le savez et l’avez très justement dit, la création de places en foyers de vie pour adultes est gérée par le conseil départemental du Finistère, dont le nouvel exécutif vient d’entrer en fonction. Sous la précédente mandature, la création de 120 places avait été annoncée pour la période 2020-2025 dans le cadre de son cinquième schéma départemental.

Comme je l’ai indiqué précédemment, et comme vous l’avez signalé, nous avons un véritable souci avec les places « Creton » – notre pays en compte plus de 6 000 : cela crée forcément un embouteillage pour les jeunes qui veulent entrer en IME. Nous avons donc collectivement la responsabilité de répondre à la demande de places d’hébergement pour adultes financées au titre de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) et autorisées par l’ARS.

Le Finistère compte à ce jour, pour les adultes, 543 places en foyer d’accueil médicalisé (FAM) et 222 places en MAS. À ce total, il faut ajouter les 20 places nouvellement autorisées en MAS qui seront ouvertes dès 2022 à l’issue d’opérations immobilières : 17 pour personnes polyhandicapées et 3 pour handicap rare.

Dans votre département, comme dans l’ensemble des territoires, nous maintenons nos efforts de création de solutions pour les adultes. Cela se traduit bien sûr par la création de places en établissement pour les personnes aux besoins les plus complexes – cela a déjà été souligné –, mais également par le développement de solutions plus inclusives, comme l’habitat inclusif sur lequel nous travaillons justement avec le département, notamment par le biais de l’aide à la vie partagée (AVP) qui est financée à 80 % par la CNSA. Il s’agit de « booster » ces solutions.

Par ailleurs, la feuille de route budgétaire pour le secteur médico-social de 2021 augmente ces crédits pour trouver davantage de solutions sur les territoires.

Aussi, l’ARS de Bretagne consacrera un peu plus de 1 million d’euros à la création de places d’hébergement pour adultes en situation de handicap. C’est le fruit d’un travail de coconstruction en lien avec les acteurs du territoire. Et je tiens à souligner que, dans le Finistère, ils travaillent extrêmement bien entre eux.

Depuis le début du quinquennat, nous avons privilégié le développement de services tels que les services d’éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad), ou bien le déploiement des unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS). Ainsi, 45 places de Sessad sont programmées pour la rentrée 2021.

Nous n’oublions pas pour autant l’accompagnement en IME : en témoigne l’autorisation de 16 places nouvelles en accueil temporaire pour l’année 2021, notamment pour assurer des solutions de répit pour les familles.

Vous avez évoqué la situation des ÉSAT : nous avons réaffirmé notre soutien à ces structures via une réforme de transformation globale et ambitieuse, construite avec les acteurs de terrain. Nous devons en effet garantir à chaque personne un parcours sécurisé et accompagné autant que de besoin. Vous pouvez vraiment compter sur ma mobilisation. Je serai d’ailleurs dans le Finistère, jeudi, pour rencontrer des familles confrontées à l’autisme.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour la réplique.

M. Jean-Luc Fichet. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Je pense cependant qu’il faudrait améliorer la concertation avec les professionnels du milieu médico-social. Auquel cas, des solutions immédiates pourraient être trouvées, pas forcément très coûteuses, même si elles nécessitent des moyens et une volonté.

Cette volonté, vous l’affichez en partie et je souhaite donc vraiment que ces solutions soient mises en place très rapidement. Comme vous l’avez mesuré, me semble-t-il, il y a beaucoup de détresse dans ces familles.

prime informatique des enseignants

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, auteur de la question n° 1556, transmise à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

M. Olivier Paccaud. Madame la secrétaire d’État, en octobre dernier, dans le cadre des discussions relatives à la revalorisation des carrières de l’enseignement, le ministère proposait l’instauration d’une prime d’équipement informatique au profit de l’ensemble des professeurs et psychologues de l’éducation nationale. Cette prime, consacrée par un décret du 5 décembre 2020, s’élève à 150 euros par an, pour un coût total de 179 millions d’euros.

Eu égard à l’impératif de continuité pédagogique rendu palpable lors du confinement du printemps 2020, l’enjeu du téléenseignement ne pouvait plus être ignoré. Il va donc de soi que cette prime est la bienvenue et qu’il nous faut consentir à cette dépense qui vient compléter la revalorisation salariale, peut-être insuffisante, mais elle aussi ô combien attendue, décidée lors du Grenelle de l’éducation.

Si de nombreux professeurs manifestaient depuis longtemps leur souhait de bénéficier d’aides financières substantielles pour acquérir un ordinateur, outil désormais indispensable au plein exercice de leur profession, nous regrettons néanmoins que cette prime exclue les documentalistes et conseillers principaux d’éducation (CPE).

Mais, outre l’incompréhension suscitée par le fait que certains personnels éducatifs se voient écartés du périmètre d’application de la mesure, vous n’êtes pas sans savoir que le montant de cette prime demeure lui aussi discuté. Ainsi, certains syndicats espéraient à raison que le montant de la prime serait calculé selon les besoins du corps enseignant, et non au regard du budget prévu. Et pour cause, le coût d’un ordinateur s’élève à environ 400 euros, sans compter celui d’une imprimante ou de logiciels de travail, outils non moins essentiels.

Sous ce rapport, d’aucuns peuvent estimer que l’aide prévue n’est pas à la hauteur de l’ambition affichée : celle que le corps enseignant, à l’instar de très nombreux autres secteurs d’activité, dispose rapidement et massivement d’équipements lui permettant de répondre aux évolutions des pratiques pédagogiques.

Madame la secrétaire d’État, vous aspirez à une école du XXIe siècle, pleinement disposée à garantir la continuité du service public de l’enseignement, notamment en période de crise sanitaire. À cet égard, n’estimez-vous pas pertinent de revaloriser le montant de cette prime d’équipement informatique ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Nathalie Elimas, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de léducation prioritaire. Monsieur le sénateur Olivier Paccaud, comme vous l’indiquez, la crise sanitaire a révélé la nature cruciale de la question de l’équipement informatique des élèves, mais également de nos professeurs. Nous avons vu combien nous étions inégaux en termes de maîtrise des outils informatiques.

Cependant, au-delà de ce contexte particulier, l’évolution des pratiques pédagogiques induite par la crise a rendu indispensable l’utilisation du matériel informatique par l’ensemble des enseignants.

Le ministre Jean-Michel Blanquer a lancé en juin 2020 les états généraux du numérique pour l’éducation, avec pour objectif de tirer tous les enseignements de la crise sanitaire, de valoriser les réussites, de renforcer la stratégie numérique éducative et d’alimenter la réflexion du Grenelle de l’éducation sur ces enjeux décisifs.

La prime d’équipement informatique annuelle de 176 euros brut – soit 150 euros net –, créée par le décret du 5 décembre 2020 et versée aux enseignants pour la première fois en février 2021, s’inscrit dans ce contexte. Elle vise à permettre aux professeurs de s’équiper ou de renouveler entièrement leur équipement sur une durée de trois à quatre années, dès lors qu’ils n’en disposent pas sur leur poste de travail.

Or les professeurs documentalistes, comme les CPE ou les conseillers pédagogiques, bénéficient de la mise à disposition d’un tel équipement sur leur poste de travail.

Indépendamment de la question de la prime d’équipement informatique, le ministère a engagé, avec le Grenelle de l’éducation, des travaux d’ampleur qui conduisent notamment à mieux reconnaître l’engagement de l’ensemble de la communauté pédagogique et éducative.

Quelques exemples l’illustrent : la création de la prime d’attractivité, versée à compter de mai 2021 aux professeurs, aux CPE et aux psychologues de l’éducation nationale ; les revalorisations spécifiques décidées en 2021 au bénéfice des conseillers principaux d’éducation – 236 euros brut par an – et des professeurs documentalistes – 233 euros brut par an. Voilà de quoi compenser ce besoin en équipement informatique.

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour la réplique.

M. Olivier Paccaud. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État. Effectivement, 150 euros, cela me semble insuffisant. J’entends ce que vous dites au sujet des CPE et des documentalistes, mais ils disposent de postes non pas mobiles, mais fixes ! Là est la problématique.

Pour conclure, je veux dire un mot de la formation des enseignants au téléenseignement, demande révélée notamment dans une étude de l’Institut français de l’éducation selon laquelle plus de la moitié des enseignants sont prêts, si besoin est, à y recourir, à la condition d’y être formés. Il me semble que le ministère doit prendre cette demande en considération.

scolarisation des jeunes sourds et malentendants

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, auteur de la question n° 868, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

Mme Nadia Sollogoub. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur les inquiétudes exprimées par les familles de jeunes personnes sourdes et malentendantes.

En théorie, chaque académie doit proposer un pôle d’enseignement pour les jeunes sourds (PEJS), depuis la maternelle jusqu’au lycée. Pourtant, les annonces autour du concept « Ensemble pour l’école inclusive » sont à l’origine de vives inquiétudes. En effet, l’inclusion au sein de l’école n’est pas techniquement et humainement possible pour tous les handicaps. Inclure un enfant sourd au sein d’une école ordinaire, sans possibilité de communication, pourrait procéder davantage de l’exclusion que de l’inclusion parce que, dans ces conditions, c’est à l’enfant sourd qu’il reviendrait de conduire les efforts pour se faire entendre auprès des autres.

Le taux d’illettrisme chez les enfants sourds avoisine les 80 % pour ceux qui sont en âge de maîtriser la lecture et l’écriture.

Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous me préciser votre position sur la spécificité que constitue le handicap de la surdité, et quelles dispositions souhaite prendre le Gouvernement afin de garantir les droits des personnes sourdes et malentendantes pour l’accès à l’éducation et à la formation ?