Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.

Mme Marie-Claude Varaillas. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je me permets de commencer par une remarque de forme s’agissant de cette proposition de résolution : il est difficile de comprendre que seuls trois groupes aient été initialement associés à sa rédaction. Lors de la préparation de la COP21, un texte ambitieux avait été construit à la suite de travaux auxquels avaient participé l’ensemble des commissions et des groupes. Il est regrettable que cette procédure n’ait pas été réitérée.

Sur le fond, cette résolution ne manque pas d’intérêt, mais elle semble très, voire trop technique. Elle n’insiste donc pas suffisamment sur les enjeux posés par la COP26.

En effet, l’essentiel n’est plus désormais d’approfondir les engagements de la COP21 ni d’en décliner tel ou tel article, mais il s’agit de produire un sursaut majeur avant l’hécatombe du vivant sur cette planète.

L’omniprésence des multinationales dans les enceintes des débats des COP apparaît comme un symptôme de l’impuissance des États à préserver le cadre public des échanges, qui est pourtant d’intérêt général. L’élément est certes anecdotique, mais il est révélateur des contradictions majeures entre les discours et les actes. La réalité devrait pourtant nous rappeler à l’ordre.

Entre 1990 et 2018, les émissions de CO2 dans le monde ont augmenté de 67 %. Le dernier rapport du GIEC confirme un dérèglement climatique que l’on peut déjà mesurer par un réchauffement de 1,1 degré et la certitude que celui-ci atteindra 1,5 degré dans dix ans.

Selon la dernière évaluation des Nations unies, les engagements actuels mènent la planète vers un réchauffement de 2,7 degrés d’ici à la fin du siècle. Nous savons pourtant qu’au-delà de 2 degrés les conditions mêmes d’existence de l’humanité ne sont pas soutenables.

Face à ces prévisions, la future COP doit acter des engagements plus importants, y compris de la part des plus gros émetteurs. Aussi, nous partageons l’appel à aller vers des objectifs plus ambitieux dans le cadre d’une responsabilité commune, mais différenciée.

Cependant, des sources légitimes d’inquiétude demeurent. Nous sommes notamment dubitatifs sur le satisfecit qui a été donné concernant les objectifs de la France et de l’Union européenne. En effet, si les engagements pris s’articulent avec des politiques de libéralisation dans les secteurs clés pour la transition écologique, comme l’agriculture, les transports ou l’énergie, grâce à la signature d’accords de libre-échange, ils n’auront que peu de portée à long terme, ce qui condamne par avance tout effort tangible de réduction massive des émissions.

Quant aux mesures prises par la France, elles sont clairement insuffisantes comme l’a pointé le Haut Conseil pour le climat. La récente loi Climat et résilience ou le plan de relance restent trop favorables aux énergies fossiles. Ainsi, en 2020, la France a encore soutenu le développement des énergies fossiles à hauteur de plus de 9 milliards d’euros. Faut-il rappeler que notre pays a été condamné pour non-respect de ses engagements climatiques ?

À nos yeux, l’exemplarité consiste à rompre avec des modèles de développement devenus obsolètes. Or il n’en est pas question dans cette proposition de résolution, car ses auteurs continuent de fixer le modèle libéral comme seul horizon.

Par exemple, nous ne partageons pas la philosophie dont découle le dispositif de la compensation carbone, car, par essence, compenser n’est pas réduire. Par ailleurs, son principe repose sur l’idée fausse que le vivant est interchangeable de sorte que l’on peut reconstruire ailleurs ce que l’on a détruit ici. Autrement dit, l’on pourrait émettre, dès lors que l’on absorbe ailleurs. Cette approche se fonde sur des mécanismes de financiarisation de la nature et laisse cours à toutes les dérives liées aux obligations vertes. On ne peut pourtant pas se satisfaire de simples « droits de polluer ». Non, planter des arbres à l’autre bout du monde ne diminue pas l’impact des activités des plus gros pollueurs !

Par ailleurs, l’efficacité de ces projets reste à démontrer. Pis, ils font peser de nouveaux risques sur les droits humains qu’il s’agisse de l’accaparement des terres, de l’expropriation des populations locales, de la remise en question de la souveraineté alimentaire ou de l’accentuation du dérèglement climatique.

Par conséquent, nous considérons que le texte doit aborder non seulement les engagements des parties, mais également la capacité de l’ONU et des États à préserver les biens communs mondiaux, à investir et à faire respecter ces engagements. L’eau, la terre, les forêts et l’air sont des ressources trop précieuses pour les laisser entre les mains de la finance et des multinationales.

C’est la raison pour laquelle il convient de porter très haut les idées de justice climatique, en créant un tribunal compétent en la matière, conformément à ce qui a été envisagé lors du sommet de Cochabamba.

Quant à la mobilisation du Fonds vert, aussi importante soit-elle, comment ne pas souligner son aspect dérisoire dès lors que l’industrie pétrolière finance la recherche sur les énergies fossiles à hauteur de 500 milliards de dollars par an ?

Enfin, nous considérons – la proposition de résolution esquisse cette idée – que l’on ne trouvera pas de solution pour le climat sans remettre en cause l’organisation sociale, afin de résoudre les problèmes auxquels est confrontée l’humanité, que ce soit l’accès aux vaccins, la gestion de la dette publique, la protection de la biodiversité et la baisse des émissions.

La lutte pour le climat est aussi une lutte pour l’égalité des droits et donc pour le progrès social partagé. Nous aurions souhaité que le texte mentionne plus clairement la nécessité d’une véritable reconnaissance des droits des peuples autochtones et la priorité donnée à l’humain plutôt qu’au marché et aux intérêts financiers.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe CRCE s’abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Demilly. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Stéphane Demilly. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes en état d’urgence climatique. Alors que la COP26 vient de commencer, il est essentiel pour les citoyens du monde entier que nous tenions les promesses de l’accord de Paris. La lutte contre le réchauffement climatique est notre plus grand défi actuel et c’est le plus urgent.

Depuis le premier Sommet de la Terre à Stockholm, en passant par les différentes COP qui se sont succédé jusqu’à cette COP26, inquiétudes et déclarations de bonne volonté se sont multipliées.

Cependant, la température de notre planète et les catastrophes environnementales n’ont jamais cessé de s’aggraver. Nous avons connu cette année encore des records de chaleur, des incendies de grande ampleur, des inondations, des canicules et des sécheresses. Le mois de juillet 2021 a été le plus chaud jamais enregistré sur Terre. Le seuil d’une augmentation de température de 1,5 degré pourrait être franchi dès 2030. Le niveau des mers devrait augmenter de près de deux mètres d’ici à la fin du siècle.

Sans vouloir être un oiseau de mauvais augure, je ne fais que reprendre les nouvelles projections du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publiées le 9 août dernier.

La COP26 doit permettre aux pays participants de négocier la mise en œuvre effective de l’accord de Paris. Les principaux pollueurs ne doivent plus ignorer leurs obligations. L’heure tourne… Il ne faudrait pas que la COP de Glasgow soit synonyme de douche écossaise ! (Sourires.)

Les pays doivent s’engager à atteindre des objectifs plus ambitieux pour réduire leurs émissions d’ici à 2030. Ils doivent élaborer des mesures d’adaptation aux conséquences du changement climatique, et naturellement accroître le financement en faveur de la transition écologique. Cela vaut en particulier pour les pays en développement.

Cependant, comme on le constate, la situation traîne et les pays peinent à s’accorder sur des sujets clivants, comme la mise en application du marché du carbone.

Le président de la COP26, Alok Sharma, a lui-même déclaré qu’il serait difficile de parvenir à un accord, compte tenu de la difficulté des questions à traiter. Pourtant, réussir n’est plus une option, car il y va de notre survie. Nous n’avons pas de plan B, ou plutôt pas de planète B !

Le réchauffement climatique est porteur d’inégalités, de crises migratoires et de nouveaux problèmes sanitaires, comme le paludisme, qui se poseront dans de nombreux endroits de la planète. Je ne connais pas une ville qui ne soit pas affectée par des problèmes de pollution ou de changement climatique.

Ces grands défis se moquent des frontières. Seules des réponses concertées et une coopération internationale ambitieuse apporteront des solutions efficaces et durables. Tel est le message que portent les auteurs de cette proposition de résolution, et je les en félicite.

La France est engagée pour le climat. Nos territoires le sont aussi ! L’échelon local dispose de ressources extraordinaires et d’acteurs concernés, capables de porter des projets territoriaux en faveur de l’environnement et de la biodiversité. L’accord de Paris reconnaît et valorise le rôle des régions, des villes et des autorités locales dans la lutte contre le changement climatique.

L’Union européenne est aussi, naturellement, un acteur clé dans les négociations climatiques. Au fil des ans, elle a adopté une législation environnementale parmi les plus avancées au monde et elle a atteint ses objectifs antérieurs en matière de réduction des émissions.

Toutefois, le changement climatique est une menace mondiale, de sorte que les pays européens ne peuvent pas agir seuls.

Les Européens ne représentent que 8 % de la population mondiale. Le retour des États-Unis dans l’accord de Paris et l’engagement du président Biden sont venus renforcer nos capacités d’actions, et nous le saluons.

De même, des pays comme l’Arabie Saoudite dont on n’attendait pas qu’ils s’engagent, du moins pas aussi vite, ont fait savoir qu’ils participeraient aux efforts internationaux, en visant un objectif de zéro émission d’ici à 2060.

Quoi qu’il en soit, les objectifs de la COP26 doivent nous permettre de ne pas atteindre ces fameux et dramatiques « points de basculement » mentionnés par les experts, c’est-à-dire des changements irréversibles du système climatique. Nous pouvons encore agir.

Le groupe centriste votera en faveur de cette proposition de résolution. Il votera pour une coopération ambitieuse vers un nouveau modèle de développement durable, juste et respectueux de l’environnement. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Gilbert-Luc Devinaz. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, au-delà de l’ambition que nous souhaitons afficher dans ce texte, les enjeux de la COP26 s’inscrivent dans un contexte de « basculement » que nous sommes en train d’effectuer.

L’ONU alerte sur la concentration des trois principaux gaz à effet de serre. Même si les 200 pays concernés appliquent strictement leurs engagements sur la réduction des émissions, l’estimation du réchauffement reste à hauteur de 2,7 degrés Celsius, bien loin de l’objectif de l’accord de Paris.

En outre, même si nous stoppions toute émission, le réchauffement persistera durant plusieurs décennies…

Revenons sur quelques enjeux de la COP26. Elle sera l’occasion de tester pour la première fois l’application de l’accord de Paris. Six ans après sa signature, où en sont les contributions déterminées au niveau national ? Comment les évaluer ?

L’Australie, par exemple, qui est le plus gros exportateur mondial de charbon, a annoncé viser zéro émission nette à l’horizon 2050, sans fournir de détails sur la façon dont elle compte y parvenir, alors qu’elle a renouvelé son soutien appuyé aux industries minière et gazière.

L’article 6 de l’accord de Paris prévoit qu’une partie des réductions d’émissions peut être réalisée via « des démarches concertées », incluant « l’utilisation de résultats d’atténuation transférés au niveau international », tout en « garantissant l’intégrité environnementale et la transparence ». Il fait ainsi référence aux mécanismes de flexibilité décidés à Kyoto, qui peuvent s’inscrire dans des problématiques de marchandisation de la nature.

À rebours de cette conception, nous devons développer une approche qui se fonde sur la notion de biens communs. Notre groupe avait d’ailleurs défendu un texte sur ce sujet.

L’espèce humaine est le résultat de l’évolution de la vie à l’échelle du temps de la Terre. Elle n’est pas une pièce rapportée dans un paradis terrestre. Or ce qui semble caractériser la nature, c’est l’interdépendance et l’interaction entre tous les éléments qui la composent, de sorte que notre vision anthropocentrée pose question. (M. Gérard Longuet sexclame.)

Si nous envisageons de rémunérer la nature et ses services écosystémiques, qui donc y gagnera sinon l’espèce humaine ? Il me semble que le concept de biens communs au bénéfice de tous permettra de répondre à l’urgence écologique face à la dégradation de la biodiversité et des écosystèmes. En somme, l’espèce humaine est-elle capable de s’adapter à elle-même ? Ne sommes-nous pas dans une fuite en avant ?

Par exemple, en Nouvelle-Zélande, la recherche est subventionnée pour travailler sur des programmes de reproduction sélective et développer des lignées d’animaux qui produisent naturellement moins de gaz. La recherche scientifique est-elle une réponse à nos problèmes ?

Au-delà de l’activité humaine, ce sont bien nos modes de production qui sont en question. Certains économistes identifient la période que nous vivons à l’ère du « capitalocène ». Dans cette perspective, les droits à polluer impliquent une mise sur le marché du climat.

Or une telle logique ne va pas sans effets pervers inquiétants. La stratégie de TotalEnergies en est l’illustration, puisque l’entreprise s’est engagée à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 tout en poursuivant ses investissements dans les hydrocarbures en Arctique, grâce au marché du « droit à polluer ».

Tant que nous agirons sur les conséquences du problème au lieu d’en affronter les causes, nous nous enfoncerons dans le réchauffement climatique. Évitons l’effet papillon de Lorenz.

Il m’a été accordé un temps de parole de quatre minutes. Durant cet intervalle, une surface de la forêt amazonienne équivalant à douze terrains de football a été détruite, alors qu’Amazon a engrangé 3 millions de dollars.

La COP de Glasgow sera réussie si nous arrivons à établir les indicateurs qui nous permettront de mesurer et de comparer les contributions des différents États, dans un temps acceptable.

Pour éviter que ce dialogue international ne passe pour du « blabla », alors qu’il est nécessaire pour dégager un consensus planétaire, la COP26 doit déboucher sur des actions concrètes et tangibles.

Notre groupe votera en faveur de cette proposition de résolution qui s’inscrit dans les douze enjeux principaux de la COP26. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Tabarot. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Tabarot. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, sortirons-nous par le haut de la situation, à l’issue de ce sommet ? Les grands de ce monde continueront-ils de « regarder ailleurs », selon la formule chiraquienne maintenant consacrée ? (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.)

Malgré la décision de Joe Biden de ramener les États-Unis à la table des discussions, cette COP, la vingt-sixième du nom, sera-t-elle la dernière alors que la Russie, le Brésil ou la Chine ne feront pas le déplacement ?

Comment ne pas constater que, si l’accord de Paris de 2015 a fait l’objet d’une communication retentissante, les efforts qui ont suivi sont loin d’être suffisants. En effet, la coopération interétatique n’a pas trouvé d’application concrète dans toutes les parties du monde. Signes d’une écologie de façade, les échecs successifs dans l’application concrète de l’accord marquent également le fait que l’écologie est un sujet pris en otage par certains États.

Voilà pourquoi cette excellente proposition de résolution de nos collègues Mandelli, Longeot et Dantec prend tout son sens.

Cette COP doit être celle où nous fixons les règles de coopération volontaire bilatérale ainsi qu’un cadre robuste pour garantir la réciprocité, afin d’éviter que l’enjeu écologique ne soit pris en otage.

L’Europe est confrontée à une flambée spectaculaire des prix de l’énergie. Le Gouvernement a récemment adopté une série de mesures pour y faire face. Pourtant, ces annonces plus conjoncturelles, voire électoralistes, que structurelles ne font que retarder l’inévitable.

En effet, la tension que l’on peut observer sur les marchés de l’énergie jette une lumière crue sur l’urgence écologique. Elle offre l’occasion de tirer le signal d’alarme et de prendre un tournant fondé sur l’action, en privilégiant le nucléaire et certaines énergies renouvelables, mais pas toutes.

M. Philippe Tabarot. L’action est la condition de réussite de la COP26. L’accord de Paris demeure notre meilleure boussole au cœur de la tempête. En 2015, sa signature marquait un engagement de niveau international. Six ans après, son héritage apparaît bien maigre. Notre ambition est de prendre de l’avance. Il faut demander aux États réticents de se dévoiler. Qui voile la planète, dévoie la France.

Il faut avoir le courage de reconnaître que nous ne pouvons plus définir des politiques en ignorant que nous détruisons les conditions de notre survie. Chaque pays doit être comptable de son action.

Quelles convictions défendons-nous au Sénat ? Tout d’abord, nous prônons l’engagement en action. Cette action ne saurait être confisquée par les idéologies radicales qui ont un autre agenda que celui de la protection de la nature.

M. Laurent Burgoa. Très bien !

M. Philippe Tabarot. Nous défendons, ensuite, l’alternative pour tous. Les décisions environnementales ne doivent pas punir les gens, notamment les plus modestes, qui sont les premiers à subir ces changements. La méthode doit être incitative. L’acceptabilité sociale est la clé.

Ces conditions ont orienté notre philosophie lors de l’examen au Sénat de la loi Climat et résilience. Nous avons formulé des propositions qui rassemblent, car pour que l’écologie devienne la préoccupation de chacun, elle ne doit pas exclure.

Certaines de nos propositions visent à accélérer la décarbonation en garantissant l’efficacité des mesures. À cet égard, la transition est en cours comme en témoignent les 5,1 milliards d’euros que la France a reçus de l’Union européenne.

L’évolution actuelle des émissions conduit cependant de manière certaine à un réchauffement global trop important. L’Union européenne doit donc engager des actions rapides et fortes.

Il faut également cibler certains secteurs, comme celui des transports, qui est l’un des plus gros émetteurs de gaz à effet de serre. Outre la route dont l’électrification constitue un enjeu clé, les priorités, en matière de décarbonation des transports, sont connues. Nous devons réaliser un effort considérable de rattrapage sur les infrastructures ferroviaires, accroître la part modale du ferroviaire électrique et développer une politique de fret décarbonée, favoriser le verdissement des flottes de transport de voyageurs et restaurer les équilibres économiques des opérateurs de transport.

L’acceptation des mesures est essentielle, et nous l’avions privilégiée, au Sénat, en proposant l’instauration d’un prêt à taux zéro pour l’acquisition de véhicules peu polluants, le rétablissement de la TVA à 5,5 % pour le transport ferroviaire de voyageurs ou encore le doublement de la part modale du fret ferroviaire et fluvial.

Cette COP permettra-t-elle de transcender les égoïsmes nationaux grâce à une coopération internationale largement renforcée ? Nous l’espérons encore.

Entre les plaidoyers des « marchés de la peur », les partisans de l’écologisme politique, bridant toute initiative technologique ou encore les garants du seul fait compétitif, la voie est étroite, mais elle existe.

L’Union européenne, que la France présidera en 2022, représente sur ce point un laboratoire d’exception.

Les travaux du Sénat sont comme toujours, en particulier dans ce cadre, d’une aide précieuse. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pascal Martin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Maurey. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)

M. Hervé Maurey. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, « Soit nous stoppons le réchauffement climatique, soit c’est lui qui nous stoppe. » Cet avertissement du secrétaire général de l’ONU lors de l’ouverture de la COP26 fait suite à de nombreuses mises en garde formulées depuis maintenant des décennies, comme l’appel lancé par Jacques Chirac en 2002.

Nous le savons tous : les nombreux rapports des scientifiques sur le réchauffement climatique, notamment ceux du GIEC, se succèdent et sont, hélas, de plus en plus alarmants.

Le rapport publié en août dernier indique que la fourchette basse d’un réchauffement climatique à 1,5 degré serait atteinte vers 2030, soit dix ans plus tôt que ne l’annonçaient les prévisions antérieures.

Plus que jamais, il y a donc urgence à agir réellement et à ne pas se contenter de grandes déclarations.

L’accord de Paris de 2015 fixe un objectif commun : le maintien de l’augmentation de la température moyenne de la planète à un niveau inférieur à 2 degrés et la poursuite des efforts pour limiter l’augmentation de cette température à 1,5 degré.

Il prévoit également une méthode pour atteindre cet objectif. Les États parties doivent prendre des engagements, actualisés tous les cinq ans, dans la perspective d’un relèvement continu de l’ambition environnementale.

À ce stade, la deuxième vague de contributions n’empêcherait pas d’atteindre une hausse des températures d’environ 2,7 degrés d’ici à la fin du siècle.

C’est pourquoi nous ne pouvons que soutenir cette proposition de résolution qui appelle à un rehaussement des contributions déterminées au niveau national, comme l’ont déjà fait un certain nombre d’États – pas tous, malheureusement.

Quant à l’Union européenne, elle a fixé un nouvel objectif de réduction des émissions de 55 % en 2030 par rapport à 1990, contre 40 % précédemment.

Le rehaussement des engagements est l’un des principaux enjeux de la COP26, mais il en existe d’autres comme la question du financement et de l’accompagnement des pays en voie de développement, notamment des pays africains, responsables d’une part infime du réchauffement climatique.

Mais au-delà des engagements qui seront, je l’espère, pris à Glasgow, l’essentiel sera de les tenir. Malheureusement, force est de constater que tel n’est pas toujours le cas, tant s’en faut. À cet égard, je constate avec regret que la France est loin d’être exemplaire.

Le Haut Conseil pour le climat estime ainsi dans son dernier rapport que les émissions de la France devraient baisser presque deux fois plus vite pour atteindre les objectifs climatiques qu’elle s’est fixés. La récente condamnation de la France par la justice administrative pour son inaction climatique est un autre rappel à l’ordre.

Face à cette situation, les parlements, et tout particulièrement notre assemblée, doivent veiller au respect des engagements pris. Nous ne devons pas laisser les nombreuses associations, les ONG ou la justice jouer le rôle de vigie des engagements gouvernementaux en matière d’environnement.

N’oublions pas que nous votons la loi permettant la mise en œuvre des engagements internationaux ! Le Sénat a ainsi joué pleinement son rôle, notamment lorsqu’il a renforcé l’ambition de la loi Climat et résilience. Il faut aller encore plus loin, au travers d’études d’impact plus approfondies.

C’est nous qui votons le budget. Nous devons veiller à ce que les moyens soient mis en adéquation avec les ambitions annoncées et que la loi de finances donne la priorité à la lutte contre le réchauffement climatique.

Conformément à notre mission de contrôle de l’action du Gouvernement, il nous revient également de vérifier que celui-ci prend les mesures nécessaires et suffisantes. J’ai ainsi pu observer que l’État est loin de respecter la loi en ce qui concerne la part minimale d’acquisition de véhicules propres lors du renouvellement de sa flotte.

Vous l’aurez compris : au-delà du caractère crucial de cette COP, le plus important sera ensuite de maintenir le cap pour atteindre les objectifs fixés. C’est un travail que nous devons mener au quotidien en tant que parlementaires, mais aussi en tant que citoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Chevrollier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Guillaume Chevrollier. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, quels sont les changements apparus depuis la COP21 ? Si l’on s’en tient aux statistiques, ils sont en réalité peu nombreux et nous avons toujours le sentiment d’être au pied du mur.

Les émissions de gaz à effet de serre ont continué d’augmenter, à l’exception de l’année 2020, durant laquelle la covid-19 a entraîné une baisse de 6 % des émissions mondiales.

Chaque année, les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère augmentent, les températures grimpent et les événements extrêmes sont de plus en plus fréquents.

L’année 2021 est une année importante, puisqu’elle aura été marquée par le congrès mondial de l’UICN, la COP15 pour la biodiversité et la COP26. Je regrette d’ailleurs que ces rassemblements internationaux soient distincts, tant la dégradation de la biodiversité, le réchauffement climatique et la désertification sont intimement liés.

Aujourd’hui, la prise de conscience est globale : la société civile, les acteurs économiques et politiques, la jeunesse, tous sont mobilisés.

Cette proposition de résolution sénatoriale en est aussi la preuve. Le Parlement est pleinement investi dans la lutte contre le réchauffement climatique, notamment au travers de l’élaboration de politiques d’adaptation : nous devons « conserver ce qui vaut et adapter ce qu’il faut. »

Les accords de Paris présentent une limite : malgré l’amorce d’une réflexion sur la transition énergétique, aucune des parties prenantes n’a souhaité que cette problématique soit présente dans la version finale.

On a ainsi encouragé les États à réduire leur consommation ou à décarboner leur production, sans donner l’impulsion à un nouveau modèle énergétique clair. Il nous faut une stratégie en la matière !

Les énergies renouvelables doivent être développées, mais nous ne pourrons pas nous passer du nucléaire, qui fait partie de la solution, n’en déplaise à certains. Le nucléaire est reconnu par le GIEC comme une solution indispensable pour respecter les accords de Paris.

Limiter le réchauffement climatique n’est pas hors d’atteinte. Cela suppose d’entamer une révolution énergétique globale et de prévoir des transitions dans tous les pans de notre économie. Selon le rapport du GIEC, il existe de nombreuses possibilités de lier cette atténuation et cette adaptation à l’atteinte d’autres objectifs sociétaux, grâce à des approches globales. Pour que les efforts déployés soient fructueux, il faut se doter d’outils appropriés, de structures de gouvernance adaptées et il faut renforcer notre capacité de réaction.

Pour ma part, je crois au génie humain afin de progresser dans la connaissance et lutter ainsi efficacement contre le réchauffement climatique. L’innovation jouera un rôle central dans ce combat. La recherche doit être soutenue, tant sur le climat que sur la biodiversité.

Abandonnons les postures : le pessimisme, c’est le défaitisme ! Penchons-nous sur ce que nous pouvons faire concrètement pour nous adapter.

La proposition de loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique, déposée sur l’initiative de notre collègue Patrick Chaize et dont nous allons débattre dans quelques minutes, en est un bel exemple : elle tend à organiser la convergence entre les transitions numérique et écologique.

Les grandes conférences internationales que constituent les COP sont nécessaires pour donner l’impulsion à une mobilisation mondiale et sensibiliser les États.

La coopération internationale est vitale. À l’heure de la COP26, il est indispensable de tenir nos promesses et de ne pas en formuler d’autres si nous ne sommes pas capables de les tenir – cela vaut également pour le débat national. De plus, il faut finaliser les règles de mise en œuvre du pacte sur le climat, notamment au sujet de la transparence, c’est-à-dire la façon dont les États rendent compte de leurs actions et de leurs résultats. Enfin, il convient de voter à l’unanimité un accord contraignant qui impose des obligations aux plus gros émetteurs de gaz à effet de serre.

L’Union européenne dispose d’une chance unique de prendre le leadership de la transition écologique et de renforcer ainsi sa légitimité, sa souveraineté et sa compétitivité.

Saisissons-la, à l’occasion de cette COP26 ! Saisissons aussi l’occasion de la présidence française du Conseil de l’Union européenne pour donner une nouvelle impulsion. Malheureusement, cette présidence sera partiellement paralysée par l’élection présidentielle.