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Souhaits de bienvenue à une nouvelle sénatrice

Mme le président. Je salue notre nouvelle collègue Amel Gacquerre, sénatrice du Pas-de-Calais, qui remplace Mme Catherine Fournier au sein du groupe Union Centriste. Je lui souhaite la bienvenue dans notre assemblée. (Applaudissements.)

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Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2022
Discussion générale (suite)

Loi de finances pour 2022

Suite de la discussion en nouvelle lecture d’un projet de loi

Mme le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Rémi Féraud.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2022
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. Rémi Féraud. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après un examen tronqué du budget en première lecture, une commission mixte paritaire non conclusive et une nouvelle lecture à l’Assemblée nationale – vous nous en avez donné, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, les principaux éléments –, nous reprenons aujourd’hui la discussion du projet de loi de finances pour 2022.

Au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, je veux dire de nouveau que nous regrettons le choix de la majorité sénatoriale d’avoir refusé d’examiner mission par mission les dépenses de l’État. Cette posture a privé notre assemblée de l’une de ses missions essentielles, et le manque de respect du Gouvernement pour le Parlement, qui est bien réel, ne saurait à lui seul la justifier.

Qu’avons-nous eu pour occuper l’ordre du jour en attendant ? Des débats auxquels vous accordiez, paraît-il, mes chers collègues de la majorité sénatoriale, une grande importance, portant sur des thèmes qui vous tiennent à cœur, mais qui n’ont pas semblé vous passionner si j’en juge par votre faible mobilisation lors des séances publiques, et qui sont restés relativement formels.

Quel dommage, car je suis sûr, chers collègues du groupe Les Républicains, que vous aviez tant de propositions à faire ! Si j’en crois le programme de votre candidate Valérie Pécresse, vous souhaitez réaliser 76 milliards d’euros d’économies d’ici à 2027, diminuer encore davantage les impôts de production, dans une forme de surenchère avec le Gouvernement, et supprimer 150 000 postes de fonctionnaires.

Pourquoi ne pas avoir saisi l’occasion de ce dernier budget avant la présidentielle pour illustrer votre programme ?

Vous auriez pu ainsi commencer à nous préciser quels postes vous comptez supprimer et dans quels ministères : l’éducation nationale, les forces de l’ordre, nos armées, la présence de l’État dans les territoires ? Nous aurions pu voir s’il y avait vraiment une différence entre le Gouvernement et Les Républicains en matière budgétaire. Vraiment, quel dommage ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie Mercier. Nous pourrions aussi parler de vos propositions à vous !

M. Rémi Féraud. Ne vous inquiétez pas, mes chers collègues, j’ai aussi des choses à dire au Gouvernement… (Sourires.)

En effet, du côté du Gouvernement, ce dernier budget du quinquennat, qui met fin brutalement au « quoi qu’il en coûte » et qui renoue avec la politique libérale menée depuis 2017, n’aura de conséquences bénéfiques suffisantes ni sur le pouvoir d’achat ni sur l’investissement et la préparation de l’avenir.

S’il restait encore le moindre doute chez quelqu’un à gauche, ce dernier budget est celui des dernières illusions perdues.

Illusion perdue de la justice sociale, avec une explosion des inégalités de revenus, mais aussi de patrimoine dans le monde entier après cette crise, plus particulièrement dans notre pays, sans que cela semble émouvoir quelque membre que ce soit du Gouvernement ou de la majorité parlementaire.

Illusion perdue de la théorie du ruissellement : il n’y a plus aujourd’hui aucun économiste pour donner crédit à cette théorie selon laquelle la politique de l’offre viendrait améliorer la croissance et le sort de l’ensemble de la population, en particulier les plus modestes.

Illusion perdue du volontarisme écologique, avec un budget consacré à la transition écologique bien insuffisant et un refus répété de conditionner, écologiquement comme socialement, les aides aux entreprises. On se rend compte aujourd’hui que ces aides sont mal calibrées et mal ciblées dans notre pays.

Illusion perdue du pouvoir d’achat. Et les dispositions adoptées dans la loi de finances rectificative cet automne ou dans ce projet de loi de finances aujourd’hui, même augmentées de la disposition du nouveau bouclier tarifaire sur l’électricité pour 2022, que vous avez improvisée en vue de la deuxième lecture à l’Assemblée nationale, ne sont pas à la hauteur des besoins. Les revendications sociales couvent dans notre pays, de manière tout à fait légitime.

Illusion perdue, enfin, pour la jeunesse, qui aura été la sacrifiée de cette crise. Même le Président de la République l’a reconnu, sans pour autant en tirer les conséquences en termes de mesures prises dans ce budget, puisque nous aurons finalement, en guise de revenu d’engagement, des contrats d’engagement au compte-gouttes, et puis c’est tout.

Finalement, pour résumer, les choix budgétaires constants arrêtés depuis 2017 et qui s’inscrivent de nouveau dans ce dernier budget, malgré la parenthèse du « quoi qu’il en coûte », conduisent en même temps à l’injustice fiscale, à l’insuffisance de la relance et au retard de la transition écologique, tout en conservant un déficit budgétaire élevé – à hauteur de 5 %, avez-vous dit, monsieur le ministre –, mais qui reste bien hypothétique pour l’année 2022.

C’est pourquoi notre groupe, regrettant toujours de n’avoir pu discuter, mission après mission, des dépenses de ce projet de loi de finances, votera évidemment sans hésiter contre le projet de loi de finances pour 2022.

Cette discussion s’achèvera probablement avec cette motion tendant à opposer la question préalable, qui est en effet dans les usages du Sénat à ce stade de la discussion. Si nous regrettons la première motion déposée, nous comprenons le sens de celle-ci.

Cependant, nous nous abstiendrons probablement sur cette motion, tout en marquant bien notre opposition au budget présenté par le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme le président. La parole est à M. Teva Rohfritsch.

M. Teva Rohfritsch. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne sommes évidemment pas d’accord avec ce qui vient d’être dit…

M. Vincent Segouin. Quelle surprise !

M. Teva Rohfritsch. À l’aube d’un nouveau quinquennat, le projet de loi de finances pour 2022 marque positivement un cycle de cinq années au service des Français. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) prévoit un taux de croissance à 6,8 % pour 2021 et à 4,2 % en 2022, le plus fort taux de croissance depuis cinquante ans. Avec 8 % de chômage au quatrième trimestre, la France a atteint sa meilleure performance depuis près de quinze ans, au lendemain d’une crise majeure.

Dans ce projet de loi de finances, le Gouvernement nous invite à progresser sur cette voie, avec la poursuite du plan de relance, mais aussi en faveur des investissements d’avenir et des ambitions que porte le plan France 2030 : sortir de la crise et regarder vers l’avant ; être présent auprès de chacun, quoi qu’il arrive, mais aussi poursuivre la réindustrialisation de la France ; baisser les impôts tout en contenant le déficit et la dette publics,…

M. Laurent Burgoa. Parlons-en !

M. Teva Rohfritsch. … malgré la période de crise ; protéger et accompagner 13 millions de salariés et plus de 2 millions de TPE-PME.

Le « quoi qu’il en coûte », tant décrié par les oppositions, a été salutaire pour nos emplois, nos entreprises et notre pouvoir d’achat, dans l’Hexagone comme dans les outremers.

M. Vincent Segouin. Le pouvoir d’achat est à la baisse !

M. Teva Rohfritsch. Il s’agit aussi d’alléger le fardeau du coût de la vie ; de tenir les engagements pris, comme la suppression de la taxe d’habitation, tout en compensant les recettes des collectivités locales (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) ; de déployer rapidement un bouclier tarifaire contre la hausse des prix du gaz et de l’électricité ; enfin, de prévoir des aides exceptionnelles contre l’inflation pour les foyers les plus modestes, ainsi protégés par une expression de solidarité forte et novatrice.

Ce PLF permet de réengager l’État sur ses missions premières – plus de protection, plus de sécurité, plus de justice –, de réarmer les missions régaliennes, avec 1,7 milliard d’euros de crédits de plus pour nos armées, 1,5 milliard d’euros de plus pour l’intérieur, mais aussi 700 millions d’euros de plus pour la justice, soit une hausse de 8 % pour la seconde année consécutive.

M. Vincent Segouin. Ça, c’est de la gestion !

M. Laurent Duplomb. C’est le gouvernement de la dette !

M. Teva Rohfritsch. Ce PLF est également tourné vers la jeunesse, avec un budget de l’éducation nationale augmenté de 1,7 milliard d’euros et l’ouverture de plus de 1 million de parcours d’insertion et de contrats d’apprentissage, qui orientent nos jeunes vers l’emploi et la compétence.

M. Laurent Duplomb. Vous, vous êtes orientés vers l’incompétence !

M. Teva Rohfritsch. Symbole de la force d’adaptation républicaine, le service militaire adapté (SMA) poursuit son développement dynamique : en Nouvelle-Calédonie à Bourail, en Polynésie française à Hao, mais aussi à Mayotte avec le plan SMA 2025+.

Les sujets ne manquent pas. Il y a tant à dire sans doute, tant à débattre assurément, mais surtout à voter, parce que c’est notre rôle. Malheureusement, notre noble représentation a préféré rejeter à une très large majorité l’article d’équilibre et arrêter net l’examen du PLF.

Mes chers collègues, je vous le demande : que répondre lorsque les pourfendeurs du Sénat nous diront que notre chambre ne sert à rien ? (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Le projet de loi de finances sera adopté sans que nous l’ayons amendé ou même sans que nous ayons débattu de ce texte en séance publique. On parle dans certains rangs de « tradition de fin de quinquennat »… Nous avons des traditions plus belles !

À l’heure où nous prenons la présidence du Conseil de l’Union européenne, à l’heure où les Antilles connaissent une crise forte, à l’heure où de nombreux villages et foyers français ont été submergés par les eaux et la neige, à l’heure où la Nouvelle-Calédonie a choisi la France,…

M. Laurent Duplomb. À l’heure de la campagne électorale !

M. Teva Rohfritsch. … le Sénat décide de prendre des vacances budgétaires, pour mieux se consacrer à l’invective et aux jeux de couloirs !

Comment dire aux Français et aux élus locaux que nous n’avons pas voulu débattre des moyens consacrés au renforcement des services publics dans les territoires, des maisons France Services, des maisons de santé, de la réduction de la fracture numérique, de l’école plus inclusive et adaptée, des moyens déployés pour les finances locales, en particulier pour nos communes, avec la dotation globale de fonctionnement (DGF), qui a été stabilisée pour la cinquième année consécutive ?

M. François Bonhomme. Encore un ravi…

M. Teva Rohfritsch. Comment expliquer à nos concitoyens que nous n’avons pas cru bon de légiférer sur les mesures de cohésion sociale et de transition écologique, comme le plan quinquennal « Logement d’abord », la réforme de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), le dispositif MaPrimeRénov’ et les aides que sont les certificats d’économies d’énergie (CEE) ?

Toutefois, après tout, à quoi bon cette quête du débat perdu ? Car, au fond, ce PLF n’en appelle pas. Vous êtes dans le vrai : ce projet de loi de finances est si pertinent, équilibré et efficient qu’il serait politiquement suicidaire de s’y opposer. (Sourires sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)

Aussi, je vous invite, mes chers collègues, mais je rêve peut-être un peu,…

M. Laurent Duplomb. Et même beaucoup !

M. Teva Rohfritsch. … à voter en faveur du dernier projet de loi de finances du quinquennat, amendé par l’Assemblé nationale. Les Français nous regardent et ils apprécieront ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Vincent Segouin. De la dette, de la dette, de la dette !

M. Laurent Duplomb. Les générations futures paieront !

Mme le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme Vanina Paoli-Gagin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, finalement, l’examen du projet de loi de finances pour 2022 aura connu une procédure habituelle. J’entends par là que nos débats auront, malgré tout, suivi quelques figures imposées.

La première, c’est bien évidemment la traditionnelle motion tendant à opposer la question préalable, déposée par nos collègues communistes. Ils avaient pourtant fait savoir, par voie de presse, qu’ils ne comptaient pas voter la motion que le groupe majoritaire envisageait cette année de déposer. Mais, après que Les Républicains se sont ravisés, ils ont pris leurs responsabilités et déposé leur propre motion. Je tiens ici à saluer leur constance, qui n’a rien à envier à celle de Sisyphe.

La seconde figure imposée, à laquelle nous n’échapperons pas non plus cette année, c’est la motion tendant à opposer la question préalable avant la deuxième lecture. Celle-là, comme le veut la tradition, est déposée par la commission, après l’échec de la commission mixte paritaire.

On dit souvent qu’il est bon que les traditions ne se perdent pas. En l’occurrence, permettez-moi d’en douter. Car ces deux figures obligées montrent, au fond, que le Sénat est une chambre d’opposition politique, alors qu’elle doit être une assemblée constructive au service de nos territoires. (Oh là là ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Les élus locaux se moquent bien de savoir si nous rejetons le budget du Gouvernement. Ils veulent savoir comment nous choisissons de les défendre et de les représenter, de façon concrète, par les mesures que nous portons et par les arbitrages que nous prenons.

Aussi, depuis que la Haute Assemblée a décidé de rejeter la première partie du budget, donc renoncé à examiner sa deuxième partie, nous n’avons plus rien à revendiquer.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Il faudrait que le Gouvernement sache où il va !

Mme Vanina Paoli-Gagin. J’aurais aimé, pourtant, que nous puissions prendre un peu de hauteur pour débattre du plan France 2030.

Ce plan se structure autour de dix objectifs ambitieux pour les investissements publics. Je pense que nous sommes tous convaincus ici qu’il faut donner à la puissance publique les moyens de soutenir et d’accélérer les grandes transitions du siècle. Il nous faut nous assurer que la transition climatique ne sera pas une variable d’ajustement budgétaire, mais sera programmée sur le temps long.

Ainsi, quelque 30 milliards d’euros ont été inscrits dans le marbre de la loi. C’est énorme, mais la réussite d’un plan ne réside pas dans les crédits mobilisés ; en cela, je rejoins le rapporteur général.

Il faut que l’argent soit utilement fléché dans nos territoires, de façon opérationnelle, en lien avec nos collectivités locales et le tissu économique. Il faut que ce plan retisse la fibre de nos territoires. Nous avions là un rôle important à jouer. Pourtant, la majorité d’entre nous a volontairement renoncé au débat, tandis que les élus locaux, nos mandants, attendaient que nous nous fassions leur porte-voix.

J’aurais aimé, aussi, formuler des propositions sur les outils que nous comptions mettre en place pour mobiliser l’épargne des Français. Celle-ci n’est pas dans son état le plus dynamique sur les livrets, alors que les besoins de financement des transitions écologique et numérique sont massifs.

J’aurais également aimé vous faire des propositions concrètes pour optimiser l’immobilier universitaire, un sujet sur lequel j’ai déjà eu l’occasion de travailler au nom de la commission des finances.

Enfin, j’aurais évidemment souhaité que nous puissions formuler des propositions pour renforcer l’efficacité de la justice, pour mieux décarboner notre économie, ou encore pour renforcer la sécurité des Français.

Bref, cette deuxième partie aurait été l’occasion pour nous de faire valoir nos positions, non pas sur des considérations d’ordre général, mais sur des questions bien précises.

Je regrette sincèrement que le Sénat se soit ainsi privé de l’occasion d’examiner le budget dans sa totalité. Notre groupe, qui tient au débat, votera contre cette motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2022
Discussion générale (suite)

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Clôture du scrutin pour l’élection d’un juge suppléant à la cour de justice de la république

Mme le président. Mes chers collègues, il est plus de quinze heures. Le scrutin est clos pour l’élection d’un juge suppléant à la Cour de justice de la République.

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Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2022
Discussion générale (suite)

Loi de finances pour 2022

Suite de la discussion en nouvelle lecture et rejet d’un projet de loi

Mme le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean-Baptiste Blanc. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le rapporteur général de la commission des finances applaudit également.)

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2022
Question préalable (début)

M. Jean-Baptiste Blanc. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire a échoué, sans grande surprise, puisque nous avions fait le choix au Sénat de rejeter le projet de loi de finances.

Cette décision exceptionnelle a été prise pour alerter l’opinion sur la gravité de la situation de nos finances publiques. Celle-ci a été, bien sûr, fortement aggravée par la crise économique liée à la crise sanitaire, qui a nécessité l’adoption de nombreuses mesures coûteuses pour faire face à l’urgence et sauvegarder, puis relancer, notre économie. Nous ne contestons pas la nécessité de ces dépenses. Nous les avons même soutenues, en adoptant tous les projets de loi de finances rectificative qui les ont mises en œuvre.

En revanche, la situation extrêmement dégradée de nos finances publiques – je le rappelle, nous nous situons en queue de peloton de l’Union européenne pour quasiment tous les indicateurs – résulte également de la gestion de nos finances en dehors de la crise.

Comme l’a rappelé notre rapporteur général à plusieurs reprises, les dépenses ordinaires, c’est-à-dire non liées à l’urgence ou à la relance, ont dérivé de 60 milliards d’euros durant ce quinquennat par rapport à l’objectif que s’était fixé Emmanuel Macron au début de son mandat, dans la loi de programmation des finances publiques.

Monsieur le ministre, vous avez annoncé à plusieurs reprises la fin du « quoi qu’il en coûte ». Dès janvier 2021, il y a presque un an, vous expliquiez : « Le niveau de dépenses que nous connaissons aujourd’hui n’est pas soutenable dans le temps. »

Pourtant – c’est ce que nous avons voulu dénoncer par notre vote négatif, en refusant d’examiner le volet dépenses du projet de loi de finances –, depuis trois mois, le président Emmanuel Macron et le Premier ministre n’ont cessé d’annoncer de nouvelles dépenses sans aucun lien avec la crise, une succession de chèques en bois qui a fait exploser le compteur. La plupart de ces mesures ont été intégrées au fil de la discussion budgétaire, sans étude d’impact – faut-il le rappeler ? –, ce qui, au regard des montants en jeu, soit plusieurs dizaines de milliards d’euros, est du jamais vu !

Nous pouvons vous détailler l’objet de ces annonces, mais vous les connaissez, et la liste a été reprise dans la presse. Je tiens cependant à en rappeler les montants, pour que ceux qui nous écoutent puissent comprendre ce que signifie la fin du « quoi qu’il en coûte »…

Le 2 septembre, ce fut une première annonce de 500 millions d’euros ; le 3 septembre, 1,5 milliard d’euros ; le 6 septembre, 300 millions ; le 9 septembre, 21 millions ; le 13 septembre, 1 milliard d’euros ; le 14 septembre, 50 millions d’euros, puis 500 millions d’euros ; le 16 septembre, 600 millions d’euros… Et je ne cite pas tous les chiffres !

Pour résumer, ont été annoncés 2 milliards d’euros le 17 septembre et 1,4 milliard d’euros le 27 septembre.

M. Laurent Duplomb. Qui dit mieux ?

M. Jean-Baptiste Blanc. Le 30 septembre, 5,9 milliards d’euros ont été annoncés pour le bouclier tarifaire, qui, comme l’a rappelé notre rapporteur général, pourrait exploser jusqu’à atteindre 12 milliards d’euros !

Le 12 octobre, 34 milliards d’euros – excusez du peu ! – sont consacrés, au travers de l’amendement le plus cher de l’histoire de la Ve République, comme on n’a cessé de le répéter, et ce matin encore en commission, au plan France 2030.

M. François Bonhomme. Quelle générosité ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Baptiste Blanc. Ces 34 milliards d’euros ont été votés les yeux fermés par les députés de la majorité, sans que l’on sache qui va les piloter ni vers où précisément ces crédits vont être dirigés…

Je poursuis : le 14 octobre, 200 millions d’euros annoncés ; le 21 octobre, 3,8 milliards d’euros, etc.

M. François Bonhomme. Cela donne le tournis !

M. Jean-Baptiste Blanc. Le même jour, le 3 novembre, sont annoncés à l’Assemblée nationale : 2 milliards d’euros, 200 millions, 300 millions, 400 millions d’euros, puis de nouveau 400 millions d’euros, 300 millions d’euros et, enfin, 200 millions d’euros !

Je vous prie de bien vouloir m’excuser, mes chers collègues, pour cette énumération fastidieuse, mais elle me semblait nécessaire pour mettre en lumière, de manière manifeste, la contradiction avec la prétendue fin du « quoi qu’il en coûte » ! À cette liste, je pourrais ajouter l’annonce, il y a une semaine, de 350 millions d’euros de prime de Noël.

Le courage en politique, paraît-il, c’est de dire la vérité. Et la vérité, au risque de vous décevoir à dix jours des fêtes de fin d’année, c’est que le père Noël n’existe pas ! (Exclamations amusées sur les travées des groupes Les Républicains, UC et SER.)

M. François Bonhomme. En est-on sûr ? (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Baptiste Blanc. Emmanuel Macron infantilise les Français. Il veut leur faire croire que le père Noël existe, et que c’est lui. Et c’est Noël avant l’heure !

En septembre, en octobre, en novembre, lors de sa tournée à travers la France, il aura promis presque chaque jour, comme nous venons de le voir, de nouveaux cadeaux fiscaux et des chèques de Noël aux Français.

En trois mois, il aura promis plus de 25 milliards d’euros pour 2022, et même plus de 30 milliards d’euros si le coût du bouclier tarifaire explose.

M. François Bonhomme. Ne cassez pas les rêves…

M. Jean-Baptiste Blanc. Et comme l’a précisé M. le rapporteur général, ce sont près de 65 milliards d’euros qui affecteront les cinq années du prochain quinquennat, si nous tenons compte des mesures pluriannuelles ou pérennes ; 25 milliards d’euros en trois mois, c’est entre 200 et 300 millions d’euros promis en moyenne chaque jour !

Jamais un Noël n’aura été aussi faste ! Manifestement, le père Noël Macron confond le calendrier de l’Avent avec le calendrier électoral. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Baptiste Blanc. Sauf que, manifestement, le père Noël n’existe pas.

M. Teva Rohfritsch. Vous l’avez déjà faite, celle-là…

M. Jean-Baptiste Blanc. Les enfants, en grandissant, apprennent que ce sont les parents qui paient leurs cadeaux. Avec le père Noël Macron, la réalité est bien pire encore : les cadeaux sont pour les parents et sont payés avec la tirelire de leurs enfants et petits-enfants ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

Emmanuel Macron, ce n’est pas le père Noël, c’est le père Fouettard !

M. Teva Rohfritsch. Il faudrait savoir !

M. Jean-Baptiste Blanc. Au regard de cette situation et de notre position en première lecture, il est inutile de refaire le débat et de réexaminer le budget, puisque les mêmes causes auront les mêmes conséquences.

C’est pourquoi le groupe Les Républicains approuvera la position de la commission des finances et votera la motion tendant à opposer la question préalable. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Laurent Duplomb. Elle va dire qu’il n’y a pas encore assez de dépenses…

Mme Sophie Taillé-Polian. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici donc à la fin de ce qui aurait dû et aurait pu être le fameux et traditionnel marathon budgétaire. Au lieu de quoi nous avons économisé nos efforts dans cet hémicycle, puisque nous n’avons pas eu le loisir de discuter de l’intégralité de ce projet de budget, ce qui, vous le savez, est fort dommageable pour la démocratie et le rôle de notre assemblée.

Cela étant, le présent projet de loi de finances est assez proche du texte qui nous avait été transmis initialement. Leurs caractéristiques étant les mêmes, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne peut évidemment pas voter un budget qui aggrave la dette à cause de la volonté farouche, partagée par le Gouvernement et la majorité sénatoriale, de baisser toujours plus les impôts et toujours au bénéfice des mêmes.

Non seulement ce projet de budget aggrave l’endettement de notre pays, mais il ne répond pas aux deux enjeux majeurs auxquels nous sommes confrontés. En effet, les décisions de justice pleuvent et se ressemblent !

Le 19 novembre 2020, le Conseil d’État, saisi par l’Affaire du siècle et la mairie de Grande-Synthe, observait que la baisse des objectifs de diminution des gaz à effet de serre pour la période 2019-2023 remettait en cause la possibilité pour la France de respecter l’accord de Paris sur le climat. Le Conseil demandait que démonstration soit faite que ces objectifs demeuraient réalistes. Il n’a pas reçu de réponse.

En août 2021, le Conseil d’État épinglait l’État sur la question de la qualité de l’air.

Le 14 octobre 2021, le Conseil d’État – encore lui ! – fixait au 31 décembre 2022 l’échéance pour réparer le préjudice écologique. Or ce projet de budget permet-il à l’État d’atteindre cet objectif ? Non ! Malgré nos interrogations répétées, cette question est passée sous silence.

Le préjudice est écologique, mais aussi social – nous ne cessons de le répéter. Les Français savent que la justice fiscale est un vain mot, et ils le déplorent fortement lors de leurs nombreuses mobilisations.

S’agissant des grandes causes, définies comme telles, les objectifs fixés n’ont pas été atteints au cours du quinquennat.

Ainsi, sur les questions de l’égalité femmes-hommes et de la lutte contre les violences faites aux femmes, on sait que notre pays manque d’ambition, notamment parce qu’il manque un élément crucial : allouer aux ministères concernés, ainsi qu’aux associations qui portent, accompagnent et aident les femmes, les moyens nécessaires. (M. Laurent Duplomb sexclame.)

Ce gouvernement a pris l’immense responsabilité de ne pas aller aussi loin qu’il était possible et nécessaire pour mettre véritablement fin aux violences faites aux femmes.

Autre grande cause oubliée de ce quinquennat : la place des personnes en situation de handicap dans notre société.

On cite souvent le problème de la conjugalisation de l’AAH, qui met sous tutelle toutes les personnes handicapées, mais on pourrait aussi évoquer le budget de l’éducation nationale. À travers toute la France, des enfants n’ont pas accès à leurs droits dans les classes : ils n’ont pas le droit à un accompagnement régulier et cohérent assuré par des personnels formés, les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH), lesquels doivent être respectés en termes tant de contrats que de rémunérations.

Quant à la jeunesse, elle devait être mise à l’honneur au travers de ce projet de budget. Or le Gouvernement n’est pas au rendez-vous.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera donc contre ce projet de loi de finances. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)