M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Catherine Deroche. Ma question s’adressait à Mme la ministre des affaires étrangères.

Le 14 septembre dernier, le président Larcher recevait le docteur Denis Mukwege, prix Nobel de la paix 2018. Ce médecin, gynécologue obstétricien, opère chaque semaine dans l’hôpital de Panzi des victimes de viols perpétrés dans l’est de la République démocratique du Congo.

Ces violences sont connues depuis plus de vingt ans. En 2010, le rapport de mapping de l’ONU dénonçait ces crimes de guerre. Pourtant, depuis lors, rien ne bouge vraiment. Tout cela intervient sur fond d’enjeux économiques importants dans cette zone, site important de production de cobalt et de coltan.

Quelle a été et quelle est l’action de la France pour porter à l’international la voix de ces populations martyrisées, qui méritent reconnaissance, mais aussi justice, c’est-à-dire condamnation des auteurs et réparation ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées du groupe SER. – Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Julien Bargeton applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger.

M. Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de lattractivité et des Français de létranger. Madame la sénatrice Deroche, la recrudescence des violences dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) est en effet préoccupante. Je pense en particulier à la reprise depuis le 20 octobre dernier des combats entre le Mouvement du 23 mars (M23) et les forces armées de la RDC, après plus de trois mois d’accalmie.

Nous condamnons depuis longtemps les activités de tous les groupes armés, appelant ces derniers à cesser le combat, à déposer les armes et à prendre part au processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration. Il est nécessaire que toutes les parties mettent en œuvre rapidement leurs engagements, notamment ceux qui ont été pris lors d’une réunion organisée le 21 septembre dernier par le Président de la République à New York pour établir un dialogue régional apaisé et contribuer à la stabilité dans l’est de la RDC.

La situation actuelle démontre l’importance de la lutte contre l’impunité en RDC. La France joue un rôle moteur, au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, pour que la Mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (Monusco) continue d’être dotée d’un mandat exigeant en la matière. Elle soutient également la mise en œuvre de mesures restrictives, au sein des Nations unies et de l’Union européenne, contre des personnalités responsables de graves violations des droits de l’homme.

Enfin, nous soutenons depuis de très nombreuses années l’action du docteur Denis Mukwege en faveur des femmes victimes de violences sexuelles, notamment via l’appui de son hôpital et de sa fondation à Bukavu. Dans la droite ligne de l’engagement pris par le Président de la République lors du sommet du G7 présidé par la France, en 2019, notre pays a également mobilisé plus de 6 millions d’euros au profit du Fonds mondial pour les survivantes de violences sexuelles liées au conflit, que ce médecin et Nadia Murad ont créé. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour la réplique.

Mme Catherine Deroche. Le docteur Denis Mukwege compte en effet beaucoup sur la France, ainsi que sur les autres pays.

Je veux rappeler ses propos lors de la réception du prix Sakharov, en 2014 : « Chaque femme violée, je l’identifie à ma femme. Chaque mère violée, je l’identifie à ma mère et chaque enfant violé, je l’identifie à mes enfants. […] Quel est cet être humain doué de conscience qui se tairait quand on lui amène un bébé de 6 mois dont le vagin a été détruit soit par la pénétration brutale d’un adulte, soit par des objets contondants, soit par des produits chimiques ? […] Comment me taire quand, depuis quinze ans, nous voyons ce que même un œil de chirurgien ne peut s’habituer à voir ? »

C’était il y a huit ans. La France ne peut pas, ne doit pas détourner le regard, et elle ne peut pas se taire. (Applaudissements nourris.)

dumping social sur la ligne transmanche

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe INDEP.)

M. Michel Canévet. Monsieur le président, madame la Première ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la France est un grand pays maritime, et nous souhaitons qu’elle le demeure. À l’approche des quatrièmes Rencontres du transmanche, qui se tiendront en fin de semaine à Saint-Malo, et avant les Assises de l’économie de la mer, qui auront lieu la semaine prochaine à Lille, je souhaite interroger le Gouvernement sur les conditions de concurrence dans le transport maritime transmanche et méditerranéen.

Les armateurs sont actuellement confrontés à une concurrence déloyale, puisqu’un certain nombre d’opérateurs utilisent de la main-d’œuvre extraeuropéenne à bas coût pour assurer leurs liaisons maritimes. Cela n’est pas acceptable, parce que les conditions salariales, notamment en matière de temps de travail, imposées à nos opérateurs ne sont pas respectées par ces concurrents.

Il convient de restaurer des conditions normales de concurrence. C’est pourquoi je demande au Gouvernement ce qu’il compte faire pour essayer d’assainir la situation. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la mer.

M. Hervé Berville, secrétaire dÉtat auprès de la Première ministre, chargé de la mer. Monsieur le sénateur Canévet, je vous remercie de votre question, qui dépasse le simple sujet des ferries transmanche, puisque c’est celle, au fond, du modèle social de notre économie maritime. La France doit demeurer une puissance maritime importante, mais dans le cadre de ses valeurs, de son identité et du renforcement de son modèle social.

Une entreprise, P&O Ferries, a brutalement licencié 800 personnes par visioconférence l’été dernier. C’est inacceptable et révoltant ! Depuis le mois de juillet dernier, nous sommes en relation avec le gouvernement anglais, mais également avec tous nos partenaires de l’Union européenne pour faire face à cette situation et trouver des solutions.

Aussi le Gouvernement fait-il, sous l’autorité de la Première ministre et du Président de la République, de la lutte contre le dumping social l’une de ses priorités.

J’ai rencontré l’été dernier Jean-Marc Roué, de l’entreprise Brittany Ferries, mais aussi la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC), la CFDT et la CGT. Ainsi, nous avons tenu, la semaine dernière, dans les locaux d’Armateurs de France, une réunion inédite associant les organisations syndicales et patronales et le Gouvernement, afin d’avancer très concrètement sur le sujet.

Nous avons défini trois orientations.

D’abord, je vous l’annonce, nous allons renforcer les contrôles dans le transmanche, afin de démontrer notre exigence concernant la protection sociale de nos marins.

Ensuite, j’ai mandaté au mois d’août dernier une mission de l’inspection générale des affaires maritimes pour mettre sur la table, d’ici à Noël, toutes les options, y compris une loi de police interdisant à tous les navires qui ne respecteraient pas des normes sociales élevées d’accéder à un port français, pour un départ ou une arrivée.

Enfin, vous l’avez indiqué, il s’agit d’un enjeu non seulement pour le transmanche, mais encore pour la Méditerranée et pour les autres activités maritimes. C’est pourquoi, dans le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, nous avons étendu un dispositif visant à renforcer notre modèle social, grâce aux énergies marines renouvelables.

Ainsi, vous le voyez, le Gouvernement a pris conscience de ces enjeux.

J’en profite pour saluer tous les députés et sénateurs qui se battent sur le sujet.

M. le président. Il faut conclure !

M. Hervé Berville, secrétaire dÉtat. J’aurai très prochainement une discussion avec mon homologue anglais, quand il sera définitivement installé, afin de renforcer les contrôles et de définir une politique bilatérale permettant de lutter contre des pratiques aussi déloyales et inacceptables. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour la réplique.

M. Michel Canévet. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces orientations, qui sont importantes, car il s’agit non pas d’engager plus d’argent dans les entreprises, mais de faire en sorte que les conditions de concurrence soient respectées. C’est bien ce que vous venez de proposer, et je l’apprécie.

Il importe que l’on puisse convaincre les autorités britanniques, pour ce qui concerne le transmanche, et espagnoles et italiennes, pour ce qui concerne la Méditerranée, d’être aussi exigeantes à l’égard de ceux qui viennent dans nos ports qu’à l’égard des entreprises de notre pays. Il y va notamment de l’avenir de Brittany Ferries, premier employeur de marins en France. Nous souhaitons que le modèle maritime français subsiste. La France, qui est un grand pays maritime, doit pouvoir le rester demain.

Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour y parvenir. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)

relations franco-allemandes

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Rapin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la guerre entre la France et l’Allemagne « redevient possible » !

Ces mots, qui interpellent, ne sont pas de moi ; ils sont de Jacques Attali, qui titrait ainsi sa tribune dans Les Échos, au lendemain de la rencontre à Paris entre MM. Scholz et Macron, pourtant qualifiée de « constructive ». Elle ne l’était en tout cas pas assez pour déboucher ne serait-ce que sur une déclaration commune à la presse. Et qu’est-il sorti de cette rencontre ? Des groupes de travail… Voilà qui n’est pas propre à nous rassurer.

La guerre en Ukraine signifie un changement d’époque, mais l’Allemagne continue de jouer cavalier seul. Elle sort de son chapeau 200 milliards d’euros pour amortir la crise énergétique. Elle refuse notre demande de plafonnement européen du prix du gaz. Elle choisit SpaceX pour lancer ses satellites. Elle achète des équipements militaires américains sans égard pour nos projets communs de char et d’avion de combat. Elle lance un bouclier antimissile européen sans la France. Et elle va se rendre seule, après-demain, à Pékin, à qui elle vend le port de Hambourg…

Monsieur le ministre, vous nous devez la vérité : la confiance à l’égard de l’Allemagne est-elle en berne ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger.

M. Bruno Sido. La Première ministre devrait répondre !

M. Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de lattractivité et des Français de létranger. Monsieur le sénateur Rapin, le couple franco-allemand a été à la fondation même des communautés européennes et en demeure, depuis lors, un moteur essentiel. L’entretien entre le Président de la République et le chancelier Scholz à Paris, mercredi dernier, a permis de réaffirmer une ambition commune et de définir une méthode de travail pour les prochaines semaines.

La France et l’Allemagne sont convenues de rechercher, dans tous les domaines, des perspectives communes face aux défis de notre temps. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.)

Mme Sophie Primas. Tout ça, c’est du bla-bla !

M. Olivier Becht, ministre délégué. Plusieurs chantiers ont été lancés : mise en place d’un fonds franco-allemand pour l’innovation, rénovation des structures du partenariat franco-allemand…

M. Bruno Retailleau. C’est décisif ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Olivier Becht, ministre délégué. … ou encore constitution d’un réseau entre les futures élites de nos deux pays.

M. Jacques Grosperrin. Vous ne répondez pas à la question !

M. Olivier Becht, ministre délégué. Nous allons approfondir le dialogue franco-allemand, en particulier sur l’énergie, la défense et le spatial, (Exclamations ironiques sur les travées des groupes Les Républicains et SER.) ou encore sur les conséquences pour l’Europe de la politique américaine, notamment au regard de l’Inflation Reduction Act. (Mêmes mouvements.)

Nous avons particulièrement bien travaillé avec nos amis allemands lors de la réunion informelle des ministres européens du commerce, qui s’est tenue à Prague le week-end dernier.

Nous espérons que cette nouvelle approche, qui nécessitera un travail important de la part du Gouvernement, se matérialisera dès le conseil des ministres franco-allemand du mois de janvier prochain, à l’occasion du soixantième anniversaire du traité de l’Élysée.

La ministre de l’Europe et des affaires étrangères travaillera étroitement avec Mme Annalena Baerbock, qu’elle rencontrera lors de la réunion des ministres des affaires étrangères du G7, à Münster, en Allemagne, puis plus longuement, à Paris, à la fin du mois.

Nous souhaitons définir les axes de travail pour agir en franco-allemand. Je pense à l’Ukraine, en particulier à sa reconstruction à court et à long terme, au renforcement de l’autonomie stratégique de l’Union européenne ou encore à l’Afrique, notamment à notre présence au Sahel.

Vous le voyez, le couple franco-allemand demeure solide. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous travaillons en confiance, et nous sommes bien décidés à agir ensemble pour relever les défis de notre temps. (M. François Patriat et Mme Patricia Schillinger applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour la réplique.

M. Jean-François Rapin. Monsieur le ministre, vous avez parlé de « couple » ; j’ai simplement parlé de « relation ».

La construction européenne s’est faite après-guerre, grâce à la convergence d’intérêts entre une Allemagne qui cherchait la rédemption et une France qui voulait incarner sa puissance. Les temps ont changé. L’Allemagne ne s’excuse plus ; elle s’affirme. Et la France est à sa remorque.

Déjà distancé en matière économique, notre pays risque à présent le déclassement diplomatique. Et tout cela parce que l’élargissement de l’Union européenne va recentrer géopolitiquement l’Allemagne au cœur de l’Europe. Est-elle capable de mieux articuler ses intérêts propres avec l’intérêt stratégique supérieur que nos deux pays partagent : une Europe de la paix et de la liberté ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

stratégie de développement de la filière hydrogène

M. le président. La parole est à M. Sebastien Pla, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Sebastien Pla. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la souveraineté énergétique française est mise à mal. Les énergies décarbonées produites localement et la diversification des approvisionnements apparaissent comme une solution d’avenir. L’hydrogène est une piste sérieuse, qui présente de nombreux atouts, notamment celui de décarboner les activités industrielles et les mobilités.

Le plan d’action REPowerEU insiste sur la nécessité de créer un réseau de distribution à l’échelle européenne. Cette dorsale concerne vingt et un pays et viserait à interconnecter les centres de production régionaux et nationaux pour se prémunir de la dépendance au gaz russe.

La mise en œuvre de ce plan permettra d’alimenter les usagers industriels, parmi lesquels le premier hub « d’hydrogène vert éolien offshore » à Port-la-Nouvelle, maillon essentiel de la transition énergétique en Méditerranée occidentale, porté par la région Occitanie et financé fortement par l’Europe, l’État et la Banque publique d’investissement (BPI).

Dans ce contexte, c’est avec la plus grande surprise que nous avons appris dans la presse la naissance d’un nouveau projet de gazoduc sous-marin entre Barcelone et Fos-sur-Mer, baptisé « BarMar ». Ce nouveau projet ne peut pas ignorer et balayer d’un revers de main la stratégie de développement en Occitanie d’une filière industrielle de massification de production et d’usages d’hydrogène décarboné, déjà en phase opérationnelle.

Si le projet BarMar va dans le bon sens, nous n’avons aucune information quant à son impact économique et écologique ou à la stratégie énergétique visée, contrairement au projet initial Midi-Catalogne, ou MidCat, qui reliait les centres de production régionaux, ainsi que les utilisateurs industriels de Bordeaux à Marseille.

Madame la ministre, pouvez-vous nous assurer que la région Occitanie aura confirmation, lors du sommet européen d’Alicante des 8 et 9 décembre prochains, de sa future connexion au projet BarMar via le pôle industriel de Port-la-Nouvelle ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition énergétique.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique. Monsieur le sénateur Pla, je veux tout d’abord vous dire l’engagement de la France à soutenir une filière d’hydrogène bas carbone. Il s’agit de l’un des grands axes de notre politique industrielle et énergétique.

Nous investissons dans cette filière 9 milliards d’euros dans le cadre du plan France 2030, pour faire émerger toutes les briques technologiques de la filière hydrogène bas carbone : électrolyseurs, piles à combustible, solutions de stockage. Je pense par exemple au projet de production d’hydrogène décarboné de Port-la-Nouvelle pour la filière transport ou à d’autres projets qui vont permettre de décarboner nos industries et dont les collectivités locales se serviront comme d’un levier de décarbonation, comme celui de l’agglomération de Dijon en matière de transports en commun ou encore le train à hydrogène vert, soutenu par plusieurs régions, dont l’Occitanie.

Le Président de la République a pris deux décisions fortes avec les chefs de gouvernement espagnol et portugais : premièrement, renforcer les interconnexions entre la péninsule ibérique et la France en matière d’électricité, en ce qu’il s’agit du premier levier pour faciliter la production d’hydrogène sur base bas carbone ; deuxièmement, remplacer le projet MidCat, qu’il était difficile de mener à terme, par une solution sous-marine reliant Barcelone à Marseille pour en faire une infrastructure hydrogène, en complément des autres infrastructures que nous allons devoir développer pour porter nos ambitions.

Je veux vous rassurer : l’Occitanie a pris des engagements forts en matière d’hydrogène vert que nous continuerons de soutenir, parce qu’il s’agit de solutions créatrices d’emploi et parce que nous avons besoin d’électrolyseurs sur notre territoire.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Nous souhaitons faire de la France un des leaders mondiaux de l’hydrogène. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Sebastien Pla, pour la réplique.

M. Sebastien Pla. Madame la ministre, ce ne sont pas tant les moyens – 8 milliards d’euros, c’est colossal – que la méthode qui pose question : le projet BarMar sort du chapeau du Président de la République, en accord avec les chefs de gouvernement espagnol et portugais, mais sans aucune concertation avec les acteurs locaux, dont les industriels et les élus, du MidCat ni avec la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), qui n’était pas au courant. Il y a un réel problème de méthode.

Cela dit, je tiens à remercier le précédent Premier ministre d’avoir consacré d’importants investissements à Port-la-Nouvelle.

M. le président. Il faut conclure !

M. Sebastien Pla. Toutefois, si l’on ne connecte pas BarMar au projet de Port-la-Nouvelle, ce dernier ne fonctionnera pas, et l’Occitanie et l’Aquitaine passeront à côté du futur de l’hydrogène. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

déploiement des zones à faibles émissions

M. le président. La parole est à M. Philippe Tabarot, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Tabarot. Ma question s’adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Avant de poser ma question, je souhaiterais demander à M. le ministre délégué chargé des transports de cesser de laisser entendre, comme il l’a fait mercredi dernier dans cet hémicycle, que vous allez investir 12 milliards d’euros cette année dans le réseau ferroviaire, car c’est faux ! Pour vous paraphraser, c’est de « l’esbroufe », contrairement aux moyens supplémentaires votés par le Parlement !

Nous sommes au dernier rang européen, avec la Lituanie, en matière de modernisation du réseau. Nos lignes ferroviaires vont être ralenties ou fermées les unes après les autres faute d’investissements si vous ne réagissez pas fortement.

Vous devriez écouter plus souvent les appels du Sénat, comme sur la question des zones à faibles émissions (ZFE). Nous avions proposé, lors de l’examen de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et résilience, un certain nombre de mesures pour obtenir l’adhésion de nos concitoyens.

Car oui, il est urgent de décarboner nos transports pour cause de santé publique. Mais pour faire accepter une réforme qui va affecter d’ici à deux ans près de 40 % du parc automobile, il faut informer, écouter, accompagner nos compatriotes, ce qui n’avait pas été fait jusqu’à la semaine dernière : devant les quarante-trois présidents d’agglomération concernés, vous avez enfin repris quelques-unes des propositions du Sénat, rejetées à l’époque par la ministre Pompili, comme le prêt à taux zéro, la révision du schéma de restriction et l’ineffectivité des contrôles.

Mais le préalable indispensable demeure un développement massif de l’offre de transports en commun de la France périphérique vers nos agglomérations pour réduire cette fracture qui mine notre pays. Monsieur le ministre, à défaut de freinage d’urgence ou de rétropédalage, n’est-il pas temps, avec pragmatisme, de revoir l’ensemble du dispositif des zones à faibles émissions ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur Tabarot, je répondrai avec beaucoup de joie et de précision à la deuxième partie de votre question dans quelques instants. En revanche, j’ai trouvé votre introduction abrupte et imméritée : pour travailler avec lui, je peux vous assurer que Clément Beaune n’est nullement dans l’esbroufe. (Mme Frédérique Puissat proteste.)

Nous œuvrons, dans le cadre de la planification écologique, à vous présenter des investissements massifs. Pour ce faire, nous suivons une méthode claire : nous attendons le rapport du Conseil d’orientation des infrastructures (COI), dont vous êtes membre, et qui a pris soin d’auditionner tous les territoires pour déterminer une feuille de route en s’appuyant sur cette remontée des besoins. Dans l’esprit de la loi d’orientation des mobilités (LOM 1), notre méthode consiste à se mettre d’accord sur les projets avant de débourser l’argent ; il doit en aller de même pour la saison 2.

En ce qui concerne les ZFE, personne ici ne le conteste, nous ne pouvons pas continuer de compter les morts de la pollution atmosphérique sans réagir, même si Santé publique France mesure une amélioration de la qualité de l’air : 47 000 morts en 2021 liées aux particules fines ou au dioxyde d’azote, cela nécessite de donner aux élus de proximité les moyens nécessaires pour agir.

Mais si notre politique écologique de lutte contre le réchauffement climatique se fait au détriment des plus fragiles, nous perdrons leur adhésion, et nous transformerons une cause juste en une nouvelle levée de boucliers des uns contre les autres. Nous ferons alors de l’écologie un combat ou une guerre au lieu d’en faire un chemin et de la rendre désirable, comme cela est notre ambition.

C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de mettre en place un comité interministériel tous les six mois pour profiter des retours d’expérience, de mener un travail spécifique sur l’accessibilité sociale, de conduire une réflexion sur les mesures d’accompagnement, d’accorder de premiers moyens dans le cadre du Fonds vert, de réfléchir à des dispositifs, un peu sur le modèle de ce qui se fait à Strasbourg, permettant aux voitures, même hors critères, d’accéder aux centres-villes sous certaines conditions, d’intensifier les primes avec l’abandon de la réciprocité sur la surprime ZFE, de mener une campagne de communication nationale l’année prochaine… Autant de sujets qui nous permettront d’améliorer ensemble le dispositif sans en détricoter l’ambition. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées des groupes INDEP et UC.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Tabarot, pour la réplique.

M. Philippe Tabarot. Monsieur le ministre, n’oubliez pas non plus de redonner la main aux élus. À défaut, vos ZFE deviendront des zones à forte exclusion ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

nomination du directeur du mucem

M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Stéphane Le Rudulier. Le monde de la culture est en émoi, en effervescence, après la nomination par le président Macron de Pierre-Olivier Costa à la tête du musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem).

Plusieurs hauts fonctionnaires spécialistes de l’art et de la culture ont dénoncé cette nomination, qui, selon eux, relèverait du pur copinage. M. Pierre-Olivier Costa, ancien directeur de cabinet de Mme Brigitte Macron et ancien chef de cabinet du Président de la République, ne répondrait pas aux qualifications nécessaires pour le poste.

Ma question est simple : quels ont été les critères retenus pour asseoir la nomination de Pierre-Olivier Costa ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Laurence Rossignol applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur Le Rudulier, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre de la culture, qui assiste à la cérémonie en hommage à Pierre Soulages.

En ce qui concerne la procédure de nomination de M. Pierre-Olivier Costa à la tête du musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, le fabuleux Mucem, il n’y a pas eu d’appel à candidatures, ce qui n’est pas exceptionnel en soi. En effet, beaucoup des candidats à ce type de poste souhaitent garder la confidentialité sur leur candidature, (Marques dironie sur les travées des groupes Les Républicains et SER.) parce qu’ils se trouvent déjà à la tête de lieux de prestige culturel. Tel fut le cas, par exemple, pour le musée du Louvre ou le Théâtre national de Strasbourg. Pour autant, la ministre confirme avoir reçu plusieurs candidats ayant manifesté leur intérêt pour prendre la tête du Mucem.

La légitimité de Pierre-Olivier Costa est reconnue. Il a exercé une grande partie de sa carrière dans le milieu culturel : il a participé au lancement du Journal des Arts, a eu des responsabilités au sein de la Réunion des musées nationaux, a travaillé au Centre Pompidou et au Centre national de la cinématographie (CNC), avant de rejoindre la Ville de Paris puis la présidence de la République. M. Pierre-Olivier Costa a 54 ans. Ne résumez pas sa carrière professionnelle aux cinq dernières années, alors qu’il a dédié la quasi-totalité de sa vie professionnelle au monde de la culture.