M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Nous pensons qu’une telle mesure de simplification évitera le renvoi à des procédures plus longues et permettra une acceptation par les parties. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 265.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 187, présenté par Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 58

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au premier alinéa de l’article 568, le nombre : « cinq » est remplacé par le nombre : « dix » ;

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Cet amendement a pour objet d’harmoniser les délais de pourvoi en cassation avec ceux de l’appel. Nous considérons qu’il est nécessaire d’unifier les délais en matière pénale, afin de simplifier la procédure.

Dans cette optique, nous proposons d’aligner le délai prévu à l’article 568 du code de procédure pénale sur celui du délai d’appel, soit dix jours.

Actuellement, le délai de pourvoi en cassation diffère de celui de l’appel, ce qui peut entraîner des complications et des incohérences dans le déroulement des procédures.

En alignant ces délais, il serait donc possible d’établir une cohérence dans les délais de recours et, ainsi, de faciliter le travail des parties concernées et des juridictions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Une telle mesure relèvera de la simplification globale du code de procédure pénale que nous souhaitons. Pour le moment, nous pensons que c’est un peu prématuré. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Sur le fond, pourquoi pas ? Mais cette disposition est un peu en dehors du texte, si j’ose dire. Surtout, il faudrait concerter les procureurs généraux, les procureurs, les avocats à la Cour de cassation, pour savoir s’ils estiment que cette mesure est utile.

En l’état, je suis donc défavorable à cet amendement, mais, si l’on me dit qu’il faut absolument en passer par là, je serais tout à fait ravi d’adopter une position contraire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 187.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 266, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 59

Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

…° L’article 706-24-2 est ainsi rétabli :

« Art. 706-24-2. – Les interprètes mentionnés à l’article 803-5 peuvent être nominativement autorisés par le procureur général près la cour d’appel de Paris, dans les procédures relatives aux infractions entrant dans le champ d’application de l’article 706-16, à ne pas être identifiés par leurs noms et prénoms, lorsque la révélation de leur identité est susceptible, compte tenu des conditions d’exercice de leur mission, de mettre en danger leur vie ou leur intégrité physique ou celle de leurs proches.

« Cette décision permet à l’interprète qui en bénéficie d’être identifié par un numéro anonymisé.

« L’état civil des interprètes visés au premier alinéa ne peut être communiqué que sur décision du procureur général près la cour d’appel de Paris. Il est également communiqué, à sa demande, au président de la juridiction de jugement saisie des faits.

« Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État. » ;

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Cet amendement est très simple : il vise à ce que les interprètes qui interviennent en matière de terrorisme puissent bénéficier de l’anonymat. Ce serait, pour eux, une mesure de sécurité.

Cela me paraît très utile. Je ne veux pas que ces personnes, qui collaborent à la justice, soient éventuellement menacées, poursuivies, inquiétées, recherchées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 266.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 7 rectifié est présenté par MM. Roux, Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Guérini.

L’amendement n° 96 est présenté par Mme Benbassa.

L’amendement n° 135 est présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 67

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…°Au premier alinéa de l’article 719, après les mots : « zones d’attente », sont insérés les mots : « , les hôpitaux psychiatriques » ;

La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour présenter l’amendement n° 7 rectifié.

M. Jean-Yves Roux. Cet amendement a un objet très simple : inclure les hôpitaux psychiatriques dans la liste des lieux de privation de liberté susceptibles de faire l’objet d’un droit de visite par les parlementaires ou le bâtonnier.

Pour mémoire, la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes a autorisé les députés et sénateurs à visiter à tout moment les locaux de garde à vue. En 2015, ce droit avait été élargi aux centres éducatifs fermés.

Je crois que nous devons aller plus loin et inclure les services de psychiatrie. En effet, si l’hôpital n’est pas, par définition, un lieu de privation de liberté, il s’y trouve des patients admis sans leur consentement et dont la liberté d’aller et venir est restreinte, parfois dans des conditions très discutables.

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 96.

Mme Esther Benbassa. Cet amendement vise à inclure dans la liste des lieux de privation de liberté susceptibles de faire l’objet d’un droit de visite des parlementaires et des bâtonniers les hôpitaux psychiatriques.

Certes, les hôpitaux psychiatriques ne sont pas considérés comme des lieux de privation de liberté. Toutefois, on y trouve des patients admis sans leur consentement, dont la liberté d’aller et venir est forcément restreinte et qui, parfois, se retrouvent, dans leur chambre, complètement isolés.

Le patient peut même faire l’objet d’une mesure de contention. Celle-ci limite la liberté de mouvement d’un patient et est appliquée sans son consentement libre et éclairé. Elle restreint en tout point la liberté individuelle du patient et peut porter atteinte à sa dignité.

Ainsi, étendre l’article 719 du code de procédure pénale, en ajoutant les hôpitaux psychiatriques dans la liste de contrôle des lieux de privation de liberté, permettra aux parlementaires et aux bâtonniers de s’assurer du respect des droits fondamentaux des personnes hospitalisées dans ces établissements.

Vous le savez, monsieur le garde des sceaux, j’effectue souvent des contrôles en prison. Je suis atterrée du nombre de détenus aux problèmes psychiatriques sévères non pris en charge et laissés à l’abandon dans leur cellule ! Ils n’ont absolument pas leur place en détention. Leur situation devrait faire l’objet d’une réflexion approfondie.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 135.

M. Guy Benarroche. Si le problème que vient d’évoquer Esther Benbassa ne constitue pas l’objet de cet amendement, il est primordial.

J’ajoute que j’ai eu l’occasion, depuis deux ans et demi, de visiter un grand nombre de tribunaux judiciaires, comme beaucoup d’entre nous. Cette possibilité d’aller visiter les hôpitaux psychiatriques a été très souvent évoquée, par de nombreux professionnels, des magistrats, des avocats, qui nous ont fait part de la nécessité d’intégrer les hôpitaux psychiatriques dans des lieux de privation de liberté.

On sait très bien que les hôpitaux psychiatriques sont des lieux de privation de liberté, non par nature, mais parce qu’ils accueillent des malades dont le droit d’aller et venir est restreint : hospitalisations sous contrainte, chambres d’isolement…

On le sait d’autant plus qu’un contrôle des chambres d’isolement est désormais effectué régulièrement par les JLD – je ne reviendrai pas sur la récente loi qui l’a permis –, et c’est tant mieux.

Notre demande nous paraît tout à fait légitime, et je ne vois pas de raison particulière de s’y opposer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Madame Benbassa, le sujet n’est pas l’incarcération des personnes qui ont des difficultés psychiatriques !

Nous avons voté hier l’amendement de M. Benarroche dans le rapport annexé sur l’évaluation préalable aux unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA).

C’est un autre sujet qui nous est soumis aujourd’hui : la possibilité pour les bâtonniers et les parlementaires de visiter les hôpitaux psychiatriques parmi l’ensemble des lieux de privation de liberté dans lesquels nous sommes autorisés à pénétrer.

Ce débat est récurrent : le sujet revient régulièrement à la surface. Néanmoins, une telle évolution poserait tout de même un certain nombre de difficultés, notamment au regard du secret médical et du droit des autres patients.

Avis défavorable sur les trois amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7 rectifié, 96 et 135.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 127, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 69, première phrase

Remplacer les mots :

Au cours de

par les mots :

À compter des dix premières heures de

II. – Alinéa 70

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Le projet de loi ajoute un alinéa à l’article 803-5 du code de procédure pénale, prévoyant qu’au cours de la garde à vue ou de l’audition libre d’une personne majeure – les majeurs protégés sont bien entendu exclus –, l’intervention de l’interprète lors de la notification de ses droits, ainsi que son assistance par un interprète peuvent se faire par l’intermédiaire d’un moyen de télécommunication audiovisuelle.

Nous avons souvent alerté, dans plusieurs domaines, sur la dénaturation des rapports humains qu’engendre la vidéocommunication.

La mesure du texte a une visée particulière : pallier, là encore, un manque d’organisation ou un déficit d’interprètes disponibles.

Le Conseil d’État a, d’ailleurs, relevé une difficulté : il a estimé que, si le recours à un interprète par un moyen de télécommunication était justifié par les circonstances de la garde à vue ne permettant pas de programmer la présence d’un interprète, cette justification n’était plus valable au-delà de quarante-huit heures. Pourtant, ce n’est pas la solution qui a été retenue par le Gouvernement dans son projet de loi.

Cette possibilité de recours à la visioconférence n’est même pas assortie d’un contrôle par le procureur de la République.

Comme lors de l’examen en commission du texte sur l’immigration au mois de en mars dernier, notre groupe insiste sur le besoin d’échanges en direct du justiciable et de son interprète, afin d’améliorer les conditions d’exercice des droits de la défense.

Ayant eu l’occasion d’assister à la réception des migrants de l’Ocean Viking à Hyères, j’ai vu toutes les difficultés que posait cette question d’interprète à distance.

Je le rappelle, mes chers collègues, l’interprétariat n’est pas de la traduction pure !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Le texte prévoit le recours à la visioconférence pour permettre la traduction et, surtout, qu’au bout de quarante-huit heures de garde à vue, pour les infractions les plus graves, la présence physique du traducteur est nécessaire. Le présent amendement tend à ramener le délai aux dix premières heures de la garde à vue.

Cela paraît aujourd’hui compliqué. Il nous semble que le délai de quarante-huit heures permet une préservation suffisante des droits des personnes gardées à vue. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 127.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié, présenté par MM. Roux, Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Guérini, est ainsi libellé :

Alinéa 69, première phrase

Après les mots :

peuvent se faire,

insérer les mots :

avec l’accord exprès de la personne gardée à vue,

La parole est à M. Jean-Yves Roux.

M. Jean-Yves Roux. Dans la continuité de l’amendement que nous avons examiné précédemment sur les examens médicaux en garde à vue, nous regrettons que ce projet de loi propose l’extension de recours aux technologies de communication audiovisuelle pour l’intervention de l’interprète lors des gardes à vue.

Certes, le recours à un interprète à distance est une facilité qui peut permettre d’alléger et d’accélérer les procédures, mais il doit rester une option pour le gardé à vue, qui doit pouvoir le refuser s’il souhaite la présence physique de l’interprète, notamment pour limiter tout risque de mauvaise compréhension.

Le bon fonctionnement de la justice tient aussi au bon déroulé de la garde à vue, qui est souvent le socle des affaires et constitue un moment clé des investigations.

Il faut donc s’assurer que cette phase de l’instruction ne soit pas entachée de maladresses et d’erreurs aux conséquences potentiellement très graves.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Votre amendement, monsieur Roux, pose un vrai problème pratique, puisque, pour obtenir l’accord express, il faut un interprète ! C’est un peu la quadrature du cercle. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Même avis, pour les mêmes raisons que Mme la rapporteure.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 123 est présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

L’amendement n° 189 est présenté par Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 71

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 123.

M. Guy Benarroche. L’alinéa 71 de l’article 3 nous pose réellement problème.

En effet, cet alinéa prévoit d’instaurer la faculté d’un placement sous Arse – nous en avons parlé – en cas d’irrégularité constatée du placement en détention provisoire. Autrement dit, malgré une irrégularité constatée dans cet écrou, on va mettre la personne en cause sous assignation à résidence avec surveillance électronique !

Bien sûr que l’assignation à résidence sous surveillance électronique nous paraît pertinente lorsqu’elle se substitue à l’incarcération : sur ce point, nous sommes d’accord à 100 % avec le garde des sceaux.

En revanche, elle ne nous semble pas pertinente lorsqu’elle se substitue à ce qui aurait dû être une liberté du fait d’une irrégularité de la procédure. Cette irrégularité constatée découle d’un vice de procédure dont le justiciable est victime. En aucun cas, on ne doit faire payer au justiciable les frais d’une irrégularité procédurale dont il n’est pas à l’origine !

Je ne parviens vraiment pas à comprendre la logique de cet alinéa. La conséquence d’une détention provisoire irrégulière ne peut être que la liberté, comme c’est le cas actuellement ! Il nous semble que nous ne rentrons pas du tout dans le respect des droits de la défense en plaçant sous Arse un individu libre.

Remplacer un écrou irrégulier par un nouvel écrou revient à ne pas tirer les conséquences nécessaires de cette irrégularité.

Nous demandons donc au Gouvernement, monsieur le garde des sceaux, de ne pas modifier l’article 803-7 du code de procédure pénale. Laissons-le tel quel, afin de préserver les libertés individuelles de chacun !

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 189.

Mme Cécile Cukierman. Comme l’a dit notre collègue Guy Benarroche, nous sommes là dans un cas très particulier, qui fait suite à une irrégularité.

Il nous semble qu’il serait contradictoire et disproportionné de remplacer une mesure privative de liberté jugée nulle par une autre mesure privative de liberté, d’autant plus que le code de procédure pénale assimile l’assignation à résidence sous surveillance électronique à une privation de liberté.

Ainsi, en maintenant la possibilité d’assignation à résidence sous surveillance électronique en cas de détention provisoire irrégulière, on aboutit à une situation où la sanction de l’irrégularité de la détention provisoire perdrait tout son sens.

Nous considérons qu’il est nécessaire de supprimer cette disposition, afin de garantir la cohérence et l’équité du système judiciaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Je rappelle que les dispositions du projet de loi prévoient la possibilité de prononcer une Arse en cas de détention devenue irrégulière du fait du non-respect des délais de jugement. Ce sont les difficultés à respecter ces délais – nous les déplorons – qui peuvent conduire à la libération de personnes dangereuses. C’est une réalité.

Il n’est pas question de remettre ces personnes en prison, mais il faut prévoir une mesure alternative : l’Arse. C’est ce que prévoit le texte.

Nous sommes évidemment opposés à la suppression d’une telle disposition. Nous émettons un avis défavorable sur ces deux amendements, parce que nous pensons que le dispositif tel qu’il est prévu aujourd’hui instaure un point d’équilibre entre la protection des droits et celle des victimes.

On sait que les délais sont souvent difficiles à tenir, notamment quand ils sont contingentés. L’actualité récente nous l’a encore montré, avec la libération pour non-respect des délais par la cour d’appel à la suite d’une erreur de saisine par le parquet – de Rennes – de l’auteur d’un homicide lié à un crime organisé.

Cette mesure permet de protéger par les personnes une peine de substitution. Elle nous paraît donc nécessaire, et sa suppression ne nous semble pas une bonne idée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 123 et 189.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 134 est présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

L’amendement n° 190 est présenté par Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 71

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

…° L’article 803-8 est ainsi modifié :

a) La dernière phrase du cinquième alinéa du I est supprimée ;

b) Le deuxième et le dernier alinéas du II sont supprimés.

La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 134.

M. Guy Benarroche. Par cet amendement, nous proposons de supprimer la possibilité de transfèrement de l’article 803-8 du code de procédure pénale, relatif aux recours contre les conditions de détention indignes.

Comme le note le comité des ministres du Conseil de l’Europe dans le suivi de l’arrêt J.M.B. et autres contre France, dans ce cas précis, la procédure de transfèrement, qui est censée permettre le respect de la dignité des personnes détenues, n’est pas efficace et n’est pas effective.

Le risque de transfert auquel s’expose le détenu l’incite à ne pas effectuer ce recours, parce que cela le conduira vraisemblablement à un éloignement familial et, in fine, à un transfèrement dans une autre prison, dans laquelle les conditions de détention ne seront pas forcément meilleures.

Il convient donc, pour rendre effectif le recours, de supprimer cette possibilité de transfèrement.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 190.

Mme Cécile Cukierman. Cet amendement vient d’être excellemment défendu par notre collègue Guy Benarroche.

M. le président. L’amendement n° 52, présenté par M. Sueur, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Durain, Bourgi, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 71

Insérer cinq alinéas ainsi rédigé :

…. – L’article 803-8 est ainsi modifié :

a) Le cinquième alinéa du I est ainsi modifié :

- la deuxième phrase est ainsi rédigée : « Le juge peut enjoindre à l’administration pénitentiaire de prendre des mesures déterminées afin de mettre fin aux conditions indignes de détention. » ;

- est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Si une situation d’indignité a été constatée dans une cellule, cette dernière ne pourra être à nouveau occupée que si la situation d’indignité y a définitivement cessé. » ;

b) Le 1° du II est complété par les mots : « , dans ce cas, le requérant doit être assuré que cette situation ne se renouvellera pas dans le nouvel établissement pénitentiaire » ;

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Avec cet amendement et le suivant, nous arrivons à un sujet sur lequel votre projet de loi présente un grand vide, monsieur le garde des sceaux : dans une loi de programmation aussi importante, il eût été logique que l’on parle de la surpopulation carcérale et, surtout, des moyens d’y mettre fin.

Je sais que vous avez déjà répondu qu’il y aura quelques constructions, mais nous savons déjà que la surpopulation va de pair avec les constructions, qui aboutissent d’ailleurs parfois avec difficulté.

Le présent amendement vise à améliorer la procédure de recours contre les conditions indignes de détention instaurées par la loi du 8 avril 2021.

Il est d’abord nécessaire que le juge puisse enjoindre à l’administration pénitentiaire de prendre des mesures déterminées pour mettre fin aux conditions indignes de détention.

Afin de respecter plusieurs recommandations de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté et de la Cour européenne des droits de l’homme, il doit être assuré que la cellule où a été constatée une situation d’indignité ne pourra pas être occupée avant que cette situation n’y ait cessé.

De plus, si le détenu est transféré dans un autre établissement pénitentiaire, il doit être assuré qu’une situation d’indignité ne se renouvellera pas dans le nouvel établissement.

M. le président. L’amendement n° 53, présenté par M. Sueur, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Durain, Bourgi, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 71

Insérer quatre alinéas ainsi rédigé :

…° Le II de l’article 803-8 est ainsi modifié :

a) Le 1° est abrogé ;

b) Après le 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Soit il ordonne le transfèrement de la personne dans un autre établissement pénitentiaire après un examen approfondi de la sauvegarde de la vie privée et familiale, du respect de ses droits à la réinsertion, à la santé et à la défense. » ;

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement vise à améliorer la procédure de recours contre les conditions indignes de détention.

Il est proposé de décaler le transfèrement dans un autre établissement pénitentiaire en dernier recours, et non plus en premier recours pour le juge judiciaire.

De plus, ce transfèrement sera conditionné à plusieurs garanties démontrées par le juge : sauvegarde de la vie privée et familiale ; respect de ses droits à la réinsertion, à la santé et à la défense.

En effet, le transfèrement ne doit pas être la première solution, puisqu’il implique de lourdes conséquences pour une personne détenue.

Il est contre-productif et dissuade de nombreux prévenus d’intenter un recours, de peur d’être éloignés de leur famille.

Déplacer les personnes détenues d’un établissement à un autre est une pratique déjà courante, mais qui ne règle ni la question de la surpopulation carcérale ni celle des conditions de détention indignes, puisque celles-ci nécessitent d’être traitées par la mise en œuvre de moyens concrets.

Le texte déplace le problème plus qu’il ne met fin à des conditions de détention indignes.

J’ajoute, monsieur le garde des sceaux, que de nombreuses propositions ont été faites pour la régulation carcérale, que les amendements que nous présentons ne sont qu’une partie de celles-ci et que de nombreux exemples, en Europe – vous le savez –, montrent qu’il est possible d’avancer dans cette voie.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Nous ne pouvons effectivement pas nous satisfaire de ces conditions indignes de détention.

Nous avons tous ici déjà visité des établissements pénitentiaires : force est de constater que, dans certains cas, les conditions sont en effet plus que déplorables. La France a déjà été condamnée à plusieurs reprises.

C’est la raison pour laquelle nous avons, il n’y a pas très longtemps – à peine deux ans –, adopté une procédure, sur l’initiative du président de la commission des lois, François-Noël Buffet, pour permettre des recours et se mettre en adéquation avec les attentes de la jurisprudence européenne, qui protège évidemment les droits et les libertés des détenus.

Néanmoins, la suppression de la possibilité du transfèrement pour remédier à une situation de détention indigne ne nous paraît pas une bonne solution.

En effet, cette possibilité de transfèrement est une solution qui est nécessairement limitée, particulièrement en cette période où existe une surpopulation carcérale quasiment dans tous les établissements.

Mais même si une telle mesure n’est pas complètement satisfaisante, elle est tout de même utile. Elle est décidée par un juge, qui peut prendre en compte l’ensemble des éléments liés aux prisonniers, notamment la proximité avec sa famille.

C’est pourquoi une suppression pure et simple ne nous semble pas une solution adaptée. La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements identiques nos 134 et 190.

J’en viens à l’amendement n° 52, sur l’amélioration de la procédure contre les conditions de détention indignes. Le dispositif proposé nous paraît peu convaincant. Surtout, sa portée nous semble assez incertaine.

Selon nous, la solution réside plutôt dans le développement des moyens de l’administration pénitentiaire, qu’il s’agisse de l’immobilier, des personnels, des gardiens – nous y reviendrons –, mais aussi, et de manière très importante, des personnels des services pénitentiaires d’insertion et de probation (Spip). Nous en avons déjà débattu. Avis défavorable.

Idem s’agissant de l’amendement n° 53, puisque la loi du 8 avril 2021, dont le président de la commission des lois, François Buffet, est à l’origine, permet de répondre aux exigences de la Cour européenne des droits de l’homme en matière de lutte contre les conditions indignes de détention.

La question du transfèrement est tout à fait sensible, mais nous voyons bien que, dans un contexte de surpopulation carcérale généralisé, son efficacité est limitée.

D’ailleurs, le transfèrement est soumis au contrôle du juge.

Nous ne pensons pas qu’il faille être plus restrictif en la matière.