M. Pierre Ouzoulias. Ces émissions font l’honneur du service public !

M. Julien Bargeton. Pour autant, cette expression ne fait pas l’unanimité.

À l’heure où certains voudraient le faire oublier et sombrent parfois dans le révisionnisme, il faut rappeler, comme le Président Chirac l’avait fait, et comme le montrent les travaux d’Henry Rousso et de Robert Paxton, que c’est l’État français qui a collaboré avec l’Allemagne nazie et qui a rendu les spoliations possibles.

Au travers de la formule qui a été trouvée et qui me paraît adéquate, « l’État français entre le 10 juillet 1940 et le 24 août 1944 », le présent projet de loi rappelle que cette réalité ne doit pas être oubliée.

Nous suivrons attentivement l’application de ce texte. Pour l’heure, mon groupe se félicite qu’il puisse être adopté dans le plus parfait consensus. Tel est notre devoir de mémoire. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lucien Stanzione, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Lucien Stanzione. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour honorer notre engagement envers les victimes de persécutions antisémites et leurs familles en prenant des mesures concrètes pour accélérer la restitution des biens spoliés.

Ces objets ne sont pas seulement des biens matériels : ce sont aussi les témoignages poignants des vies bouleversées par le nazisme.

Je tiens à exprimer ma sincère reconnaissance au président de la commission, Laurent Lafon, à notre rapporteure, Béatrice Gosselin, ainsi qu’à Mme la ministre Rima Abdul-Malak pour leur travail acharné et leur dévouement exemplaire dans l’élaboration de ce projet de loi-cadre. Leurs efforts ont été essentiels pour garantir que les délais inacceptables soient réduits et que la restitution puisse être effectuée de manière efficace.

Nous avons pris des mesures importantes pour faciliter le processus de restitution. En dérogeant au principe d’inaliénabilité applicable aux biens relevant du domaine public, nous ouvrons la voie à la restitution des biens culturels spoliés aux victimes de persécutions antisémites ou à leurs ayants droit.

De plus, la délivrance automatique du certificat d’exportation simplifiera les démarches nécessaires.

Autre avancée significative, nous avons clarifié le périmètre des spoliations en identifiant sans ambiguïté l’autorité de fait du régime de Vichy en tant que coauteur des persécutions antisémites.

En reconnaissant que les biens spoliés intégrés par don ou legs aux collections publiques doivent également faire l’objet de restitution, nous prenons en compte la diversité des situations et nous garantissons que la justice puisse être rendue dans tous les cas.

La transparence est une valeur fondamentale dans ce processus de restitution. C’est pourquoi je salue vivement l’amendement du Sénat visant à imposer la publicité des avis de la commission administrative compétente. Cette mesure renforce la confiance du public dans le processus et assure une plus grande transparence dans la prise de décision.

Le projet de loi-cadre que nous examinons aujourd’hui ne serait pas complet sans des modalités d’application clairement définies. L’article L. 115-4 du code du patrimoine renvoie ainsi à un décret le soin de préciser ces modalités, notamment la composition, les compétences et le fonctionnement de ladite commission.

De plus, grâce à l’élargissement du champ du décret par l’Assemblée nationale, des modalités de réparation autres que la restitution du bien seront également prises en compte, reflétant ainsi la diversité des mesures de réparation possibles.

En élargissant l’application du dispositif de déclassement et de restitution aux biens spoliés issus des collections privées ayant reçu l’appellation « musée de France », nous franchissons une étape supplémentaire pour permettre une restitution directe aux ayants droit ou aux propriétaires, sans obligation de cession aux autres musées de France. Cela renforce encore notre engagement à rétablir la justice et à reconnaître les droits légitimes des victimes.

Enfin, l’article 4 de ce projet de loi-cadre prévoit la remise au Parlement d’un rapport bisannuel dressant l’inventaire des biens culturels spoliés et restitués au cours des deux années écoulées.

Je me réjouis de l’élargissement, par l’Assemblée nationale, du champ de ce rapport, qui inclut désormais les biens ayant fait l’objet d’autres modalités de réparation. Cela souligne l’importance accordée par le Gouvernement au soutien du développement de la recherche de provenance, une étape cruciale pour rendre justice aux victimes et à leur famille.

Pour conclure, mes chers collègues, je tiens à affirmer notre entier soutien à ce projet de loi. La restitution des biens spoliés est non seulement une nécessité morale, mais aussi un impératif éthique.

En adoptant ce projet de loi-cadre, nous envoyons un message puissant à tous ceux qui ont été touchés par l’obscurantisme et les injustices. Nous réaffirmons notre engagement pour la justice et la dignité humaine et nous contribuons à construire un avenir où les leçons du passé ne seront jamais oubliées. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Pierre Ouzoulias. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce n’est pas la vocation du Parlement d’écrire l’histoire, et la loi que nous allons voter n’est pas une loi mémorielle. Ce texte pose les bases juridiques de procédures administratives permettant de sortir de la domanialité publique des biens culturels pour les restituer aux ayants droit des familles auxquelles ils ont été volés.

Partant, il fonde en droit, de manière tout à fait inédite, la reconnaissance par la loi des spoliations organisées par l’État français. À ma connaissance, c’est la première fois qu’une loi mentionne la date du 10 juillet 1940, et donc le vote par lequel 426 députés et 244 sénateurs accordèrent les pleins pouvoirs au maréchal Pétain.

Ce jour-là, la République n’a pas été assassinée ; elle s’est suicidée.

Douze jours plus tard, le gouvernement du maréchal Pétain promulgua une loi portant révision des naturalisations obtenues depuis 1927, qui priva 6 000 Français de confession juive de leur nationalité.

Progressivement, le régime de Vichy mit en place une législation antisémite et une administration chargée de la mettre en œuvre. Les radiations précédèrent les spoliations, qui préparèrent la déportation, et finalement la Shoah.

L’État pétainiste mit ainsi toute son administration au service de l’aryanisation des entreprises et du pillage des biens des familles de confession juive. Sans doute plus de 100 000 biens culturels furent ainsi saisis.

La loi du 10 juillet 2000 a reconnu officiellement les crimes racistes et antisémites de l’État français et instauré une journée nationale à la mémoire de leurs victimes.

Le présent projet de loi va plus loin, en identifiant non seulement les spoliations perpétrées par l’Allemagne nazie et par Vichy, mais aussi les vols et les dols commis par des particuliers profitant de l’extrême vulnérabilité des personnes fuyant la persécution.

Ce changement de doctrine avait été acté depuis la restitution d’un tableau de Klimt, acheté par le musée d’Orsay à une galerie suisse, qui le tenait d’un intermédiaire l’ayant lui-même obtenu à vil prix d’une famille déportée par la suite dans un camp d’extermination.

Cet élargissement considérable du périmètre de recherche des œuvres spoliées oblige les institutions muséales à s’assurer des conditions d’acquisition, en France et à l’étranger, jusqu’en 1933, des œuvres qu’elles conservent.

La mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945 du ministère de la culture et la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation, placée auprès de la Première ministre, ont déjà organisé leurs travaux pour satisfaire à cette nouvelle exigence.

Il convient maintenant que toutes les institutions muséales se donnent les moyens d’un récolement général de leurs collections à la lumière de ce nouveau critère.

Le second apport considérable de ce texte est de méthode. Il est de bonne politique de confier à un service scientifique toute l’animation de la politique publique en matière de recherche de provenance, et à une commission indépendante la mission de proposer à la Première ministre un avis sur la base d’une analyse administrative et juridique.

Les deux institutions travaillent dans une parfaite collaboration, et l’indépendance de la CIVS, garantie par ses statuts et sa composition, confère à ses avis un bénéfice essentiel et tout à fait nécessaire.

Je me félicite donc que la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation voie son existence et sa mission reconnues par la loi et ses attributions, élargies. Cette commission est compétente pour instruire les conditions de la spoliation, mais aussi pour proposer des alternatives aux différentes restitutions.

Après le vote et la promulgation de cette première loi-cadre, je ne doute pas que notre proposition de loi relative à la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques soit adoptée dans les mêmes conditions de coopération et de consensus.

Il restera alors à nous emparer du dossier plus complexe de la restitution des biens culturels spoliés partout dans le monde. Ce que nous avons mis en place avec les deux premiers textes devra nous guider pour mener à bien ce nouveau chantier.

Que l’instruction de ces dossiers de restitution fût assurée dans les mêmes conditions de transparence et d’indépendance qui président aux travaux de la CIVS présente un caractère impérieux. Il ne faudrait pas que l’institution muséale défaillante à les traiter par le passé les organisât dans le cadre d’une relation exclusive avec l’exécutif.

À titre personnel, j’estime que les missions de la CIVS pourraient être étendues à l’instruction de ces dossiers.

En tout état de cause, mes chers collègues, notre groupe votera ce texte avec beaucoup d’émotion et de responsabilité. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour le groupe Union Centriste.

M. Pierre-Antoine Levi. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen du présent texte.

La commission mixte paritaire a apporté des modifications techniques, mais le changement le plus notable, depuis notre première lecture au Sénat, est l’introduction, par l’Assemblée nationale, de la reconnaissance explicite de la responsabilité du régime de Vichy dans les spoliations antisémites.

En mettant fin à une distanciation hypocrite entre la France et le gouvernement d’occupation, ce texte marque une étape cruciale dans notre histoire. En substituant la périphrase initiale désignant Vichy en tant qu’« autorité de fait se disant gouvernement de l’État français » par les termes d’« État français », nous assumons pleinement notre passé.

La portée de ce projet de loi excède celle du dispositif transverse de restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945 qu’elle établit. En inscrivant, pour la première fois dans la loi, la reconnaissance par la France de la responsabilité de l’État dans les persécutions antisémites ayant conduit aux spoliations, elle devient une loi mémorielle. Elle marque une étape importante dans notre volonté de faire face à notre histoire.

Je tiens à rendre hommage à celles et ceux qui ont engagé ce travail. Sans eux, rien de tout cela n’aurait abouti.

Le Sénat, en particulier notre groupe – nous pouvons en être fiers, mes chers collègues –, peut se targuer d’avoir été un moteur dans ce domaine. En effet, nous devons à Nicolas About la première loi de ce type. La loi du 6 mars 2002 relative à la restitution par la France de la dépouille mortelle de Saartjie Baartman à l’Afrique du Sud a en effet permis la restitution des restes humains de la Vénus hottentote à son pays d’origine.

Dans la même veine, nous devons à Catherine Morin-Desailly la loi du 18 mai 2010 visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories à la Nouvelle-Zélande et relative à la gestion des collections.

Voilà déjà dix ans de cela, en 2013, Corinne Bouchoux avait, pour sa part, ouvert le débat relatif aux restitutions de biens culturels spoliés dans le contexte du nazisme.

Il aura fallu dix ans pour qu’un gouvernement s’empare pleinement du sujet. Je vous en remercie, madame la ministre.

Si la loi du 21 février 2022 relative à la restitution ou la remise de certains biens culturels aux ayants droit de leurs propriétaires victimes de persécutions antisémites a permis la restitution de quatorze œuvres de collections nationales et d’une œuvre de collection municipale spoliées ou acquises dans des conditions troubles, il était nécessaire de créer une procédure transversale, évitant ainsi de mobiliser le Parlement pour chaque restitution. Ce texte réalise enfin cette ambition.

Il s’inscrit toutefois dans un cadre plus large, car le Gouvernement a choisi de traiter la question des restitutions au travers de trois véhicules législatifs distincts plutôt que d’une loi-cadre.

Bien que mon groupe ait plaidé pour cette seconde option, nous comprenons l’intérêt de distinguer des faits générateurs distincts de restitution, ainsi que des contextes et situations historiques individualisés.

Le travail continue. Je sais que la commission de la culture s’attachera à faire prospérer la proposition de loi relative à la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques ainsi que le futur projet de loi relatif aux biens culturels acquis dans un contexte colonial.

Pour l’heure, nous voterons avec enthousiasme les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce dimanche 16 juillet aura lieu la journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux Justes de France.

Voter unanimement les conclusions de la commission mixte paritaire portant sur le présent projet de loi constituerait un geste fort de la part de notre assemblée dans ce long chemin vers la reconnaissance des crimes antisémites qui entachent notre État et une invitation à continuer l’indispensable travail de mémoire qui constitue notre dette commune.

Rappelons que cette journée de commémoration, qui répond au souhait de voir reconnaître officiellement la responsabilité du régime de Vichy dans les persécutions et les crimes perpétrés contre les Juifs, trouve directement écho au travers de ce projet de loi. La navette parlementaire a en effet permis de caractériser les autorités françaises responsables des spoliations antisémites par une formule bornant dans le temps l’implication de l’État français.

Si ce texte est le premier d’un triptyque décisif sur les spoliations, je rappelle que nous avons été alertés, au cours des auditions, sur le risque de ressentiment qu’une loi spécifique aux spoliations antisémites pourrait alimenter si nous négligions concomitamment d’autres spoliations.

L’enfer est pavé de bonnes intentions, mes chers collègues. Nous devons aux victimes des persécutions antisémites et à leurs descendants de ne pas risquer d’entrouvrir la porte de l’enfer. C’est pourquoi cette reconnaissance et ces réparations doivent être intégrées au sein d’un plus vaste devoir de reconnaissance et de réparation des autres spoliations réalisées à d’autres époques et en d’autres lieux.

Ce projet de loi répond à une nécessité morale et éthique, dont le renforcement de la justice et de la dignité humaine sont le cœur.

Le Sénat a déjà adopté, à l’unanimité, la proposition de loi relative à la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques.

Le groupe RDSE espère que le troisième texte, sans doute plus complexe, relatif aux biens étrangers acquis dans un contexte colonial, emportera le même assentiment.

Lors de l’examen du présent projet de loi en première lecture au Sénat, nous nous sommes inquiétés du manque de moyens humains, matériels et financiers affectés à la recherche de provenance des biens culturels spoliés au sein des établissements culturels. Nous avons souligné combien il était nécessaire que les ambitions affichées par ce texte, dont les dispositions doivent pouvoir donner leur pleine mesure, puissent se matérialiser.

La bonne mise en œuvre de ce projet de loi passera également par une meilleure sensibilisation des établissements culturels et des collectivités territoriales à l’importance de la réparation des spoliations et par l’intensification du travail de recherche de provenance et d’identification des propriétaires spoliés et de leurs ayants droit, une tâche chronophage et coûteuse.

Or le budget alloué à la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés ne s’élève qu’à 100 000 euros, soit l’équivalent d’une goutte d’eau au regard des besoins humains, financiers et techniques. Nous devrons donc nous montrer vigilants sur ces points lors de l’examen du prochain projet de loi de finances.

Le groupe RDSE salue néanmoins les apports successifs de l’Assemblée et de la commission mixte paritaire, qui ont permis de préciser que les moyens nécessaires sont non pas seulement financiers, mais également humains.

Il nous reviendra d’évaluer la mise en œuvre de ces moyens lors de la remise par le Gouvernement du rapport prévu à l’article 4, dont je rappelle qu’il a été introduit à la suite de l’adoption d’un amendement de mon collègue Bernard Fialaire, qui aurait bien aimé être des nôtres aujourd’hui, mais qui est retenu dans sa chère commune de Belleville-en-Beaujolais par l’arrivée du Tour de France. (Sourires.)

Si nous regrettons que ce rapport, qui était initialement annuel, soit désormais bisannuel, ce qui ne permettra pas un suivi aussi efficace, il est nécessaire que le Parlement ne soit pas complètement tenu à l’écart de la procédure de restitution et puisse exercer ses missions de contrôle et d’évaluation en étant informé de l’ensemble des restitutions de biens culturels spoliés.

Mes chers collègues, le groupe RDSE votera naturellement les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sabine Drexler, pour le groupe Les Républicains.

Mme Sabine Drexler. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons au bout du processus législatif, engagé sur l’initiative du ministère de la culture, relatif à ce nouveau texte, soutenu par le Sénat.

L’année dernière, ensemble, nous avons permis la restitution de quatorze œuvres spoliées pendant la Seconde Guerre mondiale.

Aujourd’hui, par ce texte, nous allons encore un peu plus loin en créant un cadre de simplification, assorti de garanties mises en œuvre par la CIVS, qui permettra de restituer des œuvres culturelles appartenant aux collections publiques.

Après des investigations minutieuses et un accord amiable signé par les parties, ces œuvres pourront enfin revenir aux descendants de leurs propriétaires.

Nous n’effacerons malheureusement pas ce qui a eu lieu – persécutions, spoliations, arrestations, déportations et terribles exterminations. Le passé est passé, alors saisissons-nous aujourd’hui, mes chers collègues, de toutes les occasions qui nous sont données pour tenter de réparer et de rendre justice.

Alors que les derniers rescapés disparaissent, j’espère que cela permettra aux victimes de trouver une forme de repos et de panser, autant que faire se peut, les plaies de ces vies et de ces familles brisées.

Même si ces démarches n’effacent pas et n’excusent en rien les crimes commis pendant cette période, elles contribueront, nous l’espérons tous, à honorer un triple devoir : celui de mémoire, bien sûr, celui de reconnaissance des crimes dont les familles ont été les victimes, mais aussi un devoir d’éducation, celui de n’avoir jamais de cesse de rappeler la réalité de ce qui s’est passé, d’empêcher certains de réécrire l’histoire et de contribuer inlassablement à entretenir la vigilance face à l’antisémitisme et à toutes les formes de xénophobie qui ressurgissent insidieusement, ou parfois, depuis quelques années, sous la forme de violences extrêmes.

Le génocide des Juifs européens par les nazis, qui, dans notre pays, fut « secondé » par les autorités françaises, pour reprendre le terme employé par Jacques Chirac dans son discours de 1995, nous oblige à nous saisir de chaque occasion de panser, autant que faire se peut, cette blessure. Ce texte constitue à cet égard une nouvelle avancée qu’il faut saluer.

On estime qu’au moins 5 millions de livres et environ 100 000 œuvres d’art ont été spoliés en France pendant l’Occupation. Environ 45 000 de ces œuvres ont été restituées après la guerre et près de 2 200 d’entre elles font partie, aujourd’hui encore, des collections des musées nationaux.

Ces données sont fondées sur les déclarations effectuées après la guerre par les personnes spoliées. Or l’on sait que toutes n’ont pas déclaré la disparition ou la vente forcée de leurs biens. Il convient donc d’envisager ces données avec précaution, car l’on peut penser qu’elles sont certainement en dessous de la réalité.

J’estime que nous pouvons collectivement nous réjouir de cette volonté de réparation qui, aujourd’hui, nous anime tous. Ce n’est que justice de permettre aux victimes et à leurs héritiers de retrouver ainsi leurs biens familiaux.

Élue d’un territoire, l’Alsace, qui a une histoire complexe et singulière, liée notamment à la présence d’une importante communauté juive remontant au XIIe siècle, et native d’un village que l’on appelle aujourd’hui encore « la petite Jérusalem du Sundgau », je suis particulièrement heureuse que la voie soit ouverte.

Il nous appartient maintenant collectivement de continuer sur ce chemin. Nous comptons sur vous et sur votre administration, madame la ministre, pour continuer d’allouer les moyens nécessaires à l’accompagnement de cette politique de restitution auprès des musées.

Je tiens à saluer le travail effectué par ma collègue rapporteure Béatrice Gosselin, ainsi que par nos collègues, ici même, au Sénat, mais également par les députés qui ont travaillé sur ce texte. Ce travail empreint d’humanité a permis de trouver un accord lors de la commission mixte paritaire.

Il est heureux et éminemment rassurant que, sur ce sujet, l’unanimité ait prévalu dans les deux chambres.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, c’est avec conviction et émotion qu’avec l’ensemble de mon groupe je voterai les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements.)

Mme la présidente. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble du projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l’objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945.

(Le projet de loi est adopté définitivement.) – (Applaudissements.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945