Le Gouvernement et les services de l'État sont pleinement engagés pour vérifier la qualité du dialogue social avec les organisations syndicales (M. Fabien Gay s'exclame.), ainsi que le respect de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique. Ils vérifient également la qualité des mesures d'accompagnement du plan de sauvegarde de l'emploi, qui doit tenir compte des spécificités de chacun des sites. Ils s'assurent, enfin, de la qualité des actions menées pour trouver un repreneur, conformément à la loi du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle, dite loi Florange, durant une période de quatre mois.
Des solutions intégrant des repreneurs existent pour un certain nombre d'entreprises. Ainsi, dans le cas de la Fonderie de Bretagne, un repreneur a été trouvé il y a quelques jours.
M. Fabien Gay. Parce que les camarades se sont battus !
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Plus de 250 emplois sont concernés.
Je le répète, des reprises sont possibles. Il faut donc se mobiliser pour trouver un repreneur pour la Verrerie du Languedoc. En tout cas, le Gouvernement est complètement engagé en ce sens.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Vencorex, ArcelorMittal, Michelin, la Fonderie de Bretagne, General Electric, Photowatt : dans toute la France, les sites industriels ferment, entraînant leur lot de licenciements, de pertes de savoir-faire et de territoires meurtris.
Pendant que vous parlez de réindustrialisation, des activités dans des secteurs aussi stratégiques que l'acier, la chimie, les pneus, les éoliennes et les panneaux solaires sont liquidées les unes après les autres. Lorsqu'une entreprise ferme, c'est toute une filière qui se retrouve en difficulté, par un effet domino.
Certes, la compétition asiatique, la guerre commerciale américaine et les prix élevés de l'énergie expliquent en partie les difficultés actuelles. Mais la plupart de ces entreprises sont rentables ! Les choix que font, par exemple, M. Mittal, déjà riche de 18 milliards de dollars, ou des fonds d'investissement comme BlackRock, qui est à la manœuvre chez Michelin et General Electric, ont pour seul objectif de rémunérer encore plus les actionnaires.
Face à cette rapacité qui détruit notre souveraineté industrielle, que fait l'État ?
Quand il faut subventionner de nouvelles usines, la recherche ou la décarbonation, il est au rendez-vous, souvent sans effectuer aucun contrôle sur l'usage qui est fait des aides. En revanche, quand il faut sauver ces entreprises, il devient tout à coup impuissant, comme si les délocalisations et les licenciements étaient des fatalités divines !
L'État peut pourtant agir, notamment en nationalisant les activités stratégiques. Nous l'avons fait avec succès pour les Chantiers de l'Atlantique et les câbles sous-marins d'Alcatel ; pourquoi ne pas le faire pour d'autres ? Lorsqu'il existe des projets de reprise en coopérative par des salariés qui maîtrisent et aiment leur travail, pourquoi ne sont-ils jamais retenus et accompagnés ?
Madame la ministre, la destruction créatrice que vous encouragez détruit toute notre industrie. Or l'intelligence artificielle (IA) ne remplacera jamais les savoir-faire humains perdus au passage. Qu'attendez-vous pour agir ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur, nous déplorons les défaillances d'entreprises et les suppressions d'emplois, et ce même lorsqu'il n'y a pas de fermeture.
Pour autant, permettez-moi de rappeler quelques chiffres faisant état d'une réindustrialisation.
L'année 2024 a été une année de continuité dans la réindustrialisation de notre pays. La hausse se poursuit et la dynamique enclenchée en 2022 se confirme, malgré des difficultés conjoncturelles, c'est vrai.
On a ainsi compté 89 ouvertures nettes de sites au total en 2024 et 450 ouvertures nettes depuis 2022. Il s'agit d'un chiffre positif, qu'il convient de souligner, alors que certains commentateurs ne croyaient pas à de telles prévisions il y a encore quelques mois.
Ce solde positif, il faut le mettre en avant, car il nous encourage à tenir bon, à continuer de soutenir les entreprises, à persévérer, à accélérer, sans nier les difficultés. Il s'agit non pas de refuser de les voir, mais de ne pas céder à la fatalité.
Les chiffres nous montrent également que la situation est très contrastée dans le secteur industriel. Alors que les secteurs énergo-intensifs souffrent, les industries vertes et le secteur de l'agroalimentaire réalisent des scores admirables.
Il n'a cependant échappé à personne que la conjoncture est difficile. Encore une fois, il n'y a pas de fatalité. Il nous faut soutenir nos entreprises, les accompagner, actionner tous les leviers utiles pour leur redonner de la compétitivité et assurer leur prospérité économique.
Le projet de loi de simplification de la vie économique comporte un certain nombre de réponses en matière de zéro artificialisation nette (ZAN), de raccordement ou de coût de l'énergie.
Le plan d'urgence européen aura également un impact en la matière.
Enfin, nous devons ouvrir le débat sur le coût du travail et reprendre dès que possible une réflexion sur la baisse des impôts de production, afin de soutenir la compétitivité de nos entreprises.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.
M. Guillaume Gontard. Merci, madame la ministre, mais quelle est au fond la stratégie du Gouvernement pour faire face à la désindustrialisation, qui est en marche ? De quelle manière allez-vous agir concrètement ?
Vous refusez d'utiliser les outils qui sont à votre disposition, qu'il s'agisse des nationalisations temporaires, du soutien au modèle des coopératives ou de l'accompagnement des collectivités territoriales.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Vous avez évoqué à deux reprises la situation des Scop.
En ma qualité de ministre chargée de l'économie sociale et solidaire, je me suis intéressée à ce sujet. Il existe bien une difficulté, actuellement, pour que des structures comme les Scop ou les sociétés coopératives d'intérêt collectif (SCIC) disposent d'outils de financement équivalents à ceux qui existent pour l'économie traditionnelle.
Par exemple, le prêt transmission que propose Bpifrance est adapté à des reprises, mais il est réservé aux structures ayant au moins trois années d'ancienneté. Par définition, une Scop ou une SCIC constituée pour reprendre une entreprise ne peut pas afficher une telle ancienneté. Nous travaillons avec Bpifrance pour trouver une solution.
J'ai participé aujourd'hui à la conférence des financeurs de l'économie sociale et solidaire : nous y avons étudié un certain nombre d'outils pour organiser le financement de ces structures.
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès.
Mme Marion Canalès. Madame la ministre, Auchan, Valeo, Vencorex : bien sûr, ces fermetures et plans sociaux catastrophiques qui sont le fait de grands noms attirent l'attention, dans le Puy-de-Dôme, mon département, comme ailleurs. Mais ces annonces relèvent souvent davantage d'une décision stratégique que d'une défaillance à proprement parler, comme l'a expliqué Fabien Gay.
J'en profite pour parler de la décision, scandaleuse, prise par le groupe Auchan de fermer le magasin des quartiers nord de ma ville, Clermont-Ferrand. Il s'agit d'un choix stratégique de la famille Mulliez, propriétaire d'Auchan, qui condamne des dizaines de salariés. Pourtant, chacun sait que 10 % des dépenses alimentaires et d'équipement des Français profitent à la famille Mulliez.
Ce soir, je veux parler des vraies défaillances, car c'est le sujet retenu par notre délégation aux entreprises.
Le secteur des petites entreprises est celui qui en subit le plus, comme Olivier Rietmann l'a rappelé. Entre octobre 2023 et octobre 2024, il y a ainsi eu une augmentation de 31 % dans le Puy-de-Dôme. C'est un sujet qui nous tient tous à cœur, mais ces défaillances se font souvent à bas bruit.
La loi a confié aux tribunaux de commerce une fonction de prévention et un rôle actif dans la détection des difficultés des entreprises, le plus en amont possible, afin d'aider celles-ci à les surmonter. Pousser la porte du tribunal de commerce, c'est faire confiance à des femmes et des hommes qui, comme les chefs d'entreprise en difficulté, sont issus du monde de l'entreprise.
Comme le nombre de salariés dont l'emploi est menacé par une défaillance de leur entreprise a triplé dans mon département, Clermont Auvergne Métropole a pris la décision de ne pas rester sans rien faire et de venir conforter ce rôle de prévention assumé par le tribunal de commerce, en créant un dispositif permettant d'intervenir au stade de la procédure amiable. La métropole a ainsi signé une convention et créé un fonds et elle verse une subvention à l'association des juges et anciens juges consulaires du Puy-de-Dôme. Chaque année, plus d'une douzaine d'entreprises sont ainsi accompagnées afin de traiter les problèmes en amont. La région Île-de-France, aussi, a créé un dispositif, le chèque prévention.
Madame la ministre, vous nous l'avez dit, il y a des initiatives en matière de prévention. Mais il ne suffit pas d'identifier les chefs d'entreprise concernés, il faut aussi les aider, et cela avec de l'argent. L'État va-t-il se saisir de ce type d'initiatives prises par des collectivités locales pour les généraliser et passer de la culture de la défaillance à une culture de la prévention et du rebond ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Madame la sénatrice Marion Canalès, vous évoquez un certain nombre de dispositifs existants, tout en déplorant un manque de lisibilité ou de clarté, avec pour résultat que trop peu de chefs d'entreprises en difficulté franchissent la porte du tribunal de commerce.
Il nous faut effectivement renforcer la lisibilité du système afin de faciliter son accès pour les chefs d'entreprise, qui doivent savoir facilement à quelle porte frapper.
J'étais la semaine dernière dans la Loire, où j'ai évoqué cette question avec le préfet. Ses services y ont mis en place un dispositif pour la prévention des difficultés, en associant l'ensemble des acteurs, publics et privés, sur le modèle du comité qui avait été créé durant la crise de la covid. Ce dispositif, appelé rencontres économiques, permet de porter une attention particulière aux défaillances d'entreprises.
Nous pouvons aussi nous appuyer sur les conseillers départementaux aux entreprises en difficulté (CDED), sur les commissaires à la restructuration et à la prévention des risques (CRPR) et sur le comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri). Ce n'est effectivement pas toujours facile pour les entreprises de s'y retrouver. Il faut une porte d'entrée unique pour mieux les accompagner et mieux les engager dans les deux dispositifs de procédure amiable.
Au-delà de la question du soutien financier, il faut travailler en amont pour renforcer la compétitivité internationale des entreprises, en diminuant les prélèvements obligatoires et le coût du travail, afin qu'elles puissent embaucher plus facilement. C'est essentiel.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Brault.
M. Jean-Luc Brault. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, habituellement, quand le bâtiment tousse, c'est l'économie toute entière qui s'enrhume. Aujourd'hui, le bâtiment est grippé, complètement grippé.
J'ai deux minutes pour vous parler des défaillances d'entreprises, madame la ministre ; il me faudrait deux semaines ! Empilement de normes, surtransposition du droit européen, concurrence déloyale au sein même de l'Union européenne, délais et charges administratives – où en est la simplification ? –, accès au crédit bancaire, agissements et temps de réaction des mandataires liquidateurs…
Dernier exemple en date : ce matin, dans mon département, le Loir-et-Cher, j'ai eu un échange avec un équipementier de la SNCF employant six cents salariés. Il m'a dit que, dans le nord de la France, il lui a fallu deux ans et demi pour obtenir un permis de construire et les autorisations correspondantes. À Barcelone, en Espagne, il lui a fallu cinq mois. Et encore, mes chers collègues, deux ans, c'est dans le cas où vous ne tombez pas sur un triton doré ou un papillon azuré ! Je n'ai rien contre la biodiversité, au contraire, mais vous avez compris l'idée…
Madame la ministre, à l'heure où on arrête chantier sur chantier, je connais, dans le centre de la France, un chantier de 60 millions d'euros qui vient d'être arrêté ce matin, définitivement. Oui, 60 millions d'euros !
L'immobilier peine à redémarrer, nombre de restaurants déposent le bilan… Même des boulangeries mettent la clé sous la porte !
Nous devons nous mobiliser. Nous avons examiné il y a plusieurs mois un projet de loi de simplification de la vie économique, qui a été voté ici à l'unanimité. Il comporte notamment des mesures sur les syndics et les mandataires liquidateurs, qui font beaucoup de mal lors des dépôts de bilan et qui font traîner les affaires afin de se servir et de liquider la trésorerie de l'entreprise en difficulté.
La question sur le travail le 1er mai n'est pas le sujet de ce débat, mais n'est-elle pas révélatrice ? Ne faut-il pas enfin, madame la ministre, acter une révolution culturelle de l'entrepreneuriat ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Jean-Luc Brault, les entreprises du BTP ont été particulièrement touchées par les dernières crises.
Plusieurs facteurs sont en cause : la hausse des taux d'intérêt, le durcissement des conditions d'octroi des crédits bancaires, mais aussi la baisse du nombre de constructions neuves. Même si le secteur de la rénovation énergétique est en croissance, cela ne compense pas totalement la contraction de l'activité dans le neuf. Il nous faut donc tout faire pour relancer la construction et soutenir efficacement le secteur du logement, car c'est un levier essentiel.
Par ailleurs, nous devons continuer le travail de simplification. Le projet de loi de simplification de la vie économique, actuellement en discussion à l'Assemblée nationale, comporte des mesures concrètes, notamment le relèvement de 40 000 euros à 100 000 euros du seuil de la commande publique. Cela facilitera l'accès des TPE et PME à ces marchés.
D'autres pistes sont à l'étude, comme la réforme des groupements momentanés d'entreprises (GME). Aujourd'hui, la responsabilité solidaire et indéfinie entre les membres de tels groupements constitue un frein. Une proposition vise à la supprimer pour les marchés de moins de 100 000 euros, ce qui rendrait ce dispositif bien plus attractif.
Le ministère du logement travaille aussi à simplifier l'accès au label Reconnu garant de l'environnement (RGE).
Enfin, puisque vous évoquez la restauration, je vous informe du lancement, le 13 mai prochain, des assises de la restauration et des métiers de bouche. Nous travaillerons avec l'ensemble des acteurs du secteur pour répondre aux défis conjoncturels et structurels auxquels ils font face.
M. le président. Il faut conclure.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Je reviendrai tout à l'heure sur les autres mesures de simplification que nous envisageons de prendre.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Hybert. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Annick Billon applaudit également.)
Mme Brigitte Hybert. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les chiffres des défaillances au premier trimestre montrent que les Pays de la Loire figurent parmi les régions les plus touchées, avec une augmentation de 28 %, soit 924 procédures supplémentaires.
Dans ma région, 28 % des salariés travaillent dans une ETI, contre 25 % au niveau national. Les ETI attendent une réelle simplification de toutes les procédures. Le programme ETIncelles est donc plutôt bien accueilli par le milieu économique, car il permet de lever certains freins administratifs au bon développement de nos entreprises. Cela va dans le bon sens, et tout ce qui contribue à simplifier la vie de nos entreprises, de nos entrepreneurs, doit être encouragé.
Cependant, certains freins demeurent, notamment dans l'éligibilité à ce programme. Au sens de l'Insee, une PME française doit compter entre dix et deux cent cinquante salariés. En deçà, c'est une TPE ; au-delà, une ETI. Or le critère d'éligibilité au programme ETIncelles intègre les PME comptant entre soixante et deux cent vingt salariés.
Ma question est donc simple : pourquoi imposer un seuil de soixante salariés et un plafond de deux cent vingt salariés ? Pensez-vous généraliser ce programme, qui ne profite aujourd'hui qu'à trop peu d'entreprises ? Élargir le champ des bénéficiaires permettrait de lever des freins pour beaucoup plus d'entreprises et de redonner un élan à l'industrialisation de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Annick Billon applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Madame la sénatrice Brigitte Hybert, puisque vous avez évoqué la question de la simplification, permettez-moi de vous apporter quelques éléments concrets sur ce point.
J'ai engagé une démarche de simplification à deux niveaux : sur le plan législatif, d'une part, au travers du projet de loi de simplification de la vie économique ; sur le plan opérationnel, d'autre part, par la révision des démarches administratives existantes.
J'ai fait un bilan hier matin : 115 formulaires Cerfa ont d'ores et déjà été supprimés sur les 1 800 recensés au total, 535 relevant directement du ministère de l'économie et des finances. Cela représente 450 000 téléchargements annuels en moins pour les entreprises. C'est un allègement concret et mesurable des contraintes administratives, ce qui va dans le bon sens. (M. le président de la délégation aux entreprises s'en réjouit.)
S'agissant du programme ETIncelles, lancé en 2023, il a déjà accompagné près de deux cents PME, avec un objectif affiché de cinq cents d'ici 2027. Ce programme propose un accompagnement individualisé et sur mesure pour lever les freins à la croissance des PME et les aider à devenir des ETI. Il est organisé dans un cadre souple pour permettre à une grande diversité d'entreprises d'y accéder. La direction générale des entreprises (DGE) assure une sélection à partir d'un panel représentatif, permettant de valoriser les pépites de nos territoires.
Dans votre propre département, plusieurs entreprises bénéficient déjà de cet accompagnement, telles que le groupe ABCM, Arcade Cycles, Rabaud ou Clean Sells.
Je le répète, les critères de sélection sont souples.
La dernière campagne d'appel à manifestation d'intérêt s'est close le 28 mars dernier. Le lancement de la cinquième promotion interviendra le 16 mai prochain. Je vous invite, si vous connaissez des entreprises susceptibles d'en bénéficier, à les orienter vers la DGE.
M. le président. La parole est à M. François Patriat.
M. François Patriat. Madame la ministre, les questions posées cet après-midi seront parfois redondantes. Personne ne nie ici les difficultés rencontrées par les entreprises ni ne conteste le nombre de faillites et de dépôts de bilan. Mais nul ne peut nier l'effort fait ces dernières années par les gouvernements successifs pour faire de la réindustrialisation une véritable priorité, car cet effort a porté ses fruits.
On peut dramatiser à l'extrême. La vie économique a toujours été faite d'entreprises qui se créent, et d'autres qui disparaissent. C'est la vie des entreprises. Pour autant, il est vrai qu'il y a des efforts à faire dans ce pays.
Pendant la crise sanitaire, le Gouvernement a mis en place de nombreux dispositifs exceptionnels, tels que les fonds de solidarité, les prêts garantis par l'État, les exonérations de charges. Personne ne le nie, et tout le monde les réclamait. Ces aides ont permis de préserver l'activité de centaines de milliers d'entreprises et de sauver notre économie. Elles ne sont plus à l'ordre du jour. Certaines structures déjà fragilisées rencontrent des difficultés de trésorerie et, vous l'avez dit, l'effet de rattrapage intervient aujourd'hui.
Ce sont surtout les petites entreprises les plus exposées aux potentielles hausses de droits de douane qui font face aujourd'hui à des pressions considérables.
Je pense en particulier à une entreprise sidérurgique de mon département, Valti, qui était un fleuron de la métallurgie et fabriquait des tubes en acier, notamment pour les centrales nucléaires. Une de ses usines historiques, située à Montbard, a été victime d'une liquidation judiciaire ordonnée le 4 février dernier par le tribunal de commerce de Dijon. Ce sont ainsi cent trente personnes qui risquent de se retrouver sans emploi.
C'est vrai qu'il est difficile, aujourd'hui, de trouver un repreneur. Cela marque la fin d'une époque, mais cet exemple s'inscrit, malheureusement, comme cela a été dit, parmi tant d'autres.
Par ailleurs, la guerre commerciale hasardeuse lancée par l'administration de Donald Trump engendre beaucoup d'incertitudes pour notre tissu d'entrepreneurs. Or, que ce soit dans le secteur des produits chimiques ou cosmétiques, des parfums ou de l'aéronautique comme dans le secteur viticole, nous exportons de nombreux produits issus du savoir-faire français. Si nous n'agissons pas dans ces secteurs, nous serons fortement affectés. Demain, ce seront d'autres acteurs qui prendront la place de nos entreprises et ils seront issus de groupes étrangers massivement subventionnés, parfois moins soucieux de nos standards, surtout environnementaux.
Vous avez déjà évoqué, madame la ministre, le travail qui est fait, les pistes que vous envisagez et les mesures qui ont été prises et qui portent leurs fruits.
M. le président. Il faut conclure.
M. François Patriat. Allez-vous prendre encore des mesures de simplification pour aider les entreprises à poursuivre leur activité ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur François Patriat, vous avez, à juste titre, évoqué la réindustrialisation qui débute, et j'avais moi-même eu l'occasion d'y revenir.
Je rappelle quelques chiffres : en 2024, ce sont quatre-vingt-neuf ouvertures nettes de sites industriels qui ont été enregistrées, portant à quatre cent cinquante le nombre total depuis 2022. Au-delà des défaillances d'entreprises, réelles, nous devons aussi prendre en compte cette dynamique positive.
S'agissant des droits de douane, leur évolution récente engendre de l'incertitude. Même si une suspension a été décidée par Donald Trump sur l'augmentation de 20 % initialement prévue, il ne faut pas oublier que d'autres hausses ont bien été mises en œuvre : 10 % sur de nombreux produits, 25 % sur l'acier, l'aluminium, l'automobile et leurs dérivés. Cette période de quatre-vingt-dix jours de suspension reste donc marquée par l'incertitude pour nos entreprises.
Nous devons profiter de ce moment pour construire un rapport de force, pour contraindre à la discussion, et cela doit se faire collectivement, de manière unie, à l'échelle européenne. D'ailleurs, le monde économique s'est très rapidement félicité de cette prise de position commune de l'Europe, sans initiatives isolées des États membres.
Vous avez aussi évoqué les mesures de simplification. Elles sont engagées dans le cadre du projet de loi de simplification de la vie économique. Plusieurs dispositifs sont prévus pour améliorer l'accès à la commande publique, notamment en faveur des artisans ; pour faciliter aussi la vie des start-up innovantes, avec des seuils adaptés ; ou pour soutenir les commerçants. Je pense ici à la mensualisation des loyers commerciaux, en lieu et place du paiement trimestriel, ou encore à la limitation du dépôt de garantie à un mois. Ces mesures, à elles seules, représentent un gain de trésorerie de 2 milliards d'euros pour les commerçants. Enfin, des mesures spécifiques sont également prévues, toujours dans ce projet de loi, pour les TPE.
M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet.
M. Philippe Grosvalet. Madame la ministre, en 2024, 67 830 procédures de défaillance d'entreprises ont été enregistrées. Tous les secteurs sont touchés, toutes nos régions. Un record, hélas !
L'année 2025 ne semble pas en voie de voir cette implacable réalité corrigée : 250 000 emplois sont menacés.
La direction d'ArcelorMittal vient d'annoncer six cents licenciements, ce qui vient encore assombrir le tableau. En Loire-Atlantique, comme sur l'ensemble des territoires concernés, c'est la stupeur. Prendre la décision de licencier six cents salariés après avoir bénéficié de 298 millions d'euros de subventions en 2023, puis s'être vu promettre des aides de 850 millions d'euros pour décarboner son activité est incompréhensible pour l'ensemble de nos concitoyens.
ArcelorMittal vient s'ajouter à l'inquiétante litanie : Michelin, Vencorex, Systovi, General Electric – encore dans mon département... Et cette liste n'est pas exhaustive.
Certes, les déclarations de l'administration Trump viennent compliquer une situation économique internationale particulièrement incertaine. Mais ces aléas ne peuvent à eux seuls expliquer la fragilisation de notre tissu économique et industriel : l'absence de vision, le manque de planification y sont pour beaucoup.
L'objectif de souveraineté industrielle ne peut pas se réduire à la distribution de subventions, sans stratégie de sauvegarde et de structuration. Il est plus que temps que l'État s'empare de ce sujet à bras-le-corps pour initier une réelle politique de développement économique et industrielle en partenariat avec nos territoires et nos représentants européens.
Ayons une pensée particulière pour tous les salariés de notre pays qui voient leur avenir et celui de leur famille plonger dans l'incertitude, sans oublier les territoires, qui ne sortent jamais indemnes de ces fermetures.
À quand, madame la ministre, une planification pour garantir à nos concitoyens, à notre République, la souveraineté économique et industrielle que nous sommes en droit d'attendre ? S'agissant d'ArcelorMittal, qu'envisagez-vous de faire ? (Applaudissements sur les travées du groupe du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Philippe Grosvalet, nous avons pris connaissance des annonces faites par ArcelorMittal concernant le site de Dunkerque. Certes, nous sommes dans un contexte de crise sans précédent pour la sidérurgie européenne, notamment du fait de surcapacités mondiales. Nous ne pouvons que regretter cette décision.
Dans la filière sidérurgique, les difficultés remontent à plusieurs années. La production européenne a baissé de 20 % entre 2018 et 2023 et la demande sur le marché européen s'est affaiblie en 2024, ce qui entraîne des surcapacités.
Le plan d'ArcelorMittal concerne tous les sites européens et ne vise pas uniquement et spécifiquement les sites français. ArcelorMittal soutient que ces annonces sont liées à un objectif prioritaire de restauration de la compétitivité du groupe. Aucun des sites français n'est menacé de fermeture à court terme – il est important de le rappeler et nous serons particulièrement vigilants sur ce point, comme le ministre chargé de l'industrie, Marc Ferracci, l'a clairement dit.
La France est très mobilisée au niveau européen pour obtenir des mesures fortes de protection du marché de l'acier afin de restaurer une concurrence loyale en Europe. Avec huit autres États membres, elle a d'ailleurs fait des propositions ambitieuses à la Commission, qui se sont traduites par un plan d'action présenté le 19 mars dernier et un premier renforcement des mesures de défense commerciale au 1er avril 2025. Un nouvel instrument de protection commerciale doit être proposé au plus vite par la Commission ; la France plaide pour qu'il soit le plus ambitieux possible afin de préserver l'industrie sidérurgique européenne.
L'État sera très vigilant quant à la mise en œuvre des annonces d'ArcelorMittal, notamment en matière de reclassement des salariés concernés, pour lesquels j'ai une pensée, et poursuit les discussions avec le groupe pour la confirmation rapide des projets de décarbonation sur les sites de Dunkerque et Fos-sur-Mer, auxquels l'entreprise s'est engagée.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Pierre-Antoine Levi. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur l'impact dévastateur pour les entreprises des retards de paiement, qui progressent de manière inquiétante.
Le rapport remis le 23 avril dernier par les médiateurs Frédéric Visnovsky et Pierre Pelouzet dresse un constat alarmant : les retards de paiement interentreprises ont atteint près de quatorze jours fin 2024, privant nos TPE et PME de 15 milliards d'euros de trésorerie. Cette situation est d'autant plus préoccupante que nous traversons une période de croissance ralentie : 0,9 % en 2025 selon la Banque de France.
Les chiffres sont parlants : 20 % des TPE et 9 % des PME présentent des capitaux propres négatifs, ce qui révèle une fragilité structurelle inquiétante de notre tissu économique. Dans ce contexte, les retards de paiement constituent souvent la goutte d'eau qui fait déborder le vase, menant à la défaillance.
Le rapport cite également le frein culturel, issu de la honte de l'échec, qui conduit à une situation de déni, aggravée par l'absence d'informations prévisionnelles sur la trésorerie.