M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, pour la réplique.
M. Fabien Genet. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Il est vrai qu'interroger la ministre de la culture en plein Festival de Cannes n'était peut-être pas le plus opportun… (Sourires.)
Néanmoins, je note que le Gouvernement est à l'écoute. À l'heure où il appelle les collectivités locales à faire des économies, la meilleure façon d'y parvenir est encore de réduire leurs charges.
créole et ratification de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires par la france
M. le président. La parole est à M. Frédéric Buval, auteur de la question n° 429, adressée à Mme la ministre de la culture.
M. Frédéric Buval. Ma question concerne la non-ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires par la France. Adoptée par le Conseil de l'Europe en 1992, cette charte vise à protéger et à promouvoir les langues régionales au sein des États membres.
Bien que la France l'ait signée en 1999, elle ne l'a toujours pas ratifiée, ce qui empêche malheureusement la mise en œuvre de ses dispositions sur le territoire national, la Charte encourageant notamment l'utilisation des langues régionales dans l'éducation, les médias et les institutions publiques.
Cette ratification suscite beaucoup d'attentes, notamment pour la préservation et la valorisation du créole. Cette langue régionale française, parlée au quotidien par des millions de personnes dans les territoires d'outre-mer, fait partie de ces langues dont la survie et la transmission sont essentielles pour la diversité culturelle de notre pays.
Le créole est utilisé pour transmettre des savoirs, des traditions et des pratiques culturelles, notamment dans la musique, la poésie et les arts. En 2010, l'Unesco l'a même inscrit dans la liste des langues patrimoniales mondiales, dans le cadre de son programme Mémoire du monde.
La ratification de la Charte pourrait donc offrir une opportunité de renforcer la place du créole, d'assurer sa préservation et sa transmission, tout en respectant l'unité nationale de la langue française.
Si certains soulèvent l'obstacle constitutionnel et notamment le principe d'indivisibilité de la République garanti par l'article 2 de la Constitution, qui dispose que « La langue de la République est le français », l'article 75-1 de la même Constitution reconnaît que « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».
Il s'agit donc de trouver un juste équilibre permettant de protéger et de promouvoir les langues régionales, via un ensemble de mesures respectant les droits individuels et collectifs, sans pour autant remettre en cause la place centrale du français, fondement de notre modèle républicain. Ma question est simple, madame la ministre : comment le Gouvernement compte-t-il traduire concrètement cette reconnaissance dans ses politiques publiques et quelles solutions pourrait-on envisager pour surmonter les obstacles à la ratification de la Charte, notamment en matière législative ou constitutionnelle ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Monsieur le sénateur Buval, vous avez raison, la France n'a pas ratifié la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, mais elle s'efforce d'appliquer pleinement les trente-neuf engagements qu'elle a pris au moment de la signature de cette convention, qui concernent l'enseignement, la culture, les médias, la vie sociale et économique ou les services publics. Nous parlons en effet de langues vivantes et répandues, en particulier dans votre département, monsieur le sénateur.
Le veto du Conseil constitutionnel à la ratification de cette charte portait précisément sur les principes d'indivisibilité de la République, d'égalité devant la loi, d'unicité du peuple français et d'usage officiel de la langue française, non sur l'ensemble du texte. Dans ce cadre, le Gouvernement met tout en œuvre pour que nos politiques publiques soient aussi au service de la diversité culturelle et linguistique.
Au cours des dernières années, faut-il le rappeler ? une dynamique nouvelle a vu le jour, d'abord grâce à l'adoption de la loi du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, dite Molac, puis avec la création en 2022 du Conseil national des langues et cultures régionales, mais également avec les dispositifs État-régions, notamment la signature d'un pacte linguistique entre le ministère de la culture et La Réunion en 2023.
En outre, les états généraux du multilinguisme outre-mer permettent régulièrement des avancées dans les champs sociaux, culturels, numériques et éducatifs. Le dialogue avec les collectivités et les élus pour la promotion des langues régionales est constant et a été soutenu budgétairement avec volontarisme, au travers d'une enveloppe de 900 000 euros jusqu'en 2022, puis de 2 millions d'euros par an.
Nous continuons donc de faire vivre le plurilinguisme dans le respect de l'unicité de la Nation française, monsieur le sénateur.
désinformation relative au sida chez les jeunes
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, auteur de la question n° 477, adressée à Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Stéphane Demilly. Madame la ministre, à l'occasion de sa campagne annuelle, l'association Sidaction a publié une étude très inquiétante, qui démontre la montée en puissance de la désinformation chez les jeunes concernant le VIH.
En 2023, en France, 719 personnes âgées de moins de 25 ans ont découvert leur séropositivité ; cela représente plus d'un diagnostic sur sept, une proportion qui ne cesse d'augmenter. En outre, parallèlement à la hausse des infections chez les plus jeunes, on constate un recul important des connaissances sur le VIH.
L'étude réalisée par Sidaction à ce sujet est inquiétante, pour ne pas dire édifiante : 42 % des personnes interrogées pensent encore que le virus peut se transmettre par un baiser et un tiers des personnes sondées pense que l'on peut être contaminé en partageant son assiette avec une personne séropositive. À l'inverse, trop peu de jeunes savent qu'une personne sous traitement voit sa charge virale diminuer au point de ne plus être détectée lors des analyses.
Si les avancées spécifiques des dernières années ont été incroyables, les représentations sociales, elles, continuent de se dégrader ; c'est un véritable échec collectif.
Depuis la loi du 4 juillet 2001 relative à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception, le code de l'éducation prévoit qu'« Une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d'au moins trois séances annuelles ». Or le compte n'y est pas ! Selon un récent rapport du Conseil économique, social et environnemental, moins de 15 % des élèves en avaient bénéficié au cours des dernières années.
Par ailleurs, toujours selon l'étude de Sidaction, seulement un tiers des jeunes de 15 à 24 ans s'étaient fait dépister au cours des douze mois précédents l'étude. Or, depuis le 1er janvier 2022, le dépistage du VIH est gratuit, sans rendez-vous et sans ordonnance, dans tous les laboratoires d'analyse médicale de France. Il faut le dire et le répéter : ce dépistage est gratuit, sans rendez-vous et sans ordonnance !
Madame la ministre, comment renforcer la prévention et la sensibilisation de nos jeunes quant au VIH ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Monsieur le sénateur Stéphane Demilly, je vous réponds au lieu et place de la ministre de l'éducation nationale.
Je me joins à votre constat : les chiffres sont non seulement alarmants, mais encore, pour reprendre votre expression, édifiants. Le rapport que vous évoquez confirme un constat que nous faisons également : à l'école, la lutte contre les infections sexuellement transmissibles (IST), a fortiori contre le VIH, passe d'abord par la sensibilisation, la lutte contre les fausses informations et le dépistage.
Il est d'ailleurs essentiel de combattre le non-recours à ce dépistage, alors même que celui-ci est gratuit.
C'est pourquoi le ministère de l'éducation nationale agit de concert avec ses partenaires pour promouvoir la santé de façon plus globale. La ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, Mme Borne, et le ministre de la santé, M. Neuder, ont annoncé une série de mesures à ce sujet la semaine dernière, lors des assises de la santé scolaire.
J'en viens à la question de la sensibilisation.
Le 30 janvier dernier, le Conseil supérieur de l'éducation a adopté à l'unanimité le nouveau programme d'éducation à la vie affective et relationnelle, et à la sexualité. Ce programme inclut la prévention contre le VIH et les IST en général dès la classe de quatrième. Il permet aussi de lutter contre les fausses croyances sur la séropositivité, souvent sources de conduites à risques. Ce programme sera appliqué dès la rentrée prochaine ; il concernera tous les élèves, il sera obligatoire et consistera en au moins trois séances par an.
En outre, une page de ressources en ligne consacrée à la prévention des IST et du VIH à l'école a été publiée, afin d'accompagner au mieux le personnel de l'éducation nationale, de lui fournir toutes les informations nécessaires.
Nous sommes donc actifs sur cette question, sur la sensibilisation et la lutte contre les mauvaises informations sur la transmission des maladies sexuellement transmissibles, dès le plus jeune âge, à l'école.
compensation de la suppression du fonds de soutien aux activités périscolaires
M. le président. La parole est à M. Michel Masset, auteur de la question n° 539, adressée à Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Michel Masset. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la pérennité du fonds de soutien au développement des activités périscolaires, qui prendra fin le 1er septembre prochain.
Nombre de communes du Lot-et-Garonne ont opté pour la semaine de quatre jours et demi – je pense aux villes de Cancon, Monbahus ou encore Villeréal. Elles offrent aux élèves un rythme d'apprentissage plus adapté à leurs besoins, en lien avec un projet éducatif territorial.
Supprimer ce fonds de manière abrupte et sans concertation ne peut constituer une mesure satisfaisante pour nos élus locaux. Il faudrait, à tout le moins, prévoir une compensation pour assurer le maintien et la gratuité des activités périscolaires.
Dans le milieu rural du Lot-et-Garonne, il est certain que, sans financement, les associations encadrant ces activités périscolaires péricliteront ; on observe déjà un manque prégnant de bénévoles.
Certes, un protocole a été signé entre le Gouvernement et l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) le 8 avril dernier, mais aucune information n'a filtré à ce stade, aucune solution concrète n'a été présentée aux collectivités. Je rappelle la date d'extinction de ce fonds : le 1er septembre prochain.
Aussi, face au risque d'une désorganisation durable de la vie locale, quelles mesures le Gouvernement prévoit-il de prendre et surtout quels moyens compte-t-il mobiliser pour continuer d'accompagner financièrement les communes qui ont fait un choix courageux, voilà bientôt dix ans, pour le bien de leurs élèves et de leurs familles ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Monsieur le sénateur Michel Masset, le fonds auquel vous faites référence devait contribuer à la mise en place d'activités périscolaires au moment du passage à une organisation scolaire sur quatre jours et demi. Il avait une durée limitée, la loi du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République, qui l'avait créé, étant très claire à ce sujet.
Depuis le décret de 2017, la plupart des communes qui en bénéficiaient ont opté pour une organisation du temps scolaire sur quatre jours ; elles ne bénéficient donc plus de ce fonds. L'évolution observée est sensible : 20 000 communes, soit plus de 5 millions d'élèves, en ont bénéficié au cours de l'année scolaire 2016-2017 et, aujourd'hui, le nombre de communes bénéficiaires a été divisé par vingt, puisque l'on n'en compte plus que 1 200. Dans le département dont vous êtes élu, le Lot-et-Garonne, il n'y a plus qu'une quinzaine de communes qui en bénéficient…
Au total, ce dispositif représente un coût de l'ordre de 37 millions d'euros, dont la moitié est concentrée sur quinze communes, notamment Paris, qui représente à elle seule un coût de 5 millions d'euros. Il semble donc que ce fonds n'incite pas les communes à maintenir les rythmes scolaires et profite essentiellement à quelques grosses communes. C'est pourquoi son extinction avait été programmée pour la rentrée de 2023.
Toutefois, pour répondre à l'inquiétude des élus et aider les collectivités à se préparer, le Gouvernement a choisi de reporter cette échéance. Cela étant, cette décision ne remet nullement en question le principe de la suppression du fonds pour la rentrée 2025, décidée en loi de finances, ici même, en 2024. Un nouveau report ne peut donc être envisagé, a fortiori par voie réglementaire.
Dans un contexte budgétaire contraint, Élisabeth Borne a fait le choix de recentrer ses crédits sur d'autres priorités ; je pense notamment aux crédits ouverts pour le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
Cela dit, nous sommes à votre disposition et à l'écoute de vos propositions dans le cadre de la préparation du budget de 2026.
M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour la réplique.
M. Michel Masset. Madame la ministre, je tiens à vous alerter : il existe une véritable spécificité rurale à prendre en compte en ce qui concerne le maintien du fonds de soutien des temps d'activité périscolaire (TAP) de nos petites communes.
J'entends toutefois vos propos. Je suis prêt à travailler avec le Gouvernement pour trouver une issue heureuse, dans le projet de loi de finances pour 2026, afin de protéger nos communes rurales.
réglementation du balisage des zones de baignade
M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin, auteure de la question n° 513, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Mme Béatrice Gosselin. Madame la ministre, nombre de collectivités littorales, notamment dans le département dont je suis élue, la Manche, rencontrent d'importantes difficultés pour organiser la sécurisation des zones de baignade.
Ces difficultés tiennent à la superposition de deux cadres techniques : d'un côté, l'arrêté du 27 mars 1991 relatif au balisage et à la signalisation de la bande littorale maritime des 300 mètres, qui impose un balisage flottant par des bouées spécifiques dans ladite bande ; de l'autre, la norme de l'Agence française de normalisation (Afnor) Spec X50-001, qui recommande des dispositifs terrestres, comme les drapeaux de baignade et les panneaux d'information. Dans la pratique, ces deux dispositifs sont parfois imposés simultanément par les autorités préfectorales, ce qui engendre des charges logistiques et financières considérables pour les communes, sans toujours améliorer la sécurité.
La situation est encore plus préoccupante dans les territoires à fort marnage, comme la côte ouest de la Manche ou la baie du Mont-Saint-Michel, où le maintien d'un balisage flottant permanent est souvent irréalisable. Elle expose aussi les collectivités à un risque juridique accru en cas d'accident.
Madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour clarifier l'articulation entre l'arrêté de 1991 et la norme Afnor, afin de permettre une adaptation des règles aux réalités géographiques locales et de sécuriser juridiquement les collectivités dans l'exercice de leur mission de service public sur les plages ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Madame la sénatrice Gosselin, je réponds à la place de Mme Pannier-Runacher, qui avait prévu d'être présente ce matin, mais qui a dû se rendre à une conférence sur les océans.
Les deux dispositifs que vous citez ne sont ni contradictoires ni redondants, ils sont complémentaires. Ils constituent tous deux des outils à la disposition du maire pour l'exercice de ses compétences et responsabilités en matière de police des baignades.
Le fondement de cette responsabilité se trouve dans le code général des collectivités territoriales, selon lequel il appartient au maire de décider si des zones de sa commune nécessitent la mise en place de mesures réglementaires pour la pratique des activités nautiques. Ce dernier établit ses choix en fonction de la fréquentation, de la typologie des activités pratiquées ou encore de la configuration des lieux.
S'il décide de mettre en place de telles mesures, qui peuvent comporter notamment un zonage, son obligation est d'en informer le public par une publicité adaptée sur les lieux où ces baignades se pratiquent. Les deux dispositifs que vous mentionnez visent, en définissant des normes techniques, à faciliter leur lisibilité par les usagers sur l'ensemble du territoire national.
L'arrêté de 1991 n'impose pas la mise en place d'un balisage maritime. Il en définit seulement la forme si un tel balisage doit être mis en place, ce qui est le cas au titre de l'obligation de publicité définie par la loi. De la même manière et dans le même objectif d'harmonisation et de lisibilité accrue pour les usagers, la norme Afnor Spec précitée définit le format des signalisations destinées à satisfaire à l'obligation de publicité à terre, sur la plage.
L'articulation entre ces deux outils signalétiques dépend donc en tout premier lieu du dispositif réglementaire établi localement et des nécessités de publicité le concernant, qui peuvent différer d'un site à l'autre, selon la configuration des lieux et les pratiques effectivement observées sur place.
M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin, pour la réplique.
Mme Béatrice Gosselin. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais il est vrai que tout cela représente des complexités pour des territoires comme le mien, où le marnage est important, les bouées étant alors parfois malmenées.
Cette question existait déjà avec le dispositif de 1991 et il n'y avait aucune difficulté. Le nouveau dispositif ajoute des coûts supplémentaires pour les zones de baignades, ce qui pose problème quand une commune a plusieurs zones de baignades depuis longtemps.
J'entends qu'il soit nécessaire d'informer le public, mais il faut aussi s'adapter aux territoires. Il me semble donc qu'il serait opportun que les préfets aient la main sur ce sujet, afin d'adapter la sécurisation des zones de baignade en fonction des capacités et de la configuration géographique de chaque commune.
mise en œuvre de la filière à responsabilité élargie du producteur des emballages professionnels
M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, auteur de la question n° 532, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
M. Guislain Cambier. La simplification, en parler, c'est bien ; la faire, c'est mieux. Or ce n'est pas ce que nous faisons en ce qui concerne la responsabilité élargie du producteur (REP), notamment celle qui s'applique aux emballages professionnels.
Les services du ministère de la transition écologique ont annoncé la publication des textes réglementaires y afférents « à l'été », pour une mise en œuvre au 1er janvier 2026. Six mois, c'est bien court si l'on veut être efficace, d'autant que, nous le savons tous, les processus d'agrément des éco-organismes ou des systèmes individuels par l'État prendront ensuite entre trois et six mois. Comment voulez-vous que les entreprises s'organisent ?
En outre, après l'agrément des éco-organismes viendra le temps du processus d'organisation interne des entreprises metteuses sur le marché, processus long et complexe : choix de l'éco-organisme en fonction des barèmes des écocontributions, identification en interne des emballages soumis à la REP, mise à jour des outils informatiques, puisqu'il faudra intégrer chaque référence d'emballage en vue de la déclaration annuelle auprès de l'éco-organisme choisi, révision des contrats pour l'enlèvement des déchets, réorganisation logistique pour la reprise des déchets, intégration des nouvelles consignes de tri, formation du personnel, etc.
Je souhaite donc savoir, madame la ministre, si un moratoire sur cette REP serait envisageable, afin de simplifier au maximum sa mise en place pour les entreprises. Il ne faudrait pas reproduire ce qui se passe actuellement avec la filière des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment, qui est beaucoup trop complexe.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Monsieur le sénateur Cambier, vous nous interrogez sur la mise en place de la filière à responsabilité élargie du producteur pour les emballages professionnels.
Je souhaite tout d'abord rappeler que la mise en place d'une telle filière est issue du droit européen et que celle-ci aurait dû entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier de cette année, comme c'est déjà le cas chez nos voisins. Nous sommes donc déjà en retard par rapport à nos obligations européennes.
Le projet de décret définissant le cadre général de cette filière a fait l'objet d'une large concertation en fin d'année dernière. Ce travail approfondi est maintenant achevé et le texte sera prochainement examiné par le Conseil d'État. Ce décret sera complété par un arrêté portant cahier des charges, qui est en cours de finalisation et qui fera lui-même l'objet d'une large concertation, à laquelle vos collègues et vous-même pourrez prendre part, ce qui permettra à chacun d'anticiper l'impact des futures obligations.
Par ailleurs, parmi les emballages couverts par cette filière REP, les emballages en plastique représentent un gisement d'environ 1 million de tonnes, à peine un quart de ces emballages étant aujourd'hui recyclés. En raison de cette piètre performance, la France est aujourd'hui le pays qui paie le plus à l'Europe dans le cadre de la ressource propre sur les emballages en plastique non recyclé, soit 1,5 milliard d'euros chaque année.
Il y a donc urgence à renforcer la collecte et le recyclage de ces emballages. Dans ce contexte, il n'est pas envisageable de retarder encore la mise en œuvre de cette filière en décrétant un moratoire. Vous pouvez compter sur Agnès Pannier-Runacher pour que le dispositif retenu soit équilibré et performant, notamment dans le cadre de la deuxième concertation qui aura lieu avant la publication de l'arrêté.
M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, pour la réplique.
M. Guislain Cambier. Je retiens de vos propos que l'on va continuer de surtransposer la réglementation européenne, puisque celle-ci ne compte que cinq filières REP et que nous allons en avoir vingt-cinq. Malgré cela, nous allons imposer aux entreprises des délais très courts et des contraintes que d'autres n'ont pas, instituant ainsi un désavantage compétitif. C'est dommage, surtout au regard des objectifs que l'on vise. Les entreprises sont volontaires pour agir, mais encore faut-il ne pas leur mettre des bâtons dans les roues.
avenir des cétacés du parc marineland d'antibes
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, auteure de la question n° 536, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Mme Mathilde Ollivier. Madame la ministre, voilà quelques jours, l'ONG de défense animale TideBreakers a diffusé des images saisissantes : on y voit deux orques, Wikie et son fils Keijo, tourner en rond dans un bassin plein d'algues.
Les images sont nouvelles, mais la situation ne l'est pas. L'urgence pour ces cétacés détenus au parc Marineland d'Antibes est connue de toutes et tous. Depuis des années, les scientifiques, les ONG et une majorité croissante de Français dénoncent ces conditions de captivité indignes pour les orques et les dauphins. Les travaux scientifiques ont largement documenté les besoins complexes de ces espèces, qui rendent leur maintien en bassin particulièrement problématique au regard de leur bien-être.
Oui, la loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes a représenté un point de bascule. Elle a acté la fin des spectacles et l'interdiction de la reproduction et de l'acquisition de nouveaux cétacés. Cette avancée majeure marque un tournant en matière de considération éthique pour les animaux sauvages détenus en captivité à des fins de divertissement. C'était un signal fort, attendu.
Toutefois, cette loi conserve un angle mort inquiétant : que deviennent les animaux encore captifs ? À Marineland, nous laissons quasiment à l'abandon deux orques et douze dauphins. Récemment, l'Espagne a refusé leur transfert. Pour ces animaux, rien n'est clair : pas de solution concrète, pas de sanctuaire, pas même un plan de transition.
Une solution pourrait se trouver dans la création ou dans le recours à des sanctuaires marins, c'est-à-dire des zones côtières fermées et protégées dans un environnement semi-naturel tout en restant sous supervision humaine. Des projets existent, surtout en Europe, notamment en Grèce, où j'ai pu aborder le sujet lors d'un déplacement.
Où en sommes-nous à ce sujet, madame la ministre ? La situation avance-t-elle ou enterre-t-on le dossier en silence ? On ne peut laisser ces animaux finir leur vie dans l'oubli parce que cela dérange ou coûte trop cher de s'en occuper. Je vous demande aujourd'hui un engagement clair. Allons-nous, oui ou non, offrir à ces cétacés une fin de vie digne, dans un environnement adapté ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Madame la sénatrice Mathilde Ollivier, je vous réponds au lieu et place de Mme Pannier-Runacher.
En vertu de la loi de 2021, Marineland a annoncé l'arrêt de ses activités de présentation de cétacés au public à compter du 5 janvier 2025. Pour accompagner cette démarche, le ministère a exploré les possibilités de relocalisation des orques dans des enclos marins. Un appel à manifestation d'intérêt a été lancé au printemps 2024. Les projets reçus ont été analysés par l'inspection générale de l'environnement et du développement durable, mais aucun ne présentait de garanties suffisantes à court terme en matière de bien-être animal.
En ce qui concerne les dauphins, le ministère a réuni l'ensemble des parties prenantes au premier trimestre 2025. Leurs travaux ont conclu que, bien qu'étant prometteurs, les projets d'enclos marins prévus en Italie et en Grèce n'étaient pas encore opérationnels et ne pouvaient donc accueillir les animaux de Marineland. Néanmoins, des échanges interministériels sont en cours pour les faire aboutir.
C'est l'objet du groupe de travail que ma collègue Agnès Pannier-Runacher souhaite réunir au cours des prochains jours avec ses homologues italiens, grecs et espagnols, qui sont favorables à un partage d'informations et de connaissances sur le sujet, afin de favoriser la faisabilité technique et administrative de ces enclos marins.
En l'absence de solution à ce jour, Marineland a sollicité le transfert des cétacés à l'étranger, vers d'autres delphinariums, notamment au Japon, ce que la ministre de la transition écologique a refusé, en raison du risque associé à un transport de longue durée des orques. Une seconde demande, visant à un transfert des orques et des dauphins vers l'Espagne, a été rejetée par les autorités de ce pays, qui ont estimé que leurs infrastructures ne répondaient pas aux besoins des animaux.
Ces derniers restent donc aujourd'hui sous la responsabilité de Marineland, qui veille à les maintenir en bonne santé, dans l'attente d'une nouvelle solution. Le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour faire émerger une solution conforme à l'esprit de la loi et fondée sur le respect du bien-être animal.