(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 116, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Rapport annexé, après l’alinéa 162

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

L’État développera une offre de formation dans les filières générales, technologiques et professionnelles adaptée à la demande, et s’assurera d’un nombre de places suffisant dans chaque filière de sorte qu’aucun lycéen ne soit pas contraint de poursuivre sa scolarité loin de chez lui en raison de la saturation de la filière de son choix.

La parole est à Mme Mélanie Vogel.

Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à clarifier, dans le rapport annexé, le fait que l’État développera une offre de formation adaptée à la demande dans les filières générales, technologiques et professionnelles.

Nous étudierons plus tard, à l’article 26, l’ouverture du passeport mobilité pour les lycéens. C’est une mesure positive qui permet de pallier un problème : en l’absence d’offre adaptée de formations, les lycéens doivent faire leurs études ailleurs.

Mais on ne peut pas se satisfaire du fait que l’on doive envoyer les lycéens mahorais poursuivre leurs études en métropole. À terme, ce que l’État doit être en mesure de faire, c’est de garantir que ces formations aient lieu sur place.

Jusqu’à aujourd’hui, seul Saint-Pierre-et-Miquelon bénéficie de ce passeport pour les jeunes. Mayotte dispose d’un large panel de spécialités pour les filières générales et technologiques – l’offre est presque complète –, mais pour les filières professionnelles, le territoire ne propose que 31 des 94 filières disponibles en France.

Néanmoins, avec la croissance démographique que l’on connaît, les capacités d’accueil des filières n’augmentent pas au même rythme que les demandes d’inscription.

Nous nous retrouvons donc dans une situation qui n’est pas acceptable : des lycéens ne peuvent pas poursuivre leurs études chez eux.

L’aide à la mobilité est une réponse de court terme qui est nécessaire et nous la soutenons, mais à terme, il faut que nous soyons capables d’offrir la formation sur place. Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement vise à développer l’offre de formation dans les lycées de Mayotte. Comme vous l’avez rappelé, ma chère collègue, le projet de loi prévoit déjà, en son article 26, d’encourager la mobilité des lycéens mahorais grâce au passeport mobilité, dès lors qu’ils sont dans l’impossibilité de suivre à Mayotte le cursus de formation de leur choix.

La question est non pas de limiter le développement des formations sur Mayotte, mais de prévoir de manière temporaire, le temps justement que les formations s’y mettent en place, l’orientation vers des formations sur d’autres parties du territoire national.

Nous estimons que cet engagement est déjà inscrit dans le rapport annexé. C’est pourquoi cet amendement nous semble satisfait. L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 116.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 88, présenté par M. Omar Oili, Mmes Le Houerou, Narassiguin et Artigalas, MM. Lurel et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Rapport annexé

I. – Alinéa 171

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Un calendrier d’investissement pour les travaux de modernisation du CHM de Mamoudzou et la réouverture de l’ensemble des dispensaires de l’île seront assurés avant le 31 décembre 2025.

II. – Alinéa 172

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Un calendrier pour la réorganisation territoriale des centres médicaux de référence sera élaboré avant le 31 décembre 2025.

III. – Alinéa 173

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Un plan d’investissement et un calendrier des travaux pour la construction du second site hospitalier seront élaborés avant le 31 décembre 2025.

La parole est à M. Saïd Omar Oili.

M. Saïd Omar Oili. Cet amendement vise à préciser les objectifs fixés dans le rapport annexé concernant l’accès aux soins.

À Mayotte, l’offre de soins reste très limitée, le centre hospitalier de Mayotte (CHM) étant le principal dispensateur de soins. À l’exception de l’activité de maternité, le nombre de lits disponibles est bien en dessous des ratios moyens qui prévalent dans l’Hexagone. Le différentiel de capacité rapporté à la population recensée est considérable en médecine, chirurgie, obstétrique (MCO), le nombre de lits représentant à peine 40 % de la moyenne hexagonale, avec 1,56 lit pour 1 000 habitants.

Par conséquent, Mayotte dépend fortement de La Réunion. Le territoire mahorais ne disposant pas d’une offre suffisante dans l’ensemble des spécialités et ayant des besoins largement supérieurs aux capacités, les transferts et évacuations sanitaires restent nécessaires pour permettre aux patients d’accéder dans de bonnes conditions aux soins dont ils ont besoin. Le nombre d’évacuations sanitaires, très dynamique, est ainsi passé de 500 en 2010 à 1 452 en 2021.

Il est crucial que l’offre de soins s’étende et se développe à Mayotte, ce qui requiert de préciser les contours des objectifs fixés au sein du rapport annexé. Ainsi, nous demandons que soient établis, avant le 31 décembre 2025, un calendrier d’investissement pour les travaux de modernisation du CHM de Mamoudzou et pour la réouverture de l’ensemble des dispensaires de l’île, un calendrier pour la réorganisation territoriale des centres médicaux de référence et, enfin, un plan d’investissement et un calendrier des travaux pour la construction du second site hospitalier.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Les auteurs de l’amendement prévoient une série de calendriers et de plans pour les principales mesures d’investissement en matière sanitaire. Nous sollicitons l’avis du Gouvernement, monsieur le ministre.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. Je remercie d’abord Mme la rapporteure… (Sourires.)

Le Gouvernement vise l’objectif, partagé par tous, d’une extension de l’offre de soins à Mayotte. C’est indispensable pour toutes les raisons que vous connaissez parfaitement.

Le projet que nous portons concerne non seulement le CHM, sur le site principal de Mamoudzou, les quatre centres médicaux de référence et les dispensaires, tous ouverts à part l’un d’entre eux. Ils bénéficient de la présence de médecins, d’infirmières, d’aides-soignantes, mais nous devons faire en sorte de mobiliser l’offre libérale dans ces dispensaires. C’est l’une de mes préoccupations.

Le programme correspondant a été validé par le Conseil national de l’investissement en santé (Cnis). Il comprend d’abord une opération de 244 millions d’euros, financée par le Ségur de la santé, pour le site de Mamoudzou. Il s’agit d’augmenter les conditions d’accueil des patients et, surtout, les capacités de prise en charge.

Le programme comporte ensuite une opération, pour un montant estimé à 148 millions d’euros, hors coût d’acquisition du foncier, pour la construction du second site hospitalier, à Combani.

Nous visons une passation des marchés au premier semestre de 2026. Un calendrier précis pourra être transmis au 31 décembre 2025. C’est pour cette raison que je suis favorable à votre amendement, qui a justement pour objet d’apporter cette précision.

Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 88.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 89, présenté par M. Omar Oili, Mmes Le Houerou, Narassiguin et Artigalas, MM. Lurel et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Rapport annexé, alinéa 176

Compléter cet alinéa par un alinéa ainsi rédigé :

Un plan d’investissement et un calendrier pour la mise en place des actions d’informations et d’accès aux services de santé en matière de sexualité de procréation à Mayotte seront élaborés avant le 31 décembre 2025.

La parole est à M. Saïd Omar Oili.

M. Saïd Omar Oili. Cet amendement vise à préciser les objectifs fixés par le rapport annexé concernant les actions d’information et d’accès aux services de santé en matière de sexualité et de procréation à Mayotte.

Nous souhaitons en outre qu’un plan d’investissement en faveur de ces actions et un calendrier soient mis en place avant le 31 décembre 2025.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Nous sollicitons l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. L’agence régionale de santé prépare un renforcement des actions en faveur de l’éducation affective et sexuelle, avec, en particulier, le déploiement d’un référent à Mayotte et des mesures pour un meilleur accès aux contraceptifs. Ces actions doivent être déployées en lien étroit avec les centres de protection maternelle et infantile (PMI).

Vous proposez de compléter le rapport annexé par un alinéa qui précise les initiatives que nous devons prendre dans ce sens. C’est très important. Au fond, on évoque beaucoup la sécurité, l’immigration, ainsi que les défaillances en matière d’infrastructures et d’eau potable, mais, incontestablement, la question des violences intrafamiliales et des violences faites aux femmes et aux enfants, ainsi que les problèmes d’accès à la sexualité pour les plus jeunes – il n’y a qu’à voir le nombre de très jeunes filles enceintes sur l’île –, nous oblige à une très grande mobilisation.

J’ai eu l’occasion de rencontrer l’ensemble des organisations publiques ou associatives qui travaillent sur ces sujets. Il y a d’ailleurs une nouvelle déléguée auprès du préfet pour prendre en charge cette politique publique.

Il me semble qu’il faut une véritable mobilisation de toute la société mahoraise, accompagnée par l’État, et tenant compte, évidemment, des spécificités culturelles de Mayotte. Il y a trop de jeunes femmes qui se retrouvent en très grande détresse.

Votre amendement va dans ce sens, donc je ne peux qu’y être favorable.

Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 89.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 90, présenté par M. Omar Oili, Mmes Le Houerou, Narassiguin et Artigalas, MM. Lurel et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Rapport annexé, alinéa 185, deuxième phrase

Remplacer l’année :

2031

par l’année :

2027

La parole est à M. Saïd Omar Oili.

M. Saïd Omar Oili. La situation socio-économique à Mayotte demeure extrêmement préoccupante, avec des écarts majeurs en matière de précarité et de pauvreté par rapport à l’Hexagone. L’échéance initialement prévue pour une convergence totale est fixée à 2036, mais il nous semble impératif d’accélérer ce calendrier.

En effet, le taux de pauvreté s’élève à 77 %, alors qu’il n’est que de 14 % en France métropolitaine. Le PIB par habitant y est le plus faible de tous les territoires français : il représente seulement un quart du PIB national par habitant. Enfin, le chômage touche 37 % de la population active.

Au 1er novembre 2024, le Smic horaire brut a été fixé à 11,88 euros dans l’ensemble des départements et collectivités d’outre-mer, à l’exception notable de Mayotte, où le Smic horaire brut demeure à 8,98 euros, soit un écart mensuel de 439,83 euros pour une durée de travail identique de trente-cinq heures hebdomadaires.

Pourtant, l’ancien ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion, Olivier Dussopt, avait appelé à une accélération de la convergence à la faveur des revalorisations périodiques, ce qui aurait pu être le cas ce 1er novembre 2024. Il aurait suffi de relever de 4 %, au lieu de 2 %, le Smic brut et de prélever les cotisations correspondantes.

L’échéance de 2031 mentionnée dans le rapport annexé pour une convergence du Smic entre Mayotte et le reste du pays reste trop lointaine au regard de l’urgence sociale. Nous souhaitons donc avancer cette échéance à 2027 au plus tard.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Avis défavorable. Vous proposez d’avancer à 2027, au lieu de 2031, la convergence du Smic. Dès lors que l’alignement du revenu minimum se traduit pas une hausse des cotisations et, partant, du coût du travail, il convient de ne pas y procéder trop brutalement, au risque d’encourager le travail illégal. Mme Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pourra vous apporter des précisions à ce sujet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. J’irai dans le même sens que Mme la rapporteure. Je précise que l’alignement du Smic net est prévu au plus tard en 2031 – je dis bien au plus tard. J’ai bien insisté hier sur le fait que la valeur travail doit être placée au cœur de ce processus de convergence, car la bataille contre la pauvreté – mais pas seulement – ne sera gagnée qu’avec la réduction du chômage, qui est bien trop élevé à Mayotte.

Le rapport annexé prévoit cependant que cette évolution doit se faire selon une trajectoire soutenable tant pour l’économie que pour la société mahoraise post-Chido. Nous devons être très attentifs à l’accompagnement des entreprises pour qu’il n’y ait pas d’effets de bord susceptibles de mettre en difficulté une grande partie de la population.

J’ai donc souhaité, monsieur le sénateur, avec ma collègue Catherine Vautrin, que cette question soit préalablement expertisée afin de ne pas déstabiliser l’économie, les entreprises, l’emploi et le pouvoir d’achat des Mahorais. Une séquence de concertation a d’ores et déjà été prévue par le préfet de Mayotte, ce jeudi 22 mai. Il s’agira d’écouter tous les acteurs concernés – représentants des entreprises et des syndicats, conseil économique, social et environnemental de Mayotte (Cesem) et élus.

Avant d’annoncer une date d’alignement du Smic, nous avons besoin de ce temps d’expertise pour être le plus efficaces possible. Je suis conscient des attentes fortes de la population, mais nous devons avant tout éviter les effets négatifs qu’une trop grande précipitation pourrait avoir sur l’économie, les entreprises et l’emploi.

C’est la raison pour laquelle, à défaut de retrait de votre amendement, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.

Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Je confirme les propos de Mme la rapporteure. Selon la direction de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DEETS) de Mayotte, 80 % environ de l’économie mahoraise n’est pas déclarée.

Dans le cadre du chantier de la convergence sociale, que le Gouvernement souhaite accélérer, les cotisations et contributions sociales recouvrées à Mayotte seront progressivement alignées dans leur assiette et dans leur montant sur le niveau du droit commun. Cela aura pour conséquence d’augmenter le coût du travail, ce qui justifie d’autant plus de rehausser progressivement le Smic brut mahorais, afin de ne pas créer d’effets incitatifs supplémentaires au recours au travail dissimulé.

Dans le même temps, le Gouvernement envisage d’étendre à Mayotte le dispositif d’exonération de cotisations sociales prévu par la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, dite Lodéom.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 90.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 138, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Rapport annexé, alinéa 187

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Notre amendement vise à supprimer l’alinéa 187 du rapport annexé, qui indique que la convergence sociale entre Mayotte et l’Hexagone n’interviendra, pour les allocations individuelles de solidarité, dont l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et le revenu de solidarité active (RSA), qu’après celle du Smic, prévue d’ici à 2031. Par ailleurs, les prestations familiales sont écartées de cette convergence.

Cette hiérarchisation entre salaires, prestations contributives et prestations universelles de solidarité ne présente aucune rationalité et n’a aucun sens économique ou social. C’est même un véritable contresens !

Les salariés ont tout autant besoin de prestations familiales pour espérer un niveau de vie correct par unité de consommation, et le risque famille n’est pas couvert par une cotisation contributive. La solidarité universelle, monsieur le ministre, est attachée aux citoyens, et non pas aux travailleurs.

Rappelons que les écarts entre les montants des prestations versées à Mayotte et ailleurs, dans l’Hexagone comme dans les autres départements d’outre-mer, restent importants. Par exemple, les montants de l’AAH et du RSA ne représentent que 50 % de ceux des autres régions. Ces disparités alimentent et expliquent le niveau élevé de pauvreté et les profondes inégalités qui frappent l’île. La fonction redistributive de ces prestations sociales est entravée, voire annihilée.

À Mayotte, 94 % des familles monoparentales – mères isolées avec enfants le plus souvent – sont pauvres. Cela s’explique par la faible couverture du risque famille à Mayotte. C’est pourtant une branche historique de notre sécurité sociale. Enfin, les ménages pauvres comptent davantage d’enfants que les autres ménages.

Aussi, cet amendement de suppression de l’alinéa 187 vise à rétablir la convergence sociale entre l’Hexagone et Mayotte en ce qui concerne l’AAH, le RSA et les prestations familiales.

Mme la présidente. L’amendement n° 139, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Rapport annexé, alinéa 187, troisième phrase

Remplacer les mots :

n’appelle pas

par le mot :

appelle

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement, inspiré par l’Unicef, vise à intégrer les prestations familiales à la convergence sociale. L’amendement précédent était plus large. À Mayotte, le code de la sécurité sociale ne s’applique pas dans son intégralité. Le territoire souffre une fois de plus d’un régime dérogatoire et de règles spécifiques qui entravent la lutte contre la pauvreté des familles et des enfants. C’est justement le rôle des prestations de corriger cela.

Les écarts de montant des prestations familiales entre l’Hexagone et les autres territoires sont importants. Pour une famille avec trois enfants à charge, l’allocation de base à Mayotte est de 223,89 euros, contre 338 euros dans les départements d’outre-mer et l’Hexagone, soit seulement 66 % du montant hexagonal. Le complément pour chaque enfant supplémentaire est de 21,69 euros à Mayotte, contre 190,29 euros ailleurs. L’allocation de soutien familial n’est carrément pas versée à Mayotte, au contraire des autres régions.

Par ces dispositions dérogatoires, la réglementation spécifique à Mayotte omet de prendre en compte un principe universel figurant dans nos engagements internationaux : l’intérêt supérieur de l’enfant.

Cette situation, liée à l’absence de convergence des droits sociaux, est aggravée par un fort taux de non-recours. L’exclusion explicite, volontaire, des prestations familiales de la convergence des droits prévus par le projet de loi amplifie la précarisation des familles, alors que c’est précisément un alignement de ces prestations qui permettra une meilleure prise en charge des familles et le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant, comme l’exige notre signature internationale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Ces amendements prévoient un alignement plus rapide du régime des prestations familiales à Mayotte. Nous y sommes défavorables. Nous rappelons que la spécificité de la démographie mahoraise, la moitié de la population étant mineure, ainsi que la situation migratoire de l’archipel, ne pousse pas à développer une politique de soutien en faveur de la natalité. Ma collègue Christine Bonfanti-Dossat pourra apporter des précisions au nom de la commission des affaires sociales.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.

Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Je souscris aux propos de Mme le rapporteur. Je précise également qu’à l’alinéa 187 le Gouvernement ne déclare pas renoncer à tout alignement des prestations familiales, indiquant plutôt qu’un tel alignement n’est pas prioritaire au regard du niveau des naissances à Mayotte. Il faut savoir que la population mahoraise est pour moitié âgée de moins de 20 ans et que, pour une population de 300 000 habitants, 10 000 naissances ont été recensées par l’Insee en 2022. Aussi, la mise en œuvre d’une politique familiale ne peut pas être la priorité de cette loi pour la refondation de Mayotte.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je suis assez étonnée par ces propos. La droite s’occupe constamment du ventre des femmes, s’alarmant des conséquences du déclin démographique pour l’avenir de notre système de retraite. Elle nous appelle donc à…

M. Rachid Temal. Un réarmement démographique !

Mme Raymonde Poncet Monge. Voilà !

En revanche, les femmes de Mayotte faisant trop d’enfants à son goût, elle propose de mettre un frein à la politique familiale dans ce département.

Mais la politique familiale n’est pas faite pour cela ! Elle est faite pour lutter contre la pauvreté des enfants et des familles. Elle n’est pas faite pour inciter les femmes à faire plus d’enfants, même si elle améliore le pouvoir d’achat. Le souhait d’un troisième enfant, quand on en a déjà deux, n’est pas subordonné aux prestations familiales. Il existe d’autres critères sur lesquels il faut se pencher.

Mais Mayotte fait trop d’enfants, donc elle est privée de prestations familiales. C’est assez savoureux d’entendre la droite dire le contraire de ce qu’elle dit pour la France hexagonale.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.

Mme Corinne Narassiguin. Les socialistes voteront évidemment ces propositions du groupe écologiste.

Il s’agit effectivement d’assurer la convergence la plus rapide possible des prestations sociales, que ce soit les prestations familiales, l’AAH ou le RSA.

Les gens ne font pas des enfants pour les allocations familiales : il faut en finir avec ce fantasme ! La situation de la natalité à Mayotte n’a rien à voir avec les prestations sociales, puisqu’aujourd’hui il y a justement un problème de convergence. La question qui se pose est la suivante : comment sortir des familles entières de la précarité et de la pauvreté en s’assurant qu’elles vivent dignement ? Aujourd’hui, c’est ce qui accable le plus la population à Mayotte. Il est de la responsabilité de la République de corriger le plus rapidement possible ces inégalités. Il y va du respect de la promesse de notre pacte social.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 138.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 139.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 135, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Rapport annexé, alinéa 192, deuxième phrase

1° Remplacer les mots :

pourra définir

par le mot :

définira

2° Après le mot :

sociaux

insérer les mots :

et comprenant un objectif spécifique de logements locatifs très sociaux,

La parole est à M. Saïd Omar Oili.

M. Saïd Omar Oili. À Mayotte, 88 % des ménages demandeurs de logement social ont des ressources qui les situent sous le plafond du logement locatif très social. Or le parc de logements aidés est principalement constitué de logements prêts locatifs intermédiaires (PLI) ou assimilés, qui représentent 59 % du total.

Nous proposons que des objectifs spécifiques soient fixés en matière de production de logements locatifs très sociaux à Mayotte.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Bitz, rapporteur. La commission s’en remet à l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. L’augmentation de l’offre de logements très sociaux à destination des ménages les plus modestes, les plus fragiles, doit être au cœur des enjeux de cohésion sociale en outre-mer, et notamment, bien sûr, à Mayotte. L’objectif est de proposer une offre d’habitat adaptée, c’est-à-dire à loyers et charges maîtrisés, avec une gestion locative idoine, et, le cas échéant, un accompagnement des populations concernées.

Dans le prolongement de la première expérimentation menée à Mayotte pour du « logement locatif très social adapté », avec le déploiement de l’appel à projets « Un toit pour tous en outre-mer » (Totem), des réflexions sont en cours pour pérenniser le logement très social et fixer des objectifs chiffrés sur cette catégorie spécifique. Je ne vous cache pas que les chiffres de l’année dernière, notamment les constructions de la Société immobilière de Mayotte (SIM), étaient inquiétants, puisque, si je ne me trompe pas, 73 logements seulement ont été réalisés.

Heureusement, j’ai pu constater que des chantiers de reconstruction avaient été lancés et que la SIM s’était fixé des objectifs plus ambitieux pour cette année 2025. Les choses semblent aller dans le bon sens.

Le souhait du Gouvernement est de bien développer une offre nouvelle de logements « très sociaux adaptés », dont le besoin est incontestablement croissant. C’est pourquoi je suis favorable à votre amendement, monsieur le sénateur.