Sommaire
Présidence de M. Pierre Ouzoulias
Financement de la sécurité sociale pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
Article 6 bis (nouveau) (précédemment réservé)
Après l'article 6 bis (précédemment réservé)
PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert
Mise au point au sujet d'un vote
Financement de la sécurité sociale pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mise au point au sujet de votes
(À suivre)
Présidence de M. Pierre Ouzoulias
vice-président
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)
1
Décès d'un ancien sénateur
M. le président. J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Jean-François Humbert, qui fut sénateur du Doubs de 1998 à 2014.
2
Financement de la sécurité sociale pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, dont le Sénat est saisi en application de l'article 47-1, alinéa 2, de la Constitution, de financement de la sécurité sociale pour 2026 (projet n° 122, rapport n° 131, avis n° 126).
Dans la discussion des articles, nous en revenons, au sein du titre Ier de la deuxième partie, à l'article 6 bis précédemment réservé.
DEUXIÈME PARTIE (SUITE)
Dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre financier de la sécurité sociale pour l'exercice 2026
TITRE Ier (SUITE)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Article 6 bis (nouveau) (précédemment réservé)
Au 2° du I de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, le taux : « 9,2 % » est remplacé par le taux : « 10,6 % ».
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, sur l'article.
Mme Christine Lavarde. Nous abordons la discussion de l'article 6 bis, introduit à l'Assemblée nationale pour compenser la suspension de la réforme des retraites.
Le groupe Les Républicains est du même avis que Mme la rapporteure générale de la commission des affaires sociales, qui a déposé un amendement de suppression : cet article n'a pas lieu d'être, puisqu'il n'y a pas lieu de suspendre la réforme des retraites.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Exactement !
Mme Christine Lavarde. Cependant, je souhaite appeler l'attention de chacun sur le fait que, en application des règles légistiques qui organisent nos débats, les autres amendements qui visent à modifier cet article tomberaient avant même d'être débattus si les amendements de suppression étaient adoptés.
Pourtant, certains de ces amendements ont été adoptés par le Sénat l'année dernière. C'est par exemple le cas de mon amendement n° 1627 rectifié bis qui a pour objet de revenir à l'esprit du législateur en matière de fiscalité des revenus du patrimoine pour les travailleurs transfrontaliers.
Historiquement, la fiscalité appliquée aux transfrontaliers pour leurs revenus du capital était identique à celle de leurs voisins travaillant en France, mais certains d'entre eux ont engagé des recours qui ont débouché sur un très long contentieux. Finalement, la Cour de justice de l'Union européenne a donné tort à la France, si bien que, depuis 2017, cette fiscalité est moins élevée pour les transfrontaliers.
L'amendement n° 1627 rectifié bis, associé à un amendement miroir dans le projet de loi de finances pour 2026 visant à compenser la perte pour la sécurité sociale par un transfert de TVA, permet, selon nos calculs, de rapporter à terme 1 milliard d'euros à l'État français.
Il s'agit, en revenant au régime antérieur à 2017, d'appliquer la même fiscalité sur le patrimoine, quel que soit l'endroit où l'on travaille.
Je rappelle que l'État soutient les transfrontaliers en prenant notamment en charge leur assurance chômage lorsqu'ils travaillent dans un pays avec lequel la France n'a pas signé de convention fiscale.
Certes, il est nécessaire de revenir sur la hausse de la fiscalité du capital prévue à l'article 6 bis, mais nous devons être attentifs à la manière dont nous organisons nos débats. J'aimerais donc connaître la position de Mme la ministre, en particulier sur les amendements de réécriture de cet article.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, sur l'article.
M. Vincent Delahaye. Je rejoins Christine Lavarde au sujet de l'ordre de discussion des amendements. J'ai moi-même déposé un amendement de rédaction globale et je voudrais comprendre pourquoi les amendements de suppression sont systématiquement discutés en premier. Est-ce en application du règlement du Sénat ? La logique n'est-elle pas d'aller du général au particulier ? (Mme Laurence Rossignol s'exclame.)
Je comprends qu'il soit plus aisé, pour accélérer la séance, de discuter prioritairement des amendements de suppression, mais j'aurais préféré que nous examinions les amendements de rédaction globale en premier.
Je profite donc de cette prise de parole pour présenter mon amendement n° 139 rectifié quater, qui risque de ne pas être appelé en discussion.
De même, il serait bon d'étudier l'amendement de Christine Lavarde, dont l'adoption aurait pour effet de rapporter 1 milliard d'euros à l'État.
Si les amendements de rédaction globale devaient ne pas être adoptés, nous pourrions voter ensuite sur les amendements identiques de suppression.
Pour ma part, j'ai cherché à rédiger un amendement allant dans le sens de la valorisation du travail, un objectif que nous affichons tous dans nos déclarations.
Je ne comprends pas bien pourquoi les pensions de retraite comme les revenus de remplacement se voient appliquer des taux de contribution sociale généralisée (CSG) moins élevés que les revenus du travail.
C'est la raison pour laquelle mon amendement tend à réduire le taux de CSG sur les revenus du travail de 9,2 % à 8,3 %, ce qui l'alignerait sur celui des pensions de retraite les plus élevées.
En contrepartie, le taux de CSG sur les revenus de remplacement et sur les revenus des jeux, respectivement de 6,2 % et de 7,2 % – je ne comprends pas non plus pourquoi les revenus des jeux sont moins taxés que les revenus du travail – serait relevé à 8,3 %.
Cette harmonisation irait dans le sens de la valorisation du travail.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, sur l'article.
Mme Annie Le Houerou. Nous sommes favorables au maintien de l'article 6 bis, menacé de suppression par la droite sénatoriale.
Jusqu'en 2018, la CSG sur les revenus du capital était supérieure d'un point à la CSG sur les revenus d'activité et de remplacement. Depuis lors, plus de 24 milliards d'euros ont manqué à l'État du fait de la baisse de ce taux.
La politique dite de l'offre menée par les gouvernements macronistes successifs a entraîné une perte sèche de 450 milliards d'euros entre 2014 et 2023.
Le montant total des niches qui grèvent le budget de la sécurité sociale s'élève à plus de 100 milliards d'euros, dont environ 35 milliards ne sont pas compensés, selon les estimations de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss).
L'augmentation du taux de CSG sur les revenus du capital prévue à l'article 6 bis est donc importante pour les comptes sociaux.
Par ailleurs, l'impact individuel de cette mesure reste faible. Ainsi, pour un plan d'épargne-logement (PEL) dont l'encours serait de 50 000 euros et le taux d'intérêt de 2 %, le rendement annuel passerait de 700 euros à 686 euros, soit une perte de 14 euros.
Pour un contrat d'assurance vie investi dans un fonds en euros de 10 000 euros, le rendement annuel passerait de 248 euros à 244 euros, soit une baisse de 4 euros.
L'affaiblissement et la perte de qualité des services publics, dus à leur sous-financement, minent le consentement à l'impôt.
À l'inverse, une fiscalité juste, condition d'une protection sociale fonctionnelle et de qualité, est la base du bon fonctionnement de notre contrat social.
L'Assemblée nationale a souhaité corriger les inégalités de rente, qui cassent le consentement à l'impôt et la cohésion sociale et qui ne contribuent que faiblement à la croissance. C'est pourquoi elle a adopté l'article 6 bis, qui relève le taux de CSG sur les revenus du capital de 9,2 % à 10,6 %, ce qui représente un gain de 2,66 milliards d'euros pour la sécurité sociale.
Supprimer cet article, c'est ponctionner le pouvoir d'achat de la majorité des Français sans viser les revenus des plus riches. Alors que vous voulez exonérer de cotisations les heures supplémentaires et que vous refusez de mettre à contribution les plus hauts revenus, la proposition adoptée par l'Assemblée nationale est juste et responsable.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, sur l'article.
Mme Laurence Rossignol. Il faut prendre très au sérieux les interventions de nos collègues Lavarde et Delahaye. D'abord, parce qu'ils sont connus dans cet hémicycle pour être de bons fiscalistes et des spécialistes des finances publiques, y compris de celles de la sécurité sociale ; ensuite, parce que l'adoption de leurs amendements contribuerait incontestablement à abonder les recettes de la protection sociale.
Vincent Delahaye, ancien vice-président de notre assemblée, sait bien, même s'il fait mine de s'interroger, que les amendements de suppression sont toujours examinés en premier.
Pour ma part, je proposerai à nos collègues une solution pour que leurs amendements soient discutés et, le cas échéant, votés : il suffit de ne pas adopter l'amendement de Mme Doineau et les trois autres amendements de suppression. J'ajoute que, selon toute vraisemblance, ces amendements ne devraient pas survivre à la navette parlementaire. (Très bien ! sur des travées du groupe SER.)
Mes chers collègues, rejetez l'amendement Doineau, défendez vos amendements et nous pourrons travailler ensemble ! (Murmures.)
M. Claude Raynal. Très bien !
M. Martin Lévrier. Exactement !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Bien vu ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Fargeot, sur l'article.
M. Daniel Fargeot. Remettons l'église au centre du village !
Mme Laurence Rossignol. La mairie plutôt !
M. Daniel Fargeot. Aujourd'hui, les revenus d'activité sont assujettis à la CSG au taux de 9,2 %. Je voudrais que l'on m'explique pourquoi, alors que nous cherchons des recettes supplémentaires, les revenus de remplacement – indemnités d'allocation chômage, de sécurité sociale ou d'accidents du travail et de maladies professionnelles – ne sont taxés qu'à 6,2 %.
Trois points supplémentaires sur ces revenus permettraient à la sécurité sociale de retrouver des ressources budgétaires. Je suis donc très favorable à ce que nous discutions ensemble de l'harmonisation du taux de CSG sur les revenus d'activité et sur les revenus de remplacement.
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, sur l'article.
M. Patrick Kanner. En écho aux propos très pertinents de Laurence Rossignol, qui propose de rejeter les amendements de suppression de l'article 6 bis, je tiens à souligner l'importance de cet article qui a été, vous le savez bien, un élément très important du débat sur la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale à l'Assemblée nationale. Je salue d'ailleurs à cette occasion le travail de Jérôme Guedj, qui a réussi à convaincre ses collègues députés de l'adopter.
On peut comprendre qu'il soit un peu compliqué, pour un sénateur qui a cosigné un amendement, de voter contre. Pour éviter cela, vous pourriez, mes chers collègues, retirer ces amendements de suppression. Cela nous permettrait d'examiner les autres amendements comme celui de Mme Lavarde.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, sur l'article.
M. Martin Lévrier. Je remercie Laurence Rossignol et Patrick Kanner, puisqu'ils m'ont en partie devancé... (Sourires et exclamations amusées sur des travées des groupes SER et CRCE-K.) Le moyen le plus simple de débattre des autres amendements est en effet de rejeter les amendements de suppression.
Hier, nous avons passé une grande partie de la journée à demander des efforts, souvent aux plus fragiles d'entre nous, notamment en gelant les prestations et les retraites. Cela ne me choque pas dans l'absolu, mais seulement à partir du moment où nous sommes exemplaires.
Ensuite, nous nous sommes permis – pardonnez-moi, je ne l'ai pas digéré ! – de décider que les tickets pour assister à des matchs de football ne devaient pas être considérés comme des avantages en nature. Ce petit jeu me fait honte et il devrait faire honte au Sénat !
Enfin, quand on demande des efforts aux Français, en particulier aux plus fragiles, on se doit aussi d'en demander aux revenus du capital. Je ne suis donc absolument pas choqué par cet article. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE-K.)
Mme Laurence Rossignol. La magie du PLFSS…
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, sur l'article.
Mme Raymonde Poncet Monge. De nombreuses dispositions ont été supprimées lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale et c'était bien nécessaire.
À l'exception de cet article, la bataille des recettes a néanmoins été perdue pour la gauche et, en fin de compte, si le déficit s'accroît, c'est bien parce les concessions qui ont été faites, notamment sur le gel des prestations, n'ont pas été compensées par des recettes correspondantes. Lorsque l'on augmente les dépenses, il faut prévoir en retour de nouvelles recettes ; sinon, on alimente la politique de la caisse vide.
Faisons ensemble le constat que l'adoption d'une seule petite mesure – les écologistes la réclament depuis cinq ans, c'est donc tout de même une bonne nouvelle – n'est aucunement à la hauteur pour compenser les concessions que le Gouvernement a dû faire.
En supprimant cet article, vous allez de facto accroître le déficit. Or le véritable enjeu, c'est la baisse régulée et efficiente des dépenses.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, sur l'article.
Mme Corinne Féret. J'ai beaucoup de mal à suivre nos collègues de la majorité sénatoriale !
Hier, à l'occasion de l'examen de l'article 6 que vous avez proposé de rétablir, vous nous disiez : « Écoutez, nous sommes obligés de le faire. Il faut trouver de l'argent. Ce n'est pas de notre faute. Nous aurions bien voulu nous en passer. Nous comprenons que les plus faibles ne devraient pas être mis ainsi à contribution… »
Votre choix politique n'est pas le nôtre, dont acte, mais affirmez au moins votre logique !
L'article 6 bis, dont vous demandez purement et simplement la suppression, permet d'abonder le budget de la sécurité sociale, qui est en déficit, par de nouvelles recettes. Et vous nous dites : « Non, cela ne va pas ! »
Je ne vous comprends plus et j'espère que vos explications nous permettront d'y voir plus clair.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l'article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. La majorité sénatoriale propose donc de supprimer l'article 6 bis.
Mes chers collègues, quelques rappels s'imposent. Depuis hier, nous cherchons de nouvelles recettes et, lorsque, finalement, nous vous en proposons, vous les rejetez.
Comme cela a été dit, vous préférez de toute évidence faire les poches des petites gens, ceux qui ont du mal à boucler les fins de mois, plutôt que de vous attaquer au capital ! (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Eh oui, c'est la réalité ! Gel des retraites, gel des prestations, etc. Martin Lévrier a lui-même souligné les efforts que vous demandez aux plus fragiles pendant que vous épargnez les autres.
La CSG sur le capital et les revenus du patrimoine rapporte 18 milliards d'euros chaque année, mais elle ne représente – c'est là que le bât blesse – que 10 % des recettes totales de CSG quand les revenus du capital représentent 12 % des revenus des ménages.
Sans doute nous rétorquera-t-on que le taux total des prélèvements sociaux sur le capital est déjà de 17,2 %, du fait de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) et du prélèvement de solidarité.
Très bien, faisons preuve néanmoins d'un peu de rigueur analytique. La CRDS finance le remboursement de la dette et le prélèvement de solidarité alimente diverses politiques publiques. Ce dont il est question ici, c'est du financement de la sécurité sociale. Or 84 % du produit de la CSG y est directement affecté.
Mes chers collègues, parlons chiffres : 1 % des ménages capte 96 % des dividendes distribués et 100 milliards d'euros – si l'on considère les rachats d'actions – ont ainsi été versés en 2024 par les entreprises du CAC 40.
Faites donc un petit geste et attaquez-vous à celles et ceux qui ont beaucoup d'argent !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, en préambule, je veux évoquer, puisque ce sujet a été soulevé, la procédure d'examen du texte.
Sachez que les députés se posent les mêmes questions que vous, l'ordre de classement des amendements étant devenu un sujet majeur d'interrogations à l'Assemblée nationale. Il faut bien reconnaître que la procédure actuelle ne facilite pas le compromis, puisque vous êtes amenés à voter d'abord sur des amendements de suppression globale.
Or, lorsqu'on essaye de bâtir un compromis dans une démarche de dialogue et de débat, celui-ci peut n'émerger que dans le quatrième ou le cinquième amendement en discussion, amendement qui ne sera en fait jamais débattu, puisqu'un amendement de suppression aura été voté avant.
Peut-être avez-vous pris connaissance de l'entretien que la présidente de l'Assemblée nationale a accordé hier au journal Le Monde. Elle évoque notamment le fait que, sur de nombreux sujets, par exemple le logement ou les collectivités locales, la distinction entre les recettes et les dépenses est au fond assez artificielle – cela fait écho à ce que certains disent également ici. D'ailleurs, lorsqu'on veut mettre en œuvre une politique publique, on mobilise souvent des subventions, de la fiscalité, voire les deux à la fois.
C'est pourquoi la présidente de l'Assemblée nationale propose, à la lumière de l'expérience novatrice que nous vivons, de réfléchir dans les prochains mois à faire évoluer le mode d'examen des textes financiers.
C'est un peu ce que nous avons fait, hier, au sujet de la présentation des documents prévus par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (Lolf). Le moment que nous vivons ce matin est à cet égard représentatif d'un tel besoin d'évolution.
J'en viens au fond. Même si l'exposé des motifs de l'amendement qui a abouti à cet article évoque le sujet des retraites, les montants concernés n'ont rien à voir avec les conséquences de la suspension de la réforme.
Si l'on appliquait le taux de CSG proposé, un taux qui pourrait évidemment évoluer au cours de la navette, le rendement serait de 2,8 milliards d'euros. Or, comme vous le savez, la suspension de la réforme des retraites coûtera au maximum 300 millions d'euros l'an prochain, si l'ensemble des personnes concernées choisissaient de partir à la retraite plus tôt.
J'insiste sur ce point : les ordres de grandeur sont tout à fait différents et cette mesure n'a pas comme objectif de financer la suspension de la réforme des retraites.
Alors, pourquoi cet article a-t-il été inséré dans le PLFSS ? Il se trouve que les propositions du Gouvernement qui prévoyaient des recettes supplémentaires pour la sécurité sociale de l'ordre de 5 milliards d'euros n'ont pas recueilli de majorité. Je pense notamment à nos propositions sur les compléments de salaire ou à celles sur l'évolution des dispositifs de la loi de 2009 pour le développement économique des outre-mer (Lodéom).
Par esprit de responsabilité à l'égard des comptes de la sécurité sociale, les députés ont alors proposé comme alternative une augmentation du taux de la CSG sur les revenus du capital.
Pourquoi le Gouvernement s'en est-il remis à la sagesse de l'Assemblée nationale sur cet amendement – j'ai même parlé d'un « avis favorable de méthode » ?
Parce que, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2026 qui sera discuté au Sénat dans quelques jours et qui a donné lieu à de nombreux échanges sur la fiscalité des entreprises, le Gouvernement a voulu fixer un principe fort : ne pas toucher au stock de capital, à l'outil productif.
En revanche, nous nous sommes montrés disposés à débattre des flux. À ce titre, la CSG sur les revenus du capital nous semblait constituer, bien que n'ayant pas notre préférence, un outil plus pertinent économiquement que la taxation des biens professionnels ou de l'outil productif.
Je souhaitais retracer l'historique de cet article pour éviter qu'on lui donne un sens qui n'était pas le sien lors de son adoption à l'Assemblée nationale.
Vous l'aurez compris, le Gouvernement voit tout de même dans l'augmentation de la CSG sur les revenus du capital un outil à ne pas négliger dès lors que le Parlement ne retient pas les mesures de recettes qu'il propose.
En effet, il nous faut bien trouver des solutions pour financer le budget de la sécurité sociale, dont le déficit doit être maintenu, à transferts constants, j'y insiste, sous les 20 milliards d'euros. Tel est le point d'entrée du Gouvernement sur ce sujet.
M. le président. Madame la ministre, je me permets de vous rappeler que seul le Sénat est compétent, sous le contrôle du Conseil constitutionnel, pour adopter son règlement, c'est-à-dire son mode d'organisation. (Mme la ministre marque son approbation.)
En l'occurrence, monsieur Delahaye, c'est l'article 46 bis de notre règlement qui fixe l'ordre de mise aux voix des amendements, les amendements de suppression venant en premier.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 523 rectifié bis est présenté par MM. Capus, Malhuret et Chasseing, Mmes Bourcier, Lermytte et Bessin-Guérin, MM. Brault et Chevalier, Mme L. Darcos, MM. Grand, Laménie, V. Louault et Médevielle, Mme Paoli-Gagin, MM. Pellevat, Rochette, Verzelen, L. Vogel, Wattebled, Dhersin et Maurey, Mmes Guidez, Canayer et Romagny et M. Levi.
L'amendement n° 595 est présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 1093 rectifié bis est présenté par MM. Canévet, Folliot et Fargeot, Mme Sollogoub, MM. S. Demilly, Mizzon, Menonville, Kern et J.M. Arnaud, Mme Patru et MM. Duffourg, Chauvet, Bleunven, Longeot et Delahaye.
L'amendement n° 1506 rectifié ter est présenté par M. Le Rudulier, Mme Dumont, MM. Khalifé, Sido, Naturel et Séné, Mme Lopez et MM. H. Leroy, Ravier et Panunzi.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte, pour présenter l'amendement n° 523 rectifié bis.
Mme Marie-Claude Lermytte. Cet amendement proposé par notre collègue Emmanuel Capus vise à supprimer la hausse de CSG sur les revenus du capital de 1,4 point votée par l'Assemblée nationale.
Pour aborder sereinement les défis de la transition écologique, de la réindustrialisation et de la robotisation, notre pays a besoin de plus de capital-investissement, certainement pas de moins.
La hausse de la CSG sur les revenus du capital votée à l'Assemblée nationale est une mesure idéologique (Protestations sur les travées du groupe SER.), qui désincitera les foyers français à investir dans notre économie.
Afin de ne pas créer d'obstacle aux investissements dont notre pays a besoin, le présent amendement vise à supprimer cette hausse de CSG, qui est anti-économique.
M. Vincent Louault. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l'amendement n° 595.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Permettez-moi tout d'abord de préciser que le présent amendement n'est pas l'amendement « Doineau », c'est celui de la commission. Il exprime le choix de la majorité sénatoriale.
Pour notre part, nous ne sommes pas perdus. Depuis le mois de mai, la majorité sénatoriale cherche, sur l'initiative du président Gérard Larcher, des solutions.
M. Patrick Kanner. Sur le dos de qui ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous sommes ainsi parvenus à élaborer une épure avec un déficit de 18 milliards d'euros.
Cette épure ne retient pas la mesure qui est prévue dans l'article 6 bis. C'est pourquoi la commission a décidé de proposer de supprimer cet article, lorsqu'elle a examiné le texte qui nous a été transmis de l'Assemblée nationale et qui, je le rappelle, prévoit, lui, un déficit de 24 milliards d'euros – on imagine donc bien que cet article pouvait être utile…
Cet amendement vise ainsi à supprimer cette disposition, tout simplement parce qu'elle ne fait pas partie des mesures que la majorité sénatoriale défend depuis le mois de juillet, lorsque François Bayrou était Premier ministre. (Protestations sur les travées du groupe SER)
M. Patrick Kanner. Le Premier ministre a changé !
M. le président. La parole est à M. Daniel Fargeot, pour présenter l'amendement n° 1093 rectifié bis.
M. Daniel Fargeot. Cet amendement, identique à celui de la commission, est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Khalifé Khalifé, pour présenter l'amendement n° 1506 rectifié ter.
M. Khalifé Khalifé. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Monsieur le président, je tiens d'abord à préciser que je ne souhaite absolument pas m'immiscer dans le fonctionnement des assemblées.
J'observe simplement, comme l'ont fait les députés et certains sénateurs, que les règlements des assemblées, sur lesquels le Gouvernement n'a, par définition, pas à se prononcer, peuvent conduire à ce que des amendements dits de compromis, susceptibles de recueillir les votes d'une majorité, ne peuvent pas être examinés à cause de leur place dans l'ordre de discussion.
La logique de ce classement – partir du plus large pour aller vers le plus précis – est tout à fait compréhensible. Toutefois, cela soulève des interrogations.
En tout cas, j'y insiste, mon propos était uniquement de me faire la porte-parole des parlementaires, puisque, par définition, le Gouvernement est au service du Parlement (Sourires.) et n'a pas vocation à s'immiscer pas dans l'élaboration des règlements des assemblées.
En ce qui concerne ces amendements de suppression, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
À l'Assemblée nationale, j'ai émis, je l'ai dit, un « avis favorable de méthode » sur l'amendement dont l'adoption a abouti à cet article.
D'un côté, les députés étaient en train de modifier les équilibres du projet de loi de financement de la sécurité sociale. De l'autre, le Gouvernement souhaitait absolument que le déficit reste in fine en dessous de 20 milliards d'euros. Il fallait donc bien adopter des mesures alternatives à ce que nous proposions ; sans cela, l'Assemblée nationale aurait continué de creuser toujours davantage, à mesure qu'elle examinait le texte, le déficit et cela ne me semblait pas responsable.
De son côté, le Sénat entend formuler d'autres propositions ; je le constate, madame la rapporteure générale, au vu des travaux de la commission.
Dans ces conditions, mon avis repose sur une question : comment voulons-nous construire un compromis ?
En ce qui concerne la méthode, il ne me semble pas inintéressant de conserver l'outil de la CSG sur les revenus du capital. Est-ce que ce sera au taux de 10,6 % comme prévu par l'Assemblée nationale ? Aurons-nous besoin, à la fin, de 2,8 milliards d'euros pour équilibrer les comptes ? J'espère que ce ne sera pas le cas et que nous aurons, collectivement, d'autres idées, y compris en matière d'économies, pour faire en sorte que notre sécurité sociale ne s'enfonce pas dans un gouffre financier encore plus profond.
En tout cas, d'un point de vue méthodologique, il ne serait pas inintéressant que cet outil demeure dans le texte, mais je m'en remets sur ce point, mesdames, messieurs les sénateurs, à votre sagesse.
Par ailleurs, je tiens à souligner que certains amendements qui viennent ensuite sont intéressants. Certes, leur rédaction n'est pas toujours aboutie, mais les propositions de M. Delahaye et de Mme Lavarde mériteraient, à mes yeux, d'être débattues.
Naturellement, il appartient au Sénat de décider de la manière de faire.
M. le président. La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour explication de vote.
M. Alexandre Ouizille. Madame Doineau nous a dit que cette hausse de la CSG n'était pas prévue dans le projet de budget « Les Républicains » (LR). Nous ne vivons donc pas un moment ordinaire ! Si le Sénat se contente d'appuyer simultanément sur les touches Ctrl, Alt et Suppr pour plaquer le budget LR, il ne servira à rien : il y aura une commission mixte paritaire, dans laquelle aucun accord ne sera trouvé, et le texte retournera à l'Assemblée nationale pour être examiné en nouvelle lecture. (M. Vincent Delahaye s'exclame.)
Ce qui se joue dans cette discussion, c'est donc de savoir si nous allons essayer, dans le moment que nous vivons, de consolider les compromis qui ont été trouvés à l'Assemblée nationale – en l'occurrence, il s'agit d'une mesure introduite dans le texte par l'adoption d'un amendement de notre collègue Jérôme Guedj – pour faire en sorte que l'on puisse adopter un budget pour la sécurité sociale.
Hier, je le rappelle, lorsque nous avons débattu du gel du barème de la CSG – rassurez-vous, je ne veux pas refaire le film Retour vers le futur –, vous avez soumis à l'impôt 300 000 nouvelles personnes – des invalides, des retraités touchant de petites pensions, des chômeurs, etc. Cela a été souligné par M. Lévrier.
Or voilà que, ce matin, vous nous dites qu'il serait impossible de mettre à contribution les revenus du patrimoine, dont on connaît pourtant la dynamique depuis des années. C'est irresponsable.
Je vous appelle donc, mes chers collègues, à faire preuve de décence : on ne peut pas demander tout à ceux qui ont peu et rien à ceux qui ont tout ! (Marques d'approbation sur les travées du groupe SER.)
Madame Doineau, il est nécessaire que vous retiriez votre amendement, afin que nous puissions construire le compromis républicain dont notre pays a besoin.
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Madame la ministre, par cohérence, vous auriez plutôt dû demander le retrait de ces amendements de suppression afin de permettre un compromis.
Ce débat est particulièrement éclairant. Lors des discussions que nous avons eues hier, il est apparu – assumez-le, mes chers collègues ! – que vous souhaitiez faire porter l'effort de redressement des comptes publics sur les plus fragiles, ainsi que sur les travailleurs.
Alors que vous êtes censés défendre les travailleurs, vous défendez de fait et de manière entêtée les profits et le capital. Pourtant, les revenus du capital ont explosé ces dix dernières années. Ce sont eux qui ont le plus augmenté ! Vous ne souhaitez pas y toucher, vous êtes cohérents.
Par cohérence toujours, vous soutenez la politique économique qui est menée depuis huit ans : la politique de l'offre. D'ailleurs, cette politique a été conduite par l'un des vôtres au ministère de l'économie et vous ne souhaitez pas la remettre en cause. Voilà qui me semble très éclairant !
Finalement, vous ne souhaitez pas remettre en cause l'augmentation de la dette – l'explosion, devrais-je dire ! –, qui s'explique par des décisions de baisses massives d'impôts au bénéfice des plus riches. Vous devez endosser la responsabilité de cette politique à laquelle vous avez participé. Aujourd'hui, vous proposez toujours les mêmes solutions, qui ont pourtant conduit le pays dans les difficultés budgétaires que nous connaissons.
Pour notre part, nous souhaitons rétablir les comptes publics, mais dans un esprit de justice. Ceux qui ont le plus bénéficié de ces évolutions au cours des dernières années doivent contribuer le plus.
Il faut être honnête : il est question d'augmenter de 1,4 point le taux de la CSG, alors que, ces dernières années, les taux de rendement ont dépassé les 10 % pour le capital. La hausse ne serait que de 1,4 point et, pourtant, vous la refusez !
C'est une forme de déni, c'est même un contresens économique et cela alimente l'injustice fiscale. Tant que vous défendrez un budget injuste, le pays ne pourra pas vous approuver !
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. L'intervention de notre collègue Martin Lévrier est, à mon sens, symptomatique et significative. Voilà un membre de la majorité présidentielle qui reconnaît, d'une certaine façon, qu'il y a eu des injustices et qu'il est peut-être temps de les corriger.
Dans les arguments qui ont été avancés ce matin, certains ont parlé d'idéologie. Mais, mes chers collègues, en matière d'idéologie, nous n'avons de leçons à recevoir de personne !
Madame la rapporteure générale, je vous ai écoutée attentivement, mais je n'ai rien entendu qui justifierait de taxer les revenus modestes, comme la majorité sénatoriale l'a décidé hier, et de ne pas taxer un tout petit peu le capital. Vous nous dites simplement que cela ne correspond pas à vos idées politiques – je ne parle pas d'idéologie –, mais quels sont vos arguments de fond ?
Et d'ailleurs, êtes-vous vraiment à l'écoute du pays ? De la gauche aux extrêmes, chacun se rejoint sur l'idée que tout le monde doit participer à l'effort, surtout les plus aisés et ceux qui perçoivent des revenus du capital. Il existe une poche de résistance : la majorité sénatoriale.
Certes, au Sénat, mes chers collègues, vous êtes largement majoritaires, mais vous ne l'êtes pas dans le pays ! Le projet que vous défendez aujourd'hui est l'antithèse de ce que veulent 75 % des Français. J'aimerais donc avoir un peu plus d'explications.
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. J'ai lu, dans un grand journal du matin, Le Figaro pour ne pas le citer, des mots qui peuvent surprendre dans la bouche de membres de la majorité sénatoriale, y compris dans celle du Président du Sénat. Il est question d'« hystérie fiscale », de « karchérisation » du travail de l'Assemblée nationale…
Manifestement, nous allons assister au deuxième acte de cette karchérisation, à moins que nous ne puissions vous convaincre. En tout cas, c'est vous qui faites preuve d'une hystérie et elle est tournée contre la justice fiscale. C'est clair ! Et la suite de la discussion sur cette partie du PLFSS le démontrera encore.
Je ne sais pas si je parviendrai à vous convaincre, mais je voudrais vous donner des éléments qui figurent dans un rapport de l'Insee qui est paru le 18 novembre dernier. Celui-ci révèle que, en 2022, les 0,1 % de Français les plus aisés gagnent en moyenne 167 fois plus que le quart des foyers les plus modestes. Oui, mes chers collègues, vous avez bien entendu ! Cette strate regroupe 40 700 foyers, des personnes très aisées qui ont gagné au moins 463 000 euros et en moyenne 1 million d'euros.
Mais il est encore plus intéressant de comprendre d'où vient leur argent : il provient pour moitié des dividendes et des recettes tirées des actifs financiers – c'est-à-dire les revenus visés par l'article 6 bis adopté à l'Assemblée nationale – et pour 38 % seulement des traitements, des salaires et des retraites.
Doit-on en déduire, mes chers collègues, que vous préférez la rente au travail ? (MM. Daniel Fargeot et Vincent Delahaye protestent.) Vos amendements de suppression traduisent une préférence claire pour la rente par rapport au travail.
Nous, au contraire, nous préférerons toujours défendre les plus modestes face à l'incurie budgétaire qui est celle des gouvernements successifs depuis huit ans.
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.
Mme Christine Lavarde. À titre personnel, je serai obligée, une fois n'est pas coutume, de voter contre l'amendement de la commission, car je souhaiterais que nous discutions ensuite de la réécriture de l'article. (M. Martin Lévrier apprécie.)
Toutefois, je souhaiterais avoir des précisions qui peuvent être utiles pour la suite de nos débats. Imaginons que nous ne votions pas les amendements de suppression, que la discussion se poursuive, mais que nous n'adoptions pas non plus les amendements de réécriture et que nous rejetions finalement l'article : que se passerait-il ?
N'étant pas une experte en légistique, j'aimerais savoir s'il existe une différence entre voter un amendement de suppression et voter contre l'article à la fin de son examen ?
M. Daniel Fargeot. Bonne question !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Il existe une différence, qui apparaîtrait seulement dans le cas où, pour des raisons de délais d'examen, le Gouvernement devait utiliser l'article 47-1 de la Constitution et transmettre à l'Assemblée nationale le texte sans qu'il ait pu être adopté par le Sénat.
Dans cette situation, puisque nous nous sommes engagés à transmettre le texte avec les amendements adoptés, un article supprimé par amendement ne figurerait pas dans la navette, tandis qu'un article rejeté par un vote à l'issue de son examen y figurerait.
Ainsi, le texte qui vous a été transmis contient des articles qui n'ont pas été adoptés ; c'est parce qu'ils n'ont pas été supprimés par voie d'amendement.
Toutefois, comme il n'est pas prévu, me semble-t-il, que le Sénat ne travaille pas dans les temps, il ne devrait pas y avoir de différence.
C'est une petite subtilité qui est apparue dans le contexte que nous connaissons et qui découle de la procédure parlementaire. À l'Assemblée nationale, certains députés se sont posé la même question. C'est pourquoi j'ai souhaité, en toute transparence, vous apporter cette réponse.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, la CSG n'a jamais été le meilleur vecteur de financement de la sécurité sociale. Malgré tout, nous voterons bien évidemment contre ces amendements de suppression.
Je voulais, moi aussi, évoquer l'étude de l'Insee parue cette semaine, qui fait suite à de très nombreuses autres études qui montrent que les Français les plus riches se portent de mieux en mieux dans notre pays. Le chiffre a été évoqué : les 0,1 % des Français les plus aisés gagnent en moyenne 167 fois plus que le quart des foyers les plus modestes !
Il me semble que cela constitue un problème pour notre pacte républicain. Quand un pays a pour devise « Liberté, Égalité, Fraternité » et est bâti sur ces valeurs, un tel niveau d'inégalité pose un problème profond. Je m'adresse particulièrement à tous ceux qui sont prompts à convoquer la République dans leurs discours, mais qui, peut-être, n'en mesurent pas tous les fondements.
Que révèle également cette étude de l'Insee ? On entend parfois dire, dans cet hémicycle, qu'il existerait une immense pression fiscale qui empêcherait l'investissement, que l'on a besoin des plus fortunés parce que leur richesse est destinée à ruisseler sur la société, etc. Vous connaissez tous ce discours, mes chers collègues, même s'il est quelque peu éculé.
Les conclusions de l'Insee sont très éloignées de ce discours : l'étude montre en effet que les réformes mises en œuvre depuis qu'Emmanuel Macron est Président de la République ont fait baisser le taux d'imposition des plus riches.
Par conséquent, lorsque vous proposez d'aggraver les choses pour les Français les plus modestes, cela me semble insupportable, car, dans le même temps, pour les plus riches, on adoucit tout !
Enfin, la rapporteure générale nous a expliqué que la majorité sénatoriale souhaitait supprimer cet article simplement parce qu'il ne correspond pas aux propositions présentées par la majorité au Premier ministre. Avec tout le respect que je vous porte, vous auriez aussi bien pu nous dire : on n'est pas d'accord parce qu'on n'est pas d'accord ! Cela aurait été du même acabit. Ce débat est nécessaire et il faut que chacun argumente avec sérieux.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Je suis étonné à double titre.
Tout d'abord, étant plutôt un libéral social, mais avant tout un libéral, je suis étonné quand la majorité sénatoriale, après avoir expliqué, dans cet hémicycle, que son objectif était d'atteindre un déficit de 18 milliards, refuse un amendement qui permet de le réduire à 15 milliards. Il faudrait en rester à 18 milliards… Voilà qui m'épate !
Si j'étais un élu de droite, je viserais évidemment le déficit le plus bas possible ! Or, voilà qu'on vous propose, mes chers collègues, de réduire le déficit, et vous refusez. « Surtout pas ! », vous entend-on dire. Vous prétendez être de bons gestionnaires, mais il ne faudrait surtout pas adopter une telle mesure… Je ne comprends pas ! (M. Alexandre Ouizille applaudit.)
Ensuite, dans la discussion générale, tous les orateurs ont évoqué la solidarité. Or c'est un mot que je n'ai pas entendu aujourd'hui, et cela me pose un problème, car la sécurité sociale constitue le fondement même de la solidarité dans notre pays.
Je ne veux ni taper sur les riches ni agonir les pauvres. Je veux simplement que tout le monde soit solidaire. Le patron de TotalEnergies, qui gagne très bien sa vie, a dit, il y a quelques jours, qu'il était prêt à faire davantage d'efforts. J'ai entendu nombre de gens qui gagnent beaucoup d'argent dire qu'ils étaient prêts à faire des efforts. Saisissons cette main tendue, car il est très important d'équilibrer les efforts que nous demandons. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. Patrick Kanner. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Je souscris aux propos de la ministre : l'ordonnancement du débat ne permet pas, dans la mesure où les amendements de suppression sont examinés en premier, de parvenir à un compromis ou à un équilibre, que nous essayons les uns et les autres d'atteindre, comme ce fut le cas à l'Assemblée nationale. Cela permettrait pourtant d'avancer un petit peu.
Nos collègues de l'Assemblée nationale ont proposé, dans cet article 6 bis, d'augmenter de 1,4 point la CSG. Il ne s'agit nullement, comme l'a dit Mme la ministre, de toucher à l'outil de travail. Cette mesure ne devrait donc pas provoquer les frayeurs qu'a suscitées la taxe Zucman.
On comprend bien que la ligne de la majorité de la commission consiste à appliquer les propositions du budget LR, sans que nous puissions en discuter. Je sais que les Républicains sont, dans cette assemblée, extrêmement majoritaires, mais le rôle du Sénat n'est pas d'approuver purement et simplement le budget qu'ils proposent, ni de suivre leur dogme.
Ils ne cessent d'évoquer la responsabilité, le partage des efforts. Or c'est ce que nous vous proposons ! Il ne faut pas toujours frapper sur les plus vulnérables et les plus faibles. Les efforts doivent être partagés avec ceux qui sont un peu plus aisés. (Mme Cathy Apourceau-Poly renchérit.)
Comme Monique Lubin l'a rappelé, vous allez à l'encontre de ce que souhaite une très large majorité de Français, qui réclame justice fiscale et sociale. L'adoption de ces amendements de suppression couperait la voie à cette aspiration.
M. Lévrier a eu raison de parler de solidarité. C'est bien l'enjeu de notre débat ce matin.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Nous avons beaucoup entendu parler de responsabilité ; j'ai donc un petit peu de mal à comprendre la position du groupe Les Républicains.
Nous comprenons bien ce que vous souhaitez faire. Vous avez employé des mots parfois assez durs : « karcher », « nettoyage » et d'autres termes que je ne citerai pas. Vous souhaitez faire adopter le budget LR, alors que votre groupe ne dispose que d'une quarantaine de députés à l'Assemblée nationale. Il me semble que, dans la séquence politique dans laquelle nous nous trouvons, ce n'est pas responsable.
Oui, nous avons besoin de faire des compromis, mais nous avons surtout besoin de justice fiscale. Chacun le perçoit, mais peut-être, mes chers collègues, ne vivons-nous pas dans le même pays… Je ne sais pas si vous les entendez, mais les Françaises et les Français ne demandent qu'une chose : de la solidarité, de la justice fiscale et un partage des efforts.
Or vous leur proposez totalement l'inverse ! Les idéologues, en fait, c'est vous ! Vous restez campés sur vos positions. Vous ne souhaitez pas faire de pas vers des propositions visant à renforcer la solidarité. Vous avez toujours le même refrain : taxer les pauvres pour aider les pauvres riches ! (Mme Anne-Marie Nédélec proteste.) Voilà qui est un peu court et il va certainement falloir évoluer.
Que demandons-nous ? Une hausse de 1,4 point du taux de la fiscalité sur les revenus du capital.
Écoutez notre collègue Martin Lévrier qui, lui, a été capable de changer, de prendre la mesure de la transformation de notre pays et de comprendre pourquoi il était nécessaire d'évoluer. (M. Martin Lévrier se récrie.). C'est, pour reprendre des mots que vous utilisez très souvent, de la sagesse, du bon sens.
Par conséquent, je vous invite à revenir sur votre position. Soyez responsables !
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Il y a quelque chose d'un peu agaçant dans nos travaux. Ils ont été organisés de manière très simple. Un vote, ou plutôt un non-vote, a eu lieu à l'Assemblée nationale et un texte nous a été transmis avec un certain nombre de mesures de recettes.
Au Sénat, l'idée est d'aller très vite pour faire adopter le budget du groupe Les Républicains. Certains seraient même heureux de réunir une commission mixte paritaire dans l'heure qui suit la fin de nos travaux, voire même avant… (Sourires.) Voilà, il est vrai, qui serait encore mieux ! Ce serait plus expéditif et l'on n'en parlerait plus.
Tout cela aboutit quand même à mettre en cause l'utilité de nos débats. Je crois qu'il faut sortir des postures. Il est extraordinaire d'entendre certains qualifier l'article 6 bis de mesure idéologique, car s'il existe des positions qui sont purement idéologiques, ce sont bien celles que la majorité sénatoriale défend aujourd'hui. C'est affiché et extrêmement clair !
Lorsque, en guise de réponse, on entend : « on a élaboré un budget avec un déficit de 18 milliards d'euros, et pas moins », les bras nous en tombent ! Il est quand même invraisemblable de refuser de descendre le déficit à 15 milliards au motif qu'on a prévu 18 ! Chacun sait bien que, dans les années qui viennent, il faudra continuer à faire des efforts, si l'on veut atteindre l'équilibre budgétaire.
J'ose espérer, madame la rapporteure générale, que vous avez été prise de court par la question, mais, de grâce, reprenez-vous et acceptez cette proposition.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Claude Raynal. Enfin, en ce qui concerne l'assurance vie, on peut se dire, quand on connaît le fonctionnement de ce secteur, que cette hausse n'aura, sans doute, même pas d'impact pour les détenteurs de contrats, vu les rendements qui sont servis.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Je conçois que l'on puisse avoir des désaccords sur la façon d'envisager l'effort, la contribution, la justice fiscale ou la justice sociale, mais je ne comprends pas l'argumentation économique développée par la droite.
D'abord, j'entends très souvent dire, par des personnes de droite, qu'un bon impôt doit avoir une assiette large et un taux faible. C'est le cas, en l'occurrence !
Ensuite, les auteurs de ces amendements craignent que les entreprises soient fragilisées. Mais, de quoi parlons-nous ? On parle principalement de la fiscalisation des revenus de l'épargne.
Je rappelle que l'encours moyen des livrets A est de 7 000 euros. Le niveau moyen d'épargne des contribuables du neuvième décile s'élève à 750 000 euros, il est à 2 millions pour les Français du dernier décile. Or cette épargne-là n'est pas placée sur un livret A ou sur un livret de développement durable et solidaire, sur lesquels les Français mettent leur argent.
Cette épargne est notamment investie, comme le disait le président de la commission des finances, dans des contrats d'assurance vie. Un tiers de l'épargne des Européens sert à acheter de la dette américaine. Taxer davantage ce qui finance la dette américaine, n'est-ce pas une bonne politique économique ? Pour ma part, j'estime que si.
En revanche, lors de l'examen du projet de loi de finances, nous déposerons des amendements afin notamment de renforcer l'épargne productive, celle qui vise à soutenir l'activité des entreprises.
Lorsque l'on refuse de taxer davantage l'épargne qui dort ou qui sert à financer les économies de pays étrangers, je suis sincèrement scotché – permettez-moi d'employer ce terme ! Une hausse de 1,4 point du taux de la CSG ne me paraît pas être de nature à empêcher les mouvements sur les marchés financiers.
Soyons, mes chers collègues, raisonnables et crédibles !
M. le président. Il reste plusieurs orateurs inscrits. Je vous invite, mes chers collègues, à respecter le temps de parole qui vous est imparti.
Mme Laurence Rossignol. C'est un débat sérieux, prenons le temps nécessaire ! Ne nous mettez pas la pression ! (Mme Catherine Di Folco s'en agace.)
M. Stéphane Piednoir. Il faut respecter le règlement !
M. le président. Tous ceux qui le souhaitent pourront évidemment s'exprimer, mais chacun doit respecter le règlement du Sénat.
La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
« Il est terrible
« Le petit bruit de l'œuf dur cassé sur un comptoir d'étain
« Il est terrible ce bruit
« Quand il remue dans la mémoire de l'homme qui a faim. »
Merci, monsieur Lévrier, d'avoir parlé de solidarité. Il était temps ! J'aimerais bien que le Gouvernement en parle aussi et peut-être assisterons-nous alors à une petite révolution.
Au terme d'un long débat, l'Assemblée nationale, éclairée par un avis « de responsabilité » du Gouvernement, a introduit la mesure que vous proposez de supprimer. Il s'agit – cela a déjà été évoqué à de nombreuses reprises, mais il convient de le rappeler – de porter le taux de la CSG sur les revenus du capital de 9,2 % à 10,6 %.
À entendre certains, nous défendrions la collectivisation de l'ensemble des moyens de production. Mais réveillez-vous ! Nous ne demandons qu'un effort supplémentaire de 1,4 point. Je vous rappelle par ailleurs qu'une telle augmentation a été soutenue, voilà près de vingt ans, par le gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin, sous la présidence de Jacques Chirac.
Mes chers collègues de la droite de cet hémicycle, seriez-vous toutes et tous ralliés à la politique de l'offre ? Où sont les tenants de la droite sociale ?
Supprimer cet article, c'est creuser le déficit de la sécurité sociale de près de 3 milliards d'euros. Est-ce votre objectif ? Évidemment, le groupe écologiste votera contre ces amendements de suppression.
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. Si nous votons ces amendements de suppression, nous rayons d'un trait de plume 2,6 milliards d'euros, ce qui a de quoi inquiéter pour la suite de nos débats.
Mme la ministre a dit tout à l'heure que la majoration avait été intégrée à l'Assemblée nationale pour compenser la suspension de la réforme des retraites, …
Mme Laurence Rossignol. Pas seulement !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je n'ai pas dit cela !
Mme Marion Canalès. … une suspension dont le coût prévisionnel doit être pris en compte autrement si cet article est supprimé.
Nous avons besoin de cet argent pour rétablir l'équilibre de nos comptes sociaux. Ce rééquilibrage doit se faire par différentes voies. Comme M. Jomier l'a dit lors de la discussion générale, l'accent doit être mis sur la prévention, ce qui n'est pas au cœur de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, et nous l'avons regretté à différentes reprises.
Ce rééquilibrage passe également par la perception de recettes nouvelles. Or, lorsque nous proposons certaines recettes, notamment via la fiscalité comportementale, vous dénoncez une prétendue hystérie fiscale.
Enfin, il passe par la réduction des dépenses. C'est ce point, évidemment, qui est privilégié ici, dans cet hémicycle.
Aujourd'hui, je le répète, rayer d'un trait de plume ces 2,6 milliards d'euros me paraît insupportable pour la suite de nos débats.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Il y a deux sujets dans notre discussion : un sujet de responsabilité ou plutôt d'irresponsabilité politique, que tout le monde a bien en tête – ceux qui choisissent l'irresponsabilité savent parfaitement ce qu'ils font – ; et un sujet de politique sociale et fiscale.
Essayons de nous émanciper des questions idéologiques et prenons les chiffres. L'Insee a publié hier son analyse. Le constat est simple : le versement des dividendes et la baisse du taux d'imposition ont dopé les hauts revenus.
Si cette augmentation des hauts revenus avait entraîné une augmentation des revenus de tous, à la limite, nous ne nous en émouvrions pas. Nous nous en féliciterions même. Le problème est qu'elle s'est en même temps accompagnée d'une baisse des revenus des plus défavorisés et des plus pauvres. C'est bien l'objet de notre discussion d'aujourd'hui.
Nous vous proposons, par la fiscalité du capital, de corriger ce que l'Insee constate, à savoir que c'est l'augmentation des dividendes et la baisse du taux d'imposition des plus riches qui entraînent cet accroissement des inégalités au détriment des plus pauvres.
Madame la rapporteure générale, soyez sincère, au moins dans l'objet de votre amendement. Qu'écrivez-vous ? « La commission considère que la réduction du déficit doit porter sur la maîtrise des dépenses. » Cette formule – la maîtrise des dépenses –, c'est comme les « techniciens de surface » pour désigner les gens qui font le ménage. Ce n'est pas de la maîtrise des dépenses. Soyez courageuse, écrivez plutôt : « La baisse des prestations versées aux assurés sociaux et aux allocataires ne doit pas s'interrompre, parce que nous préférons privilégier le maintien des revenus des catégories les plus aisées de ce pays, au détriment des autres. » (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
C'est ainsi qu'il faut rédiger votre objet : cette précision sera utile, dans le futur, lorsque les historiens chercheront à comprendre comment nous avons pu prendre de telles décisions politiquement et socialement indéfendables. (Mme Émilienne Poumirol applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je suis d'accord avec Mme la ministre, cela n'a rien à voir avec le décalage de la réforme des retraites ; nous en reparlerons.
Pour notre part, nous faisons la même proposition depuis cinq ans. Il s'agit tout simplement de justice fiscale.
Je tiens à dire, pour rassurer la droite, que le rendement du capital a augmenté largement plus vite que la richesse nationale mesurée par le PIB. C'est un problème.
On nous a dit que, si les dépenses de santé augmentaient plus vite que le PIB, elles allaient absorber tout le gain de croissance.
Là, c'est la même chose : le rendement du capital augmente beaucoup plus vite depuis l'arrivée de M. Macron, ce qui tend à transformer les plus riches en rentiers et à obérer l'avenir. Jamais dans ce pays les inégalités de patrimoine n'ont tant explosé. La France est dorénavant un pays de rentiers, ce n'est un pays productif. Non, cette mesure ne touchera pas ceux qui investissent, elle touchera ceux qui touchent des dividendes.
Madame la rapporteure générale, le Gouvernement vous a écoutée. Sur 11 milliards d'euros d'efforts, 9 milliards portent sur les dépenses et 2 milliards sur les recettes.
Toutefois, par le passé, vous le savez, la sécurité sociale n'a jamais été équilibrée de cette manière. Jusqu'en 2014, date de l'arrivée de M. Macron à la tête du ministère de l'économie, il y a toujours eu des efforts équilibrés entre les recettes et les dépenses. Or M. Macron, non seulement n'a pas augmenté les recettes, mais il les a même baissées par des cadeaux fiscaux.
Enfin, de quelle maîtrise des dépenses parlons-nous ? Certaines mesures de ce type ont le même effet qu'une augmentation de recettes. Pour une bonne maîtrise, il faut encourager des baisses durables et non transférer des dépenses vers les ménages.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Madame Rossignol, il n'y a pas la responsabilité d'un côté et l'irresponsabilité de l'autre. Vos leçons de responsabilité, gardez-les pour vous ! Nous vous en serons reconnaissants. (Applaudissements sur des travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
Seconde mise au point : il s'agit non pas d'une proposition « LR », mais d'une proposition de la majorité sénatoriale, qui a été exprimée par Gérard Larcher lors d'une rencontre avec François Bayrou cet été.
Quel a été notre raisonnement ? Le mal dont souffre le pays est avant tout un excès de dépenses et un excès d'endettement. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Et d'un déficit de recettes !
M. Olivier Henno. Il est légitime de poser la question de la justice fiscale. Vous avez d'ailleurs parfaitement réussi à le faire, puisque vous avez inversé les termes du débat et mis cette question au cœur de nos discussions.
Cependant, j'y insiste, les maux de notre pays résident dans le niveau de dépenses et de dette. Par conséquent, la priorité est de faire des économies et de réguler la dépense publique. Voilà l'architecture de notre réflexion. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. Patrick Kanner. Sur le dos de qui ?
M. Olivier Henno. À chaque instant, nous devons avoir cette obsession.
Pourquoi la France en est-elle là ? Parce qu'à chaque fois que nous avons eu des débats sur les finances publiques, la variable d'ajustement a été l'augmentation des impôts.
M. Vincent Louault. Bravo !
Mme Céline Brulin. La CSG n'est pas un impôt !
M. Olivier Henno. C'est la raison pour laquelle nous en sommes là. Aussi, nous voulons rompre avec cette pratique.
Nous devons d'abord réguler la dépense publique et faire des économies. Ensuite seulement, nous devons nous interroger sur la justice fiscale, un sujet qui est, je le répète, légitime. En revanche, si nous inversons l'ordre de nos préoccupations, nous retomberons dans les travers du passé, ceux qui ont mené le pays dans cette situation. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
M. Patrick Kanner. C'est vraiment bien à droite !
M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.
M. Simon Uzenat. D'où vient ce débat sur le rétablissement des comptes ? Qui est responsable de la dégradation des comptes du pays depuis maintenant huit ans ? Qui, madame la ministre ?
Mesdames, messieurs les sénateurs de la droite sénatoriale, c'est bien vous qui avez soutenu et validé les choix budgétaires de ces dernières années. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Quand on est responsable d'une dérive, d'un échec, on le reconnaît et, ensuite, on essaie de corriger le tir. C'est bien la moindre des choses. Et pourtant, vous vous obstinez ; vous vous acharnez encore et toujours sur les mêmes.
Vous nous donnez des leçons de cohérence, mais où est la cohérence quand, hier encore, vous prétendiez vouloir trouver des recettes supplémentaires tout en validant des options qui continuent à miter notre modèle de protection sociale avec des niches supplémentaires, encore et toujours, pour les plus aisés ? Vous poursuivez sur cette voie absolument mortifère.
Nous considérons, et nous allons même peut-être un peu plus loin que M. Lévrier, que c'est aux plus aisés de donner d'abord l'exemple avant de demander des efforts aux autres.
Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, le service public est le patrimoine des plus modestes. Ils souhaitent pouvoir vivre en bonne santé. Or, aujourd'hui, s'ils nous regardent, ils voient une droite sénatoriale qui cherche à fracturer le pays au lieu de le rassembler (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.), qui met à mal le consentement à l'impôt et la solidarité nationale. C'est très clair : vous rejetez ici le compromis auquel l'Assemblée nationale était parvenue. Après, vous voulez nous donner des leçons sur le sens des responsabilités et de l'équilibre. Comprenez que je m'interroge. (M. Laurent Somon proteste.)
Encore une fois, nos concitoyens, quelle que soit leur sensibilité politique, attendent de nous que nous fassions porter l'effort sur celles et ceux qui ont les moyens d'y contribuer. C'est le cas avec cette augmentation très modeste de la CSG sur le capital. Nous espérons que vous retrouverez la raison.
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Ces discussions sont fort intéressantes, car nous nous rendons compte qu'il existe bien un débat de classes et un clivage droite-gauche. Martin Lévrier a fait des efforts depuis quelques semaines, et nous l'en remercions (M. Martin Lévrier s'esclaffe.). En tout cas, il y a un vrai débat.
Je suis contente, car nous avons parlé de la solidarité, qui est le principe central du système français de protection sociale. Pour nous, la CSG est moins efficace que les cotisations pour financer la sécurité sociale.
J'entends ce qui se dit, mais il y a tout de même 79 % des Français qui, aujourd'hui, demandent de la justice fiscale. Ce n'est pas rien. Par conséquent, quand nous vous proposons des mesures de justice fiscale, il me semble que nous sommes dans le vrai, dans le sens de ce que veulent les gens. Finalement, ils sont une minorité à ne pas vouloir de justice fiscale et sociale. Les gens du peuple, eux, ont bien compris qu'avec ce budget de la sécurité sociale ils allaient payer durement la note et que, comme d'habitude, les privilégiés de ce pays y échapperont.
M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.
M. Vincent Louault. Madame la sénatrice, 82 % des Français ne veulent pas de hausses d'impôts et souhaitent une baisse des dépenses.
Mme Raymonde Poncet Monge. Les capitalistes !
M. Vincent Louault. C'est pourquoi il faut être ferme et continuer à avancer dans cette direction. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
Par ailleurs, madame Lavarde, je comprends la logique de votre amendement, mais, d'un point de vue légistique, j'aimerais savoir si ce que nous voterons dans le cadre du PLF s'appliquera au PLFSS. Quelle est la règle ?
Mme Christine Lavarde. Il y a un transfert !
M. Vincent Louault. Très bien ! Dans ce cas, sachez que nous vous suivrons lors du PLF sur ce sujet technique très intéressant.
M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.
M. Laurent Somon. Je souhaite rebondir sur les propos de Mme Apourceau-Poly. Je suis d'accord avec elle, la CSG n'est pas la meilleure solution pour résoudre les problèmes de la sécurité sociale. Ce sont bien, comme vous l'avez dit, les cotisations sociales. Or celles-ci reposent essentiellement sur le travail : il faut donc favoriser les entreprises pour créer des emplois et être capable de prélever des cotisations sociales. (Protestations sur des travées des groupes GEST et SER.)
M. Grégory Blanc. Il faut revenir aux 39 heures…
M. Laurent Somon. J'ai aussi entendu dire que nous voulions développer des niches. Nous essayons surtout de développer nos entreprises pour qu'elles créent des emplois. Nous en reparlerons.
M. Guillaume Gontard. Si seulement cela marchait !
M. Laurent Somon. Encore une fois, essayons de soutenir nos entreprises et nos emplois.
M. Patrick Kanner. Là, ce sont les rentiers !
M. Grégory Blanc. Les entreprises ne paient pas la CSG !
M. Laurent Somon. Il y aura d'autres mesures dans le projet de loi de finances. Quand vous dites que les plus hauts revenus ne sont pas assez mis à contribution, je m'inscris en faux. Nous examinerons, dans le cadre du PLF, une mesure visant à pérenniser le dispositif de contribution des plus hauts revenus à la résorption du déficit national, qui concerne tant le budget général que celui de la sécurité sociale.
Ne dissocions pas systématiquement les deux textes. Ayons une vision globale et ne nous focalisons pas sur la CSG. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.
Mme Silvana Silvani. Au premier semestre 2025, nous avons constaté quatre-vingts fermetures d'usines pour quarante-deux ouvertures. Sans revenir sur votre « plan de réindustrialisation », je veux simplement dire que, de mon point de vue, ce plan ne fonctionne pas bien... (Rires. – Mme Émilienne Poumirol applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je vais répondre en priorité au président Raynal. En fait, nous voyons bien ce matin que le débat existe. Je suis la rapporteure générale de la commission des affaires sociales et je m'exprime donc au nom de la majorité sénatoriale, ne vous en déplaise.
M. Ouizille m'accuse de défendre le budget LR. Si j'étais caricaturale comme lui, je répondrais que je m'oppose à un budget PS, parce que c'est en réalité ce qui est ressorti de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme Laurence Rossignol. Pas exactement !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J'y insiste, si j'étais caricaturale, comme M. Ouizille l'a été.
M. Guillaume Gontard. Sauf que nous, nous n'avons pas besoin d'être caricaturaux.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Si nous sortons des postures politiciennes, ce débat est beaucoup plus intéressant, car nous voyons ce que chacun pense de la réalité du financement de la sécurité sociale.
Nous avons eu l'occasion, avec Raymonde Poncet Monge, de travailler pendant de longues semaines sur les moyens de ramener la sécurité sociale à l'équilibre, en agissant sur les dépenses, sur les recettes et sur la quantité de travail.
Nous avons beaucoup réfléchi et nous avons présenté, dans notre rapport, une centaine de mesures chiffrées. C'est une première, qui doit permettre à tout un chacun de voir ce qu'il adviendrait si nous agissions sur telle recette, sur telle dépense ou si nous augmentions, par exemple, le nombre d'heures travaillées. Chacun est en mesure de choisir et c'est ce que nous nous efforçons de faire ce matin en essayant de trouver un chemin majoritaire.
De tout temps, nous avons fait le choix de ne pas soutenir cette proposition de hausse de la CSG. Aussi, la majorité sénatoriale n'est pas perdue ce matin, même si certains ont instillé du doute – n'est-ce pas, monsieur Lévrier ?
Je le comprends et je respecte la parole de Martin Lévrier comme je respecte la vôtre. C'est une possibilité qui est effectivement évoquée dans notre rapport de cet été. De la même façon, je respecte les propositions faites par nos collègues Christine Lavarde et Vincent Delahaye.
C'est vrai, un doute a été semé, mais c'est aussi toute la richesse de notre débat.
D'aucuns regrettent que la suppression de l'article nous empêche de discuter des amendements suivants. Comme je vous l'ai dit depuis le départ, cette sécurité sociale est si mal en point qu'il faudrait tout remettre à plat. Pouvons-nous le faire dans ce PLFSS d'une grande complexité, qui nous est parvenu si tard ? Très honnêtement, il me semble que c'était tout de même très compliqué cette année, encore plus que les précédentes.
Pour autant, nous étions tentés par l'amendement n° 1627 rectifié bis de notre collègue Christine Lavarde, parce qu'il remet de la justice entre les travailleurs, qu'ils soient transfrontaliers ou non. Si j'ai bien compris, tout le monde n'est pas traité aujourd'hui de la même façon et il s'agirait de rétablir une forme de justice.
La difficulté, c'est que le vote de cet amendement aggraverait encore le déficit du PLFSS de 17 milliards d'euros. L'image serait terrible, même si Mme Lavarde accompagne sa proposition d'une promesse de recette supplémentaire qui serait votée dans le cadre du PLF.
En tout cas, vous déciderez en votre âme et conscience, mes chers collègues.
Mme Laurence Rossignol. J'espère bien !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cependant, en tant que rapporteure générale, je ne peux évidemment pas soutenir une proposition qui dégrade encore le déficit de la sécurité sociale.
M. Patrick Kanner. Augmenter les recettes ! Un peu de cohérence !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ces chiffres étant posés, mes chers collègues, je vous laisse bien évidemment toute liberté de choix.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Pour ce qui concerne les amendements de suppression de l'augmentation du taux de CSG sur les revenus du capital, vous avez eu un débat assez complet sur lequel je ne reviendrai pas pour ne pas donner l'impression de tourner en rond.
Vous avez tous des visions très légitimes, avec des arguments pour et des arguments contre cette hausse. J'ai également entendu des questionnements sur la légitimité même de la CSG, mais ce débat est d'une nature quelque peu différente.
Je préfère revenir rapidement sur les amendements proposés par M. le sénateur Delahaye et Mme la sénatrice Lavarde.
Monsieur Delahaye, ce que vous proposez est au fond une bascule de financement, car votre amendement est également lié à une hausse de la TVA.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Évidemment !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je préfère le préciser, sans quoi nous n'aurions pas une vision complète de votre proposition.
Honnêtement, c'est une proposition très intéressante. Aujourd'hui, vous l'avez dit, la majorité du financement qui n'est pas déjà fiscalisé via un transfert de l'État vers la sécurité sociale reste en grande partie constituée de cotisations. Or, M. Somon l'a dit, les cotisations salariales et patronales sont, encore aujourd'hui, trop lourdes. (Mme la rapporteure de la commission des affaires sociales acquiesce.) Elles découragent les entreprises d'investir, parce qu'elles grèvent leur compétitivité ; elles découragent les Français de travailler, parce qu'elles pèsent très lourd sur la feuille de paie.
Nous devons donc réfléchir à une bascule. Comment toutes les richesses, et non pas seulement le travail, peuvent-elles contribuer à nous protéger des différents risques sociaux ? De nombreux économistes proposent une telle bascule.
Pour ma part, j'y vois aussi un enjeu générationnel. Il y a aujourd'hui 30 millions d'actifs dans le pays, qui, à eux seuls, portent la solidarité nationale pour des politiques publiques qui s'appliquent aux 70 millions de Français. Ce n'est pas seulement un enjeu de génération ; il ne faut pas opposer les actifs et les retraités – le sujet n'est pas là.
La question est de savoir comment l'ensemble des richesses – revenus de remplacement, revenus du travail, revenus du capital – peut davantage contribuer, de sorte que les actifs, via les cotisations, ne soient plus les seuls à supporter le financement de la protection sociale.
Je tiens à rappeler également que les cotisations patronales en France représentent 10 points de PIB, contre 8 points en moyenne dans la zone euro et 6 ou 7 points en Allemagne. Cela pèse très lourd. Nous parlons toujours des cotisations sociales salariales, mais nous oublions souvent dans nos débats leur versant patronal.
Votre proposition a donc beaucoup de mérite. Je répète cependant qu'elle ne « tient debout », d'un point de vue budgétaire, que parce qu'elle s'accompagne d'un mouvement sur la TVA.
Nous aurons sûrement ce débat dans le cadre du projet de loi de finances. Avec mes équipes, nous avons de nombreuses propositions qui peuvent permettre de réformer la TVA sans nuire aux ménages modestes. Je serai ravie, le moment venu, de les préciser.
Le PLFSS 2026 n'est pas le bon véhicule législatif, mais le sujet sera certainement mis en avant lors de la campagne pour l'élection présidentielle de 2027. Les services de Bercy ont travaillé sur beaucoup de scénarios, à la demande, d'ailleurs, de nombreux parlementaires, pour éclairer les réflexions. Je le répète, je serai ravie d'y revenir.
Madame Lavarde, votre amendement m'inspire plusieurs réactions.
D'abord, je connais bien le sujet des frontaliers, car j'ai été ministre des affaires européennes, en charge des relations transfrontalières. C'est un sujet très complexe, qui concerne près d'un million de nos concitoyens et qui soulève des problèmes d'équité fiscale dans les territoires concernés. Il faut aborder ce débat avec beaucoup de rigueur, en gardant à l'esprit que les systèmes fiscaux européens créent beaucoup de difficultés dans tous les territoires transfrontaliers.
À mon sens, nous aurions beaucoup à gagner à ce que la Commission européenne nous aide à gérer ce sujet de manière beaucoup plus harmonisée, les négociations bilatérales étant extrêmement inflammables et plus ou moins couronnées de succès.
Il y a aussi des conséquences sur les collectivités locales, vous le savez, qui doivent porter, souvent seules, les coûts induits – garde d'enfants, logement, infrastructures, protection sociale des retraités, etc. –, sans avoir le bénéfice des financements. C'est donc un sujet très lourd qu'il faut regarder dans sa globalité.
Ensuite, vous proposez également une bascule. Pourquoi pas ? Simplement, il faut bien voir que cette proposition tend à fiscaliser davantage le financement de la sécurité sociale. Il y aurait donc un transfert supplémentaire de 17 milliards d'euros. Songez-y, madame Poncet Monge…
C'est donc un choix beaucoup plus politique et profond que la seule portée de votre amendement qui, sur le sujet des frontaliers, peut très bien s'entendre sous réserve de tous les ajustements qu'il requiert pour éviter les contentieux.
J'en reviens, et je terminerai sur ce point, aux propos du sénateur Delahaye : comment voulons-nous financer demain la protection sociale ? Si vous votiez l'amendement de Mme Lavarde, le résultat serait très simple : la sécurité sociale serait davantage financée par l'impôt sur le revenu que par les cotisations sur le travail et le capital, même assorties d'un taux homogène. Tout cela peut s'entendre et doit être porté au débat.
Je le dis souvent aux députés, il y a des choses que nous ferons en 2027 plutôt qu'en 2026. Sur le principe, rien ne s'oppose fondamentalement à la mise en œuvre d'une telle bascule. Ce sont cependant des choix très politiques qui doivent être discutés dans le cadre des grands débats qui précéderont l'élection présidentielle de 2027.
Je voulais simplement vous indiquer la position du Gouvernement sur les propositions que vous faites.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 523 rectifié bis, 595, 1093 rectifié bis et 1506 rectifié ter.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, de la commission des affaires sociales et, l'autre, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ? …
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 35 :
| Nombre de votants | 345 |
| Nombre de suffrages exprimés | 341 |
| Pour l'adoption | 208 |
| Contre | 133 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'article 6 bis est supprimé, et les amendements nos 1627 rectifié bis, 139 rectifié quater, 1645 rectifié et 1144, ainsi que les amendements identiques nos 1145, 1489 et 1644 rectifié n'ont plus d'objet.
Après l'article 6 bis (précédemment réservé)
M. le président. L'amendement n° 133 rectifié quinquies, présenté par M. Fargeot, Mme Vermeillet, MM. Maurey et Dhersin, Mme Perrot, MM. Chasseing, Houpert et Menonville, Mmes Patru et Housseau, M. Cambier, Mme Lermytte, M. A. Marc, Mme Jacquemet et MM. Bleunven et Levi, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du 1°, le taux : « 6,2 % » est remplacé par le taux : « 9,2 % » ;
2° Au 2°, le taux : « 8,3 % » est remplacé par le taux : « 9,2 % ».
La parole est à M. Daniel Fargeot.
M. Daniel Fargeot. Il est indispensable que la réduction du déficit de la sécurité sociale passe par la maîtrise des dépenses, mais aussi par l'équité. Mme la rapporteure générale connaît mes convictions en la matière.
Par cet amendement, je souhaite mettre fin à une injustice majeure. La CSG a été créée par Michel Rocard en 1991 pour répartir justement la charge des dépenses sociales. Mais où est la juste répartition quand, en percevant 2 000 euros brut, un salarié cotise 180 euros et un demandeur d'emploi ou une personne en arrêt de travail 122 euros ? J'aimerais que l'on m'explique les raisons de ce déséquilibre.
Je vous propose de trouver de nouvelles recettes pour réduire le déficit, en fixant un même taux de CSG pour les revenus de remplacement et les revenus d'activité. Le taux de CSG applicable aux revenus de remplacement, actuellement de 6,20 %, s'élèverait à 9,20 %, soit un ajustement de trois points. C'est une mesure d'équité sociale et fiscale.
Dans notre situation budgétaire, nous ne pouvons pas accepter sérieusement que les revenus de remplacement contribuent moins aux dépenses sociales que les revenus du travail. Eh oui, mes chers collègues, la droite sociale parle aussi de solidarité !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à porter à 9,2 %, soit le taux applicable aux revenus d'activité, d'une part, le taux de CSG de droit commun applicable aux allocations chômage et aux indemnités journalières, qui est actuellement de 6,2 %, et, d'autre part, le taux de droit commun applicable aux pensions de retraite et d'invalidité, qui est actuellement de 8,3 %.
Précisons que le seul fait de porter de 8,3 % à 9,2 % le taux applicable aux pensions de retraite rapporterait 1,8 milliard d'euros. C'est une proposition qui mérite d'être versée au débat au même titre que d'autres.
Toutefois, la commission est convenue qu'il était inenvisageable d'alourdir excessivement les prélèvements obligatoires, en particulier par des hausses de taux.
L'avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. L'harmonisation proposée rapporterait 2,7 milliards d'euros. L'un des amendements devenus sans objet de par la suppression de l'article 6 bis aurait abouti à un résultat financier similaire, mais avec une tout autre cible.
Cet amendement-ci vise les retraités, qui bénéficient actuellement d'un taux maximal de CSG de 8,3 %, mais aussi l'ensemble des revenus de remplacement.
Concernant ces derniers, vous n'ignorez pas que le Gouvernement propose, dans le cadre du projet de loi de finances que vous aurez bientôt à examiner, d'améliorer l'équité fiscale, en particulier par une homogénéité accrue de la fiscalité applicable aux indemnités journalières. Aujourd'hui, la fiscalité diffère suivant que le bénéficiaire de ces indemnités est en simple arrêt maladie, pris en charge au titre de la branche AT-MP (accidents du travail et maladies professionnelles), ou encore atteint d'une affection de longue durée (ALD). Vous pouvez avoir la même maladie à un instant t, mais selon sa classification entre ces trois catégories, vos indemnités seront soumises à une fiscalité différente !
Le Gouvernement s'est donc concentré sur une recherche d'harmonisation fiscale, alors que vous proposez une harmonisation sociale. Nous n'avons pas fait ce choix, considérant que le gel des pensions et des prestations pour l'année 2026 constituait déjà un effort substantiel pour les ménages, notamment de retraités, qui seraient affectés par votre proposition.
Bien des propositions peuvent être discutées. Simplement, il faut que nous examinions l'impact cumulé des mesures adoptées sur tel ou tel ménage type. Au vu des choix du Gouvernement et de ceux que vous, parlementaires, avez faits jusqu'à présent, je ne peux donc qu'émettre un avis défavorable sur cet amendement.
Cela étant dit, ce que vous proposez, tout comme la proposition d'harmonisation que M. Delahaye a faite précédemment, peut tout à fait être inscrit au débat dans la perspective de l'élection présidentielle, car ce serait une vraie refonte du financement de la sécurité sociale. Seulement, cette discussion doit se tenir dans un cadre beaucoup plus global que celui que permet l'examen d'amendements. Ces 2,7 milliards d'euros supplémentaires seraient sans doute bienvenus pour nos finances sociales, mais ce serait un choc assez important pour notre pays et pour des ménages qui ne s'y attendent pas.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Mon cher collègue, pour reprendre votre terminologie, il ne serait vraiment pas convenable de ne pas taxer les revenus du capital à la même hauteur que les revenus du travail et les revenus de remplacement !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le revenu de remplacement, par définition, vient remplacer le revenu du travail, mais il ne le fait pas intégralement.
Le problème est que l'on oublie l'histoire de la CSG. Celle-ci, quand elle porte sur les revenus d'activité, a remplacé des cotisations maladie et des cotisations chômage ; on a fait de ces prélèvements un impôt. On peut en penser ce qu'on veut, nous n'allons pas refaire aujourd'hui le débat sur le principe de la CSG, qui a au moins eu le mérite d'élargir l'assiette du prélèvement. Simplement, dans ces conditions, sur quel fondement les retraités pourraient-ils être soumis à la cotisation chômage ?
Le problème, c'est que, de réforme en réforme, on ne sait plus de quoi l'on parle. On ouvre tous les débats. Ainsi, Mme la ministre, qui a la chance de ne pas avoir un temps de parole limité à deux minutes, a ouvert le débat sur la TVA sociale. Mais celle-ci existe déjà ! La compensation par l'État des allégements de cotisation étant assurée par l'allocation à cette fin d'une fraction de la TVA, on a déjà la TVA sociale. Le problème est que la TVA est un impôt antiredistributif. Or, quand on est de gauche, on essaie d'éviter des mesures de ce type, parce qu'on est pour la réduction des inégalités. Cela justifiait d'ailleurs notre soutien à l'article 6 bis, qui tendait à réduire les inégalités de patrimoine.
M. le président. La parole est à M. Daniel Fargeot, pour explication de vote.
M. Daniel Fargeot. Madame la ministre, je tiens à répondre aux arguments que vous avez opposés à mon amendement.
Celui-ci ne vise pas seulement les pensions de retraite ; tous les revenus de remplacement sont également concernés. Je ne comprends absolument pas l'absence actuelle de cohérence entre les taux de CSG de 6,2 % et de 9,2 %. Il me paraîtrait tout à fait naturel de les unifier.
Une personne indemnisée pour un accident du travail perçoit 100 % de son salaire ; en arrêt maladie, on n'en touche qu'une fraction, éventuellement augmentée par l'assurance complémentaire. Il serait bien naturel d'unifier les taux applicables à ces différentes situations ; ce serait une forme d'équité sociale.
Quant à l'équité fiscale, je suis assez d'accord avec vous. Seulement, je veux rappeler que, sur la CSG, 2,4 points sur les 9,2 points du taux ordinaire sont réintégrés dans l'assiette de l'impôt sur le revenu, ainsi que la CRDS, soit 0,5 point supplémentaire : pour 2,9 % du revenu, on paie de l'impôt sur l'impôt ! Je proposerai donc, lors de l'examen du PLF, que ces 2,9 points soient déductibles de l'impôt sur le revenu. J'espère que nous parviendrons ensuite à trouver un consensus pour l'unification des taux de CSG.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Mon cher collègue, je disais tout à l'heure que je ne vous comprenais pas, que je ne voyais pas quelle était votre ligne, votre cohérence. Maintenant, tout cela s'éclaircit !
Vous avez voté la suppression de l'article 6 bis, qui devait rapporter, si l'on peut dire, 2,6 milliards d'euros ; vous vous dites donc qu'il faut trouver l'argent ailleurs, et où allez-vous le chercher ? Vous voulez faire peser 3 points supplémentaires de CSG sur ceux qui sont en arrêt de travail, pour cause de maladie ou d'incapacité, comme si leur situation était facile à vivre. Pour vous, c'est cela l'équité sociale et fiscale !
Je comprends où vous voulez en venir, mais nous n'avons pas du tout la même vision de la société ni la même approche de la meilleure manière de préserver notre système social.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 133 rectifié quinquies.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 1521, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L'article L. 135-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les recettes de l'assurance maladie sont par ailleurs constituées d'une fraction du produit de la contribution sociale mentionnée au I de l'article L. 136-7-1 à concurrence d'un montant correspondant à l'application d'un taux de 3 % à l'assiette de cette contribution. » ;
2° Au 3° du I de l'article L. 136-8, le taux : « 7,2 % » est remplacé par le taux : « 10,2 % ».
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Les opérateurs de jeux d'argent, vous le savez certainement, réalisent des profits colossaux sur le dos des plus fragiles. C'est pourquoi nous proposons de renforcer la fiscalité comportementale sur ce secteur et de faire porter la charge sur ceux qui profitent de la maladie de l'argent.
Rappelons que les paris sportifs et les jeux en ligne ciblent massivement les jeunes : trois quarts des parieurs ont moins de 34 ans. Pour les paris sportifs, la part de joueurs à risque modéré est trois fois plus importante que pour les jeux de loterie ; la part de joueurs excessifs, six fois plus.
Cette addiction a des conséquences dramatiques. Selon l'hôpital Marmottan, les tentatives de suicide sont quinze fois supérieures à la moyenne chez les personnes dépendantes. En outre, l'addiction aggrave l'isolement social. Tout cela ne vise qu'à engranger des profits : pas moins de 40 % du chiffre d'affaires des acteurs du secteur provient des joueurs à pratique excessive. Il s'agit d'un modèle économique littéralement prédateur.
Nous proposons donc d'augmenter de trois points, de 7,2 % à 10,2 %, le taux de CSG sur les paris sportifs et les jeux de hasard, et d'affecter ce rendement supplémentaire à l'assurance maladie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, je voudrais avant tout vous donner des chiffres relatifs à l'effet des dispositions que nous avions adoptées l'an dernier, quand ce sujet avait déjà été mis au débat, et qui sont donc entrées en vigueur tout récemment.
Le rendement global de la fiscalité sur les jeux pour l'année 2025 est estimé à 1,3 milliard d'euros. La grande majorité de cette somme a été affectée au régime de base de la sécurité sociale ; 80 millions d'euros ont notamment été affectés au financement des mesures nouvelles de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 entrées en vigueur le 1er juillet dernier.
Nous avons donc bien fait, l'an dernier, d'alourdir la taxation sur les jeux de hasard et de loterie ; cela produit de bons résultats.
Est-il pour autant nécessaire d'augmenter encore les taux cette année ? Il faudrait peut-être attendre deux ou trois ans pour voir comment évolue le rendement de cette nouvelle fiscalité et déterminer s'il convient d'y apporter des corrections.
Nous sommes bien d'accord, l'addiction aux jeux est un fléau. Seulement, votre proposition ferait augmenter de façon disproportionnée la fiscalité sur une assiette réduite, puisque seuls les jeux de loterie sont visés par le dispositif de votre amendement.
Si je partage votre combat contre les pratiques addictives, le levier fiscal ne peut constituer à lui seul une politique publique. Nous l'avons dit l'an dernier, il convient également de mieux accompagner les personnes, souvent très fragiles et dans une situation difficile, qui se livrent aux jeux de hasard comme d'autres tombent dans la drogue ou d'autres addictions encore.
En tout cas, sachez qu'à titre personnel je suis tout à fait sensible aux difficultés que vous mettez en avant et opposée à ce fléau – car c'en est un –, mais nous avons déjà pris des décisions l'année dernière, qui portent vraiment leur fruit – nous ne nous attendions pas à un tel rendement.
Reparlons-en donc un peu plus tard et voyons comment prospèrent les décisions prises l'année dernière. C'est dans cette perspective que la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. En tant que ministre des comptes publics, je suis entre autres choses chargée de la tutelle de l'Autorité nationale des jeux (ANJ), autorité administrative indépendante chargée de la régulation de ce secteur, mais aussi de structures comme la Française des jeux, entreprise certes privatisée, mais dont l'État reste actionnaire, ou encore le groupement d'intérêt économique (GIE) qu'est le PMU. Je suis donc ce sujet avec beaucoup d'attention.
L'addiction aux jeux est indéniablement un très grand fléau. C'est pourquoi la présidente de l'ANJ, Mme Falque-Pierrotin, en a fait son premier sujet d'action, en œuvrant notamment à ce que les paramètres des jeux ne contribuent pas eux-mêmes à renforcer l'addiction.
Je rappellerai cependant que vous avez beaucoup renforcé la fiscalité sur les jeux l'année dernière. Aujourd'hui, 69 % du produit brut des jeux de loterie – la différence entre la mise et les gains – est fiscalisé ; la fiscalité est donc déjà importante.
Votre amendement suscite en outre une petite difficulté légistique : son dispositif ne vise que les jeux de loterie. Je peux comprendre votre proposition dans son principe, même si j'estime que nous devons être très précautionneux en matière de fiscalité. Toutefois, ce dispositif affecterait surtout la Française des jeux et susciterait un report mécanique vers d'autres formes de jeu, comme les paris sportifs et hippiques ou les jeux hors loterie.
Dès lors, même si vous avez raison de soulever ce sujet de société, et que la limitation des effets dramatiques de l'addiction sur les personnes qui en souffrent, leur situation financière et leur entourage – j'ai évidemment connaissance de ces très grandes difficultés – doit clairement être une priorité collective, je ne peux que vous demander de retirer l'amendement : tel qu'il est rédigé, son dispositif aurait des effets de bord contre-productifs pour la cause même que vous défendez.
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Merci de votre réponse, madame la ministre, mais ce n'est pas parce qu'une proposition est insuffisante qu'il faut la rejeter. Quant aux effets de bord, j'aimerais être convaincue de leur réalité. Surtout, la taxation que nous proposons pèserait sur les opérateurs de ces jeux et non sur les personnes qui jouent ; c'est toute la différence entre nos approches.
Madame la rapporteure générale, tant mieux si ce que nous avons adopté l'an dernier fonctionne ; alors, continuons ! Vous savez comme moi que, pour le tabac, on a continué à augmenter la fiscalité ; c'est ainsi qu'on a réussi à faire baisser cette addiction. Les taxes comportementales sont extrêmement importantes et effectives.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Je veux remercier Mme la ministre et Mme la rapporteure générale de leurs explications. J'envisageais de voter cet amendement, car il porte sur une forme d'addiction et que, en la matière, je suis très inquiet pour notre jeunesse. C'est pourquoi, madame la rapporteure générale, j'ai du mal à entendre qu'il faudrait attendre deux ou trois ans. Notre jeunesse ne peut pas attendre si longtemps !
À ce propos, j'avais déposé un amendement qui a été déclaré irrecevable au titre de l'article 41 de la Constitution. Nous n'aurons donc pas ce débat aujourd'hui, mais sachez que je proposais d'aller plus loin. En effet, derrière ces addictions, il y a le smartphone, qui est devenu une arme, un outil terrible. C'est pourquoi je demandais que soit interdite la vente de smartphones aux jeunes de moins de 16 ans, ainsi que leur possession. Il faudra en venir là, car le combat contre les applications est perdu d'avance : quoi que nous décidions, quelque fiscalité que nous instaurions, nous perdrons, car les acteurs concernés se replieront à l'étranger. Il faut donc réfléchir en amont et aller très vite, car c'est notre jeunesse qui est en jeu.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1521.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 347 rectifié, présenté par M. Chantrel et Mme Conway-Mouret, est ainsi libellé : Après l'article 6 bis Insérer un article additionnel ainsi rédigé : I. Le 3° bis de l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié : 1° Au a, le taux : « 6,67 % » est remplacé par le taux : « 6,66 % » ; 2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé : « …) À la Caisse des Français de l'étranger, mentionnée à l'article L. 766-4-1, pour la contribution mentionnée à l'article L. 136-1, pour la part correspondant à un taux de 0,01 % ; ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Yan Chantrel.
M. Yan Chantrel. Cet amendement a pour objet la Caisse des Français de l'étranger (CFE). Cet organisme de sécurité sociale, certes de droit privé, est chargé d'une mission de service public. Pourtant, la caisse ne touche presque pas d'argent public à ce titre : seulement 380 000 euros, alors que l'offre destinée à la catégorie aidée lui coûte à elle seule 5 millions d'euros.
Cette catégorie de contrats lui est imposée au titre de cette mission de service public. La réforme de 2018 a fixé des montants maximaux au-delà desquels la CFE ne peut pas augmenter les prix de ces contrats ; ces niveaux ont été atteints.
En outre, contrairement aux caisses privées, la CFE accueille tous nos compatriotes expatriés, sans distinction d'âge ni d'état de santé.
Cette mission de service public honore la CFE, mais il ne faudrait pas que cet effort repose sur les contributeurs à cette caisse : l'État devrait être au rendez-vous.
L'objet de cet amendement est donc de permettre à l'État de jouer son rôle en finançant cette mission de service public, dont le coût a été évalué à quelque 25 millions d'euros, soit un peu moins que ce que je propose de lui allouer.
L'enjeu est d'autant plus important que nos compatriotes résidant hors d'Europe sont assujettis – nous en reparlerons tout à l'heure – à la CSG et à la CRDS. Rappelons que cela a été jugé contraire au droit de l'Union européenne pour les Français résidant dans d'autres pays de l'Espace économique européen.
Dès lors, comme nos compatriotes extra-européens contribuent à nos finances sociales par ce biais, il paraît pertinent qu'une petite partie – pas même un dixième – de cet argent permette à cette caisse de voir sa mission de service public pleinement financée par l'État. Soutenir ainsi nos compatriotes les plus démunis hors de France, en votant aujourd'hui ce financement, honorerait la représentation nationale.
M. le président. L'amendement n° 1303 n'est pas soutenu.
L'amendement n° 348, présenté par M. Chantrel et Mme Conway-Mouret, est ainsi libellé : Après l'article 6 bis Insérer un article additionnel ainsi rédigé : I. Le 3° bis de l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié : 1° Au b, le taux : « 0,45 % » est remplacé par le taux : « 0,44 % » ; 2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé : « …) À la Caisse des Français de l'étranger, mentionnée à l'article L. 766-4-1, pour la contribution mentionnée à l'article L. 136-1, pour la part correspondant à un taux de 0,01 ; » II. La perte de recettes pour la Caisse d'amortissement de la dette sociale est compensée, à due concurrence, par la majoration des contributions mentionnées à l'article 19 de l'ordonnance n° 90-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.
La parole est à M. Yan Chantrel.
M. Yan Chantrel. Il s'agit d'un amendement de repli, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 1518 rectifié quater, présenté par Mme Conway-Mouret, MM. Chantrel, Bourgi et P. Joly, Mme Narassiguin, MM. Temal, M. Weber et Tissot, Mmes Bélim et Monier et MM. Stanzione et Ziane, est ainsi libellé : Après l'article 6 bis Insérer un article additionnel ainsi rédigé : I. Le 3° bis de l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié : 1° À la fin du b, le taux : « 0,45 % » est remplacé par le taux : « 0,447 % » ; 2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé : « …) À la Caisse des Français de l'étranger, mentionnée à l'article L. 766-4-1, pour la contribution mentionnée à l'article L. 136-1, pour la part correspondant à un taux de 0,003 %. » II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Yan Chantrel.
M. Yan Chantrel. Par cet amendement de repli, ma collègue Hélène Conway-Mouret propose également d'assurer un financement de la mission de service public de la CFE, au moins pour la catégorie aidée de contrats, qui permet à nos compatriotes de l'étranger au revenu le plus faible d'avoir accès à la CFE.
Rappelons que cette offre, imposée par l'État, coûte chaque année quelque 5 millions d'euros à la caisse, mais que l'État ne compense ce coût qu'à hauteur de 348 000 euros. Certes, nous avons réussi à augmenter progressivement ce montant au fil des ans, mais il reste absolument insuffisant, ce qui met la CFE structurellement en péril et fait peser cet effort financier sur l'ensemble de ses cotisants.
Je le précise bien, aux termes de cet amendement de repli, l'État financerait entièrement la catégorie aidée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ces amendements ont des objets similaires, mais leurs dispositifs diffèrent quelque peu.
Par l'amendement n° 347 rectifié, M. Chantrel propose de transférer de la branche vieillesse vers la CFE 0,01 point de CSG, ce qui paraît infime, mais représente tout de même 150 millions d'euros. Nous avons déjà eu cette discussion en 2023 et en 2024, et notre position n'a pas beaucoup changé : il ne convient pas de réduire les ressources de la branche vieillesse dans le contexte actuel.
Aux termes des amendements nos 348 et 1518 rectifié quater, le transfert profitant à la CFE se ferait depuis la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) et non depuis la branche vieillesse, toujours à hauteur de 150 millions d'euros pour le premier d'entre eux.
Toutefois, il ne convient pas à l'heure actuelle de réduire les ressources de la Cades, dont nous aurons l'occasion de débattre dans la suite de l'examen de ce texte. Surtout, seule une loi organique pourrait modifier la destination des sommes dévolues à la Cades ou issues de cette caisse. Celle-ci doit normalement voir sa mission s'achever en 2033. Certes, la Cour des comptes a estimé que son amortissement pourrait être accompli plus tôt, auquel cas l'on pourrait peut-être profiter d'une porte de 20 milliards d'euros.
Néanmoins, faire amortir ces 20 milliards d'euros supplémentaires par la Cades requerrait une loi organique, mais surtout deux conditions de fond : d'une part, il faudrait ramener la courbe vers l'équilibre, avec des déficits de moins en moins importants, pour véritablement rassurer les marchés financiers ; d'autre part, il faudrait des recettes supplémentaires, comme l'impose la loi organique à l'origine de la Cades, donc augmenter la CSG ou la CRDS. Un débat sur ces contributions pourra avoir lieu à cette occasion ; cela s'imposera même si l'on veut transférer à la Cades de nouvelles dettes sociales.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. La Caisse des Français de l'étranger est un organisme de nature hybride : d'un côté, c'est une institution de droit privé, qui offre aux Français de l'étranger la possibilité, s'ils le souhaitent, de cotiser pour bénéficier d'une couverture de leurs soins, en particulier quand ils viennent en France ; de l'autre, elle assure un certain nombre de missions de service public, pour lesquelles elle reçoit une subvention du ministère des affaires étrangères.
Puisqu'il s'agit d'une organisation privée, à laquelle l'affiliation est volontaire, la CFE s'inscrit dans un champ concurrentiel, aux côtés d'autres structures privées auprès desquelles certains Français de l'étranger choisissent de s'assurer pour leurs besoins, notamment de couverture santé.
Il en découle une restriction de principe : il n'est pas possible d'affecter un impôt, en l'occurrence une part de la CSG, à une organisation privée, telle que la CFE. À moins d'en faire une caisse obligatoire en disant à tous les Français de l'étranger : « Quand vous habitez hors de France, vous cotisez obligatoirement à la CFE. » En revanche, le débat que vous soulevez est très légitime, car la CFE connaît des difficultés financières indéniables. J'ai beaucoup travaillé sur ce sujet avec Laurent Saint-Martin, qui a été successivement un très bon ministre des comptes publics et un très bon ministre des Français de l'étranger. Le rapport qui nous a été remis, à la suite des débats de l'année dernière, par l'inspection générale des finances (IGF) et l'inspection générale des affaires sociales (Igas) propose un certain nombre d'évolutions, certaines de nature législative, d'autres de nature financière, notamment pour adapter aux risques la tarification des contrats. Il est également proposé de faire évoluer l'organisation et le fonctionnement de la caisse.
Je vous redis donc ce que j'avais répondu aux députés qui faisaient des propositions similaires, tout en m'en remettant à la sagesse de l'Assemblée nationale : la solution proposée ne fonctionne pas, elle sera retoquée à moins d'une évolution majeure, voire existentielle, de cette caisse. J'entends néanmoins, aujourd'hui encore, la demande très forte des parlementaires quant au besoin de redonner à cette caisse une trajectoire de viabilité, faute de quoi l'on priverait nombre de nos concitoyens d'une couverture maladie abordable.
Nous souhaitons également promouvoir l'offre de contrats collectifs par la CFE. En effet, il existe des entreprises françaises à l'étranger qui, si nous réformions quelque peu le fonctionnement de la caisse, trouveraient intéressant de disposer de tels contrats pour leurs salariés, en particulier ceux qui effectuent des allers-retours fréquents dans notre pays, afin de garantir leur couverture et celle de leurs familles.
Il y a donc de nombreuses pistes de réforme. J'entends vos préoccupations, j'y travaille, mais je vous le répète : affecter une part de la CSG à une caisse de droit privé et d'affiliation volontaire serait censuré par le Conseil constitutionnel ou nous imposerait de transformer la CFE en caisse obligatoire.
C'est pourquoi je suis très réservée sur l'ensemble de ces amendements et je vous invite à les retirer. Le message est bien passé, mais il nous faudra employer d'autres leviers pour atteindre les objectifs que vous défendez tout à fait légitimement.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, pour explication de vote.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Je ne soutiendrai pas ces amendements, et ce pour quatre raisons.
Premièrement, la CFE est en pleine restructuration. L'Igas et l'IGF ont proposé plusieurs scénarios susceptibles d'en modifier les missions, le périmètre et le financement. Faire reposer ce dernier sur un prélèvement national serait prématuré et déconnecté du chantier actuellement en cours.
Deuxièmement, un tel fléchage rendrait impossible toute exonération future de CSG et de CRDS pour les Français établis hors d'Europe. Le Gouvernement nous dirait aussitôt : « Ces prélèvements financent votre couverture de sécurité sociale, vous ne pouvez donc pas en être exonérés. » Ce serait par conséquent une erreur stratégique pour les Français vivant en dehors de l'Europe.
Troisièmement, cela créerait une confusion juridique au regard du droit européen. La jurisprudence établit que la CSG et la CRDS financent la sécurité sociale française, ce qui justifie l'exonération des non-résidents européens affiliés à une autre caisse. Si, demain, ces prélèvements finançaient la CFE, qui n'est pas un régime obligatoire ni coordonné, cet équilibre serait remis en cause.
Enfin, ce fléchage compliquerait considérablement la gestion budgétaire de la CFE comme de la sécurité sociale. La CFE dépendrait d'une ressource instable et la sécurité sociale perdrait des recettes, alors qu'elle est déjà en déficit. Ce n'est ni soutenable ni cohérent.
Mme Frédérique Puissat. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Je souhaite intervenir au nom de notre collègue Mélanie Vogel, qui n'a pu défendre l'amendement qu'elle avait déposé. Nous soutiendrons donc les amendements présentés par notre collègue Yan Chantrel, car il importe d'assurer un financement pérenne à la Caisse des Français de l'étranger, qui est confrontée depuis plusieurs années à des difficultés financières structurelles.
La CFE, cela a été rappelé, est un organisme de sécurité sociale de droit privé chargé d'une mission de service public, qui offre aux Françaises et aux Français établis hors de France une assurance maladie et des couvertures maternité et retraite, ainsi qu'une assurance face aux risques professionnels. À ce titre, elle apporte une protection essentielle à nos concitoyens qui perdent leur affiliation à la sécurité sociale française lors de leur départ à l'étranger.
Dans des pays aux systèmes de santé défaillants ou incomplets, l'accès à la CFE constitue à l'évidence le seul moyen d'obtenir une protection sociale fiable et continue.
Pourtant, contrairement aux caisses primaires d'assurance maladie, elle ne bénéficie d'aucune taxe affectée. La participation de l'État se réduit à une subvention résiduelle couvrant moins de 10 % du coût de la seule catégorie aidée, soit 380 000 euros.
Ainsi, malgré une obligation d'accueil universel, la CFE est soumise à des charges de mission de service public qui ne sont pas compensées. Cette situation est d'autant plus anormale que les Français hors de France s'acquittent de la CSG sur leurs revenus français, sans qu'aucune part de cette contribution soit affectée à la caisse qui leur est destinée.
Les élus de l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE) ont adopté plusieurs résolutions pour appeler un financement stable, de même que les Assises de la protection sociale des Français de l'étranger ont apporté un soutien franc à cette proposition. Les taux retenus qui abondent la CFE de 174 millions d'euros correspondent à ceux de la proposition de loi déposée à l'Assemblée par Karim Ben Cheikh et Eléonore Caroit avant la nomination de cette dernière comme ministre déléguée, laissant entendre un soutien du Gouvernement à ce dispositif de bon sens attendu par les élus des Français de l'étranger.
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Je note votre ouverture sur ce sujet, madame la ministre.
Depuis que je suis sénateur, je reviens chaque année à la charge. Je continuerai de le faire.
Lors des Assises de la protection sociale des Français de l'étranger, qui ont eu lieu dans tous les consulats et ont concerné tous nos compatriotes, cette mesure a été approuvée à l'unanimité par les élus de l'Assemblée des Français de l'étranger, quel que soit leur bord politique. Voilà qui montre bien qu'il s'agit là d'un dispositif central pour la pérennité de la CFE.
La disposition que je dépose chaque année par voie d'amendement a le mérite de mettre au débat ce sujet. Dans la mesure où nos compatriotes établis hors de France contribuent à la CSG-CRDS – nous en discuterons à l'occasion d'autres amendements –, il serait pertinent et légitime de permettre ce financement, notamment pour justifier cette cotisation. En effet, si celle-ci est injuste pour ceux qui résident au sein de l'Union européenne, pourquoi ne le serait-elle pas non plus pour les résidents extracommunautaires ? Je découvre que ma collègue Évelyne Renaud-Garabedian est contre le financement de la Caisse des Français de l'étranger, qui est pourtant chargée d'une mission de service public.
Vous avez évoqué une piste de solution, madame la ministre. Le problème, c'est que le rapport de l'Igas-IGF analyse une situation à moyens constants ; par conséquent, il contraint la réflexion. En l'espèce, c'est une décision politique qu'il faut prendre : que souhaitons-nous faire de cette caisse, qui n'est pas privée et à qui l'État confie une mission de service public ? À un moment donné, il faut être au rendez-vous.
D'autres pistes existent, sur lesquelles il nous faudra également réfléchir. Le Gouvernement pourrait par exemple décider que tous les agents de droit local français, qui n'ont pas de protection sociale et qui travaillent dans nos consulats et ambassades, soient affiliés à la CFE. Cela augmenterait les cotisations versées à cette caisse et enverrait un message positif à ceux de nos compatriotes établis hors de France qui ont des contrats précaires. Ce serait une bonne décision.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je peux entendre les objections de Mme la ministre et de certains de mes collègues.
Cela fait trois ans que nos collègues Mélanie Vogel et Mathilde Ollivier soulèvent ce problème. Certes, l'Igas et l'IGF ont remis un rapport, mais il y a urgence à agir ! Il ne faudrait pas attendre que la CFE devienne déficitaire au point de cesser de fonctionner pour en suivre les préconisations, d'autant que celles-ci peuvent lever certaines objections, qui sont légitimes.
Il n'est pas normal que, depuis trois ans, nos demandes se voient opposer un refus et que l'on réponde à ce problème avec lenteur, même si je ne pense pas qu'il s'agisse de mesures dilatoires. Rendons par exemple obligatoire l'adhésion à la CFE, puisque celle-ci est encore facultative ! On peut dépasser les obstacles.
L'inaction est véritablement préjudiciable. Si le Gouvernement ne fait rien, nous représenterons les mêmes amendements l'année prochaine.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 347 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, pour explication de vote sur l'amendement n° 348.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Ce n'est pas un problème financier, c'est d'abord un problème de gestion. La gestion de la CFE ne convient pas.
Il faudrait trouver une solution pour que les membres du conseil d'administration gèrent cette caisse comme une entreprise privée (Murmures sur les travées des groupes SER et GEST.),…
M. Grégory Blanc. Pas comme une entreprise privée !
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. … ce qui n'est pas le cas, tout en tenant compte des catégories aidées et en soutenant nos compatriotes de l'étranger dans les difficultés qu'ils rencontrent.
Mme Frédérique Puissat. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 348.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1518 rectifié quater.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 1172, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 7° du II de l'article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. La question des apprentis et de leur rémunération, comme celle de la survie de ce mode de transmission et de l'acquisition des savoirs professionnels, ont été dans toutes les têtes ces dernières années.
Il y va de l'avenir de très nombreux métiers qui s'apprennent sur le terrain, au contact des travailleurs et par la pratique.
Il y va de l'avenir de notre industrie, du secteur de la construction et de tout ce qui concourt à la réindustrialisation, en particulier celle de notre pays. Alors que la formation professionnelle prend l'eau de toutes parts, que les centres de formation ferment faute de moyens, que l'enseignement professionnel tire la langue, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 est une nouvelle attaque contre ce mode de formation. En effet, la baisse des exonérations de cotisations payées par l'apprenti se traduira par une perte de 100 à 180 euros par mois, ce qui représente jusqu'à 20 % du salaire d'un jeune de 16 ans en première année d'apprentissage.
Cette attaque contre la formation des travailleurs, des jeunes en particulier, n'est pas nouvelle. Elle s'inscrit dans une longue succession de reculs sociaux pour ce qui n'est rien d'autre que des économies de bout de chandelle. Ainsi, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 a assujetti à la CSG-CRDS la tranche des revenus des apprentis au-delà de 50 % du Smic. En d'autres termes, non contents d'être la fraction du monde du travail la moins bien payée, les apprentis se voient prélever depuis le mois de mars 2025 une cotisation supplémentaire sur la fraction de leur rémunération supérieure à 900 euros brut.
Pour notre part, nous défendons l'apprentissage et considérons la CSG-CRDS comme un impôt injuste, vous le savez, mes chers collègues. Autant de raisons qui nous conduisent à refuser cette disposition.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cette disposition a été adoptée l'année dernière et le débat a eu lieu à cette occasion. Vous comprendrez par conséquent que la commission des affaires sociales ne souhaite pas y revenir et émette un avis défavorable sur cet amendement.
Tout le monde ici défend l'apprentissage. Nous aurons l'occasion de débattre de ces questions lors de l'examen de l'article 9, comme vous le savez. Les annexes du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 et de celui pour 2026 contiennent de nombreux éléments d'appréciation sur l'ensemble des aides dont bénéficient les apprentis. Certes, je sais que ce n'est pas ce que vise cet amendement, mais il faut appréhender le sujet dans sa globalité.
Il me semble que nous devons tendre à rapprocher les droits des apprentis de ceux des stagiaires, des intérimaires, voire de l'ensemble des salariés, même ceux qui sont à temps partiel. Dans ces conditions, il est bien normal que les cotisations soient corrélées aux droits sociaux dont les apprentis bénéficient.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je formulerai deux remarques.
Sur la forme, cet amendement est rédigé de telle sorte que son adoption entraînerait l'effet inverse de celui que recherchent leurs auteurs. En effet, 100 % du revenu des apprentis serait assujetti à la CSG-CRDS.
Sur le fond, l'année dernière, à la suite d'un travail collectif, nous avons décidé d'assujettir à la CSG-CRDS 50 % du revenu. Désormais, le débat porte sur les cotisations, comme l'a rappelé la rapporteure générale. Je vous propose que l'on s'en tienne à l'existant.
Au regard de l'erreur de rédaction que j'ai signalée, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1172.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1673, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa du I de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « une ».
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à plafonner l'abattement forfaitaire de 1,75 % sur l'assiette de la CSG-CRDS au titre des frais professionnels à une fois le plafond annuel de la sécurité sociale (Pass), et non à quatre fois, comme c'est actuellement le cas. Au 1er janvier 2026, cela représenterait plus de 16 000 euros brut mensuels.
Un abattement sur de tels niveaux de revenus paraît excessif et inefficace. S'agit-il vraiment d'une mesure de soutien au pouvoir d'achat ?
Nous ne remettons pas en cause l'abattement de 1,75 %. Nous demandons en revanche le réajustement du plafond d'application à une fois le Pass, lequel sera fixé à 48 060 euros annuels au 1er janvier 2026. Cela permet de garantir que l'abattement demeure un avantage pour les salariés sans pour autant profiter de manière disproportionnée aux revenus les plus élevés.
Cette mesure n'est pas seulement technique, elle est de fraternité et de justice. La sécurité sociale n'est pas une simple institution administrative, elle est un pacte collectif, un engagement entre tous ceux qui participent au financement de la solidarité et ceux qui en bénéficient. Pour que ce pacte perdure, chacun doit contribuer à la hauteur de ses moyens.
Le plafonnement de l'abattement permet ainsi de dégager les ressources supplémentaires pour la branche autonomie, conformément à ce que propose le rapport Vachey, et d'assurer 150 millions d'euros pour soutenir cette branche essentielle. Dans un contexte de déficit persistant, nous pensons que chaque contribution compte pour maintenir nos services sociaux et garantir l'accès à la santé et à la protection sociale pour tous.
Cet amendement a donc pour objet de rééquilibrer un avantage fiscal et de faire en sorte que chacun participe de manière juste au financement de notre système de protection, tout en préservant les revenus modestes et moyens.
M. le président. L'amendement n° 928, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa du I de l'article L. 136-2 du code de la sécurité́ sociale, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « deux ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à plafonner l'abattement de 1,75 % sur l'assiette de la CSG-CRDS au titre des frais professionnels à deux fois le plafond du Pass, contre quatre fois aujourd'hui. Nous sommes donc plus raisonnables que les auteurs de l'amendement n° 1673 !
Toutefois, ma collègue a raison, le rapport Vachey intitulé La Branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement préconise un abattement limité à un Pass. Je rappelle que ce rapport a pour objet de fournir des pistes de financement pour la branche autonomie, qui entre en déficit faute de mesures de ce type : « Le plafonnement à quatre Pass de cet abattement pour frais professionnels conduit à offrir un avantage en réduction de la CSG et de la CRDS pour des salariés ayant des rémunérations élevées. »
Comme nous sommes soucieux de fournir des leviers de financement à la branche autonomie et aux comptes sociaux, nous tenons compte de la préconisation du rapport Vachey tout en limitant l'effet en plafonnant l'abattement à deux fois le Pass. En ce sens, il s'agit presque d'un amendement de repli par rapport à celui qui vient d'être défendu.
Cette disposition me semble raisonnable. Il est temps de retenir les pistes de financement contenues dans le rapport Vachey.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Ce débat est loin d'être inintéressant, puisqu'il s'agit de savoir comment la CSG, qui n'est pas progressive, pourrait notamment encourager le travail des personnes aux revenus les plus moyens, voire modestes.
Toutefois, ne faire que baisser le plafond ne serait pas un très bon signal à envoyer aux travailleurs. On aurait pu proposer de baisser le plafond, tout en augmentant le taux pour les ménages qui ont un moindre revenu. Une telle réforme permet une bascule intéressante, car elle crée plus de justice sociale, dans la logique de l'abattement tel qu'il existe, et donne un plus grand gain aux ménages les moins rémunérés.
Mesdames, messieurs les sénateurs, depuis l'ouverture de nos travaux ce matin, nous esquissons les pistes d'une réforme assez profonde du financement de la sécurité sociale ; la disposition dont nous débattons en fait partie. Toutefois, il me semble qu'elles auront davantage leur place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2027 que dans celui que nous examinons aujourd'hui.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Tout de même, madame la ministre !
Le plafonnement à quatre Pass n'a pas toujours existé. Il a été introduit dans la loi de finances pour 2011. Aujourd'hui, la situation n'est plus la même !
Les mesures que nous proposons, nous qui siégeons à la gauche de cet hémicycle, visent à préserver les revenus bas ou moyens. Une mesure prévoyant un abattement jusqu'à deux fois le Pass concernera une grande majorité des salariés, même si je n'ai pas de statistiques à produire. Nous cherchons donc à ce que cette mesure soit la plus redistributive possible.
À l'inverse, le gel des pensions de retraite concerne tout le monde ! Il n'a aucun effet redistributif – on en reparlera, notamment en abordant ses effets sur le revenu des ménages, puisque c'est plus pénalisant pour certains déciles.
Parce que la solidarité participe de l'esprit de la sécurité sociale, les mesures que nous votons doivent viser à réduire les inégalités, à lutter contre la pauvreté et à avoir des effets redistributifs.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1673.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 928.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1648, présenté par M. Chantrel, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon et Chaillou, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre 6 du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le I ter de l'article L. 136-6, il est inséré un quater ainsi rédigé :
« I quater. – Par dérogation aux I et I bis du présent article, ne sont pas redevables de la contribution les personnes, fiscalement domiciliées dans un pays autre que ceux mentionnés au premier alinéa du I ter, qui relèvent en matière d'assurance maladie d'une législation d'un pays étranger et qui ne sont pas à la charge d'un régime obligatoire de sécurité sociale français.
« Pour l'application du premier alinéa du présent I quater aux gains mentionnés à l'article 150-0 B bis du code général des impôts et aux plus-values mentionnées au I de l'article 150-0 B ter du même code, la condition d'affiliation à un autre régime obligatoire de sécurité sociale s'apprécie à la date de réalisation de ces gains ou plus-values. » ;
2° Après le I ter de l'article L. 136-7, il est inséré un I quater ainsi rédigé :
« I quater. – Par dérogation aux I et I bis, ne sont pas redevables de la contribution les personnes, fiscalement domiciliées dans un pays autre que ceux mentionnés au premier alinéa du I ter, qui relèvent en matière d'assurance maladie d'une législation d'un pays étranger et qui ne sont pas à la charge d'un régime obligatoire de sécurité sociale français.
« L'établissement payeur mentionné au 1 du IV ne prélève pas la contribution assise sur les revenus de placement dès lors que les personnes titulaires de ces revenus justifient, selon des modalités définies par décret, des conditions définies au premier alinéa du présent I quater.
« En cas de prélèvement indu par l'établissement payeur, ce dernier peut restituer le trop-perçu à la personne concernée et régulariser l'opération sur sa déclaration ou la personne concernée peut solliciter auprès de l'administration fiscale la restitution de la contribution prélevée par l'établissement payeur.
« La contribution assise sur les plus-values mentionnées au 2° du I n'est pas due dès lors que les personnes titulaires de ces plus-values justifient, selon des modalités définies par décret, des conditions définies au premier alinéa du présent I quater. »
II. – À la première phrase du I de l'article 16 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, les mots : « au I ter » sont remplacés par les mots : « aux I ter et I quater ».
III. – Le présent article s'applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2022 et aux plus-values réalisées au titre de cessions intervenues à compter de cette même date.
IV. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Yan Chantrel.
M. Yan Chantrel. Cet amendement a un objectif simple : rétablir l'équité fiscale entre les Français établis hors de France.
En 2019, à la suite d'une jurisprudence européenne, le Gouvernement s'est trouvé dans l'obligation d'exonérer de CSG-CRDS les personnes affiliées à un régime de sécurité sociale d'un État de l'Espace économique européen et de la Suisse. La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a jugé anormal que ces concitoyens établis hors de France payent la CSG-CRDS alors qu'en vertu du principe de territorialité ils ne peuvent bénéficier de la sécurité sociale.
Depuis lors, l'assujettissement à la CSG-CRDS est vécu comme une profonde injustice par nos compatriotes installés dans le reste du monde, d'autant plus que certains d'entre eux sont, par ailleurs, contraints de cotiser à des régimes de sécurité sociale obligatoire à l'étranger ou de cotiser à la Caisse des Français de l'étranger. Ils ne comprennent pas pourquoi ils continuent à supporter un impôt qui ne concerne qu'une partie des non-résidents uniquement en fonction de leur lieu de résidence. Cela va à l'encontre du principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt.
C'est pourquoi cet amendement vise, par souci de justice, à étendre la suppression de la CSG-CRDS sur les revenus du capital à l'ensemble des non-résidents.
Je défends d'autant plus volontiers cette mesure de justice que j'ai proposé une solution à l'occasion d'un amendement précédent, à savoir flécher une partie de cette taxe vers la mission de service public de la CFE. Je suis donc cohérent. À partir du moment où le Gouvernement ne prend pas cette décision, il faut supprimer cette mesure d'injustice. Ce qui est injuste au sein de l'Espace économique européen l'est tout autant en dehors.
M. le président. L'amendement n° 345 rectifié bis, présenté par Mmes Renaud-Garabedian et Briante Guillemont et MM. Ruelle, D. Laurent, H. Leroy et Séné, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre 6 du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le I bis de l'article L. 136-6 est complété par les mots : « et qui ne justifient pas d'avoir déjà été domiciliées fiscalement en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts pendant une durée cumulée d'au moins cinq années, que ces années soient consécutives ou non » ;
2° Le I bis de l'article L. 136-7 est complété par les mots : « et qui ne justifient pas d'avoir déjà été domiciliées fiscalement en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts pendant une durée cumulée d'au moins cinq années, que ces années soient consécutives ou non ».
II. – Le 1° du I s'applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2026.
III. – Le 2° du I s'applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2026.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
L'amendement n° 344 rectifié bis, présenté par Mmes Renaud-Garabedian et Briante Guillemont et MM. Ruelle, D. Laurent, H. Leroy et Séné, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre 6 du titre III du livre I du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le I bis de l'article L. 136-6 est complété par les mots : « et qui ne justifient pas d'avoir été assujetties, pendant une durée cumulée d'au moins cinq années, à la contribution sociale généralisée prévue au présent article ou à la contribution pour le remboursement de la dette sociale prévue à l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, lorsqu'elles étaient fiscalement domiciliées en France, que ces années soient consécutives ou non. » ;
2° Le I bis de l'article L. 136-7 est complété par les mots : « qui ne justifient pas d'avoir été assujetties, pendant une durée cumulée d'au moins cinq années, à la contribution sociale généralisée prévue au présent article ou à la contribution pour le remboursement de la dette sociale prévue à l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, lorsqu'elles étaient fiscalement domiciliées en France, que ces années soient consécutives ou non. »
II. – Le 1° du I s'applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2026.
III. – Le 2° du I s'applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2026.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, pour présenter ces deux amendements.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Madame la ministre, pourquoi les Français établis dans les pays extracommunautaires restent-ils soumis à la CSG et à la CRDS, alors que les Français résidant au sein de l'Espace économique européen en sont exonérés ?
Vous me répondrez que la CSG-CRDS est un impôt. Pourtant, socialement, économiquement et fonctionnellement, il s'agit bien d'un prélèvement social. La France défend donc la thèse qu'un prélèvement social n'en est pas un.
Vous me répondrez également que cette exonération coûte 300 millions d'euros. Les conditions d'application de la mesure que je propose – soit avoir été assujetti à la CSG et à la CRDS pendant cinq ans, soit avoir été domicilié fiscalement en France pendant cinq ans – réduiront drastiquement le nombre de contribuables concernés, tout en écartant les profils des investisseurs et des spéculateurs.
Vous répondrez évidemment défavorablement à mes amendements, bien qu'ils soient mesurés, équilibrés, sécurisés et raisonnables.
Madame la ministre, à défaut d'émettre un avis favorable, seriez-vous prête à envisager une étude d'impact pour que l'on connaisse le coût exact de ce que je propose, en fonction des deux versions que j'ai retenues ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ces amendements visent à exonérer l'ensemble des non-résidents, qu'ils soient Français ou non, du paiement de la CSG et de la CRDS sur les revenus du patrimoine qu'ils perçoivent en France.
L'objet de l'amendement n° 1648 ne fixe pas de conditions particulières ; celui de l'amendement n° 345 rectifié bis soumet la mesure à une domiciliation fiscale en France d'au moins cinq ans ; celui de l'amendement n° 344 rectifié bis la soumet à un assujettissement à la CSG-CRDS d'au moins cinq ans.
Une telle mesure est régulièrement présentée à l'Assemblée nationale et au Sénat – très souvent d'ailleurs, la position de la commission n'est pas suivie. (Sourires.)
Les partisans de ces amendements mettent en avant le fait que les Français résidant hors de France paient la CSG et la CRDS s'ils vivent hors de l'Union européenne, alors que ce n'est pas le cas s'ils vivent en son sein. Ce traitement différent, alors que les situations sont voisines, suscite un sentiment d'injustice que je partage.
Toutefois, il faut rappeler que cette différence n'est évidemment pas voulue par les pouvoirs publics. Elle vient du fait que, selon un arrêt de 2015 de la Cour de justice de l'Union européenne, la France doit appliquer une telle exonération dans le cas des Français vivant dans l'Union européenne.
Dans ces conditions, pourquoi n'avoir pas décidé d'exonérer aussi les Français vivant en dehors de l'Union européenne ?
Trois raisons l'expliquent.
Premièrement, la CSG et la CRDS ne sont pas des cotisations qui créent des droits : ce sont des impôts qui ne créent pas de droits. Où s'arrêtera-t-on si l'on commence à exonérer de CSG et de CRDS les Français vivant hors de l'Union européenne ? Pourquoi ne pas les exonérer aussi de l'impôt sur le revenu ? Après tout, ils utilisent moins les routes ou les écoles françaises !
Je sais que, pas plus que les années précédentes, je ne convaincrai les auteurs de ces amendements avec cet argument.
Deuxièmement, il n'est pas du tout évident qu'il soit juridiquement possible d'exonérer les Français sans exonérer aussi les étrangers. Par exemple, on peut subordonner l'exonération à l'assujettissement à un régime français obligatoire d'assurance maladie. Reste que le lien avec l'exonération de CSG ou de CRDS n'est pas évident. Pour cette raison, il est douteux qu'il survive à un recours devant le juge constitutionnel. Pourra-t-on vraiment expliquer à nos compatriotes que tel ou tel étranger fortuné, voire très fortuné – il en existe –, est exonéré de CSG et de CRDS sur ses investissements en France ?
Troisièmement, j'avancerai un argument financier, essentiel dans le contexte actuel. Comme vous le savez, le coût de cette mesure est estimé à environ 300 millions d'euros. La situation des finances sociales est dramatique. Personnellement, je ne peux pas défendre une telle baisse des recettes de la sécurité sociale.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je partage les arguments tout à fait clairs avancés par Mme la rapporteure générale.
Je rappelle le droit.
Toute personne qui reçoit des revenus du capital de source française est soumise aux prélèvements sociaux, quel que soit son domicile. Voilà pour le principe.
La CJUE a décidé que l'on ne pouvait pas payer pour deux régimes obligatoires de sécurité sociale. Par conséquent, dès lors que l'on réside dans l'Union européenne, comme on est couvert par un régime de sécurité sociale, on ne paye pas deux fois. Aussi, dans le strict périmètre de l'Union européenne, de l'Espace économique européen et de la Suisse, cette exonération existe.
Revenons au principe : tout revenu du capital de source française est soumis à la CSG et aux prestations sociales.
C'est parce qu'il existe des régimes obligatoires de sécurité sociale européens que cette exonération a été prévue pour le seul périmètre européen. Vous souhaitez qu'il en soit de même pour les Français établis à Singapour, aux États-Unis ou au Canada. Voilà un raisonnement qui me paraît difficile à défendre.
Comme l'a expliqué la rapporteure générale, la CSG est un impôt – c'est la position du Conseil constitutionnel. Dans ces conditions, il faudrait logiquement supprimer l'imposition de tous les autres types de revenus.
Imaginons que, cette année, ces amendements soient adoptés et que les revenus du capital d'un résident extra-européen ne soient plus assujettis à la CSG. L'année prochaine, vous réclamerez qu'il n'y ait plus d'impôts sur le revenu, éventuellement qu'il n'y ait plus d'impôts fonciers, puis plus d'impôts sur les loyers ?
Vous le voyez, tout cela provoque un effet domino qui ne tient qu'à cet état de fait : en Europe, ce qui compte, ce n'est pas la domiciliation, c'est le fait d'être contributeur à un régime obligatoire de sécurité sociale.
Je vous mets en garde contre les effets en chaîne de ces amendements, dont l'objet semble à première vue évident et plein de bon sens, mais dont l'adoption ferait qu'un Français établi hors de France qui aurait des revenus de source française ne paierait plus aucun impôt.
Je sais que je ne convaincrai pas les auteurs de ces amendements. En revanche, je cherche à convaincre tous les autres que, l'année prochaine, légitimement, avec une logique implacable, il faudrait exonérer d'impôt tous les revenus de source française des Français non-résidents. Voilà qui me paraît bien dangereux.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1648.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 345 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 344 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1490, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.– Les IV et IV bis de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale sont rétablis dans la rédaction suivante :
« IV.– Par dérogation au I, sont assujettis à la contribution sociale :
« 1° Au taux de 6,6 % les revenus mentionnés au II de l'article L. 136-1-1 du présent code perçus par les personnes dont les revenus de l'avant-dernière année, définis au IV de l'article 1417 du code général des impôts sont inférieurs à 30 271 € pour la première part de quotient familial, majorés de 6 028 € pour chaque demi-part supplémentaire.
« 2° Au taux de 10,6 % les revenus mentionnés au II de l'article L. 136-1-1 du présent code perçus par les personnes dont les revenus de l'avant-dernière année, définis au IV de l'article 1417 du code général des impôts excèdent 72 560 € pour la première part de quotient familial, majorés de 6 028 € pour chaque demi-part supplémentaire.
« IV bis.– Les seuils mentionnés aux IV sont revalorisés au 1er janvier de chaque année, conformément à l'évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, constatée pour l'avant-dernière année et arrondis à l'euro le plus proche, la fraction d'euro égale à 0,50 étant comptée pour 1. »
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Il s'agit d'ouvrir le débat sur la progressivité de la CSG sur les revenus d'activité.
En ce sens, nous proposons un taux réduit de CSG de 6,6 % pour les personnes dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 30 271 euros, soit environ 1,4 Smic annuel, et un taux majoré de 10,6 % pour les hauts revenus supérieurs à l'équivalent du neuvième décile du niveau de vie moyen, soit 72 560 euros, selon l'étude Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA.
Rappelons que la CSG est déjà progressive sur les revenus de remplacement, notamment les retraites, avec quatre seuils : exonération, taux réduit, taux médian, taux plein.
Aujourd'hui, un salarié au Smic et un salarié percevant un très haut revenu payent le même taux de CSG. Une progressivité permettrait d'aligner la contribution sur le niveau de vie comme pour l'impôt sur le revenu.
Par ailleurs, une telle progressivité permettrait aussi de réduire les prélèvements obligatoires sur les bas salaires, comme certains le proposent ici.
Au fond, c'est une mesure de justice sociale que nous portons. S'il s'agit, évidemment, d'un amendement d'appel, madame la ministre, j'espère qu'il nous permettra, d'une part, d'obtenir des indications chiffrées sur l'éventuel rendement qu'entraînerait la progressivité, d'autre part, d'ouvrir un chantier avec les partenaires sociaux sur une distribution plus juste via la CSG.
M. le président. L'amendement n° 1759 rectifié, présenté par M. Mérillou, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le II est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° a) Les revenus d'activité définis au premier alinéa du I de l'article L. 136-1-1 des personnes dont les revenus fiscaux définis au IV de l'article 1417 du code général des impôts perçus l'avant-dernière ou l'antépénultième année n'excèdent pas 20 764 € pour la première part de quotient familial sont assujettis à la contribution :
« – au taux de 2,5 % lorsque ces revenus fiscaux sont inférieurs à 16 014 € pour la première part de quotient familial ;
« – au taux de 3,25 % lorsque ces revenus fiscaux sont compris entre 16 014 € et 16 610 € pour la première part de quotient familial ;
« – au taux de 4 % lorsque ces revenus fiscaux sont compris entre 16 610 € et 17 161 € pour la première part de quotient familial ;
« – au taux de 4,75 % lorsque ces revenus fiscaux sont compris entre 17 161 € et 17 845 € pour la première part de quotient familial ;
« – au taux de 5,5 % lorsque ces revenus fiscaux sont compris entre 17 845 € et 18 371 € pour la première part de quotient familial ;
« – au taux de 6,25 % lorsque ces revenus fiscaux sont compris entre 18 371 € et 19 048 € pour la première part de quotient familial ;
« – au taux de 7 % lorsque ces revenus fiscaux sont compris entre 19 048 € et 19 556 € pour la première part de quotient familial ;
« – au taux de 7,75 % lorsque ces revenus fiscaux sont compris entre 19 556 € et 20 227 € pour la première part de quotient familial ;
« – au taux de 8,5 % lorsque ces revenus fiscaux sont compris entre 20 227 € et 20 764 € pour la première part de quotient familial.
« b) Les montants mentionnés au 3° sont majorés de 2 971 € pour chaque demi-part de quotient familial supplémentaire. »
2° Au premier alinéa du III, après la référence : « L. 136-1-2 », sont insérés les mots : « du présent code » ;
3° Au III ter, les mots : « aux III et III bis » sont remplacés par les mots : « au 3° du II, au III et au III bis ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Corinne Féret.
Mme Corinne Féret. Je défends cet amendement au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Depuis quatre ans, l'inflation cumulative atteint près de 15 % et frappe durement nos concitoyens. Pour l'alimentation, elle est de plus de 25 % ; pour le gazole, de plus de 18 %.
Dans nos foyers, ce ne sont pas des pourcentages, ce sont des arbitrages douloureux : se chauffer moins, se déplacer moins, réduire les achats essentiels. Ce décrochage du pouvoir d'achat entraîne un phénomène, documenté, de déconsommation, qui touche d'abord les ménages modestes. En 2023, la consommation n'a progressé que de 0,6 % et d'à peine plus en 2024. Cette crise du porte-monnaie se répercute sur l'économie tout entière, jusqu'aux recettes de l'État : la TVA a rapporté 1,4 milliard d'euros de moins l'an dernier.
Par cet amendement, nous proposons donc de redonner du souffle aux revenus modestes, entre 1 et 1,4 Smic, en rendant la CSG enfin progressive sur les revenus d'activité. Aujourd'hui, que l'on gagne 1 Smic ou 4, on paie 9,2 % de CSG. C'est injuste et cela pèse sur les Français qui travaillent et peinent malgré tout à joindre les deux bouts.
Nous proposons un barème en dix tranches, débutant à 2,5 % au niveau du Smic et progressant jusqu'à 8,5 %, avant de retrouver le taux plein actuel, à 1,4 Smic.
Très concrètement, pour une mère seule au Smic avec un enfant, cela représente 900 euros de gain par an. Pour un couple avec deux enfants, dont chaque membre gagne 1 920 euros, le gain s'élève à 1 500 euros par an.
Ce n'est ni un chèque ponctuel ni une rustine ; c'est un gain immédiat et durable de pouvoir d'achat pour ceux qui en ont le plus besoin. C'est aussi une mesure qui, en réduisant ainsi le coût du travail dans les secteurs exposés à la concurrence internationale, soutient l'emploi.
C'est pourquoi, mes chers collègues, nous vous invitons à voter cet amendement pour garantir plus de justice sociale et fiscale, et pour protéger nos travailleurs qui en ont le plus besoin.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame Souyris, vous ouvrez là un grand chantier.
Nous en avons déjà un peu débattu tout à l'heure, au sujet des taux de CSG. Le cas présent est quelque peu différent, puisque vous entendez instaurer une CSG progressive sur les revenus d'activité.
Si toutes ces questions sont en effet très importantes, dans la mesure où il s'agit de savoir comment nous finançons notre protection sociale, je vous le dis très franchement : ce n'est pas au travers de ce PLFSS que nous pourrons obtenir un résultat cohérent.
Il nous faut réfléchir, en lançant soit des assises, soit des états généraux – ou que sais-je encore… –, à la manière de financer la protection sociale en France, alors que l'environnement a totalement changé et que de nombreux facteurs sont à prendre en compte.
La mesure que vous proposez, si nous n'avons pas eu le temps de la chiffrer précisément, coûterait en réalité plusieurs milliards d'euros. Je ne vois pas très bien l'intérêt – il faudra peut-être en débattre dans d'autres lieux, comme je le disais – d'avoir deux impôts progressifs, c'est-à-dire la CSG et l'impôt sur le revenu, car nous nous retrouverions avec deux modes de calcul semblables. La complémentarité de ces deux impositions, différentes parce que non basées sur les mêmes assiettes, était finalement intéressante.
Il serait donc plus lisible et moins coûteux en gestion de modifier pour le moins le barème de l'impôt sur le revenu.
J'émets donc un avis défavorable sur votre amendement, madame Souyris, ainsi que sur l'amendement n° 1759 rectifié, mais la question que vous posez est tout aussi pertinente que toutes celles que nous avons évoquées ce matin sur les moyens à mettre en œuvre pour financer la sécurité sociale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Madame la sénatrice, voilà un amendement à 20 milliards d'euros ! (Sourires sur plusieurs travées.) Je vous remercie donc d'avoir précisé qu'il s'agissait d'un amendement d'appel ; sinon nous aurions eu du mal à comprendre comment le dispositif s'articulait.
Toutefois, cet amendement n° 1490 est intéressant.
En effet, contrairement à beaucoup d'autres propositions dont on a pu débattre au sujet de la CSG progressive, il est rédigé de façon à permettre au dispositif prévu de fonctionner. Je le dis parce que, souvent, fleurissent des propositions pleines d'imagination sur les taux et les barèmes qui ne sont pas opérantes.
Concrètement, pour rendre la CSG progressive, il faut regarder les revenus du ménage, puisque nous avons en France une fiscalité qui est, lorsqu'on la différencie, établie par foyer. Nous procéderions donc comme pour les retraités : nous regarderions la situation familiale du foyer l'année n-2, ainsi que ses revenus, et nous en déduirions le taux de CSG à appliquer, dans le cadre du système de prélèvement à la source opéré sur les feuilles de paie, avec des acomptes contemporains.
Pourquoi n-2 et non n-1, me direz-vous ? Parce que le système doit être opérationnel au 1er janvier de l'année n et qu'à la date du vote du PLFSS – le réveillon n'est pas encore passé ! – nous ne disposons pas de la description exacte de chaque situation familiale au 31 décembre de l'année n-1. L'année n-2 est donc la dernière année pleine et complète connue. Ainsi, pour le 1er janvier 2026, par exemple, le taux de CSG que vous paieriez dépendrait de votre revenu total familialisé de l'année 2024.
Cela fonctionne pour les retraités. La situation est quelque peu compliquée au cours des deux premières années, car, les revenus d'activité étant plus importants que les pensions de retraite, la CSG est calculée sur la base de taux plus élevés. Au bout de la deuxième année de retraite, cependant, les choses rentrent dans l'ordre. Par la suite, les revenus des personnes sont plutôt stables et le système l'est donc également.
Pour les actifs, la situation est plus complexe, car plus changeante, au gré des événements de la vie – mariage, divorce, arrivée d'enfants…
Pour nos concitoyens, ce système, qui peut fonctionner sur le plan constitutionnel et qui respecte tous les droits, signifierait potentiellement que des taux de CSG, puisque ce sont des plafonds nets et finalement assez différents, pourraient varier beaucoup d'une année à l'autre.
Si je reprends vos paramètres et vos tranches, nous passerions d'une exonération totale à un taux de 6,6 %, puis de 10,6 %, soit des variations potentielles de 6 ou de 4 points.
Madame la sénatrice, sur cet amendement d'appel, je tenais à vous fournir une réponse complète, car le sujet est intéressant. Il faudrait en réalité créer beaucoup plus de tranches pour lisser davantage les paliers si nous voulions entrer dans ce genre de régime, et bien expliquer à nos concitoyens ce que cela signifie, lorsque l'on est actif, d'avoir une fiscalité qui dépend de sa situation à l'année n-2.
J'ajouterai un dernier élément au débat. Nous voulons créer une allocation sociale unique. Nous avons passé plus de cinq ans, et je salue Mme la ministre Bourguignon qui connaît cela par cœur, à vouloir contemporanéiser les aides sociales et le régime fiscal. À cet égard, la réforme du prélèvement à la source a apporté un vrai soutien à nombre de nos concitoyens, dans la mesure où le taux d'imposition s'adapte à la situation présente.
Chacun se souvient de ce que signifiait un impôt sur le revenu calculé avec un décalage d'un an ou, parfois, de deux ans. Idem pour les aides personnelles au logement (APL), décalées de deux ans : en cas de crise, on était aidé pendant deux ans, puis, subitement, on ne recevait plus rien.
La contemporanéisation est donc un bon principe. Or la réforme que vous proposez, c'est, pour le coup, l'anti-contemporanéisation, parce qu'elle nous ramène deux ans en arrière dans la vie que nous avions.
Telles sont les raisons pour lesquelles votre proposition, si elle n'est pas inintéressante, nécessite, pour être mise en œuvre, d'y réfléchir à deux fois. Elle a aussi de nombreux effets assez contradictoires avec des évolutions que nous avons portées collectivement et dont nous voyons aujourd'hui, me semble-t-il, les bénéfices.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 1490 ainsi que sur l'amendement n° 1759 rectifié.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Certes, nous l'entendons, la mise en œuvre de notre proposition entraînerait un certain nombre d'obstacles. Mais revenons-en aux faits : un tel prélèvement serait proportionnel, donc non dégressif, ce qui est déjà un point positif, mais sans être non plus totalement redistributif. Il se situe entre les deux. Cela reviendrait à appliquer, de façon partielle, le principe fondamental de la sécurité sociale, qui veut que chacun cotise selon ses moyens.
Différentes propositions peuvent être envisagées. J'avais moi-même déposé un autre amendement, qui a dû être déclaré irrecevable, afin d'envisager la possibilité de laisser la CSG telle qu'elle est, avec cet entre-deux entre la dégressivité et la redistribution, et d'ajouter un prélèvement supplémentaire pour les revenus très élevés. Il s'agissait d'introduire ce qui existe déjà dans la sécurité sociale : la notion de plafond et de cotisation plafonnée ou déplafonnée, avec les tranches A, B et C. Tous ces outils existent déjà, puisque les revenus sont pris en compte sur la base du Smic ou du plafond de la sécurité sociale.
On pourrait donc très bien reprendre cette notion de plafond, créer une ligne supplémentaire et, sur les tranches très supérieures – la tranche C correspondant, je le rappelle, à huit fois le plafond –, appliquer un prélèvement supplémentaire. Cela permettrait d'assurer la redistribution.
Il n'est absolument pas question de fusionner la CSG avec l'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP), comme certains le proposent. L'IRPP constitue une recette de l'État, destinée à financer les routes ou l'éducation, par exemple, tandis que la CSG est affectée à la sécurité sociale.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claire Carrère-Gée, pour explication de vote.
Mme Marie-Claire Carrère-Gée. J'apporterai un bref complément à tous les éléments techniques et très justes fournis par Mme la ministre, en m'adressant aux sénateurs de gauche pour leur rappeler les principes fondateurs de la sécurité sociale et les risques de rupture du contrat social qui seraient attachés au fait de rendre la CSG progressive, à une époque où la situation de la sécurité sociale est tout de même très fragile.
Je le rappelle, la CSG a remplacé des cotisations qui n'ont jamais été progressives et qui étaient même, d'ailleurs, plafonnées : elles étaient proportionnelles. Il faut en rester à cet esprit pour des prestations qui, pour la maladie par exemple, sont versées en fonction de l'état de santé et non en fonction du fait que vous soyez riche ou pauvre.
Nous avons rendu le système très redistributif via des prestations de plus en plus soumises à condition de ressources, notamment pour la famille. Prenons garde à ne pas fragiliser le contrat social en agitant des idées de cette nature.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1490.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1759 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Nous revenons au cours normal de la discussion des articles.
Article 8 octies (nouveau)
Avant le 1er avril 2026, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d'évaluation de l'article 15 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018. Ce rapport évalue notamment la fiabilité du « système national version 2 » sur lequel repose le recouvrement des cotisations sociales des travailleurs indépendants au titre de l'ancien régime social des indépendants et du régime actuel ainsi que les difficultés persistantes rencontrées par les travailleurs indépendants, en particulier en outre-mer, qui se voient réclamer des sommes indues. Il analyse les éléments liés à l'acquisition de la personnalité morale par le régime social des indépendants et les entités se présentant comme venant à ses droits et il propose des solutions permettant un règlement amiable de cette situation.
M. le président. L'amendement n° 603, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Si l'objet du rapport demandé au Gouvernement au travers de cet article est, encore une fois, tout à fait pertinent, je reprendrai la réponse habituelle que nous donnons à toute demande de cette nature : avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 603.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 8 octies est supprimé.
Après l'article 8 octies
M. le président. L'amendement n° 1040 rectifié ter, présenté par MM. Rochette et Chasseing, Mme Lermytte, MM. Pellevat, V. Louault, Capus, Laménie, Chevalier, Grand, A. Marc, Brault, Wattebled, Dhersin et Ravier, Mmes Saint-Pé et Sollogoub et M. Houpert, est ainsi libellé :
Après l'article 8 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 3° de l'article L. 3312-3 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les travailleurs indépendants. Ces derniers peuvent se verser une prime exonérée d'impôt et de charges sociales d'un montant maximum de 5 000 euros par an. Les modalités de versement de cette prime sont définies par décret. »
II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte.
Mme Marie-Claude Lermytte. Par cet amendement, notre collègue Pierre Jean Rochette aborde la question du pouvoir d'achat, l'une des préoccupations majeures des Français.
La loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat a instauré pour les salariés la prime de partage de la valeur (PPV). Cette prime, en complément du salaire, est versée à la discrétion des employeurs.
Parallèlement, les travailleurs indépendants ne vont bénéficier que d'une baisse de leurs cotisations sociales. En 2020, ils étaient environ 3,8 millions à exercer une activité non salariée générant un chiffre d'affaires total de 80,4 milliards d'euros.
Les indépendants ne bénéficient ni de l'intéressement, ni de la participation, ni du treizième mois.
La possibilité de se verser une prime non fiscalisée, mais plafonnée, serait un excellent coup de pouce au pouvoir d'achat et un signal fort envoyé à cette catégorie socioprofessionnelle, qui représente 12 % de la population.
Il est ainsi proposé d'offrir aux indépendants la possibilité de se verser une prime défiscalisée, calquée sur le modèle de celle qui est versée dans le cadre de l'intéressement. Cette prime, versée une fois par an, serait plafonnée à 5 000 euros. Les modalités de versement seraient fixées par décret.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement porte sur le statut particulier des travailleurs indépendants, qui n'ont pas les mêmes possibilités que d'autres travailleurs, notamment salariés.
Si je peux comprendre son objet, il créerait, s'il était adopté, une disposition qui défiscalise et désocialise. Le temps n'est pas venu de faire une telle proposition dans le contexte actuel des finances publiques.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Madame la sénatrice, une grande réforme du régime social des indépendants a eu lieu pour changer, vous le savez, la manière dont les cotisations sociales y étaient organisées. Je ne suis pas très à l'aise avec l'idée que, dans notre pays, un indépendant sans salarié – il ne s'agit donc pas d'un partage de la valeur – puisse se verser à lui-même une prime totalement exonérée. (Mme Raymonde Poncet Monge s'exclame.) C'est une approche étonnante.
En revanche, j'entends votre argument : il faut soutenir les indépendants, qui ont parfois des revenus modestes. Dans la catégorie des indépendants, il y a néanmoins toutes sortes de professions. Les avocats sont des indépendants, les notaires sont des indépendants, les experts-comptables peuvent être des indépendants. Il me semble donc préférable d'adopter une approche un peu plus sociale.
Vous savez qu'il existe des réductions des taux de cotisations maladie et famille ciblées sur les bas revenus pour les indépendants. Lorsque les revenus d'activité sont grevés de charges, ces taux sont d'ailleurs plus faibles. Il me paraît donc préférable de conserver des barèmes en fonction des revenus.
L'idée que tous les indépendants de France puissent se verser à eux-mêmes 5 000 euros sans aucune charge ni aucun impôt correspond à une vision qui n'est pas exactement celle que, en général, nous défendons collectivement ici.
Avis défavorable.
Mme Laurence Rossignol. Ils ne s'appellent pas « Les Indépendants » par hasard !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Peut-être cette proposition vient-elle du fait que d'aucuns s'imaginent que la prime de partage de la valeur concerne 100 % des salariés. Mais ce n'est pas du tout le cas : elle ne bénéficie qu'à quelques millions d'entre eux. Nous avons évoqué le montant moyen hier : il s'élevait, me semble-t-il, à 2 500 euros, mais pour 8 millions de salariés, ce qui est loin de concerner tout le monde.
Pour les indépendants, qui se versent eux-mêmes une rémunération, nous allons avoir un taux de recours de 100 % et à hauteur de 5 000 euros désocialisés. C'est proprement évident.
Si l'on ne voit pas cette évidence, c'est parce que l'on s'imagine que la PPV concerne tous les salariés. Je peux vous dire que ce n'est pas le cas et que cette prime représente, dans les petites entreprises, des montants très faibles et, dans les grandes entreprises, des montants maximaux, mais réservés aux cadres « ++ ». Ce n'est donc pas possible de voter un tel amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1040 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 9
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
A. – L'article L. 131-6-4 est ainsi modifié :
1° Les trois derniers alinéas du I sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Le premier alinéa du présent article s'applique aux personnes qui relèvent de l'une des catégories mentionnées à l'article L. 5141-1 du code du travail, à l'exclusion des personnes mentionnées à l'article L. 642-4-2 du présent code, et aux personnes qui créent ou reprennent une entreprise implantée dans une commune relevant de l'une des zones mentionnées à l'article 44 quindecies A du code général des impôts. » ;
2° (Supprimé)
B et C. – (Supprimés)
II et III. – (Supprimés)
IV. – Le A du I entre en vigueur le 1er janvier 2026 et s'applique aux créations et reprises d'entreprise intervenant à compter de cette date.
V. – Les B et C du I entrent en vigueur au 1er janvier 2026 et s'appliquent aux cotisations et contributions dues pour les périodes d'activités courant à compter de cette date.
VI. – (Supprimé)
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, sur l'article.
M. Dominique Théophile. Sans entrer dans le détail de cet article qui traitait, dans sa version initiale du moins, d'un certain nombre de sujets, je dirai quelques mots simplement pour exprimer notre satisfaction de voir que les alinéas relatifs au régime de la Lodéom sociale, du nom de la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, ne font pas l'objet d'amendements de réintroduction. Je remercie à ce titre la commission des affaires sociales et, en particulier, Mme la rapporteure générale, d'avoir entendu nos arguments, puisque cette discussion a été intense à l'Assemblée nationale.
L'article prévoyait en effet plusieurs mesures dites de simplification, c'est-à-dire la suppression des trois barèmes existants et l'alignement des régimes de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy sur le régime commun. Il prévoyait surtout un rabot inacceptable, mesdames les ministres, de 350 millions d'euros, qui devait s'additionner à celui qui est proposé dans le projet de loi de finances.
Vous le savez, la Lodéom a vocation à corriger les déséquilibres structurels des territoires ultramarins et à soutenir des entreprises confrontées à des réalités très spécifiques, notamment en raison de l'insularité. Elle est aujourd'hui indispensable à leur survie. La hausse du coût du travail qu'une telle mesure ne manquerait pas d'engendrer serait tout simplement insoutenable.
Il n'en demeure pas moins que la très grande complexité de cette exonération de cotisations sociales est une réalité. Plus d'une déclaration sur deux est erronée ; cette réalité chiffrée a été récemment rappelée. Si les entreprises et les élus appellent de leurs vœux une réforme du dispositif, celle-ci doit être menée avec intelligence. Son impact doit être évalué territoire par territoire. Je sais le Gouvernement attentif à nos arguments.
Mesdames les ministres, mes chers collègues, soyez certains que nous resterons mobilisés sur ce dispositif et sur la menace du rabot tant que la question se posera en ces termes.
M. le président. L'amendement n° 1349 rectifié bis, présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Grosvalet, Guiol et Masset, Mme Pantel, M. Roux et Mme Girardin, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
ou une entreprise relevant d'un secteur stratégique pour l'économie française, selon des modalités définies par décret
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Cet amendement vise à préserver la capacité d'innovation et de développement économique dans les secteurs stratégiques.
L'article 9 recentre l'exonération maximale de cotisations patronales sur les seuls demandeurs d'emploi et publics vulnérables. Cette restriction risque toutefois d'affaiblir la dynamique entrepreneuriale dans des filières essentielles à notre souveraineté nationale, à savoir la transition énergétique, les technologies critiques, la santé, l'industrie ou encore certains secteurs identifiés comme prioritaires par l'État.
Pour éviter cet effet contre-productif, nous proposons de maintenir le niveau maximal d'exonération pour les créateurs et repreneurs d'entreprises intervenant dans ces secteurs stratégiques, qui seraient définis par décret.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. À ce stade de nos débats, sans remettre en cause votre agilité intellectuelle, que je sais grande, je voudrais vous rappeler en quoi consiste cet article 9 dans son état initial et dans l'état où il est revenu de l'Assemblée nationale.
Il s'agissait de rationaliser différentes exonérations spécifiques dans le cadre des dispositifs suivants : la Lodéom, dont Dominique Théophile nous a fait part, l'aide à la création ou à la reprise d'une entreprise (Acre), les aides aux apprentis et, enfin, les aides aux jeunes entreprises innovantes. L'objectif était de regarder précisément ce que ces aides étaient devenues au fil du temps. C'est d'ailleurs ce qui est présenté dans l'annexe 9 du présent PLFSS, document que je vous invite à consulter pour connaître la progression de toutes ces aides.
En l'occurrence, le texte est revenu de l'Assemblée avec beaucoup moins d'exigences, si je puis dire. Nous allons donc débattre de la nécessité de réintroduire ou non certaines dispositions relatives à certaines aides. Il me semble que, du texte de l'Assemblée nationale, seules les dispositions relatives à l'Acre avaient été maintenues. Ce matin, nous allons donc vous proposer d'en réintroduire d'autres.
Concernant la Lodéom, je suis d'accord avec vous, monsieur le sénateur, mais j'ai eu l'occasion d'en parler aussi avec tous les représentants des outre-mer, quels qu'ils soient. M. Victorin Lurel était également présent. Oui, les territoires d'outre-mer sont en difficulté. Ceux qui n'y ont pas vécu un tant soit peu ne peuvent pas identifier les difficultés rencontrées par les populations, avec, comme vous l'avez dit, des spécificités très particulières d'un territoire à l'autre.
Nous en avons beaucoup débattu, il n'est pas forcément opportun d'appliquer pareillement les aides demandées dans tous les territoires. C'est pour cette raison que j'appuie l'idée de ne pas revenir sur la Lodéom, sachant tout de même que l'Igas et l'IGF ont, dans un rapport, mis en avant un certain nombre d'éléments à corriger.
L'année dernière, lorsque nous avons débattu des allégements généraux, nous l'avons tous observé : ces dispositifs sont presque inextricables. Je demande donc au Gouvernement, à l'issue de ce rapport et compte tenu de l'évolution de la situation économique de ces territoires, de regarder comment avancer, aussi intelligemment, précisément et territorialement que possible.
Il convient de rendre ces dispositifs plus compréhensibles et, surtout, plus accessibles. En effet, dès lors que nous constatons qu'un barème n'a pratiquement pas été utilisé par les chefs d'entreprise, pourquoi le conserver ? Il faut absolument revenir à la table de négociations, sans changer le montant.
J'attire cependant votre attention, mes chers collègues sur le fait qu'un tel montant est important – il faut le reconnaître. La Nation apporte une contribution substantielle en faveur des territoires d'outre-mer. C'est légitime, mais cela représente une part importante pour le ministère des outre-mer, une grande partie de son budget n'étant pas consacrée à d'autres projets, qui pourraient être des actions innovantes ou menées en fonction des réalités climatiques que vous vivez.
Sur l'amendement proposé par M. Masset, la commission a émis un avis défavorable, car la définition d'un secteur stratégique est très large et, donc, susceptible de créer des pertes de recettes significatives pour la sécurité sociale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Monsieur le sénateur, il y a, me semble-t-il, une petite incompréhension sur ce qu'est le dispositif de l'Acre.
Ce n'est pas une aide à l'entreprise, c'est une aide aux personnes qui reprennent ou qui créent une activité. Il ne me paraît pas nécessaire dans notre pays, si le but est bien, dans ses dispositions initiales, d'aider des personnes à reprendre une activité ou à créer une entreprise, de la limiter à des secteurs stratégiques.
Ce que nous voulons, c'est que des demandeurs d'emploi, des jeunes, des personnes éloignées de l'emploi retrouvent une activité rémunératrice. Pourquoi ne promouvoir le dispositif que dans les secteurs stratégiques ? De nombreux secteurs sont tout à fait utiles à la vie quotidienne sans qu'ils doivent être classés comme stratégiques au sens où vous l'entendez. Cela constitue, à mon sens, la première difficulté de l'amendement que vous proposez.
La proposition du Gouvernement était que l'on puisse à un moment donné reconsidérer tout dispositif public en montrant pourquoi il existe. Ce n'est pas parce qu'il a un joli nom, qui sonne bien, qu'on n'a pas le droit de le recentrer ou d'y toucher.
Au fond, à force d'extensions successives, on a fait de l'Acre un dispositif de baisse de charges pour toute personne qui crée une entreprise. Or de nombreuses entreprises sont très profitables à l'instant même où elles sont créées ; et il y a des créateurs ou des repreneurs d'entreprises qui n'ont pas besoin de ce coup de pouce pour se lancer.
Le Gouvernement a donc fait le choix suivant : quand on est demandeur d'emploi, jeune, éloigné de l'emploi ou en situation de désinsertion, au RSA par exemple, et que l'on crée une entreprise, oui, dans ce cas, on a besoin d'un coup de pouce. Car l'on voit bien ce que signifie la création d'une activité qui, potentiellement, n'est pas tout de suite rentable : il faut reprendre pied dans un réseau, se refaire une clientèle…
Je n'ai rien contre les indépendants, mais, vous le savez bien pour le constater dans vos territoires, certaines activités indépendantes sont rentables dès le premier jour. Nul besoin alors de bénéficier d'une exonération de charges qui vous place dans une situation concurrentielle différente de votre voisin, qui, lui, est installé depuis dix ans et qui ne comprend pas pourquoi vous payez moins de charges que lui.
Le projet du Gouvernement consiste à recentrer un dispositif public sur les personnes qui en ont besoin, sans distinction sectorielle. Nous assumons le choix de le recentrer sur ceux qui sont les plus en difficulté. (Mme Nadia Sollogoub acquiesce.)
Un très long débat a eu lieu à l'Assemblée nationale sur les zonages. Le député Thierry Benoit, notamment, nous a beaucoup interrogés sur les zones de revitalisation rurale (ZRR). Je tiens à rappeler qu'il faut être toujours vigilant sur les zonages : s'ils sont parfois pertinents, ils peuvent aussi être contre-productifs.
Le débat avait notamment porté sur les jeunes. Un jeune, n'importe où dans le pays, ne va pas forcément être « fixé » dans la zone de revitalisation rurale où se situe son domicile. Il doit pouvoir partir de chez lui et aller créer son entreprise plus loin.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Elle a raison !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Il faut aussi que nous redonnions de la liberté dans notre pays.
En ce qui concerne l'installation des médecins, je le dis sous le contrôle de ma collègue ministre Stéphanie Rist, le zonage ne fonctionne pas. Je vois Mme Bourguignon qui acquiesce. En effet, tout le pays a besoin de médecins.
Nous avons créé des mécanismes très pervers, notamment sur les exonérations fiscales dans les zones de revitalisation rurale, qui durent cinq ans. Que fait un médecin au bout de quatre ans et demi ? Il cherche à aller dans une autre zone de revitalisation rurale pour continuer de bénéficier de l'exonération fiscale. (Murmures sur plusieurs travées. – M. Michel Masset approuve.) Tout cela, nous le constatons.
Mesdames, messieurs les sénateurs, cela ne veut pas dire, parce que je sens que mes propos éveillent un certain émoi dans l'hémicycle, qu'il faut tout supprimer, mais le zonage n'est pas nécessairement une politique efficace à moyen terme.
M. Daniel Fargeot. C'est pareil pour les zones franches.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Il peut être efficace à un moment donné, face à une situation très particulière, mais nous voyons bien qu'il est susceptible, à un moment donné, de devenir contre-productif.
Je voulais donc simplement rappeler tous ces éléments. Le Gouvernement considère qu'une telle aide à la création et à la reprise d'une entreprise doit être ciblée pour aider ceux qui en ont besoin et qu'il convient de sortir d'une logique qui, finalement, par extension, a dénaturé le dispositif et son objectif.
Vous pouvez donc être confiants sur le fait que ce que nous faisons va dans le bon sens.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 1349 rectifié bis.
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote.
Mme Frédérique Espagnac. Je rebondis sur les propos de Mme la ministre, ce qui n'est pas dans mes habitudes.
Nous nous sommes suffisamment battus, M. Bernard Delcros et moi-même, en faveur des ZRR, devenues France Ruralités Revitalisation (FRR).
Premièrement, nous avons proposé une mesure visant précisément à éviter ce que vous avez décrit, madame la ministre. Ainsi, un médecin bénéficie d'une exonération, non pas seulement pendant cinq ans, comme cela a été dit, mais aussi pendant trois années de plus, de manière dégressive. Ainsi, il n'est pas incité à partir, puisque ce dispositif ne s'applique qu'une seule fois. Nous avons donc agi pour que cela ne se produise plus.
Deuxièmement, tous les jeunes sont éligibles, ce qui est nécessaire. Il faut cependant leur permettre, notamment dans les zones de revitalisation rurale, d'être exonérés de la même façon : cinq années, suivies de trois années de manière dégressive.
La proposition du Gouvernement est donc importante, mais il ne faut pas modifier des mesures qui sont, dans le cas des ZRR, plus avantageuses, madame la ministre.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1349 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 604, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
2° À la première phrase du deuxième alinéa du II, les mots : « l'exonération est totale » sont remplacés par les mots : « le montant de l'exonération, qui est fixé par décret, ne peut excéder 25 % de ces cotisations » ;
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous proposons de rétablir le dispositif de restriction de l'aide à la création ou à la reprise d'entreprises. Nous avons en effet constaté que ce dispositif entraînait quelques effets d'aubaine, car au fil du temps, des bénéficiaires ont été ajoutés qui ne sont pas des demandeurs d'emploi : les travailleurs indépendants, tous les créateurs et tous les repreneurs.
Le coût de l'aide est ainsi passé de 266 millions d'euros en 2017 à 424 millions d'euros en 2024. Nous souhaitons donc diminuer le niveau maximal de l'exonération pour les travailleurs indépendants et recentrer le dispositif sur les demandeurs d'emploi et les publics les plus vulnérables.
M. le président. L'amendement n° 827 rectifié, présenté par Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme Bourcier, MM. Wattebled, V. Louault, Pellevat, Grand et Laménie, Mme L. Darcos, M. Brault, Mmes Paoli-Gagin, Guidez et Antoine et M. H. Leroy, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
2° À la première phrase du deuxième alinéa du II, les mots : « l'exonération est totale » sont remplacés par les mots : « le montant de l'exonération, qui est fixé par décret, ne peut excéder 50 % de ces cotisations » ;
La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte.
Mme Marie-Claude Lermytte. Le dispositif d'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises (Accre), déployé en 1979, a longtemps constitué un pilier des politiques d'emploi et d'insertion par l'entrepreneuriat. Son objet était clair.
Jusqu'en 2019, l'aide à la création ou à la reprise d'une entreprise – qui a succédé à l'Accre – comportait deux volets complémentaires, l'un pour les travailleurs indépendants au régime réel et l'autre pour les microentrepreneurs. La réforme de 2019 a profondément modifié cette logique avec la généralisation de l'accès, la réduction de la durée de l'exonération et la fixation du taux à 50 %. Ces changements ont affaibli la cohérence du dispositif, qui favorise désormais moins efficacement l'insertion par le travail indépendant et crée des distorsions entre les régimes.
L'article 9 du PLFSS 2026 prévoyait de ramener le taux d'exonération à 25 % et de le réserver à certains publics. Toutefois, les députés ont supprimé cette mesure, afin de maintenir le dispositif d'exonération dans sa forme actuelle.
À travers le présent amendement, nous proposons une voie médiane en fixant le taux d'exonération à 50 % pendant un an, plutôt qu'à 25 %, afin de préserver un soutien concret aux créateurs et aux repreneurs d'entreprise les plus fragiles, qui reste soutenable pour les finances publiques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le texte initial préservait un compromis efficace, sans supprimer le dispositif, mais en réduisant le champ de ses bénéficiaires et en fixant le taux à 25 % des cotisations, alors que vous proposez de l'augmenter à 50 %.
Ma chère collègue, la commission a émis un avis défavorable sur votre amendement, parce que nous préférons notre version à la vôtre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Avis favorable à l'amendement n° 604, et défavorable à l'amendement n° 827 rectifié.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 604.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 827 rectifié n'a plus d'objet.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 605, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
A – Alinéa 7
Rétablir le II dans la rédaction suivante :
II. – L'article L. 6243-2 du code du travail est abrogé.
B – Alinéa 10
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
VI. – Les dispositions du II s'appliquent pour les contrats conclus à compter du 1er janvier 2026.
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à rétablir la rationalisation des aides qui sont attribuées aux apprentis. J'insiste sur le fait que ces derniers bénéficient d'un avantage ancien et unique sur les cotisations salariales, lesquelles ne doivent pas, en principe, faire l'objet d'une exonération. Seuls les apprentis sont dans ce cas, exception sur laquelle je souhaite revenir.
En effet, ce dispositif représente un coût important pour le ministère du travail, soit environ 1,6 milliard d'euros en 2025, sur le champ des associations. Cela n'est pas justifiable si l'on compare la situation de l'apprenti à celle d'un salarié à temps partiel, qui paie des cotisations salariales. Il n'est plus acceptable que persiste cette exception à l'exception, alors que les apprentis peuvent déjà bénéficier d'un certain nombre de droits.
M. le président. L'amendement n° 1107 rectifié, présenté par Mmes Billon, Bourguignon, Guidez, Housseau, Morin-Desailly, Patru, Romagny, Saint-Pé et Sollogoub et MM. Bitz, Bleunven, Canévet, Delcros, Dhersin, Duffourg, Fargeot, Henno, Kern, Menonville, Parigi et Pernot, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rétablir le II dans la rédaction suivante :
II. – À la première phrase de l'article L. 6243-2 du code du travail, après le mot : « apprenti » , sont insérés les mots : « employé dans une entreprise de deux cent cinquante salariés ou moins ».
La parole est à Mme Brigitte Bourguignon.
Mme Brigitte Bourguignon. Madame la rapporteure générale, nous considérons que la suppression de l'exonération des cotisations salariales, dont bénéficiaient jusqu'à maintenant les apprentis, pour les contrats conclus à partir du 1er janvier, ne sera pas sans conséquence sur leur pouvoir d'achat. En effet, les nouveaux barèmes entraîneront une baisse de rémunération comprise entre 101 et 187 euros, selon les profils : ce n'est pas neutre.
En outre, la suppression uniforme de l'exonération pour toutes les entreprises, telle qu'elle est envisagée, risquerait de fragiliser les plus petites d'entre elles, alors qu'elles contribuent largement à l'apprentissage puisqu'elles recrutent 70 % des apprentis. Ainsi, l'exonération et les allégements qui sont liés à ces contrats d'apprentissage restent pour les entreprises un argument de poids pour prendre un apprenti ; c'est du moins ce que mettent en avant neuf dirigeants sur dix.
À travers notre amendement, nous proposons donc une approche ciblée plutôt qu'une suppression générale du dispositif, comme vous l'envisagez, avec notamment le maintien de l'exonération des cotisations salariales pour les apprentis dans les entreprises de moins de 250 salariés. Cela permettrait de préserver la dynamique de l'apprentissage, que tout le monde salue au sein des TPE et PME que nous connaissons bien dans nos territoires, tout en limitant l'impact budgétaire de la mesure.
M. le président. L'amendement n° 1098 rectifié bis, présenté par MM. Canévet, Folliot et Fargeot, Mme Sollogoub, MM. S. Demilly, Mizzon, Menonville et Kern, Mme Patru et MM. Dhersin, Duffourg et Longeot, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 7
Rétablir le II dans la rédaction suivante :
II. – L'article L. 6243-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette exonération est maintenue durant un an après l'embauche de l'apprenti dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Nadia Sollogoub.
Mme Nadia Sollogoub. Au travers de l'amendement de notre collègue Michel Canévet, nous insistons sur l'importance de l'apprentissage et exprimons nos inquiétudes face aux dispositions proposées.
L'apprentissage ouvre la porte à un emploi durable, comme nous le savons tous. Les chiffres le prouvent et les entreprises le confirment : les jeunes en bénéficient.
Aujourd'hui, l'apprenti est exonéré de cotisations salariales pendant son contrat. Nous proposons donc une mesure très simple : maintenir cette exonération pendant un an lorsque l'apprenti est embauché en CDI. Parce qu'un jeune formé dans l'entreprise est une richesse, parce qu'une incitation supplémentaire peut faire la différence entre une embauche et une hésitation, cette mesure favoriserait la transition réussie de l'apprentissage vers l'emploi stable.
Dans un contexte où nous cherchons à lever tous les freins à l'embauche des jeunes, encourageons ceux qui recrutent des apprentis.
Tel est l'objet de cet amendement, pragmatique et très utile.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ce que l'on observe, c'est que le coût de cette aide n'a cessé d'augmenter, passant de 300 millions d'euros à 800 millions d'euros, ce qui est considérable.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Eh oui !
M. Martin Lévrier. Supprimons les apprentis !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Bien sûr que non, nous n'allons pas supprimer les apprentis !
Toutefois, il est faux de dire que la mesure que nous proposons poserait problème aux entreprises qui embauchent des apprentis. En effet, les cotisations salariales seraient en réalité un coût pour les apprentis. Leur exonération est une exception : dans notre pays, rares sont ceux qui en bénéficient. Or les apprentis ont en plus un certain nombre de droits.
Mme Cathy Apourceau-Poly. En ce cas, il faut les payer !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En tout cas, ce que nous proposons n'aura pas d'incidence sur la décision d'embaucher ou non un apprenti, puisque le coût sera pour le salarié lui-même. Il faut donc faire attention à l'argumentaire.
L'avis de la commission est défavorable sur les deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Il me semble qu'aujourd'hui, vous êtes, dans cet hémicycle, à l'unanimité favorables à ce que nous soutenions l'insertion professionnelle des jeunes ; vous reconnaissez également à l'unanimité que l'apprentissage est une filière qui a permis une amélioration de l'insertion professionnelle des jeunes. Ce point n'est pas en débat. Le sujet, tel que l'a très bien posé Mme la rapporteure générale, est plutôt de savoir ce que nous devons encourager.
Tout d'abord, il est clair que nous devons continuer à encourager les entreprises à prendre des apprentis. Nous disposons pour cela des aides à l'embauche et de mécanismes grâce auxquels les charges patronales restent faibles, dans la mesure où le revenu des apprentis l'est aussi.
Se pose ensuite la question du régime social et fiscal des apprentis, en tant qu'individus. La discussion que nous venons d'avoir confirme, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous souhaitez que les apprentis ne paient que la moitié de la CSG par rapport aux autres travailleurs d'une entreprise, puisqu'ils en sont exonérés jusqu'à 50 % du Smic.
Je rappelle, en outre, que les apprentis ne paient pas d'impôt sur le revenu. (Protestations sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Heureusement !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je vais vous donner un exemple : des étudiants en deuxième année de master dans une grande école sont embauchés avec parfois une prime d'apprentissage qui s'élève à 3 000 euros ! (Mêmes protestations.)
Mme Céline Brulin. Cela ne court pas les rues !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Quel apprenti gagne 3 000 euros !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Or les apprentis peuvent être rattachés au foyer fiscal de leurs parents, en plus de cette exonération totale d'impôt sur le revenu ; c'est tout de même un élément important.
Je rappelle également que les apprentis touchent la prime d'activité, comme les autres travailleurs, ce qui est tout à fait normal, vous avez raison – je veux juste poser les termes du débat.
La proposition que fait le Gouvernement consiste à dire qu'il ne serait pas dénué de sens, pour les cotisations salariales, d'harmoniser le régime des apprentis avec celui de leurs collègues dans l'entreprise, qu'ils soient intérimaires ou en CDD, parfois présents depuis très longtemps et qui font le même métier. Or à salaire brut égal, ils ne perçoivent pas le même salaire net que les apprentis, parce que le taux de CSG qui leur est appliqué n'est pas le même, non plus que le montant de leurs cotisations salariales.
La proposition du Gouvernement veille à ne pénaliser aucun apprenti aujourd'hui en poste : aucun d'entre eux ne verrait sa feuille de paie bouger au 1er janvier. Il s'agirait d'une réforme en flux, c'est-à-dire pour les nouveaux contrats signés. Cette évolution permettrait de recréer une forme de justice.
Il faut savoir que dans beaucoup d'entreprises, grandes et petites, ce sujet est devenu source d'un grand nombre de polémiques. En effet, des collègues qui font le même travail…
M. Fabien Gay. S'ils font le même travail, c'est qu'il y a un problème !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. … ne sont pas présents de la même manière, car l'apprenti est sur place une semaine sur deux ou quinze jours par mois, et ne travaillent pas de la même manière, puisque l'apprenti est formé. Or ce dernier gagne parfois plus à la fin du mois que son formateur.
Je tiens à le souligner, car c'est là qu'intervient la proposition du Gouvernement.
Mme Cathy Apourceau-Poly. De quelle proposition parlez-vous ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je vous expose la proposition que nous avions présentée à l'Assemblée nationale, qui a donné lieu à un long débat et qui n'a finalement pas été votée par les députés. Je rappelle donc les arguments de ce débat. Pour le reste, le Sénat est souverain et je suis, ici, à votre service.
Pour en revenir aux amendements, je suis défavorable à l'amendement n° 1098 rectifié bis de M. Canévet qui a pour objet, une fois l'apprenti embauché en CDI, de prolonger l'application du régime de l'apprentissage.
M. Xavier Iacovelli. Pour un an seulement.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Certes, mais cela encourage les entreprises à embaucher leurs anciens apprentis sans savoir si elles les garderont au bout d'un an. Bref, ce n'est pas une bonne idée. Dans notre pays, quand on est en CDI, c'est le régime des employés qui s'applique et chacun comprend, j'en suis sûre, l'intérêt de cette homogénéité, qui est une forme d'équité.
Quant à l'amendement n° 1107 rectifié, il est juridiquement inapplicable. En effet, la différenciation des charges selon la taille des entreprises n'est possible que sur la partie patronale. Sur la partie salariale, si deux apprentis, exerçant le même métier…
Mme Céline Brulin. Ils n'exercent pas un métier, puisqu'ils sont apprentis !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Certes, disons donc qu'ils apprennent le même métier.
Avec cet amendement, celui qui apprend son métier dans une entreprise de 100 salariés recevrait, par exemple, 100 euros de plus par mois que celui qui ferait la même chose dans une entreprise de 300 salariés. Le Conseil constitutionnel, selon moi, ne le permettrait pas.
En effet, le Conseil constitutionnel peut permettre d'encourager des entreprises, selon leur taille et leur réalité économique, à faire plus ou moins de choses ; c'est d'ailleurs pour cela que l'on différencie selon la taille des entreprises la partie qui concerne les cotisations patronales. Mais, pour la partie salariale, le Conseil constitutionnel pourra s'y opposer, puisqu'il n'est pas à la main de l'apprenti qui propose sa candidature de savoir quelle entreprise l'embauchera pour apprendre son métier.
Le régime que vous proposez limiterait l'intérêt, pour les apprentis, d'aller dans des entreprises de plus de 250 salariés. Par exemple, alors que la SNCF forme beaucoup d'apprentis, ces derniers seraient beaucoup moins volontaires pour aller y apprendre leur métier. Votre amendement risque donc d'avoir des effets contre-productifs.
Par conséquent, l'avis du Gouvernement est favorable sur l'amendement n° 605 de Mme Doineau et défavorable sur les amendements nos 1107 rectifié et 1098 rectifié bis. Je comprends que cela puisse générer des débats, et c'est le cas – cela ne fait aucun doute. J'ai donc souhaité vous exposer mes arguments de la manière la plus transparente possible.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Nous avons, à plusieurs voix, proposé un bon nombre d'amendements visant à diminuer les allégements généraux et à réduire les exonérations de cotisations sociales des employeurs, et ce sous toutes sortes de formes. Or ces propositions ont été systématiquement refusées de votre part.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Balayées !
Mme Céline Brulin. En effet, c'est le mot qui convient.
Mais tout à coup, l'on s'intéresse aux exonérations de cotisations salariales des apprentis, qui gagnent moins de 80 % du Smic, qui appartiennent le plus souvent à une classe d'âge – les 18-24 ans – dont 20 % vit en dessous du seuil de pauvreté. Et ces exonérations seraient l'injustice maximale que vous considérez qu'il faut réparer aujourd'hui !
Oui, il y a eu beaucoup d'aides à l'apprentissage et je vous rejoins sur le fait qu'il faut, peut-être, revoir la situation. Mais qui a décidé d'instaurer ces aides ? C'est vous, la plupart du temps. En outre, lesdites aides sont allées principalement aux entreprises qui recrutaient des apprentis – pour ma part, je n'ai pas de problème à ce que nous soutenions l'apprentissage, y compris sous cette forme – et très peu aux apprentis eux-mêmes.
Vous nous dites, madame la rapporteure générale, que ces exonérations de cotisations n'ont cessé d'augmenter. Bien sûr, puisque le nombre d'apprentis a considérablement évolué ! Mais les exonérations patronales ont également bondi au cours des dernières années, à 88 milliards d'euros, et cette hausse massive n'a pas l'air de vous déranger.
La mesure que nous examinons est très dure pour les jeunes apprentis. Elle est assez symbolique de vos choix politiques, affreux pour les plus modestes.
M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Antoine, pour explication de vote.
Mme Jocelyne Antoine. J'entends bien que l'objectif fixé de redressement des comptes publics nécessite des efforts de tous. Toutefois, si nous avons beaucoup parlé des entreprises, nous n'avons pas évoqué le secteur médico-social. Je souhaite donc interpeller Mme la ministre sur ce point, en particulier pour les territoires ruraux.
Dans le cadre de la formation du personnel dans ce secteur, nous avons énormément recours à l'apprentissage. Dans mon département très rural de la Meuse, nous avons mis en place la formation délocalisée de l'institut régional du travail social (IRTS) de Lorraine, basé à Nancy. Ainsi, les éducateurs spécialisés et les animateurs-éducateurs sont formés localement, afin de répondre aux besoins sociaux du département.
Or aujourd'hui, nous nous interrogeons sur la possibilité, pour les structures médico-sociales, de continuer à former des apprentis, dont elles ont énormément besoin. En effet, 87 % des apprentis diplômés l'année dernière ont été embauchés dans la Meuse. Quid de l'avenir de la délocalisation de l'IRTS, c'est-à-dire de la formation des apprentis dans les territoires ruraux, si le système de l'apprentissage n'est plus attractif ?
C'est une petite alerte que je souhaite lancer. Peut-être pourrons-nous en reparler dans un cadre plus personnel, madame la ministre ?
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Nous voterons contre l'amendement présenté par Mme la rapporteure générale. Je m'associe pleinement aux propos de ma collègue Brulin : nous sommes vraiment face à un deux poids, deux mesures.
En effet, si nous adoptions l'amendement de Mme Doineau, les apprentis, dont le salaire est loin d'être exceptionnel, seraient pénalisés. Pour certains, cela entraînerait une baisse non négligeable de leur rémunération, entre 55 et 102 euros, ce qui compte lorsqu'on a un faible revenu…
Vous mentionnez, madame la ministre, des apprentis payés 3 000 euros par mois. Pour ma part, je n'en connais pas beaucoup et il ne s'agit certainement pas de la majorité des apprentis, qui restent des jeunes hommes et des jeunes femmes en formation.
Sans vouloir empiéter sur l'examen du projet de loi de finances, nous savons qu'il contient des mesures qui iront à l'encontre, non seulement de l'aide à l'apprentissage, mais aussi du soutien individuel à ces jeunes.
Voilà pourquoi nous ne voterons pas l'amendement présenté par Mme Doineau.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Le « en même temps » est complètement le fait de la majorité sénatoriale, aujourd'hui. C'est hallucinant !
Tout à l'heure, l'on nous expliquait, en particulier mon collègue Henno, que nous étions là pour faire des économies, et non pour chercher des recettes. Mais voilà que vous venez de trouver 1,2 milliard d'euros de recettes, ce qui est délicieux ! Et sur le dos de qui ? En particulier, des jeunes. C'est tout de même curieux. Le capital, on n'y touche pas, mais les jeunes, tout d'un coup, ce n'est pas grave. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K. – M. Michel Masset applaudit également.)
Certains apprentis touchent en effet 3 000 euros par mois et plus : c'est vrai, il en existe. Mais, pour ma part, je voudrais surtout qu'une majorité des apprentis soit en pré-bac – je n'arrête pas de le dire. En réalité, si cette réforme est une excellente réforme, le bât blesse au niveau du nombre d'ouvertures de centres de formation d'apprentis (CFA) et de jeunes en apprentissage au niveau pré-bac. C'est là que doit être notre combat.
Si l'on veut faire des économies, j'aurai de nombreuses propositions à faire dans le cadre du projet de loi de finances. Ainsi, pour dégager 1,6 milliard euros, je propose d'agir sur l'aide aux entreprises.
Pour en revenir aux apprentis, les jeunes en pré-bac gagnent à peine 80 % du Smic.
En outre, je suis en total désaccord avec vous, madame la ministre : les apprentis ne travaillent pas au même niveau que leurs collègues. Pourquoi ? Parce qu'on est en train de les former. En d'autres termes, ils sont moins productifs. De plus, ils passent la moitié de leur temps à étudier, ce qui n'est pas le cas des autres employés.
Le temps dévolu à l'apprentissage est donc énorme pour ces jeunes, raison pour laquelle il leur faut, selon moi, un revenu légèrement supérieur. Nous devons les aider à tenir pendant un an, parce que l'apprentissage est très difficile. Vous ne mesurez pas la difficulté que représente le fait de réussir le même diplôme initial que quelqu'un qui étudie à plein temps dans une école.
C'est sur les aides aux entreprises qu'il faut travailler, et non sur la diminution du salaire net. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE et SER. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.
Mme Frédérique Puissat. Pour reprendre les propos de Mme la ministre, dans cet hémicycle, tout le monde est favorable à l'apprentissage. Là n'est pas le sujet et, sur cet amendement, il faut raison garder.
En revanche, je vous rappelle que nous sommes tous engagés pour essayer d'amoindrir le déficit de la sécurité sociale. C'est bien là notre moteur. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)
Peut-être n'avons-nous pas tous les mêmes solutions, comme nos débats l'ont montré.
S'agissant de l'apprentissage, je vous donne rendez-vous le 3 décembre, date prévue de l'examen en séance des crédits de la mission « Travail, emploi et administration des ministères sociaux ». J'aurai alors l'occasion de vous donner un certain nombre d'informations positives en faveur de l'apprentissage, ce qui nous permettra de réaffirmer que nous croyons tous dans cette voie.
D'ailleurs, pour répondre aux propos de Mme Lubin, je vous ferai aussi des propositions – mais je ne serai pas la seule – sur d'autres sujets ayant trait à cette mission budgétaire, qui concernent les jeunes en mission locale ou en structures de l'insertion par l'activité économique (SIAE). En effet, l'insertion est un tout, qui dépasse l'apprentissage.
Cela étant, nous savons très bien que l'écosystème de l'apprentissage est très compliqué, d'autant que nous l'avons largement modifié l'année dernière en adoptant de nombreux amendements. Nous nous sommes ainsi rendu compte, même si nous ne disposons pas encore des chiffres définitifs, que cela touchait les chefs d'entreprise, qui sont, je le rappelle, le moteur de l'apprentissage. En effet, sans contrat d'apprentissage, pas d'apprenti.
Il convient donc de ne pas remanier le système, du moins de ne pas le complexifier excessivement. Or vos amendements, mes chers collègues, sont quelque peu alambiqués, avec par exemple le seuil de 250 salariés. Il faut revenir au texte initial et je voterai l'amendement de Mme la rapporteure générale.
Je crois en l'apprentissage. Je vous le prouverai et, j'en suis certaine, nos votes à tous iront en ce sens, le 3 décembre, dans cet hémicycle.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Je souscris, bien évidemment, à l'argumentation de nos collègues Céline Brulin et Martin Lévrier.
Vous venez de dire, madame Puissat, qu'il fallait faire des économies. Oui, bien sûr, nous sommes d'accord sur le fait qu'il faut en faire, mais pas sur le dos des jeunes !
Je souhaite revenir sur la dérive de l'apprentissage que Mme la ministre et Martin Lévrier ont déjà évoquée. La rémunération au Smic concerne les formations en bac pro ou, au maximum, en BTS, c'est-à-dire au niveau bac+2. Or le coup de pouce que vous avez donné à l'apprentissage a considérablement augmenté le nombre d'apprentis, ce qui fait que bon nombre d'entreprises embauchent sous un statut d'apprenti des jeunes en deuxième année de master, qui touchent parfois 3 000 euros par mois. De fait, ce ne sont pas de vrais apprentis ; ce sont des emplois déguisés, dont certaines entreprises profitent…
Mme Frédérique Espagnac. Des apprentis payés 3 000 euros, cela n'existe pas !
Mme Émilienne Poumirol. Quoi qu'il en soit, il y a un effet d'aubaine pour les entreprises qui embauchent des apprentis en deuxième année de master. Cela me semble une dérégulation et une dérive par rapport à ce que doit être l'apprentissage.
Nous sommes tous favorables à l'apprentissage, mais il faut en limiter le domaine pour éviter les effets d'aubaine auprès de certaines entreprises.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je veux bien parler de l'apprentissage, mais faisons-le avec des chiffres réels. Si vous trouvez un apprenti qui gagne 3 000 euros par mois, amenez-le ici, pour que nous en discutions !
Le réel, c'est que, entre 16 et 17 ans, durant la première année d'apprentissage, on est payé 486 euros ; entre 18 et 20 ans, 774 euros ; de 21 à 25 ans, 950 euros ; et de 26 à 29 ans, 100 % du Smic. Ensuite, la rémunération peut, dans des cas exceptionnels, dépasser le Smic en atteignant le niveau minimal de la branche, s'il est supérieur. Or pour 80 % des branches, ce niveau est inférieur au Smic…
Ensuite, madame la ministre, vous avez affirmé, ce qui devrait interpeller chacun d'entre nous, que dans des entreprises, des personnes formées gagnent plus que les formateurs, alors qu'ils font le même travail. Pardon, mais un apprenti n'est pas un travailleur ou une travailleuse comme les autres ! Il est un travailleur ou une travailleuse en formation. Il perçoit, non pas un salaire, mais une rémunération équivalente, à hauteur du Smic.
Ce n'est pas un détail, car s'il s'agit d'un travailleur comme un autre, alors il ne doit pas être en contrat d'apprentissage et doit recevoir, non pas une rémunération inférieure au Smic, mais un véritable salaire, comme les autres ! Voilà le réel.
Mme Corinne Féret. Tout à fait
M. Fabien Gay. Enfin, vous allez raboter un milliard d'euros au détriment de ceux qui n'ont déjà pas grand-chose : pas 3 000 euros, mais 486 euros, ce que l'on gagne quand on a 16 ou 17 ans. C'est cela, le réel.
Vous voulez récupérer ce milliard, mais les 80 milliards d'euros d'exonérations patronales, vous n'y touchez pas – cela jamais ! Voilà comment je vous propose de raboter : prenons les 20 milliards d'euros que représentent les exonérations de cotisations sociales pour les salaires supérieurs à 1,6 Smic, dont tous les économistes, de gauche comme de droite, disent qu'elles n'ont que peu ou pas d'effet sur l'emploi. C'est là qu'il faut donner un coup de rabot, mais pas sur notre jeunesse. (Applaudissements sur des travées des groupes CRCE-K et SER.)
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Cet article est assez représentatif de la façon dont le PLF et le PLFSS ont été construits : à la va-vite, selon des arbitrages dont nous ne savons pas vraiment d'où ils viennent.
En l'occurrence, nous voyons bien que l'application de la technique du rabot aboutit à quelques absurdités, pour ne pas dire quelques aberrations.
Au fond, chacun ici conviendra qu'il serait problématique de taxer davantage des jeunes qui gagnent moins de 700 euros par mois. De la même manière, j'ose espérer que nous pouvons tous nous accorder sur le fait qu'il ne serait pas choquant que des jeunes de 24, 25 ou 26 ans, qui gagnent 1 700 ou 1 800 euros par mois, soient assujettis à la CSG.
Or cette rédaction ne laisse pas la moindre place à la nuance, parce qu'elle a été mal pensée. Le travail réalisé en amont est insuffisant.
J'étais moi-même chef d'entreprise il y a encore trois ans, et il m'est arrivé de recruter des apprentis qui avaient autour de 25 ans et étaient en troisième année de licence. Ils payaient la CSG, et personne n'y trouvait rien de choquant !
Ainsi, je nuancerai légèrement ce que vient de dire mon collègue Fabien Gay : pourquoi les apprentis ne seraient-ils pas taxés alors qu'une personne de 30 ans en contrat de professionnalisation est, pour sa part, assujettie à la CSG ?
Sur de tels sujets, nous devons nous efforcer d'instaurer une forme de progressivité.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je suis d'accord !
M. Grégory Blanc. Or cet article ne comporte ni nuance ni progressivité, ce qui crée du désordre. J'insiste fortement sur cette question de la progressivité, qui, comme cela a été dit précédemment, doit valoir non seulement pour les contrats d'apprentissage et pour les contrats de professionnalisation, mais aussi pour la taxation sur le capital. Sur ce sujet, je ne vois pas de ligne claire.
C'est pourquoi nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote.
Mme Frédérique Espagnac. Je voulais rebondir sur les propos de la ministre à propos des apprentis touchant 3 000 euros, mais Fabien Gay s'en est très bien chargé.
Je ne sais pas si, à Paris, les apprentis gagnent 3 000 euros par mois, mais je tiens à rappeler qu'il y a des apprentis dans toute la France. Être apprenti en milieu rural implique d'avoir deux logements, et donc de payer deux loyers : un pour la semaine en entreprise, et un pour la semaine en centre de formation d'apprentis, car ils ne sont pas au même endroit.
Rien que pour cette raison, il est inacceptable de revenir sur ces exonérations. Bien sûr, nous pouvons réfléchir à un assujettissement progressif à la CSG.
J'y insiste, 3 000 euros par mois, cela n'existe pas ! (Mme Cathy Apourceau-Poly aquiesce.) Quand on gagne, comme l'a dit Fabien Gay, 700 euros par mois et que ses parents sont, comme c'est souvent le cas, en grosse difficulté, comment payer deux loyers ? Il faut raison garder : ce n'est pas là qu'il faut faire des économies !
M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour explication de vote.
M. Michel Masset. Un apprenti est avant tout un étudiant, et non un salarié. Il ne faut jamais comparer les deux. L'apprenti est en formation, en alternance, et a fait le choix d'apprendre un métier, dans une société très compliquée. À mes yeux, tous les apprentis ont beaucoup de courage.
M. Fabien Gay. Très bien !
M. Michel Masset. Et ceux qui les embauchent doivent consacrer beaucoup de temps à les accompagner au quotidien. Les deux doivent donc être encouragés.
Dans le monde rural, huit postes indispensables sur dix dans le commerce ou l'artisanat sont repris par des apprentis.
Mme Frédérique Espagnac. Tout à fait !
M. Michel Masset. Les apprentis nous permettent de faire société et de faire vivre nos territoires.
C'est pourquoi le groupe RDSE ne souhaite aucune taxe, aucun impôt, ni pour les apprentis ni pour les entreprises qui les embauchent !
Mme Frédérique Puissat. Ce n'est pas le sujet !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, je vous remercie de ce débat. Je me suis posé les mêmes questions que vous en prenant connaissance de cet article 9. Les propositions sur l'apprentissage m'ont quelque peu secouée, car nous en avons déjà débattu longuement l'an dernier.
De quoi parle-t-on ? Il est certes question d'exonérer de cotisations salariales les apprentis,…
Mme Cathy Apourceau-Poly. Eh oui !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. … mais de manière exceptionnelle.
Je conçois qu'il faille conserver les exonérations de cotisations patronales et les aides à l'embauche d'apprentis. Nous devons adopter une approche globale de l'accueil de l'apprenti dans l'entreprise, au sein de laquelle la question du logement est en effet importante.
Mais, en l'espèce, il est simplement question de mettre fin aux exonérations de cotisations salariales, qui je le rappelle, donnent des droits. (Protestations sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.) Un trimestre d'apprentissage donne le droit à un trimestre de retraite, ce qui n'est pas du tout le cas d'un jeune embauché à temps partiel. (Même mouvement.)
Mme Frédérique Puissat. Ni en stage !
Mme Émilienne Poumirol. Vous mettez en balance deux types de précarité !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il y a là une distorsion.
Je dis simplement qu'il faut conserver l'ensemble des aides et des accompagnements sur l'apprentissage, mais pas les exonérations de cotisations salariales.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je tiens à clarifier les choses et à recentrer le débat.
M. Fabien Gay. Comme toujours !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Des études économiques nous encouragent à distinguer les apprentis selon leur niveau d'étude. En ce sens, je reprendrai à mon compte la proposition de Grégory Blanc d'instaurer une forme de progressivité.
En effet, ce n'est pas du tout la même chose d'être apprenti en pré-bac, en licence ou en master.
M. Martin Lévrier. Bien sûr !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Cela n'a pas les mêmes effets sur l'insertion professionnelle. Or le nombre d'apprentis ou d'alternants en master dans les domaines du marketing et de la communication est en forte augmentation. Cela pose problème, car ces jeunes trouvent moins facilement un emploi qu'un contrat d'apprentissage.
Il y a donc, vous le voyez, deux débats.
Le premier est de déterminer sur quel niveau de qualification nous devons concentrer nos moyens : pré-baccalauréat, baccalauréat, licence, master…
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous sommes d'accord !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Lors des débats budgétaires de l'année dernière, nous nous étions demandé si nous devions différencier les aides selon la taille de l'entreprise ou selon le niveau de qualification.
Les ministres Catherine Vautrin et Astrid Panosyan-Bouvet avaient alors tranché en faveur de la taille de l'entreprise.
Mme Frédérique Puissat. Et le Sénat !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Certains défendaient l'idée qu'il fallait privilégier les niveaux de qualifications moindres, pour que les apprentis, notamment de milieu modeste, puissent ensuite accéder à un master. D'autres plaidaient pour que la distinction porte sur la taille de l'entreprise. La seconde option a été retenue.
Le deuxième débat est le suivant : ils sont sûrement très peu nombreux, mais certains étudiants en apprentissage – j'ai sous les yeux des offres d'apprentissage avec le salaire correspondant – perçoivent des rémunérations qui ne sont pas celles de l'immense majorité des apprentis. (Ah ! sur les travées des groupes CRCE et SER.)
M. Michel Masset. C'est mieux !
Mme Silvana Silvani. C'est un détournement !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je ne veux cibler personne ; ces apprentis font très bien leur travail et sont très bien formés. Madame Silvani, vous dites que c'est un détournement, mais je tiens à apporter une nuance. De facto, des jeunes sont recrutés en tant qu'apprentis alors qu'il y a trois ou quatre ans, ils auraient été embauchés en CDD ou en CDI, avec des rémunérations correspondant à leur qualification. Ils auraient donc payé l'impôt sur le revenu, les charges salariales et la CSG. Je souhaite également souligner ce point.
Mme Céline Brulin. Alors contrôlez les entreprises, pas les jeunes !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Nous avons ouvert l'apprentissage, et c'est une bonne chose. Nous avons soutenu l'insertion des jeunes, et c'est également une bonne chose. Aujourd'hui, nous vous faisons une proposition, qui n'a pas été votée à l'Assemblée nationale et revient à trancher la question suivante : voulons-nous, oui ou non, instaurer une forme d'équité entre un formateur et celui qu'il forme au sein de son entreprise, sachant que cela ouvre des droits aux apprentis qui ne cotisaient pas jusqu'alors ? Tel est le débat.
Il vous appartient de choisir, mais je voulais préciser les termes du débat pour m'assurer que mon propos et mes arguments étaient compris avec suffisamment de nuance.
Quoi qu'il en soit, je remercie tous ceux d'entre vous – et c'est peut-être le plus important – qui nous ont permis de passer un peu de temps sur la jeunesse. Il est beaucoup question des retraités dans ce budget, mais il ne faut pas perdre de vue que la jeunesse, c'est l'avenir. Et il est utile pour l'avenir de nos jeunes de leur donner un cadre porteur pour se former et s'insérer sur le marché du travail.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 605.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 36 :
| Nombre de votants | 341 |
| Nombre de suffrages exprimés | 296 |
| Pour l'adoption | 175 |
| Contre | 121 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, les amendements nos 1107 rectifié et 1098 rectifié bis n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quarante.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures dix,
est reprise à quatorze heures quarante, sous la présidence de Mme Sylvie Robert.)
PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
3
Mise au point au sujet d'un vote
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte.
Mme Marie-Claude Lermytte. Madame la présidente, lors du scrutin public n° 35, mon collègue Alain Marc souhaitait voter pour.
Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point. Elle figurera dans l'analyse politique du scrutin.
4
Financement de la sécurité sociale pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 9 bis.
Article 9 bis (nouveau)
I. – La section 1 du chapitre III du titre Ier du livre III du code de la construction et de l'habitation est complétée par un article L. 313-7 ainsi rétabli :
« Art. L. 313-7. – Sans préjudice de l'obligation mentionnée au premier alinéa de l'article L. 313-1, les employeurs soumis à cette obligation peuvent prendre en charge tout ou partie des intérêts du crédit immobilier contracté par un salarié qui acquiert ou fait construire sa résidence principale, à la condition que ce salarié n'ait pas été propriétaire de sa résidence principale au cours des deux années précédant celle au cours de laquelle ce crédit est contracté.
« L'employeur verse chaque mois au salarié les sommes correspondant à la prise en charge mentionnée au premier alinéa du présent article. La rupture du contrat de travail ne peut donner lieu à la restitution de ces sommes par le salarié.
« Dans la limite de 8 % du plafond mentionné au premier alinéa de l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, les sommes versées au cours d'une année civile dans les conditions mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article sont exonérées des cotisations et des contributions prévues par la législation de sécurité sociale, à l'exception des contributions prévues aux articles L. 136-1 et L. 137-15 du code de la sécurité sociale et à l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale. »
II. – Le II de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un 9° ainsi rédigé :
« 9° Dans la limite mentionnée au dernier alinéa de l'article L. 313-7 du code de la construction et de l'habitation, les sommes versées par l'employeur au salarié au titre de la prise en charge prévue au même article L. 313-7. »
III. – Les I et II sont applicables aux contrats de travail ainsi qu'aux conventions et aux accords d'entreprise ou d'établissement conclus à compter du 1er janvier 2026.
IV. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant des I et II est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. L'amendement n° 606, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L'Assemblée nationale a introduit cet article afin de permettre aux employeurs d'accompagner financièrement leurs salariés pour acquérir un logement.
Nous sommes tous conscients de la situation du logement en France, mais nous devons nous demander si l'outil proposé par le biais de cet article est approprié. Pour la commission des affaires sociales, la réponse est non. C'est pourquoi je propose de supprimer cet article.
Certains d'entre vous ont été destinataires des simulations de l'entreprise Sofiap, la Société financière pour l'accession à la propriété, une filiale de La Banque postale, qui est à l'origine de l'amendement dont est issu cet article. Il convient d'approfondir ces simulations avant de décider, le cas échéant, d'instaurer un tel dispositif.
Fondamentalement, cet article crée une niche sociale : une exonération de cotisations sociales et la prise en charge des intérêts par l'employeur. Cela a nécessairement un coût. Les simulations reposent sur l'hypothèse que cela susciterait une augmentation du nombre de prêts tellement énorme que l'État et la sécurité sociale récupéreraient, au bout du compte, des recettes supérieures à ce coût.
Nous pourrions appliquer ce genre de raisonnement ex ante à quasiment n'importe quelle niche pour prétendre qu'elle rapporte de l'argent. Or ce n'est pas ce que l'on observe habituellement dans la pratique.
Lors de l'examen par l'Assemblée nationale de l'amendement tendant à insérer cet article, la ministre de l'action et des comptes publics a déclaré : « Je vous alerte : nous avons beaucoup de mal à chiffrer les effets de ces amendements. En effet, il est difficile d'évaluer quelle serait l'ampleur du recours au dispositif. Si elle était importante, on parlerait de centaines de millions, voire de milliards d'euros. Je le répète, vu la situation de la sécurité sociale et le niveau de déficit, et compte tenu des amendements votés ce matin, je n'ai pas aujourd'hui la latitude financière et budgétaire pour donner un avis favorable à cette disposition. » Voilà la parole de la ministre.
Par ailleurs, se pose la question de l'effet de substitution. Sur le long terme, ces dépenses se substitueraient nécessairement à des éléments de salaire davantage taxés. Il n'existe manifestement pas à ce jour de chiffrage fiable de cette niche, ne serait-ce qu'en ordre de grandeurs.
Le sujet n'étant manifestement pas mûr, la commission considère que la situation des finances publiques ne permet pas d'adopter une niche au coût potentiellement incontrôlable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre du travail et des solidarités. Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis sur la même ligne que Mme la rapporteure générale. Bien sûr, le Gouvernement partage le souci de renforcer l'offre de logement et son accessibilité. Toutefois, la solution qu'apporte cet article ne semble pas souhaitable.
En effet, il ne semble pas pertinent de mobiliser les instruments qui nous sont présentés pour poursuivre des objectifs qui relèvent avant tout de la politique du logement. En outre, ils ne bénéficieraient potentiellement qu'à des secteurs spécifiques, qui pratiquent déjà ce type de prise en charge.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement de suppression.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.
M. Laurent Somon. Le groupe Les Républicains est favorable à la suppression de cet article, car un projet de loi global sur la politique du logement est annoncé de longue date. Un tel texte permettrait d'évaluer les coûts et les moyens d'action pour relancer la construction.
Il serait donc prématuré d'adopter, dans le cadre du PLFSS, une mesurette dont l'impact n'a pas été évalué. Aussi voterons-nous cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 606.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 37 :
| Nombre de votants | 342 |
| Nombre de suffrages exprimés | 279 |
| Pour l'adoption | 261 |
| Contre | 18 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'article 9 bis est supprimé.
Après l'article 9 bis
Mme la présidente. L'amendement n° 557 rectifié ter, présenté par Mme Guillotin, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel, M. Roux et Mme Girardin, est ainsi libellé :
Après l'article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La section 1 du chapitre III du titre Ier du livre III du code de la construction et de l'habitation est complétée par un article L. 313-6-… ainsi rédigé :
« Art. L. 313-6-.... – Sans préjudice de l'obligation mentionnée au premier alinéa de l'article L. 313-1, les employeurs soumis à cette obligation peuvent prendre en charge tout ou partie du loyer payé par un salarié dont la résidence est située dans une zone tendue, à savoir les zones A bis, A, et B1, au sens de l'article D. 304-1 du code de la construction et de l'habitation.
« L'employeur verse chaque mois au salarié les sommes correspondant à la prise en charge mentionnée à l'alinéa précédent. La rupture du contrat de travail ne peut donner lieu à la restitution de ces sommes par le salarié.
« Dans la limite de 8 % du plafond mentionné au premier alinéa de l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, les sommes versées au cours d'une année civile dans les conditions mentionnées aux alinéas précédents sont exonérées des cotisations et des contributions prévues par la législation de sécurité sociale, à l'exception des contributions prévues par les articles L. 136-1 et L. 137-15 du même code et par l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale. »
II. – Le II de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Dans la limite mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 313-6-… du code de la construction et de l'habitation, les sommes versées par l'employeur au salarié au titre de la prise en charge prévue par le même article. »
III. – Les I et II sont applicables aux contrats de travail ainsi qu'aux conventions et aux accords d'entreprise ou d'établissement conclus à compter du 1er janvier 2026.
IV. – La perte de recettes résultant des I à III pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Cet amendement de ma collègue Véronique Guillotin vise à instaurer un dispositif nouveau.
Dans les zones A, A bis et B1, le coût du logement est devenu un véritable frein à l'emploi et à la mobilité. Cet amendement tend à apporter une solution pragmatique.
À l'heure actuelle, il n'existe pas de cadre incitatif pour que l'employeur prenne en charge tout ou partie du loyer de ses salariés. L'amendement a pour objet de combler ce vide en exonérant de cotisations sociales les employeurs qui se saisissent de cet outil, dans la limite de 8 % du plafond de la sécurité sociale.
Il s'agit d'un dispositif simple, volontaire et sécurisé, qui ne crée aucune obligation, mais définit enfin un cadre clair et attractif pour les entreprises désireuses de soutenir leurs salariés dans l'accès au logement.
Enfin, le ciblage sur les zones A, A bis et B1 garantit que ce mécanisme s'applique uniquement là où les tensions immobilières sont les plus fortes et où le marché locatif pèse le plus lourd sur le pouvoir d'achat. Il s'agit, pour les salariés, d'un soutien immédiat, et, pour les entreprises, d'un outil d'attractivité et de fidélisation.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il s'agit en effet d'un dispositif simple, mais est-ce à la sécurité sociale de supporter le coût d'une politique publique, qui relève, comme l'a dit M. le ministre, de la compétence de l'État ?
Il serait préférable d'engager une véritable réforme du logement, qui est très attendue pour répondre à une situation catastrophique.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. La logique de cet amendement est assez similaire à celle de l'article 9 bis, que nous venons de supprimer. Cette nouvelle niche serait simplement un peu plus encadrée, puisque l'amendement tend à instaurer un critère géographique.
En cohérence avec l'avis précédent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 557 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 9 ter (nouveau)
À l'article L. 731-14-1 A du code rural et de la pêche maritime, après la référence : « L. 731-14 », sont insérés les mots : « du présent code et à l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale » – (Adopté.)
Après l'article 9 ter
Mme la présidente. L'amendement n° 1728 rectifié, présenté par Mmes Espagnac, Le Houerou et Conconne, M. Kanner, Mmes Féret et Canalès, MM. Jomier et Fichet, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 9 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La sous-section 1 de la section 2 du chapitre Ier du titre III du livre VII du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article ainsi rédigé :
« Art. L. 731-23-.... – Les personnes non-salariées des professions agricoles bénéficient d'une exonération des cotisations d'assurance maladie, invalidité et maternité et des cotisations de prestations familiales et d'assurance vieillesse agricole pour leurs revenus issus des activités de location de meublés de tourisme au sens de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme et soumises au régime défini à l'article 50-0 du code général des impôts.
« Un décret détermine les conditions d'application et d'éligibilité de la présente exonération. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac.
Mme Frédérique Espagnac. Cet amendement vise à restaurer l'abattement fiscal concernant les gîtes ruraux.
La loi visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l'échelle locale a contribué à réduire l'avantage fiscal prévu pour le régime micro-BIC (bénéfices industriels et commerciaux), dans le but – louable – d'aligner les avantages fiscaux des locations de courte et de longue durée.
Les agriculteurs exerçant à titre complémentaire une activité de location de gîtes ruraux se sont vu appliquer la réforme, notamment l'abaissement, dans un premier temps, de l'abattement fiscal de 71 % à 50 %, alors qu'ils n'étaient pas la cible. Notre groupe avait pourtant défendu l'exception du gîte rural jusqu'en commission mixte paritaire, sans succès.
En conséquence, les revenus tirés de cette activité de location sont doublement pénalisés : d'une part, du fait de la réduction de l'abattement ; et, d'autre part, en raison de la taxation plus importante par la Mutualité sociale agricole (MSA), compte tenu de l'augmentation de l'assiette.
Je rappelle que cette activité permet aux agriculteurs de s'assurer un complément de ressources. Pour ne pas fragiliser l'activité touristique des territoires ruraux et, surtout, pour garantir des revenus décents à nos agriculteurs, cet amendement vise à exonérer de cotisations sociales les revenus qu'ils tirent de la location de gîtes ruraux, lorsqu'ils sont concernés par l'abattement fiscal en micro-BIC.
J'ajoute que nous avions voté cet amendement l'année dernière au Sénat, en demandant au Gouvernement de se pencher sur cette question des gîtes ruraux. Au vu des débats à l'Assemblée nationale sur le projet de loi de finances pour 2026, je comprends que rien n'a été fait pour avancer sur ce dossier.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame Espagnac, nous avions déjà eu un débat sur cette question l'année dernière et j'avais soutenu votre amendement.
Mme Frédérique Espagnac. Je vous en remercie !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Pour être honnête, je suis quelque peu confuse, car je pensais que nous avions résolu le problème. Ce n'est apparemment pas le cas, mais nous venons d'adopter l'article 9 ter, qui instaure déjà une exonération.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions sur cette question ?
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Je rappelle que l'article 12 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 permet déjà aux exploitants agricoles de conserver, pour le calcul des cotisations sociales, les abattements et plafonds fiscaux, dans leur version antérieure à la loi visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l'échelle locale. Nous considérons que ce dispositif est déjà très favorable. (Mme Frédérique Espagnac le conteste.)
En outre, un amendement tendant à renforcer le dispositif pour les gîtes ruraux a été adopté à l'Assemblée nationale.
Pour ces raisons, l'évolution que vous proposez n'apparaît ni soutenable ni souhaitable.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est donc l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission s'en remet à l'avis du Gouvernement : avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote.
Mme Frédérique Espagnac. Monsieur le ministre, l'amendement adopté à l'Assemblée nationale porte sur la définition non pas des gîtes ruraux, mais des Gîtes de France. Ce n'est pas la même chose.
Par ailleurs, nous avions voté la mesure que je vous propose, l'an dernier, mais elle n'a pas été retenue en commission mixte paritaire. La double taxation, due notamment à la MSA, est toujours en vigueur.
Mes chers collègues, je vous demande donc d'adopter cet amendement, car nos agriculteurs sont toujours doublement taxés et doublement peinés.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1728 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
Article 9 quater (nouveau)
I. – Au troisième alinéa du I de l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « , à l'exclusion des tâches réalisées par des entreprises de travaux forestiers, » sont supprimés.
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 607 est présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 880 est présenté par M. Salmon, Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli et Mmes Ollivier, Senée et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l'amendement n° 607.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à supprimer l'article 9quater. Pour rappel, la ministre de l'action et des comptes publics a estimé le coût de l'extension du dispositif prévue dans cet article entre 40 millions et 80 millions d'euros. La commission y est donc défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l'amendement n° 880.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement a été déposé par Daniel Salmon et les membres du groupe écologiste.
Alors que nous demandons depuis plusieurs années une évaluation de l'efficacité, des effets indirects et de l'inscription dans les objectifs de transition agroécologique du dispositif travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi (TO-DE), il nous paraît particulièrement inopportun d'étendre encore davantage cette exonération de cotisations patronales, en l'occurrence aux entreprises de travaux forestiers.
Le dispositif TO-DE est une dépense à l'aveugle, qui augmente tous les ans en fonction du niveau du Smic et du nombre de travailleurs. Cette exonération de cotisation s'ajoute à des allégements généraux, renforçant ainsi la trappe à bas salaires dans le secteur agricole.
Cette aide, dont le coût a triplé depuis 2019, a été pérennisée en 2025, alors qu'elle n'a jamais été évaluée, et profite principalement à un nombre restreint d'exploitations : les plus grosses, les plus intensives et les plus consommatrices d'intrants.
Nous nous devons de protéger et de consolider la filière bois, mais nous devons le faire par d'autres moyens que des exonérations de cotisations, lesquelles sont fort préjudiciables à l'heure des budgets contraints.
Compensé en partie sur le budget du ministère de l'agriculture, le dispositif TO-DE empêche de mobiliser d'autres crédits pour soutenir, par exemple, la transition agroécologique, le revenu des agriculteurs ou l'installation-transmission.
Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Nous sommes d'accord avec la rapporteure générale : le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement de suppression.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 607 et 880.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 9 quater est supprimé, et les amendements nos 226 rectifié ter, 1097 rectifié quater et 1614 rectifié quater n'ont plus d'objet.
Après l'article 9 quater
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 1173 est présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly, Brulin et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L'amendement n° 1314 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L'amendement n° 1691 est présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 9 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rétabli :
« III. – Les employeurs ayant bénéficié de cette exonération sont tenus de garantir aux travailleurs occasionnels des conditions de logement digne, de participer à la prise en charge de leurs frais de transports, de mettre en place un plan de réexamen de la rémunération à la tâche ainsi que d'appliquer un plan canicule. Ils en fournissent la preuve aux organismes mentionnés à l'article L. 723-1 du présent code. Les employeurs ne satisfaisant pas à ces exigences ne bénéficient pas des dispositions du présent article. »
La parole est à Mme Silvana Silvani, pour présenter l'amendement n° 1173.
Mme Silvana Silvani. Nous proposons de conditionner à un certain nombre de critères sociaux les aides accordées au secteur agricole.
Chaque année, les vendanges connaissent leur lot de faits tragiques. Des traitements inhumains sont infligés à des travailleurs saisonniers dénutris, hébergés dans des conditions extrêmes d'insalubrité, forcés à travailler sur de larges amplitudes horaires, dans des conditions météorologiques difficiles et pour une paye dérisoire, lorsqu'elle leur est seulement versée…
Concrètement, les grands groupes du capitalisme agricole français et les multinationales du luxe, comme LVMH, exploitent la misère de travailleurs précaires, voire organisent le retour d'une forme d'esclavage. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Lavarde. Oh là là…
Mme Silvana Silvani. Or les mêmes grandes entreprises parviennent à s'exonérer de toute responsabilité en ayant recours à la sous-traitance. Si trois personnes ont récemment été condamnées à de la prison ferme pour s'être rendues coupables de traite d'êtres humains, la société viticole donneuse d'ordre s'en est tirée à bon compte : elle n'a eu à acquitter qu'une faible amende, de 75 000 euros. Au sommet de la chaîne de décision, les multinationales du luxe n'ont eu à répondre d'aucun crime.
Le dispositif TO-DE coûtera plus de 620 millions d'euros aux finances sociales en 2026. C'est autant d'argent public qui n'ira pas aux finances sociales et qui ne doit pas être orienté vers des entreprises maltraitantes.
Il convient donc de conditionner le bénéfice de ces aides à l'existence d'un logement digne, à la protection des salariés lors des canicules, à la remise en cause de la rémunération à la tâche ou encore à la prise en charge des frais de transport des salariés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 1314.
Mme Raymonde Poncet Monge. L'exonération de cotisations TO-DE constitue un soutien à l'activité agricole, en particulier dans les filières dépendant fortement du travail saisonnier. Toutefois, cet outil doit s'inscrire dans un cadre garantissant le respect des droits des travailleurs.
Les difficultés récurrentes, et documentées, constatées dans l'hébergement, la rémunération et l'organisation du travail des saisonniers montrent la nécessité d'assortir ces aides publiques d'exigences sociales claires et vérifiables.
La Confédération paysanne le soulignait déjà en 2023, en rappelant le fait suivant : la conditionnalité sociale des aides figurant dans le règlement de la politique agricole commune (PAC), tout soutien accordé dans ce cadre doit être soumis au respect des droits des personnes et du travail.
Cette même année, six travailleurs saisonniers perdaient la vie dans les vignes françaises en l'espace d'une semaine, du fait de leurs conditions de travail et des fortes chaleurs ; six !
Au-delà, comme le souligne le Conseil économique, social et environnemental (Cese), les productions agricoles exigent une importante main-d'œuvre saisonnière à faible revenu. En résultent de fortes tensions dans l'accès au logement et l'indisponibilité d'un parc sous-dimensionné. Les besoins de logement des saisonniers n'en sont que plus difficile à satisfaire, si bien que ces travailleurs sont parfois contraints de vivre dans des conditions peu acceptables.
En conditionnant ces exonérations à l'existence d'un hébergement conforme aux normes de salubrité et de sécurité – ce n'est pas beaucoup demander ! – et à l'assurance d'une rémunération au moins équivalente aux standards légaux et conventionnels les plus protecteurs, nous entendons rétablir un juste alignement entre l'aide publique et l'exemplarité sociale attendue.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l'amendement n° 1691.
Mme Annie Le Houerou. À mon tour, je défends ces dispositions, présentées par les trois groupes de gauche de notre assemblée.
Par ces trois amendements identiques, nous exprimons une exigence simple, mais fondamentale : les aides publiques versées au secteur agricole doivent être conditionnées au respect du droit du travail et de la dignité humaine, ni plus ni moins.
Au cours des dernières années, chacun de nous a été marqué par des faits divers insupportables. Mme Poncet Monge l'a rappelé, plusieurs travailleurs saisonniers sont morts lors d'épisodes de canicule.
J'ajoute que nombre de ces salariés sont logés dans des conditions indignes et que l'on a constaté des abus manifestes dans l'organisation du travail.
Certes, ces situations restent minoritaires, mais elles jettent un profond discrédit sur l'ensemble de la profession. Surtout, elles rappellent que ce sont toujours les travailleurs les plus précaires qui paient le prix de telles dérives.
Il est selon nous de notre responsabilité de législateurs de dire clairement que les deniers publics ne peuvent pas financer des pratiques bafouant les droits fondamentaux. C'est le sens de ces dispositions, visant à conditionner l'exonération TO-DE au respect de quelques règles élémentaires : un jour de repos hebdomadaire doit être garanti, un logement décent doit être assuré et une protection minimale doit être accordée.
Nous entendons, en somme, veiller à l'application du droit commun. Il ne s'agit pas de pénaliser les exploitations agricoles vertueuses, qui représentent l'immense majorité. Au contraire, nous proposons de les soutenir, en évitant une concurrence déloyale fondée sur le contournement des règles sociales.
Les aides publiques doivent encourager de bons comportements et non pas cautionner des abus. Notre politique agricole doit, plus largement, être cohérente avec les valeurs de la République, l'exigence de dignité au travail et l'impératif de justice sociale. Telle doit être notre ambition collective.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, nous n'admettons pas davantage que vous les situations que vous décrivez et que vous n'êtes d'ailleurs pas seuls à dénoncer. Toutefois, je m'interroge : faut-il cibler un dispositif d'exonération des cotisations patronales ? Cette politique relève-t-elle de la sécurité sociale ? (Protestations sur des travées du groupe SER.)
Mme Annie Le Houerou. Nous proposons une simple conditionnalité de l'aide !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement est bien sûr très attentif à ces enjeux. Il vise lui aussi l'amélioration des conditions de travail des travailleurs occasionnels du secteur agricole.
L'objectif de l'exonération TO-DE est de soutenir les entreprises agricoles employeuses de main-d'œuvre occasionnelle, lesquelles sont confrontées à des crises récurrentes ainsi qu'à la concurrence internationale exercée sur les prix.
Le droit du travail contient quant à lui un vaste corpus de règles visant à protéger les travailleurs et à leur assurer des conditions de travail dignes. L'employeur qui s'y soustrait s'expose à des sanctions administratives et pénales. Le droit du travail n'est pas une option.
Mme Cathy Apourceau-Poly. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Cependant,…
Mme Laurence Rossignol. Tout est dans le « cependant »…
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. … le dispositif TO-DE n'est selon nous pas le bon outil pour inciter les entreprises à prendre des mesures plus favorables que les dispositions du code du travail.
Mme Raymonde Poncet Monge. Alors, quel est l'outil approprié ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Bref, votre cause est juste, mais l'instrument proposé ne nous semble pas adapté. Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Il y a quelques jours, nos collègues de la droite sénatoriale nous donnaient des leçons extrêmement vigoureuses de lutte contre les fraudes fiscale et sociale. Tout le monde ici renchérissait de sévérité, surtout, d'ailleurs, face à la fraude sociale.
Pour notre part, nous étions également mobilisés. Nous avons donc pu voter un certain nombre de dispositions ensemble.
Aujourd'hui, nous passons aux travaux pratiques : qu'est-ce que le non-respect du code du travail, sinon de la fraude ?
Chers collègues, nous vous proposons d'ajouter aux sanctions pénales une sanction de nature économique. Il y a quelques jours, vous nous expliquiez justement qu'il fallait supprimer le tiers payant…
Mme Laurence Rossignol. … pour les assurés sociaux qui avaient fraudé, au motif qu'ils méritaient une double peine.
J'en déduis qu'en cas de fraude la double peine vaut pour les salariés, non pour les employeurs. Franchement, soyez cohérents, tout le monde y gagnera. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Monsieur le ministre, un de vos arguments me laisse quand même dubitatif.
Vous nous dites en substance que le budget de la sécurité sociale n'est pas le bon véhicule pour mettre en œuvre une politique sociale. Nous examinons pourtant je ne sais combien d'amendements et de dispositifs tendant à soutenir l'activité économique, à aider tel ou tel secteur, ce qui n'est pas l'objet de la sécurité sociale.
Ce n'est pas l'objet de la sécurité sociale d'aider une filière agricole ; pas du tout ! Mais, à l'occasion, on utilise le budget de la sécurité sociale pour pallier les carences de l'État…
Mme Raymonde Poncet Monge. Très bien !
M. Bernard Jomier. Il est légitime de vouloir aider telle ou telle filière, mais les crédits dont il s'agit devraient figurer au projet de loi de finances. Or on préfère placer ces dispositions dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale – nous en avons largement l'habitude.
En l'occurrence, nous pointons la nécessité de mieux protéger les droits sociaux des salariés de la filière viticole. Cette question relève bien du budget de la sécurité sociale, mais vous laissez entendre que nous sommes à côté de la plaque… Cette distorsion de la réalité est à tout le moins intéressante.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Monsieur le ministre, j'ai un peu de mal à comprendre vos arguments : les dispositions de ces trois amendements identiques relèvent tout simplement du bon sens.
Les employeurs dont il s'agit seraient « tenus de garantir aux travailleurs occasionnels des conditions de logement digne, de participer à la prise en charge de leurs frais de transport, de mettre en place un plan de réexamen de la rémunération à la tâche ainsi que d'appliquer un plan canicule ». C'est quand même la base !
Il s'agit de faire respecter la loi et le code du travail. Nous ne parlons pas du tout d'une incitation, mais d'une aide qu'il convient de conditionner. À cette fin, il faut veiller à l'application du code du travail, notamment garantir la dignité de ces salariés, ce qui paraît somme toute logique.
Nous parlons d'argent public, de crédits relevant du budget de la sécurité sociale : les règles doivent être correctement appliquées. Après toutes les déclarations que nous avons entendues lors de l'examen du texte relatif à la fraude sociale, je ne comprendrais pas que le Sénat n'aille pas dans ce sens.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Mes chers collègues, à qui ces dispositions sont-elles destinées ? Toutes les entreprises viticoles ne sont pas concernées.
Nous parlons de celles et ceux qui font le choix d'aller chercher des hommes et des femmes, en général des hommes, pour récolter le raisin à la main. Il s'agit rarement du viticulteur du coin, qui gère une petite exploitation familiale. Ces dispositions visent surtout les grands, et même les très grands groupes ; les très grandes terres ; les très grands vins, qui appartiennent à peu près toutes et tous à des magnats de l'industrie, à des entreprises du luxe, en général étrangères.
Refuser de conditionner ces aides, c'est donc refuser de s'attaquer à celles et ceux qui ne respectent pas le code du travail. Il s'agit en réalité de grands propriétaires, non d'exploitants familiaux.
Monsieur le ministre, vous vous heurtez à un autre obstacle : le débat relatif au conditionnement des aides publiques, qui monte aujourd'hui dans notre société.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
M. Fabien Gay. Nos concitoyens n'accepteront pas longtemps encore que les subventions directes, les niches fiscales ou les exonérations de cotisations patronales ne soient soumises à aucune condition !
Le Gouvernement et la droite sénatoriale, travaillant main dans la main, durcissent chaque jour les conditions d'attribution des prestations sociales. Mais, quand on parle du capital, ce ne serait pas possible…
Il y va du respect du code du travail et, au-delà, de la dignité humaine. (Marques d'approbation sur les travées du groupe CRCE-K.) Les hommes et les femmes dont nous parlons, qui sont souvent des étrangers en situation irrégulière, se retrouvent dans des exploitations où le mot d'ordre est : « Tu bosses et tu te tais. » Vous ne proposez rien pour mettre fin à la double exploitation qu'ils subissent.
Le fait de conditionner ces exonérations serait vraiment un minimum.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Chers collègues de la droite sénatoriale, vous avez conditionné cette prestation minimale d'existence qu'est le revenu de solidarité active (RSA) à quinze heures d'activité. (Protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Daniel Fargeot. Mais c'est normal !
Mme Raymonde Poncet Monge. Je le répète, la France reçoit des fonds de la PAC. Or en vertu du règlement de cette politique, tout soutien octroyé à ce titre est conditionné au respect des droits des personnes et du travail. À l'évidence, on en est loin – j'en veux pour preuve la situation de l'hébergement, que j'ai évoquée tout à l'heure.
Monsieur le ministre du travail, vous dites que cet outil n'est pas le bon. J'en déduis qu'il faut recourir aux inspecteurs du travail : combien sont-ils ? Quelle est, pour ce corps, la courbe des effectifs ? Combien de contrôles les inspecteurs en fonction peuvent-ils mener dans ces exploitations ? Comment le ministère du travail et ses inspecteurs ont-ils pu laisser mourir les six travailleurs que je citais ? On ne doit pas exercer de telles tâches par temps de canicule ; mais, sauf exception, les pauvres travailleurs occasionnels ne peuvent pas revendiquer eux-mêmes l'application du droit du travail, et vous le savez.
J'y insiste, comment est-il possible que six travailleurs aient pu mourir, au cours d'une même semaine, dans ces exploitations du fait de la canicule ? Si les entreprises ne respectent pas le règlement de la PAC, il faut commencer par leur retirer ces fonds.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, j'entends que les inspecteurs du travail laissent mourir des gens : un tel propos est peut-être un peu excessif… (Protestations sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.)
M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Très excessif !
M. Fabien Gay. Personne n'a dit cela !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Je suis aussi là pour défendre le corps des inspecteurs du travail, qui mènent une action remarquable et dont nous avons rétabli les effectifs. Il me semblait nécessaire d'opérer cette mise au point.
Mme la présidente. La parole est à M. Sebastien Pla, pour explication de vote.
M. Sebastien Pla. Mes chers collègues, je tiens à témoigner en tant qu'exploitant agricole.
Les auteurs de ces amendements ont raison de vouloir conditionner les aides dont nous parlons. Je le constate en Languedoc, les prestataires de travaux tendent aujourd'hui à se multiplier. Ils embauchent de pauvres gens, venant très souvent de l'autre côté de la Méditerranée ou de l'Europe de l'Est, leur piquent leur passeport et bénéficient des exonérations TO-DE sans aucune condition.
Les inspecteurs du travail font très bien leur boulot – le problème, c'est qu'ils ne sont pas assez nombreux. Mais, quand ces entreprises se font attraper, c'est sur le malheureux exploitant que retombe la responsabilité pénale de l'embauche de ces personnes. Or il n'a aucun moyen de contrôle, et pour cause, les salariés agricoles dont nous parlons travaillent à la journée.
Nous sommes face à un système mafieux : c'est une réalité partout, que l'on parle des maraîchages, du vignoble ou d'autres secteurs encore. À l'évidence, l'attribution de ces aides doit être mieux encadrée.
De telles entreprises bénéficient d'exonérations TO-DE. Pour ma part, je ne suis pas d'accord. Il faut conditionner ces aides : mes chers collègues, vous avez entièrement raison. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.
Mme Pascale Gruny. Les inspecteurs du travail mènent un certain nombre de contrôles. Je ne sais pas s'ils sont assez nombreux…
Mme Laurence Rossignol. Il n'y en a pas assez, tout le monde le sait !
Mme Pascale Gruny. En tout cas, peut-être devraient-ils aller dans les entreprises qui ne vont pas bien au lieu de se rendre dans celles où il n'y a pas de problème, et d'où ils repartent sans avoir eu la moindre sanction à prononcer. Cette question mériterait d'être examinée.
J'étais membre de la commission d'enquête sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants, dont le rapporteur était Fabien Gay et le président Olivier Rietmann. Nous avons préconisé, entre autres, le conditionnement des aides publiques. Mais, au lieu de traiter les questions une par une, mieux vaudrait procéder globalement.
Je ne voterai donc pas ces trois amendements identiques, même si un certain nombre de situations sont effectivement scandaleuses. Des logements indignes sont proposés aux saisonniers. Pis encore, on a déploré plusieurs décès parmi eux, et c'est inacceptable.
C'est aussi aux chefs d'exploitation de veiller au respect des règles. Dans le secteur du transport routier, où j'ai travaillé, le chargeur est responsable de la sous-traitance. C'est le principe en droit français. Il faut donc regarder ce qui se passe sur le terrain, en contrôlant les agences d'intérim.
Employons tous les moyens de contrôle dont nous disposons, appliquons les sanctions prévues. Quant à la conditionnalité des aides, elle doit être traitée dans sa globalité.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1173, 1314 et 1691.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L'amendement n° 1121 rectifié bis, présenté par MM. Montaugé, Pla, Gillé et Lurel, Mme G. Jourda, MM. Redon-Sarrazy et Bourgi, Mmes Poumirol et Artigalas, M. Omar Oili, Mme Conway-Mouret, MM. Michau, Bouad, Tissot et Mérillou et Mmes Bélim et Monier, est ainsi libellé :
Après l'article 9 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le VI de l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un paragraphe VI... ainsi rédigé :
« VI.... – Lorsqu'elles réalisent plus de 75 % de leur chiffre d'affaires au titre d'activités issus des produits de la vigne tels qu'énumérés aux articles L. 665-1 à L. 665-9 du présent code, les sociétés coopératives agricoles définies aux articles L. 521-1 à L. 521-7 bénéficient des mesures énoncées au I du présent article. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Par cet amendement, notre collègue Franck Montaugé propose d'étendre le dispositif d'exonération TO-DE aux caves coopératives, lesquelles sont au cœur de nos bassins viticoles : elles transforment, valorisent et commercialisent le travail des exploitations.
Si les caves décrochent, les débouchés essentiels sont perdus. Cette situation serait d'autant plus redoutable que la filière est fragile. Elles emploient bien sûr des travailleurs saisonniers et font face aux mêmes contraintes de main-d'œuvre que les autres structures, dans la conjoncture particulièrement difficile que nous venons d'évoquer. Elles sont pourtant exclues du dispositif TO-DE.
Les coopératives majoritairement viticoles doivent en bénéficier : c'est une mesure de soutien à l'emploi local et à la filière, dans des territoires où les possibilités de développement économique demeurent très limitées et où l'attractivité se contracte. Bien entendu, les conditionnalités dont nous venons de parler pendant un quart d'heure sont absolument nécessaires.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L'avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Ces dispositions créent une confusion entre les entreprises de production agricole, qui bénéficient de l'exonération TO-DE, et les coopératives agricoles, qui sont là pour mutualiser leurs ressources et doivent normalement faire appel à une main-d'œuvre beaucoup plus pérenne.
Le Gouvernement ne sous-estime évidemment pas l'importance de la filière viticole pour l'industrie et le commerce français. C'est bien pourquoi, en 2024, plus de 230 millions d'euros ont été déployés pour soutenir les entreprises vitivinicoles au titre du fonds d'urgence.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet à son tour un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Sebastien Pla, pour explication de vote.
M. Sebastien Pla. Monsieur le ministre, au titre du budget de 2025, nous avons déjà débattu de ces questions – vous n'étiez pas alors membre du Gouvernement – et l'exonération TO-DE a été accordée aux coopératives d'utilisation du matériel agricole (Cuma), ainsi qu'aux coopératives de transformation de fruits et légumes. Quelle différence y a-t-il entre une coopérative de transformation de fruits et légumes et une coopérative de transformation de raisin en vin ? C'est exactement la même chose !
Cet amendement tend, en fait, à combler un trou dans la raquette. Il s'agit de mettre fin à une distorsion de traitement entre différentes coopératives agricoles.
Nous ne parlons pas de structures de la taille de Sodiaal, de Lactalis ou de je ne sais quelle multinationale, mais de petites coopératives locales, créées par les viticulteurs à l'échelle de leur territoire. Ces derniers n'ont pas forcément les moyens de transformer et de vendre leurs produits eux-mêmes : ils optent donc pour cet outil de cohésion territoriale, qui est également un amortisseur de crise.
Dans le rapport que nous avons consacré à la question, Daniel Laurent, Henri Cabanel et moi-même pointons la problématique des caves coopératives. Nous insistons sur les difficultés financières auxquelles elles font face. Entre autres pistes d'accompagnement et d'aide, nous évoquons l'exonération TO-DE. Pourquoi ? Parce que ces caves embauchent énormément de main-d'œuvre à l'époque des vendanges, qui ne dure que deux mois.
Ces salariés sont bien souvent des demandeurs d'emploi et des étudiants, qui se familiarisent ainsi avec l'économie agricole avant d'entrer dans le circuit et de cotiser comme les autres.
Lorsque ces coopératives cessent de fonctionner, c'est l'intégralité de la chaîne qui s'effondre. Sans elles, tous les viticulteurs vous demanderont demain des exonérations de charges : ils ne pourront plus s'en sortir, puisque les caves coopératives vitivinicoles ne seront plus en mesure de les rémunérer correctement.
Cette mesure, qui ne coûtera pas grand-chose, vous permettra de sauver une filière en grande difficulté. Je le répète, ces coopératives sont assises sur une coopération volontaire et territoriale.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. Mes chers collègues, j'abonde dans le sens de M. Pla. À l'origine, les caves coopératives sont des groupements de petits viticulteurs ayant entrepris de vinifier ensemble. Je suis bien placé pour le savoir, la première cave coopérative vitivinicole ayant vu le jour dans l'Hérault.
Nous sommes face à une question d'équité. M. Pla vient de citer les coopératives d'utilisation de matériel agricole, plus connues sous le nom de Cuma. En l'occurrence, nous parlons de caves dans lesquelles les viticulteurs vinifient ensemble.
Quelle différence y a-t-il entre un vigneron qui vinifie dans sa cave particulière et plusieurs vignerons qui se regroupent pour vinifier dans une cave coopérative ? C'est la même chose. Je ne vois pas pourquoi les uns bénéficieraient de l'exonération TO-DE et les autres non.
Il faut être raisonnable. Reconnaissons-le, nous sommes face à un défaut d'équité entre les Cuma et les caves coopératives.
Je ne reviendrai pas sur les difficultés de notre viticulture, que le changement climatique et la baisse de rendement des caves coopératives placent en mauvaise posture – les frais des caves coopératives tendent en effet à augmenter, car les rendements, qui en sont les diviseurs, diminuent progressivement.
Il ne faut pas aggraver encore cette injustice en refusant d'étendre l'exonération TO-DE aux caves coopératives. La demande formulée au travers de cet amendement me semble justifiée.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Permettez-moi de revenir un instant au sujet précédent. Il faut bel et bien conditionner l'exonération TO-DE à l'attribution de logements décents… (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Eh bien, il fallait voter nos amendements !
M. Daniel Chasseing. Le respect de cette règle doit être contrôlé lors de la demande d'exonération…
Mme Raymonde Poncet Monge. C'est cela !
M. Daniel Chasseing. En ce sens, je suis d'accord avec Mme Gruny.
Quant au présent amendement, qui a pour objet les coopératives vitivinicoles, nous le voterons. Comme l'a dit M. Cabanel, il n'y a pas de différence entre un vigneron qui a sa propre cave et un groupement de vignerons constitué autour d'une cave coopérative. En outre, cette exonération est déjà accordée aux Cuma. N'aggravons pas la situation des vignerons, qui font déjà face à beaucoup de problèmes.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1121 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel est inséré dans le projet de loi, après l'article 9 quater.
Article 9 quinquies (nouveau)
I. – Le A du I de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Le montant des dons en nature de produits tirés des activités mentionnées au premier alinéa du présent A, effectués à destination de personnes morales habilitées au titre de l'article L. 266-2 du code de l'action sociale et des familles. »
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. L'amendement n° 608, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet article, introduit dans le présent texte par l'Assemblée nationale, exonère de cotisations à la Mutualité sociale agricole tous les dons faits en nature par des agriculteurs. Il s'agit, par exemple, de denrées offertes aux banques alimentaires.
L'intention est bien sûr tout à fait louable ; simplement, je ne vois pas comment un tel dispositif peut tourner.
De plus, cette exonération n'est assortie d'aucun plafond : nous sommes donc face à un coût potentiellement incontrôlé.
Enfin, et surtout, comment vérifier la qualité et le volume des produits ? Ces points n'étant pas explicités, la commission propose de supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement est favorable à la suppression de cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.
Mme Annie Le Houerou. Madame la rapporteure générale, cette année, vous avez entrepris d'appliquer un principe simple : supprimer toutes les exonérations de cotisations introduites dans le PLFSS, au nom de la protection des comptes de la sécurité sociale et de la préservation des recettes.
Toutefois, je constate que vous procédez sans discernement et sans tenir compte de la réalité que vivent nos concitoyens. Ainsi, vous refusez toutes les adaptations que nous vous proposons afin de rendre ces exonérations plus justes, plus adaptées aux réalités, en évitant les effets d'aubaine.
L'article 9 quinquies exonère de cotisations à la MSA les dons en nature effectués par les agriculteurs auprès de l'aide alimentaire.
Ce dispositif, adopté sur l'initiative de notre collègue député Guillaume Garot, a pour but de lutter contre la précarité alimentaire en incitant les exploitants agricoles à donner une part de leur production.
Si vous faites un don en nature, vous n'êtes pas exonéré de cotisations. En revanche, si vous faites un don financier, vous bénéficiez d'un avantage fiscal. Il s'agit, en réalité, d'aligner le régime des dons en nature sur celui des dons financiers.
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.
M. Vincent Louault. Ce que le Sénat s'apprête à faire est tout de même très ennuyeux ! L'article 9 quinquies a été introduit à l'Assemblée nationale par un amendement voté à l'unanimité, sur une proposition de l'association de solidarité des producteurs agricoles et des filières alimentaires (Solaal), présidée par Angélique Delahaye, ancienne eurodéputée, alors membre du groupe LR !
Aujourd'hui, les Restos du Cœur ou les banques alimentaires sont confrontés à de réelles difficultés pour récolter des dons. Le dispositif introduit permet d'y répondre (Mme la rapporteure générale le conteste.), en tout cas en partie.
Mes chers collègues, je vous invite à faire preuve de plus de mesure que Mme le rapporteur général.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je peux parler en connaissance de cause : en tant que présidente d'une épicerie sociale dépendant d'une banque alimentaire, je connais les difficultés d'approvisionnement, et je sais combien les denrées sont aujourd'hui difficiles à obtenir.
Pour autant, je ne crois pas que l'article 9 quinquies soit la solution. Avec un tel dispositif, le moindre don de pommes ou de lait donnerait droit à exonération de cotisations à la mutualité sociale agricole. Concrètement, qui ira vérifier la quantité et la qualité des produits concernés ?
Je pense que l'intention est bonne, mais que la mesure proposée n'est pas la réponse adaptée à la pénurie actuellement constatée.
En réalité, les obligations européennes, notamment en matière d'inventaire, nous font beaucoup de mal, en décourageant les bénévoles dans les épiceries sociales ou aux Restos du Cœur.
Les problèmes d'approvisionnement en denrées dans ces établissements sont multifactoriels, et, à mon avis, ce n'est pas le mécanisme prévu à l'article 9 quinquies qui permettra de changer la donne.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. J'entends les arguments de Mme le rapporteur général, mais je trouve dommage que nous ne puissions pas adopter cet article dans une version modifiée – l'idée n'est évidemment pas de faire un vote conforme –, afin de l'améliorer ensuite dans la navette.
Le dispositif mérite sans doute d'être rectifié et borné, mais, comme cela a été rappelé, il est très attendu : par les temps qui courent, il est tout de même rare qu'une mesure soit votée à l'unanimité à l'Assemblée nationale !
Nous parlons d'aide aux plus fragiles. Si je ne suis pas certaine que l'article 9 quinquies soit véritablement opérationnel, je ne suis pas certaine non plus qu'en l'état, il faille le supprimer.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 608.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 9 quinquies est supprimé.
Après l'article 9 quinquies
Mme la présidente. L'amendement n° 394 rectifié ter, présenté par MM. Menonville, Mizzon, Pointereau et Bacci, Mme Billon, MM. Canévet, Kern et Chatillon, Mme Antoine, MM. de Nicolaÿ, A. Marc et Bleunven, Mmes Romagny et Paoli-Gagin et M. Haye, est ainsi libellé :
Après l'article 9 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Au premier alinéa du A du I de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale, la référence : « 73 E » est remplacée par la référence : « 72 E » et les mots : « de l'article 75-0 A » sont remplacés par les mots : « des articles 75, 75-0 et 151 octies ».
II.- La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Jean Bacci.
M. Jean Bacci. Cet amendement est défendu.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise, apparemment, à corriger un oubli du législateur lors de la définition de l'assiette des contributions sociales des non-salariés agricoles en lois de financement de la sécurité sociale pour 2024 et 2025. La commission sollicite l'avis du Gouvernement à cet égard.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement approuve l'intention – maintenir les exclusions existantes en matière de plus-value de court terme – des auteurs de cet amendement.
Toutefois, il faudrait en affiner la rédaction, qui ne nous paraît pas adéquate. En l'état, elle aurait pour effet d'écraser certaines exemptions qui nous paraissent utiles et d'en ajouter de nouvelles dont nous pourrions nous passer.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement sous réserve d'ajustements rédactionnels au cours de la navette.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 394 rectifié ter.
(L'amendement, modifié par la suppression du gage, est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9 quinquies.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 389 rectifié bis, présenté par MM. Menonville, Mizzon et Bacci, Mme Billon, MM. Canévet, Dhersin, de Nicolaÿ, Kern, Chatillon et Fargeot, Mmes Antoine et Patru, MM. Chevalier et A. Marc, Mme Paoli-Gagin et M. Haye, est ainsi libellé :
Après l'article 9 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le A du I de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« ... ° Les rentes versées aux non-salariés agricoles pour les maladies professionnelles et les accidents du travail, ou en réparation des maladies causées par des pesticides, au sens du 8° de l'article 81 du code général des impôts ;
« ... ° Les abandons de compte courant d'associé assimilé socialement à des apports en société. »
II. – L'article L. 731-14 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ouvrent droit à une réduction du montant des cotisations sociales les dons en nature portant sur des denrées alimentaires, effectués par les chefs d'exploitations au profit d'associations caritatives, à partir de produits issus de leur production dans une limite et selon des conditions prévues par décret en Conseil d'État ».
IV. – La perte de recettes des dispositions prévues aux II et III est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Daniel Fargeot.
M. Daniel Fargeot. Défendu.
Mme la présidente. L'amendement n° 388 rectifié bis, présenté par MM. Menonville et Mizzon, Mme Joseph, MM. Bacci, Kern, Chasseing et Fargeot, Mme Patru, MM. Chevalier, de Nicolaÿ, Chatillon et Dhersin, Mme Antoine, M. A. Marc, Mme Paoli-Gagin et M. Haye, est ainsi libellé :
Après l'article 9 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le A du I de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Les abandons de compte courant d'associé assimilé socialement à des apports en société. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Daniel Fargeot.
M. Daniel Fargeot. Défendu.
Mme la présidente. L'amendement n° 387 rectifié quater, présenté par MM. Menonville et Mizzon, Mme Gacquerre, M. Bacci, Mme Billon, MM. Canévet et Kern, Mme Housseau, MM. Chatillon et Fargeot, Mme Patru, MM. Chevalier, de Nicolaÿ, J.M. Arnaud, Dhersin, A. Marc et Bleunven, Mmes Romagny et Paoli-Gagin et MM. Haye et Levi, est ainsi libellé :
Après l'article 9 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L'article L. 731-14 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° À l'exception des sommes versées aux non-salariés agricoles pour les maladies professionnelles et les accidents du travail, ou en réparation des maladies causées par des pesticides, au sens du 8° de l'article 81 du code général des impôts. »
II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Daniel Fargeot.
M. Daniel Fargeot. Une réforme introduite en loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 et destinée à entrer en vigueur en 2026 consiste à mettre en place une assiette unique et simplifiée pour les cotisations sociales et contributions se rapprochant de celles des salariés.
Elle a pour effet d'aligner l'assiette des cotisations sociales et l'assiette des contributions telles que la CSG-CRDS pour les non-salariés agricoles, excepté quelques retraitements, en vue de déduire les contributions et d'augmenter les cotisations créatrices de droits.
Sans transposition dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, le dispositif fiscal continuera, certes, de s'appliquer en 2026, mais il ne s'appliquera plus à l'assiette sociale, pénalisant ainsi les assurés agricoles victimes d'accidents du travail, de maladies professionnelles ou de maladies causées par des pesticides.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 389 rectifié bis.
En effet, compte tenu de la situation de nos comptes sociaux, une telle mesure nous inspire des réserves. Il est proposé de diminuer une assiette soumise à des prélèvements sociaux. C'est le même objectif qu'à l'article 9 quinquies – encourager le don de denrées alimentaires –, mais, là encore, le coût du dispositif, qui pourrait affecter significativement les finances sociales, n'est pas évalué.
La commission sollicite l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 388 rectifié bis, pour des raisons techniques.
Enfin, l'avis est favorable sur l'amendement n° 387 rectifié quater.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 389 rectifié bis, pour les mêmes raisons que la commission.
J'en viens à l'amendement n° 388 rectifié bis, sur lequel Mme la rapporteure générale a sollicité l'avis du Gouvernement.
Il est proposé d'exclure de l'assiette des cotisations sociales des exploitants agricoles les sommes présentes sur leur compte courant d'associés qu'ils abandonnent au profit de la société dans laquelle ils exercent.
Pour l'associé, l'apport en compte courant consiste à consentir à sa société des avances ou des prêts, en versant directement des fonds ou en laissant à sa disposition des sommes qu'il renonce provisoirement à percevoir. Selon la jurisprudence constante du Conseil d'État, la simple renonciation par un associé à une partie des sommes figurant sur ses comptes courants d'associé en l'absence de contrepartie constitue un résultat imposable de l'entreprise. Ces sommes rentrent donc également dans l'assiette des cotisations sociales.
Une exonération de cotisations entraînerait une rupture d'égalité avec les professions non agricoles et créerait un vecteur important d'optimisation sociale.
C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Enfin, à l'instar de la commission, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 387 rectifié quater.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 389 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 388 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 387 rectifié quater.
(L'amendement, modifié par la suppression du gage, est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9 quinquies.
L'amendement n° 229 rectifié bis, présenté par Mmes Malet, Jacques, Petrus, Aeschlimann, Gruny, M. Mercier, Muller-Bronn et Lassarade et MM. Panunzi, Rietmann, Perrin, H. Leroy, Houpert et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l'article 9 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le dernier alinéa de l'article L. 781-6 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Les mots : «, au cours d'une année civile, » sont supprimés ;
2° Les mots : «, dans le cadre d'une diversification de la production ou de la mise en valeur de terres incultes, de terres laissées à l'abandon ou de terres insuffisamment exploitées, » sont supprimés ;
3° Les mots : « pour une période de cinq ans » sont supprimés ;
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée, à due concurrence, par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. À la suite du vote par le Sénat du projet de loi de lutte contre la vie chère dans les outre-mer, le Gouvernement élabore un décret visant à promouvoir une part minimale de surface de vente de produits locaux au sein des grandes surfaces. Il s'agit d'une initiative visant à accroître l'autonomie alimentaire, à aider nos agriculteurs et à lutter contre la vie chère.
La Haute Assemblée a récemment soutenu cette démarche en adoptant un amendement ayant pour objet de préciser le contenu du décret à venir et d'en sécuriser la préparation.
Afin de donner leur pleine capacité aux mesures qui sont envisagées, il faut désormais permettre à nos agriculteurs de produire davantage.
Or, aujourd'hui, en produisant plus, l'exploitant perd une partie des exonérations de cotisations sociales auxquelles il a droit.
En cohérence avec la volonté partagée du Gouvernement et du Sénat, le présent amendement vise à maintenir le bénéfice de l'exonération de cotisations sur les 40 premiers hectares pondérés dans le cas d'un dépassement, quelle qu'en soit la raison, ainsi que la limite de cinq ans.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L'exonération que notre collègue évoque a été conçue pour les petites exploitations, et chacun en reconnaît la légitimité.
Mais, en l'occurrence, il est proposé d'en étendre le bénéfice aux exploitations de plus de 40 hectares. Cela nous paraît un peu excessif.
C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Aujourd'hui, l'exonération totale s'applique aux exploitations agricoles d'une surface inférieure à 40 hectares, soit, me semble-t-il, 98 % d'entre elles. En outre-mer, 19 000 exploitations sont concernées.
Il ne nous semble pas souhaitable d'étendre l'exonération aux exploitations de plus de 40 hectares, d'autant qu'en cas de dépassement de la surface, un dispositif d'accompagnement est déjà prévu, puisque le régime en vigueur est maintenu pendant cinq ans. Il ne nous paraîtrait pas justifié d'aller plus loin.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.
Mme Audrey Bélim. Alors même que le Gouvernement veut imposer une part minimale de produits locaux dans les grandes surfaces, ce que nous approuvons, les agriculteurs ultramarins – en ce qui me concerne, je parle surtout de ceux que je connais le mieux, c'est-à-dire les agriculteurs réunionnais – risquent paradoxalement de perdre leur exonération sociale dès qu'ils augmentent leur production.
L'amendement de notre collègue tend simplement à corriger cette incohérence en sécurisant les exonérations sur les 40 premiers hectares. C'est pourquoi je le voterai.
Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Mes collègues ont présenté des arguments en faveur de cet amendement et évoqué les projets contribuant au développement de la production locale. Pour ma part, j'aimerais insister sur un autre point.
Depuis toujours, nous sommes spécialisés dans deux grandes cultures : la canne à sucre et la banane.
Certes, Mme la rapporteure générale parle de 40 hectares. Mais il s'agit de 40 hectares pondérés ! Par exemple, pour la banane, où le coefficient de pondération est de quatre, 10 hectares, cela fait 40 hectares pondérés. Pour la canne à sucre, où le coefficient de pondération pour être affilié à l'assurance maladie des exploitants agricoles (Amexa) est d'un, un hectare, cela fait un hectare pondéré. Or il faut au moins deux hectares pour avoir la qualité d'agriculteur.
Il est donc difficile de faire de la diversification animale et végétale : dès que l'on dépasse la surface pondérée maximale autorisée, on perd le bénéfice des exonérations. C'est un vrai sujet.
Et les deux années supplémentaires pour faire de la diversification ou les cinq années supplémentaires que M. le ministre a évoquées, cela ne marche pas !
Une fois que vous avez dépassé les surfaces maximales pondérées, de quoi avez-vous besoin ? De 1 000 mètres carrés ? Dans l'horticulture ou la floriculture, ce sont de très petites exploitations.
En plus, la doctrine administrative est plutôt compliquée là-bas…
Votons l'amendement de notre collègue Viviane Malet.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 229 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9 quinquies.
Article 9 sexies (nouveau)
I. – L'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est complété par un VIII ainsi rédigé :
« VIII. – Par dérogation au I du présent article, cette exonération s'applique dans les territoires précités :
« 1° Aux chambres d'agriculture, pour leurs seules activités industrielles et commerciales mentionnées à l'article L. 514-4 du code rural et de la pêche maritime ;
« 2° Aux chambres de commerce et d'industrie territoriales mentionnées au 4° de l'article L. 711-3 du code de commerce, pour l'exercice de leurs missions. »
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Bélim, sur l'article.
Mme Audrey Bélim. Mme la rapporteure générale souhaite supprimer une avancée que les députés ont introduite dans le texte.
Je le précise, le dispositif voté par nos collègues députés étend l'exonération aux seules activités industrielles et commerciales des chambres d'agriculture. D'une part, cela rétablit une équité de traitement également entre opérateurs qui exercent – je le rappelle – les mêmes missions économiques. D'autre part, cela garantit une utilisation efficace des fonds publics en permettant aux chambres d'agriculture de renforcer un budget aujourd'hui insuffisant pour assurer les missions qui leur sont imposées.
Les missions de service public industriel et commercial des chambres d'agriculture ne se développent pas de la même manière en outre-mer et dans l'Hexagone.
Dans l'Hexagone, les chambres financent une grande partie de leur fonctionnement grâce aux prestations commerciales, aux recettes propres, aux expertises techniques vendues, aux formations rémunérées et aux services payants aux agriculteurs et collectivités. L'activité est dense, stable et rentable, ce qui compense la baisse des dotations publiques.
En outre-mer, il n'est pas possible de développer un service public industriel et commercial rentable. Les contraintes climatiques empêchent tout modèle économique autonome. Nos exploitations sont plus petites, dix fois plus petites, que celles de l'Hexagone. Les revenus agricoles sont plus faibles. La vulnérabilité économique est plus forte, car la priorité est donnée à la survie et non aux services commerciaux. L'éloignement géographique fait augmenter les coûts des prestations. Les filières sont beaucoup moins industrialisées ; il y a donc moins de demandes pour des expertises spécifiques. Et le budget européen est conditionné : nos marges sont donc moindres.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Audrey Bélim. L'adaptation envisagée par Mme la rapporteure générale ne convient pas à nos territoires.
Mme la présidente. L'amendement n° 609, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Chers élus de l'outre-mer, voilà quelques jours, nous avons discuté du dispositif Lodéom. Nous avons tous conclu qu'il fallait le revoir et le simplifier avec les élus, les acteurs économiques et l'ensemble des forces vives de nos territoires ultramarins.
Et là, vous nous demandez d'étendre aux chambres d'agriculture une mesure qui ne convient à personne.
Mme Audrey Bélim. Je n'ai jamais dit cela !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je rappelle au demeurant qu'une mission conjointe de l'Igas et de l'IGF a remis un rapport dont les conclusions sont assez consensuelles parmi les acteurs économiques de vos territoires : le système est d'une complexité sans nom.
Vous-même avez reconnu qu'il fallait revoir intégralement le dispositif. Dès lors, pourquoi vouloir l'étendre aux chambres d'agriculture ?
Je le rappelle, ces dernières, à l'instar des chambres de commerce, ont un statut bien particulier.
Le risque est de créer une distorsion de concurrence avec les entreprises présentes sur le territoire. Or, si les activités sont effectivement identiques, le statut ne l'est pas. Veillons à ne pas modifier par petites touches un dispositif qui ne satisfait personne.
C'est le sens de mon amendement de suppression de l'article 9 sexies.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Mme la rapporteure générale souhaite supprimer l'extension de l'exonération Lodéom aux chambres d'agriculture sur les heures consacrées à une activité de service public industriel et commercial.
Revenons aux principes : l'exonération Lodéom dans les territoires ultramarins est fondée sur une acception stricte des entreprises et des secteurs qui en bénéficient. Le fait que les services publics ayant une activité concurrentielle n'en bénéficient pas est souvent compensé par d'autres modes de financement qui placent les acteurs concernés dans une position plus avantageuse que le secteur privé.
Aussi, afin de ne pas amplifier de tels déséquilibres et distorsions directes ou indirectes, le Gouvernement, tout en étant sensible à la situation des chambres consulaires, émet un avis favorable sur cet amendement de suppression de l'article 9 sexies.
Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Il y a une vraie confusion sur le statut des chambres consulaires.
Dans l'objet de l'amendement de Mme la rapporteure générale, il est indiqué que la mise en œuvre du dispositif prévu à l'article 9 sexies pourrait « brouiller la frontière » entre entreprises concurrentielles et organismes parapublics et contraindre les chambres à « dissocier leurs activités ».
Disons-le clairement : une instruction comptable M9-2 dissocie déjà ces activités !
Pour ma part, j'ai été directeur de chambre. J'étais alors un contractuel de droit de public.
En revanche, tous les services d'utilité agricole, qu'il s'agisse du service du développement, des établissements départementaux de l'élevage, qui font de l'insémination artificielle, ou des services de gestion, qui établissent par exemple les dossiers d'installation pour les jeunes agriculteurs, sont dans le secteur concurrentiel et ne bénéficient pas des exonérations que nous demandons.
Ce que les députés ont fait, et que le Sénat s'apprête à défaire, a simplement consisté à corriger une erreur de plume. Ce n'est pas parce que les établissements publics bénéficient de ce statut pour leurs activités publiques que les services agricoles doivent relever du marché et du secteur concurrentiel ! Aujourd'hui, les chambres d'agriculture, qui sont confrontées à une pénurie de vétérinaires, doivent aller voir la concurrence, qui bénéficie d'exonérations !
Sincèrement, ce que Mme la rapporteure générale nous demande est calamiteux. Ne laissons pas faire cela !
Si nous corrigeons seulement aujourd'hui ce qui est depuis toujours une erreur, c'est uniquement du fait d'une prise de conscience tardive.
Dans les outre-mer, les ressources propres des chambres d'agriculture, notamment la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB), c'est 10 % à 30 % sur de petites exploitations.
Mes chers collègues, refuser de corriger une telle inégalité de traitement serait une grave erreur politique. Je vous demande de ne pas voter cet amendement de suppression.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 609.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 9 sexies est supprimé, et les amendements identiques nos 965 rectifié bis et 1407 n'ont plus d'objet.
Après l'article 9 sexies.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 913 rectifié, présenté par Mme Bélim, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 1° du B du III de l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le montant de l'exonération calculé selon les modalités prévues au dernier alinéa du présent B est applicable aux employeurs relevant des secteurs du bâtiment et des travaux publics pour le paiement des cotisations et contributions mentionnées au I de l'article L. 241-13 dues du Ier janvier 2026 au 31 décembre 2027.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Toutes les études économiques le confirment : dans les outre-mer, notamment dans le territoire que je connais le mieux, La Réunion, les coûts de production dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) sont structurellement supérieurs de 25 % à 40 % à ceux qui sont pratiqués dans l'Hexagone.
Cela tient à trois facteurs : l'importation obligatoire de la quasi-totalité des matériaux, les normes spécifiques du bâti tropical, plus exigeantes, et les délais logistiques, qui renchérissent chaque chantier et chaque retard. À cela s'ajoute le fait que les délais de paiement publics peuvent dépasser six mois, quand l'écosystème local est composé à 90 % de petites structures.
Résultat : nous avons un secteur sous-capitalisé à faible marge, incapable d'absorber les chocs. Les chiffres sont clairs : un tiers des emplois ont été perdus entre 2008 et 2017, les trésoreries sont en tension et le niveau d'investissement public est au plus bas depuis plus de vingt ans dans certains territoires.
Mon amendement ne vise pas à créer un nouveau régime. Il s'agit simplement de réactiver temporairement un barème renforcé d'exonération dont l'efficacité a déjà été démontrée en ciblant exclusivement le BTP, secteur le plus exposé et le plus multiplicateur en matière d'emplois.
Techniquement, cette mesure réduit mécaniquement le coût du travail, stabilise les trésoreries, évite les faillites en chaîne et préserve la capacité de production indispensable pour répondre aux obligations de construction, de rénovation thermique et d'adaptation climatique. Elle est proportionnée, temporaire et maîtrisée budgétairement. Sans elle, nous courons vers une paralysie du secteur.
Mme la présidente. L'amendement n° 1353, présenté par M. Lurel, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 1° du B du III de l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le montant de l'exonération calculé selon les modalités prévues au dernier alinéa du présent B est applicable aux employeurs relevant des secteurs du bâtiment et des travaux publics pour le paiement des cotisations et contributions mentionnées au I de l'article L. 241-13 dues du 1er janvier 2026 au 31 décembre 2027 ».
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2026.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Je rappelle que le Sénat avait déjà adopté un dispositif similaire. Malheureusement, celui-ci n'avait pas été maintenu en commission mixte paritaire.
Je vous demande donc, mes chers collègues, de confirmer votre vote antérieur en soutenant cette mesure temporaire.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Lors de l'examen de l'article 9, nous étions convenus de ne pas revenir sur la diminution du dispositif Lodéom.
Nous sommes convaincus qu'il est grand temps de remettre tous les acteurs autour de la table pour réfléchir à un dispositif plus simple, plus accessible et respectueux de la diversité des territoires.
C'est pourquoi je suis défavorable à toutes les extensions du dispositif Lodéom qui sont proposées dans le cadre de ce PLFSS.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Les auteurs de cet amendement demandent l'application du barème de compétitivité renforcée pour les entreprises du BTP. Aujourd'hui, ce secteur bénéficie d'un régime dit « de compétitivité » tout court, qui est d'ailleurs concentré autour des bas salaires. Ce régime de compétitivité nous paraît suffisamment adapté, compte tenu du niveau des rémunérations dans le secteur.
En effet, le BTP ne fait pas partie des secteurs les plus exposés à la concurrence internationale. Or ce serait le critère qui justifierait l'application du barème de compétitivité renforcée, c'est-à-dire un changement de régime.
Je rappelle par ailleurs que des mesures spécifiques ont été mises en place dans le secteur pour faire face à la flambée des prix – nous ne la contestons absolument pas – et aux conséquences de la crise sanitaire. Je pense notamment au gel des pénalités de retard des entreprises du bâtiment ou encore à la mise en place d'une médiation de filière pour le BTP.
Compte tenu des éléments que je viens d'évoquer, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.
Mme Audrey Bélim. Je veux rappeler que nos entreprises sont confrontées à une baisse régulière de leurs moyens financiers. Les collectivités locales, principales donneuses d'ordre du BTP, raréfient leurs commandes, même si elles continuent de représenter 86 % de l'activité du secteur. On déplore également une raréfaction de la commande du côté des bailleurs sociaux, qui sont en proie à un manque de foncier face à une demande croissante.
Alors que nous vivons une crise du logement exacerbée sur notre territoire, la réorientation annoncée du prêt à taux zéro (PTZ) et le ralentissement des constructions de logement intermédiaire, dus à la remise en cause des lois de défiscalisation immobilière et du dispositif Pinel dans les outre-mer, achèvent de perturber le secteur.
Encore une fois, dans un tel contexte, les acteurs de la filière souhaitent que les pouvoirs publics, nationaux et locaux, prennent véritablement en compte cette situation critique. Il s'agit d'une urgence économique pour nos territoires !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 913 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1353.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 9 septies (nouveau)
I. – L'article L. 5553-11 du code des transports est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « code », sont insérés les mots : « , de la cotisation d'allocations familiales prévue à l'article L. 241-6 du code de la sécurité sociale et de la contribution patronale à l'allocation d'assurance contre le risque de privation d'emploi mentionnée au 1° de l'article L. 5422-9 du code du travail » ;
2° Le deuxième alinéa est supprimé ;
3° Au troisième alinéa, la première occurrence du mot : « deuxième » est remplacée par le mot : « premier » ;
4° À la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « aux deux premiers alinéas » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa » ;
5° L'avant-dernier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « aux deux premiers alinéas » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa » ;
b) À la seconde phrase, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « troisième ».
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, sur l'article.
Mme Céline Brulin. Je tenais à prendre la parole sur l'article 9 septies, car l'adoption d'amendements de suppression risque de faire tomber notre amendement n° 1174.
Cet article, introduit à l'Assemblée nationale, prévoit de réintégrer les navires de fret et la plupart des navires de service dans le dispositif d'exonération de cotisations d'assurance chômage et d'assurance famille.
J'entends parfaitement les arguments en faveur de la suppression d'une telle disposition, mais l'année dernière, nous avions déjà supprimé ce dispositif dans le cadre du PLFSS pour 2025, sans faire de distinction entre les armateurs qui ont recours à la propulsion fossile et ceux qui utilisent des énergies alternatives et durables, comme la voile.
Vous le savez, et nos amendements sont nombreux à en témoigner, nous sommes favorables à une modulation des taux de cotisation en fonction de critères non seulement sociaux, mais aussi environnementaux.
C'est la raison pour laquelle nous proposons de rétablir l'exonération pour les armateurs de la filière vélique. Cela concerne plus de quatorze équipementiers qui développent des systèmes très innovants et envisagent de créer 4 000 emplois à l'horizon 2030.
Certes, une proposition de loi transpartisane visant à accélérer le développement du transport maritime à propulsion vélique a été déposée à l'Assemblée nationale ; elle a d'ailleurs été signée par plusieurs députés de la Seine-Maritime. Il n'empêche que ce débat a tout à fait sa place au sein de ce PLFSS.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Somon, sur l'article.
M. Laurent Somon. Mes propos iront dans le même sens que ceux de ma collègue Brulin, bien qu'ils concernent un sujet plus large encore.
Nous souhaitons défendre, avec Agnès Canayer, le maintien de l'article 9 septies.
Permettez-moi en préambule de planter le décor : la France possède le deuxième domaine maritime du monde. Les mers et les océans constituent une richesse et un espace stratégique tant pour ce qui est des ressources que des voies de communication, dès lors que 90 % à 95 % des transports s'effectuent par voie maritime.
Les activités de transport participent à l'écosystème économique, non seulement pour les industries qui développent des solutions décarbonées, mais aussi pour les câbliers, les transporteurs de matériel permettant le déploiement d'énergies renouvelables (EnR) en mer et les transporteurs spécialisés, notamment dans le domaine aéronautique et spatial – on voit bien l'importance du sujet.
Le transport maritime participe à 3 % des émissions de gaz à effet de serre et doit atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050. Dans ces conditions, les entreprises innovantes, notamment celles qui développent la navigation à voile ou à l'hydrogène, doivent pouvoir se développer.
Rappelons que le secteur est exposé à une concurrence mondiale féroce concernant le coût du personnel. En effet, les différentiels sont extrêmement importants, même avec nos voisins européens, car ces derniers pratiquent le net wage, soit un système qui leur permet de supporter uniquement le tarif net des salaires.
Ainsi, les écarts atteignent 15 % pour les fonctions supérieures et près de 50 % pour les fonctions inférieures. Si l'on compare la situation de la France à celle de l'Asie, un officier français coûte 156 % de plus qu'un officier philippin.
Pour défendre la filière du transport maritime, je souhaite que l'on puisse préserver ses avantages. Voilà pourquoi je plaide pour le maintien de l'article 9 septies, qui se contente de réintroduire un dispositif mis en place en 2016 et supprimé l'an dernier.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 610 est présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 1005 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l'amendement n° 610.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je vous remercie, mes chers collègues, d'avoir attiré mon attention sur les éléments que vous avez présentés au soutien de vos propositions.
Néanmoins, à travers cet amendement, nous proposons de supprimer l'article 9 septies. En effet, l'année dernière, nous avions déjà longuement débattu de ce sujet et nous étions parvenus à un consensus. Nous avions d'ailleurs fait un geste en faveur de la filière vélique, madame Brulin.
L'article 22 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 a recentré les exonérations de cotisations familiales et de contribution à l'assurance chômage au bénéfice des seuls navires de transport de passagers.
En 2021, le coût de l'exonération de contributions sociales des entreprises d'armement maritime représentait un manque à gagner de 47 millions d'euros pour la sécurité sociale.
Il ne semble pas opportun de revenir sur l'équilibre que nous avons trouvé il y a tout juste un an. C'est pourquoi la commission demande la suppression de cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 1005.
Mme Raymonde Poncet Monge. L'article 9 septies, que nous souhaitons nous aussi supprimer, a été introduit à l'Assemblée nationale pour revenir sur les dispositions votées dans le cadre du PLFSS précédent.
Celles-ci avaient restreint les exonérations créées en 2016 aux seuls armateurs opérant des navires de transport de passagers, des navires câbliers et des navires de service consacrés aux énergies marines renouvelables.
J'entends les arguments de ma collègue communiste. Vous vous doutez que je suis sensible au soutien de la filière vélique, mais, en l'occurrence, l'article prévoit de rétablir les exonérations de cotisations sociales pour les autres activités du secteur maritime, notamment les entreprises d'armement maritime.
Interrogé en avril 2025 par notre collègue Agnès Canayer lors d'une séance de questions orales, le Gouvernement avait répondu : « nous avons d'ores et déjà prévu une évaluation approfondie du dispositif visant à en apprécier pleinement les effets économiques et budgétaires », en vue du PLFSS pour 2026.
Or il se trouve que cette évaluation promise, comme beaucoup d'autres, n'a jamais vu le jour. En conséquence, nous considérons qu'il est prématuré de légiférer sur un dispositif à peine introduit, sans avoir bénéficié d'étude préalable.
L'article 9 septies aura pour conséquence d'amplifier les baisses de recettes, au bénéfice d'entreprises d'armement maritime comme Naval Group. Ce dernier présente aujourd'hui un chiffre d'affaires de 4,3 milliards d'euros, soit son meilleur résultat depuis 2020. Dans ces conditions, il peut, sans avoir à compromettre son statut stratégique, soutenir un rétablissement des cotisations d'assurance famille et d'assurance chômage.
Puisqu'il semblerait que les principales entreprises concernées ne sont aucunement en difficulté, et parce que l'étude promise n'est pas encore publiée pour nous permettre de légiférer de façon éclairée, à partir des informations requises, nous demandons la suppression de l'article 9 septies.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. La filière maritime a de la suite dans les idées… Elle souhaite en effet revenir sur une décision qui a été votée l'an dernier.
En 2025, à l'issue d'un débat parlementaire qui a permis de trouver un compromis, et conformément aux recommandations formulées par la Cour des comptes en 2023, l'exonération de cotisations sociales a été recentrée.
Cette réforme est désormais en vigueur et reçoit toujours le soutien du Gouvernement. Compte tenu du contexte budgétaire, nous pensons qu'elle demeure le résultat d'un compromis équilibré et nécessaire.
Abroger cette mesure, c'est rouvrir la porte à des effets d'aubaine pour les compagnies et les marins les mieux rémunérés, alors que la concurrence dans le secteur se joue sur les compétences, et pas nécessairement sur des mécanismes d'allégement de cotisations.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis favorable sur ces amendements de suppression.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 610 et 1005.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 38 :
| Nombre de votants | 342 |
| Nombre de suffrages exprimés | 339 |
| Pour l'adoption | 209 |
| Contre | 130 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'article 9 septies est supprimé et les amendements nos 1112 rectifié bis et 1174 n'ont plus d'objet.
Après l'article 9 septies
Mme la présidente. L'amendement n° 1516 rectifié bis, présenté par M. V. Louault, Mme Paoli-Gagin et MM. Chasseing et Favreau, est ainsi libellé :
Après l'article 9 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
A. L'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le b du 5° du II, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« c) En cas de retrait de titres éligibles à l'article 163 bis H du code général des impôts et inscrits avant le 15 février 2025 sur un plan d'épargne en actions défini à l'article 163 quinquies D du code général des impôts, le gain net réalisé à l'occasion dudit retrait est déterminé en multipliant la valeur des titres au jour de leur inscription sur ledit plan par le rapport entre, d'une part, le gain global retraité du plan à la date du retrait et, d'autre part, la valeur liquidative retraitée du plan au jour du retrait.
« Pour les besoins du premier alinéa :
« - le gain global retraité du plan à la date du retrait s'entend de la différence entre la valeur liquidative retraitée du plan au jour du retrait définie ci-après et le total des versements effectués sur le plan jusqu'à la date du retrait. Les versements déjà pris en compte au titre des retraits antérieurs ne sont pas pris en compte pour le calcul du gain global retraité.
« - la valeur liquidative retraitée du plan au jour du retrait est égale à la valeur liquidative du plan au jour du retrait minorée de la différence entre la valeur des titres retirés au jour de leur inscription sur le plan et la valeur des titres retirés au jour du retrait.
« Ce gain est déterminé par l'établissement gestionnaire du plan défini à l'article 163 quinquies D du code général des impôts. »
2 ° Le V est ainsi modifié :
a) A la première phrase du premier alinéa, après les mots : « aux II » , sont insérés les mots : « à l'exception de celle visée au…) du 5° du II, ».
b) Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La contribution visée au c du 5° du II est contrôlée et recouvrée selon les règles visées au III de l'article 136-6. Par dérogation au III de l'article 136-6, la contribution est due l'année de cession des titres retirés ou l'année de cession des titres reçus à l'occasion d'une opération d'échange. Elle est également due au titre de l'année du terme d'un délai de douze mois qui suit le retrait à proportion des titres retirés du plan d'épargne en actions défini à l'article 163 quinquies D du code général des impôts et qui n'auraient pas fait l'objet d'une opération de cession ou d'échange dans ce délai »
B. – Le I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …) Ne sont pas soumis à la contribution, les gains réalisés au sein d'un plan défini à l'article 163 quinquies D du code général des impôts à l'occasion de la disposition, cession, conversion, mise en location de titres éligibles à l'article 163 bis H du code général des impôts et inscrits dans ledit plan avant le 15 février 2025. »
II. – Le paragraphe I s'applique aux opérations de retrait, de disposition, de cession, de conversion et de mise en location réalisées à compter du 15 février 2025.
III. – S'agissant des opérations de retrait de titres éligibles à l'article 163 bis H du code général des impôts et inscrits avant le 15 février 2025 sur un plan d'épargne en actions défini à l'article 163 quinquies D du code général des impôts réalisées avant la promulgation de la présente loi, le titulaire dudit plan peut obtenir la restitution des prélèvements sociaux prélevés par l'établissement gestionnaire dudit plan par voie de réclamation contentieuse jusqu'au 31 décembre de la deuxième année qui suit le retrait.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Vincent Louault.
M. Vincent Louault. Cet amendement est très important puisqu'il vise à corriger un effet de bord. Un arrêt du Conseil d'État de 2021 a remis en cause la possibilité pour un salarié manageur d'investir dans son entreprise via un plan d'épargne en actions (PEA), alors qu'il pouvait légitimement le faire auparavant.
Cet amendement ne vise nullement une exonération d'impôt ; il a pour seul objet de permettre le redéploiement de l'ensemble de l'investissement aux salariés cadres et manageurs dans les mêmes conditions que pour tout autre investisseur, c'est-à-dire en report d'imposition. Dans cette perspective, nous proposons de corriger l'application de l'article 163 bis H du code général des impôts, qui impose de sortir du PEA.
Je suis assez ému, car je porte aujourd'hui la voix du patron d'une entreprise en difficulté qui assiste à nos débats depuis les tribunes. Alors que cette entreprise emploie plusieurs milliers de salariés et réalise près de 1 milliard d'euros de chiffre d'affaires, elle a perdu 7 millions d'euros, en s'acquittant de la CSG, ainsi que le contrôle majoritaire de ses parts, qui sont passées de 53 % à 47 %.
La dilution de cette entreprise est mal vécue, car ce sont des Américains qui, entretemps, ont racheté les actions cédées.
Cette entreprise est admirable, monsieur Gay, parce qu'elle est détenue à 25 % par ses employés, ce qui est assez rare. En effet, ces derniers ont investi quelques centaines de milliers d'euros il y a des dizaines d'années et possèdent désormais un capital bien plus important.
Ces salariés sont très satisfaits d'appartenir à une société à mission qui, grâce à son patron, adhère pleinement à la responsabilité sociétale des entreprises (RSE).
J'attends avec impatience de connaître l'avis de la commission et du Gouvernement sur cet amendement ainsi que leur position sur les demandes d'évolution concernant ce sujet, dans le cadre du PLF.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mon cher collègue, nous sommes tout comme vous émus des circonstances qui ont conduit l'entreprise que vous évoquez à cette situation. Reste que votre amendement vise à assurer la rétroactivité des prélèvements sociaux déjà perçus par l'Urssaf, ce qui est hautement dérogatoire et renchérirait encore le coût de la mesure pour le financement des branches sociales.
Je laisse chacun d'entre vous se faire une opinion sur cette question. En attendant, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Votre intention est bonne, monsieur le sénateur, mais l'exécution de votre dispositif mériterait d'être précisée.
D'après notre analyse, cet amendement ne vise que des prélèvements sociaux et ignore entièrement le volet relatif à l'impôt sur le revenu, pourtant indissociable du PEA.
En limitant son intervention au seul volet social, la mesure proposée instaurerait une rupture d'équilibre au sein du régime des management packages, issu de la loi de finances initiale pour 2025. Elle viendrait donc altérer ce dispositif, seulement quelques mois après son adoption.
Partant de là, quelles sont les suites possibles ? Une solution complète, cohérente et techniquement stabilisée, qui couvrira à la fois les prélèvements sociaux, l'impôt sur le revenu et les autres ajustements nécessaires du régime, sera présentée au Sénat dans le cadre du projet de loi de finances.
Le Gouvernement ne s'oppose pas à votre proposition dans son principe. Toutefois, il ne peut soutenir un dispositif trop partiel et insuffisamment préparé sur le plan technique.
En conséquence, je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable. Néanmoins, le sujet n'est pas clos et le Sénat aura de nouveau à en débattre.
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Favreau, pour explication de vote.
M. Gilbert Favreau. Il s'agit d'un amendement de bon sens, contrairement à ce que laissent entendre les propos de la rapporteure générale et du ministre. En effet, il ne vise à créer aucun avantage fiscal nouveau, mais seulement à corriger un effet pervers que le législateur n'a jamais voulu prendre en compte.
Aujourd'hui, un dirigeant qui détient des titres via un PEA peut paradoxalement être plus imposé que s'il les avait acquis directement. Cette situation n'étant ni juste ni cohérente, je soutiens l'amendement de notre collègue Louault.
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.
M. Vincent Louault. Le chef d'entreprise dont j'ai porté la voix n'est pas le seul à être dans cette situation problématique : cette disposition fiscale plombe entre 100 et 150 entreprises !
Monsieur le ministre, je prends acte de votre engagement à coconstruire, dans le cadre du PLF, un amendement qui permettra de résoudre l'entièreté du problème. La direction de la législation fiscale (DLF) y est d'ailleurs favorable et je l'en remercie.
En confiance, monsieur le ministre, je retire mon amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 1516 rectifié bis est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 1302 rectifié est présenté par M. Sol, Mme Petrus, MM. Milon, Khalifé, Burgoa, Panunzi et H. Leroy, Mme Richer, MM. Hugonet, Chatillon et Anglars, Mmes Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Genet, Saury et Belin, Mmes Micouleau et Evren et M. Meignen.
L'amendement n° 1534 rectifié quater est présenté par Mmes Demas et Borchio Fontimp et MM. Delia, Cambon, Séné et Levi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 9 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 241-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 241-13-1. – I. – Les employeurs relevant du secteur de la restauration mentionnés aux codes APE de 5610A Restauration traditionnelle, 5610C Restauration de type rapide, 5621Z Services des traiteurs, 5630Z Débits de boissons et 5510Z Hôtels et hébergement similaire et dont l'établissement propose une carte composée exclusivement de plats élaborés sur place à partir de produits bruts, au sens de l'article L. 122-21-1 du code de la consommation, bénéficient d'une exonération partielle de cotisations sociales patronales dues au titre des rémunérations versées aux salariés affectés aux activités de préparation, de cuisson et de dressage des plats.
« II. – L'exonération s'applique dans la limite d'un plafond de rémunération fixé à 2,5 fois le salaire minimum de croissance. Elle est égale à 50 % du montant des cotisations patronales de sécurité sociale visées à l'article L. 241-6.
« III. – Le bénéfice de l'exonération est subordonné à la déclaration annuelle de conformité aux critères du “fait maison” auprès de l'administration, dans des conditions fixées par décret.
« IV. – En cas de manquement constaté par l'administration, le bénéfice de l'exonération est retiré pour l'année en cours et les sommes indûment exonérées sont reversées selon les modalités prévues à l'article L. 243-7. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Jean Sol, pour présenter l'amendement n° 1302 rectifié.
M. Jean Sol. Afin de préserver une restauration de qualité, en incitant à son développement, et de valoriser la gastronomie française, le présent amendement vise à instaurer un mécanisme d'exonération partielle de cotisations sociales patronales au bénéfice des restaurants qui proposent une carte composée exclusivement de plats faits maison, au sens de l'article L. 122-21-1 du code de la consommation.
Le bénéfice de l'exonération serait subordonné à une déclaration annuelle de conformité aux critères définis par la loi, auprès de l'administration, dans des conditions fixées par décret.
Ce dispositif simple permettrait de valoriser le travail artisanal et la transmission du savoir-faire culinaire, d'encourager la création et la pérennisation d'emplois qualifiés en cuisine et de renforcer la qualité de l'offre alimentaire, en cohérence avec les politiques publiques de santé et de transition écologique : réduction des produits ultratransformés, circuits courts, origine locale, etc.
Cet amendement, travaillé avec l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (Umih), aurait pour effet d'améliorer de façon progressive la qualité du parc de restauration, sans créer de rupture d'égalité ni de distorsion de concurrence.
Mme la présidente. L'amendement n° 1534 rectifié quater n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Dans cette assemblée, nous défendons tous la gastronomie française au quotidien.
Cet amendement a pour objet de privilégier le fait maison et nous sommes d'accord sur le principe. Mais est-ce à la sécurité sociale de vérifier que tel restaurant propose bien ce genre de carte ? N'est-ce pas plutôt au consommateur de choisir, le plus souvent possible, les établissements qui inscrivent sur leur menu des plats faits maison ?
Ces derniers sont bien meilleurs pour la santé et ont meilleur goût, nous sommes d'accord, mais ce n'est pas à la sécurité sociale de prendre en charge ce contrôle. En conséquence, l'avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement soutient fermement le secteur de la restauration, en général, et le fait-maison, en particulier. Plus largement, tout produit fait maison ou fabriqué en France doit être soutenu.
Le secteur de la restauration profite déjà de systèmes d'aides destinés à la main d'œuvre en cuisine ou dans le service. Ainsi, il existe un dispositif de réduction générale dégressive unique destiné à tous les secteurs professionnels, dont celui de la restauration, ciblé sur les salariés percevant une rémunération équivalente au Smic.
Après réflexion, nous avons conclu que le caractère opérationnel de votre mesure n'était pas évident, compte tenu de la complexité des modalités déclaratives qu'elle implique. En effet, ce sont des petites structures qui ne disposent pas de beaucoup de personnel ni de service administratif qui seraient concernées. Les formalités supplémentaires pour les entreprises, comme pour les organismes de contrôle, ne seraient pas légères.
Pour ces raisons, monsieur le sénateur, le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement, même s'il reconnaît que votre intention est louable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1302 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 340 rectifié est présenté par Mmes Muller-Bronn et Aeschlimann, MM. Pointereau et Panunzi, Mmes P. Martin, Gosselin et Evren, M. Anglars, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Genet et D. Laurent et Mmes Pluchet et Ventalon.
L'amendement n° 764 rectifié est présenté par Mme Bourguignon, MM. Dhersin, Henno et Levi, Mmes Saint-Pé et Billon, MM. Canévet et Bleunven et Mmes Patru, Vermeillet, Antoine et Sollogoub.
L'amendement n° 949 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 9 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les dépenses supportées par l'employeur s'agissant des véhicules terrestres motorisés quels que soient leurs nature et qualification, mis à la disposition des salariés tels que définis à l'article L. 241-10 sur les aides à domicile. »
II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour présenter l'amendement n° 340 rectifié.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Cet amendement de notre collègue Laurence Muller-Bronn vise à exclure de l'assiette de cotisations sociales les véhicules mis à la disposition permanente des intervenants à domicile avec un usage privé, même limité par l'employeur, afin d'effectuer leur tournée au domicile de personnes âgées en perte d'autonomie ou de personnes en situation de handicap.
En l'état actuel du droit, le régime applicable est celui de l'avantage en nature véhicule, qui est assujetti aux cotisations sociales. En effet, seule la mise à disposition d'un véhicule à un salarié pour un usage exclusivement professionnel n'est pas soumise à charges sociales, car aucun avantage en nature n'est caractérisé. Il s'agit d'ailleurs du régime le plus courant.
À travers cet amendement, nous souhaitons accroître l'attractivité des métiers d'aide à domicile, qui sont particulièrement en tension dans un contexte de vieillissement de la population.
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Bourguignon, pour présenter l'amendement n° 764 rectifié.
Mme Brigitte Bourguignon. Permettez-moi d'évoquer une scène que nous connaissons tous, celle d'une aide à domicile, souvent une femme, qui passe sa journée sur la route pour se rendre d'un domicile à un autre, tout cela pour percevoir un petit salaire et connaître des fins de mois très difficiles.
Lorsque cette aide à domicile ne possède pas de voiture, le service qui l'emploie en met une à sa disposition, dans le meilleur des cas : ce n'est pas un luxe, c'est juste la condition pour qu'elle puisse travailler.
Pourtant, ce véhicule est aujourd'hui considéré comme un avantage en nature, si bien qu'il est réintégré dans l'assiette sociale et fiscale. Autrement dit, on taxe l'outil qui permet à cette personne d'accompagner nos aînés et d'assurer le bien-vieillir à domicile.
Par cet amendement, nous proposons une mesure simple et ciblée : exclure ces véhicules de l'assiette de cotisations pour les aides à domicile. Nous ferions un geste concret pour préserver le pouvoir d'achat de ces professionnels et pour assurer l'attractivité d'un métier déjà en forte tension. C'est d'ailleurs l'une des pistes d'amélioration de l'attractivité de ces métiers que nous avions identifiée.
Oui, mes chers collègues, c'est bien à la sécurité sociale de soutenir l'aide à domicile via l'exonération de cotisations proposée. Cela ne démunira pas le système, bien au contraire !
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 949.
Mme Raymonde Poncet Monge. Mes collègues l'ont rappelé, seule la mise à disposition d'un véhicule à un salarié pour un usage exclusivement professionnel n'est pas soumise à charges sociales et devient, de facto, un avantage en nature. Le présent amendement vise donc à l'exclure de l'assiette de cotisations.
J'attire votre attention sur le temps que cela représente pour les aides à domicile de reconduire leur véhicule au siège social de l'entreprise, le soir, après leur tournée, puis de revenir le chercher le lendemain matin. C'est du temps qui est payé, et il doit l'être : certaines associations le font, comme le réseau Aide à domicile en milieu rural (ADMR) qui est pourtant en difficulté financière. Mais c'est surtout du temps de fatigue inutile pour des personnes qui exercent dans une branche d'activité désormais classée première en matière de sinistralité, devant le secteur du bâtiment.
En définitive, ces temps de trajet le matin et le soir, qui pourraient être comparés dans un autre domaine aux tâches chronophages de reporting, raccourcissent le temps qui aurait pu être consacré à l'accompagnement ou à une dernière intervention. Pourtant, l'on sait que 20 % des plans d'aide à domicile ne sont pas réalisés, à cause de la crise d'attractivité qui frappe la profession.
J'y insiste : s'il faut exonérer de cotisations un avantage en nature, c'est bien celui-là.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je remercie mes collègues pour leur plaidoyer, auquel j'adhère pleinement.
En France, les allégements généraux ont été créés parce qu'un certain nombre d'entreprises n'arrivaient plus à soutenir la concurrence avec les entreprises étrangères, ou même avec d'autres sociétés établies dans l'Hexagone qui subissaient moins de contraintes et versaient des salaires non soumis à cotisations.
Parce qu'il y avait trop de cotisations, les employeurs créaient moins d'emplois. Les allégements généraux ont permis de sortir de cette impasse et ont assuré aux entreprises d'être de nouveau concurrentielles sur les marchés de production.
À travers leurs amendements, nos collègues ciblent un secteur qui n'est pas suffisamment rémunéré et proposent de créer une exonération de cotisations pour l'octroi d'un avantage en nature, à savoir la mise à disposition d'un véhicule.
Néanmoins, je ne suis pas sûre qu'ils répondent à la problématique, car ne font-ils pas en réalité que réparer les décisions que certains employeurs ont prises collectivement ? C'est une question qui vaut plus largement, et je me la pose depuis le début de nos échanges et de nos réflexions sur ce texte.
Nos collègues proposent une exonération supplémentaire ; or la philosophie de la commission est de refuser ce type de mesure, compte tenu de l'état dégradé de nos comptes sociaux. L'avis est donc défavorable, même si j'adhère au plaidoyer.
Plus largement, je me demande de quelle manière nous pourrons faire tenir tout le système. Si l'on rehausse les cotisations, les salaires ne peuvent pas augmenter, en conséquence de quoi l'on crée des allégements ou des exonérations… Il en ressort que le système semble un peu grippé. Même quand nous évoquons des sujets bien précis, comme celui de la mobilité des aides à domicile, nous devons continuer d'envisager le système dans sa globalité.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Ces amendements identiques visent à exonérer de cotisations sociales les véhicules mis à la disposition d'une aide à domicile de façon permanente. C'est bien le mot « permanent » qui fait débat, car il englobe l'utilisation professionnelle et l'utilisation privée du véhicule.
Comment déterminer le moment précis où chacune de ces utilisations commence et finit ? Certains sénateurs ont tenté de répondre à cette question en proposant une définition élargie.
Le code de la sécurité sociale est très clair : un avantage en nature est bel et bien constitué par la mise à disposition d'un véhicule, en conséquence de quoi il est assujetti à cotisations et contribution sociale.
Sur un terrain davantage macroéconomique, je rappelle que, en application de l'article 20 de la loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie, 75 millions d'euros sont destinés à soutenir la mobilité des aides à domicile.
Compte tenu de ces éléments, et pour des raisons de principe, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Une fois de plus, nous nous trouvons confrontés à une situation que je ne saurais qualifier autrement que par cette formule, qui pourrait devenir notre slogan : deux poids, deux mesures.
Vous affirmez qu'il n'est pas raisonnable de prévoir des exonérations de charges, arguant du déficit du budget de la sécurité sociale. Pourtant, ce matin, vous adoptiez une approche radicalement différente !
Vous souteniez à l'instant que cette mesure pourrait présenter un intérêt, mais qu'une revalorisation des salaires serait préférable. Or, lorsque nous avons évoqué cette possibilité ce matin, vous nous avez opposé que les primes étaient plus intéressantes.
Vous êtes dans une contradiction totale.
Pour notre part, nous ne suivons qu'une seule ligne : soutenir et accompagner celles et ceux qui ont le moins. J'ai en particulier à l'esprit toutes ces personnes, majoritairement des femmes, qui interviennent dans le secteur domiciliaire pour accompagner ceux qui sont contraints de rester chez eux.
Leurs salaires ne sont absolument pas assez élevés, vous l'avez certes reconnu, mais des charges et des dépenses s'imposent également à elles quand elles se rendent au domicile de chacun des bénéficiaires.
L'adoption de ces amendements, que nous soutenons, sera une manière de reconnaître leur engagement et de rendre ces métiers un peu plus attractifs.
Certes, une mesure a été prise dans le cadre de la loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie, dite loi Bien Vieillir, pour accroître le nombre de postes, mais encore faut-il renforcer l'attractivité de ces professions afin que des candidats s'intéressent à ces emplois. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes GEST et RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. J'aurais tendance à voter en faveur de ces amendements. Pour autant, j'ai écouté monsieur le ministre et j'avoue que le mot « permanent » me gêne également. En tant qu'ancien employeur, ce sujet me pose problème.
Le débat est fidèle au travail que mène depuis toujours notre commission, animée par l'obsession du temps médical. Le sujet d'aujourd'hui est proche de cette question : il s'agit de tout ce temps payé et perdu, non pas au service des personnes, mais pour déplacer un véhicule parce que l'intervenant n'a pas le droit de le garer devant chez lui. Il y a là un équilibre à trouver.
Je suis certes un Lévrier, je n'aime pas les niches (Sourires.), mais tout de même !
En conclusion, puisque l'humour est de mise aujourd'hui, je suis désolé, madame la rapporteure générale, mais je n'ai pas d'inquiétude au sujet du vote : la droite ne devrait pas vous suivre, puisqu'elle-même a décidé de considérer les billets de matchs de football comme un avantage en nature, ses membres défendront cette logique et voteront sans aucun doute ces amendements !
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je tiens à préciser à madame la rapporteure générale qu'il ne s'agit nullement d'une affaire d'exonération. Je l'ai indiqué et M. Lévrier l'a parfaitement compris : l'objectif est de supprimer des temps improductifs rémunérés au profit de temps d'intervention, eux aussi rémunérés.
Que l'heure soit qualifiée d'improductive ou d'intervention, elle demeure soumise à cotisations ; il n'est donc pas question d'exonération.
De quoi s'agit-il ? Nous parlons d'une aide à domicile qui utilise le véhicule le lundi matin. Je rassure monsieur le ministre : elle ne le conserve pas le week-end, son usage n'est pas permanent, car des tournées sont organisées le samedi et le dimanche, et la salariée de service, qui n'est pas la même, récupère alors le véhicule.
Concrètement, l'aide à domicile qui dispose de la voiture du lundi matin au vendredi doit avoir la possibilité de la ramener à son domicile le soir, du lundi au jeudi, afin d'éviter ces temps improductifs qui doivent être payés et soumis aux charges.
Il ne s'agit évidemment pas d'une voiture de fonction, qui serait l'apanage du directeur. Ce véhicule tourne sans cesse. Le réseau Aide à domicile en milieu rural (ADMR) dispose d'un volant de voitures affectées aux tournées. Lorsque la salariée n'est pas en tournée ou ne travaille pas la journée, elle ne bénéficie pas du véhicule. Elle ne part ni en week-end ni en vacances avec celui-ci. L'usage n'est donc pas permanent, il s'agit seulement de rentrer chez soi.
Par ailleurs, ce n'est pas une affaire salariale. Si tel avait été le cas, j'aurais rappelé à M. le ministre la nécessité d'agréer l'avenant 68, ce que vous avez refusé, pour mettre à niveau les grilles de la branche de l'aide, de l'accompagnement, des soins et des services à domicile. Le débat n'est pas là.
L'objet de ces amendements est de reconnaître que le fait de conserver la voiture pour rentrer chez soi et repartir le lendemain ne constitue pas un avantage en nature, mais qu'il s'agit véritablement d'une affaire d'efficacité.
Je le rappelle, il s'agit de temps perdu. À l'instar des temps de reporting, ce sont des heures qui ne sont pas consacrées à l'intervention, alors même que des plans d'aide sont refusés, faute d'effectifs.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je fais pleinement miens les propos de Mme Poncet Monge.
En territoire rural, les lieux d'intervention à domicile sont parfois à une très grande distance du siège de la structure ; le soir, lors de la dernière intervention, le salarié peut donc s'en trouver très éloigné. Il apparaît totalement anormal qu'il soit contraint de ramener le véhicule, alors que celui-ci ne sera pas utilisé durant la nuit, par exemple.
Ces amendements visent à exclure de l'assiette des cotisations sociales les véhicules mis à disposition pour intervenir auprès des personnes âgées en perte d'autonomie et des personnes handicapées. Vous savez que les organismes gestionnaires rencontrent des difficultés. Il s'agit, en réalité, de donner davantage de salaire à ces personnels.
Je suis donc favorable à l'exclusion de ces cotisations. Cette mesure pourrait d'ailleurs s'étendre au portage de repas à domicile, puisque cette activité constitue, elle aussi, un maillon du maintien à domicile.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Hébergeant ma mère âgée de 97 ans, je vois intervenir quatre personnes au titre de l'aide à domicile : ces amendements ne recouvrent pas une abstraction. Je propose, monsieur le ministre, de les sous-amender en mentionnant un « usage temporaire » ou le « temps de travail ».
Si le terme « permanent » soulève une difficulté, nous avons la faculté d'adopter dès maintenant en séance un tel sous-amendement qui réglerait la question et lèverait votre hésitation quant à un usage permanent risquant d'être détourné à des fins personnelles.
Je connais bien ceux qui travaillent à domicile, ma mère recourant à leurs services. J'ai pu les voir à l'œuvre encore hier alors que la neige couvre le centre de l'Orne. Il convient vraiment de dérouler un tapis rouge devant ces personnes, tant elles mettent de passion à exercer ce métier si difficile d'accompagnement de nos aînés.
Je vous propose donc, monsieur le ministre, madame la rapporteure générale, de sous-amender ces amendements pour régler le problème d'un éventuel usage permanent.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Ces amendements vont assurément dans le bon sens. Pour avoir géré durant des années, en tant qu'élue, un service intercommunal d'aide à domicile, je mesure ce que représente l'obligation pour le personnel d'aller chercher le véhicule le matin et de le rapporter le soir.
L'exclusion de ces frais de l'assiette des cotisations sociales de l'avantage en nature et, par conséquent, de l'assiette des revenus imposables marquerait une avancée majeure, qui soulagerait non seulement les structures, mais aussi, et surtout, ces aides à domicile, dont nous tenons tous à souligner le rôle capital.
Je souhaite toutefois attirer votre attention sur la différence existant entre les services de soins à domicile gérés par le secteur public ou par une association à but non lucratif, il a été question de l'ADMR, qui est certainement la plus connue, et les services privés mettant à disposition des aides à domicile.
Dans ces derniers services règne une forme d'esclavage : aucun véhicule n'est mis à disposition et le quart d'heure de battement entre deux interventions n'est pas comptabilisé comme temps de travail. Je souhaite donc que l'on ne leur accorde pas cet avantage d'exclusion de l'assiette des cotisations.
Il existe ainsi une foule de structures qui exploitent encore davantage ces aides à domicile ; ces travailleurs accomplissent une tâche remarquable, mais fort mal reconnue et très mal rémunérée.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La proposition qui vient d'être avancée est susceptible de satisfaire l'ensemble de l'assemblée. Nous pourrions ainsi exclure du texte la notion de permanence afin d'indiquer qu'il s'agit bien d'un usage professionnel.
Je me propose de déposer un sous-amendement en ce sens, afin que nous puissions tous nous accorder pour atterrir sur cette mesure.
Mme la présidente. Je suis saisie du sous-amendement n° 1868, présenté par Mme Doineau, qui est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, dans leurs déplacements professionnels, selon des conditions définies par décret
Ce sous-amendement a déjà été défendu.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Favorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Mme la rapporteure générale a exposé avec justesse ce que je me proposais de vous soumettre.
Après avoir entendu nos collègues Raymonde Poncet Monge et Nathalie Goulet, il me semble indispensable d'établir une distinction claire entre l'usage d'un véhicule de fonction, qui constitue un avantage salarial assujetti en tant que tel aux cotisations sociales, et l'usage d'un véhicule de service.
Il est donc opportun de supprimer la notion de permanence des amendements, qui est un irritant nous empêchant de cheminer ensemble vers une rédaction de compromis et de réaffirmer la prévalence de la notion de véhicule de service.
Ces voitures sont utilisées dans le cadre exclusif de l'exercice professionnel, pour les tournées. Au demeurant, différents intervenants se succèdent pour les conduire, y compris durant le week-end. Nous ne connaissons que très peu d'intervenants à domicile empruntant le véhicule de service pour faire leurs courses ou pour partir en week-end.
Une telle clarification constituerait un signal fort, de nature à rallier l'ensemble de notre assemblée.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je souhaite que l'assemblée saisisse bien l'enjeu – ayant dirigé des services, je parle d'expérience. Les déplacements durant les intervacations, c'est-à-dire entre deux bénéficiaires, qu'il s'agisse de personnes handicapées ou âgées, constituent des déplacements professionnels. Ils sont rémunérés ; c'est une obligation.
Si vous mentionnez « pour l'activité professionnelle », l'interprétation se limitera à ces temps de déplacement entre deux interventions.
Or la difficulté surgit lorsque la journée s'achève, par exemple à dix-huit heures : le temps nécessaire pour regagner son domicile ne relève plus du temps professionnel. Toutefois, si la salariée conserve le véhicule pour en disposer le lendemain matin, sans avoir à le déposer pour le reprendre ensuite, cela devient un avantage en nature. Ce n'est donc pas un usage permanent – j'ignore si ce terme avait été retenu.
Je le répète : le trajet de retour au domicile, à la fin de la journée de travail, n'est pas du temps professionnel. Si vous inscrivez cette mention, vous ne ferez que rappeler l'existant, à savoir que les déplacements entre deux personnes durant les intervacations sont obligatoirement rémunérés.
Cette règle s'applique partout, sauf dans le secteur privé. Il conviendrait donc de limiter la mesure au secteur privé à but non lucratif et aux associations, car le secteur privé lucratif ne rémunère pas ces temps ; il est dès lors inutile de lui accorder un tel avantage.
Prêtons toutefois une attention particulière à la formulation : il s'agit d'un temps qui n'est plus professionnel, celui du retour au domicile. C'est l'intervalle entre deux jours travaillés durant lequel l'intervenante conserve le véhicule pour rentrer chez elle.
Ne vous contentez pas de mentionner le « temps professionnel », car ce point est d'ores et déjà satisfait.
Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.
Mme Pascale Gruny. Je vous invite à la prudence, car il s'agit d'un sujet de contentieux avec l'Urssaf dans toutes les entreprises.
J'ignore comment vous vérifierez que la personne disposant d'un véhicule de service rentre directement à son domicile et ne s'en sert pas pour aller faire ses courses. Cette situation engendrera inévitablement des discussions incessantes avec les contrôleurs de l'Urssaf.
Je tiens à vous le dire : au sein des collectivités territoriales, ces situations ont un coût. Aujourd'hui, nombre d'entre elles commencent à mettre en place des systèmes pour s'assurer précisément que les véhicules mis à disposition sont utilisés exclusivement pour des déplacements professionnels. Les collectivités concernées peuvent d'ailleurs attester que les coûts ont depuis diminué.
Je réitère donc mon appel à la vigilance : je ne vois pas comment les vérifications pourront s'opérer. J'accepte que cette disposition soit inscrite, mais comment la contrôlerez-vous ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Bourguignon, pour explication de vote.
Mme Brigitte Bourguignon. Nous sommes ici pour trouver la solution la plus simple, celle qui convient en priorité aux aides à domicile, avant d'évoquer la question des contrôles, un débat qui me choque quelque peu. Il s'agit avant tout du premier critère d'attractivité pour ces métiers extrêmement difficiles.
Certes, une aide à la mobilité a été votée dans le cadre de la loi Bien Vieillir. En tant que conseillère départementale, j'en constate les effets et je vois ce dispositif se développer dans les départements.
Il ne s'agit donc pas ici uniquement de véhicules ; personne ne cherche pas à réaliser du profit avec les automobiles qui seront mises à disposition. L'objectif est bien de soutenir les structures et les aides à domicile, pour qui la mobilité constitue, je vous l'assure, l'une des principales difficultés du métier.
Dès lors, si nous souhaitons réellement réussir le virage domiciliaire que nous appelons tous de nos vœux, commençons par le commencement et n'assujettissons pas ces véhicules.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Il faut tout de même rappeler que nous parlons des aides à domicile, dont le salaire moyen net annuel s'élève à 7 040 euros.
Aussi, cette discussion sur le contrôle et sur l'hypothèse d'un usage permanent dépassant le cadre de l'activité professionnelle me semble être, dans cette enceinte, très malaisante, pour ne pas dire indécente, je le dis au regard des fonctions que certains d'entre nous ont exercées, des véhicules qui y sont associés, des fonctions que certains d'entre nous exercent aujourd'hui, avec les mêmes avantages, et de celles que beaucoup d'entre nous espèrent exercer un jour. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Frédérique Puissat. Ah non ! C'est n'importe quoi !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claire Carrère-Gée, pour explication de vote.
Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Sans vouloir trop compliquer le débat, il serait peut-être opportun, pour répondre à la remarque formulée tout à l'heure, d'ajouter la mention « temps professionnel » ou « temps de trajet », au sens de la législation sur les accidents du travail.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je souscris tout à fait à ce sous-amendement.
Évoquer les contrôles ne me semble pas du tout indécent, mais il s'agit souvent, en l'espèce, d'employés qui dispensent des soins ou apportent des services aux personnes âgées ou handicapées, en fonction des demandes. Le soir, ces salariés peuvent se trouver fort éloignés de la base de l'association ou du service public. Dès lors, y retourner allongerait inutilement leur trajet. Il est évident que, durant les congés, ils rapportent le véhicule au siège de l'association. Cela ne pose aucun problème.
Je souhaitais simplement ajouter, comme je l'ai fait tout à l'heure, que le portage de repas à domicile doit faire partie du dispositif.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Les associations d'aide à domicile ne disposent pas d'un parc automobile permettant de mettre des voitures à la disposition de l'ensemble des salariés.
Mme Raymonde Poncet Monge. Eh oui !
M. Jean-Luc Fichet. Sont concernées ici les personnes dépourvues de véhicule personnel. Pour leur permettre d'accomplir leur travail, l'employeur met à leur disposition un véhicule de service, assuré pour les seuls déplacements professionnels.
J'imagine mal les aides à domicile utiliser ce véhicule pour aller faire leurs courses ou conduire leurs enfants à l'école : elles prendraient des risques considérables, puisqu'elles ne seraient pas assurées pour cet usage.
Il me semble que nous discutons là de situations particulières. Si la personne ne possède pas de véhicule pour exercer son activité et que l'association d'aide à domicile lui en fournit un au regard de ses compétences reconnues, il m'apparaît juste qu'elle puisse regagner son domicile avec. Nous n'allons tout de même pas la laisser rentrer à pied !
Il convient d'éviter qu'elle tombe sous le coup de cotisations ou de frais d'assurance, alors que son salaire, comme cela a été rappelé tout à l'heure, demeure absolument dérisoire.
C'est sans doute sur ce dernier point que nous devrions débattre plus longuement : la qualité, la compétence de ces personnes et le niveau de rémunération qu'elles perçoivent aujourd'hui.
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.
Mme Frédérique Puissat. Nous sommes tous d'accord et pourtant les débats s'animent dans cet hémicycle.
Je souhaite revenir sur quelques propos excessifs. En tant que législateurs, nous prenons des décisions, ce qui est naturel. Cependant, lorsque nous arrêtons des choix, il nous appartient aussi d'en mesurer les conséquences. Il est donc tout à fait logique que notre collègue s'interroge et aille jusqu'au bout de la chaîne : le contrôle fait partie de ces suites.
Non seulement il relève de nos missions, mais je rappelle également une réalité organisationnelle : qui effectue ces vérifications ? Des agents.
Il est indispensable de conférer les moyens de contrôler le personnel aux présidents ou aux directeurs d'associations qui gèrent des services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad) ou des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD). Cela relève de leur mission. Je ne comprends donc pas l'indignation suscitée par les propos tenus en ce sens.
Puisque, pour une fois, nous sommes tous d'accord sur cette mesure, je souhaite simplement que nous nous respections mutuellement dans nos interventions.
Mme Laurence Rossignol. Vous voulez contrôler les salariés, mais pas les patrons !
Mme la présidente. La parole est à M. le vice-président de la commission.
M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. J'interviens à la suite des propos de nos deux collègues de gauche concernant les salaires des personnels travaillant dans les Saad ou les Ssiad.
Il est vrai que ce ne sont pas des rémunérations importantes. Toutefois, lorsque vous interrogez les responsables de ces structures, tous vous indiquent que les salariés souhaitent effectuer un nombre d'heures limité pour ne pas atteindre le plafond.
Mme Émilienne Poumirol. Mais non, ce n'est pas toujours le cas, enfin !
M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Je ne vous interromps pas lorsque vous parlez ; essayez de ne pas m'interrompre. Vous direz ensuite ce que vous avez à dire. Sinon, je serai contraint de reprendre à mon compte le « Taisez-vous ! » que votre collègue a lancé tout à l'heure !
La plupart des responsables de Saad affirment donc que les intervenants ne veulent pas travailler jusqu'au plafond afin de pouvoir continuer à bénéficier des aides.
Je propose, en accord avec M. le ministre, de relever les plafonds. Si nous procédons ainsi, les personnels des Saad travailleront davantage, percevront de meilleurs salaires et continueront de toucher les aides, puisque les seuils auront été rehaussés.
Tant que les plafonds demeureront bas, toutes ces personnes refuseront d'atteindre cette limite pour conserver le bénéfice des aides. C'est une évidence ; tout le monde vous le confirmera.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Je souhaite répondre brièvement à notre collègue Alain Milon. Pour avoir géré des Saad, en particulier, je sais que la solution la plus commode pour le service consiste à établir des plannings sur la base de vingt-sept heures hebdomadaires.
Il ne s'agit donc pas d'un temps de travail choisi, mais bien d'une durée imposée par le service. Si ces dames avaient la possibilité d'effectuer trente-cinq heures, elles le feraient, mais la structure ne leur en propose que vingt-sept, car cette organisation s'avère plus pratique. Je parle ici d'expérience.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. A priori, nous sommes tous d'accord. Il convient toutefois de préciser la rédaction du sous-amendement.
Comme l'a très justement souligné ma collègue Raymonde Poncet Monge, la mention d'un « usage professionnel » risque de poser des difficultés, notamment pour ce qui concerne l'utilisation du véhicule en fin de journée.
Peut-être serait-il préférable de retenir la formule « usage non permanent », une rédaction plus souple permettrait de résoudre le problème.
Si le consensus est réel, nous devrions parvenir à nous entendre sur cette mesure.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1868.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 340 rectifié, 764 rectifié et 949, modifiés.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9 septies.
L'amendement n° 1647, présenté par M. Féraud, Mmes Artigalas et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, M. Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 9 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase du 35° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale est supprimée.
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Je change totalement de sujet : cet amendement concerne la pénurie de logements, aggravée par le développement massif des meublés touristiques.
Aujourd'hui, lorsque la location meublée, qu'elle soit professionnelle ou non, entre dans le champ des cotisations sociales, l'assiette est calculée après un abattement de 60 %. Toutefois, les meublés de tourisme classés bénéficient d'un abattement dérogatoire de 87 %, ce qui introduit une différence de traitement particulièrement avantageuse.
Dans le contexte actuel, cet avantage n'est ni justifié ni soutenable. Chacun le sait, la multiplication des meublés touristiques contribue directement à la raréfaction de l'offre locative classique, en particulier dans les zones où l'équilibre entre l'offre et la demande est déjà rompu.
Les élus locaux, les acteurs du logement et les habitants eux-mêmes en constatent les effets : envolée des loyers, difficultés d'accès au logement pour les travailleurs essentiels évoqués à l'instant, ou encore perte de vitalité des centres-bourgs et des quartiers.
Il n'est pas cohérent, dans une telle situation, de maintenir un régime social sur-avantageux pour des activités qui, de fait, fragilisent l'accès au logement pour le plus grand nombre.
L'objet de cet amendement est simple et de bon sens : supprimer l'abattement dérogatoire de 87 % pour aligner les meublés de tourisme sur l'abattement commun de 60 %.
Il ne tend pas à créer de nouvelles contraintes ; il vise à mettre fin à une niche injustifiée, sans remettre en cause l'activité touristique, mais en la rendant plus équilibrée et plus compatible avec les besoins des habitants.
C'est une mesure d'équité, de responsabilité et de cohérence, qu'exige l'urgence de la crise du logement actuelle.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Nous serons un peu plus ouverts sur cet amendement : nous partageons l'objectif de cohérence et de simplification des règles relatives aux locations de meublés touristiques, dans un contexte de forte tension sur le logement.
Toutefois, à l'examen de la rédaction de cet amendement, il nous semble que celle-ci mériterait d'être précisée concernant les travailleurs indépendants et la préparation de son entrée en vigueur, car ces aspects n'ont pas été anticipés.
Par conséquent, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1647.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq,
est reprise à dix-sept heures cinq.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Article 10
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au I de l'article L. 138-10, après l'année : « 2022 », sont insérés les mots : « , à l'exclusion de toutes autres remises mentionnées à l'article L. 138-9 » ;
2° Le premier alinéa du même article L. 138-11 est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « , à l'exclusion de toutes autres remises mentionnées à l'article L. 138-9. Si la différence entre le chiffre d'affaires d'une entreprise et le montant de ces remises est négative, elle n'est pas déduite de l'assiette de la contribution. » ;
3° L'article L. 245-6 est ainsi modifié :
a) Le début du I est ainsi rédigé : « I. – A. – Il est institué une contribution, dénommée “contribution de base”, des entreprises… (le reste sans changement). » ;
b) Le début du premier alinéa du II est ainsi rédigé : « B. – Cette contribution de base est assise… (le reste sans changement) : » ;
c) Le premier alinéa du III est ainsi rédigé :
« C. – Sont exclus de l'assiette définie au B du présent I : » ;
d) Les IV à X sont remplacés par vingt-sept alinéas ainsi rédigés :
« D. – Le chiffre d'affaires servant d'assiette à la contribution de base s'entend déduction faite des remises mentionnées à l'article L. 138-9 accordées par les entreprises ainsi que des ventes ou reventes à destination de l'étranger, à l'exclusion de toutes autres remises mentionnées aux articles L. 162-16-5-1-1, L. 162-16-5-1-2, L. 162-16-5-2, L. 162-17-5, L. 162-18, L. 162-18-1, L. 162-18-2 et L. 162-22-7-1 et à l'article 62 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022.
« E. – Le taux de la contribution de base est fixé à 0,20 %.
« II. – A. – Une contribution additionnelle à la contribution de base, dénommée “contribution additionnelle”, est instituée pour les entreprises définies au A du I du présent article lorsque l'une ou plusieurs des spécialités pharmaceutiques donnent lieu à remboursement par les caisses d'assurance maladie en application des deux premiers alinéas de l'article L. 162-17 et sont inscrites sur la liste des médicaments agréés à l'usage des collectivités, sur la liste prévue à l'article L. 162-22-7 ou sur la liste prévue à l'article L. 162-23-6, ou certaines de leurs indications seulement, ou prises en charge au titre des articles L. 162-16-5-1 et L. 162-16-5-1-2 ou de l'article 62 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 précitée.
« B. – Cette contribution additionnelle est assise sur le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer au cours d'une année civile au titre des spécialités pharmaceutiques remplissant les conditions prévues aux B à D du I du présent article et inscrites sur les listes mentionnées au A du présent II.
« C. – Le taux de la contribution additionnelle est de 1,6 %.
« III. – A. – Une contribution supplémentaire à la contribution de base et à la contribution additionnelle, dénommée “contribution supplémentaire”, est instituée pour les entreprises définies au A du I qui exploitent les spécialités suivantes ou assurent leur importation parallèle ou leur distribution parallèle :
« 1° Celles inscrites sur les listes mentionnées aux deux premiers alinéas de l'article L. 162-17 ;
« 2° Celles inscrites sur la liste prévue à l'article L. 162-22-7 ou sur la liste prévue à l'article L. 162-23-6, ou certaines de leurs indications seulement ;
« 3° Celles bénéficiant d'une autorisation ou d'un cadre de prescription compassionnelle prévus aux articles L. 5121-12 et L. 5121-12-1 du code de la santé publique et de la prise en charge correspondante ;
« 4° Celles bénéficiant d'une prise en charge au titre de l'article L. 162-16-5-1-2 du présent code ;
« 5° Celles bénéficiant d'une autorisation d'importation délivrée en application du premier alinéa de l'article L. 5124-13 du code de la santé publique et prises en charge par l'assurance maladie ;
« 6° Celles bénéficiant du dispositif de prise en charge prévu à l'article 62 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 précitée ;
« 7° Celles acquises par l'Agence nationale de santé publique en application de l'article L. 1413-4 du code de la santé publique.
« A bis (nouveau). – Sont exclus de l'assiette définie au A du présent III :
« 1° Les spécialités génériques définies au a du 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique ;
« 2° Les spécialités inscrites au répertoire des groupes génériques en application des deux dernières phrases du b du même 5° ;
« 3° Les médicaments hybrides définis au c dudit 5° ;
« 4° Les médicaments biologiques similaires définis au a du 15° du même article L. 5121-1 ;
« 5° Les spécialités de références définies aux 5° et 15° dudit article L. 5121-1, lorsqu'elles sont remboursées sur la base d'un tarif fixé en application du II de l'article L. 162-16 du présent code ou lorsqu'elles le sont sur la base de remboursement la plus chère en vigueur pour les spécialités génériques ou hybrides ou pour les médicaments biologiques similaires appartenant au groupe générique, au groupe hybride ou au groupe biologique similaire concerné, en application du III du même article L. 162-16, ou lorsque leur prix de vente au public est identique à celui des spécialités du groupe générique, du groupe hybride ou du groupe biologique similaire auquel elles appartiennent ;
« 6° Les spécialités de référence dont le prix de vente au public est inférieur à un seuil fixé par décret.
« B. – Cette contribution supplémentaire est assise sur le chiffre d'affaires correspondant aux ventes en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer au cours d'une année civile au titre des spécialités inscrites sur les listes mentionnées au A du présent III, sans déduction des remises mentionnées aux articles L. 162-16-5-1-1, L. 162-16-5-1-2, L. 162-16-5-2, L. 162-17-5, L. 162-18, L. 162-18-1, L. 162-18-2 et L. 162-22-7-1 et à l'article 62 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 précitée, ni de toutes autres remises mentionnées à l'article L. 138-9 du présent code.
« C. – Un taux de base s'applique à l'assiette de la contribution supplémentaire définie au B du présent III.
« D. – Le montant de la contribution supplémentaire dû par chaque entreprise redevable ne peut excéder 10 % de son chiffre d'affaires, en France métropolitaine, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, au cours de l'année civile considérée, au titre des spécialités mentionnées au A du présent III, après déduction des remises mentionnées aux articles L. 162-16-5-1-1, L. 162-16-5-1-2, L. 162-16-5-2, L. 162-17-5, L. 162-18, L. 162-18-1, L. 162-18-2 et L. 162-22-7-1 du présent code et à l'article 62 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 précitée, à l'exclusion de toutes autres remises mentionnées à l'article L. 138-9 du présent code.
« IV. – Les contributions de base et additionnelle sont exclues des charges déductibles pour l'assiette de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés.
« V. – A. – En cas de déclarations des contributions de base, additionnelles et supplémentaires manifestement erronées, l'organisme chargé du recouvrement des contributions fixe, en vue d'une taxation d'office, les chiffres d'affaires retenus pour le calcul de ces contributions par tous moyens, notamment en fonction des versements effectués au titre des exercices antérieurs ou des bases de données disponibles, notamment les données de remboursement de l'assurance maladie ou toute autre base de données.
« B. – Lorsque les déclarations des contributions de base, additionnelles et supplémentaires n'ont pas été produites dans les délais prescrits ou ont donné lieu à la taxation d'office dans le cas prévu au A du présent V, l'organisme chargé du recouvrement des contributions met à la charge de l'entreprise redevable une majoration forfaitaire. Pour chaque contribution due, la majoration forfaitaire est égale à 0,05 % du chiffre d'affaires hors taxes retenu pour le calcul des contributions de base, additionnelles et supplémentaires et, dans le cas d'un retard de déclaration, par période de quinze jours de retard. Les majorations forfaitaires peuvent être cumulatives, sans pouvoir être inférieures à 2 000 euros ni supérieures à 100 000 euros.
« VI. – Les contributions de base, additionnelles et supplémentaires sont instituées au profit de la Caisse nationale de l'assurance maladie. Elles sont versées de manière provisionnelle le 1er juin de l'année au titre de laquelle elles sont dues, pour un montant correspondant à 95 % du produit du chiffre d'affaires défini pour chacune d'elles et réalisé au cours de l'année civile précédente par leur taux respectif. Une régularisation intervient au 1er octobre de l'année suivant l'année au titre de laquelle les contributions sont dues. »
I bis (nouveau). – À l'article 238 bis GC du code général des impôts, la référence : « IX » est remplacée par la référence : « IV ».
I ter (nouveau). – L'article L. 5121-18 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, après la première occurrence du mot : « au », sont insérés les mots : « A du » ;
2° Au deuxième alinéa, la référence : « III » est remplacée par les mots : « C du I ».
II. – Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les montants de la contribution mentionnée à l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale notifiés aux entreprises qui en sont redevables pour les années 2021 à 2024 par les organismes chargés de leur recouvrement en application du II de l'article L. 138-15 du même code, en tant qu'ils seraient contestés sur le fondement des décisions prises en application des articles L. 138-10 et L. 138-11 dudit code pour apprécier le dépassement du seuil de déclenchement de la contribution et pour fixer son assiette, aux motifs tirés, d'une part, de l'intégration des remises mentionnées à l'article L. 138-9 du même code dans le chiffre d'affaires pris en compte pour le calcul de la contribution par les entreprises redevables et, d'autre part, de l'absence de déduction de l'assiette de la contribution lorsque la différence entre le chiffre d'affaires d'une entreprise et le montant de ces remises à l'exclusion de toutes autres remises mentionnées au même article L. 138-9, est négative.
III. – Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les montants de la contribution mentionnée à l'article L. 245-6 du code de la sécurité sociale notifiés aux entreprises qui en sont redevables pour les années 2014 à 2024 par les organismes chargés de leur recouvrement, en tant qu'ils seraient contestés sur le fondement de la prise en compte du chiffre d'affaires incluant l'ensemble des remises versées par les laboratoires, à l'exclusion des remises mentionnées à l'article L. 138-9 du même code.
IV. – Le I est applicable pour la première fois aux contributions dues au titre de l'année 2025.
V. – À la fin du III de l'article 29 de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025, le montant : « 27,25 milliards d'euros » est remplacé par le montant : « 30,60 milliards d'euros ».
VI. – Pour l'année 2026, le montant Z mentionné à l'article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale est fixé à 2,19 milliards d'euros.
VII. – Pour l'année 2026, le montant M mentionné à l'article L. 138-10 du même code est fixé à 26,65 milliards d'euros.
VII bis (nouveau). – Le montant de la contribution prévue à l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale due au titre de l'année 2026 par chaque entreprise redevable au titre des spécialités pharmaceutiques définies aux 1° à 3° du présent VII bis ne peut excéder 1,75 % du chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise au titre de ces mêmes spécialités, calculé selon les modalités mentionnées à l'article L. 138-11 du code de la sécurité sociale. Ces spécialités sont :
1° Les spécialités génériques définies au 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique ;
2° Les spécialités de référence mentionnées au même article L. 5121-1 dont la base de remboursement des frais exposés par les assurés est limitée à un tarif forfaitaire de responsabilité défini au II de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale ou dont le prix fixé en application de l'article L. 162-16-4 du même code est identique à celui des spécialités génériques figurant dans le même groupe générique en application du b du 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique ;
3° Les spécialités de référence dont le prix de vente au public est inférieur à un seuil fixé par décret.
L'application du présent VII bis ne peut avoir pour effet de diminuer le montant total de la contribution calculé selon les modalités prévues à l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale. Le montant à redistribuer dû par chaque entreprise redevable est réparti au prorata de la contribution au titre des spécialités non mentionnées aux 1° à 3° du présent VII bis. Le cas échéant, la contribution due par chaque entreprise en application de l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale peut être augmentée du montant issu de cette redistribution, sans excéder 10 % de son chiffre d'affaires calculé selon les modalités définies à l'article L. 138-10 du même code.
VIII. – Le taux de base de la contribution dite supplémentaire mentionné au C du III de l'article L. 245-6 du code de la sécurité sociale est fixé comme suit :
1° Pour l'année 2025, ce taux est fixé à 4,24 % ;
2° Pour l'année 2026, ce taux est fixé à 4,01 %.
Le taux différencié mentionné au même C est fixé comme suit :
a) Pour l'année 2025, ce taux est fixé à 1,75 % ;
b) Pour l'année 2026, ce taux est fixé à 1,65 %.
IX (nouveau). – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du A bis du III de l'article L. 245-6 du code de la sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
X (nouveau). – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du VII bis du présent article est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. Mes chers collègues, comme je l'indiquais, je suis saisie à cet article de plus de quarante amendements et sous-amendements faisant l'objet d'une discussion commune. Je prendrai donc soin, au fil du dérouleur, d'indiquer le sort de chacun des amendements et de préciser les amendements qui n'auraient plus d'objet.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Alors que nous abordons l'article 10, qui porte sur la clause de sauvegarde des médicaments, sujet important du PLFSS auquel nous consacrons toujours un certain temps, je tiens à vous faire part des dernières avancées sur le dispositif prévu à cet article.
Samedi dernier, nous avons adopté en commission un amendement visant à supprimer la nouvelle contribution sur le chiffre d'affaires des entreprises pharmaceutiques instaurée par l'article. Si nous soutenons naturellement l'objectif de stabilité et de prévisibilité pour les entreprises ayant présidé à l'élaboration de cette contribution, les auditions que nous avons menées nous ont en effet convaincus que cette réforme d'ampleur souffrait d'un défaut de concertation et de conception. La rapporteure pour l'assurance maladie, Corinne Imbert, et les autres commissaires des affaires sociales qui ont mené ces auditions avec moi, pourront le confirmer.
Par ailleurs, la création d'une nouvelle taxe risquait d'envoyer un très mauvais signal pour l'investissement et l'innovation dans notre pays.
Après de nombreux échanges sur le sujet, en particulier avec les acteurs concernés et avec Corinne Imbert, le Gouvernement nous propose une solution de compromis au travers de l'amendement n° 1861. Ce dernier étant arrivé tardivement, la commission n'a toutefois pas pu l'examiner, si bien que c'est à titre personnel que j'émettrai un avis.
S'il faut bien reconnaître que cette proposition d'ampleur ne nous parvient pas dans des conditions idéales, je vous invite à la soutenir, mes chers collègues, car elle comporte de nombreuses dispositions identiques à celles que vous proposez d'introduire au travers de plusieurs de vos amendements : le plafonnement cumulé de la nouvelle contribution et de la clause de sauvegarde à 10 % du chiffre d'affaires net, l'exemption des génériques de l'assiette de la nouvelle contribution afin de protéger les baisses de prix dans le secteur, une assiette définie sur le chiffre d'affaires non pas brut, mais net, afin de prendre en compte la réelle capacité contributive des entreprises du secteur, un taux réduit pour les plus petites entreprises afin de protéger les TPE et PME du secteur, et enfin, le report de l'entrée en vigueur de la taxe en 2026, sans application rétroactive en 2025.
Autrement dit, le Gouvernement reprend dans cette proposition l'ensemble des sujets sur lesquels les personnes auditionnées – les représentants de l'organisation professionnelle Les entreprises du médicament (Leem), le Comité économique des produits de santé (CEPS), le Syndicat national de l'industrie des technologies médicales (Snitem), etc. – nous ont alertés.
Par ailleurs, et c'est un point essentiel, car nous avons formulé cette demande à plusieurs reprises, je souhaite que le Gouvernement s'engage à ce que les investissements réalisés en France et en Europe puissent être déduits du montant de la nouvelle contribution. Ces dispositions relèvent de l'accord-cadre porté par le CEPS.
Je vous prie de bien vouloir m'excuser pour la longueur de mon propos, madame la présidente, mais il me paraissait essentiel d'expliciter l'objet de l'amendement n° 1861 du Gouvernement, qu'à titre personnel, j'inviterai mes collègues à adopter plutôt que les amendements de la commission, qui ont été déposés antérieurement à la conclusion par le Gouvernement d'un compromis avec l'ensemble des acteurs et entreprises du secteur.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, sur l'article.
Mme Émilienne Poumirol. Je souhaite revenir sur la politique du médicament dans notre pays, en particulier sur la question du prix du médicament et, au sein de celui-ci, du prix de l'innovation.
Cette année, j'ai eu la grande surprise de voir les amendements relatifs à la transparence du prix du médicament ou à l'instauration de davantage de démocratie sanitaire au sein du CEPS que j'avais déposés être déclarés irrecevables, alors que les mêmes amendements, ou quasiment, ont pu être examinés les années précédentes, dans le cadre des derniers PLFSS.
L'instauration des mesures que je proposais aurait pourtant contribué à améliorer la situation des finances publiques. Dans un contexte budgétaire tendu, comment ne pas s'interroger sur le prix exorbitant de certains médicaments dits innovants, dont les prix, qui ne sont pas revus régulièrement, grèvent très lourdement les dépenses de l'assurance maladie ? Les remboursements de médicaments pèsent chaque année à hauteur de 23,7 milliards d'euros, me semble-t-il, sur le budget de la sécurité sociale.
L'amélioration de la transparence des prix et des négociations au sein du CEPS permettrait une meilleure régulation du prix des médicaments.
Si les industriels mettent toujours en avant le prix de la recherche et développement, une part importante de ces dépenses est financée par des fonds publics au travers du crédit d'impôt recherche (CIR), dont ces entreprises bénéficient, tandis que la recherche publique, qu'elle soit menée par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) ou par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), contribue également à l'effort de recherche.
Le cas du Zolgensma, médicament traitant l'amyotrophie spinale, que j'ai déjà cité dans cet hémicycle, est un exemple emblématique puisque bien que ce traitement soit issu de la recherche fondamentale menée par le CNRS et par l'AFM-Téléthon, il n'en reste pas moins commercialisé en accès précoce à un prix affiché proche de 2 millions d'euros l'injection.
Il me paraît donc important que nous puissions avoir une véritable politique de transparence du prix des médicaments. En tout état de cause, je me félicite que vous ayez pu trouver ce compromis, madame la rapporteure générale. Nous y reviendrons lors de l'examen des amendements.
Mme la présidente. Je suis saisie de 46 amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 297 rectifié bis est présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann.
L'amendement n° 891 rectifié est présenté par Mmes Schillinger et Duranton et MM. Rambaud, Buis et Buval.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéas 1 à 40
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéa 43
Supprimer cet alinéa.
III. – Alinéa 44
Remplacer le nombre :
30,60
par le nombre :
27,89
IV. – Alinéa 46
Remplacer le nombre :
26,65
par le nombre :
28,34
V. – Après l'alinéa 51
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
...– Au VII de l'article 28 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024, l'année : « 2026 » est remplacée par l'année : « 2028 ».
Par dérogation au dernier alinéa de l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale, le montant de la contribution prévue au même article L. 138-12 due au titre des années 2025 et 2026 par chaque entreprise redevable ne peut excéder 10 % de son chiffre d'affaires calculé selon les modalités définies à l'article L. 138-10 du même code.
VI. – Alinéas 52 à 57
Supprimer ces alinéas.
VII.... – Pour compenser la perte de recettes résultant des I à VI, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Khalifé Khalifé, pour présenter l'amendement n° 297 rectifié bis.
M. Khalifé Khalifé. Je vous remercie de ces précisions importantes, madame la rapporteure générale, et je remercie le Gouvernement de ce compromis qui nous évite bien des écueils.
Dans ces conditions, et en accord avec son auteur, je retire cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 297 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 891 rectifié n'étant pas soutenu, le sous-amendement n° 1813 rectifié n'a plus d'objet.
L'amendement n° 299 rectifié bis, présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
1° Les articles L. 138-10 à L. 138-16 sont abrogés ;
II. – Alinéa 44
Supprimer cet alinéa.
III. – Alinéas 46 à 51
Supprimer ces alinéas.
IV. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I à III, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Khalifé Khalifé.
M. Khalifé Khalifé. Je retire également cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 299 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 893 rectifié, présenté par Mmes Schillinger et Duranton et MM. Buis, Rambaud et Buval n'est pas soutenu.
L'amendement n° 1861, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l'alinéa 2
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
1° bis L'article L. 138-10 est complété par un III ainsi rédigé :
« III. – Sont exclues de l'assiette définie au II du présent article, les spécialités génériques définies au 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et les spécialités de référence mentionnées au même article L. 5121-1 dont la base de remboursement des frais exposés par les assurés est limitée à un tarif forfaitaire de responsabilité défini au II de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale ou dont le prix fixé en application de l'article L. 162-16-4 du même code est identique à celui des spécialités génériques figurant dans le même groupe générique en application du b du 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique. »
II. – Après l'alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
2° bis Le V de l'article L. 138-12, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025, est ainsi rédigé :
« V. – Le montant de la contribution due par chaque entreprise redevable est plafonné selon les modalités définies au D du III de l'article L. 245-6. »
III. – Alinéas 23 à 29
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« A bis. – Sont exclues de l'assiette définie au A du présent III, les spécialités génériques définies au 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et les spécialités de référence mentionnées au même article L. 5121-1 dont la base de remboursement des frais exposés par les assurés est limitée à un tarif forfaitaire de responsabilité défini au II de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale ou dont le prix fixé en application de l'article L. 162-16-4 du même code est identique à celui des spécialités génériques figurant dans le même groupe générique en application du b du 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique.
IV. – Alinéa 30
1° Après les mots :
au A du présent III,
insérer les mots :
à l'exclusion de celles mentionnées au A bis du même III,
2° Remplacer les mots :
sans déduction
par le mot :
minoré
et les mots :
ni de
par les mots :
à l'exclusion de
V. – Alinéa 31
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un taux différencié du taux de base assis sur la même assiette s'applique chaque année aux entreprises dont le chiffre d'affaires défini au D du présent III est inférieur à 50 millions d'euros.
VI. – Alinéa 32
1° Remplacer les mots :
de la contribution supplémentaire dû par chaque entreprise redevable
par les mots :
total dû par chaque entreprise au titre de la contribution supplémentaire et de la contribution prévue aux articles L. 138-10 et suivants du code de la sécurité sociale
2° Après les mots :
au A du présent III,
insérer les mots :
sans exclusion de celles mentionnées au A bis du même III,
VII. – Alinéa 43
Rédiger ainsi cet alinéa :
IV. – Les 1° et 2° du I sont applicables à partir des contributions dues au titre de l'année 2025. Les dispositions des 1° bis, 2° bis et 3° du I sont applicables à partir des contributions dues au titre de l'année 2026.
VIII. – Alinéa 44
Supprimer cet alinéa.
IX. – Alinéas 47 à 51
Supprimer ces alinéas.
X. – Alinéas 52 à 57
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
VIII. – Les taux de base et différencié de la contribution dite supplémentaire, mentionnés au C du III de l'article L. 245-6 du code de la sécurité sociale sont fixés, respectivement, à 6,45 % et 4,01 % pour l'année 2026.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées. Mesdames, messieurs les sénateurs, la rédaction que je vous propose par le présent amendement est le fruit de nos échanges avec les parlementaires et la traduction du compromis qui a été trouvé avec les acteurs du secteur, entre simplicité du dispositif, maintien du rendement attendu à hauteur de 1,6 milliard d'euros pour 2026 et allègement de la charge sur certains secteurs, notamment les génériques.
Il est tout d'abord proposé de décaler à 2026 l'entrée en vigueur de la réforme, initialement prévue dès 2025.
La contribution demandée sera ensuite calculée sur la base du chiffre d'affaires net de remises conventionnelles, à l'exclusion des remises commerciales.
Les médicaments génériques seront de plus exemptés de la contribution supplémentaire comme de la clause de sauvegarde, et un taux réduit est prévu pour les plus petites entreprises, comme les parlementaires l'ont demandé.
Le plafonnement à 10 % du chiffre d'affaires net de remises conventionnelles prévu pour la contribution supplémentaire est enfin élargi à la clause de sauvegarde.
Cette réforme attendue contribuera à accorder plus de visibilité aux industriels sur leur contribution comme aux services de l'État et aux parlementaires sur nos comptes sociaux.
Je vous invite donc à adopter cet amendement important, mesdames, messieurs les sénateurs.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1864, présenté par Mme Bonfanti-Dossat et M. Masset, est ainsi libellé :
Amendement 1861, alinéas 4 et 11
Compléter ces alinéas par les mots :
et les spécialités de référence dont le prix de vente au public est inférieur à un seuil fixé par décret
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Ce sous-amendement, cosigné par ma collègue du Lot-et-Garonne Christine Bonfanti-Dossat, vise à adapter le mécanisme de plafonnement de la clause de sauvegarde et de la contribution supplémentaire due par les entreprises du médicament, afin de mieux prendre en compte la réalité économique des spécialités à prix bas.
Une telle mesure avait déjà été adoptée par les parlementaires l'an dernier, mais elle n'a jamais été mise en œuvre. Dans la rédaction proposée par le Gouvernement, ce plafonnement s'applique uniquement aux spécialités génériques, ainsi qu'aux spécialités soumises à un tarif forfaitaire de responsabilité. Un nombre croissant de spécialités de référence commercialisées à prix bas sont de ce fait exclues de ce dispositif, alors qu'elles participent de la même logique de contribution à l'efficience du système de santé.
Le présent sous-amendement vise donc à inclure, dans la rédaction proposée par le Gouvernement, les spécialités de référence dont le prix de vente au public est inférieur à un seuil fixé par décret.
Une telle disposition permettra d'assurer une équité de traitement entre produits de référence et génériques, qui concourent tous deux à la maîtrise des dépenses de santé. Elle contribuera également à préserver la soutenabilité économique de ces spécialités à faible prix, laquelle est essentielle à la continuité des traitements comme à la sécurité d'approvisionnement, tout en maintenant un cadre de régulation cohérent et transparent.
En renforçant la cohérence du dispositif existant, cette mesure s'inscrit dans l'objectif de garantir une régulation plus juste, proportionnée et adaptée à la structure réelle du marché du médicament.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1865, présenté par Mme Bonfanti-Dossat et M. Masset, est ainsi libellé :
Amendement 1861, après l'alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les entreprises peuvent bénéficier d'un abattement de 20 % si, pour une entreprise redevable de la contribution, au moins 50 % de ses spécialités pharmaceutiques éligibles à la contribution ont au moins une étape majeure de production, principe actif ou produit fini, réalisée en Europe ou en France, par l'exploitant lui-même ou par un sous-traitant.
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Ce sous-amendement vise à appliquer, lors du calcul de la contribution supplémentaire, une décote aux entreprises qui contribuent à renforcer notre souveraineté sanitaire via la localisation de l'investissement et des emplois, au sein de leurs unités de production comme de recherche et développement.
Une telle pratique, d'usage rare en France, est du reste courante dans de nombreux grands pays de l'OCDE, notamment parmi les plus importants d'entre eux.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1867, présenté par Mme Schillinger n'est pas soutenu.
L'amendement n° 514, présenté par M. Khalifé, est ainsi libellé :
I. – Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Le 6° du II de l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale est abrogé.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Khalifé Khalifé.
M. Khalifé Khalifé. Cet amendement vise à exclure du champ de la clause de sauvegarde les produits acquis par Santé publique France, dont les volumes et les prix sont déterminés par l'État dans le cadre de politiques nationales.
Ces produits – vaccins, antidotes, traitements d'urgence – ne participant pas de la dynamique du marché, il est en effet justifié de les exclure de la clause de sauvegarde.
Mme la présidente. L'amendement n° 268 rectifié bis, présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
I. – Après l'alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...°Au V de l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025, après le mot : « redevable » , sont insérés les mots : « , additionné à celui de la perte de chiffre d'affaires au titre des contributions mentionnées à l'article L. 245-6 du code de la sécurité sociale ainsi que des baisses de prix conclues par convention avec le comité économique des produits de santé, concernant les produits entrant dans l'assiette de la contribution sur la même période, » ;
II. – Alinéa 32
Après le mot :
redevable
insérer les mots :
, additionné à la perte de chiffre d'affaires au titre de la contribution mentionnée à l'article L. 138-12 du présent code ainsi que des baisses de prix conclues par convention avec le comité économique des produits de santé, concernant les produits entrant dans l'assiette de la contribution sur la même période,
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Khalifé Khalifé.
M. Khalifé Khalifé. Je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 268 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 251 rectifié, présenté par Mme Bonfanti-Dossat, MM. Masset, Gueret et H. Leroy, Mmes Belrhiti et Micouleau, M. Panunzi, Mme Lassarade, M. Genet et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
b) Le premier alinéa du II est ainsi rédigé :
« B. – Cette contribution de base est assise sur le montant remboursé par l'Assurance maladie aux assurés sociaux au cours de l'année civile en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer au cours d'une année civile au titre des médicaments bénéficiant : » ;
II. – Alinéa 13
Remplacer les mots :
chiffre d'affaires hors taxes réalisé
par les mots :
montant remboursé par l'Assurance maladie aux assurés sociaux au cours de l'année civile
et les mots :
remplissant les
par les mots :
répondant aux
III. – Alinéa 30
Remplacer les mots :
chiffre d'affaires
par les mots :
montant remboursé par l'Assurance maladie aux assurés sociaux,
IV. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I à III, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Florence Lassarade.
Mme Florence Lassarade. Par cet amendement, Christine Bonfanti-Dossat propose de préciser l'assiette des contributions dues par les entreprises du médicament et de fonder celle-ci non plus sur le chiffre d'affaires hors taxes, mais sur le montant effectivement remboursé par l'assurance maladie aux assurés sociaux.
Cette évolution poursuit un double objectif de cohérence et de justice économique.
En effet, la prise en compte du chiffre d'affaires hors taxes ne distingue pas les ventes de médicaments remboursables de celles qui ne donnent lieu à aucun remboursement par la collectivité. Or seules les dépenses effectivement supportées par l'assurance maladie doivent logiquement être prises en compte dans l'assiette des contributions qui visent à réguler la dépense publique.
Une telle approche s'inscrit dans la continuité de la loi du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024, qui a retenu une assiette de la clause de sauvegarde fondée sur les montants non pas remboursables, mais remboursés, au plus près de la réalité économique du système de santé.
Cette approche présente en outre l'avantage d'être plus fiable, puisqu'elle s'appuie sur des données objectives, issues des remboursements réalisés par l'assurance maladie et indépendantes de tout système déclaratif.
En cohérence avec les principes de transparence et de bonne régulation, cette modification permet ainsi d'assurer une contribution plus juste, plus lisible et plus conforme à la réalité des dépenses effectivement supportées par la solidarité nationale.
Mme la présidente. L'amendement n° 196 rectifié, présenté par Mme Romagny, MM. Menonville, Courtial, Bonneau, Henno et Cambier, Mme Billon, M. Dhersin, Mme Antoine, M. Chevalier, Mme Sollogoub, M. Genet et Mme Perrot, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
b) Le premier alinéa du II est ainsi rédigé :
« B. – Cette contribution de base est assise sur le montant remboursé par l'assurance maladie aux assurés sociaux au cours de l'année civile en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer au cours d'une année civile au titre des médicaments bénéficiant : » ;
II. – Alinéa 13
Remplacer les mots :
chiffre d'affaires hors taxes réalisé
par les mots :
montant remboursé par l'assurance maladie aux assurés sociaux au cours de l'année civile
III. – Alinéa 30
Remplacer les mots :
chiffre d'affaires
par les mots :
montant remboursé par l'assurance maladie aux assurés sociaux
IV. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Il est défendu, madame la présidente.
Aux propos de Mme la rapporteure générale, j'ajouterai que si le prix des médicaments doit être envisagé au prisme des enjeux sanitaires et à celui du meilleur prix possible, j'estime qu'il convient également de le considérer, comme tout ce qui concerne l'industrie, à l'aune de notre souveraineté – je salue le président de la commission des affaires européennes, qui souscrira sans doute à mon propos.
Vous vous rappelez sans doute, mes chers collègues, que la Commission européenne, compétente en la matière, avait interdit le projet d'acquisition d'Alstom par Siemens. Au cours des travaux de la mission d'information sur la modernisation de la politique européenne de concurrence que je menais alors, j'avais constaté à quel point nous appliquions encore, au nom du principe de la concurrence libre et non faussée, la logique du meilleur prix pour le consommateur.
Il me semble que le monde ayant changé, il nous faut aujourd'hui examiner les enjeux industriels au prisme de la souveraineté nationale et européenne et sans doute aussi – mais c'est un autre débat – à l'aune du développement social et durable.
Mme la présidente. L'amendement n° 1176, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer le taux :
0,20 %
par le taux :
0,50 %
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. L'article 10 se borne au fond à opérer un transfert de rendement depuis la clause de sauvegarde vers la contribution sur le chiffre d'affaires prévue à l'article L. 245-6 du code de la sécurité sociale. Pendant ce temps, les pénuries et les ruptures de stock de médicaments, quant à elles, ne reculent toujours pas, sinon très insuffisamment.
La différence entre la clause de sauvegarde et la contribution supplémentaire créée tient à leur assiette de calcul respective, la clause de sauvegarde étant assise sur le chiffre d'affaires déduction faite de toute remise, tandis que la contribution supplémentaire est assise sur le chiffre d'affaires brut sans déduction de toutes les remises. Dans l'annexe 9 du présent PLFSS, il est précisé que la non-déductibilité des remises permettra de « soutenir les spécialités dites matures, les génériques, les biosimilaires et les hybrides substituables ».
Le montant de la contribution supplémentaire est actuellement plafonné à 10 % du chiffre d'affaires. Par cet amendement, nous proposons de relever à 0,50 % le taux de la contribution de base sur l'ensemble des médicaments, hors générique et orphelins, contre 0,20 % dans le texte.
Nous pourrons ainsi financer la constitution du pôle public du médicament que nous appelons de nos vœux, un pôle capable de produire des médicaments d'intérêt thérapeutique majeur et de garantir notre souveraineté – je rejoins sur ce point Olivier Henno – en matière de médicaments.
Mme la présidente. L'amendement n° 1499, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Remplacer le taux :
1,6 %
par le taux :
2,6 %
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Dans quelques minutes, notre rapporteure générale nous dira que la commission n'est pas favorable à la réforme de la contribution des industries pharmaceutiques et préfère poursuivre le chemin entamé avec la réforme de la clause de sauvegarde.
Pour tout vous dire, nous étions quelque peu circonspects face à cet article 10, le plus technique de ce PLFSS selon le rapporteur général de l'Assemblée nationale. Mais ce qui nous intéresse n'est pas tant le mécanisme utilisé – s'il améliore la lisibilité pour les acteurs et que ces derniers peuvent ainsi mieux anticiper les sommes qu'ils devront verser, tant mieux ! – que le montant de la contribution.
Par cet amendement, nous vous proposons de relever à 2,6 %, contre 1,6 % actuellement, le taux de la section additionnelle de la nouvelle contribution prévue à l'article 10. Nous estimons le rendement supplémentaire à 200 millions d'euros, mais nous sommes naturellement preneurs de meilleures estimations du Gouvernement.
Au cours de la dernière décennie, le marché du médicament en France a connu une croissance rapide, les bénéfices étant passés de 24,7 à 36,5 milliards d'euros. Or, entre 2000 et 2023, les marges brutes du secteur pharmaceutique se sont en moyenne établies à 73 %. L'industrie pharmaceutique se finançant en grande partie grâce à la sécurité sociale, cette dynamique pèse lourdement sur la soutenabilité de notre système de santé. Dès lors qu'elle en est bénéficiaire – et elle ne l'a jamais autant été –, il est donc juste que cette industrie participe pleinement au financement de notre système de santé.
J'ajoute que nous nous opposerons au plafonnement du rendement de la contribution supplémentaire prévu par l'amendement n° 1861 du Gouvernement.
Mme la présidente. L'amendement n° 1180, présenté par M. Savoldelli, Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 14
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... – Les entreprises dont le siège social, le site de production industrielle, de recherche quittent le territoire national, sont soumises à une contribution S de 10 % de la différence entre la valorisation boursière de l'année de départ et la valorisation qui suit l'annonce au Comité Social et Économique de l'entreprise. »
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. En juillet dernier, j'attirais l'attention sur la situation de l'usine Sanofi de Maisons-Alfort, dans le Val-de-Marne, menacée par une décision de cession à un groupe allemand.
Ce site spécialisé dans les activités de contrôle de qualité et de recherche pharmaceutique, qui emploie 452 personnes, joue un rôle stratégique dans la chaîne de production de médicaments, y compris dans le domaine des vaccins.
La décision de Sanofi de vendre ce site suscite une vive inquiétude chez les salariés, les habitants du secteur et les élus locaux, qui, en dépit des promesses du repreneur, craignent une délocalisation progressive des activités et des suppressions d'emplois.
Les grands laboratoires réalisent pourtant d'immenses profits. L'exemple de Sanofi est frappant : 4,9 milliards d'euros de dividendes versés en 2024 et un objectif de 5 milliards de rachats d'actions pour l'année 2025.
Alors que le Gouvernement affirme faire de la réindustrialisation et de la relocalisation des productions une priorité nationale, cette décision de cession affaiblit notre souveraineté sanitaire, en totale contradiction avec les objectifs affichés, madame la ministre.
Le présent amendement vise donc à créer une nouvelle contribution de solidarité, ou contribution S, dont devraient s'acquitter les entreprises pharmaceutiques implantées sur notre territoire qui délocalisent leur siège social ou leurs sites de production industrielle ou de recherche.
Mme la présidente. L'amendement n° 611, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 15 à 32
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéas 34 à 36
Remplacer (quatre fois) les mots :
, additionnelles et supplémentaires
par les mots :
et additionnelle
III. – Alinéa 44
Supprimer cet alinéa.
IV. – Alinéas 52 à 58
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Comme je l'indiquais précédemment, je vous invite à adopter l'amendement n° 1861 du Gouvernement, qui a été déposé après le présent amendement, mes chers collègues.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1814 rectifié, présenté par M. Masset, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bilhac, Daubet et Grosvalet, Mme Guillotin et MM. Laouedj et Roux, est ainsi libellé :
Amendement n° 611
Compléter cet amendement par deux paragraphes ainsi rédigés :
V. – Le II de l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025, est ainsi rédigé :
« Le montant de la contribution due par chaque entreprise mentionnée au I de l'article L. 138-10 est déterminé :
« 1° À concurrence de 50 %, au prorata du montant remboursé par l'assurance maladie au titre des médicaments qu'elle exploite, importe ou distribue au sein du montant total remboursé par l'assurance maladie défini au même I ;
« 2° À concurrence de 30 %, en fonction de la progression du montant remboursé par l'assurance maladie au titre des médicaments que l'entreprise exploite, importe ou distribue par rapport à l'année précédente définie audit I ;
« 3° À concurrence de 20 %, en fonction du lieu de production des médicaments que l'entreprise exploite, importe ou distribue au sein du montant total remboursé par l'assurance maladie défini au même I.
« La fraction de la part de la contribution due en fonction du lieu de production est ainsi déterminée :
Parts des médicaments mentionnées à l'article L. 138-10 du présent code produits en UE |
Coefficient |
Part de la contribution de l'entreprise |
Inférieure ou égale à 20 % |
4 |
Coefficient de l'entreprise / Somme des coefficients de l'ensemble des entreprises redevables |
Supérieure à 20 % et inférieure ou égale à 40 % |
3 |
Coefficient de l'entreprise / Somme des coefficients de l'ensemble des entreprises redevables |
Supérieure à 40 % et inférieure ou égale à 60 % |
2 |
Coefficient de l'entreprise / Somme des coefficients de l'ensemble des entreprises redevables |
Supérieure à 60 % et inférieure ou égale à 80 % |
1 |
Coefficient de l'entreprise / Somme des coefficients de l'ensemble des entreprises redevables |
Supérieure à 80 % |
0 |
Coefficient de l'entreprise / Somme des coefficients de l'ensemble des entreprises redevables |
»
VI. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du V est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Je ne pense pas qu'il faille rejeter la réforme de la clause de sauvegarde qui nous est proposée par le Gouvernement, mais, si nous devions adopter l'amendement n° 611 de la commission, ainsi que les amendements de suppression des articles 10 bis et 10 ter, il nous faudrait être à la hauteur des enjeux industriels et sanitaires de la production de médicaments.
Madame la rapporteure générale, avec ce sous-amendement, je vous invite à la plus grande vigilance à cet égard. En effet, je vous propose d'introduire un critère de territorialité dans le calcul de la clause de sauvegarde : c'est un impératif pour préserver notre souveraineté industrielle dans le secteur du médicament.
Mme la présidente. L'amendement n° 160 rectifié, présenté par MM. Piednoir, J.P. Vogel et Lefèvre, Mmes Micouleau et Belrhiti, MM. Brisson, Panunzi, Paccaud, Pointereau et Houpert, Mmes Garnier et Evren, MM. Savin et Saury, Mme Berthet, MM. de Nicolaÿ, H. Leroy et Reynaud, Mmes Aeschlimann et Ventalon, MM. Sido et Bruyen, Mmes P. Martin, Joseph, Canayer et Estrosi Sassone, MM. Anglars et Somon, Mme Lassarade, MM. Genet et Cadec, Mmes Di Folco et Pluchet et MM. Rapin et Naturel, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Florence Lassarade.
Mme Florence Lassarade. Cet amendement de notre collègue Stéphane Piednoir vise à exempter du périmètre de la clause de sauvegarde les médicaments et produits de santé constitutifs des stocks stratégiques de l'État, afin de préserver leur rôle central dans la sécurité et la souveraineté sanitaires de la France au service des populations civiles et militaires.
Sur l'initiative du gouvernement de l'époque, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 a entériné l'introduction, dans le périmètre de la clause de sauvegarde, de l'ensemble des médicaments et produits de santé acquis par Santé publique France.
Cette décision a engagé le sort des médicaments et produits de santé constitutifs des stocks stratégiques de l'État, définis par l'article L. 3135-4 du code de la santé publique. Indispensables pour garantir la sécurité sanitaire nationale, ils sont vitaux pour la préparation et la gestion des situations d'urgence, en lien avec la prise en compte de la menace terroriste et du risque épidémique, la gestion des accidents industriels et la protection des opérateurs d'importance capitale. Ces stocks stratégiques de l'État intègrent notamment les antidotes et contre-mesures médicales essentielles pour faire face aux risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC).
Il est incohérent de soumettre les médicaments et produits de santé constitutifs des stocks stratégiques de l'État à la nouvelle contribution, dans la mesure où les dépenses auxquelles ils se rapportent ne correspondent pas à une consommation de produits ou de prestations de santé qu'il s'agirait de contrôler ou d'atténuer, mais bien à la traduction de la doctrine de l'État en matière de sécurité et de protection des populations.
Le faible nombre d'entreprises concernées rend la mesure que nous proposons acceptable financièrement au regard de l'enjeu stratégique que les risques NRBC représentent pour la Nation. Il est légitime que nous procédions aujourd'hui à l'exemption de ces médicaments, à l'instar des dispositions prises pour les stocks stratégiques constitués au cours de la crise de la covid-19.
Mme la présidente. L'amendement n° 301 rectifié ter, présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 23 à 29
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéa 30
Remplacer les mots :
sans déduction
par les mots :
après déduction
et les mots :
ni de toutes autres remises
par les mots :
des remises
III. – Après l'alinéa 31
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« Par exception au premier alinéa du présent C :
« 1° Un taux différencié du taux de base assis sur la même assiette s'applique chaque année aux spécialités génériques définies au 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et aux spécialités de référence mentionnées au même article L. 5121-1 dont la base de remboursement des frais exposés par les assurés est limitée à un tarif forfaitaire de responsabilité défini en application du II de l'article L. 162-16-6 du présent code ou dont le prix fixé en application de l'article L. 162-16-4 du même code est identique à celui des spécialités génériques figurant dans le même groupe générique créé au titre du b du 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et aux spécialités de référence lorsque leur prix de vente au public est inférieur à un seuil fixé par décret ;
« 2° Un second taux différencié du taux de base s'applique chaque année pour les entreprises définies au A du I du présent article dont le chiffre d'affaires tel que défini au B du même I réalisé au cours du ou des exercices clos depuis la dernière échéance n'excède pas 50 millions d'euros. »
IV. – Alinéa 53
Remplacer le taux :
4,24 %
par le taux :
6,1 %
V. – Alinéa 54
Remplacer le taux :
4,01 %
par le taux :
5,9 %
VI. – Après l'alinéa 57
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
Le second taux différencié mentionné au 2° du même C est fixé comme suit :
a) Pour l'année 2025, ce taux est fixé à 4,24 % ;
b) Pour l'année 2026, ce taux est fixé à 4,01 %.
VII. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I à VI, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Khalifé Khalifé.
M. Khalifé Khalifé. Je retire également cet amendement au profit de l'amendement n° 1861 du Gouvernement.
Mme la présidente. L'amendement n° 301 rectifié ter est retiré.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 895 rectifié est présenté par Mmes Schillinger et Duranton et MM. Buis, Rambaud et Buval.
L'amendement n° 908 rectifié ter est présenté par M. Henno, Mmes Vermeillet, Vérien, Romagny et Perrot, MM. Mizzon, Menonville et Levi, Mme Billon, MM. J.M. Arnaud, S. Demilly et Fargeot et Mmes Patru et Sollogoub.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 23 à 29
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéa 30
1° Remplacer les mots :
sans déduction
par les mots :
après déduction
2° Remplacer les mots :
de toutes autres remises
par les mots :
des remises
III. – Après l'alinéa 31
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« Par exception :
« 1° Un taux différencié du taux de base assis sur la même assiette s'applique chaque année aux spécialités génériques définies au 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et aux spécialités de référence mentionnées au même article L. 5121-1 dont la base de remboursement des frais exposés par les assurés est limitée à un tarif forfaitaire de responsabilité défini en application du II de l'article L. 1621-6 du présent code ou dont le prix fixé en application de l'article L. 1621-4 du même code est identique à celui des spécialités génériques figurant dans le même groupe générique créé au titre du b du 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique ;
« 2° Un second taux différencié du taux de base s'applique chaque année pour les entreprises définies au A du I dont le chiffre d'affaires tel que défini au B du I réalisé au cours du ou des exercices clos depuis la dernière échéance n'excède pas 50 millions d'euros. »
IV. – Alinéa 53
Remplacer le taux :
4,24 %
par le taux :
6,1 %
V. – Alinéa 54
Remplacer le taux :
4,01 %
par le taux :
5,9 %
VI. – Après l'alinéa 57
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« Le second taux différencié est ainsi fixé :
« a) Pour l'année 2025, ce taux est fixé à 4,24 % ;
« b) Pour l'année 2026, ce taux est fixé à 4,01 %.
VII. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
L'amendement n° 895 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l'amendement n° 908 rectifié ter.
M. Olivier Henno. Je retire mon amendement, puisque le nouveau dispositif du Gouvernement, qui est sans doute le plus pertinent, a fait évoluer l'assiette de la contribution.
Mme la présidente. L'amendement n° 908 rectifié ter est retiré.
L'amendement n° 1792 rectifié bis n'est pas soutenu.
L'amendement n° 1296 rectifié, présenté par MM. Sol et Milon, Mme Petrus, MM. Khalifé, Burgoa, Panunzi et H. Leroy, Mme Richer, MM. Hugonet et Chatillon, Mme Canayer, M. Somon, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Genet, Saury, Belin et Anglars, Mmes Micouleau et Evren et M. Meignen, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 26 et 27
Supprimer ces alinéas.
II. – Après l'alinéa 30
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« .... – Est exclu de l'assiette définie au B du présent III le chiffre d'affaires correspondant aux ventes en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer au cours d'une année civile au titre des spécialités génériques et des médicaments hybrides définis au 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et des médicaments biologiques similaires définis au 15° du même article L. 5121-1. »
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Jean Sol.
M. Jean Sol. Défendu !
Mme la présidente. L'amendement n° 1177, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 29
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 a pérennisé un dispositif de plafonnement individuel de la contribution des laboratoires pharmaceutiques au titre de la clause de sauvegarde. Le Gouvernement, toujours enclin à concéder des cadeaux au grand capital du secteur de la santé, propose donc d'appliquer ce même plafonnement dans le cadre de la nouvelle contribution supplémentaire qui absorbera le rendement de la clause de sauvegarde. Celui-ci sera en conséquence limité à 1,6 milliard d'euros.
Les laboratoires se livrent à un véritable braquage des caisses de la sécurité sociale par leurs politiques tarifaires agressives. Les prix imposés sont complètement décorrélés des coûts de production et des investissements en matière de recherche et développement, financés à grand renfort, faut-il le rappeler, par de l'argent public. L'exemple le plus frappant concerne les médicaments innovants. Les laboratoires forcent la main des autorités sanitaires pour qu'elles acceptent leur commercialisation à prix d'or. Ces autorités, abandonnées par un gouvernement au service des grandes entreprises, sont soumises à un chantage : la bourse ou la vie… des patients !
C'est ainsi que le remboursement du Keytruda, le médicament contre le cancer du laboratoire Sanofi Pasteur MSD, a coûté plus de 2 milliards d'euros en 2024, soit 5,2 % des dépenses de médicaments remboursables. Il s'agit d'un médicament commercialisé au prix de 2 000 euros par flacon, alors que, selon des analyses indépendantes, un prix juste se situerait plutôt entre 52 et 885 euros, soit un montant très éloigné de ceux qui sont facturés à l'assurance maladie.
Tous ces profits réalisés à partir de nos cotisations et qui empêchent de sauver des vies doivent être récupérés et réinjectés dans le budget de l'assurance maladie.
Mme la présidente. L'amendement n° 887 rectifié n'est pas soutenu.
Les quatre amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 195 rectifié est présenté par Mme Romagny, MM. Menonville, Courtial, Bonneau, Henno et Cambier, Mme Billon, M. Dhersin, Mme Antoine, MM. Chevalier et Fargeot, Mme Sollogoub, M. Bleunven, Mme Lermytte, M. Genet et Mme Perrot.
L'amendement n° 515 est présenté par M. Khalifé.
L'amendement n° 789 est présenté par Mme Valente Le Hir.
L'amendement n° 1411 rectifié bis est présenté par Mme Bonfanti-Dossat, MM. Masset, Gueret et H. Leroy, Mmes Belrhiti et Micouleau, M. Panunzi et Mme Lassarade.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l'alinéa 30
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ... – Les entreprises peuvent bénéficier d'un abattement de 20 % si, pour une entreprise redevable de la contribution, au moins 50 % de ses spécialités pharmaceutiques éligibles à la contribution ont au moins une étape majeure de production, principe actif ou produit fini, réalisée en Europe ou en France, par l'exploitant lui-même ou par un sous-traitant. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l'amendement n° 195 rectifié.
M. Olivier Henno. Je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 195 rectifié est retiré.
La parole est à M. Khalifé Khalifé, pour présenter l'amendement n° 515.
M. Khalifé Khalifé. J'aurais moi aussi pu retirer mon amendement, mais je tenais à attirer votre attention sur ce dispositif, qui vise pour l'essentiel à prévoir certaines dispositions pour l'industrie produisant spécifiquement en Europe et en France des produits à bas coût : il importe de sauvegarder ce secteur et d'éviter ainsi les ruptures, les pénuries ou une commercialisation à l'étranger de ces médicaments.
Mme la présidente. L'amendement n° 789 n'est pas soutenu.
La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l'amendement n° 1411 rectifié bis.
Mme Florence Lassarade. Cet amendement, que j'aurais également pu retirer, tend à introduire une remise de 20 % dans le calcul de la contribution supplémentaire, qui tienne compte du lieu de production des médicaments concernés. En l'espèce, je songeais au laboratoire UPSA dans le département du Lot-et-Garonne.
Mme la présidente. L'amendement n° 252 rectifié, présenté par Mme Bonfanti-Dossat, MM. Masset, Gueret et H. Leroy, Mmes Belrhiti et Micouleau, M. Panunzi, Mme Lassarade, M. Genet et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
I. – Après l'alinéa 31
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Un taux différencié du taux de base assis sur la même assiette s'applique chaque année aux spécialités génériques définies au 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, aux spécialités de référence mentionnées au même article L. 5121-1 dont la base de remboursement des frais exposés par les assurés est limitée à un tarif forfaitaire de responsabilité défini en application du II de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale ou dont le prix fixé en application de l'article L. 162-16-4 du même code est identique à celui des spécialités génériques figurant dans le même groupe générique créé au titre du b du 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et aux spécialités de référence lorsque leur prix de vente au public est inférieur à un seuil fixé par décret.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Le présent amendement a pour objet d'élargir le bénéfice du taux différencié de la nouvelle contribution aux spécialités de référence lorsque leur prix de vente au public est inférieur à un seuil fixé par décret. Cette évolution permettra d'assurer une équité de traitement entre produits de référence et génériques qui concourent tous à la maîtrise des dépenses de santé.
Mme la présidente. L'amendement n° 1104, présenté par Mme Harribey, MM. Gillé et Bourgi, Mmes Poumirol et Bonnefoy, M. Ros, Mme G. Jourda, M. Roiron, Mme Le Houerou et MM. P. Joly et Pla, est ainsi libellé :
I. – Après l'alinéa 31
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
« Un taux différencié du taux de base s'applique aux spécialités de référence au sens de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et aux spécialités autorisées sur la base d'un usage médical bien établi, au sens de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001, dont le principe actif n'est plus breveté.
« Le taux différencié applicable aux spécialités mentionnées à l'alinéa précédent est ainsi fixé :
« a) Pour l'année 2025, ce taux est fixé à 1,75 % ;
« b) Pour l'année 2026, ce taux est fixé à 1,65 %. »
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« .... – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre I du livre III du code des impositions sur les biens et services. »
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement de notre collègue Laurence Harribey vise à appliquer le taux différencié de la contribution supplémentaire aux médicaments matures, c'est-à-dire ces spécialités de référence ou établies depuis longtemps dont le principe actif n'est plus protégé par un brevet.
Il s'agit de spécialités anciennes, largement prescrites, dont on connaît l'efficacité, la sécurité et l'intérêt thérapeutique. Dans un souci d'équité vis-à-vis des génériques, il convient de porter une attention particulière à ces médicaments : ce taux différencié permettrait de soulager les laboratoires qui les produisent.
Il s'agit d'un enjeu de souveraineté sanitaire et territoriale, puisque ces médicaments matures sont souvent produits en France – pour 70 % d'entre eux – ou en Europe – pour le reste. Ils contribuent donc à la souveraineté nationale et au maintien des capacités industrielles sur notre territoire.
Aujourd'hui, en raison du faible prix de ces médicaments, la production locale est menacée, avec à la clé des risques de tension, de rupture ou de pénurie de médicaments. Le danger est du reste aggravé par la hausse tendancielle des coûts de production et le poids des contributions. Notre collègue Florence Lassarade a parlé d'UPSA, mais on pourrait tout autant évoquer le laboratoire Biocodex et bien d'autres…
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 300 rectifié bis est présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann.
L'amendement n° 894 rectifié est présenté par Mmes Schillinger et Duranton et MM. Rambaud, Buis et Buval.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 32
Remplacer les mots :
Le montant de la contribution supplémentaire dû par chaque entreprise redevable
par les mots :
Le montant total dû par chaque entreprise au titre de la contribution supplémentaire et de la contribution prévue aux articles L. 138-10 et suivants du code de la sécurité sociale
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Khalifé Khalifé, pour présenter l'amendement n° 300 rectifié bis.
M. Khalifé Khalifé. Je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 300 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 894 rectifié n'est pas soutenu.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 302 rectifié bis est présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann.
L'amendement n° 896 rectifié est présenté par Mmes Schillinger et Duranton et MM. Buis, Rambaud et Buval.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l'alinéa 32
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les entreprises redevables de la contribution supplémentaire qui, en application des articles L. 162-16-4, L. 162-16-4-1, L. 162-16-5 et L. 162-16-6, ont conclu avec le comité économique des produits de santé, pour au moins 90 % de leur chiffre d'affaires réalisé au cours de l'année civile au titre des médicaments mentionnés au A qu'elles exploitent, une convention en cours de validité au 31 décembre de l'année civile au titre de laquelle la contribution supplémentaire est due et conforme aux modalités définies par un accord conclu, le cas échéant, en application du premier alinéa de l'article L. 162-17-4 peuvent signer avec le comité, avant le 31 janvier de l'année suivant l'année civile au titre de laquelle la contribution est due, un accord prévoyant le versement, sous forme de remise, à un des organismes mentionnés à l'article L. 213-1 désigné par le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, de tout ou partie du montant dû au titre de la contribution. Les entreprises assurant l'exploitation, l'importation parallèle ou la distribution parallèle des médicaments mentionnés au A bénéficiant d'une autorisation ou d'un cadre de prescription compassionnelle mentionnés aux articles L. 5121-12 et L. 5121-12-1 du code de la santé publique et de la prise en charge associée mentionnée aux articles L. 162-16-5-1 et L. 162-16-5-2 du présent code, d'une prise en charge au titre de l'article L. 162-16-5-1-2 ou du dispositif de prise en charge d'accès direct prévu à l'article 62 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022, dont le syndicat représentatif est signataire de l'accord mentionné au premier alinéa de l'article L. 162-17-4, peuvent également signer avec le comité un accord prévoyant le versement d'une remise.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Khalifé Khalifé, pour présenter l'amendement n° 302 rectifié bis.
M. Khalifé Khalifé. Je retire mon amendement, car il me semble satisfait par l'amendement n° 1861 du Gouvernement.
Mme la présidente. L'amendement n° 302 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 896 rectifié n'est pas soutenu, non plus que l'amendement n° 886 rectifié.
L'amendement n° 575, présenté par M. Khalifé, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 43
Rédiger ainsi cet alinéa :
IV. – Les dispositions des 1° et 2° du I sont applicables à partir des contributions dues au titre de l'année 2025.
II. – Alinéas 53 et 56
Supprimer ces alinéas.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Khalifé Khalifé.
M. Khalifé Khalifé. Je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 575 est retiré.
L'amendement n° 884 rectifié n'est pas soutenu.
L'amendement n° 745 rectifié, présenté par M. Cambier, Mmes Romagny et Billon, MM. Fargeot, Longeot et Dhersin, Mmes Guidez et Antoine, M. Courtial, Mme Gosselin, MM. Houpert, Mizzon et Chasseing, Mmes Gacquerre et de La Provôté, MM. Menonville et Kern et Mme Perrot, est ainsi libellé :
I. – Après l'alinéa 44
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.... – Au II de l'article 29 de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025, le montant : « 2,26 » est remplacée par le montant : « 2,36 ».
II. – Alinéa 45
Remplacer le montant :
2,19
par le montant :
2,29
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. Compte tenu des erreurs de prévision observées par le passé et reconnues par les pouvoirs publics sur des données affectant la détermination du seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde, cet amendement tend à préconiser une définition plus prudente du montant Z pour que cette contribution redevienne un filet de sécurité et non une mesure de rendement.
Ce dispositif est légitime parce qu'un « rebasage » du montant Z est nécessaire du fait des erreurs initiales du Gouvernement. Il serait dommageable de pénaliser le secteur du dispositif médical, qui contribue au développement du virage ambulatoire et qui est donc, par essence, source d'économies à long terme. La clause touchera de nombreuses PME, qui sont plus fragiles que les autres entreprises et très présentes dans les territoires.
Les dispositifs médicaux visés par ce mécanisme de la clause de sauvegarde sont principalement implantables en cardiologie et en orthopédie ; leur utilisation est intrinsèquement liée à l'activité médicale et aux besoins vitaux de patients.
Mme la présidente. L'amendement n° 613, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 45
Remplacer le montant :
2,19
par le montant :
2,29
II. – Alinéa 46
Remplacer le montant :
26,65
par le montant :
24,87
III. – Après l'alinéa 46
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.. .– Pour l'année 2026, le montant M mentionné au VII du présent article est fixé à un niveau conduisant à un rendement maximal de 1,6 milliard d'euros de la contribution mentionnée à l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale si l'évolution des dépenses de l'assurance maladie au titre des médicaments remboursés avant les mesures d'économies et les mesures d'économies portant sur ces dépenses sont conformes aux prévisions sous-jacentes à la présente loi. Ce montant M est révisé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2027, à la hausse ou à la baisse, afin de garantir le respect de l'équilibre économique conforme à ces prévisions.
IV. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement de la commission visait à fixer un montant M pour 2026 à un niveau garantissant le déclenchement de la clause de sauvegarde pour un rendement de 1,6 milliard d'euros, et ce afin que la suppression de la contribution supplémentaire, souhaitée par la commission, ne se traduise pas par une perte de recettes pour l'assurance maladie.
Comme je l'ai indiqué, l'amendement n° 1861 du Gouvernement tend à lever les réserves exprimées par la commission et à assurer un tel rendement de 1,6 milliard d'euros. Je vous invite donc, j'y insiste, à privilégier ce dispositif.
Cela étant, le présent amendement de la commission avait aussi pour objet d'augmenter le montant Z, qui concerne quant à lui les dispositifs médicaux – et non, comme le montant M, les médicaments –, afin que celui-ci ne se déclenche pas en 2026. En effet, nous sommes nombreux à vouloir défendre un secteur dès lors qu'il est composé essentiellement de TPE et de PME.
Dans l'hypothèse où l'amendement n° 1861 du Gouvernement serait adopté, je demanderai donc à ce que cet amendement n° 613 soit rectifié de sorte à pouvoir conserver cette dernière disposition sur les dispositifs médicaux.
Mme la présidente. L'amendement n° 1179, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 45, à la fin
Remplacer le montant :
2,19
par le montant :
2,1
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Les fabricants de dispositifs médicaux profitent largement des financements publics.
Sur la période 2017-2022, les dépenses d'assurance maladie relatives aux dispositifs médicaux se sont accrues de 3,7 %, soit une hausse totale de l'ordre de 2,4 milliards d'euros. Ces dépenses s'élevaient à 14 milliards d'euros en 2022. La consommation de dispositifs médicaux représentait quant à elle 21,7 milliards d'euros en 2024, en augmentation de 4,4 % sur un an.
La France est le pays de l'OCDE qui consacre le montant le plus élevé de dépenses aux dispositifs médicaux : 298 euros par an et par habitant en 2021.
La hausse des dépenses dans ce secteur s'explique pour partie – nous l'avons souligné à plusieurs reprises – par l'évolution démographique que connaît notre pays. Le vieillissement de la population entraîne des besoins accrus de matériel et d'appareils d'aide à la vie.
En outre, c'est sur les dispositifs médicaux que le reste à charge des ménages est le plus important, comme le souligne la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) dans son rapport annuel sur les dépenses de santé.
Cette tendance à l'accroissement des besoins implique de mettre à contribution les industriels. Le Gouvernement fait exactement l'inverse en fixant chaque année un montant Z si élevé qu'il ne se déclenche jamais.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Et c'est tant mieux !
Mme Silvana Silvani. Ce montant s'élevait en effet à 2,21 milliards en 2023, à 2,31 milliards d'euros en 2024 et à 2,26 milliards d'euros en 2025. Nous proposons pour notre part d'abaisser ce seuil de déclenchement de 2,19 milliards d'euros – c'est le montant fixé pour 2026 – à 2,1 milliards d'euros, afin que le montant Z devienne un véritable outil de contrôle des dépenses liées aux dispositifs médicaux.
Mme la présidente. L'amendement n° 269 rectifié bis, présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 46
Remplacer le montant :
26,65 milliards d'euros
par le montant :
31,8 milliards d'euros
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... – Au VIII de l'article 29 de la loi n 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025, l'année : « 2026 » est remplacée par l'année : « 2027 » et l'année « 2027 » est remplacée par l'année : « 2028 ».
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Florence Lassarade.
Mme Florence Lassarade. La régulation économique du médicament a atteint une telle complexité qu'il est indispensable d'en remettre à plat le cadre et les modalités après que l'on a mené des concertations approfondies avec les acteurs concernés.
Dans ces conditions, il paraît plus opportun de reporter à nouveau l'évolution du mode de calcul de la clause de sauvegarde, afin de nous laisser le temps de la réflexion et de nous permettre de faire les meilleurs choix, au vu notamment de la situation internationale que la France ne peut ignorer, sous peine d'une accélération brutale de son déclin en termes d'attractivité, de souveraineté sanitaire et d'accès aux meilleurs soins pour les patients.
Cet amendement de notre collègue Alain Milon tend en outre à rehausser le montant M pour 2026, afin que cette contribution redevienne le filet de sécurité que le dispositif de l'article 10 envisageait initialement.
Mme la présidente. L'amendement n° 1501, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 46
Remplacer le montant :
26,65
par le montant :
25,65
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement, qui s'inscrit dans le droit fil de ma précédente intervention, vise à augmenter le montant de la contribution des industries pharmaceutiques à la sécurité sociale. Pour ce faire, il baisse de 1 milliard d'euros le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde.
L'objectif que nous visons avec cette nouvelle recette est d'envoyer un signal aux industriels. Il est temps de changer de modèle économique et de revenir à des prix plus justes, plus transparents et plus soutenables pour notre système de santé et pour l'accès aux soins de tous.
J'ajoute que je suis très inquiète de l'amendement du Gouvernement, lequel prévoit, à la dernière minute, sans nous laisser le temps d'en examiner le dispositif ou d'en débattre en commission, de plafonner le montant de la contribution due par chaque entreprise redevable. À mon sens, c'est un vrai problème. Sans compter que la décision de contenir le rendement de la clause de sauvegarde au montant de 1,6 milliard d'euros a pour effet de garantir un montant relativement faible par rapport aux profits des laboratoires pharmaceutiques qui, nous l'observons tous, continuent de croître.
Mme la présidente. L'amendement n° 1178, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 46
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.... – Le montant M mentionné à l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale est retranché du total des financements et aides publiques perçus au cours de l'année précédant la déclaration par l'entreprise assujettie.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. La question des aides publiques, de leur modulation, de la légitimité de leur maintien est intéressante, et même passionnante.
La commission d'enquête sénatoriale sur l'utilisation de ces aides, de composition transpartisane – plusieurs des membres de la commission sont présents dans cet hémicycle –, a par exemple auditionné plusieurs représentants de Sanofi, une entreprise qui a versé en dix ans près de 40 milliards d'euros de dividendes à ses actionnaires. On ne peut donc pas dire qu'elle soit en péril imminent…
Sanofi a par ailleurs bénéficié au total d'environ 1,1 milliard d'euros de crédit d'impôt recherche, et ce alors même qu'il s'agit dernier laboratoire au monde à avoir trouvé un vaccin contre le virus de la covid-19. Il y est parvenu après la moitié des laboratoires de la planète, et même après les Cubains qui subissent pourtant un blocus… J'ajoute que cette entreprise a supprimé 3 500 postes au bas mot, notamment dans le secteur de la recherche, et qu'elle est à l'origine de la vente de nombreux sites, dont celui qu'a évoqué mon collègue Pascal Savoldelli, mais aussi le site d'Amilly ou celui d'Opella, tous sites stratégiques.
À un moment donné, soit nous continuons de laisser faire et de n'assortir ces aides publiques d'aucune condition, en donnant de l'argent public à des entreprises qui versent des dividendes, pratiquent le rachat d'actions et licencient, soit nous nous décidons à agir, notamment dans un secteur concentrant des outils stratégiques tels que le médicament.
Nous vous proposons de nouveau – et nous continuerons de le faire – la création d'un pôle public du médicament. Mais si vous ne la voulez pas, conditionnons au moins les aides au maintien de l'outil industriel et de l'emploi en France. Il s'agirait déjà d'un pas énorme !
Mme la présidente. L'amendement n° 614, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 47, première phrase
1° Remplacer les mots :
1,75 % du chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise
par les mots :
2 % du montant remboursé par l'assurance maladie
2° Après les mots :
mêmes spécialités
insérer les mots :
qu'elle exploite, importe ou distribue
3° Compléter cette phrase par les mots :
dans sa rédaction résultant de l'article 28 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024
II. – Alinéa 51, dernière phrase
1° Remplacer les mots :
10 % de son chiffre d'affaires
par les mots :
12 % du montant remboursé par l'assurance maladie au titre des médicaments que cette entreprise exploite, importe ou distribue
2° Compléter cette phrase par les mots :
dans sa rédaction résultant de l'article 29 de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements restant en discussion commune.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement de la commission visait à plafonner la contribution due au titre des génériques dans le calcul de la clause de sauvegarde afin de protéger ces spécialités.
Toutefois, comme je l'ai déjà souligné, l'amendement n° 1861 du Gouvernement tend à exclure de la clause de sauvegarde les génériques et les spécialités de référence à tarif forfaitaire de responsabilité, c'est-à-dire à bas prix. C'est pourquoi je vous invite à voter prioritairement le dispositif gouvernemental.
J'en viens, mes chers collègues, à la position de la commission sur les amendements restant en discussion commune.
Vous l'avez compris, la commission est favorable à l'amendement n° 1861 du Gouvernement. Pour ce qui est du sous-amendement n° 1864, je demanderai l'avis du Gouvernement, car celui-ci tend à étendre les exclusions de l'assiette de la nouvelle contribution aux spécialités de référence dont le prix est inférieur à un seuil fixé par décret. Si le soutien aux spécialités matures est essentiel, il me semble, sur le fond, que ces spécialités sont déjà largement couvertes par le dispositif proposé par l'exécutif.
Le sous-amendement n° 1865 est, quant à lui, identique à un amendement pour lequel la commission avait émis un avis défavorable. Par cohérence, j'émettrai un avis défavorable sur ce second sous-amendement.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 514, parce qu'elle souhaite stabiliser les règles applicables dans le cadre de la réforme en profondeur que connaîtra la clause de sauvegarde l'année prochaine, laquelle sera calculée sur les montants remboursés et non sur le chiffre d'affaires des entreprises. Par souci de lisibilité, l'objectif est de conserver toutes les dépenses relatives aux produits de santé dans l'assiette de la clause de sauvegarde.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 251 rectifié, ainsi que sur l'amendement n° 196 rectifié, qui lui est presque identique, parce que le dispositif proposé, en prévoyant de faire reposer le calcul de la contribution prévue à l'article L. 245-6 du code de la sécurité sociale sur les montants remboursés et non plus sur le chiffre d'affaires, risque d'entraîner un report de charges vers les entreprises qui ne sont pas documentées. Le présent article 10 prévoit déjà une importante réforme en intégrant dans la contribution sur le chiffre d'affaires le rendement jusqu'ici issu de la clause de sauvegarde. Il est important de ne pas bouleverser tout l'environnement fiscal des entreprises – c'est une demande que les sociétés nous ont fait remonter.
La commission est aussi défavorable aux amendements nos 1176 et 1499, qui visent à augmenter le taux de base applicable à la contribution sur le chiffre d'affaires. Les laboratoires pharmaceutiques sont déjà mis à contribution dans le cadre de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. La réforme de la contribution sur le chiffre d'affaires vise à intégrer, en base et de façon pérenne, une recette qui, jusque-là, était issue de la clause de sauvegarde et se voulait exceptionnelle.
Par ailleurs, les objectifs de baisses des prix ambitieuses sont fixés au titre de 2026 pour un montant de 1,4 milliard d'euros. Dans un environnement international difficile – je pense aux signaux et informations qui nous parviennent des États-Unis –, il n'est pas opportun d'envoyer un tel message qui serait préjudiciable pour les investissements dans notre pays et nos entreprises.
L'amendement n° 1180 a pour objet de créer une nouvelle taxe sur la valorisation boursière des entreprises qui quittent la France. Je ne reprendrai pas l'argumentaire que je viens de développer pour les deux précédents amendements. J'ajouterai simplement que je m'interroge sur la faisabilité d'une telle mesure qui touchera les entreprises qui ne produisent plus sur notre territoire : avis défavorable.
La commission est également défavorable au sous-amendement n° 1814 rectifié. Même si nous n'avons pas pu l'examiner, la portée de ce dispositif excède manifestement la portée habituelle d'un sous-amendement ; je considère donc que nous aurions dû le déclarer irrecevable. La mesure proposée est d'ailleurs identique à celle qui figure à l'article 10 ter du présent texte.
Je rappelle que la contribution sur le chiffre d'affaires des entreprises doit garantir un rendement à hauteur de 1,6 milliard d'euros – c'est le niveau du rendement des contributions des entreprises pharmaceutiques jusqu'à présent. Dans une première mouture, l'article 10 prévoyait la mise en place d'une taxe. Nous avons souhaité que cette version soit corrigée et avons obtenu gain de cause, si je puis dire : une rédaction de compromis a été trouvée par le Gouvernement, avec l'accord du Leem. Le nouveau dispositif nous convient parfaitement, raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 160 rectifié.
Pour les mêmes raisons, elle sera également défavorable aux amendements nos 1296 et 1177.
Des amendements similaires aux amendements identiques nos 515 et 1411 rectifié bis ont déjà été débattus à l'Assemblée nationale. Si je souscris à l'objectif que visent leurs auteurs, celui de préserver la souveraineté de notre pays en matière de médicament, et même si j'estime qu'il est prioritaire d'assurer notre approvisionnement dans ce domaine, ces amendements risquent de manquer leur cible.
En effet, les critères retenus sont trop flous. Que signifie concrètement une « étape majeure », qui plus est lorsqu'elle peut être réalisée par un sous-traitant ? Par ailleurs, le terme de « remise » est utilisé : que signifie-t-il dans le cas présent ? S'agit-il d'une réduction de l'assiette ou du montant de la contribution ? Je pense qu'il est préférable de privilégier la négociation entreprise par entreprise pour arriver à mieux cibler celles d'entre elles qui devraient bénéficier d'aides ou d'un soutien à l'investissement dans notre pays.
Le Comité économique des produits de santé et le Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) accordent, par exemple, des avoirs sur remise – 160 millions d'euros en 2024 – permettant de s'acquitter de la contribution au titre de la clause de sauvegarde afin de soutenir la croissance des entreprises ayant opéré ou s'engageant à opérer des investissements en Europe et en France, de nature à maintenir ou à accroître les activités de recherche et de production.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 515 et 1411 rectifié bis.
L'amendement n° 252 rectifié, qui vise à mettre en place un taux différencié pour tenir compte des médicaments génériques est satisfait par l'amendement n° 1861 du Gouvernement, d'où un avis défavorable.
La commission est défavorable à l'amendement n° 1104 : les génériques étant déjà pris en compte, il n'est pas souhaitable de créer une nouvelle catégorie pour les spécialités hybrides.
Je présenterai un amendement similaire à l'amendement n° 745 rectifié, qui tend à prévoir une hausse du montant Z applicable aux dispositifs médicaux. Je demande donc le retrait de l'amendement n° 745 rectifié au profit de l'amendement n° 613, qui, comme je vous l'indiquais, sera par ailleurs rectifié.
L'amendement n° 1179 vise à diminuer le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde pour les dispositifs médicaux. S'il était adopté, la clause se déclencherait dans des proportions trop importantes pour les entreprises du secteur.
Pour ma part, je propose l'inverse. Les entreprises que je connais – cela vaut, me semble-t-il, pour l'ensemble du territoire – sont très souvent des PME ou TPE très innovantes. Elles patientent souvent longtemps avant que les dispositifs médicaux qu'elles proposent ne soient remboursés. Il leur est structurellement et financièrement difficile de concrétiser leurs innovations. Par conséquent, je souhaite au contraire les défendre.
En raison du dynamisme des dépenses de dispositifs médicaux, les rendements attendus de la clause de sauvegarde pour 2025 se situeront entre 100 millions d'euros et 150 millions d'euros.
La clause se déclenche bien cette année, contrairement à ce qui a été dit, mais je ne souhaite pas que ce soit le cas de nouveau en 2026. Comme me le disait d'ailleurs le représentant d'une TPE, une hanche ne se remplace qu'une fois. (Sourires.) Il peut y avoir des rejets, mais on imagine mal un usage à répétition de dispositifs médicaux : le besoin se manifeste à un moment donné, mais ensuite nul besoin de remplacement, comme cela semble suggéré.
Au contraire, la commission a souhaité relever le montant Z afin d'éviter que la contribution des entreprises ne soit trop importante. Le secteur des dispositifs médicaux est innovant et fait vivre nos territoires, nous devons donc le privilégier. Fragiliser davantage notre tissu industriel local n'est pas pertinent.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 1179.
L'amendement n° 269 rectifié bis vise à relever le montant M sur la base de la trajectoire récente du chiffre d'affaires du secteur du médicament. Or, dans le cadre de la réforme de la clause de sauvegarde, le montant M pour 2026 sera basé sur les montants remboursés. Il n'est donc pas pertinent de relever ledit montant à un tel niveau : avis défavorable.
Je demande le retrait de l'amendement n° 1501 : les entreprises du secteur sont déjà largement mises à contribution dans le PLFSS au travers de la nouvelle contribution et d'importantes baisses de prix.
Je rappelle qu'à l'article 13, nous leur demandons des acomptes pour deux années, ce qui me semble constituer des contributions importantes. Nous ne pouvons pas aller plus loin, sauf à les inciter à quitter le territoire. C'est donc une demande de retrait ; à défaut, l'avis sera défavorable.
La commission est défavorable à l'amendement n° 1178, qui tend à prévoir une modulation du montant M en fonction des aides publiques perçues par les entreprises pharmaceutiques.
L'absence de définition transversale des aides publiques, justement relevée par le rapport de notre collègue Fabien Gay qui s'est exprimé sur le sujet, rend cette disposition extrêmement complexe, voire inapplicable. (Mme Émilienne Poumirol s'exclame.)
Par ailleurs, cette disposition mélange un montant M collectif et des aides publiques attribuées individuellement à chaque entreprise. Il y a donc un problème d'articulation.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. J'émettrai un avis défavorable sur tous les amendements et sous-amendements en discussion commune, hormis l'amendement n° 1861 du Gouvernement. (Marques d'ironie sur les travées des groupes SER et GEST.)
Le sous-amendement n° 1864 entraînerait, s'il était adopté, une complexité technique qui irait à l'encontre de notre objectif de simplification.
Les autres propositions touchent à des sujets de fond, à commencer par le faible niveau du prix des médicaments, lui-même lié à un enjeu majeur de souveraineté qui doit nous rassembler.
Mme la sénatrice Lassarade a cité le laboratoire UPSA. Ce dernier souhaite apposer sur ses boîtes de médicaments un logo « Fabriqué en France ». Nous soutenons cette proposition parallèlement au PLFSS et travaillons sur le sujet.
En ce qui concerne les prix, vous savez que le CEPS dispose de deux leviers pour agir sur la baisse des prix : il peut proposer au laboratoire soit un bonus, soit un avoir sur investissement qui restreint l'application de la clause de sauvegarde. (Mme Émilienne Poumirol s'exclame.)
Cette faculté, censée favoriser le made in France, est déjà prévue par la loi, puisque nous l'avons votée dans un précédent PLFSS. Toutefois, elle n'est pas appliquée de manière systématique. C'est pourquoi nous proposons que ce soit le cas.
Je rappelle également que, grâce aux financements de France 2030 à hauteur de 300 millions d'euros, une quarantaine de médicaments ont été relocalisés en France dans le cadre du plan de relocalisation de la production de produits de santé, annoncé en 2023 par le Président de la République.
Je veux évoquer aussi la relocalisation, dans l'Isère, de la fabrication du princeps du paracétamol, dans le cadre du projet Seqens.
Enfin, toujours sur ce thème de la souveraineté, nous travaillons surtout à l'échelon européen dans le cadre du Critical Medicines Act. Les projets avancent.
J'en viens à la question des pénuries de médicaments, qui a fait également l'objet d'amendements. Si nous devons continuer le combat, les pénuries se font plus rares depuis quelques années. Les nombreuses mesures législatives votées par les deux chambres du Parlement semblent porter leurs fruits. Alors que les pénuries sont plus facilement signalées, leur nombre a ainsi baissé de 22 % entre 2023 et 2024. C'est un résultat significatif, ne relâchons pas nos efforts.
Par ailleurs, une feuille de route est en cours d'élaboration. Elle aura pour objet d'améliorer la détection et la prévention des pénuries. Sur le long terme, le travail de relocalisation de la fabrication des médicaments contribue à ces efforts.
La question a été soulevée d'un pôle public du médicament et il est important d'y répondre. En la matière, le Gouvernement souhaite travailler sur l'articulation entre le public et le privé.
Dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, nous avions d'ailleurs voté le « Florange » du médicament. En cas de départ d'un fabricant, cette mesure oblige l'investisseur à trouver un repreneur à l'autorisation de mise sur le marché (AMM).
Mme Cathy Apourceau-Poly. C'est en théorie ce qui devrait se passer…
Mme Stéphanie Rist, ministre. Si l'investisseur n'y parvient pas, la mesure permet à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) de demander la concession de la licence pour que le secteur public reprenne l'autorisation. Ce dispositif est en cours de mise en place.
Plusieurs amendements ont pour objet d'augmenter la contribution du secteur pharmaceutique. Je rappelle que celle-ci s'élève à 1,6 milliard d'euros pour 2026 et qu'elle s'ajoute à une baisse de prix d'un montant équivalent.
Certains amendements visent à relever le montant Z applicable aux dispositifs médicaux, d'autres à le baisser. En cherchant un juste milieu, nous devrions approcher de la vérité. Quel que soit le montant fixé, il y aura un effet direct sur le financement.
Enfin, la nouvelle formulation que nous proposons de retenir redonne à la clause de sauvegarde son sens originel : celui d'un filet de sécurité qui n'a pas vocation à être déclenché.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. À l'évidence, le compromis qui a été trouvé entre le Gouvernement et la majorité sénatoriale sur l'amendement n° 1861 satisfait entièrement nos collègues : la plupart d'entre eux ont retiré leur amendement, ce qui complique quelque peu l'examen du texte.
Il est regrettable que ce compromis ait été trouvé en catimini et, je n'en doute pas, en accord avec le Leem et le Snitem.
Mme Raymonde Poncet Monge. Absolument !
Mme Émilienne Poumirol. Pour les usagers, en revanche, la transparence aura été comme d'habitude inexistante.
En définitive, à qui donc profite ce compromis ? À la sécurité sociale et à sa branche assurance maladie ? Je ne le pense pas : le montant de la contribution, 1,6 milliard d'euros, reste inchangé.
En revanche, le bénéfice sera pour l'industrie pharmaceutique : vous avez en effet répondu aux demandes du Leem et du Snitem en déplaçant certaines échéances au mois de janvier de l'année prochaine, afin d'éviter un double paiement la même année. Nous connaissons bien les demandes habituelles de ces deux entités !
Or, comme cela a été dit à maintes reprises, les bénéfices des Big Pharma n'ont fait qu'exploser ces dernières années.
Il a beaucoup été question, entre autres, de Sanofi. Je me souviens d'une réunion, en 2021, au cours de laquelle le directeur de Sanofi France nous avait expliqué allègrement qu'il distribuait 4 milliards d'euros de dividendes aux actionnaires du groupe, mais que, dans le même temps, l'activité de 700 chercheurs à Strasbourg ne l'intéressait plus, la recherche en chimie n'étant pas rentable. Mieux valait acheter de petites biotech, le retour sur investissement étant plus rapide. Vous le savez bien, la recherche en thérapie génique est beaucoup plus intéressante.
Ce compromis a donc émergé au seul bénéfice de l'industrie pharmaceutique. Heureusement, vous avez tout de même préservé les génériques. Mais il faut aussi se préoccuper des médicaments matures. (Marques d'impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Émilienne Poumirol. L'effort n'est donc pas du tout équitablement réparti.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour explication de vote.
Mme Corinne Imbert. Il est vrai que l'exercice auquel nous nous livrons ne facilite pas la lecture…
Mme Raymonde Poncet Monge. C'est peu de le dire !
Mme Corinne Imbert. Je vous remercie tout de même, madame la ministre, du travail de recherche de compromis que vous avez mené avec l'industrie pharmaceutique.
J'en profite pour appeler votre attention sur la situation des industries de santé françaises, qui fabriquent en France et qui sont à ce titre – cela a été évoqué à plusieurs reprises et chacun en a conscience – un pilier de notre souveraineté sanitaire.
Le Premier ministre en a même fait mention dans la lettre de mission qu'il a adressée à la nouvelle présidente du Ceps il y a quelques mois.
Dans le même temps, les entreprises du médicament contribuent de façon importante à la réduction des dépenses de la sécurité sociale. (Mme Émilienne Poumirol s'exclame.) Baisses de prix, clause de sauvegarde, remises conventionnelles et désormais une nouvelle contribution : nous ne pouvons nier cette contribution, reconnaissez-le.
Privilégier la production française au travers d'un abattement sur la clause de sauvegarde ou sur la contribution supplémentaire de ces entreprises n'a rien de scandaleux.
Nous connaissons la qualité et la sécurité de leur production. Ce lundi 17 novembre s'est tenu le sommet Choose France – Édition France, dont l'objectif est d'encourager les entreprises qui investissent dans notre pays. Par cohérence avec cet événement, nous avons la possibilité, madame la ministre, de soutenir les entreprises françaises de santé, en proposant une décote sur la nouvelle taxe.
Aussi, je soutiendrai les sous-amendements présentés par mon collègue Michel Masset et voterai votre amendement n° 1861, sous-amendé.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour explication de vote.
M. Jean-François Rapin. Il est vrai que le débat n'est pas facile à suivre.
En écho des propos de l'excellent sénateur Olivier Henno sur la dimension européenne, j'aimerais revenir en particulier sur l'amendement n° 160 de M. Piednoir, qui concerne les stocks stratégiques.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, considérant qu'il était satisfait par celui du Gouvernement.
Or j'ai bien relu l'amendement n° 1861 et je n'y vois aucune mention des stocks stratégiques européens, qui sont pourtant essentiels. (Mme Cathy Apourceau-Poly acquiesce.)
Je me tourne vers les rapporteurs de la commission qui ont travaillé sur cette question : il faut absolument que de tels éléments, qu'ils soient médicaux, paramédicaux ou autres, soient exclus de la clause de sauvegarde.
J'aimerais en avoir confirmation, auquel cas je voterai non pas l'amendement de M. Piednoir, mais, à l'instar de Corinne Imbert, l'amendement du Gouvernement, sous-amendé.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. C'est bien le cas.
Mme la présidente. La parole est à M. Khalifé Khalifé, pour explication de vote.
M. Khalifé Khalifé. Beaucoup de choses ont été dites et je salue les efforts en faveur de l'industrie française et européenne.
N'oublions pas que les entreprises étrangères ont aussi fait des efforts importants – Corinne Imbert l'a rappelé et nous venons de le voir au travers de l'amendement du Gouvernement – pour maintenir au plus bas les prix des médicaments innovants que nous trouvons en France. Il est important de le souligner.
Je tiens à vous alerter, mes chers collègues : la baisse du niveau de la recherche clinique en France, un domaine qui était naguère à l'apogée, devient préoccupante, notamment en ce qui concerne l'accès aux médicaments nouveaux.
Madame la ministre, il est important de travailler sur ce sujet pour encourager les équipes françaises, mais aussi pour inciter les laboratoires étrangers à investir dans la recherche clinique en France.
Je sais, par expérience, que beaucoup de représentants de laboratoires étrangers en France se battent avec leur maison mère pour installer un ou deux centres de recherche, parfois plus, en France.
La France intéresse moins que l'Allemagne et, surtout, moins que le pays émergent de l'Europe en matière de recherche clinique, à savoir l'Espagne.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je soutiens l'amendement n° 1180.
Il ne s'agit pas d'un problème de souveraineté : les entreprises visées au travers de cet amendement sont celles qui quittent le territoire national.
Notre débat du jour est assez classique. On y retrouve des figures imposées – dividendes, retraites chapeaux, licenciements, aides publiques – avec les problèmes de contrôle et d'adéquation induits.
Il y a tout de même un certain bon sens à vouloir taxer des entreprises qui quittent le territoire. L'idée est non pas de défendre notre souveraineté en les empêchant de partir, mais de taxer davantage des entreprises qui ont choisi de quitter notre pays.
Compte tenu du contexte général, il est hautement probable que les entreprises en question ont déjà reçu des aides publiques. Nous avons vécu ces situations des dizaines et des dizaines de fois : on touche des aides publiques, on promet de ne pas licencier et, in fine, on délocalise et on licencie ! (Mme Cathy Apourceau-Poly acquiesce.)
Une grande confiance n'excluant pas une petite méfiance, je voterai l'amendement n° 1180.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Ce débat, certes complexe, est de la plus haute importance.
J'y vois au moins trois enjeux : un enjeu sanitaire, un enjeu de souveraineté et un enjeu d'accès à l'innovation et de développement de celle-ci dans notre pays. Nous devons appréhender tous ces aspects.
Peut-être avons-nous trop longtemps considéré la question – c'est le cas également en matière de concurrence européenne – sous le seul angle du prix le plus bas. Résultat, l'industrie pharmaceutique française, voire européenne, est aujourd'hui en difficulté.
Le Gouvernement semble être dans cet état d'esprit. Je l'encourage à l'y être plus encore et à regarder les choses non seulement au prisme de notre souveraineté industrielle et de notre capacité à développer l'industrie pharmaceutique, mais aussi à celui de l'innovation.
Face à la Chine et aux États-Unis, il nous faudra en effet faire émerger des géants européens si nous voulons être au sommet de l'innovation.
Enfin, le pôle public du médicament ne me semble pas être la bonne réponse.
Mme Émilienne Poumirol. Ah bon ?
M. Olivier Henno. Pardonnez-moi, mes chers collègues, mais cela fleure bon « mai 1981 ». (Sourires.)
En revanche, nous devons nous poser la question du conditionnement des aides. C'est un enjeu de souveraineté à la fois européenne et nationale.
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Certains de mes collègues parlent de compromis pour qualifier l'amendement du Gouvernement. Il s'agit plus précisément d'un compromis avec les grands groupes pharmaceutiques. Citez-moi les TPE ou les PME qui y ont été associées ?
Prenons l'exemple du site Sanofi de Maisons-Alfort : il a été vendu non pas à un groupement de PME ou d'ETI françaises, mais à un grand investisseur allemand. C'est donc de compromis et de promesses de vente qu'il retourne.
Par ailleurs, j'entends des propos qui me scandalisent. Franchement, même vous, madame la rapporteure générale, et vous, madame la ministre, vous évoquez l'environnement international… J'ai sous les yeux une note de Stifel, banque d'investissement basée à Saint-Louis, aux États-Unis. Que nous dit-elle ? Que Sanofi va racheter 5 milliards d'euros de ses propres actions qui seront ensuite annulées.
Allez expliquer cela aux Françaises et aux Français : 5 milliards d'euros rachetés puis détruits, simplement pour être mis au rebond de son bénéfice !
Mme Raymonde Poncet Monge. Et voilà !
M. Pascal Savoldelli. La banque américaine Stifel nous annonce encore un impact positif de 3 à 4 points. Et vous vous contentez d'un rendement de 1,6 milliard d'euros ? Quelle insolence !
Sanofi bénéficie de 100 millions d'euros de crédit d'impôt. Dans mon département, le Val-de-Marne, le groupe annonce la suppression de 330 emplois en recherche et développement, dont 288 sur le site de Vitry.
Comme l'a rappelé Fabien Gay, Sanofi, c'est 3 000 emplois supprimés sur 17 000 . On voudrait mettre le feu à la France sociale que l'on ne s'y prendrait pas autrement !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Bien sûr. Ils vont tous partir !
M. Pascal Savoldelli. Je vous le dis franchement, vous allez mettre le feu et provoquer un désordre social !
Pour couronner le tout, on nous sort du chapeau un amendement dont l'adoption en rendra de nombreux autres ssans objet. Et l'on prétend rendre la parole au Parlement, pour le laisser décider ? Merci ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et SER. – Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Il y a un problème démocratique : on ne peut pas nous demander de voter sur un amendement sans même qu'une commission ne réexamine la structuration de la clause de sauvegarde, qui est l'un des dispositifs les plus techniques et les plus compliqués qui soient.
Vous ne pouvez pas, madame la ministre, mes chers collègues, avoir pour seul interlocuteur – vous le reconnaissez pourtant – le Leem, c'est-à-dire l'industrie pharmaceutique, quand nous n'avons pas été convoqués à la moindre réunion !
Dans ces conditions, on ne peut pas parler de démocratie ; ou alors il s'agit d'autre chose, qui sort du cadre de la République.
Sur le fond, le point positif est le maintien du montant de la contribution à 1,6 milliard d'euros, que certains amendements tendaient à remettre en cause. Il est tout de même inquiétant de constater que cette contribution tend à diminuer d'année en année, alors que les bénéfices, eux, se portent très bien, que ce soit en France ou à l'étranger.
Vous parlez de sauvegarder l'innovation. Mais qui paie l'innovation, sinon le secteur public ? (M. le vice-président de la commission des affaires sociales le conteste.) Alors que c'est la recherche publique qui finance l'innovation, nous devrions soutenir le secteur privé pour l'inciter à faire de même ? Eh bien non, le secteur pharmaceutique doit contribuer.
Enfin, je m'interroge sur la défense de la souveraineté nationale, en faveur de laquelle on prétend agir.
Cela a été dit, l'industrie pharmaceutique supprime des emplois en France en permanence. Et même quand les industries fabriquent des médicaments sur le territoire, les molécules continuent d'être produites en Chine ou ailleurs. Le problème reste donc entier.
Peu m'importe de savoir si l'idée d'un pôle public du médicament soit pré ou post-1981. Elle pourrait même remonter à la Commune de Paris, l'essentiel est de se demander comment agir. Or ce n'est pas grâce à cet amendement que nous pourrons résister.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il a été question de procédés non démocratiques. Celui qui vient d'être utilisé en est un exemple évident : vous avez conclu un compromis – vous avez eu l'honnêteté de le reconnaître, madame la rapporteure générale – avec le Leem, c'est-à-dire avec l'industrie pharmaceutique.
Pour ce faire, vous avez repris des amendements issus de la majorité sénatoriale et vous les avez intégrés à votre texte, si bien qu'une dizaine d'amendements ne seront ni défendus, ni discutés, ni votés. (Mme Cathy Apourceau-Poly acquiesce.) Vous êtes donc parvenus entre vous à un compromis dont vous nous présentez maintenant le résultat.
Quant à nous, nous disposons de deux minutes pour expliquer notre vote. C'est mépriser notre travail. Contrairement à vous, nous n'avons pas pléthore d'administrateurs pour nous aider. Nous avions travaillé sur des amendements que jamais nous ne discuterons.
Le Gouvernement avait annoncé une nouvelle méthode : « Nous présentons, on discute, vous votez ». Force est de constater que ce qui est appliqué est aux antipodes de vos promesses !
Pour avoir étudié pendant quelque temps les pratiques de Sanofi, je rejoins tout à fait mes collègues. Cette entreprise a coutume de licencier ses propres équipes de recherche et développement pour ensuite acheter des PME en pointe dans le secteur de l'innovation.
C'est formidable : Sanofi bénéficie du crédit d'impôt recherche, mais elle en fait très peu, préférant s'appuyer sur la recherche fondamentale de l'État.
En conclusion, j'y insiste, vous méprisez le travail de nos collaborateurs qui travaillent depuis dix jours, qui ont étudié tous les amendements et qui ont préparé les arguments pour le débat. Voilà que soudain, il ne reste plus qu'un seul amendement en discussion et deux minutes pour expliquer notre vote. Je vous remercie pour ces deux minutes, je vous remercie pour ce moment !
Mme la présidente. La parole est à M. le vice-président de la commission.
M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, j'ai bien écouté vos interventions. Qu'un amendement du Gouvernement arrive au dernier moment, comme un grain de sable, est extrêmement fréquent.
Tous les gouvernements que j'ai connus jusqu'à présent, qu'ils soient de droite ou de gauche, ont agi de la sorte. Quand le gouvernement est à gauche, c'est la droite qui proteste, et vice-versa. Il s'agit donc d'une pratique courante, cessons de nous plaindre.
Je vous informe par ailleurs que nous nous réunirons dans quelques minutes pour examiner un amendement du Gouvernement plus important encore que l'amendement n° 1861. Je ne vous en dis pas plus pour le moment.
L'amendement n° 1861, tout de même important, vise à corriger le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale, qui était, comment dire…
Mme Raymonde Poncet Monge. Ni fait, ni à faire !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Magnifique !
M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Disons qu'il entraînait beaucoup d'incertitudes pour l'industrie pharmaceutique française et internationale, pour les professionnels de santé et pour l'ensemble du secteur de la santé.
Dans mon propos liminaire, lors de la discussion générale, j'ai indiqué que 31 % des médicaments innovants en Chine sont fabriqués sur place. Les autorités chinoises et les industriels pharmaceutiques ont investi 330 milliards de dollars, en cinq ans, dans le pays. Aux États-Unis, l'application de la méthode Trump – dont chacun est libre de penser ce qu'il veut, et je pense la même chose que vous sur l'individu – a entraîné l'annonce de 550 milliards de dollars de promesses d'investissement dans l'industrie pharmaceutique.
Voilà des éléments de réflexion, si nous voulons aider l'industrie pharmaceutique en France.
Si je dois prendre des médicaments innovants, je préfère qu'ils soient européens ou français, plutôt que chinois. Pour cela, nous devons faire le nécessaire pour aider l'entreprise pharmaceutique internationale.
L'amendement présenté par Mme la ministre, en outre, ne pénalise pas, comme l'a dit Corinne Imbert, l'industrie pharmaceutique française locale, territoriale, qui produit des médicaments courants, génériques, biosimilaires ou autres.
Certes, l'amendement a été déposé de manière tardive, mais il vise à corriger toutes les erreurs du texte initial que j'ai trouvées, comme certains de mes collègues.
Je vous demande donc, mes chers collègues, de le voter, en sachant que nous aurons encore l'occasion d'en discuter de nouveau plus tard, lorsque nous examinerons les dispositions relatives à l'accès précoce, qui constitue un sujet extrêmement important.
En ce qui me concerne, je souhaite que les patients français atteints de maladies graves puissent avoir accès librement à tous les médicaments, y compris à certains médicaments innovants qui, en effet, coûtent une fortune. S'ils coûtent une fortune, c'est parce que la recherche coûte elle aussi une fortune et qu'il faut, par ailleurs, permettre à l'industrie pharmaceutique de trouver d'autres médicaments, qui constitueront de nouvelles avancées pour faciliter la guérison de nos patients. Voilà ce que je souhaite.
Évidemment, cela peut ne pas plaire à certains. En attendant, cet amendement, tel qu'il est présenté par Mme la ministre, correspond à ce que j'ai proposé dans mes propres amendements.
S'il est adopté, cet amendement permettra aux professionnels de santé de trouver les médicaments qu'il leur faut pour soigner leurs patients, aux patients de trouver les médicaments nécessaires à leur guérison. Quant à l'industrie pharmaceutique, elle pourra continuer de mener ses recherches – c'est important. (Mme Cathy Apourceau-Poly proteste.)
En conclusion, je ne connais pas un seul pays au monde, sauf peut-être les États-Unis et la Chine, qui soit capable d'investir 500 milliards de dollars en cinq ans.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je tiens d'abord à vous dire, chère collègue, que nous n'avons pas fait travailler vos collaborateurs pour rien !
Nous avons expliqué, dans notre rapport, pourquoi nous n'acceptions pas la première version du texte. À l'issue d'un travail important, tous les points d'achoppement ont été levés. Ce travail n'avait pas pu aboutir auparavant avec les industriels, mais aussi parce qu'un certain nombre de points ne nous convenaient pas.
Il est vrai, j'en conviens, que cet amendement a été présenté très tard. Cependant, tous les autres amendements, qu'ils émanent de la majorité ou de l'opposition, avaient été déposés avant. Par conséquent, les avis de la commission, qu'ils soient favorables ou défavorables, ont également été émis avant. Certains d'entre vous ont donc retiré leurs amendements, je les en remercie. Toutefois, ce travail n'est pas perdu.
Chaque année, les débats sur la clause de sauvegarde sont compliqués, nous en convenons tous. L'important est d'essayer d'adopter un dispositif lisible, notamment pour les industriels. De grâce, n'allez pas imaginer que nous faisons cela pour que les industriels puissent en profiter au maximum : en plus de la clause de sauvegarde, ils consentent des remises et des abattements très importants. (M. Pascal Savoldelli proteste.)
Regardez dans le rapport la courbe retraçant l'évolution du produit de la clause de sauvegarde. (Mme la rapporteure générale brandit un graphique.) Elle est importante. Ce n'est pas un hasard si celui-ci atteint 1,6 milliard d'euros : le montant M est un instrument de régulation. Il est calculé, je le rappelle, en fonction du chiffre d'affaires du secteur de l'industrie pharmaceutique, après déduction des remises et des abattements. Je n'accepterai donc pas les faux procès.
Je suis d'accord avec le président Milon. Souhaitons-nous être soignés par des médicaments français et européens ? Bien sûr que oui ! Il ne faut pas que les laboratoires pharmaceutiques partent tous à l'étranger, à l'heure où Donald Trump indique qu'il veut faire baisser le prix des médicaments et rapatrier aux États-Unis l'innovation, la fabrication et tout le reste.
Il faut savoir ce que nous voulons. Attention à ne pas reproduire ce qui se passe avec Shein actuellement. La logique est exactement la même. Je constate par ailleurs que, malheureusement, les prothèses dentaires sont importées de Chine. À force de ne rien faire dans certains domaines, on subit. On a beau se demander ensuite ce que l'on peut faire pour s'y opposer, il est alors trop tard. (Protestations sur les travées du groupe CRCE-K.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous ne parlons pas des prothésistes dentaires !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je veux dire que tout vient de Chine...
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Vous déplorez, et je le comprends, que cet amendement ait été déposé un peu tardivement. Nous aurions aimé aller plus vite, mais nous avons cherché à élaborer un dispositif technique susceptible de constituer un compromis. Il nous a également fallu tenir compte des amendements qui avaient été déposés à l'Assemblée nationale, notamment par le rapporteur général, ainsi que de ceux qui ont été adoptés ici en commission.
Je ne voudrais pas que l'on croie que cet amendement vise à diminuer l'effort demandé à l'industrie pharmaceutique. Cela a été dit, le taux de contribution demandé à l'industrie pharmaceutique est plus élevé que jamais – il s'élève à 1,6 milliard d'euros –, et la baisse de tarifs que nous lui demandons, de 1,6 milliard d'euros supplémentaires, est également importante.
Madame Poumirol, le décalage que vous avez évoqué s'explique par le fait qu'il n'était pas prévu d'appliquer la réforme dès cette année. En 2025, c'est l'ancienne version du calcul de la clause de sauvegarde qui reste utilisé. L'amendement vise simplement à reporter d'un an l'application de la nouvelle méthode de calcul, qui, je l'espère, sera plus simple.
Chaque année, en effet, de nombreux amendements de réécriture de cet article sur le médicament sont déposés chaque année. L'enjeu est de pouvoir fixer une contribution annuelle plus lisible pour l'industrie pharmaceutique, mais aussi dans les comptes publics.
Mme Imbert a évoqué le sommet Choose France. Au début de la semaine, j'ai rencontré les industriels français du médicament. Nous avons évoqué plusieurs pistes pour favoriser les relocalisations, telles que, notamment, la baisse de prix par le Comité économique des produits de santé (CEPS) : celui-ci pourrait prendre en compte de manière plus systématique le critère de la localisation dans ses décisions ; il y a là un levier d'action.
Je reviendrai à présent sur le plan France 2030, dont un volet concerne les médicaments et l'innovation. Au total, 7,5 milliards d'euros ont été investis pour renforcer notre souveraineté en la matière. Je l'ai dit, la production d'une quarantaine de médicaments a d'ores et déjà été relocalisée, tout comme celle de bioproductions, pour 800 millions d'euros. Il s'agit de médicaments innovants. La production en France a permis de créer ou de conforter 13 000 emplois dans ce secteur industriel.
Je n'avais pas répondu à la question qui m'a été posée sur les stocks stratégiques. Sur ce sujet, nous travaillons à l'échelon européen. La France défend ainsi très fortement l'instauration de la préférence européenne dans les achats publics de médicaments, dans le cadre du Critical Medicines Act. Celle-ci constitue, selon nous, un levier puissant pour améliorer la situation.
Ensuite, faut-il taxer les entreprises qui partent à l'étranger ? C'est un débat récurrent. Le risque est grand que les entreprises hésitent à s'installer, de peur d'être taxées, le cas échéant, si elles décidaient de partir. En outre, je crains que nous n'assistions à un mouvement massif de départs avant la publication des décrets. Le débat est ouvert. Je comprends que les avis divergent sur ce sujet.
La production européenne de recherche clinique diminue. Cependant, les chiffres dont je dispose sont antérieurs aux mesures, assez lourdes, de l'administration Trump pour soutenir la recherche aux États-Unis. Nous verrons ce qu'il en est, mais il y a là un axe d'amélioration.
En revanche, en 2024, la France restait le leader européen en nombre d'essais cliniques réalisés, si l'on prend en compte les secteurs académique et industriel, devant l'Espagne. On a recensé ainsi 2 062 essais en France, contre 1 277 en Espagne. Toutefois, l'enjeu est d'améliorer notre rang dans la recherche au niveau mondial.
Les stocks stratégiques ont été réintégrés au sein de la clause de sauvegarde dans la loi de financement de la sécurité sociale en 2023. Pour respecter une forme d'équité, nous ne les sortons pas de ce dispositif, car il convient d'éviter les effets de report vers les autres acteurs.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1864.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1865.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1861.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 39 :
| Nombre de votants | 341 |
| Nombre de suffrages exprimés | 327 |
| Pour l'adoption | 229 |
| Contre | 98 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'amendement n° 611 n'a plus d'objet, non plus que le sous-amendement n° 1814 rectifié.
De même, les amendements nos 1296 rectifié, 1177, 252 rectifié, 1104 et 614 n'ont plus d'objet.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 514.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 251 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 196.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1176.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1499.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1180.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 160 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1411 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Madame Guidez, l'amendement n° 745 rectifié est-il maintenu ?
Mme Jocelyne Guidez. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 745 rectifié est retiré.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous avons adopté l'amendement du Gouvernement. Conformément à ce que je vous ai indiqué précédemment, je souhaite rectifier mon amendement n° 613, afin de modifier le montant Z, tout en évitant que l'adoption de cet amendement ne se traduise par un doublement de la contribution des entreprises du médicament. Il s'agit concrètement de supprimer le II et le III.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d'un amendement n° 613 rectifié, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, et ainsi libellé :
I. – Alinéa 45
Remplacer le montant :
2,19
par le montant :
2,29
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement rectifié ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Il demeure défavorable, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 613 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 1179 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 269 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1501.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1178.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 925 rectifié bis, présenté par Mmes Gruny, Petrus et Dumont, MM. H. Leroy et Burgoa, Mmes Puissat, Canayer et Belrhiti, MM. Milon, Lefèvre, J.P. Vogel et Cambon, Mme V. Boyer, MM. Somon, Brisson et Saury, Mmes Lassarade et Malet, MM. Sido, Panunzi et Gueret, Mme Aeschlimann et M. Genet, est ainsi libellé :
I. – Après l'alinéa 8
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...) Après le premier alinéa du III, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Les spécialités de référence au sens de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et les spécialités autorisées sur la base d'un usage médical bien établi, au sens de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001, dont le principe actif n'est plus breveté ; »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. Cet amendement est analogue à l'amendement n° 1104, qui a été défendu par Mme Poumirol.
Nous proposons que les médicaments matures soient exclus de l'assiette de la contribution de base sur le chiffre d'affaires, comme c'est déjà le cas pour les médicaments génériques.
Madame la ministre, je ne comprends pas, en effet, pourquoi les médicaments matures ne sont pas exonérés. Ils font partie, pour 80 % d'entre eux, des médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM).
C'est un sujet qui nous intéresse au Sénat. Une commission d'enquête sur la pénurie de médicaments et les choix de l'industrie pharmaceutique française a ainsi été menée. Au sein de la commission des affaires européennes, avec Bernard Jomier et Cathy Apourceau-Poly, nous avons voté pour préserver la souveraineté nationale et européenne en la matière.
On s'apprête pourtant à taxer davantage ces entreprises – il ne s'agit pas d'ailleurs, nécessairement, de grandes entreprises. Les médicaments matures sont vendus à des prix très faibles, mais ils sont, en revanche, je le répète, d'un intérêt thérapeutique majeur pour les patients.
Je maintiens donc cet amendement. Si vous refusez de le soutenir, madame la ministre, il faudra nous donner des explications. Pourquoi ces médicaments ne bénéficieraient-ils pas de l'exonération ?
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je reconnais, chère collègue, que nous avons besoin de précisions sur cette question.
Cet amendement vise à exclure de l'assiette de la contribution sur le chiffre d'affaires les spécialités de référence et à usage médical bien établi, dont le principe actif n'est plus breveté.
Le dispositif de l'amendement comporte la notion d'« usage médical bien établi », qui correspond au régime d'autorisation principalement applicable aux spécialités à base de plantes. Ces médicaments répondent à des règles bien spécifiques d'autorisation de mise sur le marché (AMM), pour lesquelles il ne me semble pas pertinent de prévoir, à ce stade, des régimes dérogatoires.
L'amendement du Gouvernement, que nous venons d'adopter, tend déjà à exclure de l'assiette de la nouvelle contribution supplémentaire les médicaments génériques et les spécialités de référence dites matures.
Il est vrai que, comme l'article 10 vient d'être remanié, le dispositif est assez touffu. Il convenait de préciser certains points très clairement.
En tout cas, après l'adoption de l'amendement du Gouvernement, les médicaments génériques et les spécialités de référence dites matures sont exclus, je le répète, de l'assiette de la nouvelle contribution.
Je vous invite donc à retirer votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je comprends l'enjeu que vous soulevez, madame la sénatrice.
Je tiens à rappeler que la contribution est très faible, puisque son taux s'élève à 0,2 %.
Néanmoins, la prise en compte du critère que vous évoquez est très délicate, car il est lié, par exemple, à la perte des brevets, ce qui soulève plusieurs difficultés. Les régimes de protection intellectuelle sont, comme vous le savez, complexes, évolutifs, et les administrations ne disposent pas toujours des informations relatives à l'expiration des brevets.
L'objet de la réforme que nous vous avons soumise à l'article 10 est de renforcer la lisibilité, la simplicité et la transparence.
Pour l'ensemble de ces raisons, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Madame Gruny, l'amendement n° 925 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Pascale Gruny. Pour l'instant, je le maintiens, madame la présidente. J'invite d'ailleurs mes collègues à interroger également Mme la ministre sur ce point, s'ils le souhaitent.
Vous parlez de lisibilité et de transparence. C'est absolument nécessaire, nous sommes tout à fait d'accord ! Mais, en l'occurrence, il faut avouer qu'il est très difficile de comprendre votre amendement… Je ne suis pas médecin et, je vous le dis franchement, votre amendement, qui porte sur des sujets particulièrement complexes, était trop compliqué. Je ne sais d'ailleurs pas, mes chers collègues, comment nous ferons pour répondre à des questions si nous sommes interrogés sur ce point à l'issue de la séance.
Je veux être certaine que le dispositif que vous proposez répond bien aux problèmes des pénuries, du coût des médicaments, et que les médicaments importants pour nos patients resteront disponibles.
Vous nous demandez de vous faire confiance, mais nous avons tellement été échaudés par le passé que ce n'est pas facile…
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. J'irai dans le sens des propos de ma collègue. Nous plaidons, en effet, depuis des années, pour l'exclusion des génériques et des médicaments matures, médicaments dont le prix est très bas. Ce n'est pas eux qu'il faut viser si l'on souhaite agir sur le niveau des prix des médicaments.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
Mme Émilienne Poumirol. Qu'une boîte de paracétamol soit vendue à 2,10 euros ou à 2,40 euros, cela ne change pas la face du monde. En revanche, il en va différemment des médicaments innovants, dont le prix est élevé.
Les médicaments dont on parle sont, pour la plupart, fabriqués en France, pour 70 % d'entre eux, et en Europe, pour 30 % d'entre eux. Voilà qui constitue déjà une bonne garantie.
L'amendement que vous nous avez présenté, madame la ministre, est arrivé un petit peu, comme on le dit dans ma région, comme un cheveu sur la soupe, juste avant le début de la séance.
Je veux être sûre qu'il prend bien en compte tous ces médicaments, qui sont d'un usage courant, vendus à des prix bas et qui sont fabriqués en France, ce qui contribue à préserver l'industrie française.
Je voudrais en avoir l'assurance.
Mme Pascale Gruny. Ce n'est pas écrit...
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 925 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 892 rectifié n'est pas soutenu.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 298 rectifié ter est présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann.
L'amendement n° 612 est présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 42
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l'amendement n° 298 rectifié ter.
Mme Florence Lassarade. Le présent amendement a pour objet de supprimer les dispositions visant à valider des modalités de calcul de la contribution sur le chiffre d'affaires de 2014 à 2024 et de calcul de la clause de sauvegarde de 2021 à 2024, modalités qui avaient été invalidées dans le cadre de procédures contentieuses par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, le 20 mars 2025, et par le tribunal administratif de Paris, le 17 juillet 2025.
Cette validation législative constitue une ingérence préoccupante du pouvoir législatif dans l'administration de la justice afin d'influer sur le dénouement d'actions en cours, dans un but de rendement financier.
Tant la Cour de cassation que le Conseil d'État ou la Cour européenne des droits de l'homme n'ont eu de cesse de rappeler qu'une telle mesure de validation législative, attentatoire par nature aux droits fondamentaux des citoyens, ne pouvait être prise qu'à la stricte condition d'être justifiée par un motif impérieux d'intérêt général.
Or aucune justification ni aucune étude d'impact n'est présentée pour justifier une mesure d'une telle ampleur. La seule considération d'un intérêt financier ne constitue pas un motif impérieux d'intérêt général suffisant pour permettre au législateur de faire obstacle à des décisions de justice déjà intervenues ou à intervenir.
De plus, leur dimension particulièrement étendue, dix ans pour l'un des contentieux ciblés par la mesure, ne respecte pas la nécessaire proportionnalité de telles mesures.
L'article prévoyant déjà des clarifications pour l'avenir, il est donc indispensable de supprimer ces mesures pour le passé, lesquelles porteraient gravement atteinte aux droits des contribuables et aux principes fondamentaux posés par la Constitution française, le droit de l'Union européenne et la Convention européenne des droits de l'homme.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l'amendement identique n° 612.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il vient d'être excellemment défendu par ma collègue Lassarade. Je rappelle à ceux de nos collègues qui ont assisté aux auditions que ce sujet a déjà été évoqué.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Les dispositions de cet article sont limitées dans le temps et dans leur objet, puisqu'elles concernent des motifs de contestation précis.
Très concrètement, ce type de mesures ne pose aucune difficulté juridique. Elles ont fait l'objet d'une analyse approfondie par le Conseil d'État et répondent à l'objectif d'intérêt général et constitutionnel de préservation de l'équilibre financier de la sécurité sociale.
Par conséquent, je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Madame Lassarade, l'amendement n° 298 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Florence Lassarade. Non, je le retire, monsieur le président.
Mme la présidente. Madame la rapporteure générale Doineau, l'amendement n° 612 est-il maintenu ?
Mme Élisabeth Doineau. Non, il est retiré, monsieur le président.
Mme la présidente. Les amendements nos 298 rectifié ter et 612 sont retirés.
Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Après l'article 10
Mme la présidente. L'amendement n° 1687, présenté par Mmes Bélim et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et Artigalas, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 10
Insérer un article ainsi rédigé :
L'article L. 138-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° A la première phrase du deuxième alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre » ;
2° Le deuxième alinéa est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« La quatrième part est constituée par le chiffre d'affaires hors taxes réalisé par l'entreprise au cours de l'année civile dans le cadre de ventes directes de médicaments remboursables aux pharmacies d'officine, aux pharmacies mutualistes et aux pharmacies des sociétés de secours minières des départements d'outre-mer.
« Constitue une vente directe, au sens du présent article, toute fourniture d'une spécialité pharmaceutique inscrite sur la liste des médicaments remboursables aux assurés sociaux mentionnée à l'article L. 162-17 du présent code, effectuée directement par une entreprise exploitante auprès d'une pharmacie. »
3° Après le sixième alinéa, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« ...) Un taux de 5 % à la quatrième part. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à mettre fin à une dérive qui met en danger la sécurité sanitaire de nos territoires ultramarins, à savoir l'explosion de ventes directes de médicaments par certains laboratoires.
L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) elle-même nous alerte. Ces ventes directes, qui représentent jusqu'à un tiers du marché, déstructurent complétement la chaîne d'approvisionnement locale. Elles contournent les circuits officinaux et sont la cause, pour certains médicaments, d'une absence totale d'avance. Elles privent donc nos officines de leurs stocks de sécurité, entraînent des ruptures prolongées liées au fret et placent nos patients dans une situation d'inégalité flagrante par rapport à ceux de l'Hexagone.
Ce modèle met directement en danger la continuité d'accès aux traitements pour nos patients. Soyons honnêtes, les ventes directes de médicaments par certains laboratoires dans les outre-mer aujourd'hui est tout simplement inacceptable et scandaleux. Pendant ce temps, ces laboratoires optimisent leurs marges.
Dans l'Hexagone, l'ANSM a interdit ces pratiques quand elles compromettaient les approvisionnements. Alors, pourquoi laisser perdurer en outre-mer ce que l'on juge dangereux ici ? Pourquoi accepter qu'un modèle disruptif fragilise nos territoires les plus vulnérables ?
Je veux être très claire, cet amendement a pour objet non pas de pénaliser, mais bien de responsabiliser. Il s'agit de protéger nos circuits pharmaceutiques, de garantir l'équité et de restaurer la souveraineté sanitaire locale. Le taux proposé de 5 %, strictement aligné sur la marge moyenne d'un laboratoire exploitant, ne remettrait aucunement en cause leur rentabilité, mais il mettrait fin à un modèle économique qui sacrifie la continuité de l'accès aux traitements sur l'autel d'une optimisation commerciale.
Mes chers collègues, je vous propose d'envoyer un signal clair : on ne peut pas fragiliser l'accès aux médicaments outre-mer pour augmenter des profits déjà confortables.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, vous dénoncez les ventes directes pratiquées par les laboratoires. Nous sommes totalement d'accord avec vous, mais nous vous proposons une autre solution.
En effet, l'outil fiscal ne nous apparaît pas le plus adapté. Il semble d'abord plus pertinent de faire encadrer les pratiques de ventes directes par l'ANSM lorsqu'il existe un risque de rupture, comme vous l'avez rappelé.
Ensuite, l'article 11 quinquies, que, je l'espère, nous adopterons, prévoit justement de soutenir les grossistes-répartiteurs en diminuant le taux de la taxe qui leur est applicable.
Ces deux mesures répondent à votre préoccupation. Je vous invite donc à soutenir l'article 11 quinquies.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Madame la sénatrice, vous proposez de créer une quatrième tranche dans le calcul de la contribution sur la vente en gros. Actuellement, cette contribution comporte déjà trois parts, la troisième visant déjà à limiter les ventes directes aux officines. Une quatrième tranche ne nous semble donc pas utile.
Vous avez indiqué que l'ANSM interdisait les ventes directes dans l'Hexagone. Je vous précise qu'elle ne le fait qu'en cas de pénurie, et pas uniquement sur le territoire national, à ma connaissance.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur votre amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1687.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 1694, présenté par M. Mérillou, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 138-10-... ainsi rédigé :
« Art. L. 138-10-.... – I. – Il est institué une taxe à la charge des entreprises exploitant des spécialités pharmaceutiques mentionnées à l'article L. 5121-8 du code de la santé publique, lorsque ces spécialités retardent l'entrée effective sur le marché d'un médicament générique plus de douze mois après la date d'expiration du brevet initial ou du certificat complémentaire de protection.
« II. – Sont réputées constituer un retard injustifié, au sens du présent article, les pratiques consistant à maintenir artificiellement l'exclusivité commerciale d'un médicament par :
1° Le dépôt d'un ou plusieurs brevets portant sur des formes galéniques, dosages, associations de principes actifs ou procédés n'apportant pas d'amélioration du service médical rendu (ASMR V) ;
2° Ou toute action judiciaire ou administrative manifestement dilatoire visant à empêcher ou retarder l'autorisation de mise sur le marché d'un générique équivalent.
« III. – Le taux de la taxe est fixé à 3 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au titre des ventes de la spécialité concernée sur l'exercice au cours duquel le retard est constaté. Ce taux peut être porté à 5 % en cas de récidive dans un délai de cinq ans.
« IV. – Le produit de la taxe est recouvré et contrôlé selon les mêmes règles, sous les mêmes garanties, privilèges et sanctions que la taxe mentionnée à l'article L. 138-10.
« V. – Le produit de la taxe est affecté à la Caisse nationale de l'assurance maladie et inscrit en recettes du régime général.
« VI. - Un décret prévoit les modalités d'application du présent article. »
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement, déposé par notre collègue Serge Mérillou, vise à lutter contre une pratique bien connue dans le secteur du médicament. Je veux parler de l'« evergreening », c'est-à-dire la prolongation artificielle de l'exclusivité commerciale d'une spécialité en fin de brevet.
Ces stratégies retardent l'arrivée des génériques, alors même que ceux-ci constituent un élément essentiel de la soutenabilité budgétaire de l'assurance maladie. Les exemples sont nombreux.
Le plus connu est celui du Clopidogrel, dont l'association avec l'aspirine a prolongé de dix ans la protection commerciale. Il était pourtant simple de prendre les deux médicaments séparément. Il y a aussi le cas de l'Abiratérone, qui a été vendu près de 300 euros plus cher que la version générique pour une efficacité strictement équivalente. Ce seul produit a entraîné un surcoût pour l'assurance maladie estimé entre 9 millions et 20 millions d'euros par an, sans bénéfice clinique identifié.
Selon la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam), tous ces retards coûtent plus de 500 millions d'euros par an à l'assurance maladie. Ce coût résulte non pas de l'innovation, mais d'artifices juridiques, comme le dépôt de brevets sous des formes galéniques différentes ou avec des dosages légèrement différents, qui n'améliorent en rien le service médical rendu.
Face à ces dérives, nous proposons un mécanisme simple et proportionné : l'instauration d'une taxe sur les spécialités lorsque les laboratoires les commercialisant retardent à l'évidence l'arrivée d'un générique plus de douze mois après l'expiration du brevet, dès lors, bien sûr, qu'il n'y a pas d'innovation justifiant ce maintien de prix. Cette taxe serait de 3 % du chiffre d'affaires concerné, et de 5 % en cas de récidive.
Cette mesure est dissuasive, mais équilibrée. Elle ne remet pas en cause la liberté d'innover ni la protection de la propriété industrielle. Elle vise simplement à décourager les stratégies dilatoires et à réorienter les efforts de R&D vers des traitements véritablement innovants.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Vous visez un objectif pertinent, mais, une nouvelle fois, vous proposez d'utiliser le levier fiscal. Une entreprise pharmaceutique doit pouvoir être sanctionnée, et vraiment sanctionnée, pour avoir empêché ou retardé l'entrée sur le marché de médicaments génériques. Il s'agit de respecter les règles de la concurrence, lesquelles sanctionnent l'abus de position dominante et les pratiques anticoncurrentielles.
Les outils juridiques existent. Je pense notamment, pour les cas les plus importants, à la licence d'office, prévue par l'article L. 613-16 du code de la propriété intellectuelle. Renforçons la coordination entre le Comité économique des produits de santé (CEPS), l'Autorité de la concurrence, ou encore la Commission européenne, et donnons-nous les moyens de mettre en œuvre le droit existant avant de créer une nouvelle taxe. L'avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je suis d'accord avec cet objectif. Cependant, Mme la rapporteure générale a bien rappelé les mesures existantes. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) est d'ailleurs mobilisée sur ce sujet. L'avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1694.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 192 rectifié est présenté par Mme Lassarade, M. Milon, Mme Richer, MM. Panunzi et H. Leroy, Mme de La Provôté, MM. Lefèvre et Naturel, Mme Malet, MM. Burgoa et Houpert, Mme Aeschlimann, MM. Piednoir, D. Laurent, Cambon et Genet, Mme Bonfanti-Dossat et MM. de Nicolaÿ, Duplomb et J.M. Boyer.
L'amendement n° 1594 rectifié est présenté par Mmes Canalès, Poumirol et Le Houerou.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le premier alinéa de l'article L. 138-19-10 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ne sont pas redevables de la contribution prévue à l'article 138-19-8 les établissements et organismes qui, autorisés à cet effet, conformément à l'article L. 1243-2 du code de la santé publique, assurent la préparation, la conservation, la distribution et la cession des produits inscrits au chapitre 3 du titre III de la liste des produits et prestations pris en charge en sus des prestations d'hospitalisation conformément à l'article L. 162-22-7 du présent code. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l'amendement n° 192 rectifié.
Mme Florence Lassarade. La clause de sauvegarde des dispositifs médicaux, dite DM, de l'article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale, s'applique à l'ensemble des produits et des prestations pris en charge en sus des prestations d'hospitalisation mentionnées à l'article L. 162-22-7 du même code.
Les exploitants de greffons tissulaires d'origine humaine, c'est-à-dire les banques de tissus humains, sont actuellement assujettis à la contribution au titre de la clause de sauvegarde dite DM.
Or leurs produits se distinguent fondamentalement des dispositifs médicaux sur deux points essentiels.
D'une part, ils s'inscrivent dans les objectifs du plan ministériel pour le prélèvement et la greffe d'organes et de tissus 2022-2026, qui vise à renforcer le don national d'organes, de tissus et de cellules afin d'améliorer la disponibilité des greffons ; d'autre part, ils relèvent de réglementations spécifiques, distinctes de celles qui sont applicables aux dispositifs médicaux, tant à l'échelon national qu'à l'échelon européen.
Soumettre ces établissements à la clause de sauvegarde fragiliserait leurs capacités opérationnelles, déjà limitées, et risquerait de réduire l'offre de greffons humains disponibles pour les patients en France. Une telle situation irait à l'encontre des objectifs du plan pour le prélèvement et la greffe d'organes et des politiques publiques en matière de don et de transplantation.
Aussi, cet amendement vise à exonérer de la contribution au titre de la clause de sauvegarde les banques de tissus distribuant des greffons tissulaires d'origine humaine inscrits au chapitre 3 du titre III de la liste des produits et prestations pris en charge en sus des prestations d'hospitalisation.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour présenter l'amendement n° 1594 rectifié.
Mme Marion Canalès. Pourquoi exonérer de la contribution au titre de la clause de sauvegarde les banques de tissus qui distribuent ces greffons tissulaires d'origine humaine ? D'abord, parce que les banques de tissus françaises – il n'y en a qu'une trentaine – sont des acteurs parfois méconnus, mais pourtant essentiels de la santé. Leur rôle en matière de souveraineté sanitaire, comme l'a rappelé ma collègue, est très important pour notre pays.
Les greffons tissulaires relèvent d'une réglementation spécifique. Ils s'inscrivent dans les objectifs du plan ministériel pour le prélèvement et la greffe d'organes et de tissus 2022-2026, qui vise à renforcer le don national d'organes, de tissus et de cellules afin d'améliorer la disponibilité des greffons.
Certes, les greffons tissulaires ont un coût pour la collectivité – il s'est élevé à 31 millions d'euros en 2024, soit 1,3 % des produits concernés –, mais nous ne pouvons pas ignorer leur caractère fondamental et unique – il s'agit de greffons tissulaires d'origine humaine. Ils se distinguent des dispositifs médicaux conventionnels.
La contribution des banques de tissus à la clause de sauvegarde risque de réduire l'offre de greffons humains pour les patients français. Cette situation semble aller à rebours des objectifs du plan susmentionné. C'est la raison pour laquelle je demande que ces banques soient exonérées de la contribution au titre de la clause de sauvegarde.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je remercie mes collègues d'aborder ce sujet.
Je profite de cette occasion pour dire que l'assiette de la clause de sauvegarde des dispositifs médicaux, qui est pourtant loin d'être parfaite, est beaucoup plus cohérente que celle des médicaments. Pour que vous soyez au faîte de la question, je rappelle que cette clause intègre l'ensemble des dépenses remboursées sur les produits ou prestations pris en charge en sus des prestations d'hospitalisation ou bénéficiant d'une prise en charge transitoire.
Ces dépenses connaissent un dynamisme important, d'où le déclenchement du montant Z cette année pour 100 millions à 150 millions d'euros, je le rappelle. Évitons autant que possible de multiplier les exemptions et d'ajouter de la complexité dans ce domaine.
Le soutien aux exploitants et aux banques de tissus humains doit passer par d'autres dispositifs s'inscrivant dans les objectifs du plan ministériel pour le prélèvement et la greffe d'organes et de tissus, plan qui va s'étendre jusqu'en 2026.
Malgré tout, je souhaite connaître l'avis du Gouvernement sur ce sujet, car il a plus d'expertise que moi.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je comprends ces amendements, car ces dispositifs très particuliers nous conduisent à nous interroger sur la pertinence du financement de ces tissus au travers de la liste des produits et prestations pris en charge en sus des prestations d'hospitalisation.
Je m'en remettrai à la sagesse du Sénat sur ces amendements. S'ils étaient adoptés, le montant Z devrait techniquement baisser, puisque nous retirerions un élément de l'assiette. Ces produits ne représentent toutefois pas des sommes considérables.
Mme la présidente. Quel est finalement l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Favorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. Je vous remercie de vous en remettre à la sagesse du Sénat sur ces amendements, madame la ministre.
Les banques de tissus sont des structures assez petites. Il ne s'agit pas de gros laboratoires. Nous avons véritablement besoin de consolider la trentaine de banques de tissus françaises. Mon département en compte une, c'est la raison pour laquelle je défends cette proposition.
J'invite mes collègues à voter ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Madame la ministre, acceptez-vous de lever le gage ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 192 rectifié et 1594 rectifié.
(Les amendements, modifiés par la suppression du gage, sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10.
L'amendement n° 1699, présenté par Mmes Bélim et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et Artigalas, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 245-6 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 245-6-... ainsi rédigé :
« Art. L. 245-6-.... – I. – Il est institué une contribution à la charge des entreprises titulaires de l'autorisation de distribution en gros mentionnées à l'article L. 5124-2 du code de la santé publique, ainsi qu'à la charge des pharmacies d'officine titulaires d'une autorisation d'exportation en application de l'article L. 5124-13 du même code, lorsque ces entreprises réalisent des exportations de médicaments remboursables par les régimes obligatoires d'assurance maladie en application des articles L. 162-17 et L. 162-16-4 du présent code.
« II. – La contribution est assise sur le montant hors taxes du chiffre d'affaires réalisé au titre de ces exportations. Son taux est fixé à 5 %.
« III. – Sont exonérées de la contribution les exportations réalisées à des fins humanitaires, effectuées par des opérateurs placés sous le contrôle de l'État ou par des organisations non gouvernementales certifiées.
« IV. – Les entreprises et officines situées dans les départements et régions d'outre-mer mentionnés à l'article 73 de la Constitution sont exonérées de la contribution.
« V. – Le produit de la contribution est affecté à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
« VI. – Un décret précise les modalités de déclaration, de liquidation et de recouvrement de la contribution. Elle est recouvrée et contrôlée comme en matière de taxes sur le chiffre d'affaires. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à répondre à une urgence sanitaire très concrète : la pénurie de médicaments essentiels, aggravée par la forte progression des exportations parallèles spéculatives, dont le nombre a été multiplié par trois entre 2016 et 2023.
Nous proposons une réponse simple et responsable : la création d'une contribution spécifique sur ces exportations spéculatives. L'objectif est double : sécuriser les stocks pour les patients, notamment pour les médicaments essentiels et pour les pharmacies rurales isolées ou ultramarines ; mettre fin à une rente pure qui détourne des médicaments remboursés par l'assurance maladie vers des marchés plus lucratifs à l'étranger.
Cette contribution ne touche pas les acteurs ultramarins, qui ne participent pas à ces flux, mais subissent les pénuries. Elle préserve totalement les exportations humanitaires.
Enfin, cet amendement tend à créer une ressource nouvelle pour l'assurance maladie, estimée entre 50 millions et 70 millions d'euros, sans créer ni élargir de prestation.
En votant cet amendement, nous choisirons clairement la priorité : la santé des patients avant les profits spéculatifs.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Chère collègue, ne vaudrait-il pas mieux interdire purement et simplement l'exportation parallèle de certains médicaments qui connaissent des risques de rupture d'approvisionnement ou procéder à des hausses de prix de ces médicaments, plutôt que d'utiliser l'outil fiscal ?
Je rappelle que les grossistes-répartiteurs connaissent, pour beaucoup, d'importantes difficultés financières, d'où l'introduction à l'Assemblée nationale de l'article 11 quinquies, dont je vous ai parlé tout à l'heure.
L'Autorité de la concurrence fait le constat d'un secteur fragilisé : les faibles niveaux de marge ne permettent pas aux grossistes-répartiteurs de compenser leurs charges, notamment le coût des obligations de service public auxquelles ils sont soumis. Les assujettir à une nouvelle taxe, même ciblée, pourrait remettre en cause leur rôle dans la territorialisation de l'approvisionnement en médicaments, c'est-à-dire dans l'homogénéisation de la distribution en tout point du territoire.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. J'ajoute que la directrice ou le directeur de l'ANSM peut déjà restreindre ou suspendre l'exportation des médicaments en cas de rupture ou de risque de rupture d'approvisionnement d'un médicament d'intérêt thérapeutique majeur. Il faudrait plutôt discuter d'une sanction en cas de non-respect de cette décision.
Je vous remercie d'avoir évoqué ce sujet, mais le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1699.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 10 bis (nouveau)
I. – L'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale est complété par un III ainsi rédigé :
« III. – Ne sont toutefois pas pris en compte pour le calcul des chiffres d'affaires mentionnés au I du présent article :
« 1° Les spécialités génériques définies au 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique ;
« 2° Les médicaments biologiques similaires définis au a du 15° du même article L. 5121-1 ;
« 3° Les médicaments hybrides définis au c du 5° dudit article L. 5121-1. »
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. L'amendement n° 615, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le présent amendement vise à supprimer l'article 10 bis, qui prévoit de sortir de l'assiette de la clause de sauvegarde les médicaments génériques, mais aussi les biosimilaires et les hybrides.
En effet, les biosimilaires, bien que moins chers que les médicaments de référence, ne peuvent être assimilés aux génériques. Compte tenu de leur modèle économique et de l'évolution de leur consommation, les exclure entièrement de la clause ne paraît pas soutenable dans le contexte financier actuel de l'assurance maladie.
Par ailleurs, un mécanisme de plafonnement de la contribution de la clause de sauvegarde due au titre des spécialités génériques et matures a été intégré à l'article 10.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 615.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 10 bis est supprimé et l'amendement n° 926 rectifié bis n'a plus d'objet.
Article 10 ter (nouveau)
I. – Le II de l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025, est ainsi modifié :
1° Au 1°, le taux : « 70 % » est remplacé par le taux : « 50 % » ;
2° Il est ajouté un 3° ainsi rédigé :
« 3° À concurrence de 20 %, en fonction du lieu de production des médicaments que l'entreprise exploite, importe ou distribue au sein du montant total remboursé par l'assurance maladie défini au même I.
« La fraction de la part de la contribution due en fonction du lieu de production est ainsi déterminée :
« |
Part des médicaments mentionnées à l'article L. 138-10 du présent code produits dans l'Union européenne |
Coefficient |
Part de la contribution de l'entreprise |
» |
Inférieure ou égale à 20 % |
4 |
Coefficient de l'entreprise / somme des coefficients de l'ensemble des entreprises redevables |
||
Supérieure à 20 % et inférieure ou égale à 40 % |
3 |
Coefficient de l'entreprise / somme des coefficients de l'ensemble des entreprises redevables |
||
Supérieure à 40 % et inférieure ou égale à 60 % |
2 |
Coefficient de l'entreprise / somme des coefficients de l'ensemble des entreprises redevables |
||
Supérieure à 60 % et inférieure ou égale à 80 % |
1 |
Coefficient de l'entreprise / somme des coefficients de l'ensemble des entreprises redevables |
||
Supérieure à 80 % |
0 |
Coefficient de l'entreprise / somme des coefficients de l'ensemble des entreprises redevables |
II. – La perte de recettes éventuelle pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. L'amendement n° 616, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Assurer la souveraineté en matière de médicaments en favorisant les investissements et la production sur le sol européen et français constitue un enjeu majeur, ce point de vue étant partagé.
Toutefois, le mécanisme prévu par cet article viendrait complexifier le calcul de la contribution individuelle de la clause de sauvegarde, alors même qu'une réforme d'ampleur entrera en vigueur au 1er janvier 2027 et s'appliquera sur les montants dus au titre de l'année 2026.
Pour cette raison, je vous propose la suppression de l'article 10 ter.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 616.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 10 ter est supprimé.
Article 11
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L'article L. 162-18 est ainsi modifié :
a) À la dernière phrase du premier alinéa du II, les mots : « dernier alinéa du I » sont remplacés par les mots : « troisième alinéa du III » ;
b) Le III est ainsi modifié :
– au début, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« III. – Les remises conventionnelles prévues aux I et II sont versées par les entreprises de manière provisionnelle, à parts égales, chaque trimestre de l'année civile au titre de laquelle elles sont dues, pour un montant cumulé représentant 95 % du montant dû aux organismes mentionnés à l'article L. 213-1 au titre de l'antépénultième année civile.
« Une régularisation, portant sur la différence entre la somme des acomptes versés et le montant de la remise due, intervient pendant l'année civile suivant celle au titre de laquelle ces remises sont dues. » ;
– au début, la mention : « III. – » est supprimée ;
– au début de la première phrase, le mot : « Les » est remplacé par le mot : « Ces » ;
– il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L'Agence centrale des organismes de sécurité sociale rend publics, pour chaque entreprise concernée, les remises, les prix nets, les tarifs nets et les coûts nets ainsi que le niveau de régularisation par rapport à l'acompte. » ;
2° Après le II de l'article L. 165-4, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
« II bis. – Les remises conventionnelles prévues aux I et II du présent article sont versées par les entreprises concernées de manière provisionnelle, à parts égales, chaque trimestre de l'année civile au titre de laquelle elles sont dues, pour un montant cumulé correspondant à 95 % du montant dû aux organismes mentionnés à l'article L. 213-1 au titre de l'antépénultième année civile.
« Une régularisation, portant sur la différence entre la somme des acomptes versés et le montant de la remise due, intervient pendant l'année civile suivant celle au titre de laquelle ces remises sont dues.
« Ces remises sont recouvrées par les organismes mentionnés au même article L. 213-1 désignés par le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Les prix nets, les tarifs nets ou les coûts nets s'entendent déduction faite de ces remises.
« L'Agence centrale des organismes de sécurité sociale rend publics, pour chaque entreprise concernée, les remises, les prix nets, les tarifs nets et les coûts nets ainsi que le niveau de régularisation par rapport à l'acompte. »
II. – Pour l'année 2026 et à titre transitoire, les remises conventionnelles prévues aux I et II de l'article L. 162-18 du code de la sécurité sociale dues au titre des années 2025 et 2026 sont versées par les entreprises mentionnées au I du même article L. 162-18 de manière provisionnelle selon les modalités suivantes.
A. – Pour les remises dues au titre de l'année 2025, la somme des versements provisionnels est égale à 95 % du montant des remises dues aux organismes mentionnés à l'article L. 213-1 du même code obtenu au titre de l'année 2024 et fait l'objet de deux versements :
1° De 75 % le 1er juin 2026 ;
2° De 25 % le 1er septembre 2026.
Une régularisation, portant sur la différence entre la somme des acomptes versés et le montant de la remise due, intervient au plus tard le 31 décembre 2026.
B. – Pour les remises dues au titre de l'année 2026, la somme des versements provisionnels est égale à 95 % du montant dû aux organismes mentionnés au même article L. 213-1 au titre de l'année 2024, et fait l'objet de deux versements égaux :
1° De 50 % le 1er septembre 2026 ;
2° De 50 % le 1er décembre 2026.
Une régularisation, portant sur la différence entre la somme des acomptes versé et le montant de la remise due, intervient au plus tard le 31 décembre 2027.
III. – Le I du présent article s'applique pour la première fois aux remises dues au titre de l'année 2027.
IV. – Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article, qui s'applique aux conventions en cours. Il peut prévoir des modalités particulières pour le calcul du montant des versements provisionnels ou des exonérations de ces versements, notamment lorsqu'il n'est pas pertinent de se référer au montant de la remise de l'antépénultième année ou lorsqu'un changement de situation concernant l'entreprise ou le produit est susceptible d'entraîner une variation significative de la remise due.
Mme la présidente. L'amendement n° 617, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéas 6 et 13
Remplacer le mot :
antépénultième
par les mots :
avant-dernière
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à corriger une erreur de référence.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. La rédaction de ces alinéas ayant été validée par le Conseil d'État, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Madame la rapporteure générale, l'amendement n° 617 est-il maintenu ?
Mme Élisabeth Doineau. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 617 est retiré.
Je suis saisie de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les six premiers sont identiques.
L'amendement n° 316 rectifié ter est présenté par M. Milon, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann.
L'amendement n° 576 est présenté par M. Khalifé.
L'amendement n° 618 est présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 746 rectifié bis est présenté par MM. Cambier et Fargeot, Mme Billon, M. Longeot, Mme Guidez, M. Dhersin, Mme Antoine, M. Courtial, Mme Gosselin, MM. Houpert, Mizzon et Chasseing, Mme Gacquerre, MM. Menonville et Kern et Mmes Saint-Pé et Perrot.
L'amendement n° 1087 rectifié est présenté par M. Lévrier, Mme Schillinger, M. Iacovelli, Mme Nadille, MM. Théophile, Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Kulimoetoke, Lemoyne, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L'amendement n° 1369 rectifié bis est présenté par Mme Berthet, MM. Belin et Anglars, Mme Belrhiti, MM. Lefèvre, H. Leroy et Panunzi, Mme Petrus et MM. Saury et Sido.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 10, 11 et 16
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean Sol, pour présenter l'amendement n° 316 rectifié ter.
M. Jean Sol. L'amendement adopté à l'article 11 à l'Assemblée nationale, qui tend à imposer à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) de rendre publiques différentes informations sur les prix des médicaments, dont la publication des prix nets, sera catastrophique pour l'accès aux traitements en France, particulièrement dans le contexte résultant de la mise en œuvre de la clause Most Favored Nation (MFN) des autorités américaines visant à aligner leurs prix sur le moins-disant international.
Le dispositif actuel de double tarification confidentielle permet à l'assurance maladie de négocier des prix nets plus bas grâce au paiement de remises par les industriels, et à l'entreprise d'accorder à l'assurance maladie de tels tarifs sans risque que ceux-ci soient utilisés comme référence pour la fixation des prix dans d'autres pays, seul le prix facial public étant connu. Enfin, le Comité économique des produits de santé (CEPS) a la possibilité de soutenir la production locale à travers un prix net attractif. Les territoires profitent ainsi d'implantations industrielles.
Une transparence sur les prix nets, telle qu'elle est prévue par l'article 11, inciterait les autres pays à exiger les mêmes prix nets, ce qui réduirait les marges de négociation de la France et créerait des situations d'impasse susceptibles de priver les patients français de certains traitements. Elle faciliterait l'application de la politique américaine MFN, qui aligne les prix américains sur les plus bas prix internationaux. Elle dissuaderait les laboratoires de mettre à disposition leurs produits en France pour ne pas risquer d'apparaître comme le prix de référence le plus bas.
En conclusion, cette mesure introduite à l'article 11 du PLFSS par l'Assemblée nationale affaiblira l'accès aux traitements, l'innovation et la compétitivité de la France.
Pour toutes ces raisons, il convient de supprimer les alinéas 11 et 16, aux termes desquels « l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) rend publics, pour chaque entreprise concernée, les remises, les prix nets, les tarifs nets et les coûts nets, ainsi que le niveau de régularisation par rapport à l'acompte. »
Mme la présidente. La parole est à M. Khalifé Khalifé, pour présenter l'amendement n° 576.
M. Khalifé Khalifé. J'ajoute, après avoir écouté religieusement mon collègue Jean Sol, que cette disposition est contraire à la directive européenne de 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulguées et porterait atteinte à la liberté contractuelle, ainsi qu'à la confidentialité des négociations avec le CEPS.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l'amendement n° 618.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l'amendement n° 746 rectifié bis.
Mme Jocelyne Guidez. Il est également défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour présenter l'amendement n° 1087 rectifié.
M. Martin Lévrier. Pour l'anecdote, j'indique que le jour du vote à l'Assemblée nationale, un certain Donald Trump a réclamé exactement la même mesure. C'est assez curieux...
Mme la présidente. L'amendement n° 1369 rectifié bis n'est pas soutenu.
Mme la présidente. L'amendement n° 304 rectifié bis, présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
Alinéas 10 et 11
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Khalifé Khalifé.
M. Khalifé Khalifé. Il est défendu !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 304 rectifié bis ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Favorable !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements en discussion commune ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Il est favorable sur tous ces amendements, voire très favorable pour les cinq amendements identiques !
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. La fixation du prix des médicaments se fait dans une opacité totale. Les remises accordées par le CEPS aux industriels, certes dans le cadre d'une négociation, s'envolent et rendent encore plus compliquée la compréhension du coût des médicaments.
Ceux-ci constituent en France un marché de plus de 36 milliards d'euros, dont la dynamique est largement soutenue par la solidarité nationale. Il s'agit à la fois d'un poste majeur de dépenses publiques et d'un enjeu essentiel de santé publique.
Le caractère secret des remises prive le débat démocratique et parlementaire de toute capacité de contrôle sur les conditions économiques réelles de la dépense en produits de santé. Cette opacité empêche également toute évaluation du juste prix des médicaments, des stratégies tarifaires de l'industrie pharmaceutique et de la pertinence de la dépense publique.
J'irai plus loin : cette opacité nous prive, en tant que législateurs, de données pour mieux légiférer, comme le montre la réforme quasi annuelle du mécanisme de la clause de sauvegarde – nous l'avons encore constaté il y a cinq minutes.
Nous nous étions donc réjouis de l'adoption par l'Assemblée nationale de l'amendement écologiste tendant à renforcer la transparence des prix des médicaments.
Certes, j'entends les arguments relatifs au secret des affaires, mais je regrette que la seule conséquence qu'en tire la commission soit la suppression de cette exigence de transparence. Nous aurions pu lui préférer une communication de ces données aux seules commissions compétentes du Parlement.
En attendant d'avoir ce débat nécessaire, le groupe Écologiste votera contre ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. L'article 11 a été modifié à l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption d'un amendement visant à instaurer un mécanisme de transparence sur les remises et les prix réels des médicaments et des dispositifs médicaux, données actuellement soumises au secret commercial.
Les prix publiés au Journal officiel masquent de fait les remises confidentielles négociées entre les laboratoires et le Comité économique des produits de santé. Ces remises représentaient plus de 9 milliards d'euros en 2024. Leur caractère secret prive le débat démocratique et parlementaire de toute capacité de contrôle sur les conditions économiques réelles de dépenses en produits de santé. Cette opacité empêche également toute évaluation du juste prix des médicaments, des stratégies tarifaires de l'industrie pharmaceutique et de la pertinence de la dépense publique.
Vous proposez aujourd'hui, mes chers collègues, de supprimer les alinéas 10 et 11 de l'article 11, arguant que « rendre publiques différentes informations sur les prix des médicaments, dont la publication des prix nets des médicaments, serait catastrophique pour l'accès aux traitements en France ».
Pour résumer, nous aurions donc, d'un côté, les industriels du médicament, qui négocient dans l'ombre les prix des médicaments, au détriment du budget de la sécurité sociale et de l'accès des malades aux traitements ; de l'autre, la disparition des dernières industries du médicament dans notre pays, à la suite de la publication des tarifs effectivement remboursés par la sécurité sociale.
Cela démontre, à notre sens, l'absurdité du marché mondial du médicament, où les industriels font la loi et où les États doivent céder à toutes leurs exigences.
Par conséquent, nous voterons contre ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Je veux simplement rappeler que les médicaments en France sont quasiment les moins chers au monde. Le résultat de la pratique actuelle est donc excellent, ce qui est somme toute le plus important.
Il est bientôt 20 heures, je me permettrai donc de partager une petite réflexion sur ce genre de négociations : mes chers collègues, la transparence est à la négociation ce que la pornographie est à l'érotisme ! (Rires.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. C'est beau !
Mme Nathalie Goulet. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je voudrais porter deux arguments au débat.
Premièrement, les partisans de ces dispositions dénoncent des négociations menées « dans l'ombre ». Mais le simple fait qu'une négociation ne soit pas publique ne signifie pas qu'elle se déroule dans l'ombre ; ce n'est pas comme si, derrière un rideau, une seule personne décidait du prix sans que personne ne regarde.
Je rappelle que le président et le vice-président du CEPS sont nommés par les ministres de la santé, quel que soit le gouvernement en place ; figurent en outre dans ce comité des représentations de la direction de la sécurité sociale (DSS), de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam), de l'Union nationale des organismes complémentaires d'assurance maladie (Unocam), ou encore de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Toutes ces équipes contribuent à la négociation, qui n'est certes pas publique, pour protéger le secret des affaires.
Deuxièmement, il convient d'avoir en tête la volonté de Donald Trump, qui n'est autre que de baisser les prix des médicaments aux États-Unis et de les faire augmenter en Europe. Par conséquent, si nous rendions publiques ces négociations, les prix augmenteraient pour notre pays.
Nous n'aurions donc vraiment pas intérêt, à mon sens, à rejeter ces amendements.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 316 rectifié ter, 576, 618, 746 rectifié bis et 1087 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 304 rectifié bis n'a plus d'objet.
L'amendement n° 1114 n'est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Après l'article 11
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements identiques nos 6 rectifié quater et 9 rectifié bis ne sont pas soutenus.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 10 rectifié bis est présenté par MM. Cadec, J.P. Vogel et Paccaud, Mme Micouleau, M. Brisson, Mmes Perrot et Bellamy, M. Daubresse, Mme Muller-Bronn, MM. Panunzi et D. Laurent, Mme Canayer et MM. Rapin, Bruyen, Genet, Séné et Levi.
L'amendement n° 7 rectifié quinquies est présenté par MM. V. Louault et Rochette, Mme Lermytte, MM. Laménie et Pellevat et Mmes Bourcier et Paoli-Gagin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le II de l'article L. 165-3-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Le présent article n'est pas applicable aux catégories de produits figurant au chapitre 3 du titre 2 de la liste des produits et prestations remboursables. »
II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Jean-François Rapin, pour présenter l'amendement n° 10 rectifié bis.
M. Jean-François Rapin. Défendu !
Mme la présidente. L'amendement n° 7 rectifié quinquies n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 10 rectifié bis ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 a instauré des mesures d'encadrement des remises commerciales sur les dispositifs médicaux, afin de mieux distinguer ce qui relève de la valeur du dispositif, de sa distribution, ou encore de la prestation, dans le prix total du produit. Ces dispositions entreront en vigueur à la fin de l'année.
L'amendement restant en discussion vise à exclure de ces mesures d'encadrement les produits relevant du secteur de l'audition. Toutefois, les dépenses remboursées pour les produits de ce secteur, qui figurent au chapitre 3 du titre 2 de la liste des produits et prestations remboursables (LPPR), chapitre qui couvre ce secteur, représentaient plus de 412 millions d'euros en 2024. Notons en particulier que les prises en charge d'audioprothèses ont plus que doublé en cinq ans, malgré une légère baisse en 2024.
Dès lors, il apparaît nécessaire de maintenir ce secteur dans le champ de l'encadrement réglementaire des remises commerciales, afin d'améliorer la transparence du secteur.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 10 rectifié bis.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. Jean-François Rapin. Je retire l'amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° 10 rectifié bis est retiré.
Article 11 bis (nouveau)
Le I de l'article 1613 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutes les boissons alcoolisées titrant plus de 1,2 % vol et comportant une adjonction de substances actives ayant un effet stimulant sur le corps, notamment la caféine, la taurine et la guaranine, font l'objet de la même taxe. Un décret précise les substances. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1756 rectifié quater, présenté par M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet et Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le I de l'article 1613 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutes les boissons constituées par un mélange préalable de boissons ayant un titre alcoométrique acquis n'excédant pas 1,2 % vol. et de boissons alcooliques au sens du 2° de l'article L. 111-4 du code des impositions sur les biens et services, ainsi que les boissons spiritueuses répondant aux définitions prévues au règlement (UE) 2019/787 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 concernant la définition, la désignation, la présentation et l'étiquetage des boissons spiritueuses, l'utilisation des noms de boissons spiritueuses dans la présentation et l'étiquetage d'autres denrées alimentaires, la protection des indications géographiques relatives aux boissons spiritueuses, ainsi que l'utilisation de l'alcool éthylique et des distillats d'origine agricole dans les boissons alcoolisées, et abrogeant le règlement (CE) n° 110/2008, à l'exception des catégories de boissons spiritueuses figurant aux 1 à 44 de l'annexe I de ce règlement, font l'objet de la même taxe. »
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Cet amendement porte sur les prémix, ou plus précisément sur une catégorie particulière de prémix. Souvenons-nous, mes chers collègues : nous avions institué une taxation de ces boissons. Toutefois, depuis lors sont apparus sur le marché ce que l'on appelle les « Vody », à savoir des boissons associant des alcools forts à des boissons énergisantes ou à des composés sucrés aromatisés. Ces Vodys sont vendus dans des canettes de petit format, à un prix d'environ 3,50 euros.
Or ces boissons présentent un titre alcoométrique qui varie entre 18 % et 25 %, ce qui leur permet d'échapper à la taxe sur les prémix, actuellement limitée aux boissons qui titrent moins de 12 %.
L'objet de cet article est donc d'étendre le champ de cette taxe pour y inclure ces boissons, dont il faut rappeler que la cible est, encore et toujours, les jeunes. Toutefois, le dispositif adopté par l'Assemblée nationale n'intègre que les Vodys contenant soit de la caféine, soit de la taurine, soit de la guaranine, ce qui exclut de fait du champ de la taxe les boissons de ce type qui auraient été obtenues en mêlant du sucre et des arômes à un alcool dont le degré a été augmenté.
Il y a là un problème, car on ne saurait taxer seulement les produits qui contiennent certaines substances supplémentaires et, de fait, exclure les autres, alors même qu'ils ne titrent pas loin de 25 degrés d'alcoolémie.
L'objet de cet amendement est donc de réparer cette omission ; je précise que le dispositif proposé ne vise pas l'ensemble des autres produits contenant de l'alcool, notamment les produits vitivinicoles définis par le règlement de l'Union européenne.
Mme la présidente. L'amendement n° 619, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Après le I de l'article 1613 bis du code général des impôts, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« I bis. – Les boissons présentant un titre alcoométrique acquis de plus de 1,2 % vol. et inférieur à 25 % vol., comportant une adjonction de substances ayant un effet stimulant sur le corps dont la liste est fixée par un arrêté du ministre chargé du budget et du ministre chargé de la santé font l'objet de la même taxe. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2026.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avec l'article 11 bis, nous changeons de thème : après les médicaments et les dispositifs médicaux, voici que nous abordons les taxes comportementales.
Notre collègue Bernard Jomier, comme beaucoup d'entre nous, se préoccupe des jeunes et des addictions qui les menacent. Nous avons déjà beaucoup évoqué ces sujets les dernières années. Il y a un an, nous avons permis des avancées intéressantes sur les boissons sucrées, mais aussi sur les jeux d'argent, dont il a été question ce matin.
Je partage tout à fait l'objectif de notre collègue. Simplement, pour mieux l'atteindre, je lui demanderai de retirer son amendement au profit de celui que je vais maintenant vous présenter.
L'amendement n° 619 de la commission vise à préciser la rédaction de l'article 11 bis, dont je rappelle qu'il est issu de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement de Frédéric Valletoux, président de sa commission des affaires sociales.
Puisqu'il s'agit d'instaurer une imposition, la loi doit en effet être claire et précise sur son assiette, son taux et l'échéance de son entrée en vigueur.
Premièrement, il convient de cibler plus précisément les boissons concernées par la taxe, en fixant un plafond au titre alcoométrique acquis. Les Vodys, qui sont les boissons visées, ont en général un titre alcoométrique compris entre 18 % et 22 % de volume d'alcool. Nous proposons donc de cibler les boissons titrant à plus de 1,2 degré et jusqu'à 25 degrés d'alcool. Je rappelle qu'au-delà de cette quantité, les boissons alcooliques sont déjà soumises à l'accise sur les alcools et à la cotisation de sécurité sociale.
Deuxièmement, l'amendement tend à renvoyer la liste des substances énergisantes à un arrêté ministériel plutôt qu'à un décret, car cibler dans la loi certaines substances seulement offrirait une moindre sécurité juridique.
Enfin, nous fixerions la date d'entrée en vigueur de cette nouvelle taxe au 1er janvier 2026.
Nous avons donc le même objectif, mon cher collègue. Simplement, il nous semble nécessaire de corriger l'article introduit dans le texte par l'Assemblée nationale de manière à préciser tous les éléments que je viens d'évoquer. Je vous remercie donc par avance de bien vouloir retirer votre amendement au profit de celui-ci.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. J'avais émis un avis de sagesse à l'Assemblée nationale sur l'amendement de M. Valletoux visant à mieux taxer ce que l'on appelle les prémix.
Je profite de cette occasion pour rappeler que l'alcool est interdit aux mineurs. Nous avons intérêt à le faire savoir le plus largement possible : il est interdit à la vente, interdit à la consommation. Nous avons un travail de prévention à poursuivre et à renforcer de façon très importante.
Je demande le retrait de l'amendement n° 1756 rectifié quater de M. Jomier au profit de l'amendement n° 619 de Mme la rapporteure, sur lequel je m'en remets à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour explication de vote.
Mme Florence Lassarade. Il est évident que ces produits de type « vody » sont très néfastes pour la jeunesse et qu'ils constituent une façon d'entrer dans l'alcoolisme.
Néanmoins, je crains que, dans nos départements, certains produits de nos activités économiques traditionnelles ne risquent d'être affectés par cette mesure. Je songe ainsi au Lillet, excellent apéritif girondin : entrerait-il dans le champ de cette disposition ? Si c'était le cas, ce serait dramatique pour tout un secteur économique de la Gironde.
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. J'entends bien l'explication de Mme la rapporteure générale, qui a rappelé que l'alcool est déjà taxé d'une autre manière. Mais l'idée de surtaxer ces premix n'en est pas moins intéressante…
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. C'est ce que je propose !
Mme Anne Souyris. … car ce serait reconnaître ces boissons alcoolisées comme un problème majeur, en particulier pour les jeunes.
Certes, leur vente est interdite aux mineurs. De fait, ce sont peut-être des adultes qui les achètent, mais aussi des jeunes dans les supermarchés. En attendant de disposer de mesures efficaces pour l'empêcher – le problème se pose aussi d'ailleurs pour beaucoup d'autres produits addictifs –, il faut à tout le moins, sur le modèle de la loi Évin, s'intéresser au conditionnement et à tous les moyens de limiter l'attrait de ces produits. Les surtaxer est nécessaire, car il est indéniable qu'ils sont conçus pour les jeunes : on leur offre un shoot à 25 degrés, mais avec beaucoup de sucre pour que l'alcool ne se sente pas. C'est dans cet esprit que les industriels les conçoivent. C'est pourquoi les surtaxer, au-delà du taux de 18 % prévu par ailleurs, ne serait pas une aberration.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Il n'a échappé à personne que nous avons les mêmes buts, madame la rapporteure générale, mais nous ne visons pas tout à fait les mêmes boissons, puisque votre proposition n'inclut pas les Vodys qui ne contiennent pas de caféine, de taurine, ou de guaranine.
En fait, vous défendez la même chose que Frédéric Valletoux à l'Assemblée nationale : de fait, son amendement, devenu l'article 11 bis, limite le champ de la mesure aux boissons comprenant des substances énergisantes. Or il existe des Vodys qui, même s'ils ne contiennent pas de caféine, de taurine, ou de guaranine, n'en titrent pas moins 25 degrés ; pourtant, ils ne seraient pas concernés par la taxation proposée. Il y a là une incohérence.
Votre amendement tend à améliorer le dispositif en lui apportant quelques précisions, je vous en donne acte, mais il n'en reste pas moins que vous en restreignez l'application, en excluant du champ de la taxe, par exemple, des Vodys à 23 degrés sans taurine, caféine ni guaranine.
J'apprécierais donc une rectification en ce sens de votre amendement, à moins que cette restriction du champ de la taxe ne soit votre intention, auquel cas je vous invite à le dire clairement, afin que nous votions en connaissance de cause ; toujours est-il que le périmètre que vous proposez n'est pas satisfaisant.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je répondrai d'abord à Mme Souyris, selon qui je ne voudrais pas taxer ces boissons. Au contraire, je les surtaxe, puisque j'étends la taxation existante jusqu'à 25 degrés d'alcoolémie, soit beaucoup plus que ce qui existe aujourd'hui.
Concernant les boissons, il faut effectivement cumuler l'alcoolémie et les produits énergisants. Nous sommes donc d'accord quant à la nécessité de prendre en compte ces deux éléments.
M. Bernard Jomier. Mais ce n'est pas le cas dans votre amendement !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Vous reconnaissez vous-même, monsieur Jomier, que l'amendement de la commission tend à améliorer le dispositif de l'article. Nous demandons que la liste des substances concernées soit renvoyée à un arrêté, car nous constatons que de nouveaux produits énergisants apparaissent presque tous les jours. Si nous énumérions nommément dans la loi les produits concernés, nous nous retrouverions vite coincés, car les industriels inventeraient autre chose. C'est pourquoi nous renvoyons cette liste à un arrêté ministériel.
Enfin, madame Lassarade, pour répondre à votre interrogation sur les boissons issues de la région bordelaise, les boissons que nous visons sont les alcools forts mélangés à des produits énergisants. Il ne me semble pas que les boissons auxquelles vous faisiez allusion soient des productions de ce type.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Pour que tout le monde comprenne bien, il existe deux types de Vody : ceux qui comportent essentiellement de l'alcool à 25 degrés, et ceux qui lui adjoignent des produits excitants et énergisants, comme de la caféine ou de la taurine.
Le dispositif de l'article 11 bis, tel qu'il a été rédigé à l'Assemblée nationale par M. Valletoux, exclut du champ de cette taxe les Vody ne contenant pas de produits excitants. Par conséquent, les Vody qui ne sont composés que d'alcool à 25 degrés ne sont pas visés par ce texte. Madame la rapporteure générale, vous améliorez certes le dispositif, mais d'une façon strictement technique, sans en étendre le champ. C'est là le problème que nous pointons.
L'amendement de M. Jomier, que nous sommes nombreux à avoir cosignés, vise pour sa part à réintroduire dans le champ et l'assiette de la taxe les Vody comportant exclusivement de l'alcool. En effet, il n'est pas normal que ces derniers ne subissent pas la même taxation que celle que nous avons mise en place pour les prémix.
Nous voulons donc inclure tous les Vody dans la catégorie des prémix. Pardonnez-moi, mes chers collègues, d'utiliser tous ces mots qui peuvent paraître un peu abscons quand on a passé 22 ans, ce qui s'explique puisqu'il s'agit de l'alcool des jeunes, du produit d'appel par lequel les industriels les appâtent. Les gamins ont du mal à boire directement un certain nombre d'alcools forts, mais l'adjonction de différents produits sucrés en fait des boissons bien plus faciles à consommer.
Nous défendons donc l'amendement de Bernard Jomier, soutenu par nombre de parlementaires socialistes, car il s'agit de la proposition la plus juste en matière de santé publique : il faut lutter contre l'accoutumance des mômes à l'alcool !
M. Alain Joyandet. C'est pas faux…
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1756 rectifié quater.
(L'amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 11 bis est ainsi rédigé et l'amendement n° 619 n'a plus d'objet.
Article 11 ter (nouveau)
I. – La section III du chapitre II du titre III de la deuxième partie du livre Ier du code général des impôts est complétée par un article 1613 bis A ainsi rédigé :
« Art. 1613 bis A. – I. – Les metteurs sur le marché de produits entrant dans le champ d'application du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, modifiant les règlements (CE) n° 1924/2006 et (CE) n° 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 87/250/CEE de la Commission, la directive 90/496/CEE du Conseil, la directive 1999/10/CE de la Commission, la directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2002/67/CE et 2008/5/CE de la Commission et le règlement (CE) n° 608/2004 de la Commission sont assujettis à une contribution assise sur le chiffre d'affaires hors taxes. Son taux est de 5 %.
« Les metteurs sur le marché de produits bénéficiant d'un des signes nationaux ou européens de qualité dont la liste est définie par décret ne sont pas assujettis à cette contribution.
« Cette contribution est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d'affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes.
« II. – Le produit de cette contribution est affecté à la Caisse nationale de l'assurance maladie.
« III. – La contribution prévue au I du présent article n'est pas due lorsque l'entreprise respecte les obligations prévues à l'article L. 3232-8 du code de la santé publique. »
II. – Le premier alinéa de l'article L. 3232-8 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après la dernière occurrence du mot : « Commission, », sont insérés les mots : « à l'exception des produits bénéficiant d'un signe national ou européen de qualité dont la liste est définie par décret, » ;
2° Les mots : « peut être accompagnée » sont remplacés par les mots : « s'accompagne ».
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques et d'un sous-amendement.
L'amendement n° 15 rectifié est présenté par MM. Pellevat, Bacci et Bonhomme, Mme Bourcier, MM. Chasseing, Chatillon et Chevalier, Mmes L. Darcos et Dumont, M. Grand, Mmes Gosselin, Jacquemet et Joseph, M. Laménie, Mme de La Provôté, M. D. Laurent, Mme Lermytte, MM. H. Leroy, Levi, V. Louault et Médevielle, Mme Noël, MM. Panunzi et Parigi, Mme Perrot, MM. Pillefer, Pointereau, Sido et Rochette, Mmes Romagny et Saint-Pé et M. Verzelen.
L'amendement n° 1344 rectifié quater est présenté par Mme Housseau, M. Dhersin, Mme Vermeillet, MM. Mizzon et Courtial, Mmes Billon et Guidez, MM. Delcros et Fargeot, Mme Patru, MM. J.M. Arnaud et Canévet, Mme Sollogoub, M. Chauvet, Mme Morin-Desailly et MM. Bleunven, Cambier, Capo-Canellas, Duffourg et L. Hervé.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Après le mot :
qualité
insérer les mots :
et d'origine, notamment d'une appellation d'origine protégée ou d'une indication géographique protégée,
La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l'amendement n° 15 rectifié.
M. Daniel Chasseing. Le présent amendement de mon collègue Cyril Pellevat vise à inclure explicitement les produits bénéficiant d'une indication géographique protégée (IGP) ou d'une appellation d'origine protégée (AOP) parmi les produits exclus de la contribution instaurée par cet article.
En effet, tous les produits bénéficiant de signes officiels d'identification de la qualité et de l'origine (Siqo), qu'ils relèvent d'une AOP ou d'une IGP, partagent les mêmes fondements : un ancrage territorial fort, des cahiers des charges précis et contraignants, et une garantie de traçabilité et de qualité pour le consommateur.
Or le système d'information nutritionnelle simplifié, de type Nutri-score, pris en référence dans l'article L. 3232-8 du code de la santé publique, constitue un outil inadapté et réducteur pour ces produits traditionnels.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour présenter l'amendement n° 1344 rectifié quater.
Mme Nadia Sollogoub. Cet amendement de ma collègue Marie-Lise Housseau vise à exempter de la contribution liée au Nutri-score les metteurs sur le marché de produits bénéficiant d'un des signes officiels d'identification de la qualité et de l'origine (Siqo) dont la liste sera fixée par décret, en particulier les AOP et les IGP.
Les Siqo reposent sur des cahiers des charges stricts, homologués et contrôlés, qui fixent précisément les méthodes de production, la composition du produit concerné, les pratiques d'élevage ou de fabrication, ainsi que l'ancrage territorial.
Par leur nature même, ces cahiers des charges ne permettent aucune reformulation destinée à améliorer une éventuelle notation nutritionnelle, si bien qu'imposer uniformément l'affichage du Nutri-score de ces produits engendrerait une rupture d'égalité entre opérateurs. En outre, cela entrerait en contradiction avec les principes du règlement européen, lequel prévoit un étiquetage nutritionnel simplifié strictement facultatif.
Par ailleurs, le Nutri-score évalue les denrées sur la base de portions de 100 grammes ou 100 millilitres sans tenir compte des portions réellement consommées ni du degré de transformation des produits. De nombreux produits sous Siqo – fromages et salaisons, huiles et beurres d'appellation – se trouvent dès lors artificiellement pénalisés alors même qu'ils sont peu transformés, fabriqués à partir d'ingrédients simples, sans additifs, et s'inscrivent dans des pratiques agricoles et artisanales durables, respectueuses des terroirs et de la biodiversité.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1802 rectifié bis, présenté par MM. Anglars et Longeot, Mme Canayer, M. Menonville, Mmes Antoine et Gosselin, M. Chevalier, Mme Berthet, MM. Chasseing et Cambier, Mme Dumont, M. Margueritte, Mme Belrhiti, MM. Brisson et A. Marc, Mme Saint-Pé, MM. Genet, Pernot et Houpert, Mme Billon, MM. Panunzi et Wattebled, Mme Jacquemet, MM. Cambon, Duffourg et Gremillet, Mmes Lassarade et Primas, MM. Parigi, Belin, Saury et Lefèvre et Mmes Lermytte, Dumas, Herzog et Valente Le Hir, est ainsi libellé :
Amendement n° 15, alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que les produits alimentaires bénéficiant du qualificatif « fermier » ou des mentions « produits de la ferme » ou « produit à la ferme » en application de l'article L. 641-19 du code rural et de la pêche maritime et tout produit brut exempté de l'obligation d'étiquetage nutritionnel, conformément au règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, modifiant les règlements (CE) no 1924/2006 et (CE) no 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 87/250/CEE de la Commission, la directive 90/496/CEE du Conseil, la directive 1999/10/CE de la Commission, la directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2002/67/CE et 2008/5/CE de la Commission et le règlement (CE) no 608/2004 de la Commission,
La parole est à Mme Béatrice Gosselin.
Mme Béatrice Gosselin. Le présent sous-amendement, déposé par M. Jean-Claude Anglars, vise à rendre plus explicites les dispositions de l'article 11 ter et des amendements identiques tendant déjà à le préciser, afin de tenir compte des spécificités des produits traditionnels à protéger.
Il convient en effet d'exclure explicitement de l'obligation d'apposition du Nutri-score les produits alimentaires sous signe officiel de qualité comme les AOP et les IGP, mais aussi les appellations d'origine contrôlée (AOC), les spécialités traditionnelles garanties (STG), les produits sous label rouge, ceux qui bénéficient d'une mention valorisante « produit fermier », « produits de la ferme », ou « produit à la ferme », les produits bruts au sens du règlement européen, ainsi que les « denrées alimentaires présentant des caractéristiques traditionnelles » reconnues par l'Union européenne, tous produits dont la liste exacte sera définie par voie réglementaire.
Les signes officiels d'identification de la qualité et de l'origine ont pour vocation de garantir des savoir-faire ancestraux, des recettes exigeantes et un ancrage territorial fort. C'est une part essentielle de notre patrimoine culturel et gastronomique. L'agriculture française est également marquée par une production importante de ces produits traditionnels hors labels.
Devant la nécessité de protéger la spécificité de produits aux recettes simples, fabriqués selon des cahiers des charges stricts – des produits parfois inchangés depuis des siècles, reconnus pour leur excellence gustative et leur ancrage territorial –, il apparaît essentiel de les exempter de cette obligation d'affichage, qui deviendrait discriminante.
Nous reprenons ainsi le dispositif de la proposition de loi de nos collègues Jean-François Longeot et Jean-Claude Anglars.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission est favorable aux deux amendements identiques, mais défavorable au sous-amendement.
Celui-ci tend à aller plus loin que lesdits amendements, en ajoutant aux IGP et AOP notamment les produits portant la mention « fermier » ou « produit de la ferme ». Cette demande peut être considérée comme satisfaite par l'article 11 ter et les amendements identiques que nous venons d'examiner.
J'entends que vous souhaitez énumérer dans la loi certaines mentions de qualité, de manière à exempter les produits ainsi labellisés du champ de la taxe, mais la loi n'a pas vocation à citer tous les labels et qualificatifs des produits qui pourront en être exemptés.
Le dispositif que vous proposez est extrêmement ciblé et renvoie à diverses dispositions nationales et européennes, ce qui rend son imputation dans la loi assez malaisée. Sans faire de juridisme excessif, je dirais que la loi doit être suffisamment précise, mais sans excès. Nous devons être garants de sa clarté. C'est ce qui a motivé l'avis défavorable de la commission.
J'y insiste : la rédaction actuelle de l'article 11 ter permet de répondre à votre préoccupation. Divers labels auront vocation à être exclus du champ de la taxe, pour protéger certaines filières locales. Ces labels seront précisés par voie réglementaire, n'ayant pas vocation à tous figurer dans la loi.
Je ne peux donc que vous inviter à retirer ce sous-amendement, chère collègue.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l'article 11 ter et appelle à ne pas le voter. En effet, l'obligation d'affichage du Nutri-score est incompatible avec le droit européen.
Pour autant, le Gouvernement estime les amendements identiques et le sous-amendement satisfaits. C'est pourquoi il en demande le retrait.
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Je nous félicite que le débat parlementaire nous ait permis d'avancer sur le Nutri-score. J'ai d'ailleurs défendu un amendement dont l'objet était similaire à la disposition contenue à l'article 11 ter à l'occasion d'autres débats.
En effet, plusieurs études françaises et internationales ont démontré la pertinence du classement des aliments par le Nutri-score au regard de son impact sur la santé des consommateurs. D'ailleurs, le rapport sénatorial d'information sur la fiscalité comportementale dans le domaine de la santé recommande un Nutri-score obligatoire à l'échelon européen. À défaut d'une nouvelle réglementation européenne, nous avons été nombreux à proposer un mécanisme national d'incitation.
C'est chose faite avec cet article. C'est pourquoi nous le voterons.
Mme Pascale Gruny. Très bien !
Mme Anne Souyris. Les amendements identiques et le sous-amendement ont des objets très intéressants, parce qu'ils concernent les labels. Si une telle de reconnaissance est importante d'un point de vue territorial, elle est sans fondement en matière de santé publique ; or il est extrêmement important de distinguer, pour les produits, la présence de ces mentions des vertus nutritionnelles.
C'est pourquoi nous ne voterons ni les amendements identiques ni le sous-amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Béatrice Gosselin, pour explication de vote.
Mme Béatrice Gosselin. Je préfère maintenir ce sous-amendement, dont l'adoption permettra d'apporter des précisions loin d'être inutiles.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je remercie la rapporteure générale de ses propos.
J'espère pouvoir me féliciter que le Sénat, après l'Assemblée nationale, approuve la généralisation du Nutri-score, qui est un outil simple réclamé par les Français. Il ne s'agit ni d'une taxe ni d'une interdiction : il délivre une information transparente, dont il est largement prouvé qu'elle modifie les comportements dans le bon sens, notamment quand il s'agit de l'alimentation des enfants. Par conséquent, il faut généraliser le Nutri-score, afin qu'il devienne un véritable outil de santé publique.
Madame la ministre, je tiens à répondre à votre argument sur le droit européen. Je me souviens de l'une de vos prédécesseurs qui, en 2018, affirmait que nous ne pouvions pas voter l'obligation pour les entreprises pharmaceutiques de constituer un stock de sécurité de médicaments, parce que c'était contraire au droit européen. Vous connaissez la suite...
Vous vous abritez trop souvent derrière le droit européen quand vous le craignez. Si la Commission européenne estime que la France se met en infraction, elle la poursuivra devant le Tribunal de l'Union européenne. À ce propos, je rappelle le précédent très éclairant du dioxyde de titane : le Tribunal de l'Union européenne a estimé que la France était dans son droit en l'interdisant, puisque le traité prévoit que, pour des raisons de santé publique, il puisse être dérogé au principe de la libre circulation des marchandises. Qui prétendra que le surpoids et la malbouffe des enfants et des adultes ne sont pas un problème de santé publique majeur en Europe ?
Il n'y a donc pas à trembler face à cet argument.
J'en viens aux amendements identiques et au sous-amendement. S'il faut lever des craintes concernant un certain nombre de produits du terroir, faisons-le. C'est pourquoi, même si je pense très sincèrement que ces craintes ne sont pas fondées, je voterai les amendements identiques. En revanche, je ne voterai pas le sous-amendement, dont l'objet me paraît trop flou.
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote.
Mme Frédérique Espagnac. Mon intervention va dans le même sens.
Au nom des élus de montagne, je soutiens les amendements identiques de Cyril Pellevat et Marie-Lise Housseau. Il est essentiel de concilier l'information nutritionnelle utile à tous les consommateurs et la préservation d'une filière traditionnelle de qualité. Il s'agit d'éviter que les produits bénéficiant d'un signe officiel de qualité et d'origine ne soient pénalisés par un dispositif générique et qu'il ne soit pas tenu compte de leur singularité.
Il s'agit non pas d'entraver l'information des consommateurs, mais au contraire de garantir que l'information nutritionnelle soit juste et reconnaisse la valeur culturelle, territoriale et artisanale de ces produits En proposant une adaptation, nous protégeons un patrimoine gastronomique, des emplois dans les territoires et nous évitons les effets pervers d'une réponse mécanique du Nutri-score, qui pourrait marginaliser des produits de terroir.
Il est de notre responsabilité d'équilibrer santé publique et filières de qualité. En adoptant cette disposition, nous affirmons qu'interdire de prévoir des exceptions ne sert ni les consommateurs ni les territoires.
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.
Mme Frédérique Puissat. Ma voix sera dissonante…
Je rappelle que cet article prévoit une taxe de 5 % du chiffre d'affaires pour les entreprises qui n'appliqueraient pas le Nutri-score. Cela ne signifie pas que l'on est pour ou contre cet outil.
Cet article a été introduit à l'Assemblée nationale sans concertation, bien entendu, avec les branches ni discussion avec les entreprises. Mme Primas m'informe que, pour un certain nombre de producteurs, il est impossible de mettre en place le Nutri-score parce que c'est trop compliqué.
En résumé, non seulement cet article n'est pas complet et n'a pas été fait l'objet d'une concertation, mais il n'est peut-être même pas conforme au droit européen, à en croire Mme la ministre. (Mme la ministre acquiesce.) Preuve en est, un certain nombre d'amendements tendent à le corriger – bien ou mal, peu importe.
Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains votera les amendements identiques et le sous-amendement, mais ne votera pas l'article 11 ter.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Les filières concernées, qui sont des filières d'excellence, ont un poids économique très important.
L'adoption de cet article fragilisera nos territoires. Une taxe de 5 % du chiffre d'affaires n'est pas soutenable pour nos entreprises, qui sont déjà en crise.
Je rappelle que le solde de la balance commerciale agroalimentaire est proche de zéro, alors qu'il était jusqu'à présent en excédent.
Il s'agit de sauvegarder le patrimoine gastronomique en cohérence avec le droit européen – d'après M. Jomier, cela pourrait s'arranger. Selon moi, il faut supprimer la contribution prévue dans cet article.
Les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires voteront en grande majorité contre l'article 11 ter.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. C'est pour des motifs européens, mais également, plus spécifiquement, en raison de la complexité du dispositif pour les PME et les producteurs modestes qui sont nombreux dans le secteur de la gastronomie que le groupe Union Centriste votera également contre cet article. Celui-ci introduit en effet une norme à laquelle certaines entreprises auront beaucoup de mal à s'adapter.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Je voterai cet article et la concrétisation du Nutri-score. Ce dispositif produit des résultats probants. Qui plus est, il est conforme à nos convictions : permettre aux consommateurs d'avoir une information au moment où ils s'orientent vers un produit.
Bernard Jomier a rappelé que cet outil visait les produits industriels transformés, pour lesquels il a été spécialement conçu.
Je tiens à souligner l'intérêt de cet article que je soutiens, tout comme je soutiens les amendements identiques qui visent à tenir compte de la spécificité de nos produits du terroir bénéficiant d'un label. Je n'ai pas besoin de préciser qu'en Normandie cela concerne surtout les fromages... (Sourires.)
Nous sommes tout à fait en phase avec cet objectif d'information et de transparence qui préserve également nos savoir-faire.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je rappelle comment fonctionne le Nutri-score.
Au supermarché, face à une gamme de produits, par exemple le rayon des madeleines, dont on sait à quel point il est vaste, il s'agit d'orienter les consommateurs vers les marques qui ont réalisé un effort pour atteindre un Nutri-score plus acceptable, puisqu'il s'agit d'une note synthétique. Au Chili où je me suis rendue, il existe quatre marqueurs obligatoires, notamment le sucre et les glucides.
Si, comme moi, vous adorez le roquefort, vous savez qu'il est noté E, mais c'est le cas pour tous les bleus ! Pour les marques de madeleines, c'est pareil : elles sont presque toutes notées D. Pour certains produits, toutes les marques ont la même note. Cette obligation est donc sans incidence.
Par conséquent, le Nutri-score n'a pas pour but d'empêcher de prendre un produit – on sait d'ailleurs de façon intuitive qu'il est gras, sucré, etc. –, mais il offre un comparatif qui permet de favoriser sa santé personnelle, plus généralement la santé publique, et de faire le meilleur choix.
Aujourd'hui, l'absence de Nutri-score sur un produit est très mal perçue par les consommateurs : elle est le signe que le produit en question est sans doute très mauvais. Par conséquent, ils préfèrent se tourner vers les produits qui affichent un Nutri-score, quand bien même il n'est pas bon, considérant que c'est une transparence et une information qui leur sont dues.
Quand on ne peut pas comparer les Nutri-score, on achètera toujours les produits labellisés.
C'est méconnaître le fonctionnement du Nutri-score que de croire que cela empêchera l'achat de certains produits.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Le sénateur de Camembert ne peut rester en dehors de ce débat. (Exclamations amusées.) Ce n'est pas possible.
Je soutiens évidemment l'amendement défendu par notre collègue de Normandie.
Je rappelle que l'alinéa 3 de cet article prévoit que « les metteurs sur le marché de produits bénéficiant d'un des signes nationaux ou européens de qualité – le camembert ! (Sourires.) – dont la liste est définie par décret ne sont pas assujettis à cette contribution ». Il faudra donc être attentif à ce décret.
Pour ma part, je voterai les amendements identiques, mais je serai très prudente sur l'article 11 ter, en attendant le sort qui lui sera réservé au cours de la navette parlementaire.
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Je m'exprime à titre personnel.
Nous parlons souvent – peut-être pas assez – de prévention. Le Nutri-score est un outil tout simple d'information et de prévention, permettant à chacun d'avoir la main sur ce qu'il s'apprête à acheter. C'est pourquoi je trouve cet article intéressant.
Le groupe RDPI votera les amendements identiques. Pour l'article 11 ter, c'est une autre histoire…
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Malgré l'heure avancée, ce sujet mérite que l'on s'y arrête, d'autant qu'il faut certainement lever des malentendus et des incompréhensions.
D'après ce que j'ai compris du Nutri-score – peut-être la ministre pourrait-elle le préciser –, le camembert, le roquefort et autres ne seraient pas inclus dans le champ du dispositif, parce qu'ils bénéficient d'une appellation de type AOP.
Mme Pascale Gruny. Et le maroilles ? (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Rossignol. En revanche, il faut penser aux parents, qui entendent des tas d'injonctions sur le surpoids, les risques d'obésité, etc. Tous ne sont pas aussi bien informés que nous pourrions l'être. Pour y remédier, ils disposent du Nutri-score, qui est un outil facile à lire, avec des couleurs.
À en lire les sondages, la généralisation du Nutri-score est souhaitée par 85 % des Français, qui ont compris qu'ils avaient besoin d'être aidés. C'est ce que fait le Nutri-score.
Si nous voulons être cohérents avec ce que nous affirmons à l'occasion de l'examen de ce projet de financement de la sécurité sociale et prendre le tournant de la prévention, cela passe par des outils nouveaux, comme le Nutri-score.
Par conséquent, on ne peut pas dans le même temps évoquer le tournant de la prévention et freiner au moment d'en voter les outils.
Nous parlons également beaucoup de politique familiale et de soutien à la parentalité. Le Nutri-score est un outil de soutien à la parentalité. C'est à ce titre que j'espère vraiment que l'article 11 ter sera adopté.
Mme la présidente. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour explication de vote.
Mme Colombe Brossel. Pendant que j'écoutais nos intéressants débats sur l'éventuelle exclusion d'un certain nombre de produits du Nutri-score, je ne pouvais pas m'empêcher de penser à la nocivité des produits transformés dans notre alimentation, plus précisément dans celle de nos enfants. Il en a d'ailleurs été question dans quelques articles de presse cette semaine.
Que celui qui n'a jamais mis des nuggets de poulet ou des cordons bleus dans son frigo me jette la première pierre. Je plaide coupable ce soir devant vous. (Exclamations amusées.) J'entends la réprobation dans cet hémicycle, mais, enfin, il faut bien survivre ! (Sourires.)
Mme Sophie Primas. J'adore les cordons bleus ! (Nouveaux sourires.)
Mme Colombe Brossel. On ne peut pas dans le même temps avoir des informations scientifiques sur les dangers de long terme de l'alimentation transformée et se priver de l'outil le plus simple pour accompagner les Français dans un acte de liberté en toute transparence. Nous sommes ici tous attachés à la liberté et à la transparence. Donner aux consommateurs la liberté de choix et celle d'anticiper les conséquences de leur achat et de leur consommation, c'est leur rendre leur pouvoir d'agir au moment où ils remplissent leurs caddies et leur donner la faculté de le faire en ayant en tête les questions de santé publique.
Autant je comprends qu'il puisse y avoir un débat sur l'exclusion d'un certain nombre de produits – c'est légitime –, autant, une fois que ces débats nous auront permis de faire avancer la réflexion, je ne comprendrai pas que nous ne soyons pas d'accord pour acter ensemble cette obligation.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Que l'on soit clair : dans cet hémicycle, tout le monde est favorable à l'information des consommateurs, comme à une information qui donne la liberté de choix. Tout le monde reconnaît l'intérêt du Nutri-score.
Le problème, c'est que cet article crée une taxe !
Martin Lévrier et moi allons vous emmener dans les Yvelines, à la ferme du Loup ravissant, qui fait du pâté,…
M. Martin Lévrier. Elle n'est pas concernée !
Mme Sophie Primas. … ou à la pisciculture de Villette, qui fait des rillettes de saumon.
M. Martin Lévrier. Elle n'est pas concernée non plus !
Mme Sophie Primas. Toutes deux fabriquent des produits dont le volume ne leur permet pas de mettre en place le Nutri-score. C'est pourquoi elles devront payer 5 % de leur chiffre d'affaires !
Alors même qu'on les exhorte à privilégier les circuits courts, pour faire de la marge et améliorer et consolider le marché agricole local, on leur explique que, comme elles ne sont pas de taille suffisante, elles devront payer cette taxe !
Pour ma part, je voterai les amendements identiques et le sous-amendement, au nom de la ferme du Loup ravissant, mais je ne voterai pas cet article. (Bravo ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. Je fais miens les propos de Mme Primas.
Mes chers collègues, vous nous parlez de consommateurs qui font leurs achats dans les supermarchés. Dans nos territoires, nos paysans essayent de s'en sortir, justement en faisant venir chez eux les consommateurs pour leur montrer comment ils produisent, comment consommer autrement et pour leur faire découvrir des produits de qualité.
J'ai bien compris qu'il s'agissait soit de rejeter cet article, soit de l'adopter en prévoyant une dérogation élargie.
Pourquoi compliquer la vie des producteurs – essentiellement de fromage de chèvre dans mon territoire – qui œuvrent en faveur de la qualité en exigeant d'eux qu'ils affichent un Nutri-score ? Ce n'est pas possible !
On demande aux consommateurs de se rendre directement dans les fermes pour faire survivre nos petits producteurs. Pourtant, cette mesure est en totale contradiction avec l'élan que nous essayons d'impulser.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.
M. Laurent Somon. Il y a pour moi un hiatus.
Le Nutri-score délivre une information, quel que soit le produit. De ce fait, même les aliments de petits producteurs devraient afficher un Nutri-score et, pour des raisons qualitatives, indiquer s'ils sont plutôt gras, plutôt sucrés, etc.
Comme disait mon professeur d'alimentation quand j'étais à l'école vétérinaire, tout est question de dose. Un aliment classé D n'est pas forcément mauvais, s'il est consommé en petite quantité. Évidemment, cette information est importante, puisqu'elle éclaire le choix des consommateurs, mais il faut la proposer pour tous les produits ! Peut-on avaler dix kilogrammes de camembert matin, midi et soir sous prétexte qu'il n'y a pas de Nutri-score ? Je ne pense pas.
À mon avis, je le répète, l'information doit concerner tous les produits. Elle devient un facteur de discrimination, voire de commercialisation, puisque cela permet d'indiquer que le produit est bon s'il est noté A. Le produit noté D l'est tout autant à condition que l'on n'en mange pas cinq kilogrammes.
L'information, oui ; la taxation, non. (Marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La vie de rapporteure générale de la commission des affaires sociales n'est pas très facile – et sur cet article, moins encore. Même si l'obstacle ne me fait pas peur, j'ai l'impression de danser le tango argentin ! (Sourires.)
Évidemment, je suis favorable au Nutri-score, qui est un moyen d'éduquer sur les produits. Toutefois, en tant que rapporteure générale, j'ai souligné en commission que cet article posait deux problèmes : d'une part, la création d'une taxe qui s'applique si le fabricant ou le producteur ne respecte pas l'affichage du Nutri-score ; d'autre part, l'anticonventionnalité. Malheureusement, j'ai été battue et cet article a été adopté.
Mme Frédérique Puissat. Quelle erreur !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Voilà qui explique les avis favorables que j'ai émis au nom de la commission sur les amendements identiques. En revanche, je réitère l'avis défavorable sur le sous-amendement : dresser une liste nous enferme. Je conseille donc son rejet.
Pour le reste, faites au mieux, mes chers collègues !
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1802 rectifié bis.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 15 rectifié et 1344 rectifié quater, modifiés.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote sur l'article.
M. Bernard Jomier. Certains des arguments avancés sont intéressants et je comprends les craintes qui sont exprimées.
Il n'est pas question de demander à un fermier qui fabrique du pâté d'en calculer le Nutri-score ! Il est tout à fait possible de l'en exempter : c'était déjà le cas avec les amendements identiques, cela le sera encore plus maintenant que nous avons adopté le sous-amendement. Il n'y a donc aucun problème, puisque c'est prévu. Madame la rapporteure générale a en revanche raison, il n'est pas utile d'énumérer toutes les exemptions dans la loi.
Le Nutri-score n'a pas vocation à viser les légumes ! Imagine-t-on calculer le Nutri-score des poireaux, pour ne prendre que cet exemple ? Ce n'est pas l'objectif !
Il s'agit bien d'exempter les IGP, les AOP ou autres pour les protéger. J'ai bien entendu les craintes concernant les produits fabriqués en petites quantités à la ferme et vendus de manière artisanale. Ils pourront être exclus du dispositif. Ces craintes ne sont donc pas fondées.
On ne va pas tourner autour du pot, vous avez bien compris que le Nutri-score visait l'industrie agroalimentaire qui met sur le marché des produits ultratransformés. C'est elle qui, depuis la création du Nutri-score, fait pression pour que sa généralisation n'aboutisse pas et que l'information des consommateurs, qui permet une véritable transparence réclamée et efficiente en termes de santé publique, ne devienne pas obligatoire.
Les comportements ont changé. À la suite de la modification du mode de calcul du Nutri-score, une marque de céréales pour enfants très populaire, que parents et enfants connaissent et qui est la plus consommée, a dû en revoir la composition pour les rendre moins sucrées et moins grasses !
Voilà les objectifs que nous partageons. C'est cela le virage de la prévention.
Il a fallu créer une taxe pour raccrocher cette mesure au projet de financement de la sécurité sociale. S'il faut en réduire le taux lors de la commission mixte paritaire, il n'y a pas de problème. Si nous ne votons pas cet article, en revanche, il n'y a plus rien.
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote sur l'article.
Mme Frédérique Espagnac. Certains peuvent à juste titre s'interroger sur les circuits courts.
Contrairement à Bernard Jomier, je ne pense pas que l'adoption des amendements identiques suffise à protéger les produits transformés fermiers. Paradoxalement, c'est le cas du sous-amendement. De ce point de vue, je tiens à rassurer : les produits labellisés étaient déjà protégés, les produits fermiers que l'on trouve sur les marchés en circuit court le seront aujourd'hui grâce à ce vote.
Cela vient d'être rappelé, c'est bien l'industrie agroalimentaire qui est visée ; nous protégeons les produits fermiers et leurs producteurs.
Les produits labellisés et les produits fermiers en circuit court seront donc exemptés de la taxe. Il est important de ne pas laisser croire que les produits AOP, IGP et fermiers ne sont pas de bonne qualité parce qu'ils sont gras.
Je rappelle que l'AOP répond à un cahier des charges extrêmement strict, qui suppose souvent dix ans de travail. C'est donc, je tenais à le dire, un gage de très bonne qualité au regard de la santé publique.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je veux le redire, mesdames, messieurs les sénateurs, voter contre cet article ne signifie pas que l'on est contre le Nutri-score, contre la prévention et contre l'information. Je regrette que la Commission européenne n'ait pas voulu récemment avancer sur la création d'un Nutri-score européen, car cela aurait permis de répondre à la question que vous soulevez et d'envisager éventuellement, pour le coup, une obligation.
Je maintiens qu'il existe un véritable risque d'incompatibilité avec le droit européen. Je comprends très bien les raisons qui vous ont amenés à vouloir exempter les AOP et l'ensemble des produits dont nous avons parlé, qui sont source de plaisir et qui font vivre nos territoires.
Malgré tout, en cas de contentieux, la France serait placée devant ses contradictions : alors qu'elle invoquerait l'argument de la prévention et des motifs de santé publique, on lui opposerait le fait d'avoir exempté de l'obligation du Nutri-score un certain nombre de produits.
Il est à mon sens essentiel de permettre au consommateur de disposer d'une telle information, afin qu'il puisse choisir, parmi les produits transformés, ceux sur lesquels figurent le Nutri-score. Ce serait un bon levier pour inciter beaucoup plus fortement les industriels à agir.
Je le répète, il y a un risque à voter cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote su l'article. (Murmures.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Rassurez-vous, madame la présidente, je ne serai pas longue ! (Sourires.)
Heureusement que Mme la ministre de la santé n'a qu'une objection de nature juridique à formuler, à savoir la compatibilité avec le droit européen. De ce point de vue, elle indique indirectement qu'en tant que ministre de la santé elle ne s'oppose pas à la mesure proposée.
Il va falloir très vite penser à faire une foire aux questions sur le Nutri-score pour s'y retrouver. S'il ne s'applique pas aux fruits et légumes et ne concerne pas les produits du marché, sans doute faut-il tout de même un support informationnel sur les produits emballés de l'agroalimentaire.
Je voulais surtout dire que la seule objection qui soit entendable, et que nous ne retenons pas, est celle de la compatibilité avec le droit européen.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 11 ter, modifié.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 40 :
| Nombre de votants | 344 |
| Nombre de suffrages exprimés | 329 |
| Pour l'adoption | 117 |
| Contre | 212 |
Le Sénat n'a pas adopté.
5
Mise au point au sujet de votes
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Lors du scrutin n° 37 sur l'amendement n° 606 tendant à supprimer l'article 9 bis du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, le groupe RDPI souhaitait voter contre.
Lors du scrutin n° 38 sur les amendements identiques nos 610 et 1005 tendant à supprimer l'article 9 septies de ce même projet de loi, ma collègue Nadège Havet souhaitait voter contre.
Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point. Elle figurera dans l'analyse politique des scrutins concernés.
La parole est à M. le vice-président de la commission.
M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Je souhaite simplement rappeler à mes collègues que la commission se réunira à la suspension dans la salle 213.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures dix.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures quarante,
....................................................................................................
(À suivre)