Table des matières
- Mardi 5 novembre 2002
- Mercredi 6 novembre 2002
- PLFSS pour 2003 - Auditions
- Audition de MM. François Logerot, Premier président, Bernard Cieutat, président de la 6e chambre, et Denis Morin, rapporteur général, sur le rapport annuel de la Cour des comptes consacré à l'application des lois de financement de la sécurité sociale
- Audition de MM. Michel Laroque, président, et Jacques Lenain, directeur du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC)
- Droit civil - Médecine - Responsabilité civile médicale - Examen du rapport
- Jeudi 7 novembre 2002
Mardi 5 novembre 2002
- Présidence de M. Nicolas About, président -
PLFSS pour 2003 - Audition de MM. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, Christian Jacob, ministre délégué à la famille et de Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées
La commission a procédé à l'audition de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. Le ministre était accompagné de M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille et de Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées.
M. Jean-François Mattei a tout d'abord constaté que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 constituait, du fait de la grande brièveté des délais dont avait disposé le Gouvernement pour le préparer, un texte de transition. Il a admis que le texte portait, à ce titre, les traces du passé, mais qu'il définissait également les voies du futur. Il a affirmé que la situation laissée par le gouvernement précédent était dégradée ; il a ainsi constaté qu'aucune réforme de structure n'avait été menée en quatre ans, que les professionnels de santé étaient désemparés, et que l'action publique avait été gravement décrédibilisée par le dépassement systématique de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM).
Il a déploré la rupture intervenue dans la gestion paritaire de la sécurité sociale et la dérive très inquiétante présentée par les comptes sociaux, le régime général devant afficher un déficit de l'ordre de 3 à 4 milliards d'euros. Il a d'ailleurs constaté que le départ en retraite des classes creuses de la seconde guerre mondiale minore les dépenses de la branche vieillesse, permettant ainsi de contenir le déficit du régime général.
Concernant l'assurance maladie, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a rappelé que l'ensemble des gouvernements français avaient dû affronter, à l'instar de leurs homologues étrangers, une augmentation tendancielle des dépenses de santé supérieure à 7 % par an. Il a néanmoins regretté que la situation française figure parmi les plus compromises, du fait de la mise en place des 35 heures qui, pour la sécurité sociale, représentaient un surcoût de dépense de 3,4 milliards d'euros. Il a souligné que, si l'on continuait sur la même tendance, le régime général présenterait un déficit de 6 milliards d'euros pour 2003, l'assurance maladie affichant, pour sa part, un déficit de 10 milliards d'euros. Il a, en conséquence, rappelé la nécessité de demeurer modeste face aux difficultés et, afin de résoudre ces dernières, de rétablir le dialogue avec les professionnels de santé.
Il a ensuite déclaré que le projet de loi de financement de la sécurité sociale était fondé sur deux piliers complémentaires, le premier participant d'une démarche de vérité, le second insistant sur le principe de la responsabilité partagée.
Concernant la recherche de la vérité, il a constaté, en premier lieu, que l'affichage d'un ONDAM en progression de 5,3 % pour 2003, ne relevait pas d'un calcul fondé sur des seuls critères budgétaires mais prenait en compte l'évolution tendancielle des dépenses d'assurance maladie constatée, minorée des économies que les propositions du Gouvernement étaient susceptibles de réaliser. Il s'est ainsi félicité de la crédibilité du chiffre proposé par le Gouvernement.
M. Jean-François Mattei a, en deuxième lieu, admis que l'augmentation des dépenses de santé présentait un caractère structurel dû au vieillissement de la population, à l'amélioration des progrès techniques et aux attentes nouvelles des patients, mais a néanmoins insisté sur la nécessité d'accompagner la croissance de ces dépenses pour éviter tout gaspillage.
Constatant l'absence de certitudes sur l'évolution future du contexte économique français, il a, en troisième lieu, réitéré son intention de présenter un collectif sanitaire et social au printemps si la situation des comptes sociaux le justifiait.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a, en dernier lieu, déploré l'« enchevêtrement invraisemblable » des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, résultant des décisions prises par le Gouvernement précédent, notamment afin d'assurer le financement du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC). Il a néanmoins regretté que le niveau de complexité atteint par les flux financiers rende impossible leur simplification immédiate.
Il s'est néanmoins félicité des éléments de changement que présente, à cet égard, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 : la compensation intégrale par l'Etat des allégements de cotisations sociales, qui se traduit par une recette de 1 milliard d'euros pour la sécurité sociale, le remboursement de la moitié de la dette du FOREC par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) sans augmenter la durée de vie de cette dernière ni le taux de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS). Il s'est enfin réjoui que le projet de loi restaure en faveur de l'assurance maladie la clé initiale de répartition des droits sur les tabacs qui avait été mise à mal pour assurer le financement des 35 heures. Il a affirmé que ces éléments devraient permettre de contenir le déficit du régime général pour 2003 à 3,9 milliards d'euros et celui de l'assurance maladie à 7 milliards d'euros.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a ensuite déclaré que le principe de responsabilité partagée concernait quatre partenaires, l'Etat, les gestionnaires, les professionnels de santé et les patients. Outre le respect de ses engagements, il a souligné le rôle éminent de l'Etat en matière de santé publique que traduisait le dépôt d'un projet de loi de programmation quinquennale de santé publique visant à améliorer la médecine préventive et le dépistage. Il a ensuite indiqué que les gestionnaires devaient, pour leur part, s'affranchir de la maîtrise comptable des dépenses et modifier la mission des contrôles médicaux des caisses, cette dernière devant s'orienter vers le conseil et l'accompagnement des professionnels de santé. Il a, en outre, déploré le caractère absurde et opaque de l'enveloppe globale des établissements de santé et a annoncé le passage à la tarification à l'activité. Il a précisé que les engagements du Président de la République d'investir 6 milliards d'euros dans le secteur hospitalier seraient tenus et que, dès l'année prochaine, 1 milliard d'euros pourrait être engagé à cette fin. Il a enfin rappelé la création, auprès de lui-même, d'une mission permanente d'audit des établissements, chargée d'établir des « bonnes pratiques de gestion ».
Concernant les médecins de ville, il s'est réjoui que le dialogue ait été restauré par l'accord du 5 juin dernier et a rappelé que ces derniers s'étaient engagés à participer à la maîtrise médicalisée des dépenses de santé.
Il a successivement évoqué l'attente des résultats de la mission conduite par M. Dominique Laurent sur la formation continue, les résultats du rapport sur la démographie médicale et le caractère enfin opérationnel des Unions régionales de médecine libérale (URML).
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a insisté sur la véritable « feuille de route » qui a été adressée par le Gouvernement aux industriels du médicament, donnant une priorité à l'innovation en ouvrant 200 millions d'euros de crédits pour que les hôpitaux puissent s'approvisionner en médicaments innovants, en raccourcissant les délais de mise sur le marché et en améliorant la protection des industriels contre la concurrence déloyale au sein de la communauté européenne. Il a en outre mentionné le travail devant être accompli sur le statut d'entreprise innovante.
Mais il a souligné que la recherche de l'efficacité se traduisait également par la création du forfait de remboursement des médicaments appartenant à des groupes génériques et la poursuite du déremboursement de certains médicaments, décidé par Mme Martine Aubry, dès lors que le service médical rendu par ces médicaments se révélait insuffisant. M. Jean-François Mattei a, enfin, rappelé que le patient, déjà sollicité par l'accord conventionnel sur le bon usage des visites à domicile et le forfait générique, se verrait proposer d'autres mesures de responsabilisation, tel le dossier médical partagé.
M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a souhaité présenter trois mesures relatives à la famille, contenues dans les projets de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances pour 2003. Il a rappelé que le prolongement des allocations familiales, en faveur des familles de trois enfants et plus, pour celui de leurs enfants ayant plus de 20 ans, était très attendu par les mouvements familiaux. Il a indiqué que cette mesure était complétée dans le projet de loi de finances par l'augmentation de 6.900 euros à 10.000 euros du plafond de défiscalisation pour les emplois familiaux, cette mesure concernant 1,2 million d'employeurs et par le doublement de 15.000 à 30.000 euros de l'abattement fiscal sur les donations effectuées par des grands-parents à leurs petits-enfants.
Tout en déplorant le maintien du transfert du financement des majorations de pension pour enfants du fonds de solidarité vieillesse vers la CNAF, ce dernier étant imposé par la situation déficitaire du fonds de solidarité vieillesse, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a rappelé que l'excédent de la branche famille demeurait comparable à celui réalisé les années précédentes, et que le remboursement effectué par la CADES améliorait d'autant les ressources de la CNAF. Aussi s'est-il félicité que le projet de loi ait été reçu favorablement par le conseil d'administration de la CNAF.
Il a précisé que la conférence de la famille n'avait pu se tenir en 2002, du fait du calendrier électoral, mais également en raison d'un souhait qu'il avait lui-même formulé de pouvoir préparer plus en amont cette rencontre avec les partenaires concernés. A ce titre, il a rappelé la mise en place de trois groupes de travail auxquels participeraient l'ensemble des tendances représentées au sein du conseil d'administration de la CNAF ainsi que des élus et des représentants de l'association des maires de France. Il a précisé que le premier groupe relatif à la prestation d'accueil du jeune enfant visait à promouvoir, pour les parents, la liberté de choix entre la poursuite d'une activité professionnelle ou la cessation de cette dernière pour se consacrer à l'éducation de leur enfant. Il a, à ce titre, rappelé l'attachement du Gouvernement à ce que la liberté de choix des parents en ce qui concerne le mode de garde de leurs enfants soit également respectée.
M. Christian Jacob a ensuite indiqué que le groupe de réflexion relatif aux services à la famille et à la parentalité se verrait assigner la mission de concevoir de nouveaux services pour les parents. Il a, enfin, mentionné un troisième groupe chargé de réfléchir et de formuler des propositions relatives à la conciliation entre vie familiale et entreprise.
Observant que les dépenses de la sécurité sociale consacrées au handicap ne faisaient pas l'objet d'une présentation spécifique en loi de financement, Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a néanmoins rappelé qu'ainsi que l'avait souligné le rapport de la mission d'information de la commission des affaires sociales du Sénat sur la politique de compensation du handicap, les dépenses supportées par les différentes branches de la sécurité sociale constituent 65 % de l'effort public en direction des personnes handicapées.
Elle a ensuite présenté à la commission les grands axes de la politique du Gouvernement en matière de handicap sur la base de sa traduction dans l'enveloppe handicap du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui atteint 6,1 milliards d'euros en 2003.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a précisé que figuraient dans cette enveloppe essentiellement les crédits de fonctionnement des établissements et services médico-sociaux accueillant des enfants et des adultes handicapés, pris en charge par l'assurance maladie, auxquels s'ajoutaient les crédits de l'allocation d'éducation spéciale (pour 481 millions d'euros), que supporte la branche famille. Elle a souhaité insister tout particulièrement sur la forte croissance des crédits de l'allocation d'éducation spéciale (AES) observée en 2002, du fait de la réforme des compléments de l'allocation intervenue en avril. Elle a précisé que, bien qu'il soit trop tôt pour apprécier le bilan de cette réforme, une évaluation était actuellement réalisée par la Direction générale de l'action sociale.
Elle a ensuite souhaité insister sur le thème de l'enfance handicapée et, notamment, sur l'objectif d'intégration scolaire, objectif commun au ministère de l'éducation nationale et à son ministère, qui conduit le Gouvernement à renforcer le développement des services d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD) et, en particulier dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, à corriger le passage hâtif et mal préparé à leur financement par dotation globale au 1er janvier 2002, qui avait suscité de vives protestations de la part des associations gestionnaires.
Mme Marie-Thérèse Boisseau a précisé que l'année 2003 serait la dernière année d'une programmation pluriannuelle axée sur le développement de ces services ainsi que des centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP) et que, grâce au taux de 6 % précédemment évoqué, 4 millions d'euros supplémentaires pourront soutenir les projets innovants en la matière.
Elle a, par ailleurs, observé que le nombre total d'enfants handicapés suivis « en ambulatoire » dépasse depuis peu celui des enfants accueillis en établissements médico-sociaux, cette évolution appelant un accompagnement par la pérennisation des services d'auxiliaires d'intégration scolaire pour les élèves handicapés, qui fait l'objet d'un groupe de travail interministériel installé le 17 octobre dernier.
S'agissant des adultes handicapés, Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a rappelé que l'attente la plus aiguë concernait l'accueil en maisons d'accueil spécialisées (MAS) ou en foyers d'accueil médicalisés (FAM) et que, à cet égard, l'action gouvernementale porterait dans trois directions :
- elle a indiqué, en premier lieu, que le nombre de places en MAS ou en FAM pouvant être créées en 2003 serait doublé, ainsi que s'y était engagé le Président de la République lors de la campagne présidentielle ; elle a précisé que cet effort permettrait d'achever des opérations partiellement financées jusqu'à présent, et de donner espoir aux familles et aux associations ;
- elle a souhaité, en deuxième lieu, que l'effort budgétaire soit assorti d'une réflexion sur les établissements accueillant des personnes lourdement handicapées, sur la pertinence de la distinction MAS et FAM, sur les normes de fonctionnement à définir pour ces établissements, en application de la loi du 2 janvier 2002, ainsi que sur les qualifications des personnels ;
- concernant les personnes lourdement handicapées faisant le choix de vivre à domicile, elle a ensuite fait part de l'intention du Gouvernement d'encourager des réseaux associant des établissements médico-sociaux, des praticiens libéraux et hospitaliers des collectivités locales et des associations, afin de multiplier les expériences.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a enfin indiqué qu'à ces mesures nouvelles s'ajoutent la revalorisation des crédits de reconduction des budgets de fonctionnement, soit près de 156 millions d'euros en 2003, nécessaires pour financer les mesures salariales, le « glissement vieillesse - technicité » (GVT), ainsi que certaines revalorisations conventionnelles, dont celle des médecins spécialistes, qui aspirent légitimement à bénéficier de la même considération que celle qui est accordée aux médecins exerçant en ville ou à l'hôpital.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux, s'est interrogé sur la solution envisagée par le Gouvernement afin de garantir, après la suppression annoncée du FOREC, la compensation intégrale, à la sécurité sociale, des pertes de recettes résultant des exonérations de cotisations. Evoquant le transfert des majorations de pension pour enfants entre le fonds de solidarité vieillesse (FSV) et la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), il a également souhaité connaître l'appréciation du Gouvernement sur la complexité et la nécessité de clarifier les circuits financiers mis en place par son prédécesseur, afin d'assurer le financement du FOREC.
En réponse, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées a, tout d'abord, confirmé la volonté du Gouvernement d'aboutir à la suppression du FOREC. Toutefois, compte tenu des sommes en jeu, soit 16 milliards d'euros, de la complexité des circuits financiers mis en place et de la nécessité de garantir la pérennité des recettes de la sécurité sociale, il a exclu, en ce domaine, toute solution brutale ou précitée. Il a donc indiqué qu'un groupe de travail, ouvert aux propositions des parlementaires concernés, viserait à définir les voies d'une réforme adaptée.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour l'assurance maladie, a demandé au ministre de confirmer l'évolution en 2003 des quatre sous-enveloppes qui composent l'ONDAM (médecine de ville, hôpital, cliniques et médico-social) et d'expliquer les raisons qui avaient justifié ces choix.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a rappelé que l'ONDAM progresserait en 2003 de + 5,3 %, qui se décomposaient ainsi : + 5 % pour l'hôpital, + 5,6 pour la médecine de ville, + 6 % pour le médico-social et + 4 % pour les cliniques.
Il a expliqué que le chiffre de 5,6 % retenu pour la médecine de ville tenait compte de la pente de progression des dépenses, aujourd'hui proche de 8 %. Il a affirmé qu'il avait souhaité que les médecins se sentent totalement responsabilisés, ce qui supposait de les placer devant des défis raisonnables. S'agissant du médico-social, il a indiqué que le chiffre de 6 % s'expliquait par la priorité donnée par le Gouvernement à la prise en charge des personnes handicapées. Evoquant l'hôpital, dont la dotation progresse de 5 %, soit + 0,2 % qu'en 2002, il a fait valoir que ce taux était en réalité de 5,2 % si l'on tenait compte de la rallonge de fin d'année de 300 millions d'euros. Il a ajouté que ce chiffre ne tenait pas compte des aides à l'investissement d'un montant de 300 millions d'euros en 2003. Après avoir précisé que la priorité serait donnée aux dépenses de personnel, il a indiqué qu'un rapport lui serait remis dans les prochains jours sur la réduction du temps de travail (RTT) à l'hôpital.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour l'assurance maladie, a rappelé que l'article 27 du projet de loi donnait au Gouvernement la possibilité d'instaurer un tarif forfaitaire de remboursement pour les médicaments figurant dans un groupe générique. Il a souligné que cette disposition suscitait une vive inquiétude au sein de l'industrie pharmaceutique, qui craignait une forte pression à la baisse sur les prix, avec les risques sanitaires induits. Il a demandé par conséquent que le ministre précise dans quelles conditions il envisageait de recourir à ce tarif forfaitaire.
Evoquant les premiers résultats positifs de l'accord du 5 juin 2002 signé avec les médecins généralistes sur le développement du générique, il a souhaité savoir si l'on disposait d'ores et déjà d'éléments probants sur les modifications de comportement induites par la décision de ne plus rembourser la visite médicale non justifiée.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a indiqué qu'il n'avait pas l'intention d'avoir recours à cette disposition avant le 1er juillet 2003, afin de ne pas démobiliser les médecins, qui s'étaient fortement impliqués dans la prescription de génériques. Il a fait valoir qu'il instaurerait ensuite systématiquement ce tarif forfaitaire sauf si les médecins s'engageaient fortement dans le générique.
S'agissant des visites médicales, il a souligné que l'on observait déjà une diminution de leur nombre. Il s'est dit confiant sur la capacité des médecins à convaincre leurs patients.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur pour la famille, a rappelé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 prévoyait la mise en place d'une allocation forfaitaire de 70 euros versée chaque mois aux familles de trois enfants ou plus à charge, qui perdraient normalement le bénéfice des allocations familiales au 20e anniversaire d'un ou de plusieurs enfants.
Il a demandé à M. Christian Jacob si la mise en place de cette allocation au 1er juillet 2003 seulement répondait à un souci d'économie, ou tenait compte d'un délai incompressible de mise en oeuvre. Il lui a en outre demandé si cette nouvelle mesure marquait le début d'une évolution en faveur de l'extension de l'intégralité des allocations familiales jusqu'à l'âge de 22 ans, comme le prévoyait la « loi famille » de 1994.
Évoquant la part du financement des majorations de pension pour enfants par la CNAF portée à 60 % par le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a rappelé que, dans sa décision du 18 décembre 2001, le Conseil constitutionnel avait semblé poser un curseur au-delà duquel cette prise en charge constituerait une rupture d'égalité entre les familles.
Il a demandé au ministre délégué si, au regard de cette décision, une nouvelle étape dans cette prise en charge lui paraissait possible en 2004.
En réponse à M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a considéré que le choix de mettre en place l'allocation forfaitaire de 70 euros au profit des familles nombreuses au 1er juillet 2003 n'était pas étranger à une préoccupation d'ordre budgétaire, mais il a rappelé que de nombreuses mesures étaient régulièrement mises en oeuvre en milieu d'année, offrant ainsi aux CAF un délai raisonnable d'organisation.
Concernant l'avenir de cette nouvelle allocation, il s'est interrogé sur la pertinence d'un allongement de la durée des allocations familiales jusqu'à 22 ans, au détriment d'une revalorisation de leur montant.
Il a indiqué, par ailleurs, que la décision du Conseil constitutionnel sur la question des majorations de pension pour enfants avait été nuancée quant à l'autonomie des branches de la sécurité sociale, puisqu'il faisait valoir que c'était l'ampleur des transferts, et non leur existence même, qui serait susceptible de porter atteinte à cette autonomie.
Interrogeant le ministre au nom de M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres généraux, a fait observer que la Caisse de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), qui est également celle du personnel hospitalier, devra, au titre du plan de refinancement de la Caisse, augmenter le taux de contribution employeur de 0,4 point par an pendant trois ans. Il a souhaité savoir quel coût cette augmentation représenterait pour l'assurance maladie, en montant et en parts dans l'ONDAM.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a indiqué que ce coût serait de 60 millions d'euros.
Puis M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis de la commission des finances, s'est étonné du paradoxe qui consistait à faire rembourser par la CADES, organisme constitué pour financer la dette des régimes sociaux, la dette contractée par l'Etat à l'égard de la sécurité sociale au titre du FOREC. Il s'est également interrogé sur les modalités concrètes, dans le secteur hospitalier, de l'expérimentation de la tarification à l'activité, avant la généralisation de cette tarification prévue pour 2004. Enfin, il a souhaité savoir si les conclusions du rapport attendu sur la démographie médicale seront rapidement suivies d'effets.
S'agissant de la CADES, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a indiqué que la solution choisie par le Gouvernement avait le mérite de la clarté et de la franchise et qu'elle ne compromettait en rien la situation financière ni l'échéancier de cet organisme.
Evoquant la tarification à l'activité, il a souligné que ce terme semblait préférable à celui de « tarification à la pathologie » dans la mesure où l'activité englobait aussi, par exemple, la prévention et le dépistage. Il a reconnu que cette forme de tarification constituait un changement culturel important pour l'hôpital public ; il a cependant jugé que c'était le seul moyen pour parvenir à une harmonisation des modalités de financement des établissements.
S'agissant des modalités d'expérimentation de la tarification à l'activité, il a expliqué qu'un appel à candidatures serait lancé courant novembre afin de sélectionner vingt établissements publics et vingt établissements privés volontaires, dotés d'une comptabilité analytique. Parallèlement, une simulation de l'application de la tarification à l'activité serait menée dans cinq régions, qui n'étaient pas encore choisies. Les premiers enseignements de ces expérimentations seraient disponibles au début de l'été 2003. Une mission d'accompagnement sur la tarification à l'activité allait être créée au sein de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS).
S'agissant de la démographie médicale, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a souligné que le rapport annexé au projet de loi mentionnait la possibilité d'autoriser les cabinets secondaires, afin de permettre une permanence médicale en milieu rural. Il a rappelé que l'article 29 du projet de loi permettait en outre à des médecins retraités de reprendre une activité, par exemple pour effectuer des remplacements. Il s'est également dit favorable à des aides à l'installation et au développement des réseaux et de toutes formes d'exercice collectif.
M. Gilbert Chabroux, tout en saluant les bonnes intentions du ministre, a estimé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 n'était pas en mesure de rétablir l'équilibre financier de la sécurité sociale. Il a donc exprimé sa crainte que la dégradation des comptes de la sécurité sociale, que le Gouvernement ne paraît pas en mesure d'enrayer, conduise à une privatisation insidieuse de la sécurité sociale, crainte avivée par les récents propos de personnalités politiques de premier plan.
M. Serge Franchis a souhaité connaître quelles actions le ministre envisageait d'engager en faveur de la médecine psychiatrique et de la lutte contre les maladies mentales, qui sont actuellement en déshérence.
M. Bernard Cazeau s'est interrogé sur le contenu qu'il convenait de donner à la maîtrise médicalisée des dépenses, invoquée par le ministre, et dont certains de ses prédécesseurs avaient pu constater, en leur temps, les limites.
Mme Claire-Lise Campion a regretté le faible nombre de mesures nouvelles en faveur des familles dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 et l'absence de conférence de la famille en 2002.
Elle a fait part de son étonnement face au transfert de 945 millions d'euros de la CNAF au FSV, et a regretté que les crédits du fonds d'investissement en faveur de la petite enfance (FIPE) ne soient pas reconduits en 2003.
Sur ce dernier point, elle a fait valoir que le manque de structures collectives ne permettait pas une vraie liberté de choix du mode de garde, puisque seulement 9 % des enfants étaient accueillis en crèche. Elle a rappelé qu'il y avait là un risque pour les collectivités locales de voir bloqués certains projets déjà engagés.
Elle a enfin interrogé le ministre délégué sur la revalorisation de la base mensuelle des allocations familiales (BMAF) qui n'atteignait que 1,7 % en 2003 et n'avait donné lieu à aucun « coup de pouce ».
M. Jean-Pierre Fourcade a rappelé que les interrogations de la commission au cours des dernières années avaient porté, non seulement sur la multiplication des branchements financiers, mais également sur les ponctions opérées sur la branche famille au profit des autres branches du régime général.
M. Guy Fischer, s'étonnant du consensus apparent de l'ensemble des professions médicales autour des propositions du ministre, s'est inquiété des risques de « médecine à deux vitesses » et de privatisation de la sécurité sociale qui pourraient être, en réalité, induits par cette politique.
En réponse aux différents intervenants, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a expliqué que la maîtrise médicalisée des dépenses de santé consistait, par exemple, à signer avec les médecins des accords sur la prescription de génériques, des accords de bon usage, à développer les règles de bonne pratique ou à encourager la démarche d'évaluation. S'agissant de la psychiatrie, il a reconnu que la prise en charge des malades était aujourd'hui désastreuse et indiqué que ce sujet serait traité dans le projet de loi de programmation quinquennale de santé publique, qui serait présenté au Parlement au printemps.
Il a réitéré son intention de voir le FOREC supprimé. Il a souligné que cela n'avait pas été possible cette année et que cela serait réalisé l'année prochaine.
Il a considéré que les propos de M. Jacques Barrot, auxquels avait fait allusion M. Gilbert Chabroux, avaient été maladroits ou mal interprétés. Il a estimé qu'il n'y avait pas de petit risque ou de grand risque en matière de santé : le risque était unique, un petit pouvant parfois dissimuler un grand. Il a fait part de sa volonté d'éviter une médecine à deux vitesses et de son souhait de voir tout le monde traité de la même manière. Il a dénoncé la gestion calamiteuse du Gouvernement précédent qui avait conduit à des situations catastrophiques, notamment à des phénomènes de files d'attente pour l'accès aux soins. Il s'est insurgé contre le procès en privatisation instruit par ceux qui feignent d'oublier que 85 % des Français sont couverts par une complémentaire maladie. Il a rappelé que le Gouvernement précédent avait institué un mécanisme de couverture maladie complémentaire aux effets de seuil désastreux, qui conduisait 15 % des Français à ne bénéficier ni d'une complémentaire, ni de la couverture maladie universelle (CMU). Il a souligné que le Gouvernement souhaitait faire en sorte que chacun puisse disposer d'une complémentaire.
S'agissant de l'assurance maladie, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a expliqué qu'il avait trouvé, en prenant ses fonctions, un système dépourvu de pilote et où le paritarisme avait disparu, puisque l'on avait contraint le mouvement des entreprises de France (MEDEF) à quitter les conseils d'administration des caisses.
Evoquant les bonnes relations entre le Gouvernement et les syndicats de médecins, il a précisé que ceux-ci avaient souffert d'être méprisés par le précédent Gouvernement et qu'il avait suffi de leur tendre la main pour restaurer le dialogue. Il a fait valoir que le conflit entre le précédent Gouvernement et les médecins généralistes avait été particulièrement mal géré.
Il a considéré qu'il n'était pas possible de remettre sur pied l'hôpital et d'augmenter le nombre des médecins dans les zones déficitaires à moyens constants. Il a souligné qu'il convenait de réfléchir à une nouvelle assiette pour les recettes de la sécurité sociale, la masse salariale apparaissant peu satisfaisante et très sensibles aux aléas de la conjoncture.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a estimé que la sécurité sociale était un patrimoine culturel commun à l'ensemble des Français. Il a souligné qu'il s'opposerait à une évolution de notre système de santé tant vers l'étatisme à la britannique que vers la privatisation à l'américaine. Il a jugé que la précédente majorité avait échoué et qu'il était désormais nécessaire d'explorer de nouvelles voies.
En réponse à Mme Claire-Lise Campion, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, s'est montré étonné de la dénonciation par cette dernière du transfert au profit du FSV, dans la mesure où son principe avait été voté dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.
Il a indiqué que le FIPE avait redémarré le 1er juillet dernier, et était doté de 228 millions d'euros pour la période 2001-2004 avec une prévision de dépenses pluriannuelle : 30 millions d'euros en 2002, 100 millions en 2003 puis en 2004. Il a rappelé que la CNAF ferait un point précis sur l'état de consommation du fonds à la fin de l'année 2002.
Il a précisé que, sur 2,2 millions d'enfants de moins de trois ans, 200.000 étaient en crèche, 1 million d'enfants étaient gardés par leurs parents (dont 50 % bénéficiaient de l'allocation parentale d'éducation [APE]), 500.000 par une assistante maternelle et donc seulement 500.000 grâce à la solidarité familiale, pour lesquels se posait réellement la question de la liberté du mode de garde. Enfin, il a rappelé que le taux de revalorisation retenu pour la base mensuelle des allocations familiales était celui prévu par la loi.
Mercredi 6 novembre 2002
- Présidence de M. Nicolas About, président -
PLFSS pour 2003 - Auditions
La commission a procédé à des auditions sur le projet de loi n° 47 (2002-2003) adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2003.
Audition de MM. François Logerot, Premier président, Bernard Cieutat, président de la 6e chambre, et Denis Morin, rapporteur général, sur le rapport annuel de la Cour des comptes consacré à l'application des lois de financement de la sécurité sociale
La commission a procédé à l'audition de MM. François Logerot, Premier président, Bernard Cieutat, président de la 6e chambre et Denis Morin, rapporteur général, sur le rapport annuel de la Cour des comptes consacré à l'application des lois de financement de la sécurité sociale.
A titre liminaire, M. François Logerot, Premier président, a présenté, dans ses grandes lignes, le rapport annuel de la Cour des comptes sur la sécurité sociale qui est consacré, tout d'abord, à la situation des comptes sociaux pour l'année 2001. A ce sujet, il a plus particulièrement attiré l'attention de la commission sur l'insuffisance des progrès réalisés en matière de délais de production des comptes et de normalisation comptable, avant d'exprimer le souhait que le Parlement puisse apporter son concours aux efforts déployés par la Cour, en ce domaine, auprès des ministres et des administrations compétentes. S'agissant de la situation financière de la sécurité sociale en 2001, il a souligné la dérive des dépenses d'assurance maladie, qui semble traduire une remise en cause générale des mécanismes de régulation.
Puis M. François Logerot, Premier président, a indiqué que le thème majeur du rapport annuel de la Cour des comptes était celui de la gestion de la dépense hospitalière avant d'en exposer la principale conclusion, à savoir l'absence d'une évaluation effective des coûts et des performances du service public hospitalier, qui limite les capacités d'action des agences régionales d'hospitalisation (ARH). Il a, ensuite, brièvement évoqué les autres sujets abordés par la Cour dont, notamment, le bilan du fonctionnement des agences sanitaires, la politique immobilière des caisses locales du régime général et du régime agricole et les concours financiers aux associations accordés par les caisses d'allocations familiales.
M. François Logerot a, par ailleurs, rappelé les difficultés rencontrées par la Cour en ce qui concerne la mise en oeuvre concrète de ses recommandations. Il a donc estimé souhaitable que, en ce domaine également, le Parlement puisse relayer les efforts de la Cour. Il a évoqué, à cet égard, le souhait exprimé par certains que le Gouvernement puisse remettre au Parlement un rapport qui ferait, chaque année, le point sur les conditions de cette mise en oeuvre. Enfin, il s'est félicité des modalités nouvelles de collaboration instaurées entre la Cour et la commission des affaires sociales qui se traduisent par l'examen, par la Cour, des thèmes soumis par la commission. Il a, toutefois, estimé que ces demandes devaient être formulées en temps utile, afin de pouvoir être intégrées dans le programme de travail de la chambre compétente.
M. Bernard Cieutat, président de la 6e chambre, a, ensuite, développé oralement certaines des réponses écrites fournies par la Cour, suite au questionnaire de la commission des affaires sociales sur son rapport annuel.
S'agissant du transfert, par l'article 49 de la loi de modernisation sociale, et à la charge du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), de la dette contractée par l'Etat à l'égard des régimes obligatoires de retraites complémentaires au titre des périodes de chômage et de préretraites, M. Bernard Cieutat a indiqué que la Cour partageait les interrogations de la commission des affaires sociales, dans la mesure où l'application combinée de cet article 49 et de l'article L. 135-3 du code de la sécurité sociale semble effectivement susceptible d'une censure par le Conseil constitutionnel.
M. Nicolas About, président, a fait observer que la portée de ces interrogations apparaissait réduite dès lors que le moyen d'équilibrer les dépenses du FSV en direction des régimes complémentaires ne provenait pas d'une nouvelle recette sociale ou fiscale mais d'une contribution de la CNAF prenant à sa charge partie des majorations de pension pour enfants.
En ce qui concerne la nécessité de modifier l'objectif de dépenses adopté par le Parlement en loi de financement initiale, pour prendre en compte les mesures réglementaires ou conventionnelles affectant lesdites dépenses, M. Bernard Cieutat a indiqué qu'une telle modification ne serait, selon la Cour, opportune que dès lors que l'importance des dépenses concernées, ou la situation, le justifierait. En revanche, il a indiqué qu'il serait utile de pouvoir disposer, en annexe du projet de loi de financement de la sécurité sociale, d'un document récapitulant et évaluant l'ensemble des modifications réglementaires ou conventionnelles ayant affecté les dépenses au cours du dernier exercice.
M. Bernard Cieutat, président de la 6e chambre, a également estimé que la présentation, pour la première fois dans le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2002, des bilans du régime général et de chacune de ses branches était une innovation intéressante, même si l'élaboration de ces bilans souffre encore de certaines imperfections méthodologiques qui en limitent, dans l'immédiat, l'utilité en tant qu'instruments d'analyse financière.
Puis M. Denis Morin, rapporteur général, a réaffirmé les avantages du passage des comptes de la sécurité sociale en comptabilité en droits constatés. Il a précisé que les difficultés techniques rencontrées en ce domaine par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), qui ont notamment rendu nécessaire une correction importante des comptes 2001, seront résolues, à l'avenir, grâce à la mise en place d'un outil informatique adapté.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers, a souhaité obtenir plusieurs précisions aux réponses formulées par la Cour aux questions de la commission.
Il a, en premier lieu, demandé si, en écrivant que « la loi de 1994 vise avant tout à clarifier la gestion des branches et à obliger les pouvoirs publics à prendre les décisions nécessaires pour assurer l'équilibre de chaque branche, au besoin en modifiant les recettes affectées à chacune, voire en transférant la prise en charge de certaines dépenses », la Cour signifiait que les transferts financiers croisés, intervenus ces dernières années, relevaient d'une interprétation de la loi de 1994.
Il a, en deuxième lieu, souhaité savoir si les reports sur l'exercice suivant des excédents du FOREC faisaient l'objet d'une ventilation entre les différentes catégories de recettes de cet organisme.
Il s'est interrogé sur les considérations de la Cour selon laquelle « le plafond des avances autorisées ne saurait avoir pour objet de couvrir un déficit récurrent ».
Il a enfin souhaité connaître la position de la Cour sur l'article premier ter introduit par l'Assemblée nationale et visant à recentraliser les compétences de contrôle relatives aux centres hospitaliers régionaux exercées aujourd'hui par les chambres régionales des comptes.
En réponse à cette dernière question, M. François Logerot, Premier président, a rappelé qu'il n'appartenait pas à la Cour de s'exprimer en opportunité sur une initiative parlementaire mais a néanmoins observé que la haute juridiction financière n'avait pas été, à ce sujet, consultée. Il a néanmoins précisé avoir fait connaître le point de vue de cette dernière aux ministres chargés des affaires sociales et des finances.
Quant à l'économie du dispositif proposé par ledit amendement, il a observé que la question des compétences entre les juridictions financières ne devait être retouchée qu'avec la plus grande prudence. A ce titre, il a constaté que les établissements hospitaliers étaient des établissements publics locaux, et que, dans le cadre d'une décentralisation accrue, il apparaissait paradoxal de recentraliser cette compétence des chambres régionales des comptes.
Il a ensuite rappelé que ces dernières s'étaient organisées, parfois en surmontant des obstacles, notamment de moyens, afin de remplir l'ensemble des charges qui leur sont assignées. Il a, à cet égard, indiqué que la chambre régionale des comptes d'Ile-de-France disposait d'une section dédiée aux seuls contrôles hospitaliers.
Il a en outre souligné l'importance du travail de coordination et de liaison mené par la Cour vis-à-vis des chambres régionales.
Puis il a relevé que l'article premier ter pouvait présenter l'inconvénient de séparer l'appréciation de la gestion du contrôle des comptes, séparation difficile à opérer dans la réalité, l'appréciation sur la gestion n'ayant guère de portée en l'absence d'une analyse robuste sur la situation comptable des établissements.
M. Nicolas About, président, s'est interrogé sur la possibilité d'ouvrir à la Cour un champ d'investigations sans pour autant décharger les chambres régionales des comptes de leurs compétences en ce domaine.
M. François Logerot, Premier président, a précisé qu'il appartenait au Sénat de se déterminer, mais que la Cour pourrait réfléchir à l'utilité d'une extension de ces missions de contrôle sur certains thèmes généraux.
En réponse à M. Alain Vasselle, M. Denis Morin, rapporteur général, a rappelé que, depuis la Libération, la sécurité sociale oscillait entre autonomie totale et fusion des branches, qu'attendu que les recettes de ces dernières se trouvaient centralisées et que l'ACOSS devait procéder à une ventilation, il ne semblait possible de parler que d'autonomie tempérée. Il a en outre constaté que du fait d'une dynamique de dépenses et de recettes variables d'une branche à l'autre, des excédents et des déficits apparaissaient ça et là et que les différents gouvernements procédaient à des transferts afin de limiter l'ampleur des déficits. Il a néanmoins rappelé que la Cour des comptes avait considéré la tentative d'équilibrage du FOREC, menée par le précédent gouvernement, comme fort peu satisfaisante.
Concernant ce fonds, il a précisé que ses excédents étaient reportés à nouveau sans être ventilés entre les catégories de recettes.
Il a observé que la Cour n'avait pas de proposition à formuler sur l'équilibre des comptes de la sécurité sociale, sauf à constater l'insuffisance des recettes dont celle-ci dispose au regard des charges qu'elle supporte.
Il a rappelé que le plafond de trésorerie voté chaque année avait pour seul objectif d'aider les caisses à supporter des tensions sur leur situation de trésorerie.
M. Nicolas About, président, s'est interrogé sur le caractère élevé du montant du plafond, fixé à 4,4 milliards d'euros, alors même que le point le plus bas constaté atteignait - 1,9 milliard d'euros.
M. Denis Morin, rapporteur général, a répondu que les régimes affrontaient dans l'année des variations très heurtées de leurs besoins de trésorerie.
M. Jean Chérioux s'est interrogé sur d'éventuels travaux de la Cour relatifs au dérapage des dépenses hospitalières provoquées par une trop grande mobilité des normes sanitaires et de sécurité.
M. François Logerot, Premier président de la 6e chambre, a rappelé que le surcoût lié à la mise aux normes des édifices n'était pas propre au seul secteur hospitalier mais a admis que celui-ci pesait fortement sur les budgets immobiliers et de fonctionnement des établissements de santé.
M. Guy Fischer s'est interrogé sur la recommandation relative aux schémas régionaux d'organisation sanitaire et sociale (SROS) formulée par la Cour des comptes dans la synthèse de son rapport et s'est interrogé sur le pouvoir de contrôle de cette dernière à l'égard des établissements de santé privés.
M. François Logerot a précisé que la Cour et les chambres régionales des comptes ne disposaient pas d'une compétence générale à l'égard des organismes de droit privé, seuls ceux parmi ces derniers bénéficiant de subventions publiques pouvant faire l'objet de contrôle.
Il a rappelé, à ce titre, que les financements apportés par l'assurance maladie aux établissements de santé privés n'étaient pas considérés comme des subventions publiques.
M. Guy Fischer a déploré qu'à Lyon un établissement privé, dont le budget repose à 90 % sur les fonds de la sécurité sociale, ne puisse faire l'objet d'un contrôle de la Cour. Il s'est plus largement interrogé sur la conduite de l'évaluation hospitalière.
M. Denis Morin, rapporteur général, a rappelé que le passage au droit constaté avait rendu les comptes de la sécurité sociale plus fiables et que seuls les délais, encore aujourd'hui trop longs, demeuraient une difficulté.
Il a observé que l'évaluation hospitalière pouvait mettre en évidence des opportunités d'économies, constatant que des investigations avaient fourni une image contrastée de sous-activités et sur-activités hospitalières simultanées, selon les services audités.
Il a enfin rappelé que la recommandation de la Cour visait la simplification du paysage juridique hospitalier.
M. André Vantomme s'est inquiété des conséquences de la suppression de lits en service de psychiatrie en région parisienne liée à une politique d'économies trop rigoureuse.
M. François Logerot, Premier président, a, sur ce point, précisé que la Cour avait constaté dans un de ses rapports précédents un décalage entre le niveau des équipements et les pratiques médicales, ces dernières préconisant le plus souvent le maintien à domicile des patients.
Audition de MM. Michel Laroque, président, et Jacques Lenain, directeur du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC)
La commission a ensuite procédé à l'audition de MM. Michel Laroque, président, et Jacques Lenain, directeur du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC).
M. Jacques Lenain, directeur général, a d'abord observé que la situation du FSV s'était dégradée au cours des trois années écoulées et que tant la réalisation de son budget pour 2002 que ses perspectives pour 2003 demeuraient incertaines.
Il a rappelé que les dépenses du FSV concernaient pour une moitié la validation des périodes non travaillées, pour un quart des prestations du minimum vieillesse et, pour le quart restant, les majorations de pension pour enfants.
Il a observé que, pour couvrir ces dépenses, le fonds disposait de produits qui avaient sensiblement évolué au cours du temps.
Il a précisé, à ce titre, que le fonds ne disposait plus que de 1,05 point de CSG, après les deux transferts au bénéfice de l'assurance maladie et du fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) intervenus en 2001 et 2002. Il a néanmoins indiqué que cette perte de recettes était depuis 2001 compensée par des transferts croissants en provenance de la CNAF à qui incombaient en 2002, 30 % du financement des majorations de pension pour enfants.
Il a néanmoins constaté qu'au total, sur l'année 2002, l'activité du fonds s'était traduite par un déficit de 1.422 millions d'euros, la plus grosse part ayant été absorbée par les réserves disponibles, mais que le déficit résiduel de 191 millions d'euros demeurait une difficulté non résolue. Il a souligné que, jamais depuis sa création, le FSV n'avait connu une telle situation.
Il a ensuite indiqué que le fonds se trouvait équilibré en prévision par le projet de loi de financement de la sécurité sociale, du fait notamment du doublement des transferts en provenance de la CNAF, mais que les évolutions des dépenses demeuraient très sensibles à l'évolution du marché du travail et que, même si ces prévisions se réalisaient, l'exercice 2003 ne permettrait pas un ajustement du solde déficitaire net cumulé du fonds.
Il a néanmoins admis que cette difficulté était pondérée par la situation avantageuse de trésorerie dont bénéficiait le fonds à l'égard de ses partenaires, puisque ses décaissements étaient calés sur les budgets primitifs et donnaient lieu à une régularisation importante en fin d'année n + 1. Il a toutefois souligné qu'une difficulté immédiate était posée au début de l'année 2003 par un décaissement de 457 millions d'euros au bénéfice de l'Association générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC) et de l'Association des régimes de retraite complémentaire (ARRCO) et que, pour l'honorer, le fonds devrait négocier avec le ministère de l'économie et des finances l'obtention d'un abondement précoce de contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S).
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, s'est interrogé sur de possibles simplifications à apporter au dispositif du minimum vieillesse.
Il a en outre demandé à M. Michel Laroque quelle validation des périodes non travaillées ressortait selon lui plus de la politique de l'emploi que de la solidarité.
M. Michel Laroque a observé que les multiples prestations du minimum vieillesse relevaient d'avantages historiques mais qu'à terme, la plupart se trouvant éteintes, seuls trois de ces derniers seraient encore versés.
Il a rappelé que sur une suggestion de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), la convention d'objectif et de gestion (COG) de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS) avait évoqué la possibilité d'une simplification mais qu'aucune suite n'avait été donnée à cette proposition.
Il a ensuite constaté que le FSV compensait le manque à gagner en cotisation pour les régimes de vieillesse de base au titre des périodes pendant lesquelles les assurés avaient bénéficié d'allocations chômage ou de dispositifs de réinsertion et que, dans ce contexte, un remboursement au fonds par l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) ou par l'Etat serait intellectuellement cohérent.
M. Alain Vasselle s'est inquiété des difficultés qu'entraînaient les versements effectuées par le fonds au bénéfice de l'AGIRC et de l'ARRCO au regard des principes régissant les lois de financement de la sécurité sociale.
En réponse à M. Alain Vasselle, M. Michel Laroque a rappelé que l'impossibilité de faire figurer ces dépenses en loi de financement avait été confirmée par le Conseil constitutionnel. Il a relevé à ce titre que cette jurisprudence s'appuyait sur une vision restrictive des régimes de base d'assurance vieillesse, rappelant que l'AGIRC et l'ARRCO, au regard du droit européen, relevaient du même pilier d'assurance vieillesse que les régimes de base de la sécurité sociale.
Puis M. Jacques Lenain, s'exprimant en sa qualité de directeur du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), a répondu aux questions de M. Alain Vasselle, rapporteur sur les équilibres financiers.
S'agissant des modalités de fonctionnement du FOREC, M. Jacques Lenain a indiqué que les relations financières entre cet organisme et les organismes de sécurité sociale, d'une part, et l'Etat, d'autre part, sont, de par la loi, organisées dans le cadre de conventions, qui sont notamment destinées à garantir la neutralité, en trésorerie, des flux financiers pour les organismes de sécurité sociale. Il a précisé que, dans ce cadre général, les recettes fiscales du FOREC, qui constituent l'essentiel des recettes du fonds, lui sont versées « au fil de l'eau » par les services compétents de l'Etat. Seules les deux recettes à caractère « social » (taxe de prévoyance et contribution sur les véhicules à moteur) sont donc transférées au FOREC en fonction de leurs dates d'encaissement. Les versements du FOREC aux régimes de sécurité sociale font, quant à eux, l'objet d'acomptes représentatifs, qui sont ensuite régularisés sur la base d'états justificatifs annuels.
M. Jacques Lenain a précisé que, dans le cadre des deux conventions provisoires conclues, pour six mois, le 21 janvier 2002 avec l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (régime général) et la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA), ces acomptes sont assis, non sur les montants prévus des charges d'exonération, mais sur les recettes perçues par le FOREC. La part desdites recettes qui sont ainsi reversées, trois fois par mois, aux deux régimes concernés a été progressivement portée de 99 % à 100 % des sommes encaissées par le fonds. En revanche, s'agissant des trois régimes spéciaux attributaires, à savoir la Caisse nationale de sécurité sociale des Mines (CANSSM), la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaire (CRPCEN) et l'Etablissement national des invalides de la marine (ENIM), ils bénéficient d'un acompte annuel unique, dont le montant est arrêté d'un commun accord ente le FOREC et chacun de ces régimes.
M. Jacques Lenain a ajouté que la régularisation des acomptes intervient sur l'exercice suivant. L'éventuel excédent de versement (ou le versement complémentaire) constaté au titre de l'exercice précédent est ainsi déduit (ou ajouté) du ou des acomptes suivants. A ce sujet, M. Jacques Lenain a indiqué que, pour l'année 2001, le solde de ces opérations avec l'ACOSS devrait dégager un excédent supplémentaire, et exceptionnel, de 146 millions d'euros, qui s'ajoutera à l'excédent de 264,5 millions d'euros déjà constaté au titre de cet exercice. Au total, le résultat excédentaire de l'exercice atteint donc 400 millions d'euros environ, qui s'ajouteront à l'excédent de 100 millions d'euros prévu pour 2002.
En ce qui concerne la détermination, en début d'exercice, des montants prévisionnels des exonérations devant être prises en charge par le FOREC, M. Jacques Lenain a précisé que le fonds était tributaire, en la matière, des évaluations réalisées par les services compétents du ministère en charge des affaires sociales, les actualisations nécessaires pouvant être réalisées en cours d'année. Pour sa part, le conseil d'administration peut, en tant que de besoin, décider de modifier son budget annuel, dans les limites définies par la loi (obligation d'équilibrer les comptes, notamment).
Enfin, M. Jacques Lenain a indiqué que, compte tenu des contraintes particulières imposées au FOREC par la loi, tout déséquilibre éventuel de ses comptes doit entraîner la mise en oeuvre de mesures correctrices qui pourraient prendre, selon les cas, la forme de prélèvements sur les réserves du fonds, l'affectation, à son profit, et sur décision des autorités de tutelle, de nouvelles recettes ou, conformément aux dispositions du code de la sécurité sociale, le versement d'une contribution publique au FOREC.
Droit civil - Médecine - Responsabilité civile médicale - Examen du rapport
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a expliqué que la proposition de loi relative à la responsabilité civile médicale, déposée le 25 octobre dernier le président Nicolas About, visait à apporter une première réponse aux difficultés que connaît aujourd'hui l'assurance en responsabilité civile médicale. Il a souligné que ces difficultés étaient anciennes et malheureusement bien antérieures à la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. Elles tenaient notamment au développement important du contentieux médical et d'une jurisprudence de plus en plus souvent défavorable aux professionnels de santé ; elles provenaient également de facteurs propres au monde de l'assurance et des difficultés que ce secteur connaît depuis les attentats du 11 septembre 2001.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a fait valoir que ces difficultés avaient aujourd'hui un retentissement direct sur le fonctionnement de notre système de santé : le retrait - très médiatisé - de plusieurs compagnies d'assurance du marché de la responsabilité civile médicale privait de nombreux médecins libéraux, la moitié des cliniques privées et certains hôpitaux publics de la possibilité de s'assurer. Si rien n'était entrepris, cette situation pourrait - dès le 1er janvier 2003 - interdire à ces professionnels et à ces établissements de santé de poursuivre leur activité.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a rappelé que le Gouvernement avait rapidement pris la mesure du péril qui menaçait ainsi des pans entiers de notre système de santé. Après avoir largement consulté les représentants du système de soins, les assureurs et les associations de malades, qu'il avait réunis lors d'une table ronde le 7 octobre dernier, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées avait annoncé qu'une modification de la loi du 4 mars 2002 apparaissait nécessaire afin d'inciter les assureurs à revenir sur le marché de la responsabilité civile médicale. Tel était précisément l'objet de la proposition de loi déposée par le président Nicolas About, issue largement de cette concertation, qui visait à rétablir le bon fonctionnement du marché de l'assurance en responsabilité civile médicale tout en préservant les droits des malades, et notamment des victimes d'infections nosocomiales. Afin de rendre véritablement effective l'obligation d'assurance des professionnels et établissements de santé, introduite par la loi du 4 mars 2002, il était en effet apparu nécessaire à l'auteur de cette proposition de loi d'adapter les conditions de mise en cause de la responsabilité de ces derniers, et d'intervention de leurs assureurs. Il serait vain, en effet, d'imposer une obligation d'assurance si aucun assureur n'est disposé à couvrir le risque médical.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a expliqué que l'article premier de la proposition de loi opérait ainsi un partage de la réparation financière des dommages résultant d'infections nosocomiales entre les assureurs et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), institué par la loi du 4 mars 2002.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a indiqué que selon une enquête réalisée en 2001 par l'Institut de veille sanitaire auprès de 1.533 établissements de santé, publics et privés, regroupant 78 % des lits d'hospitalisation en France, 7 % des patients hospitalisés avaient contracté une infection nosocomiale lors de leur séjour. Dans ce contexte, le dispositif, qui résulterait de la proposition de loi, distinguait les infections nosocomiales ayant généré de faibles dommages, qui resteraient couvertes par les assureurs des professionnels et des établissements et dont le régime d'indemnisation n'est pas modifié, et les infections nosocomiales ayant généré des dommages graves, qui seraient indemnisées par l'ONIAM au titre de la solidarité nationale.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a souligné que, naturellement, ce dispositif ne remettait en aucune façon en cause le niveau de garantie et d'indemnisation dont bénéficieront les victimes d'infections nosocomiales : il répartissait simplement de manière plus équilibrée la charge financière que représente cette indemnisation. Une telle modification de la loi du 4 mars 2002 n'était cependant possible que si l'incitation des établissements à maîtriser le risque nosocomial était parallèlement renforcée. Le risque serait évidemment que le transfert à la charge de la solidarité nationale de l'indemnisation des dommages graves provoqués par les infections nosocomiales contribue à déresponsabiliser les établissements de santé et l'ensemble des personnels soignants.
Tel n'est évidemment pas l'objet de la proposition de loi. La lutte contre les infections nosocomiales est, aux yeux de la commission, un enjeu essentiel de santé publique. Les efforts menés depuis une vingtaine d'années pour sensibiliser l'ensemble des équipes sur les efforts d'hygiène et d'asepsie qui permettent de prévenir ces infections doivent à l'évidence être poursuivis et accentués. Comme l'a souligné avec raison l'auteur de la proposition de loi, les infections nosocomiales ne sont pas une fatalité.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a souligné que c'était la raison pour laquelle la proposition de loi, dans son article premier, maintenait la possibilité d'un recours subrogatoire de l'ONIAM contre l'assuré responsable de l'infection nosocomiale en cas de faute établie à l'origine du dommage, notamment le manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales. De même, prévoyait-elle que les commissions régionales d'indemnisation informeraient le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation compétent, ainsi que l'ONIAM, des infections nosocomiales dont elles auraient eu connaissance et qui présentent le caractère de gravité requis pour une indemnisation au titre de la solidarité nationale. Dans un souci de transparence accrue, l'article premier prévoyait également que l'ONIAM adresserait au Parlement et à la Commission nationale des accidents médicaux, placée auprès des ministres chargés de la santé et de la justice, un rapport semestriel sur les infections nosocomiales dont il aura eu connaissance. Ce rapport serait rendu public et serait dès lors accessible à tous.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a considéré que loin d'alléger la responsabilité pesant sur les professionnels et établissements de santé en matière d'infections nosocomiales, le dispositif proposé faisait peser sur ceux d'entre eux qui se rendraient coupables de fautes ou de négligences la double menace d'une action subrogatoire de l'ONIAM et d'une publicité particulièrement dissuasive.
Il a précisé que l'article 2 de la proposition de loi reportait l'application des dispositions pénales, introduites par la loi du 4 mars 2002, applicables aux professionnels et établissements de santé en cas de manquement à l'obligation d'assurance et que l'article 3, qui ne figurait pas dans la proposition de loi initiale, tendait à lever toute ambiguïté quant à la date d'application du dispositif d'indemnisation de l'aléa thérapeutique mis en place par la loi du 4 mars 2002, qui s'applique aux accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales survenus au plus tôt six mois avant la publication de la loi, soit postérieurement au 5 septembre 2001.
Il a ajouté que les articles 4 et 5 définissaient les modalités d'une limitation dans le temps de la durée de garantie des contrats d'assurance de responsabilité civile médicale, concrétisant ainsi le souhait formulé par le Sénat lors de l'examen du projet de loi relatif aux droits des malades.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a conclu en soulignant que l'adoption de la proposition de loi devrait contribuer, en restaurant le marché de la responsabilité civile médicale, à préserver la pérennité et la qualité de notre système de santé.
M. Alain Vasselle a souhaité savoir si la France présentait un taux d'infections nosocomiales plus élevé que les autres pays européens. Il s'est interrogé sur le régime juridique de la responsabilité en matière d'infections nosocomiales.
M. Nicolas About, président, a expliqué que la loi du 4 mars 2002 instituait une présomption de responsabilité des établissements en cas d'infections nosocomiales. Il a souligné que la proposition de loi ne remettait pas en cause ce principe mais qu'elle opérait un partage de la charge de l'indemnisation entre les assureurs et la solidarité nationale. Il a fait valoir qu'en cas de faute établie, l'ONIAM conserverait la possibilité de se retourner contre l'établissement responsable et son assureur. Il a signalé la très grande difficulté à déterminer avec certitude l'origine d'une infection nosocomiale.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a indiqué que la loi du 4 mars 2002 n'avait fait qu'inscrire dans la loi la jurisprudence bien établie en matière d'infections nosocomiales. Il a précisé que seuls 3 % des sinistres débouchaient sur des taux d'incapacité permanente supérieurs à 25 %, seuil retenu par la proposition de loi, et auraient donc vocation à être indemnisés par la solidarité nationale. Il a souligné néanmoins que la proposition de loi incluait également, dans le champ de la solidarité nationale, l'indemnisation des décès dont le nombre apparaissait difficile à évaluer. Il a précisé qu'en matière d'infections nosocomiales la France se situait dans la moyenne européenne mais que les cas répertoriés étaient souvent plus graves que chez nos voisins en raison de la prévalence de bactéries multirésistantes.
M. Paul Blanc a félicité M. Nicolas About de l'initiative qu'il avait prise. Soulignant le nombre important de cliniques et de praticiens qui ne seraient plus couverts à compter du 1er janvier 2003, il a considéré que l'on se trouvait aujourd'hui dans une impasse dont il convenait de sortir le plus rapidement possible. Il s'est enquis du calendrier prévisionnel d'examen de ce texte.
M. Nicolas About, président, a indiqué que la proposition de loi serait examinée par le Sénat le mardi 12 novembre à 16 heures. Rappelant qu'il avait déposé ce texte en étroite concertation avec le Gouvernement, il a souligné qu'il avait tenu néanmoins à se démarquer des propositions de ce dernier sur deux points essentiels : il avait ainsi choisi de retenir la notion de faute établie et non de faute lourde, contrairement à ce que suggérait le Gouvernement ; il avait également introduit un mécanisme d'information de l'ONIAM et du Parlement sur les infections nosocomiales indemnisées au titre de la présente loi, afin de maintenir une sorte « d'épée de Damoclès » sur les professionnels de santé. Il a ajouté que les agences régionales de l'hospitalisation seraient également informées de ces infections nosocomiales et qu'il leur appartiendrait de prendre les mesures nécessaires si ce type d'événement se multipliait dans certains établissements. Il a fait valoir qu'il avait souhaité que les infections nosocomiales fassent l'objet, non seulement d'une indemnisation, mais aussi d'un véritable suivi sanitaire.
M. Jean-Pierre Godefroy a considéré que les assureurs étaient en train de jouer le pire des jeux. Il a souligné que le retrait de certains d'entre eux du marché de l'assurance médicale avait été décidé bien avant la loi du 4 mars 2002 et avait pour conséquence la disparition de toute possibilité d'appel d'offres pour l'assurance d'un certain nombre d'hôpitaux publics. Il a fait observer que ceci aurait des répercussions dans les budgets des établissements. Il s'est interrogé sur le risque de déresponsabilisation que comportait la proposition de loi à partir du moment où certaines charges d'indemnisation étaient transférées à la solidarité nationale ainsi que sur le coût pour l'assurance maladie de cette modification de la loi du 4 mars 2002. Il a signalé que les primes d'assurances versées par les professionnels de santé ou les établissements avaient crû de 25 % et s'est demandé si le rêve des assureurs ne serait pas finalement d'assurer sans risque.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a considéré que ce texte n'était pas conçu pour plaire aux assureurs. Evoquant le départ de certaines compagnies d'assurances étrangères, il a fait observer que celles-ci ne reviendraient pas sur le marché de l'assurance médicale, quoique l'on fasse. Il a jugé que la loi du 4 mars 2002, dite loi Kouchner, n'était en rien à l'origine de ces retraits d'assureurs et que l'augmentation constatée du contentieux médical restait malgré tout limitée, ce qui tempérait les craintes exprimées par certains d'une judiciarisation « à l'américaine ». Il a considéré que l'augmentation des primes d'assurances demandées aux professionnels de santé devait être intégrée dans le cadre des négociations conventionnelles menées actuellement avec l'assurance maladie.
Il a rejeté l'idée d'une déresponsabilisation des praticiens et des établissements en faisant valoir la possibilité de recours dont disposerait l'ONIAM en cas de faute établie à l'origine de l'infection nosocomiale.
M. Michel Esneu s'est dit surpris de la réaction des assureurs qui annonçaient ainsi brutalement leur départ du marché de la responsabilité civile médicale. Evoquant les infections nosocomiales, il s'est demandé s'il ne serait pas nécessaire, dans un souci de prévention, de limiter le nombre de visiteurs dans les hôpitaux car ceux-ci étaient à l'évidence porteurs de germes.
M. Nicolas About, président, a rappelé que les hôpitaux s'organisaient autrefois autour de pavillons consacrés chacun à des pathologies spécifiques. Il a souligné qu'aucun enfant n'était admis dans les maternités il y a encore vingt ans, ce qui n'était plus le cas aujourd'hui. Il s'est étonné de cette diminution de la vigilance et s'est demandé s'il ne conviendrait pas de réfléchir à une réglementation des visites plus adaptée, qui permette de préserver à la fois les malades et les visiteurs. Evoquant l'augmentation considérable des primes d'assurances demandées à certains établissements de santé, il a indiqué que le Gouvernement entendait déposer un amendement exonérant de l'obligation d'assurance l'Assistance publique - hôpitaux de Paris (AP-HP), les Hospices civils de Lyon et l'Assistance publique de Marseille, qui redeviendraient ainsi leur propre assureur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a précisé que l'on ne connaissait pas véritablement le nombre d'infections nosocomiales dans notre pays et que le chiffre souvent avancé de 800.000 cas par an était sans doute très approximatif.
M. André Lardeux a dit partager les objectifs de la proposition de loi ; il s'est demandé si elle suffirait à faire revenir les assureurs sur ce marché alors que la société tout entière semblait atteinte d'une folie procédurière.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a fait valoir que le risque zéro n'existait pas en matière médicale. Il a souligné que le développement du contentieux ne concernait, en pratique, que certaines spécialités « à risques » où les praticiens hésitaient désormais à pratiquer certains actes, telles les échographies foetales. Il a jugé qu'il convenait probablement d'aller dans le sens d'une plus grande mutualisation des risques entre les différentes spécialités médicales.
M. Nicolas About, président, a considéré que les assureurs qui avaient quitté le marché de la responsabilité civile médicale ne reviendraient vraisemblablement pas. Il a jugé qu'il convenait cependant d'assurer la survie des assureurs mutualistes spécialisés (Sou médical, MACSF...), indispensables au bon fonctionnement de l'assurance médicale.
M. Guy Fischer s'est dit très réservé sur la proposition de loi, qu'il a qualifiée de compromis. Citant l'exemple de sa ville qui n'était plus assurée, il a souligné la nécessité de répondre à la situation ainsi créée. Il a jugé très condamnable la position des compagnies d'assurances, qui souhaitaient encaisser les primes sans assumer les risques, et a dénoncé le chantage qu'elles exerçaient aujourd'hui sur les professionnels de santé.
M. Nicolas About, président, a expliqué que la proposition de loi ne remettait pas en cause les dispositions de la loi Kouchner qui prévoyaient une responsabilité des établissements en cas d'infections nosocomiales, même en l'absence de faute. Il a souligné que l'on aménageait simplement le mécanisme d'indemnisation afin de mieux partager, dans un souci de juste équilibre, la charge financière entre les assureurs et la solidarité nationale.
M. Alain Vasselle a souhaité obtenir des précisions sur la proposition du rapporteur de prévoir dans les recettes de l'ONIAM une dotation versée par l'Etat. Il a demandé si l'obligation de s'assurer était effectivement maintenue pour les professionnels et les établissements de santé.
M. Gilbert Chabroux s'est dit préoccupé par le problème que soulevait le départ de certains assureurs médicaux. Il a fait part de sa perplexité quant à l'évolution réelle du nombre des contentieux ; il a souligné que les chiffres ne reflétaient pas « l'explosion » avancée par certains assureurs. Il a regretté que l'on remette en question la loi Kouchner, qui avait recueilli l'unanimité, en cédant ainsi à la pression des assureurs. Il s'est demandé si la proposition de loi ne préfigurait pas l'évolution de la sécurité sociale telle que la préconisait M. Jacques Barrot, avec la prise en charge des gros risques par la solidarité nationale et celle des petits risques par les assureurs privés. Il a dit partager la préoccupation de l'auteur et du rapporteur de la proposition de loi mais a fait part de ses hésitations sur le texte proposé.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, a indiqué que l'ajout qu'il proposait s'agissant des recettes de l'ONIAM visait uniquement à permettre à l'Etat de rembourser à l'Office les sommes que celui-ci verserait au titre de l'indemnisation des accidents vaccinaux. Il a rappelé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 prévoyait une dotation de 70 millions d'euros pour l'ONIAM en 2002 et en 2003.
Il a souligné que la proposition de loi maintenait naturellement l'obligation d'assurance pour les professionnels et établissements de santé, obligation qui ne pourrait entrer en vigueur qu'à compter de l'installation du Bureau central de tarification. Il a considéré qu'il n'était pas question de se déjuger sur la loi du 4 mars 2002 mais qu'il fallait aussi entendre le désarroi exprimé par les professionnels de santé. Il a fait valoir que la loi Kouchner constituait un progrès notable en ce qu'elle permettait l'indemnisation de l'aléa thérapeutique et la mise en place de véritables structures de conciliation. Il a souligné la nécessité d'un véritable débat afin de faire prendre conscience à l'opinion publique que l'aléa médical existait et qu'il n'était pas possible de tout dépister.
Puis la commission a adopté les propositions du rapporteur qui constituent les conclusions de la commission sur la proposition de loi.
Jeudi 7 novembre 2002
- Présidence de M. Nicolas About, président -
PJLF pour 2003 - Audition de M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité
La commission a procédé à l'audition de M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, sur le projet de loi de finances pour 2003.
Rappelant que le projet de budget du travail et de la solidarité s'inscrivait dans la stratégie gouvernementale visant à stimuler la croissance et l'emploi, M. François Fillon a tout d'abord présenté les grandes lignes du budget travail.
Il a indiqué que les crédits s'élèveraient à 15,7 milliards d'euros en 2003, tout en observant que ce chiffre ne rendait pas intégralement compte de l'effort en faveur de l'emploi, puisqu'il faut également y ajouter les baisses de charges sur les bas salaires, qui mobiliseront 1 milliard d'euros supplémentaires.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a précisé que ce budget participait d'une stratégie générale pour l'emploi reposant sur deux piliers : la revalorisation du travail et la restauration de la compétitivité des entreprises, mais aussi la priorité donnée à l'emploi dans le secteur marchand.
A cet égard, il a souligné le caractère emblématique de la politique menée en faveur de l'emploi des jeunes que traduit le présent budget. Il a ainsi indiqué que les crédits en faveur du contrat jeune en entreprise permettraient l'embauche de 90.000 jeunes et que les crédits en faveur de l'alternance devraient autoriser une progression de 8 % du nombre de contrats. Il a également indiqué qu'il serait progressivement mis fin au système des emplois-jeunes : mal ciblé, peu valorisant en termes de rémunération et de débouchés, il ne fera plus l'objet d'aucun recrutement même si, pour les associations dont les projets sont les plus utiles, des mesures d'appui seront mises en place durant trois ans, afin de rendre leurs activités viables au-delà des cinq années couvertes par l'aide initiale.
M. François Fillon a souligné que les emplois-jeunes seraient progressivement remplacés par les contrats d'insertion dans la vie sociale (CIVIS), indiquant que ce contrat sera plus resserré vers les jeunes les plus en difficulté et que le plus grand soin sera apporté à la formation proposée aux jeunes afin d'assurer leur insertion professionnelle à l'issue de leur contrat.
Il a également déclaré que le projet de budget traduisait le lancement véritable de la politique de validation des acquis de l'expérience, les crédits correspondants étant multipliés par cinq afin de financer le dispositif de validation et de permettre la mise en place des structures d'information et de conseil. Il a sur ce point précisé que la validation des acquis de l'expérience sera l'une des composantes de la formation tout au long de la vie, que le Gouvernement entendait promouvoir.
Il a souligné que la même préoccupation inspirait l'effort budgétaire concernant l'allocation du fonds de formation, dont la dotation passerait de 38 à 73 millions d'euros.
Concernant la promotion de l'emploi et les adaptations économiques, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a indiqué que le budget reflétait une double priorité. D'une part, le Gouvernement souhaite permettre aux entreprises dont l'existence est menacée de gérer très en amont, et dans les meilleures conditions possibles, les restructurations auxquelles elles doivent faire face, ce qui conduit alors le Gouvernement à privilégier les dispositifs en faveur des salariés des petites et moyennes entreprises et des entreprises les plus en difficulté. D'autre part, alors que le taux d'emploi en France des personnes âgées de plus de 55 ans est l'un des plus faibles d'Europe, la politique de retrait anticipé des salariés âgés et expérimentés du marché du travail est clairement contraire aux orientations du Gouvernement qui a décidé, dans le présent budget, de réduire l'impact du dispositif de cessation anticipée d'activité en prévoyant une augmentation de la participation des entreprises aux préretraites fonds national de l'emploi (FNE) et, surtout, aux préretraites progressives.
Il a également insisté sur la très forte hausse des crédits relatifs à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, dont le montant est presque décuplé et sur la création d'une cellule interministérielle visant à mieux anticiper les mutations économiques et industrielles.
S'agissant de la gestion des politiques de l'emploi, il a mis l'accent sur les efforts significatifs consentis au profit de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) et de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), dont les crédits progressent de 1,7 % dans chaque cas.
Au total, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a considéré que le projet de budget du travail reposait sur un double choix : la priorité aux mesures d'insertion dans l'emploi marchand, grâce aux baisses de charges, mais aussi grâce à des dispositifs plus ciblés, comme le contrat jeune en entreprise, et la priorité aux publics les plus en difficulté pour l'accès aux contrats aidés et aux différents instruments de soutien à la formation et à la recherche d'emploi. Il a jugé que ces priorités étaient de nature à affermir la situation de l'emploi dans un contexte économique particulièrement difficile.
Abordant les crédits relatifs à la solidarité, il a indiqué que ceux-ci augmentaient de 4,8 % en 2003, observant que ce taux de progression, très supérieur à celui de l'ensemble du budget, montrait la priorité accordée à tous les dispositifs destinés aux plus démunis.
Rappelant que l'essentiel de ces crédits était consacré au revenu minimum d'insertion (RMI), à hauteur de 4,5 milliards d'euros, il a précisé que le milliard et demi d'euros restant se répartissait entre trois postes principaux : les crédits d'intégration et de lutte contre l'exclusion, l'aide médicale d'Etat et la formation des professions sociales.
M. François Fillon a souligné que son objectif majeur consistait à privilégier, dans la mesure du possible, l'insertion par rapport à l'assistance. A cet égard, il a constaté que le volet insertion du RMI ne donnait pas satisfaction et qu'à l'issue du prochain débat pour le quinzième anniversaire du RMI, des moyens seraient trouvés afin de trouver des parcours de retour à l'activité.
Il a ajouté que sa seconde priorité concernait le dispositif d'accueil des personnes en difficulté, observant qu'un effort très important était consenti à ce titre par une progression de 7 % des crédits. Il a indiqué, à ce propos, que tous les types d'accueil bénéficieraient de cet effort : les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) pour lesquels 500 places supplémentaires seraient créées en 2003, les pensions de famille et les structures pour mineurs, l'accueil d'urgence et les centres d'accueil pour les demandeurs d'asile et les réfugiés pour lesquels les crédits augmenteront de plus de 50 % compte tenu de la très forte hausse du nombre de demandeurs d'asile.
S'agissant de l'aide médicale de l'Etat, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a observé que ce dispositif, qui s'adresse principalement aux étrangers en situation irrégulière, connaissait une augmentation constante du nombre de ses bénéficiaires. Il a indiqué que les crédits pour 2003 seraient près de quatre fois supérieurs à ceux prévus initialement pour 2002, qu'il souhaitait également mieux maîtriser ces dépenses à l'avenir et qu'il menait actuellement, à cette fin, une réflexion sur les moyens d'améliorer le contrôle des conditions d'accès des bénéficiaires.
S'agissant de la formation au travail social, il a souligné qu'il s'agissait d'un élément essentiel de la réussite des politiques conduites dans le domaine de l'action sociale. Il a précisé que les crédits qui y seront consacrés augmenteront de 13 %, cet effort permettant de former 3.000 étudiants supplémentaires.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a également déclaré que la politique d'accueil, d'écoute et d'orientation des personnes âgées serait poursuivie, indiquant que les centres locaux d'information et de coordination (CLIC) continueront à être financés à la hauteur de 23 millions d'euros, mais que ces crédits prendront la forme d'une aide au démarrage pour les nouveaux CLIC.
S'agissant de l'égalité entre les hommes et les femmes, il a souligné que les crédits progresseraient de 2,3 %, l'accent étant mis notamment sur la promotion de l'égalité professionnelle et la lutte contre la violence et l'exclusion.
M. François Fillon a enfin souligné que les crédits de son ministère étaient ceux du travail et de la solidarité et a observé que notre pays parvenait mal à conjuguer ces deux valeurs. Il a alors souligné que la politique du Gouvernement visait à favoriser leur conciliation par la restauration de la valeur du travail, grâce à l'augmentation des revenus de ceux qui touchent les salaires les plus bas, et par la mise en place d'une véritable politique de solidarité fondée non pas sur la seule assistance, mais sur un ensemble d'outils destinés prioritairement aux moins favorisés (baisse des charges, contrats aidés, formations).
Il a enfin conclu qu'il ne s'agissait pas de choisir entre travail et solidarité, mais de restaurer simultanément ces deux valeurs.
M. Louis Souvet, rapporteur pour avis des crédits du travail, s'est inquiété de l'évolution de la situation financière de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) et s'est interrogé sur sa capacité à verser une contribution de 1,2 milliard d'euros au budget de l'Etat pour 2003.
Il s'est également interrogé sur une éventuelle majoration des crédits consacrés aux contrats emploi-solidarité après les récentes annonces du Gouvernement indiquant une augmentation du nombre de contrats et des dérogations pour rétablir le taux de participation de l'Etat.
Il a enfin souhaité avoir des précisions sur les dotations inscrites au projet de budget, à hauteur de 50 millions d'euros, et destinées à permettre la pérennisation des emplois-jeunes créés par les associations.
En réponse au rapporteur pour avis, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a déclaré que l'Etat n'était pas indifférent aux difficultés que rencontre le régime d'assurance chômage. Il a rappelé qu'à l'issue de l'accord du 19 juin 2002, le Gouvernement avait validé les mesures envisagées par les partenaires sociaux, en agréant l'ensemble des avenants à la convention d'assurance chômage et en acceptant de reporter en 2003 le versement de 1,2 milliard d'euros. Précisant que des négociations importantes s'engageront à la fin de l'année pour faire face au déficit prévu du régime, il a indiqué qu'il examinerait avec attention les solutions proposées par les partenaires sociaux, en fonction de la situation financière de l'UNEDIC, dans le cadre de la procédure d'agrément.
Rappelant que les contrats emploi-solidarité constituent un dispositif utile pour prévenir un chômage prolongé des publics présentant les plus grandes difficultés pour accéder à l'emploi, M. François Fillon a jugé nécessaire d'adapter le volume de ces contrats à l'évolution de la situation de l'emploi. Il a précisé que, conformément à l'arbitrage du Premier ministre, le Gouvernement entendait maintenir un rythme de création moyen, d'environ 20.000 contrats par mois sur 2003. Il a indiqué que les crédits disponibles permettaient actuellement de financer 160.000 contrats pour 2003 et qu'il faudrait donc sans doute inscrire un complément de crédits lors de l'examen du collectif pour 2003.
Il a fait part de son souhait de moderniser le dispositif, en annonçant son intention de fusionner les contrats emploi-solidarité et les contrats emploi consolidé dans le cadre d'un contrat unique mais modulable, pour mieux répondre aux besoins des publics concernés. Il a toutefois souligné que ce dispositif de traitement social du chômage ne constituait pas une solution pour réduire le chômage, ni pour offrir une insertion durable sur le marché du travail. Il a en conséquence indiqué que le Gouvernement avait décidé de ne plus subventionner uniformément, à hauteur de 95 %, ces contrats et qu'il était prévu de ramener le taux de participation de l'Etat au niveau prévu par le décret du 30 janvier 1990, soit 65 % et 85 % pour les publics les plus en difficulté. Il a néanmoins estimé que la mise en oeuvre de ces règles ne devait compromettre ni la viabilité des structures d'insertion des plus fragiles, ni l'emploi des personnes les plus vulnérables. Il a alors indiqué avoir demandé à ses services de conserver, à titre temporaire, la possibilité de maintenir des taux de prise en charge majorés jusqu'à 95 % dans deux cas : les jeunes en grande difficulté et les chantiers d'insertion. Il a indiqué que le coût de ces mesures, soit 10 millions d'euros environ, pourrait être absorbé sans difficulté dans le cadre de la gestion 2003.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a toutefois souligné que la politique de l'emploi ne pouvait se réduire au soutien à l'emploi public ou parapublic et que le Gouvernement avait choisi de réorienter les dispositifs d'aide à l'emploi et à l'insertion vers le secteur marchand et notamment les contrats jeunes, dont les premiers résultats sont extrêmement encourageants.
S'agissant des emplois-jeunes, il a rappelé que le Gouvernement avait abordé avec pragmatisme le devenir de ce programme, soucieux avant toute chose du sort des jeunes concernés. A cet égard, il a observé que le poids budgétaire de ce programme s'élèverait à 2,7 milliards d'euros en 2003, ce qui est considérable. Rappelant qu'il s'était engagé à offrir des mesures de pérennisation des emplois créés, dans le but d'accompagner les associations dans la recherche de sources alternatives de financement, il a indiqué que, pour les associations qui, au terme de 5 ans n'auraient pas atteint leur autonomie, des conventions d'une durée de 3 ans pourraient, de manière dégressive, prolonger l'aide de l'Etat et que ces mesures de pérennisation seraient mises en oeuvre avec une exigence renforcée quant à la professionnalisation des jeunes.
M. François Fillon a précisé que les 10 millions d'euros de crédits consacrés au soutien financier exceptionnel visent à permettre la conclusion d'un petit nombre de contrats dont la procédure d'agrément est en cours, au moment où la décision de suspendre le programme a été prise.
Pour les collectivités locales, il a jugé que le maintien des missions remplies par les emplois-jeunes devait faire l'objet d'une évaluation, mais que leur consolidation et leur pérennisation relevaient toutefois de leurs seules compétences, conformément au principe de libre administration des collectivités locales, même si les services de l'Etat contribueront naturellement à les aider pour mettre en place des voies d'accès à la fonction publique territoriale.
S'agissant enfin des jeunes ne pouvant entrer dans le cadre des dispositifs de pérennisation des emplois et ne trouvant pas de solution immédiate sur le marché du travail, il a déclaré que le service public de l'emploi serait mobilisé en leur faveur.
Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis des crédits de la formation professionnelle, s'est inquiétée de la faible attractivité des contrats de qualification adultes (CQA), pour lesquels l'objectif de 14.000 signatures était sans doute surévalué. Elle a demandé au ministre comment il comptait tenir un tel objectif durant l'année 2003, alors que les crédits diminuaient.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a rappelé que le CQA, créé par la loi de 1998 relative à la lutte contre les exclusions, a été pérennisé en 2002. Il s'adressait à des personnes sans emploi, âgées de 26 ans et plus, rencontrant des difficultés sociales et professionnelles du fait d'une insuffisance de qualification. La rémunération était fixée en fonction du salaire minimum conventionnel, sans pouvoir être inférieure au SMIC. La formation était obligatoire, elle représentait 25 % de la durée du contrat. Dans le cadre du plan d'aide au retour à l'emploi - plan d'action personnalisé (PARE - PAP), cette formation pouvait être financée par l'UNEDIC pour les chômeurs indemnisés.
Il a expliqué que l'objectif poursuivi était double :
- permettre aux personnes ayant des difficultés pour retrouver un emploi d'accéder à une qualification reconnue ;
- aider les entreprises ayant des difficultés de recrutement à embaucher des salariés qualifiés.
Il a précisé que les CQA avaient concerné en 1999 (année de démarrage expérimental) 3.000 personnes.
Il a déploré la lenteur de la montée en charge puisque l'on prévoyait pour 2002, 11.000 contrats, c'est-à-dire un peu moins que la prévision initiale de14.000 contrats. Il a expliqué que la principale raison était certainement la remontée du chômage, qui affectait l'ensemble des contrats de qualification. Il a ajouté que son ministère prévoyait 14.000 contrats pour 2003, ce qui, autrement dit, reprenait l'objectif initial de l'année passée. Il a ensuite soutenu que la diminution des crédits évoquée par Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis, n'y faisait nullement obstacle, car elle était liée à une mesure technique décidée par le précédent gouvernement dans le cadre de la réforme de 2002, le remplacement des exonérations de cotisations sociales par une prime versée en fin de contrat. Dans ces conditions, l'objectif de 14.000. contrats ne lui paraissait pas hors d'atteinte.
Il a jugé qu'une modification du dispositif en 2003 serait plutôt de nature à freiner la montée en charge qu'à la stimuler. Il a reconnu qu'il fallait laisser aux acteurs le temps de s'approprier les dispositions les plus récentes. Il a conclu que, pour sa part, il était déterminé à encourager les services à développer ce dispositif, notamment en se rapprochant des branches professionnelles qui manquent de main-d'oeuvre qualifiée.
M. Jean-Pierre Fourcade a alerté le ministre sur le caractère méconnu des contrats de qualification adultes auprès du grand public. Il a préconisé de sensibiliser les services publics de l'emploi grâce à une vaste campagne d'information.
Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis, a affirmé partager entièrement cet avis. Puis, après avoir rappelé que la dotation générale de décentralisation augmentait de 2,7 % à structure constante, elle s'est interrogée sur la manière la plus pertinente d'approfondir la décentralisation, tout en limitant les risques de disparités régionales. Par ailleurs, elle a demandé au ministre comment cette décentralisation s'articulerait avec la négociation interprofessionnelle des partenaires sociaux.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a observé que le projet de loi de finances pour 2003 prévoyait le transfert aux régions des aides à l'embauche et à la formation des apprentis, conformément à la loi relative à la démocratie de proximité du 27 février 2002. Il a estimé que ce transfert ne posait pas de difficultés aux régions. En effet, afin de leur éviter tout problème technique, il avait été décidé de ne transférer que les nouveaux contrats, conclus à compter du 1er janvier 2003 (soit 46 millions d'euros sur un total de 750 millions d'euros).
En ce qui concerne la décentralisation de la formation, il a rappelé que la compétence des régions en la matière avait été reconnue par les lois de 1983 et de 1993. Toutefois, il a assuré que l'Etat continuerait d'assumer de nombreuses compétences : le contrôle pédagogique et financier de l'apprentissage, le financement des jeunes en insertion à travers les missions locales et le programme trajet d'accès à l'emploi (TRACE), la prise en charge de la majeure partie des formations des demandeurs d'emploi adultes, notamment dans le cadre de l'AFPA, ainsi que leur rémunération, l'aide aux entreprises et aux branches professionnelles pour le développement de la formation.
Puis il a jugé qu'il fallait aller plus avant dans la décentralisation de la formation professionnelle. Cela signifiait à ses yeux la nécessité de préciser les rôles respectifs de l'Etat et des régions, l'Etat devant conserver la responsabilité d'ordre législatif et réglementaire de la définition et du contrôle du système de formation professionnelle, de la certification et rester garant de l'égalité d'accès et de traitement des personnes au regard de la formation, et de définir les blocs de compétences à transférer aux régions, en ayant à l'esprit que certains pans de la formation professionnelle étaient liés à la politique de l'emploi qui, elle devait rester de la compétence de l'Etat.
Par ailleurs, se posait le problème spécifique de l'AFPA, pour laquelle plusieurs scenarii pouvaient être envisagés. Sur ce point, un projet de loi serait soumis en conseil des ministres au cours de l'année 2003.
Cela signifiait également la nécessité de prévoir à côté d'un « plus » de décentralisation un « mieux » de décentralisation. Les régions pourraient assurer la coordination des différentes politiques de formation, afin d'assurer à chacun une véritable « formation tout au long de la vie ».
Puis M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a rappelé que les partenaires sociaux avaient été invités, dans un courrier du 22 octobre, à reprendre la négociation sur la formation professionnelle. Il a indiqué avoir pressé les partenaires sociaux d'avancer sur le dossier de la décentralisation. Il a conclu que le chantier de la formation professionnelle n'était pas simple et que la décentralisation ne pouvait pas être réduite à un slogan.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis des crédits de la solidarité, a observé que le ralentissement de la croissance entraînait rapidement une hausse des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion (RMI) et que la loi de finances rectificative pour 2002 avait déjà dû abonder ces crédits de 300 millions d'euros, du fait de la sous-estimation initiale des besoins.
Il a voulu savoir quelle serait la teneur des « mesures d'incitation au retour à l'emploi et de redynamisation de la démarche d'insertion » qui permettaient de gager à plus 75 % l'augmentation des crédits due à la hausse du nombre de bénéficiaires pour 2003 et leur articulation avec un éventuel projet de « revenu minimum d'activité ».
Il a également souligné le fait qu'un grand nombre de bénéficiaires du RMI n'étaient pas inscrits à l'ANPE et s'est interrogé sur les moyens de remédier à cette situation.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a confirmé que la dotation initiale au titre du RMI avait été sous-évaluée d'environ 300 millions d'euros et que la loi de finances rectificative avait dû pallier cette insuffisance.
Indiquant que la dépense réelle pour 2002 serait de l'ordre de 4,7 milliards d'euros et la dotation pour 2003 de 4,4 milliards d'euros, il a précisé les mesures qui seraient prises pour assurer cette diminution.
Il a d'abord constaté que le volet « insertion » du RMI ne donnait pas satisfaction, car, seule, une faible part des bénéficiaires (un quart en cinq ans) accédait à l'emploi, seul, un bénéficiaire sur deux signait un contrat d'insertion et l'obligation légale annuelle pour les départements de consacrer 17 % des dépenses du RMI au volet insertion était inégalement respectée.
Il a indiqué qu'un plan de redynamisation du volet insertion du RMI avait été engagé en 2002, reposant sur la diffusion d'indicateurs de résultats, notamment en matière de taux de contractualisation et de taux de sortie vers l'emploi, la comparaison de ces résultats avec des objectifs précis et le recensement et la diffusion des bonnes pratiques en matière d'insertion au plan local.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a ensuite déclaré envisager une décentralisation du RMI et il a fait part de son intention de confier à un parlementaire une mission sur ce sujet et de finaliser ses propositions dans le courant de l'année 2003. Il a estimé que, si les départements se voyaient confier la gestion de l'ensemble du dispositif, ils pourraient davantage mettre en place une véritable politique d'insertion pour les publics les plus éloignés de l'emploi.
Il a enfin confirmé réfléchir à la création d'un « revenu minimum d'activité », proposant la signature d'un contrat dans le secteur non-marchand, à titre de transition vers un emploi classique, qui devait rester l'objectif à long terme pour tous les publics.
M. Gilbert Chabroux a souligné l'ampleur des modifications intervenues depuis la présentation du projet de loi de finances, notamment quant au nombre annoncé de contrats emploi-solidarité, et à la participation de l'Etat. Il s'est alors interrogé sur la nature du vote demandé au Parlement, se demandant s'il s'agissait de voter des crédits ou d'approuver de simples perspectives.
Il a fait part de son impression d'une « navigation à vue » du Gouvernement en matière de politique de l'emploi, même s'il a reconnu que celle-ci devait s'adapter à l'évolution de la conjoncture. Observant la forte progression du chômage des jeunes, il s'est interrogé sur le sort du programme « trajet d'accès à l'emploi » (TRACE) et de la bourse d'accès à l'emploi. Il a souhaité avoir de plus amples précisions sur le nouveau CIVIS annoncé par le Gouvernement.
M. Bernard Seillier a demandé des précisions sur l'instauration, prévue par l'article 69 du projet de loi de finances pour 2003, d'une taxe au profit de l'Office des migrations internationales (OMI) et sur les actions nouvelles que cette taxe permettrait de financer.
Mme Gisèle Printz a estimé que le projet de budget pour 2003 restait très vague et faisait peu de cas des actions en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes.
M. Roland Muzeau a regretté la diminution de 960 millions d'euros des crédits consacrés à l'emploi, et notamment la situation réservée par le budget aux contrats emploi-solidarité, au programme TRACE et aux emplois-jeunes. Il a alors estimé que le projet de budget marquait une forte réorientation de la politique de l'emploi vers le secteur marchand, alors même que les exonérations de charges ne produisent pas les effets escomptés et que les employeurs ne jouent pas le jeu de la lutte contre le chômage. Il a également souhaité avoir des précisions sur le CIVIS et sur les aides à la pérennisation des emplois-jeunes.
M. André Lardeux a souligné le fait que le fonctionnement du RMI était trop rigide et que les textes qui le régissaient ne permettaient notamment pas la mise en oeuvre, par les départements, d'actions de prévention, ou de moduler les actions en fonction de l'âge du bénéficiaire.
Mme Janine Rozier s'est félicitée de l'exposé de M. François Fillon, s'agissant de la formation professionnelle. Elle a mis l'accent sur l'importance de la « formation tout au long de la vie » qu'elle a jugée particulièrement utile dans le bâtiment, les nouvelles technologies et l'artisanat. Sur ce point, elle a demandé au ministre de développer des mesures incitatives pour la formation des jeunes dans l'artisanat.
Mme Valérie Létard a insisté sur la situation des bénéficiaires du RMI, en situation de véritable handicap social, qui ne sont plus employables et notamment pas dans le secteur marchand. Elle a estimé que ces situations ne pourraient être mieux prises en compte qu'à condition de donner aux associations les moyens d'une action efficace, par la conclusion de conventions pluriannuelles de financement. Elle a également souligné le caractère désincitatif pour la prise d'un emploi, en particulier à durée déterminée, des conditions d'attributions des aides au logement, et notamment du décalage d'un an des ressources prises en compte.
Elle a enfin tenu à attirer l'attention du ministre sur la tension provoquée par l'afflux massif de réfugiés sur le dispositif des centres d'hébergement et de réinsertion sociale. Elle a salué, à cet égard, l'effort de création de places en centres d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) prévu en 2003.
M. Jean-Pierre Fourcade s'est déclaré favorable à la réorientation de la politique de l'emploi, mais a estimé que celle-ci ne produirait le résultat voulu qu'à la condition d'un important effort de communication en direction des structures d'insertion existantes. A cet égard, prenant l'exemple du nouveau contrat-jeune, il a souligné qu'il rencontrait dans sa commune une forte demande des entreprises, mais une absence d'appétence des jeunes, d'ailleurs peu orientés vers ce programme par les missions locales.
Il a également fait part de trois pistes en faveur d'une réorientation de la politique de l'emploi : accompagner l'arrêt du programme emplois-jeunes par le développement de l'apprentissage dans les collectivités locales, pénaliser le retrait anticipé des salariés âgés du marché du travail, et mettre en oeuvre rapidement le contrat d'intégration annoncé par le Président de la République pour favoriser l'accès à l'emploi des immigrés.
En réponse aux différents intervenants, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a souligné qu'à l'exception du nombre de contrats emploi-solidarité, le budget du travail n'avait en rien été modifié depuis sa première présentation. Il a, à ce propos, indiqué que la modulation du nombre de ces contrats en cours d'année était une pratique ancienne, que la fixation de leur taux de prise en charge n'était pas du domaine législatif et que le financement de tous les contrats serait garanti, soit en loi de finances initiale, soit en loi de finances rectificative.
Il a précisé que le programme TRACE n'était absolument pas abandonné puisque le projet de budget prévoyait 98.000 entrées pour 2003. Il a en revanche annoncé la suppression de la bourse d'accès à l'emploi, dans la perspective de la création à venir du CIVIS.
S'agissant du CIVIS, il a précisé que son objectif était de permettre sa mise en oeuvre à la mi-2003. Il a indiqué que ce contrat s'adresserait aux jeunes de 18 à 25 ans, de niveau baccalauréat, et serait géré de manière décentralisée, les missions locales évaluant les capacités des jeunes et leur proposant un contrat personnalisé. Il a déclaré que ce contrat pourrait notamment prévoir une bourse d'accès à l'emploi, une aide à la création d'entreprise ou le financement d'actions humanitaires et ouvrirait la possibilité d'une prise en charge, sur 3 ans, de 80 % du salaire des jeunes travaillant dans une association ou dans l'éducation nationale. Il a enfin indiqué que ce contrat ouvrirait une part importante à l'intervention des collectivités locales, et notamment aux régions pour son volet formation.
Concernant l'OMI, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a indiqué que la mesure annoncée visait à rétablir la taxe annulée par le Conseil d'Etat pour défaut de base légale et que son produit, estimé à 13 millions d'euros, permettrait de financer l'extension des plate-formes d'accueil de l'Office, ainsi que les « contrats d'intégration », annoncés par le Premier ministre. Il a précisé que ce dispositif serait opérationnel en juin 2003.
S'agissant du RMI, il a estimé que la décentralisation de ce dispositif avait notamment pour objectif de donner davantage de liberté aux départements dans la mise en oeuvre de la politique d'insertion. Il a indiqué que ce transfert serait opérationnel pour l'année 2004 et qu'une expérimentation dans ce domaine lui paraissait inutile, compte tenu de l'urgence de réformer le dispositif.
S'agissant du développement des contrats d'apprentissage, il a rappelé que le projet de budget pour 2003 prévoyait une augmentation de 7 % de ces contrats et un renforcement de la validation des acquis de l'expérience. Il s'est réjoui de la volonté de nombreuses branches, comme le bâtiment, d'adjoindre un système de tutorat aux nouveaux contrats jeunes en entreprise.
Concernant les effets de trappe à inactivité liés au dispositif du RMI, il a précisé que le cumul autorisé de l'allocation avec un revenu d'activité constituait un début de réponse, mais que les remarques concernant les aides au logement étaient une piste intéressante, qu'il intégrerait à sa réflexion sur la réforme du dispositif.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, est ensuite revenu sur la question des demandeurs d'asile. Il a déclaré être conscient de la saturation, provoquée par les afflux massifs de réfugiés, du dispositif des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS). Il a rappelé que l'accélération des procédures de traitement des demandes d'asile devait contribuer à désengorger ces institutions et à maîtriser davantage les flux de population.
En réponse à M. Jean-Pierre Fourcade, M. François Fillon a reconnu être conscient de la nécessité de mobiliser plus encore le service public de l'emploi à l'occasion de la réorientation de la politique de l'emploi. Il a toutefois observé une forte demande des entreprises pour le nouveau contrat-jeune.
En réponse à M. Roland Muzeau, il a insisté sur le nécessaire changement d'orientation de la politique de l'emploi. Il a constaté, de fait, que si les crédits diminuaient de 969 millions d'euros pour l'emploi aidé, ils augmentaient d'un milliard d'euros pour les allégements de charges.
Audition de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, et Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées
La commission a procédé à l'audition de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, et Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées sur le projet de loi de finances pour 2003.
M. Jean-François Mattei a indiqué que le projet de budget de son ministère pour 2003 s'élevait à 9,4 milliards d'euros, en progression de 4,4 % par rapport à 2002, en intégrant les crédits de gestion des politiques de santé et solidarité.
Il a fait part de sa satisfaction à l'égard de cette hausse qui traduisait la priorité accordée à son ministère dans un contexte fortement contraint.
Le ministre a d'abord souligné que le financement des grandes prestations de solidarité représentait près de 70 % du budget et que leur dynamique était très forte car elles progressaient de plus de 435 millions d'euros.
Il s'est réjoui de la part importante consacrée à l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et au fonds spécial invalidité (FSI) car le handicap constituait l'un des grands chantiers du quinquennat.
Il a souhaité rappeler l'importance de la couverture maladie universelle (CMU) mais également les mesures prises par le Gouvernement à ce titre. Il a ainsi précisé qu'une aide à l'acquisition d'une couverture complémentaire avait dû être mise en place cet été à destination des personnes situées juste au-dessus du seuil d'accès à la CMU complémentaire.
Le ministre a cependant estimé que son fonctionnement actuel n'était pas satisfaisant. Il a en particulier rappelé que certains organismes complémentaires voulaient se retirer du dispositif car ils perdaient de l'argent, compte tenu du niveau de déduction forfaitaire qui n'avait pas été revalorisé depuis 1999. Il a expliqué que cette situation était la raison d'être de la revalorisation significative (283 euros, contre 228 euros aujourd'hui) du montant de la déduction des organismes complémentaires qui participent à la CMU complémentaire.
Il a indiqué vouloir proposer en 2003 une réforme en profondeur du dispositif, pour clarifier le rôle des différents acteurs.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a constaté qu'il ne disposait que d'une marge de manoeuvre, limitée à 400 millions d'euros, pour conduire sa politique de santé.
Il a cependant estimé que le projet de loi de finances pour 2003 traduisait la priorité accordée par le Gouvernement à la santé publique, et notamment à la lutte contre le cancer, dans la mesure où d'importants financements nouveaux étaient dégagés.
Le ministre a également estimé que le choix implicite du curatif par rapport au préventif dans notre pays n'était plus acceptable et il a déclaré se fixer comme objectif de développer une véritable culture de la prévention.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a ainsi indiqué que les crédits du projet de loi de finances pour 2003 affectés aux programmes de santé publique ciblés sur la prévention, en particulier le cancer et les maladies transmissibles, étaient en progression de 30 % pour atteindre 173 millions d'euros en 2003.
Il a également rappelé son souhait de présenter une loi-cadre de santé publique au printemps 2003 et a indiqué que 5 millions d'euros avaient été provisionnés à ce titre dans le projet de loi de finances pour 2003.
Il a expliqué que le premier objectif de cette loi serait de clarifier le rôle des acteurs et de définir les objectifs prioritaires de santé publique pour les cinq années à venir. Il a indiqué que des indicateurs précis accompagneraient ces objectifs afin de permettre un réel contrôle de l'action du Gouvernement par le Parlement et, au-delà, par les citoyens eux-mêmes.
Le ministre a rappelé qu'il s'agissait d'adopter une politique générale qui serait déclinée en fonction des différentes pathologies considérées et qu'elle s'appuierait sur des actions de communication, d'information et d'éducation ainsi que sur des stratégies de dépistage et de prise en charge précoce.
Concernant le cancer, qui constitue un des chantiers du Président de la République pour le quinquennat, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a indiqué que 700.000 personnes étaient atteintes en France d'une maladie cancéreuse et, chaque année, 250.000 nouveaux cas de cancers étaient diagnostiqués. Il a souligné que le cancer représentait la première cause de mortalité prématurée en France et la deuxième cause médicale de décès, alors que 70 % des cancers étaient attribuables à des facteurs de risques sur lesquels il était possible d'intervenir efficacement.
Il a indiqué que la commission d'orientation sur le cancer, mise en place le 9 septembre 2002, identifierait les priorités sans négliger aucun des aspects d'une politique organisée et nationale de lutte contre le cancer, et prendrait en compte la prévention, l'information et le dépistage aussi bien que l'organisation du système de soins, son fonctionnement et l'accompagnement des malades.
Le ministre a insisté sur deux objectifs : le dépistage intra-familial des femmes à risque pour le cancer du sein à partir du 1er janvier 2003 et le dépistage systématique du cancer du sein qui sera étendu à l'ensemble du territoire en 2004 alors que seuls 32 départements l'organisent actuellement.
Le ministre a indiqué que le projet de loi de finances prévoyait au total 35 millions d'euros supplémentaires dès l'année prochaine pour la lutte contre le cancer, soit des crédits quatre fois supérieurs à ce qu'ils étaient en 2002.
S'agissant du Sida, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a fait part de son souhait de renforcer la lutte contre cette maladie et de l'intégrer dans une action internationale, conformément à l'engagement présidentiel, exprimé à nouveau avec force au cours de la 14e conférence internationale sur le Sida à Barcelone.
Il a ensuite exposé les objectifs de la politique de lutte contre le Sida en 2003 : renforcer les programmes de prévention en direction des populations prioritaires, maintenir un haut niveau d'information et de vigilance et faciliter l'accès aux dispositifs de prévention, veiller à la qualité de la prise en charge extra-hospitalière globale des personnes atteintes et, enfin, développer la formation des professionnels, en particulier sanitaires et sociaux.
Il a indiqué qu'au total, l'effort du ministère pour la lutte contre le Sida représenterait en 2003, comme en 2002, près de 65 millions d'euros.
M. Jean-François Mattei a également insisté sur le fait que la dimension internationale était primordiale et, qu'à ce titre, les crédits consacrés à la coopération internationale, soit 8,2 millions d'euros, progressaient de 30 %, l'accent étant mis sur l'aide publique au développement dans le domaine de la santé. Il a notamment indiqué que le groupement d'intérêt public ESTHER verrait ses crédits progresser de 3 à 4 millions d'euros afin de soutenir la création d'un réseau s'appuyant sur les établissements hospitaliers du Nord et du Sud et sur des partenariats entre les gouvernements du Nord, du Sud, de la société civile et du monde des affaires.
Concernant la question de la lutte contre la drogue et la toxicomanie, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a rappelé que la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) jouait un rôle clé dans le dispositif et il s'est félicité qu'un nouveau président de la MILDT, M. Didier Jayle, médecin et professionnel de terrain, ait été récemment nommé en conseil des ministres.
Le ministre a indiqué que les crédits destinés à la MILDT étaient, certes, ramenés de 45,6 millions d'euros à 40 millions d'euros en 2003, mais que cette diminution était justifiée par la nécessité de rechercher une meilleure synergie avec le nouvel Institut national pour l'éducation en santé (INPES).
Concernant la sécurité sanitaire, M. Jean-François Mattei s'est tout d'abord réjoui que les pouvoirs publics aient su tirer les leçons du passé et que la France dispose aujourd'hui d'un dispositif de sécurité sanitaire nettement plus performant qu'il y a une quinzaine d'années ; il a tenu à rappeler le rôle que le Sénat avait joué dans ce domaine.
Le ministre a rappelé que la sécurité sanitaire s'appuyait très fortement sur la fonction d'expertise scientifique et d'évaluation des risques confiée aux agences sanitaires. Il a indiqué qu'il entendait veiller à la séparation de cette fonction d'expertise de la décision politique proprement dite pour ne pas mélanger l'évaluation des risques avec la question de leur gestion ; il entendait également que cette transparence favorise le débat démocratique sur des sujets souvent complexes. Il a souligné que la manière dont la question de l'embargo sur les produits bovins d'origine britannique avait été gérée illustrait très bien sa démarche.
Insistant sur sa volonté de poursuivre l'effort de développement des agences et, notamment, celui de l'Institut de veille sanitaire, il a rappelé que la surveillance des pathologies contagieuses ou susceptibles de résulter d'actions bioterroristes ainsi que le signalement des infections nosocomiales restaient également une priorité.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a indiqué que les différentes agences seraient financées en 2003 à la fois par le budget de l'Etat, à hauteur de 53 millions d'euros, et par les fonds qu'elles avaient mis en réserve au cours des années passées ; le recours à ces deux sources de financement permettrait de financer 10 millions d'euros de mesures nouvelles en 2003.
Le ministre a confirmé que l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale serait installée dans les prochains jours et en mesure de commencer son travail dès novembre.
M. Jean-François Mattei a également indiqué que les moyens propres du ministère en matière de prévention et de lutte contre les risques sanitaires liés aux facteurs d'environnement étaient renforcés de 7 millions d'euros pour atteindre 14,5 millions d'euros.
Il a estimé qu'on ne pouvait, à l'heure actuelle, avoir une idée claire ni de l'ampleur des risques sanitaires, ni de la hiérarchie de ces risques environnementaux et que cette absence de quantification et de hiérarchisation contribuait à une représentation parfois fantasmatique de ces problèmes dans notre société.
Le ministre a estimé que le contenu du principe de précaution devait faire l'objet d'un vaste débat dans la société et que, dans cette perspective, l'expertise des agences devait être mise à la disposition de la population, notamment en matière d'environnement.
Concernant enfin la politique familiale, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a rappelé que les interventions publiques en direction des familles figuraient, pour l'essentiel, au projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Il a indiqué toutefois que le Gouvernement avait prévu deux mesures fiscales en faveur des familles : le doublement de l'abattement pour les donations entre les grands-parents et les petits-enfants et l'augmentation des seuils pour les emplois familiaux qui avait fait l'objet d'amendements au cours de débats à l'Assemblée nationale.
M. Jean-François Mattei a essentiellement relevé que la dotation 2003 pour l'allocation de parent isolé (API) progressait de 8,8 % à 805 millions d'euros, soit + 4,5 % après prise en compte des ouvertures de crédit pour 2002 lors du collectif de juillet. Il a rappelé que plus de 175.000 personnes seraient concernées en 2003.
En conclusion, M. Jean-François Mattei a estimé que les grandes lignes du budget du ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées pour 2003 étaient tout à fait satisfaisantes malgré l'ampleur des besoins à satisfaire.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a ensuite présenté les crédits consacrés aux personnes handicapées, qui augmentent très significativement en 2003, passant ainsi de 5,6 milliards d'euros à 5,9.
Elle a indiqué que ce chiffre regroupait 4,526 milliards d'euros pour l'allocation aux adultes handicapés, un peu plus d'un milliard pour les centres d'aide par le travail (CAT), 78,9 millions pour les crédits déconcentrés (sites de la vie autonome, auxiliaires de vie), 263,5 millions pour le fonds spécial d'invalidité et, enfin, 12,7 millions pour les instituts nationaux.
Elle a indiqué que la première orientation du budget concernait le doublement des créations de places en centre d'aide par le travail (CAT) par rapport à l'effort initialement prévu dans la dernière tranche du plan quinquennal 1999-2003 et que cette mesure devait permettre de porter le nombre de places à plus de 100.000. Elle a ensuite insisté sur la progression de 30 % des crédits déconcentrés qui permettrait notamment la création de 30 nouveaux sites pour la vie autonome, de 500 postes d'auxiliaires d'intégration scolaire à la rentrée 2003, de 709 postes d'auxiliaires dont 309 au bénéfice des personnes les plus lourdement handicapées.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a estimé que ces efforts significatifs devaient permettre d'avancer concrètement sur la question de la pérennisation des auxiliaires d'intégration scolaire, actuellement sous contrat emplois-jeunes, et sur l'amélioration de l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés.
Sur le premier point, la ministre a rappelé qu'elle avait mis en place, le 17 octobre, avec M. Luc Ferry, ministre de l'éducation nationale, un groupe de travail dont la mission était de proposer un nouveau statut pour les auxiliaires d'intégration scolaire, à partir des métiers existants et qui devait remettre ses propositions en mars 2003. Elle a fait part de son engagement en faveur d'une préservation du nombre d'auxiliaires d'intégration scolaire jusqu'à la fin de l'année scolaire. Elle a indiqué que cette mesure concernait, pour l'éducation nationale, 1.100 aides éducateurs à plein temps, 2.000 à temps partiel et, pour le secrétariat d'Etat aux personnes handicapées, 2.200 postes associatifs.
Sur le deuxième point, elle a rappelé que l'évolution du nombre de bénéficiaires de l'AAH connaissait une progression sur laquelle il était légitime de s'interroger. Elle a indiqué que cette progression était, pour les titulaires d'un taux d'invalidité de 50 à 80 %, de près de 7 % entre 2000 et 2001, de 7,7 % entre 1999 et 2000 et que, depuis 1995, on constatait une augmentation continue de cette catégorie d'allocataires.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a estimé que ce constat soulevait la question de la capacité à identifier les obstacles qui s'opposaient à ce que certaines personnes puissent retrouver un travail et devait conduire à poser la question de l'efficience du dispositif d'insertion professionnelle.
A ce titre, elle a fait part de sa volonté de travailler avec l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés (AGEFIPH) et le réseau Cap emploi, de manière à favoriser une plus grande insertion des personnes handicapées en milieu ordinaire de travail.
Mme Marie-Thérèse Boisseau a également estimé que, pour les personnes bénéficiant d'un taux d'invalidité situé entre 50 et 80 % et qui ne sont pas en état de se procurer un emploi, il apparaissait nécessaire de renforcer l'évaluation médicale par les Commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP), en s'appuyant notamment sur les nouveaux postes de médecins coordonnateurs.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a, d'autre part, rappelé que le budget de la solidarité ne résumait pas, à lui seul, l'effort de l'Etat en faveur des personnes handicapées et que le projet de loi de finances incluait également des efforts de l'ensemble des ministères. Elle a ainsi souligné que, si l'on ajoutait les mesures fiscales et les interventions de l'Etat en faveur de la garantie de ressources, le montant du budget pour les personnes handicapées s'élevait à plus de 7,5 milliards d'euros.
Elle a également rappelé que, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, il était proposé de doubler le nombre de places en maisons d'accueil spécialisées et en foyers d'accueil médicalisés.
Mme Marie-Thérèse Boisseau a également rappelé qu'il fallait intégrer les efforts consentis par les collectivités territoriales, en matière d'hébergement, ou d'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP). Elle a notamment souligné qu'une vingtaine de conseils généraux avaient décidé de déplafonner l'ACTP ou de créer une prestation spécifique pour les personnes handicapées qui souhaitaient vivre à leur domicile.
Elle a ensuite déclaré que son ambition était de faciliter les conditions d'une véritable intégration des personnes handicapées dans la société, et de leur permettre d'exercer un libre choix quant à leur mode de vie et que ces deux axes guideraient sa réflexion autour de la réforme de la loi de 1975. Elle s'est réjouie à ce titre de la nomination de M. Patrick Gohet comme délégué interministériel aux personnes handicapées.
Elle a également tenu à saluer une nouvelle fois le rapport de la Haute assemblée sur la compensation du handicap qui ouvre de nombreuses pistes sur les aménagements à apporter pour améliorer la vie des personnes handicapées.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a également précisé les quatre principaux enseignements qu'elle tirait de ses déplacements sur le terrain.
Elle a d'abord souligné l'engagement réel des différents acteurs et en particulier celui des collectivités territoriales et des associations.
Elle a ensuite constaté la nécessité de diversifier les modes de prise en charge et de créer plus de passerelles entre ces univers trop cloisonnés, ainsi que la volonté des acteurs de pouvoir expérimenter à tous les niveaux.
Mme Marie-Thérèse Boisseau a enfin souligné que certains problèmes devaient plus particulièrement être traités : celui des personnes lourdement handicapées, celui de l'aide aux familles, celui de personnes handicapées vieillissantes et des polyhandicapés, autistes et traumatisés crâniens.
Elle a ensuite tenu à citer quelques actions d'ores et déjà engagées et, notamment, la mission confiée à Mme Geneviève Levy, député du Var, sur l'accessibilité dans les transports, et celle confiée au professeur Lecomte, directrice de l'Institut médico-légal de Paris et membre du comité économique des produits de santé, sur l'amélioration de la prise en charge des aides techniques.
Le secrétaire d'Etat a enfin évoqué la réforme de la loi d'orientation du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées. Elle a estimé, à ce titre, qu'il existait un devoir de compensation et un droit à la dignité et à la protection. Elle a, enfin, souligné qu'accueillir, accompagner, intégrer et compenser devaient être les maîtres mots de la réforme de la loi de 1975.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis des crédits de la solidarité, a tout d'abord interrogé le ministre au nom de M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis des crédits de la santé, empêché. Il a relevé que près de trois ans après sa mise en place, le bilan de la CMU complémentaire confirmait les craintes et les réserves qu'avait alors exprimées le Sénat : effets de seuil désastreux, qui avaient obligé à créer une CMU bis, montant insuffisant du forfait de remboursement, plafonds inadaptés en matière dentaire, procédures de paiement coordonné encore très balbutiantes... Il a souligné que tout ceci conduisait, alors même que certaines mutuelles venaient d'annoncer leur intention de quitter le dispositif, à s'interroger sur l'avenir même de la CMU complémentaire. Il a souhaité savoir quelles étaient les intentions du Gouvernement en la matière.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a souligné le rôle social et sanitaire essentiel de la CMU. Il a rappelé qu'elle avait permis l'accès des plus démunis aux soins et couvrait aujourd'hui 4,7 millions de personnes. Il a constaté que les dépenses étaient certes plus élevées que prévu initialement, en raison sans doute d'un effet de rattrapage, mais qu'il n'était pas certain que ce niveau élevé se maintienne sur une longue période.
Il a fait observer que le fonctionnement de la CMU n'était pas satisfaisant en raison d'un effet de seuil massif, qui excluait du dispositif les bénéficiaires du minimum vieillesse et de l'AAH, créant de fait une vaste « trappe à pauvreté ». Il s'est dit partisan d'une généralisation de la couverture complémentaire et a précisé que le Gouvernement avait décidé de relever de 228 à 283 euros le forfait de remboursement pour les mutuelles, afin d'éviter que celles-ci ne se retirent de la CMU.
Après s'être réjoui de l'annonce d'une telle augmentation du tarif forfaitaire de remboursement aux mutuelles, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a constaté que le projet de loi de financement de la sécurité sociale et, en miroir, le projet de loi de finances organisaient le transfert de l'Etat à l'assurance maladie de la prise en charge des dépenses d'IVG. Il a rappelé qu'auparavant, ces dépenses étaient supportées par l'assurance maladie puis remboursées par l'Etat. Il a relevé que les dotations budgétaires étant généralement insuffisantes pour un remboursement total, l'Etat avait contracté à l'égard de la sécurité sociale une dette qui atteignait 12 millions d'euros en 2001. Il a souhaité savoir ce qu'il adviendrait de cette dette et dans quelles conditions celle-ci serait remboursée.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a précisé les raisons qui avaient conduit le Gouvernement à décider ce transfert. Il a rappelé que le principe du remboursement de l'interruption volontaire de grossesse (IVG) était inscrit dans la loi depuis 20 ans et que l'on avait, à l'époque, prévu une prise en charge par l'Etat en raison des réticences exprimées par certains de voir les cotisations sociales financer cet acte médical. Il a estimé que le contexte avait, depuis lors, profondément évolué, l'assurance maladie étant désormais financée par la contribution sociale généralisée (CSG), et l'IVG ayant, depuis la loi du 4 juillet 2001, un statut légal.
Il a expliqué que le transfert du financement de l'IVG à l'assurance maladie ne modifiait pas fondamentalement les modalités de sa prise en charge et poursuivait une logique de clarification des compétences entre l'Etat et l'assurance maladie. Il a souligné que cette décision relevait d'un souci de simplification comptable et était dépourvue de toute portée symbolique. Il a rappelé que l'IVG était un acte médical et que sa prise en charge par l'assurance maladie apparaissait, de ce fait, normale. Il a ajouté que la dette contractée à ce titre par l'Etat à l'égard de la sécurité sociale devrait normalement être honorée, dans le cadre du collectif de fin d'année.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, s'est interrogé sur l'inscription d'une mesure d'ajustement négative des crédits consacrés à l'AAH, justifiée par une « amélioration des procédures d'attribution ». Il a notamment rappelé l'attraction qu'exerçait l'AAH sur les titulaires d'autres minima sociaux et a souligné que l'économie envisagée, difficile à réaliser, devrait nécessairement s'accompagner d'une réforme en profondeur des COTOREP.
Il a également demandé des précisions sur les actions nouvelles qui seraient financées par l'augmentation de 6 % de l'enveloppe « adultes handicapés - enfance inadaptée » prévue au sein de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) pour 2003.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a précisé que l'augmentation prévue au titre du projet de loi de financement pour la sécurité sociale représentait 338 millions d'euros et qu'elle correspondait au financement de la dernière année du plan triennal, ainsi qu'à un doublement des places en MAS, à l'amélioration de l'accès des personnes handicapées aux services de soins infirmiers à domicile (SSIAD). Elle a également indiqué que cette enveloppe permettrait la mise en place des « Réseaux santé handicap » et la mise à niveau des services d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD), suite à leur passage en dotation globale.
Concernant l'AAH, la ministre a précisé que la réforme du guide-barème en 1993 avait eu pour conséquence une meilleure évaluation des taux d'incapacité par les COTOREP et avait révélé une progression sensible de la population, bénéficiant d'un taux d'invalidité compris entre 50 et 80 % et bénéficiant de l'AAH au titre de leur impossibilité de trouver un emploi. Elle a indiqué vouloir mettre en place avec les COTOREP des conventions d'objectif, visant à améliorer l'emploi de cette catégorie de personnes handicapées, en collaboration avec le réseau Cap emploi. Elle a enfin souligné que le caractère attractif de l'AAH n'était pas avéré.
M. Jean Chérioux a dit avoir apprécié le réalisme des actions préconisées par Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Il a mis l'accent sur la nécessaire intégration des personnes handicapées, en soulignant que tout commençait au niveau de l'éducation. Il a considéré que l'insertion dans le milieu éducatif se heurtait souvent à la mauvaise volonté de l'éducation nationale mais aussi des éducateurs spécialisés. Il a dénoncé le faible volontarisme des services publics en matière d'emplois publics réservés aux personnes handicapées alors qu'ils devraient, au contraire, être exemplaires en la matière. Évoquant le vieillissement des personnes handicapées, il a fait observer qu'il existait des expériences pilotes au niveau départemental ; il a considéré que les handicapés vieillissants restaient avant tout et d'abord des personnes handicapées, qu'il convenait par conséquent de ne pas couper de leur milieu. Il s'est enquis du nombre de malades du Sida bénéficiaires de l'AAH.
Mme Michèle Demessine a mis l'accent sur la lutte contre la toxicomanie. Elle a souligné que la toxicomanie restait un fléau considérable et a regretté que les différents acteurs engagés dans cette lutte se soient quelque peu démobilisés. Elle a estimé que l'amélioration de la situation observée sur le terrain provenait pour beaucoup du recours aux produits de substitution. Elle s'est inquiétée de ce que le transfert à l'assurance maladie de la charge des structures de soins aux toxicomanes s'effectue sans régler pour autant le problème des déficits que connaissaient ces établissements.
S'agissant des personnes handicapées, elle a fait valoir que la lutte pour la citoyenneté relevait de l'ensemble des ministères ; elle a cité l'exemple de l'action qu'elle avait menée en tant que ministre délégué au tourisme, formulant le souhait que celle-ci soit poursuivie. Elle a souligné que la réforme de la loi de 1975 était très attendue et que l'AAH restait encore très insuffisante. Elle s'est félicitée du doublement du nombre de places en centres d'aide par le travail (CAT) mais a fait observer que ceci ne serait pas suffisant pour faire diminuer le nombre de personnes en attente d'une place.
M. Gilbert Chabroux a estimé que la création de la CMU constituait une véritable conquête sociale. Il a jugé que si des imperfections subsistaient dans le dispositif, le Gouvernement pouvait à loisir y remédier, en fixant par exemple le niveau du seuil d'entrée au-dessus de l'AAH et du minimum vieillesse. Il s'est dit heureux que la lutte contre le cancer soit affichée comme une priorité du Gouvernement et s'est demandé pourquoi le dépistage systématique du cancer du sein institué à partir du 1er janvier 2004 ne porterait que sur la population des femmes âgées de 50 à 74 ans. Il s'est enquis du devenir du plan Alzheimer lancé par le précédent gouvernement. Il a regretté que l'on semble s'orienter vers une certaine banalisation de l'alcoolisme et du tabagisme.
Il s'est montré déçu par les réponses apportées par M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, lors de l'audition consacrée au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 et a regretté que le Gouvernement n'ait pas véritablement de politique familiale. S'agissant de la politique du handicap, il a rendu hommage à la qualité des travaux menés sur le sujet par la commission et a souhaité obtenir des précisions sur le calendrier d'examen de la réforme de la loi d'orientation du 30 juin 1975.
M. Alain Gournac a salué les actions menées par le Gouvernement en faveur des familles. Il a encouragé le ministre à poursuivre ses efforts de lutte contre les trésoreries dormantes dans certains organismes. S'agissant du Sida, il a regretté une certaine perte de vigilance de l'ensemble de la société. Il a souhaité que l'on s'inspire, en matière de lutte contre le cancer, des expériences départementales et que les efforts menés en faveur d'une certaine standardisation ne se fassent pas au détriment des institutions départementales. Il a souligné que la réforme de la loi de 1975 était très attendue par les personnes handicapées.
M. Alain Vasselle a indiqué qu'il n'était pas totalement convaincu de la nécessité de transférer à l'assurance maladie, qui connaissait des déficits importants et répétés, la prise en charge de l'interruption volontaire de grossesse (IVG). Il s'est demandé s'il ne s'agissait pas là d'un nouveau tour de passe-passe du ministère des finances pour alléger l'Etat d'une charge budgétaire. Il a considéré que la prévention des IVG était une mission de santé publique, de nature régalienne, et qu'elle ne relevait pas de la compétence de l'assurance maladie. Il a souhaité savoir si un effort particulier serait mené en faveur du dépistage du cancer de la prostate et si le Gouvernement avait prévu des investissements particuliers en faveur des équipements hospitaliers destinés à la détection des cancers.
Il a souligné que le niveau actuel de l'AAH apparaissait ridicule face aux besoins des personnes handicapées. Citant l'exemple de certains établissements qui pratiquaient un tarif journalier de 100 francs par jour, il a fait valoir qu'il restait parfois moins que 500 francs par mois aux personnes handicapées pour faire face au reste de leurs dépenses. Il a signalé que certains foyers occupationnnels devenaient parfois de véritables prisons sociales en raison du refus qu'ils opposaient, pour des raisons financières, aux familles souhaitant récupérer leur enfant pour le week-end ou pour les vacances.
Mme Gisèle Printz a mis l'accent sur la nécessité d'un effort de prévention de l'ostéoporose.
M. André Lardeux s'est félicité du souhait du ministre de recentraliser la lutte contre le cancer ; il a souligné qu'une démarche similaire serait bienvenue pour d'autres pathologies telles que la tuberculose ou les maladies sexuellement transmissibles. Il a mis l'accent sur les conséquences que pouvaient avoir, pour les départements, certaines décisions prises par l'Etat : la création de places en CAT générait mécaniquement une augmentation de demandes de places d'hébergement ; de même, les efforts d'intégration scolaire des enfants handicapés impliquaient une adaptation des transports scolaires. Il a souhaité que l'on engage une concertation sur les modalités de répartition du financement des établissements entre les personnes hébergées et les financeurs publics.
Mme Annick Bocandé a souligné que l'intégration scolaire des jeunes enfants handicapés constituait un problème difficile et une attente forte des familles. Elle a fait observer que ces familles étaient parfois confrontées à un véritable parcours du combattant pour obtenir la scolarisation de leur enfant handicapé et qu'elles devaient même, dans certains cas, participer financièrement à l'adaptation des locaux. Elle a souhaité que l'on parvienne à un meilleur équilibre du territoire en résorbant le déséquilibre entre zones rurales et urbaines.
Mme Nelly Olin a fait part de son inquiétude quant au manque de professionnalisme d'un certain nombre d'associations oeuvrant dans la lutte contre la toxicomanie. Elle a souhaité que l'on mette en place des formes de contrôle de nature à éviter les improvisations et les insuffisances parfois constatées sur le terrain.
Revenant sur la question de la CMU, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a rappelé que ce dispositif s'inspirait largement du projet d'assurance maladie universelle, préparé par le gouvernement Juppé avant l'alternance. Il a cependant estimé que le fait d'avoir supprimé la logique assurancielle avait conduit à la création d'effets de seuil. Il a indiqué que la réforme qu'il projetait visait précisément à lisser ces effets de seuil à travers une aide dégressive à l'acquisition d'une couverture complémentaire.
Concernant le dépistage du cancer du sein, il a expliqué que la tranche d'âge choisie reposait sur des critères épidémiologiques. Plus largement, il a estimé que trois types de dépistages, concernant les cancers du sein, de l'utérus et du colon, pouvaient d'ores et déjà être systématisés et que d'autres cancers, notamment celui de la prostate, présentaient des pistes intéressantes mais encore inabouties.
S'agissant de la lutte contre la toxicomanie, le ministre a rappelé que ces affections se situaient aux confins du médical et du social, ce qui conduisait à déterminer un domaine relevant des soins, sous la responsabilité de l'assurance maladie et un volet prévention, financé par l'Etat. Il a par conséquent estimé que, malgré le transfert vers l'assurance maladie du financement des centres de prévention et de soins en addictologie, les associations devraient continuer à recevoir des financements de l'Etat au titre des actions relevant de sa responsabilité.
Il a précisé que ni la question de l'alcool, ni celle du tabagisme n'étaient oubliées du Gouvernement. Il a souligné, à ce titre, que, malgré la similitude du processus de dépendance, l'expérience de terrain prouvait que la démarche de soins et l'accompagnement social ne pouvaient pas être les mêmes et qu'en tout état de cause, une personne alcoolique pouvait éprouver des difficultés à aller se faire soigner dans un centre pour toxicomanes.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a également insisté sur la nécessité d'une évaluation de la qualité du travail des associations, qui, oeuvrant dans ce domaine, sollicitaient des fonds publics. Il a, en particulier, estimé que la signature de conventions d'objectifs et de moyens était de nature à garantir le sérieux des associations, tout en leur assurant des moyens de fonctionnement pérennes.
Concernant le plan Alzheimer lancé par le précédent gouvernement, le ministre a déclaré qu'il était toujours au nombre de ses préoccupations mais que le projet de budget pour 2003 devait malgré tout établir des priorités. En tout état de cause, il a estimé que la lutte contre cette maladie devait relever d'une approche interministérielle, associant son ministère et celui des affaires sociales, mais également celui de la recherche.
Revenant sur la loi-cadre de santé publique qu'il présenterait prochainement au Parlement, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a précisé que sa méthode consisterait naturellement à consulter les régions pour faire remonter à la fois les problèmes et les bonnes pratiques.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, est ensuite revenue sur la question de l'intégration scolaire des enfants handicapés, estimant qu'une intégration en milieu ordinaire devait être au moins envisagée, avant une orientation en Institut médico-éducatif (IME) ou en Institut médico-professionnel (IMPro).
Concernant le vieillissement des personnes handicapées, elle a estimé qu'il était le plus souvent préférable de maintenir la personne au sein de la structure qui l'avait accueillie toute sa vie et, qu'à tout le moins, un placement en maison de retraite ordinaire, s'il n'était pas exclu, devait être extrêmement bien préparé.
La ministre a également rappelé que les créations de places en CAT prévues pour 2003 porteraient à plus de 100.000 personnes la capacité d'accueil de ces établissements et elle a assuré que leur création se ferait en concertation avec les départements. Elle a évoqué un manque de places évalué entre 10.000 et 15.000 et a estimé que, si les créations se poursuivaient au même rythme, cette insuffisance serait comblée à la fin de la législature. Elle a, de plus, insisté sur le fait que l'amélioration, dès l'âge scolaire, de l'intégration des personnes handicapées, devait contribuer à réduire les orientations en CAT.
S'agissant de la revalorisation de l'AAH, Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a indiqué qu'une revalorisation uniforme ne résoudrait en rien la question de la compensation du handicap, dont l'évaluation devait varier en fonction de la situation de la personne. Elle a cependant concédé que la part restant à disposition d'une personne hébergée en établissement était indigne.
La ministre a insisté sur la nécessité de placer les personnes handicapées non pas à côté mais au milieu de la cité et de la société. Elle a également ajouté qu'une amélioration importante du dispositif d'aide au maintien à domicile était possible et nécessaire.
Concernant enfin le transport des élèves handicapés, elle a déploré que les commissions départementales d'éducation spéciale ne soient pas intéressées aux conséquences financières de leurs décisions. Elle a estimé, à ce titre, que les conseils généraux devraient, à l'avenir, être représentés au sein de ces commissions.