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DELEGATION A L'AMENAGEMENT ET AU DEVELOPPEMENT DURABLE DU TERRITOIRE

Mardi 12 juin 2001

- Présidence de M. Jacques Bellanger, vice-président, puis de M. Jean-Pierre Raffarin, président. -

Projet de schéma de services collectifs de l'information et de la communication - Examen du rapport

La délégation a tout d'abord procédé à l'examen du rapport de M. Claude Belot sur le projet de schéma de services collectifs de l'information et de la communication.

M. Claude Belot, rapporteur du schéma de services collectifs de l'information et de la communication, a tout d'abord jugé que la rédaction d'un schéma prospectif en matière de technologies de l'information et de la communication était à la fois utile et périlleuse, compte tenu de l'évolution rapide et des incertitudes quant aux technologies concernées. Il a jugé opportun de limiter cet exercice, comme le propose le projet de schéma, à l'horizon 2010, et non à 2020, comme cela est prévu pour les autres schémas.

Il a considéré que l'accès aux technologies de l'information -et en particulier à Internet à haut débit- était devenu un enjeu économique et territorial, et mis en avant deux risques potentiels découlant de la diffusion spontanée de ces services :

- une inégalité sociale ;

- un déséquilibre territorial. A cet égard, il a jugé que l'objectif de lutte contre la « fracture numérique territoriale » n'était pas assez affirmé dans le texte soumis à l'avis de la délégation.

M. Claude Belot, rapporteur, a regretté qu'un inventaire précis et exhaustif des infrastructures de télécommunications implantées sur le territoire n'ait été réalisé préalablement à la rédaction du schéma. S'appuyant sur son expérience en Charente-Maritime, le rapporteur à jugé nécessaire l'établissement, par la DATAR, d'un « cadastre » des réseaux, ces derniers se révélant souvent, à l'examen, être plus nombreux que cela n'est souvent supposé. Il a considéré que les collectivités locales étaient, dans ce contexte, plus légitimes à démocratiser -par la formation de la population- l'usage de ces technologies qu'à réaliser elles-mêmes des infrastructures qui existent parfois déjà.

M. Claude Belot, rapporteur, a jugé que le projet de schéma manquait de réalisme en matière de téléphonie mobile. Rappelant le prix exorbitant des licences de téléphonie mobile de troisième génération (UMTS) -32,5 milliards de francs par licence en France, et jusqu'à 50 milliards d'euros au total en Allemagne- et les incertitudes approuvées quant à la maturité de cette technologie et quant à ses débouchés réels, il a regretté l'approche trop optimiste du projet de schéma en la matière. Il a jugé incohérent qu'aucune solution concrète ne soit, en revanche, proposée dans le document de la DATAR pour compléter la couverture territoriale des réseaux de téléphonie mobile actuelle, de deuxième génération (GSM). Il a rappelé que 10 % du territoire n'étaient pas couverts, ce qui était préjudiciable non seulement aux personnes résidant dans ces « zones d'ombre », mais également aux personnes qui les traversent, le problème concernant donc nombre de Français. D'un coût soutenable (4 milliards de francs), techniquement réalisable (par itinérance ou partage d'infrastructures), cette extension de couverture, attendue par nombre d'élus, d'entreprises et de particuliers, n'est pas concrètement envisagée par le projet de schéma, qui se contente de renvoyer en la matière à un rapport du Gouvernement, attendu depuis 1996.

M. Jacques Bellanger, vice-président, a souligné combien la prospective était délicate dans le domaine, mouvant, des technologies de l'information. Il a déclaré souscrire aux propos introductifs du projet de schéma, réaffirmant l'importance du service universel des télécommunications et des services d'intérêt général. Il a corroboré l'analyse du rapporteur quant aux difficultés découlant de l'inexistence d'un recensement territorial précis des infrastructures existantes. Rappelant son opposition de principe à un interventionnisme excessif des collectivités locales en matière d'infrastructures de télécommunications, il a déclaré soutenir la démarche actuellement engagée par le Gouvernement d'un assouplissement législatif de leurs conditions d'intervention, à la demande de certaines d'entre elles.

M. Jean-Pierre Raffarin, président, s'est interrogé sur la compatibilité de certaines initiatives des collectivités locales avec les règles européennes en matière de concurrence. Après un échange de vues sur ce sujet entre M. Claude Belot, rapporteur, M. Jacques Bellanger, vice-président, et M. Jean-Pierre Raffarin, président, M. Jacques Oudin s'est étonné de la divergence d'approche entre le projet de schéma de services collectifs de l'information et de la communication, dont le rapporteur estimait qu'il péchait par excès d'optimisme, et les projets de schémas de services collectifs de transports, qui faisaient preuve de l'excès inverse. Il a relevé que la proximité et la facilité d'accès aux dessertes autoroutières -objectifs de la loi d'aménagement du territoire du 4 février 1995, ayant fixé comme critères un accès à moins de 30 minutes ou de 45 kilomètres- n'étaient plus considérées comme souhaitables par les projets de schémas de transports. Il s'est interrogé sur la dimension européenne du projet de schéma « information et communication » et sur la capacité de l'Éducation nationale à remplir les objectifs fixés par ce document.

M. Claude Belot, rapporteur, a répondu que pour être ambitieux, le projet de schéma n'était pas forcément réaliste, avec notamment l'objectif d'une liaison à 2 mégabits par seconde pour tous en 2005, qui semblait impossible à atteindre aux acteurs du secteur.

M. Gérard Le Cam a souligné les difficultés découlant, pour les élus, du manque d'informations sur la cartographie des infrastructures de télécommunications existantes. Il a jugé que la question des contenus des autoroutes de l'information était cruciale. Il a souhaité une formation plus large du grand public aux nouvelles technologies et redouté que la numérisation de l'administration ne conduise à des relations encore plus impersonnelles avec les administrés.

Il a enfin estimé que le projet de schéma, s'il partait de bonnes intentions, devait être affiné dans sa rédaction.

La délégation a ensuite approuvé les conclusions du rapporteur.

Audition de M. Jean-Louis Chauzy, président de l'Assemblée des Conseils économiques et sociaux régionaux de France, M. Pierre Trousset, président du conseil économique et social de la région Centre, et M. Didier Delamotte, directeur général des services représentant M. Jean-Raymond Mondon, président du conseil économique et social de la région « Réunion »

Puis la délégation a entendu M. Jean-Louis Chauzy, président de l'Assemblée des conseils économiques et sociaux régionaux de France, M. Pierre Trousset, président du conseil économique et social de la région Centre, et M. Didier Delamotte, directeur général des services représentant M. Jean-Raymond Mondon, président du conseil économique et social de la région « Réunion ».

M. Jean-Louis Chauzy
a d'abord rappelé avec précision les modalités de la consultation des conseils économiques et sociaux régionaux en insistant sur les difficultés qu'avait suscitées la brièveté des délais impartis.

M. Pierre Trousset a estimé que la démarche des schémas de services collectifs était novatrice dans sa « transversalité ». Regrettant les retards dans le processus d'élaboration des documents, il a regretté que les conférences régionales d'aménagement et de développement durable du territoire n'aient pas disposé du temps nécessaire à une étude approfondie des schémas.

Après s'être interrogé sur la pertinence de la « prospective préalable » des documents, M. Pierre Trousset a évoqué le problème de la nature juridique des schémas avant d'aborder la question des transports. Sur ce point, il a critiqué une réflexion trop hexagonale, une dimension interrégionale ignorant largement la France actuelle et des contradictions par rapport aux engagements de Kyoto sur la limitation des gaz à effet de serre.

Enfin, il a jugé le scénario « multimodal volontariste » -qui a « plaqué », sur le schéma, l'objectif de doublement du fret ferroviaire en dix ans- profondément irréaliste.

S'agissant des voyageurs, M. Pierre Trousset a estimé que les schémas présentaient plusieurs insuffisances en ce qui concerne la sécurité, les itinéraires transversaux et les contournements, la saturation des corridors à grande vitesse, la pénurie des sillons et la connexion des réseaux de transport rapide.

Sur l'enseignement supérieur et l'énergie, il a regretté que les schémas fassent l'impasse sur la « nécessaire évolution de l'université » ainsi que sur le « nucléaire ».

M. Jacques Oudin, rapporteur des schémas de services collectifs de transport de voyageurs et de marchandises, a déclaré qu'il partageait entièrement les vues exprimées par l'orateur, s'agissant notamment de la brièveté de la consultation et des principales critiques formulées. Il a ensuite fait observer que le premier ministre britannique avait annoncé, pour la Grande-Bretagne, un plan de développement des infrastructures de transport, sur dix ans, pour un montant de 2.000 milliards de francs. Sur la même période, a-t-il ajouté, la France devrait dépenser au mieux quelque 600 milliards de francs.

M. Jean-Pierre Raffarin, président, s'est interrogé sur la pertinence d'une politique qui légitime la baisse des crédits routiers, en faisant valoir que le « ferroviaire » et le « maritime » seront en mesure de prendre le relais.

M. Didier Delamotte a estimé que l'outre-mer était singulièrement absente des schémas de services collectifs. Après avoir insisté sur les spécificités de chaque région d'outre-mer, il a souhaité que l'on ne se préoccupe pas seulement des liaisons portuaires et aéroportuaires entre les départements d'outre-mer et la métropole, mais aussi des dessertes internes de ces collectivités ainsi que de leur ouverture sur les pays environnants.

M. Jean-Pierre Raffarin, président, s'est interrogé sur la valeur de documents qui, en définitive, n'auront pas été « validés » démocratiquement par le Parlement. Appuyant les propos de M. Jean-Pierre Raffarin, président, M. Jacques Oudin, rapporteur, a estimé que cette absence de « validation » constituait même le « péché originel » des schémas de services collectifs.