Table des matières
Mercredi 27 février 2002
- Présidence de M. Jean Pierre Raffarin, président. -
Audition de M. Claude Martinand, président de Réseau ferré de France
La délégation a procédé à l'audition de M. Claude Martinand, président de Réseau ferré de France (RFF).
M. Jean-Pierre Raffarin, président, a souhaité une cordiale bienvenue au président de RFF et proposé que soient abordés les problèmes liés aux perspectives à long terme du ferroviaire, aux équilibres financiers de Réseau ferré de France, ainsi qu'au rôle de RFF dans la régionalisation ferroviaire, notamment à travers la question du partage des sillons.
M. Claude Martinand a déclaré qu'un consensus prévalait désormais sur la nécessité de rééquilibrer les modes de transport, compte tenu de la situation d'asphyxie de la route, notamment pour la traversée des massifs montagneux. Cette convergence de vues, a-t-il ajouté, a été récemment confirmée par le Livre blanc de la Commission européenne sur « la politique des transports à l'horizon 2010 ».
Evoquant plus particulièrement le « ferroutage », il a évoqué les projets en cours, et notamment la future liaison Lyon-Turin.
M. Claude Martinand a ensuite indiqué que la réduction du trafic de poids lourds impliquait nécessairement la mise en place de deux grands axes dédiés au fret :
- un axe Anvers-Lyon, vers l'Italie et vers l'Espagne, qui empruntera la rive droite du Rhône et impliquera un certain nombre d'opérations majeures : contournement de Montpellier, liaison Perpignan-Figueras, liaison Rhin-Rhône branche sud, contournement de Lyon et de Dijon, liaison entre le sillon mosellan et le réseau du Benelux, axe espagnol jusqu'au port de Barcelone, contournement de Turin ;
- un axe en direction de Madrid, via Bordeaux, dont le tracé n'est, au demeurant, pas encore complètement précisé.
Après avoir relevé l'existence de quelques « points nodaux » majeurs (Massy-Valenton en région parisienne, Metz, Lyon-Venissieux, Nîmes, Narbonne et Perpignan), le président de RFF a jugé possible de doubler, à partir de l'existant, la productivité du fret ferroviaire.
S'agissant du trafic de voyageurs, M. Claude Martinand a évoqué les perspectives de réalisation du réseau à grande vitesse, en insistant sur le fait que les contraintes de financement impliquaient désormais un phasage des projets.
Il a précisé qu'à côté du réseau TGV, se mettait en place un réseau de trains rapides pouvant atteindre 200 à 220 km/h, comme sur la ligne Paris-Limoges ou Paris-Clermont-Ferrand.
En ce qui concerne le réseau « transport express régional », M. Claude Martinand a déclaré que les contrats de plan Etat-région avaient fait progresser de nombreux projets de « désaturation ».
Puis le président de RFF a estimé que l'ouverture à la concurrence européenne, en mars 2003, de même que la régionalisation ferroviaire, auront des « effets profonds ».
A cet égard, il a rappelé qu'une vingtaine de nouveaux opérateurs, dotés de licences ferroviaires et de certificats de sécurité, devraient entrer sur les marchés ferroviaires allemand et italien.
M. Claude Martinand a encore jugé positif le bilan de RFF, notamment au regard des trois enjeux que sont la réorientation des investissements, la tarification des infrastructures et la répartition des sillons. Il a appelé de ses voeux une meilleure application de la directive européenne qui reconnaît au gestionnaire des infrastructures le droit de répartir les sillons.
Evoquant la situation financière de l'établissement public, M. Claude Martinand a plaidé en faveur de la pérennisation des dotations en capital de la part de l'Etat, tout en estimant que la meilleure solution consisterait dans un désendettement global.
Concernant les perspectives d'investissement, le président de RFF a enfin mis l'accent sur les importants besoins de financement suscités par la construction du TGV Est Européen, la mise en oeuvre du projet Lyon-Turin, de même que les liaisons inscrites aux contrats de plan Etat-région.
M. Jacques Oudin a rendu hommage à la franchise du propos du président de RFF, avant de plaider pour un « schéma de cohérence européenne » du fret ferroviaire. Relevant que « les infrastructures actuelles étaient mal utilisées », M. Jacques Oudin a estimé possible d'améliorer le « cadencement » des trains de marchandises, sans préjudice d'autres mesures permettant l'intensification du trafic.
Après avoir jugé que la situation pouvait évoluer sous la triple pression de l'Europe, de la mise en oeuvre, au plan national, de critères de rentabilité, ainsi que des régions, M. Jacques Oudin a jugé indispensable d'afficher clairement le besoin de financement global du secteur ferroviaire. Il a souhaité la mise en place d'un « fonds de financement », qui pourrait bénéficier des ressources spécifiques, procurées par notre système de transports (la taxe intérieure sur les produits pétroliers ou un prélèvement sur le produit des péages routiers, par exemple), ainsi que de mécanismes d'apurement de la dette ferroviaire, comparables à celui qui a été mis en place en matière de « dette sociale ».
M. Jacques Oudin a enfin regretté l'insuffisance des informations sur les programmes d'investissement mis en oeuvre, ou envisagés, par nos voisins européens.
M. François Gerbaud a, lui aussi, jugé nécessaire une politique de désendettement ferroviaire à travers une loi de programmation.
Après avoir estimé que la régionalisation ferroviaire devrait permettre la conciliation entre le service public et l'esprit d'entreprise, il a appelé de ses voeux un état comparatif des différents pays européens sur le plan ferroviaire.
M. Claude Saunier s'est félicité du présent débat, en estimant qu'il posait les bonnes questions. Il s'est plus particulièrement préoccupé du calendrier de « désenclavement ferroviaire » de l'ouest, et notamment de la Bretagne, ainsi que du problème du « barreau sud » de l'Ile-de-France.
M. Jean-Marc Juilhard a déclaré qu'il partageait les préoccupations exprimées par les orateurs, en mettant notamment en avant la question de la mise à plat du besoin global de financement et des moyens financiers disponibles.
M. Claude Martinand a alors apporté des précisions sur les prochaines lignes à grande vitesse dans la région Ouest, en relevant, en particulier, que la création de pendulaires sur les axes Rennes-Brest et Rennes-Quimper nécessiterait la suppression de nombreux passages à niveau.
Evoquant le « barreau sud » de l'Ile-de-France, le président de RFF a dressé les perspectives, d'ici 15 à 20 ans, de la connexion entre la ligne C du RER, le TGV et les lignes dédiées au fret, en soulignant que les régions de l'Ouest étaient très mobilisées sur ces projets.
M. Jean-Pierre Raffarin, président, a signalé que la région Poitou-Charentes avait refusé de financer l'étude du projet « Massy-Valenton », parce qu'elle souhaitait qu'une règle du jeu claire permette de déterminer, de façon incontestable, le champ du financement territorial. Il s'est élevé contre l'idée que l'Etat puisse mettre « aux enchères » certains projets d'infrastructure.
Après avoir jugé indispensable la détermination des besoins et des moyens en matière d'infrastructures ferroviaires à l'horizon 2010 ou 2015, M. Jean-Pierre Raffarin, président, a estimé que la régionalisation provoquerait d'inévitables évolutions chez l'opérateur ferroviaire, du fait, notamment, de la mise en place d'une politique d'évaluation.