Table des matières
Mardi 5 juin 2001
- Présidence de M. Henri Revol, sénateur, président.
Télécommunications - Conséquences de l'évolution scientifique et technique dans le secteur des télécommunications - Communication
L'Office a tout d'abord entendu la communication présentée par MM. Pierre Laffitte et René Trégouët, sénateurs, rapporteurs, dans le cadre de l'étude qu'ils mènent sur les conséquences de l'évolution scientifique et technique dans le secteur des télécommunications.
M. Henri Revol, sénateur, président, a rappelé que cette communication était faite au titre de l'article 26 du Règlement intérieur et que, comme telle, elle pouvait donner lieu à un débat, mais pas à un vote, celui-ci étant réservé au rapport final. Il a, en outre, indiqué que cette communication ferait l'objet d'un point de presse.
M. Pierre Laffitte, sénateur, a fait le constat de la crise de la filière télécommunications-informatique, dont il a rappelé le rôle moteur dans la croissance : en effet, cette filière, qui ne représente que 5 % du PIB, intervient pour plus du tiers de sa croissance.
Imputable, pour partie, à un ralentissement industriel classique, cette crise a été activée par l'éclatement de la bulle boursière américaine, mais surtout par la ponction parafiscale de 900 milliards effectuée dans les cinq plus grands pays européens à l'occasion de l'attribution des licences de téléphonie mobile de troisième génération.
M. René Trégouët, sénateur, a insisté sur le fait que le prélèvement effectué l'avait été sur des techniques qui n'étaient pas encore mûres (puissance insuffisante, terminaux à perfectionner, difficulté à véhiculer de la voix sur protocole Internet), et dont les usages n'étaient pas constitués, car ils n'étaient même pas encore acquis dans le domaine de l'Internet fixe.
Cette crise aboutit à une situation préoccupante :
- du fait de l'endettement de l'opérateur historique, elle retarde l'extension de l'Internet à haut débit sur le territoire, ainsi que le dégroupage de la boucle locale, et, dès lors, menace d'introduire une fracture numérique dans notre pays ;
- elle décale la création d'une industrie de services Internet, car les prix de transport, trop élevés actuellement, s'opposent à la constitution d'un marché de masse - seul approprié pour rentabiliser cette offre de service.
M. Pierre Laffitte, sénateur, a alors exposé les mesures qu'il conviendrait de prendre de façon urgente :
- mettre en place une vraie politique industrielle européenne dans ce domaine ;
- reconsidérer les conditions d'attribution des licences de téléphonie mobile de troisième génération ;
- activer le lancement du « General Packet Radio Service » (GPRS) ;
- maintenir une capacité française et européenne en matière de satellites de télécommunications ;
- accélérer l'implantation de l'Internet à haut débit sur l'ensemble du territoire - notamment dans le but d'encourager le télétravail, dont la France est la lanterne rouge en Europe (2,7 % de la population active, contre près de 20 % en Finlande) ;
- et renforcer la coopération européenne en matière d'harmonisation des fréquences.
A une question de M. Robert Galley, député, sur l'évolution de la téléphonie mobile de deuxième génération, M. René Trégouët, sénateur, a estimé que le déploiement du GPRS jouerait un rôle important, car il permettra, à un faible coût, de fixer progressivement les usages de l'Internet mobile.
M. Jean-Yves Le Déaut, député, premier vice-président, a estimé que le rapport définitif devrait inclure une carte de France des liaisons en Internet à haut débit et s'intéresser aux frontières de compétences entre l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) et le Conseil de surveillance de l'audiovisuel (CSA). Sur ce dernier point, M. Pierre Laffitte, sénateur, a indiqué que la convergence des télécommunications et de l'audiovisuel obligerait à une remise à plat de l'attribution des fréquences, y compris celles qui seront libérées par le numérique hertzien.
Après une observation de M. Jean-Yves Le Déaut, député, premier vice-président, sur l'insuffisance de la recherche française et européenne dans le domaine des télécommunications depuis 10 ans, M. Pierre Laffitte, sénateur, a rappelé qu'avec la privatisation de France Telecom, près de deux milliards de francs de crédits de recherche avaient été annuellement soustraits à ce secteur.
Revenant sur les problèmes de dégroupage de la boucle locale, M. René Trégouët, sénateur, a appelé l'attention sur l'exemple américain qui montre les difficultés d'installer une concurrence entre le propriétaire de la ligne et les opérateurs qui l'utilisent. Il a, également, souligné que les collectivités publiques qui avaient, dans le passé, pris leurs responsabilités dans la constitution des grands réseaux d'équipement (chemin de fer, eau, électricité), devraient, dans un avenir proche, s'investir dans la constitution des réseaux haut débit, pour assurer un aménagement du territoire équilibré.
A une question de M. Claude Saunier, sénateur, M. René Trégouët, sénateur, a répondu que les limites des techniques dites « xdsl » - et, en particulier, l'affaiblissement du signal au-delà de 5 km - étaient les mêmes en Europe et aux États-Unis, ce qui implique qu'à terme, les techniques reposant entièrement sur la fibre optique l'emporteront.
Justice - Valeur scientifique de l'utilisation des empreintes génétiques dans le domaine judiciaire - Examen du rapport
M. Christian Cabal, député, rapporteur, a ensuite présenté son rapport sur la valeur scientifique de l'utilisation des empreintes génétiques dans le domaine judiciaire.
Cette technique constitue l'outil d'identification le plus perfectionné dont disposent aujourd'hui policiers et magistrats. Elle peut contribuer à la désignation d'un suspect, mais aussi disculper un condamné, comme l'illustre, aux États-Unis, l'actualité la plus récente. Mais si elle est aujourd'hui un instrument important de l'enquête judiciaire, elle doit rester associée aux méthodes traditionnelles pour construire le faisceau de preuves permettant d'établir la vérité.
L'empreinte génétique se fonde sur le polymorphisme de l'ADN qui fait de chaque être humain un individu unique dont le profil peut être tracé à partir de toute cellule de son corps. L'analyse de ce polymorphisme, qui se fait sur la partie non codante du génome, permet, par comparaison entre un échantillon probatoire et un échantillon prélevé sur un suspect, d'établir soit une exclusion absolue, soit une possibilité d'inclusion. Ainsi peut-on identifier un suspect au moyen de traces laissées sur le lieu de l'infraction.
Après avoir distingué l'ADN nucléaire et l'ADN mitochondrial dont le pouvoir de discrimination est plus faible, M. Christian Cabal, député, rapporteur, a évoqué les différentes techniques d'analyse dont la plus récente, la PCR (Polymerase Chain Reaction) permet, à partir d'une très faible quantité d'ADN, d'obtenir rapidement un profil génétique. Sa très grande sensibilité accroît cependant les risques de contamination et impose des précautions draconiennes, tant au stade du recueil qu'à celui de l'analyse.
Le rapporteur a ensuite décrit les dispositions législatives et réglementaires qui encadrent l'utilisation des empreintes en matière civile (recherche de paternité) et pénale (enquête préliminaire et instruction). Le décret du 6 février 1997 a organisé l'agrément des experts et des laboratoires, ainsi que le contrôle de qualité, assuré par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. Quant au fichier automatisé, géré par la police technique et scientifique, et au service central de préservation des prélèvements biologiques confié à la Gendarmerie, ils ne concernent actuellement que les infractions de nature sexuelle. Cependant, l'extension à d'autres types d'infractions, qui paraît souhaitable au rapporteur, sera vraisemblablement décidée par le Parlement.
Après avoir évoqué les législations étrangères, M. Christian Cabal, député, rapporteur, a abordé la fiabilité des systèmes, qui repose sur la rigueur scientifique et technique appliquée à tous les maillons de la chaîne, depuis le prélèvement de l'indice jusqu'à son exploitation finale.
S'agissant des prélèvements sur les scènes de crime, ils doivent être opérés par des techniciens parfaitement formés à cette tâche.
Les méthodes d'analyse sont aujourd'hui standardisées, grâce à l'utilisation de kits, et ne soulèvent donc pas de problème majeur.
Quant au fonctionnement des laboratoires, les contrôles pratiqués jusqu'ici n'ont pas mis en évidence des insuffisances notables. Cependant, la mise en place d'un véritable système d'assurance-qualité applicable à tous les établissements publics et privés se révèle indispensable, même si cette certification doit avoir des effets sur le coût des analyses.
Pour ce qui concerne l'alimentation du fichier, dont la mise en place ne sera effective qu'au second semestre 2002, il paraît souhaitable, afin de réduire les risques d'erreurs matérielles, de réduire le circuit de transmission en ne faisant pas de l'autorité judiciaire l'intermédiaire obligé entre l'expert et les gestionnaires du fichier.
M. Christian Cabal, député, rapporteur, a enfin évoqué l'harmonisation européenne, déjà très avancée dans le domaine des techniques d'analyse, mais qui reste encore à développer en ce qui concerne les conditions d'accréditation et la certification de qualité.
En conclusion, le rapporteur a présenté plusieurs recommandations concernant la conservation des prélèvements, l'alimentation du fichier, la formation des personnels et l'assurance-qualité. Il a souligné qu'elles ne mettaient pas en cause la validité actuelle du système, mais se plaçaient dans la perspective de son développement, qui accroît inévitablement les risques d'erreurs matérielles.
M. Henri Revol, sénateur, président, a souligné l'intérêt d'un tel rapport au moment où le législateur s'oriente vers une conception plus extensive du fichier national automatisé d'empreintes génétiques.
M. Jean-Yves Le Déaut, député, premier vice-président, a insisté sur le fait que le profil génétique était établi à partir d'éléments non codants du génome. De ce point de vue, l'empreinte génétique ne se distingue pas de l'empreinte digitale et ne peut donc porter quelque atteinte que ce soit aux libertés individuelles. Aussi a-t-il proposé d'ajouter une recommandation visant l'extension du fichier à un plus grand nombre de condamnés, ainsi qu'aux suspects, compte tenu de la longueur des procédures d'appel.
Il a observé par ailleurs que la technique des empreintes génétiques fournissait un argument supplémentaire contre la peine capitale.
Le rapport a ensuite été adopté à l'unanimité des membres présents.
Nomination de rapporteurs
Puis l'Office a nommé :
- MM. Claude Saunier et Charles Descours, sénateurs, rapporteurs de la saisine émanant de la commission des affaires économiques et du plan du Sénat sur « l'évolution du secteur des semi-conducteurs et de la microélectronique » ;
- M. Gérard Miquel, sénateur, rapporteur de la saisine émanant de la commission des finances, de l'économie générale et du plan de l'Assemblée nationale sur « la qualité de l'eau et de l'assainissement en France ».