
Mercredi 21 mai 2025, le Sénat a adopté les conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques.
L’Assemblée nationale ayant également adopté ces conclusions le mercredi 14 mai 2025, le texte est considéré comme définitivement adopté.
Lundi 26 mai 2025, le Conseil constitutionnel a informé le Sénat qu’il a été saisi de ce texte par plus de soixante députés.
Pourquoi ce texte ?
La fraude, sous toutes ses formes, constitue un fléau social, économique et moral. C'est aussi un enjeu de justice et de finances publiques. Ces derniers mois ont été révélés de nouveaux schémas de fraude organisée mis en place par des réseaux structurés pour détourner des aides publiques. C’est pourquoi une nouvelle offensive législative en matière de lutte contre les fraudes s’impose.
A cette fin , le texte propose de :
- lutter contre la fraude à la source en introduisant un pouvoir de suspension temporaire du versement des aides publiques en cas de suspicion de fraude (art. 1) ;
- lever le secret professionnel dans les différents codes afin d’élargir et de systématiser les échanges internes à l’administration, permettre à Tracfin de transmettre des informations à l’agence nationale de l’habitat (ANAH) pour lutter contre les fraudes relatives à la prime "MaprimRénov", permettre des échanges d’informations en matière de fraude à l’identité et documentaire entre services des préfectures et les organismes de protection sociale, afin d'exploiter pleinement le partage d’informations entre services de lutte contre les fraudes et organismes qui versent les aides pour identifier plus rapidement les schémas frauduleux (art. 2) ;
- renforcer la lutte contre la fraude à la rénovation en permettant notamment de (art. 3) :
- rétablir le délit d’absence d’immatriculation au registre national des entreprises (RNE) pour permettre aux agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (CCRF) de constater cette infraction et de sanctionner les professionnels ne disposant pas de la qualification alléguée auprès des consommateurs ;
- interdire le démarchage téléphonique pour les travaux d’adaptation du logement au handicap et à la vieillesse et instituer des sanctions pécuniaires jusqu’à 375 000 euros pour les personnes morales, et 75 000 euros pour les personnes physiques prononcées les services d’enquête CCRF ;
- étendre l’interdiction sectorielle du démarchage téléphonique aux sollicitations par SMS, réseaux sociaux et courriels afin d’éviter la captation des chantiers par des professionnels peu scrupuleux ;
- assurer l’information du consommateur lorsqu’un professionnel recourt à un ou plusieurs sous‑traitants pour réaliser des travaux de rénovation énergétique et éviter que le consommateur perde le bénéfice des soutiens conditionnés à la réalisation des travaux par des professionnels reconnus garant de l’environnement (RGE) ;
- suspendre ou retirer le label RGE, par les enquêteurs de la CCRF, en cas d’anomalies graves constatées lors des contrôles afin de mettre rapidement hors d’état de nuire les grands fraudeurs.
- renforcer les contrôles et les sanctions en cas de fraudes aux certificats d'économies d'énergie (C2E) (art. 4 et 5).
Lors de son examen à l'Assemblée nationale, la proposition de loi visant à lutter contre toutes les fraudes aux aides publiques a été enrichie d'un amendement reprenant certaines dispositions de la proposition de loi sénatoriale pour un démarchage téléphonique consenti et une protection renforcée des consommateurs contre les abus, de Pierre-Jean Verzelen.
Les apports du Sénat
Le Sénat a enrichi le texte en poursuivant les quatre objectifs suivants :
- renforcer la protection des consommateurs, dans la transition énergétique et la révolution numérique ;
- veiller à la simplicité du cadre législatif, garante de son intelligibilité et de son applicabilité ;
- veiller à la simplicité de l’action administrative, en prévenant en amont tout effet de silo ;
- faire suite aux travaux sénatoriaux, notamment en matière de démarchage téléphonique en reprenant les dispositions de la proposition de Pierre-Jean Verzelen, adoptées à l'unanimité par le Sénat le 14 novembre 2024.
Les apports du Sénat retenus lors de la CMP du 6 mai 2025 prévoient ainsi notamment :
- la possibilité pour l’administration de renouveler la période de suspension d’une aide publique en cas de suspicion de fraude ;
- l’exclusion des indus de revenus de solidarité active (RSA) obtenus de manière frauduleuse de toute remise, rééchelonnement ou effacement de dette, au même titre que les autres prestations ou aides sociales ;
- la criminalisation de l’escroquerie aux finances publiques en bande organisée ;
- le renforcement des pouvoirs d’enquête et des suites données aux contrôles de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), en particulier dans la rénovation énergétique et l’obligation pour les professionnels de faire mention du service public de la performance énergétique de l’habitat (SPPEH) ;
- la sécurisation des contrôles et des sanctions en matière de certificats d’économies d’énergie (C2E) ;
- le renforcement des échanges d’informations entre administrations, notamment entre la DGCCRF, d’une part, et l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et la Commission de régulation de l’énergie (CRE), d’autre part ;
- la facilitation des contrôles à distance des fraudes aux compteurs communicants par Enedis et GrDF, sous le contrôle de la CRE ;
- le renforcement des contrôles et des sanctions aux fraudes sociales, notamment en matière de travail, d’emploi et de formation professionnelle ;
- l'entrée en vigueur de l'opt-in dans le démarchage téléphonique, pour toutes les entreprises, au 11 août 2026.