
Mercredi 2 juillet 2025, lors de son examen en séance publique, le Sénat a adopté, par 232 voix pour et 103 contre, les conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur.
Mardi 8 juillet 2025, l'Assemblée nationale a définitivement adopté la proposition de loi.
Vendredi 11 juillet 2025, le Conseil constitutionnel a informé le Sénat qu’il a été saisi de ce texte par plus de soixante députés (2025-891 DC).
Pourquoi ce texte ?
Cette proposition de loi s'inscrit en complémentarité de l'examen du projet de loi d'orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture. Elle vise à apporter des réponses concrètes à des situations d'impasses dans lesquelles se trouvent de nombreuses filières agricoles françaises, suscitant incompréhension et désarroi parmi les agriculteurs, et contribuant à la montée de la colère dans les campagne en même temps qu'à un déclin rapide des performances de la ferme France.
Les mesures proposées sont le fruit de multiples travaux du Sénat, d'initiatives de parlementaires, et de l'écoute attentive des besoins urgents des filières agricoles. Elles entendent :
- s'attaquer de front à certains totems néfastes à l'économie agricole, à l'instar de la séparation des activités de vente et de conseil en matière de produits phytopharmaceutiques ;
- revenir sur certaines surtranspositions pesant lourdement sur notre compétitivité, et notamment l'interdiction de l'usage des produits phytopharmaceutiques à base de néonicotinoïdes, dans le respect du droit européen ;
- œuvrer à faire de l'activité agricole une priorité nationale en tant qu'elle nourrit la nation.
Les apports du Sénat
Le choix de sécuriser juridiquement le texte sans en affecter l'ambition politique a guidé les travaux sénatoriaux.
La commission mixte paritaire a retenu les apports du Sénat et souhaité :
- rendre le conseil stratégique phytosanitaire facultatif, pour lever une exigence réglementaire en pratique peu respectée sur le terrain, au profit de la création d'un module sur le même sujet au sein du Certiphyto ;
- créer un conseil stratégique global facultatif au service des agriculteurs, articulé avec les diagnostics modulaires de la loi d'orientation agricole, pour ne plus appréhender la question des produits phytosanitaires isolément du reste des problématiques de l'exploitation ;
- revenir sur la séparation de la vente et du conseil de produits phytosanitaires pour les distributeurs (coopératives...), afin de tenir compte des effets contre-productifs de la réforme identifiés dans de nombreux rapports sur l'assèchement du conseil, tout en leur fixant un cadre sur les conflits d'intérêts et en leur imposant une facturation distincte du conseil par transparence, et en recentrant les certificats d'économie phytopharmaceutiques (CEPP) sur ces distributeurs ;
- maintenir une séparation stricte entre la vente et le conseil en matière de produits phytosanitaires pour les fabricants de ces produits (firmes) et maintenir l'interdiction des remises, rabais et ristournes (3R) sur ces produits, afin de maintenir un cadre incitatif à la réduction des usages ;
- permettre, sous de très strictes conditions, en cas de menace grave compromettant la production agricole, et sous le contrôle d'un comité de surveillance, la mise en place de dérogations à l'interdiction franco-française de l'usage de produits phytopharmaceutiques de la famille des néonicotinoïdes ou assimilés, dans la mesure où ceux-ci sont autorisés à l'échelle de l'Union européenne ;
- acter le principe selon lequel l’État doit accompagner les professionnels dans leurs recherches d’alternatives lorsqu'il interdit des produits phytopharmaceutiques contenant des substance pourtant autorisées au niveau européen ;
- favoriser l'aboutissement des procédures dites de reconnaissance mutuelle dans le cadre des demandes d'autorisation de mise sur le marché déposé auprès de l'Anses ;
- transformer, pour les projets d'élevage (porc, volaille, œufs), les deux réunions publiques rendues obligatoires par la loi Industrie verte, en simples permanences en mairie, afin de limiter les irritants locaux et faciliter la consolidation des élevages pour soutenir la concurrence européenne ;
- autoriser le Gouvernement à relever les seuils de déclaration, enregistrement et autorisation s'agissant des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) en matière d'élevage bovin, porcin et avicole afin de lever un frein à la consolidation des élevages pour soutenir la concurrence et faire face à l'érosion de la décapitalisation ;
- déclarer d'intérêt général majeur les ouvrages de stockage d'eau et les prélèvements associés lorsque leur finalité principale est agricole, se situent en zone de déficit quantitatif pérenne et sont issus d'une démarche territoriale concertée et d'engagements à des pratiques sobres en eau ;
- clarifier le rôle du préfet dans la détermination du programme de contrôles des inspecteurs de l'environnement et rappeler le principe de la transmission par voie hiérarchique au procureur des procès-verbaux dressés ;
- mettre en place, dans une logique d'apaisement lors de certains contrôles, le port de la caméra individuelle pour les inspecteurs de l'environnement, sur le modèle de la police et la gendarmerie.