COM(2025) 555 FINAL  du 17/07/2025

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)


Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur l'établissement du Fonds européen pour la compétitivité, comprenant le programme spécifique pour les activités de recherche et développement en matière de défense, abrogeant les règlements (UE) 2021/522, (UE) 2021/694, (UE) 2021/697, (UE) 2021/783, et modifiant les règlements (UE) 2021/696, (UE) 2023/588 et (UE) [programme pour l'industrie européenne de la défense] - COM(2025) 555 final

Cette proposition, qui fait partie du premier paquet de propositions sur le CFP 2028-2034, vise à la création d'un Fonds européen pour la compétitivité (FEC), qui regrouperait dans un cadre unique les 14 programmes européens existants en matière d'innovation, d'industrie, de soutien aux technologies critiques et de soutien à l'industrie de défense.

Ce fonds intégrerait le 2ème pilier du budget européen, selon la nouvelle architecture proposée par la Commission européenne.

A. Le contenu de la proposition législative de la Commission

La Commission européenne propose pour le CFP 2028-2034 de diviser le budget européen en quatre piliers principaux (1° Plans nationaux et régionaux incluant la PAC et la cohésion ; 2° Compétitivité, prospérité et sécurité ; 3° Europe globale ; 4° Administration).

Le Fonds européen pour la compétitivité (FEC) rassemblerait près de 70 % des crédits du deuxième pilier. Il vise à regrouper dans un cadre unique les nombreux programmes existants en matière de compétitivité, mais aussi à y intégrer les financements en matière de « résilience et de sécurité, d'industrie de la défense et d'espace ». La fusion des différents programmes existants est présentée comme un moyen de faciliter l'accès aux différents outils de financement disponibles et d'être plus réactifs en cas de nouveaux besoins1(*). Horizon Europe, qui permet d'investir dans la recherche, resterait cependant un programme autonome et n'intégrerait pas le FEC.

Pour remédier au saupoudrage de crédits et à l'éparpillement des interventions de l'Union, le Fonds pour la compétitivité se concentrerait sur quatre domaines d'action prioritaires, qui disposeraient chacun de leur propre ligne budgétaire, sur sept ans :

· 26,2 milliards d'euros destinés à des projets qui ont pour objectif de mener une transition propre et une décarbonation de l'industrie ;

· 51,5 milliards d'euros pour des projets qui favorisent la « souveraineté numérique » ;

· 20,4 milliards d'euros destinés à des projets en lien avec « la santé, la biotechnologie, l'agriculture et la bioéconomie » ;

· 125,2 milliards d'euros fléchés vers les domaines de la défense et de l'espace.

Selon la proposition formulée par la Commission, 43 % des financements du Fonds pour la compétitivité devront contribuer aux objectifs climatiques et de biodiversité.

Par ailleurs, s'agissant des modes de financement, si un projet est éligible à plusieurs financements européens (que ce soit au Fonds pour la compétitivité ou à d'autres enveloppes prévues dans CFP), le texte prévoit que le bénéficiaire pourra se conformer à un ensemble unique de règles, et non pas à une règle par type de financement reçu ou par programme.

Au sein du FEC, un instrument spécifique, appelé « Invest EU », serait mis en place. Il suivrait la même logique que le programme InvestEU de 2021-2027 et que le plan Juncker de 2014-2020. Il doit permettre de créer une garantie budgétaire, pouvant aller jusqu'à 70 milliards d'euros, qui devrait être provisionnée à hauteur de 50 %. Elle aurait pour mission de garantir ensuite des prêts pour des projets à travers toute l'Union européenne.

Par ailleurs, le fonds intègre un principe de « préférence européenne ». Selon ce principe, le FEC devrait « cibler le développement et la fabrication de technologies et de secteurs stratégiques situés dans l'Union ». La proposition précise ainsi que l'attribution des fonds peut être soumise à des critères de préférence européenne. Il peut ainsi être exigé que des bénéficiaires soient établis dans l'UE, ou s'approvisionnent en composants auprès d'entités européennes. Il peut aussi être interdit de transférer les résultats de recherche et droits de propriété intellectuelle vers une entité basée dans un État tiers pendant cinq ans après la fin du projet financé, ou encore de dépendre d'une entité basée dans un pays tiers dans les prises de décisions liées au projet financé.

B. Cette proposition est-elle conforme aux principes de subsidiarité et de proportionnalité ?

Le Fonds européen pour la compétitivité rassemblerait de nombreux programmes et instruments aujourd'hui distincts, dans des domaines d'action très variés (santé, numérique, biotechnologies, innovation, défense, spatiale, transition énergétique, interconnexion etc.).

C'est la raison pour laquelle cette proposition de règlement repose sur plusieurs bases juridiques différentes. Dans le détail, la proposition repose sur les articles 43, 168, 172, 173, 175, 182, 189, 192, 194, 212 et 322 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

En janvier 2025, la Commission européenne a adopté la Boussole pour la compétitivité, qui a recensé les freins qui entravent la compétitivité de l'Union. L'un des principaux problèmes identifiés est la dispersion des dépenses entre plusieurs programmes qui se chevauchent. Beaucoup de ces programmes financent des initiatives similaires mais avec des exigences et des règles de mise en oeuvre différentes. Cette situation conduit selon la Commission à une combinaison inefficace des financements.

La mise en place d'un Fonds de compétitivité est ainsi un moyen de coordonner encore davantage les efforts pour renforcer les investissements dans les secteurs stratégiques de l'Union.

Les sous-investissements persistants du secteur privé dans les domaines critiques, tels que les infrastructures, les transitions écologiques et numériques et le soutien aux industries critiques, ne peuvent être comblés par des interventions au niveau national. Les dépenses publiques de recherche et développement restent encore trop fragmentées et mal alignées sur les priorités de l'Union.

La taille critique nécessaire pour combler le déficit européen en matière de compétitivité appelle une intervention au niveau de l'Union. En ce sens, la proposition apparaît bien conforme aux principes de subsidiarité et de proportionnalité.

Compte tenu de ces observations, le groupe de travail sur la subsidiarité a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution.


* 1 Dans le détail, le fonds fusionne les programmes sectoriels suivants : le programme pour une Europe numérique (« Digital Europe »), ainsi que le volet numérique du Mécanisme pour l'interconnexion en Europe, le Fonds européen de la défense, le programme de soutien à la production de munitions (Asap, en anglais), le programme de soutien au renforcement de l'industrie européenne de défense via les achats conjoints (Edirpa), le programme de l'industrie de défense européenne (Edip), EU4Health, le programme spatial européen, le projet de constellation de satellites (Iris²), InvestEU, la partie PME du programme sur le marché unique, le programme Life.


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 19/09/2025