Disponible au format PDF Acrobat


Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Saisine du Conseil constitutionnel

Organismes extraparlementaires (Candidatures)

Loi de finances pour 2009 (Deuxième partie - Suite)

Sécurité

Interventions des rapporteurs

Interventions des orateurs

Examen des crédits

Article additionnel après l'article 73

Organismes extraparlementaires (Nominations)

Loi de finances pour 2009 (Deuxième partie - Suite)

Sécurité civile

Interventions des rapporteurs

Intervention des orateurs

Solidarité, insertion et égalité des chances

Interventions des rapporteurs

Interventions des orateurs

Examen des crédits

Article 35 (État B)

Article 74

Article additionnel

Article 75

Article 76

Article 76 bis

Outre-mer

Intervention des rapporteurs

Interventions des orateurs

Examen des crédits

Article 65

Articles additionnels




SÉANCE

du mardi 2 décembre 2008

33e séance de la session ordinaire 2008-2009

présidence de M. Jean-Claude Gaudin,vice-président

Secrétaires : MM. Philippe Nachbar et Bernard Saugey

La séance est ouverte à 9 h 35.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Saisine du Conseil constitutionnel

M. le président.  - Le président du Sénat a été informé, par lettre en date du 1er décembre 2008, par M. le président du Conseil constitutionnel, que celui-ci a été saisi d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution, par plus de 60 députés, de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.

Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

Organismes extraparlementaires (Candidatures)

M. le président.  - Je rappelle que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques et du Conseil supérieur de l'énergie.

La commission des affaires économiques a fait connaître qu'elle propose les candidatures de MM. Pierre Hérisson, Bruno Sido, Michel Teston et Philippe Darniche pour siéger au sein du premier de ces organismes extraparlementaires ; de MM. Ladislas Poniatowski, Roland Courteau, Jean-Claude Merceron et Daniel Raoul pour siéger -les deux premiers comme titulaires et les deux derniers comme suppléants- au sein du second organisme.

Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

Loi de finances pour 2009 (Deuxième partie - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l'Assemblée nationale.

Sécurité

M. le président.  - Nous abordons l'examen des crédits de la mission « Sécurité ».

Interventions des rapporteurs

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial de la commission des finances.  - La mission « Sécurité », dont les crédits affichent une hausse de 2,2 %, est constituée à 85,5 % de dépenses de personnel, ce qui induit une rigidité préjudiciable à la recherche d'une bonne gouvernance. Le premier objectif de cette mission, la baisse de la délinquance, est rempli avec un recul de 2 à 3 %, grâce à l'appui accru que la police technique et scientifique apporte aux services d'investigation.

Le programme « Police nationale », dont les crédits augmentent de 2,2 %, enregistre une réduction de ses effectifs de 2 383 postes équivalent temps plein travaillé ou ETPT, l'objectif étant de supprimer 4 000 ETPT d'ici trois ans. Les moyens consacrés à l'investissement accusent une baisse notoire : moins 4,5 % pour les crédits de paiement et moins 22,2 % en autorisations d'engagement. Puisse cet arbitrage entre fonctionnement et investissement ne pas mettre pas en péril la modernisation de la police nationale.

Le programme « Gendarmerie nationale », dont les crédits augmentent également de 2,2 %, affiche une réduction d'effectifs de 1 625 ETPT, l'objectif étant de supprimer 3 000 ETPT d'ici 2012. Toutefois, ce budget garantit aux sous-officiers et officiers de gendarmerie le même déroulement de carrière qu'aux fonctionnaires des corps actifs de la police nationale. La diminution des dépenses d'investissement, moins 23 % en crédits de paiement et moins 50,2 % en autorisations d'engagement, ne doit pas freiner la modernisation du corps ni entamer son potentiel opérationnel. Précisons, toutefois, que la baisse concerne les véhicules blindés, qui peuvent être mutualisés avec l'armée de terre, et le remplacement des hélicoptères Écureuil, dont la maintenance ne devra pas coûter davantage que l'amortissement de nouveaux appareils.

En 2009, cette mission est marquée par une évolution notable qui a suscité de nombreux doutes : le rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur. Ce mouvement, qui ne remet nullement en question le statut militaire de la gendarmerie et le dualisme policier, permettra de renforcer l'efficacité de la politique de sécurité.

L'application des conclusions de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, constitue un deuxième axe fort de la mission. Je regrette que l'on m'ait transmis les seules conclusions de cette étude, malgré des demandes répétées en vue d'en obtenir la « matière première » -si je peux qualifier ainsi les diagnostics d'étape et les éléments chiffrés. Faut-il en déduire qu'un journaliste peut être mieux informé qu'un parlementaire ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.  - Tout de même...

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial.  - Faut-il rappeler que la Constitution révisée, par l'importance accrue qu'elle accorde au Parlement, incite à une coopération plus étroite encore entre Parlement et Gouvernement ?

S'agissant de la RGPP, cette coopération n'est pas allée assez loin...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - Hélas !

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial.  - De surcroît, la mise en oeuvre de la RGPP est modeste, on en attend une économie représentant 0,39 % du budget de la mission... Dans un contexte budgétaire tendu, n'aurait-il pas fallu tirer tous les avantages de la mutualisation entre les deux forces ? Le dualisme policier peut être la meilleure ou la pire des choses. Il présente des inconvénients, notamment les doublons, l'absence d'interopérabilité et la concurrence exacerbée. Tout d'abord, le dispositif de formation initiale pourrait être mieux adapté à la diminution prévue des élèves. La fermeture de quatre écoles de gendarmerie, qui a été récemment annoncée, va dans ce sens. De même, pourquoi ne pas créer une agence immobilière commune aux deux forces ? La mutualisation des fichiers, essentielle pour la coordination des deux forces, devrait être totale et l'interopérabilité des réseaux de communication pleinement assurée, comme c'est le cas en région parisienne.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - On ne pouvait pas anticiper sur le rattachement prévu dans ce budget...

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Patience...

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial.  - S'agissant de la police technique et scientifique, comment comprendre que les laboratoires ne soient pas mutualisés ? Il y a là des économies d'échelle substantielles à réaliser.

La répartition des zones police et gendarmerie doit être rendue plus homogène : la police relève d'une logique de police territoriale d'agglomération, tandis que la gendarmerie doit se concentrer sur les territoires ruraux qu'elle connaît bien. (M. Jean-Louis Carrère le confirme)

En région parisienne, le particularisme de la préfecture de police de Paris fait courir le risque de doublons, notamment en matière de renseignement. Son positionnement doit être revu, dans la perspective du « Grand Paris ».

L'organisation des transfèrements conduit à faire peser des charges indues de la mission « Justice » sur la mission « Sécurité ». Pourtant, des solutions existent : refacturation interne, déplacements de magistrats en prison, vidéoconférence. Il est anormal de déplacer un détenu sous escorte pour lui demander son identité ! En 2007, il en est résulté deux millions d'heures et 1 000 ETPT pour la gendarmerie et 2 700 ETPT pour la police nationale. Le rapporteur spécial de la mission « Justice » partage cette volonté de réformer le système des transfèrements.

Les forces mobiles doivent être recentrées sur leur coeur de métier. Un rapport de 2003 concluait à un temps de travail moyen annuel de 1 731 heures pour les gendarmes ; en 1998, Jean-Jacques Hyest l'estimait pour la police à 1 300 heures. La baisse de la délinquance impose de revoir l'équation : moins d'effectifs, travaillant plus grâce à une meilleure mutualisation et un recours accru à la technique.

Enfin, la dimension internationale de la mission « Sécurité », via le service de coopération technique internationale de police, doit être optimisée. Il faut valoriser le savoir-faire, l'expérience et la maîtrise technologique des forces de sécurité françaises. La coopération internationale est source d'économies au plan intérieur et permet d'entretenir des relations avec des pays en marge des relations internationales.

Sous ces réserves, la commission des finances vous propose d'adopter les crédits de la mission « Sécurité ». (Applaudissements à droite et au centre ; M. Jean - Louis Carrère applaudit aussi)

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Les forces de police et de gendarmerie se dévouent, au péril de leur vie, pour assurer la sécurité de nos concitoyens. En 2007, 24 policiers et gendarmes sont décédés dans l'exercice de leurs fonctions, dont cinq à la suite d'agressions. Qu'il leur soit rendu un hommage particulier.

L'an dernier, policiers et gendarmes étaient déstabilisés par les rumeurs sur leur avenir. Des réponses ont été apportées et les personnels comprennent désormais la nécessité de participer à l'effort budgétaire exigé des administrations de l'État. Plusieurs réformes structurelles sont engagées ou se profilent : rattachement de la gendarmerie à votre ministère, future loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Loppsi), révision générale des politiques publiques. Après un budget 2008 de transition, le projet de loi de finances pour 2009 est la première étape de ce cycle de réformes, rendues nécessaires par le contexte budgétaire. De fait, les crédits hors dépenses de personnel diminuent et il est prévu de supprimer 7 000 ETPT sur l'ensemble de la mission à l'horizon 2011 -4 000 policiers et 3 000 gendarmes.

M. Jean-Louis Carrère.  - Cela fait beaucoup !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis.  - En baisse constante depuis 2001, l'effectif des adjoints de sécurité est passé de 15 761 en 2001 à 9 918 au 1er août 2008. Leur mission est en effet mal définie : la fonction d'intégration et de promotion de la diversité dans la police nationale ne peut suffire seule à maintenir ce dispositif. Quel est votre projet pour l'avenir des adjoints de sécurité ?

La modernisation de la police scientifique et technique constitue un défi essentiel. Les locaux de la police scientifique à Paris sont d'une vétusté indigne. Où en est le projet de regrouper les laboratoires parisiens sur un site unique et adapté ? Je me réjouis que vous ayez confirmé devant la commission des lois que la fusion de l'Institut national de la police scientifique et de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale n'était pas à l'ordre du jour.

Nous reviendrons sur la question des charges indues de transfèrements avec l'amendement de la commission des lois, identique à celui de la commission des affaires étrangères. Des économies sont attendues en matière de gardes statiques, notamment grâce à la vidéosurveillance. Quels sont les objectifs chiffrés en termes d'ETPT en 2009 ? A-t-on évalué le nombre d'ETPT que requerra la garde du futur tribunal de grande instance de Paris ? Peut-on espérer des économies grâce à une meilleure conception du bâtiment ? Aujourd'hui, la protection du Palais de justice de Paris requiert 540 ETPT !

De nombreuses réformes ont été engagées pour réduire le format des forces mobiles. Quelles en seront les conséquences sur les missions de maintien de l'ordre outre-mer, au moment où l'armée se désengage de plusieurs territoires ? Est-il envisagé d'étendre aux CRS les missions outre-mer ?

Le rapprochement entre CRS et gendarmerie mobile s'est déjà traduit par la mise en commun du centre de formation de Saint-Astier. Est-il envisagé de partager les cantonnements et de regrouper la direction de la gendarmerie mobile et la direction centrale des CRS sur un même site ?

Au bénéfice de ces observations, la commission des lois vous propose d'adopter les crédits de la mission « Sécurité ». (Applaudissements à droite)

M. Jean Faure, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - L'année 2009 sera marquée par de profondes mutations pour la gendarmerie nationale, qui sera rattachée organiquement et budgétairement au ministère de l'intérieur, afin de renforcer la coopération et de mutualiser les moyens entre police et gendarmerie.

Sur ma proposition, la commission a adopté dix-huit amendements au projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale, qui visent à préserver son statut militaire, à conforter ses missions et son ancrage territorial. Nous avons besoin d'une force de sécurité à statut militaire capable de faire face à des situations de crise, en métropole, outre-mer ou sur les théâtres extérieurs. La dualité des forces de sécurité et le statut militaire de la gendarmerie doivent être préservés. (M. Jean-Louis Carrère approuve)

Le budget de la gendarmerie s'inscrit dans un cadre pluriannuel ; il intègre ainsi une première annuité de la future Loppsi, permettant notamment de financer le recours aux nouvelles technologies. Je m'inquiète toutefois de la diminution des crédits d'investissement sur les trois prochaines années et du report de plusieurs programmes d'équipement, comme le renouvellement des hélicoptères et des véhicules blindés.

Enfin, la gendarmerie n'échappe pas aux mesures d'économies prévues au titre de la RGPP : environ 3 000 postes pourraient être supprimés sur les trois prochaines années, dont 1 625 dès 2009. Ces réductions d'effectifs et la publication par la presse d'une note d'un ancien conseiller du Premier ministre évoquant la suppression de 175 brigades territoriales et de quinze escadrons de gendarmerie mobile ont provoqué l'émoi des élus locaux. Mme le ministre a toutefois précisé devant la commission que ces réductions d'effectifs concerneraient principalement des personnels affectés à des tâches annexes. (Murmures dubitatifs sur les bancs socialistes)

Cette capacité opérationnelle et cet ancrage territorial seront préservés et, pour les renforcer, j'ai proposé à la commission des affaires étrangères un amendement sur les transfèrements et les extractions judiciaires, qu'elle a adopté à l'unanimité.

Sous réserve de l'adoption de cet amendement, notre commission a émis un avis favorable sur les crédits de la mission sécurité. (Applaudissement à droite et au centre ; M. Jean-Louis Carrère applaudit aussi)

Interventions des orateurs

Mme Anne-Marie Escoffier.  - C'est un honneur et une épreuve d'intervenir sur une mission d'un ministère que j'ai servi avec passion, conviction et détermination.

Honneur, car il s'agit d'une mission régalienne de l'État, garante des principes républicains et de l'indispensable équilibre entre prévention et répression.

Épreuve, car j'aurais voulu que ce budget vienne à bout des retards, dysfonctionnements, et parfois incohérences, relevés dans la bonne marche des services en charge de la sécurité de notre pays.

Le sujet est d'autant plus délicat que la sécurité est une exigence de tous nos concitoyens qui n'acceptent de l'État aucun manquement au risque zéro alors qu'ils sont, à leur propre égard, d'une tolérance parfois coupable. Ainsi en est-il du comportement de certains automobilistes qui n'hésitent pas à bafouer les règles élémentaires de sécurité.

Je sais, madame le ministre, que vous voulez que la sécurité publique soit au coeur de la modernisation de l'État grâce à l'augmentation des effectifs, l'amélioration des rémunérations, le renforcement des moyens de fonctionnement et d'équipement tant pour la police que pour la gendarmerie. J'ai suivi avec attention la création de la direction centrale des renseignements intérieurs en juillet. De même, j'ai approuvé le retour dans les zones difficiles des unités territoriales de quartier qui ont remplacé la police de proximité et tissent des liens indispensables avec certaines populations en déshérence. J'ai salué la coopération interministérielle qui a permis de lutter contre l'économie souterraine. Je me félicite aussi de certaines statistiques qui font état de la baisse de la criminalité routière, de la diminution de certaines formes de délinquance ou encore de l'amélioration du taux d'élucidation des crimes et délits.

Tout cela va dans le bon sens mais nous devons analyser ces chiffres avec la plus grande prudence. Ils ne disent, en effet, que ce que nous voulons leur faire dire ! Le nombre d'atteintes aux personnes à Clichy-sous-Bois a singulièrement décru depuis que l'antenne du service de police a été fermée. Pour un chéquier volé, on peut enregistrer une plainte comme vingt, s'il y avait vingt chèques ! Le nombre de victimes de la route connait une évolution contrastée, sans qu'il soit possible de dire ce qui en revient à la police...

Je ne veux pas faire le procès de la performance, de la quête du chiffre à tout prix ni de la recherche de l'efficience idéale. Je m'interroge en revanche sur la façon de donner une meilleure efficacité à votre fonction sécuritaire.

La gendarmerie et la police sont désormais placées sous la tutelle d'un même ministère. Au pilotage institutionnel mis en place en 2002 s'ajoute aujourd'hui le pilotage fonctionnel qui permettra de renforcer la cohérence des deux forces et de mutualiser leurs moyens.

Comment ne pas relever, en premier lieu, un problème de calendrier ? La particularité de cette mission tient au fait que nous examinons un budget qui doit s'appliquer à un système encore virtuel puisque nous n'examinerons la prochaine Loppsi que dans quelques mois. (M. Jean-Louis Carrère applaudit) On ne peut que regretter cette mauvaise concordance des temps qui, en grammaire, vaudrait une mauvaise note ! (M. Jean-Louis Carrère applaudit derechef) Un tel retard est gênant parce qu'il contraindra les deux administrations à trouver des modes de gestion provisoires et il inquiète les deux forces. Qui n'a pas côtoyé de près la police et la gendarmerie aurait du mal à mesurer leur sensibilité. « La police marche à l'affectif », m'avait-on dit. Les policiers ont effectivement besoin de la reconnaissance de leur autorité de tutelle pour la dangerosité et la pénibilité de leur métier. Je donne la parole au général Gilles, directeur général de la gendarmerie : « Parce que le gendarme est fils du territoire, il est l'homme d'un terroir, parce qu'il est fils de la loi, il en est le gardien intraitable, parce qu'il est fils du peuple, il en est le serviteur direct ». Les gendarmes veulent conserver ces traits distinctifs, et ils n'entendent pas les abandonner en intégrant une nouvelle administration. (M. Jean-Louis Carrère applaudit) L'inquiétude des gendarmes et des policiers tient assurément au choc de deux cultures qui, tant qu'elles étaient distinctes, entrainaient peut être des comparaisons revendicatrices mais jamais de heurts frontaux.

N'est-ce pas pour ces raisons que l'organisation future des services a retenu le clair obscur ? Ainsi, un budget « Sécurité » à deux volets : le programme « Police » est géré au niveau zonal et celui consacré à la gendarmerie reste au niveau central, avec une gestion régionale décentralisée. La gestion des carrières est rattachée au ministère de l'intérieur, sauf en ce qui concerne la discipline des gendarmes qui, en raison de leur statut militaire, implique un rattachement à la défense. Une formation continue unique, mais une formation initiale distincte, conséquence, une nouvelle fois, du statut militaire. Ne serait-il pas envisageable de prévoir un tronc commun de formation initiale ? Une parité globale des carrières avec un point de convergence au grade de brigadier. Je sais, madame le ministre, que vous vous êtes attachée à trouver les solutions les plus efficaces, comme vous l'avez fait lors de la mutualisation des moyens logistiques. Mais si cela est relativement facile lorsque n'intervient que peu la dimension humaine, cet exercice se révèle beaucoup plus délicat lorsqu'il s'agit de respecter les prérogatives fondamentales de la gendarmerie. Je suis ainsi sensible aux arguments de deux anciens directeurs généraux de la gendarmerie qui dénoncent l'abandon de la procédure de réquisition de la force armée qui fondait l'action de la gendarmerie depuis le décret de 1903 : « il est insupportable, au regard des libertés publiques, que la gendarmerie soit désormais laissée, dans les missions de maintien et de rétablissement de l'ordre, à la disposition du ministre ainsi qu'à la discrétion des préfets, sans la garantie fondamentale de la procédure de la réquisition de la force armée ».

Il faudra donc veiller, dans la future Loppsi, à ce que la police et la gendarmerie soient parfaitement complémentaires. Je ne doute pas, madame le ministre, de votre détermination et de votre volonté de dialogue pour que cette nouvelle étape se mette en place à la satisfaction de tous.

En cette année où nous fêtons les 100 ans des brigades du Tigre, comment ne pas former le voeu que, sur les pas de votre illustre prédécesseur, vous ouvriez, madame la ministre, une ère nouvelle afin que la mission sécurité soit pleinement au service de nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs socialistes, au centre et sur quelques bancs à droite)

M. Charles Gautier.  - Depuis 2002, première fois où j'intervenais sur le budget de la sécurité, mon discours a souvent été identique. Cette année, je me suis aperçu que la politique du Président de la République et de la ministre de l'intérieur a changé : M. Sarkozy, Président la République a oublié M. Sarkozy, ministre de l'intérieur.

Tout d'abord, les projets de loi sont continuellement annoncés puis retardés. Le projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, que nous devions examiner il y a un an, a sans cesse été repoussé. Compte tenu de la programmation triennale, le Parlement se retrouve dans la situation baroque de discuter de la première année d'exécution budgétaire d'une loi qui n'a même pas été adoptée en conseil des ministres. Quant à l'examen du projet de loi relatif à la gendarmerie, qui prévoit de placer la gendarmerie nationale sous la responsabilité du ministre de l'intérieur, il a été présenté en commission mais reporté. Comment discuter d'un budget qui prend déjà en compte des modifications législatives pas encore votées par le Parlement ?

M. Jean-Louis Carrère.  - C'est la nouvelle orthodoxie !

M. Charles Gautier.  - De plus, les policiers sont les grands perdants de votre politique. Les syndicats de policiers nous disent la dégradation grandissante de leurs conditions de travail : « 10 000 policiers sont blessés en service chaque année, soit 10% de l'effectif total au sol ; aucune profession ne peut afficher de tels chiffres, qui illustrent la violence au quotidien subie par les forces de l'ordre lors de l'exercice de leur mission. » Je me joins à M. Courtois pour remercier ces agents qui mènent une action aussi difficile.

La suppression d'une partie de leurs RTT, sur la base d'un accord avec un seul syndicat, dont la représentativité est contestée, est très mal perçue. Elle se traduira forcément par une baisse de l'efficacité opérationnelle et de la sécurité des policiers. Et que dire de la fermeture des écoles de formation ! La police de proximité, dont nous vous demandons le retour depuis 2003, revient certes, sous le nom d'unité territoriale de quartier, mais de manière bien trop limitée : huit seulement, dans trois départements !

La baisse annoncée des effectifs annule pour une bonne part les prétendues créations de postes de la Loppsi 1. Les syndicats de policiers contestent d'ailleurs vos chiffres et affirment que la réduction des effectifs est bien plus importante que ce que vous annoncez. La politique mise en place entre 2002 et 2004 affichait l'ambition de porter de 105 000 à 108 000 les policiers. Nous étions sceptiques. Les syndicats ont calculé que nous passerons en fait à 100 300 policiers en 2012. Les policiers ne tolèrent plus ces réductions d'effectifs et ont manifesté à ce sujet car ces mesures auront un impact sur la sécurité et donc sur le service rendu au citoyen. Que leur répondez-vous ? Qu'ils travaillent plus pour en pâtir plus !

Vous annoncez une augmentation de 2,2 % mais les autorisations d'engagement resteront stables. Si l'on prend en compte l'arrivée de la gendarmerie sous votre responsabilité, la baisse des effectifs de la police, les menaces terroristes sérieuses que vous évoquiez en commission, nous sommes inquiets. La sécurité n'est plus du tout une priorité pour le Gouvernement.

En matière de prévention, rien n'a été entrepris. Vous êtes obligée de faire mieux avec moins, c'est difficile. Vous annoncez une baisse de 13 % de la délinquance générale en vous fondant sur les enregistrements des services de police et de gendarmerie. Les enquêtes de victimation établies par l'Insee donnent des résultats plus complets qui relativisent ces données : pour 4 615 000 atteintes subies en 2007, il n'y a eu que 1 644 000 plaintes déposées. Un peu plus de 800 000 personnes de 14 ans et plus ont déclaré avoir subi au moins un acte de violence physique en 2007 contre 736 000 en 2006, soit une augmentation de 9 %. Nous sommes loin des chiffres annoncés !

Mais foin de l'éternelle polémique sur les chiffres. Admettons que la délinquance baisse en même temps que les moyens. C'est que les communes se débrouillent seules. Elles compensent le désengagement de l'État en matière de sécurité et de prévention. Il suffit de voir le nombre croissant de communes qui se dotent d'une police municipale : de 3 300 en 2005, on est passé à 4 040.

Le Fonds de prévention de la délinquance n'est plus affecté à la vidéosurveillance. Si l'efficacité de celle-ci va de soi pour les investigations des délits filmés, elle est beaucoup moins évidente pour la prévention de la délinquance. Et c'est celle-ci qui est au coeur de l'action municipale.

Nous pouvons surtout féliciter les communes de leurs actions en matière de sécurité et de prévention de la délinquance. Les économies du ministère se font à leur détriment. Inquiet pour l'avenir, le groupe socialiste ne votera pas vos crédits. (Applaudissements à gauche)

Mme Éliane Assassi.  - Vous demandez aux parlementaires de se prononcer sur des crédits pour 2009 qui correspondent à la première année d'exécution d'une loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure qu'ils n'ont même pas examinée ! Ce, au moment où l'on nous ressasse que les droits du Parlement ont été renforcés grâce à la réforme constitutionnelle.

M. Jean-Louis Carrère.  - Très bien !

Mme Éliane Assassi.  - De même, alors que le projet de loi relatif à la gendarmerie n'a toujours pas été examiné par le Parlement, on nous demande quand même de voter les crédits qui organisent le rattachement organique et fonctionnel de la gendarmerie nationale à votre ministère. Les gendarmes sont d'ailleurs inquiets : le report de cette réforme risque de gêner la gestion quotidienne des gendarmeries pendant plusieurs mois. Pour ma part, je m'interroge sur les raisons profondes d'un tel rattachement, au-delà de la volonté de réduire la dépense publique.

D'ici 2011, il est prévu de supprimer 7 000 équivalents temps plein travaillé : 4 000 policiers et 3 000 gendarmes. C'est à se demander si la Loppsi 2 -dont on apprend dans le rapport de M. Courtois qu'elle s'exécutera à moyens constants, voire en baisse- ne va pas défaire le peu qu'avait fait la version initiale. Quel peut être, dans ces conditions, l'avenir des brigades de gendarmerie ? Les effectifs des forces mobiles vont eux aussi diminuer.

Allez-vous, en contrepartie, généraliser la dénonciation anonyme ? Dans l'Isère, on trouve sur le site de la préfecture une rubrique intitulée « Comment aider les forces de l'ordre ? »...

Vous prévoyez des réorganisations, qui sont en fait des redéploiements sur le principe des vases communicants. Vous avez supprimé la police de proximité, les ADS, des postes de gardiens de la paix ; vous créez les Uteq et les compagnies de sécurisation sur les mêmes territoires.

On ne peut évoquer le thème de l'insécurité sans aborder la situation économique. De ce point de vue, l'ensemble de ce projet de loi de finances, en ne profitant qu'à la frange de la population qui en a le moins besoin, est lui-même source d'insécurité. Je pense au désengagement de l'État pour ce qui concerne la rénovation urbaine, à la suppression des Rased, au projet de suppression de l'école maternelle, à votre politique du logement, à la suppression de nombreux postes dans la fonction publique, à la disparition des services publics de proximité et du lien social qui va avec. Croyez-vous que de telles décisions vont améliorer la vie de nos concitoyens et les inciter à vivre en toute sécurité et sérénité ? Depuis les annonces faites en 2005 à la suite des émeutes, que s'est-il passé ? Rien.

Rien n'a changé dans les quartiers qu'on dit sensibles. Où est passé le plan Banlieue, pourtant si timoré ? La situation des populations écartées des centres urbains n'a guère évolué, que ce soit en matière de sécurité, d'éducation ou de transports. La précarité, le chômage, la misère, la crise du logement, la violence, l'économie parallèle qui gangrène des quartiers entiers... Tout est là. La question fondamentale est celle de l'utilisation de l'argent public. On nous parle de restriction budgétaire, d'économie, de maîtrise des dépenses publiques, comme si la France était un pays pauvre. Le problème n'est pas l'absence d'argent, c'est qu'il est mal utilisé et que les cadeaux fiscaux faits aux plus fortunés représentent autant de recettes en moins pour l'État.

Plutôt que dans des domaines qui coûtent très cher pour une efficacité qui reste à prouver comme la vidéosurveillance, la biométrie, les fichiers, les scanners corporels, les Taser, il faudrait investir dans l'éducation, dans l'emploi, dans la formation, dans l'habitat social, dans les services publics, dans l'accompagnement social, les associations de quartiers. Ce serait une politique de longue haleine beaucoup moins spectaculaire que les descentes de police filmées au petit matin !

L'État doit jouer un rôle régulateur. Ce n'est pas de moins d'État que nous avons besoin mais de plus d'État. Tant que vous refuserez toute réflexion de fond sur les causes de la délinquance, son indispensable traitement social, sa nécessaire prévention, votre politique restera inefficace. La délinquance urbaine, juvénile, prend racine dans les difficultés sociales et économiques. Quand l'écart se creuse entre la dégradation des conditions de vie et l'explosion des richesses, la délinquance augmente. Dire cela ne signifie pas excuser ni être laxiste, mais chercher à comprendre, pour mieux agir. La réponse ne peut résider seulement dans l'allongement des peines d'emprisonnement, dans l'abaissement de l'âge pénal à 12 ans, dans la construction de prisons et d'établissements pour mineurs, dont on voit jour après jour les effets détestables avec la multiplication des suicides.

Il s'agit là d'un raisonnement simpliste, populiste et dangereux. Les orientations budgétaires confirment ce constat : vous privilégiez la politique du chiffre, et vous faites passer la répression et l'enfermement avant la prévention. Nos prisons sont surpeuplées, alors même que le Gouvernement se targue d'une baisse continue de la délinquance générale depuis six ans.

Surveiller, punir, enfermer : tel est votre credo. Nous appelons de nos voeux, au contraire, une politique fondée sur la prévention, la dissuasion, puis la répression. Au nom de la lutte contre le terrorisme et la délinquance, vous cherchez à imposer votre projet de société, fondé sur la surveillance et le contrôle généralisés de la population. Depuis le 11 septembre 2001, nous avons vu se succéder des mesures liberticides, la dernière en date étant la création du fichier Edvige, finalement annulée grâce à la forte mobilisation de la société civile.

Avant de conclure, je tiens à dire ma très ferme opposition à l'utilisation par les forces de l'ordre -y compris, depuis peu, les policiers municipaux- des pistolets à impulsion électrique Taser. Le comité de l'ONU contre la torture estime que la douleur aiguë provoquée par ces armes constitue, je cite, « une forme de torture ».

Vous l'avez compris, les sénateurs du groupe CRC-SPG ne voteront pas les crédits de cette mission. (Applaudissements à gauche)

M. Raymond Couderc.  - Ce budget satisfait aux impératifs de sécurité publique de notre pays. La politique menée par le Gouvernement répond aux engagements de campagne du Président de la République et aux attentes des Français.

Il est néanmoins nécessaire d'adapter la répartition géographique des moyens en fonction des besoins et de la situation des autres services de l'État. En tant que représentant des collectivités territoriales de l'Hérault, en particulier de la ville de Béziers, je souhaite porter certains faits à votre connaissance.

A Béziers, la mise en fonction prochaine d'une nouvelle prison de 820 places n'a pas été suffisamment anticipée. La police municipale compte seulement 200 agents, dont 175 opérationnels. Les 30 fonctionnaires envoyés en renfort seront affectés à des tâches de transfert, de présentation ou de secours.

M. Jean-Louis Carrère.  - En somme, la politique du Gouvernement est la bonne, mais elle a quelques failles...

M. Raymond Couderc.  - Dans cette même circonscription, la délinquance a augmenté de 5,5 % entre les dix premiers mois de 2007 et les dix premiers mois de 2008.

M. Jean-Louis Carrère.  - Pas comme en France !

M. Raymond Couderc.  - Le trafic de stupéfiants a augmenté de 33 %.

M. Jean-Louis Carrère.  - Ce n'est pas bien !

M. Raymond Couderc.  - Les locaux du commissariat sont sous-dimensionnés et leur état déplorable, comme on a pu le constater lors de la dernière inspection. Les geôles sont trop peu nombreuses, l'armurerie n'est pas sécurisée, les vestiaires sont délabrés et les places de stationnement insuffisantes : bref, ces locaux sont tout à fait inadaptés aux missions du commissariat.

M. Jean-Louis Carrère.  - En effet !

M. Raymond Couderc.  - On peut aussi se demander où seront logés les fonctionnaires envoyés en renfort...

Je voterai les crédits de cette mission (marques d'ironie à gauche) mais j'insiste sur la nécessité de prendre en compte les situations locales et de ne pas se contenter d'une approche technocratique et purement statistique de ces problèmes. Je souhaite également qu'une meilleure coordination avec le ministère de la justice permette d'harmoniser les actions de l'État sur le terrain. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Louis Carrère.  - M. Trucy a raison d'applaudir !

M. Philippe Madrelle.  - Avant tout, je vous ferai part de mon étonnement : nous sommes appelés à voter les crédits du programme « Gendarmerie nationale » avant même d'avoir discuté le projet de loi qui prévoit le rattachement organique et budgétaire de la gendarmerie au ministère de l'intérieur à compter du 1er janvier 2009 ni le projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. Le Gouvernement tient ces réformes pour acquises alors même que le Parlement n'a pas été invité à se prononcer ! Il y a là un problème de fond.

Mme Éliane Assassi.  - Très bien !

M. Philippe Madrelle.  - En tant que membre du groupe de travail constitué au sein de la commission des affaires étrangères et de la défense, je tiens à rendre hommage à notre collègue Jean Faure, dont le rapport formule dix-sept recommandations très utiles.

Les autorisations d'engagement pour la gendarmerie sont en baisse de plus de 2 %, pour la deuxième année consécutive. Ce corps verra ses effectifs diminués de 1 625 unités et ramenés ainsi sous la barre des 100 000 agents.

Le rapprochement de la police et de la gendarmerie suscite, vous le savez, des interrogations dans ce dernier corps. Je souhaite que vous nous apportiez des précisions sur la future organisation des services. Les gendarmes tiennent à conserver leur identité propre et leur statut militaire, condition indispensable de leur efficacité opérationnelle. Ils réclament la parité des traitements et des carrières et l'octroi d'une grille spécifique.

Devant l'Assemblée nationale, vous avez témoigné, madame la ministre, de votre volonté de moderniser la gendarmerie. Moderniser, pour vous, c'est regrouper : vous prévoyez de fermer quatre écoles de gendarmerie, dont une à Libourne. La municipalité s'inquiète des retombées économiques de la disparition des 134 permanents et des 480 stagiaires de l'école et souhaite que ce site soit reconverti, suggérant que le commissariat de police et la brigade territoriale de gendarmerie s'y installent. Pouvez-vous nous donner des informations à ce sujet ? Je sais que vous n'étiez vous-même pas favorable à cette suppression.

Lors de votre audition devant la commission, vous avez mis l'accent sur le financement de nouvelles technologies destinées à la protection des gendarmes. Ne s'agit-il pas d'un objectif un peu trop ambitieux ? Dans de nombreuses brigades, les agents doivent déjà rivaliser d'imagination pour remédier à l'absence de photocopieurs et d'ordinateurs...

L'inquiétude et le désarroi des gendarmes s'expliquent aussi par le sentiment qu'ils éprouvent de perdre le contact avec la population. Accaparés par l'élaboration de statistiques, ils ne peuvent consacrer le temps nécessaire au suivi procédural des enquêtes.

Nous sommes tous attachés à la gendarmerie, particulièrement dans les campagnes. Le manque de moyens, la diminution des effectifs et la fermeture de certaines brigades ne favorisent pas son indispensable ancrage territorial. C'est pourquoi le groupe socialiste ne votera pas les crédits de ce programme. (Applaudissements à gauche)

M. Marc Laménie.  - Je m'associe à mes collègues pour rendre hommage au dévouement et au courage des gendarmes et des policiers, qui assurent la sécurité des personnes et des biens au péril de leur vie. Les chiffres rappelés par M. Courtois sur les agents décédés en mission doivent nous interpeller : dans le seul département des Ardennes, deux motards de la gendarmerie sont morts à cause de l'irresponsabilité de certains. Votre soutien est apprécié, madame la ministre ; comme vous l'avez souligné, la sécurité, ce sont d'abord des hommes et des femmes, qu'aucune technologie ne saurait remplacer.

Les crédits de la mission « Sécurité » progresseront en 2009 de 2,2 %, pour atteindre 16, 226 milliards d'euros en crédits de paiement. En tant que représentant d'un département rural, je me concentrerai sur la gendarmerie. Les crédits de paiement qui lui sont affectés se montent à 7,6 milliards d'euros, permettant notamment de financer 99 509 emplois en équivalents temps plein.

Les gendarmes tiennent à leur identité et à leur statut militaire. Ils s'inquiètent de l'avenir des petites brigades. Ils sont des interlocuteurs indispensables pour les maires ruraux, qui font face à une recrudescence des incivilités. Nous devons entendre leurs demandes légitimes quant à la préservation de leurs moyens de fonctionnement : les casernes, les véhicules, le parc informatique et l'habillement doivent être convenablement entretenus. Les gendarmes doivent être délestés de tâches administratives parfois superflues pour pouvoir être plus présents sur le terrain.

Des dispositions pourraient être envisagées pour y remédier. Nous savons, madame la ministre, que nous pouvons compter sur votre écoute et votre détermination au service de ce combat permanent, mené par nos forces de police et de gendarmerie, pour lutter contre la délinquance et l'insécurité. La sécurité routière reste également une priorité forte du Gouvernement, que nous soutenons.

Vous aurez compris qu'avec mon groupe, je voterai les crédits de cette mission. (Applaudissements à droite ; Mme Anne-Marie Escoffier applaudit aussi)

Mme Virginie Klès.  - Je centrerai mon intervention sur les moyens consacrés à la vidéosurveillance et au programme 152 concernant la gendarmerie.

Un vieux réflexe scientifique m'a en effet portée à m'interroger sur la question de l'expérimentation et de l'évaluation, sans trouver de réponse précise quant à la mise en place opérationnelle de l'équipement en vidéosurveillance : où, quand, pourquoi, comment ? Pourtant, les moyens que vous envisagez de lui consacrer sont importants : le programme « Police Nationale » a été doté d'un budget de 20 millions en autorisations d'engagement et le Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) lui consacrera 30 millions, soit la moitié de son budget global. Au service de quels objectifs ? Prévention de la délinquance ou élucidation et répression ? Pour quels délits ? Sur quels territoires ? Pour accompagner quels autres dispositifs de sécurité ? Je regrette l'absence d'expérimentation. L'exemple du Royaume-Uni nous enseigne pourtant que si la présence de caméra peut être corrélée dans certains cas à une diminution des infractions, le contraire n'est pas moins vrai : on constate dans certains cas une augmentation des homicides, des crimes sexuels, des agressions violentes... Il est clair que nous manquons de recul sur la question.

Votre empressement à vous saisir de ces moyens techniques me fait donc craindre qu'il ne s'agisse de rien d'autre que de les mettre au service de votre politique dogmatique de non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux qui se traduira, d'ici à 2011, par la suppression de 4 000 emplois dans la police et 3 000 dans la gendarmerie. Seule la présence sur le terrain, avec sa plus-value sociale, peut assurer un véritable maillage territorial jusque dans les zones rurales.

Certes, le recentrage de l'activité des gendarmes sur leur coeur de métier s'accompagne du renforcement des personnels civils de la gendarmerie, qui passeront de 2 000 à 5 000 en 2013. Un système de vases communicants dont on pourrait se satisfaire, n'était l'expérience de la période 2003-2007 au cours de laquelle seuls 6 050 postes sur les 7 000 estimés nécessaires ont été dotés, tandis que l'année 2008 s'est soldée par la suppression de 965 emplois. Le compte n'y est donc pas. D'autant que les responsabilités de la gendarmerie, en charge de la protection d'une population toujours plus nombreuse, iront croissant face à des risques et des menaces qui s'aiguisent, en même temps que des responsabilités nouvelles pèseront sur elle, en zone urbaine, avec la livraison de nouveaux établissements pénitentiaires. Comment, dès lors, maintenir l'équilibre sur l'ensemble du territoire ? Et que dire des logements de fonction dont la vétusté n'a d'égale que celle des casernes ? La communauté de brigades de mon territoire n'est pas brimée par rapport aux autres...

L'insuffisance de ce budget est criante. Les restructurations, rénovations et constructions immobilières prévues pour les petites structures rurales de moins de 40 gendarmes représentent un transfert de charge unilatéralement décidé vers les collectivités locales qui, en raison du retard pris par la Loppsi 2, n'auront pas même le choix du montage juridico-financier. Elles devront s'engager avant le 31 décembre 2008 à réaliser des équipements selon un cahier des charges extrêmement lourd, la maîtrise d'ouvrage leur étant déléguée par l'État contre une généreuse subvention de18 %, un montant de travaux plafonné et un loyer de 6 % invariable pendant neuf ans mais calculé sur les bases locatives des domaines : autant dire que le compte n'y est pas et que ce seront plus de 20 % des opérations qui resteront à leur charge, tandis que d'autres montages plus favorables, comme les partenariats public-privé ou les baux emphytéotiques leur sont interdits puisque la Loppsi qui les autorisait est caduque.

Vous aurez compris, madame la ministre, l'ampleur de nos doutes, alimentés tant par ce projet de budget que par le projet à venir sur le rattachement de la gendarmerie à votre ministère : nous ne pourrons voter les crédits de cette mission. (Applaudissements à gauche.)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.  - La définition d'un budget n'est pas un simple travail comptable. Au-delà des chiffres, et en particulier s'agissant de la protection de nos concitoyens, il s'inscrit dans une perspective politique et stratégique. Le budget 2008 traduisait la volonté de faire du ministère de l'intérieur un grand ministère pour la protection des Français. Le budget 2009 permet de relever les nouveaux défis et d'affirmer notre ambition de mieux protéger nos compatriotes. Son action s'inscrit, avec l'intégration de la gendarmerie nationale, dans un périmètre élargi. MM. de Montesquiou et Courtois ont eu raison de dire que pour la première fois, les deux services civil et militaire sont placés sous la responsabilité du ministre de l'intérieur. Je les rassure, avec M. Laménie et Mme Escoffier, cela ne remet pas en cause le statut militaire de la gendarmerie, auquel je suis tout autant que vous attachée.

Ce rapprochement doit améliorer l'efficacité de la protection des Français. Certes, nous examinons ce budget avant le projet de loi sur la gendarmerie : ce n'est pas moi qui fais l'ordre du jour... Reste que le budget de la gendarmerie est, depuis la Lolf, présenté avec celui de la police. N'est-il pas un peu hypocrite de s'en offusquer aujourd'hui ? Mme Klès a été, sur ce point, plus prudente. Le directeur général de la gendarmerie se verra déléguer les crédits du programme à partir de janvier.

Deuxième défi : les contraintes budgétaires imposent une réduction globale du déficit et de la dette. Il n'est pas responsable, madame Mathon-Poinat, de nier la réalité de la crise que nous traversons, de l'endettement de notre pays et de parler de cadeau fait aux banques. C'est du temps où vous étiez aux affaires, et alors que vous vous souciiez bien peu de creuser les déficits, que les forces de sécurité ont été le moins bien dotés ; on en a vu immédiatement les conséquences : une augmentation de 7 % de la délinquance !

M. Jean-Louis Carrère.  - Heureusement que vous êtes là ! C'est élégant !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Le ministère de l'intérieur ne saurait rester en dehors de cet effort d'intérêt national.

Troisième défi à relever, la protection des Français face à la menace terroriste. L'Europe et, en son sein, la France constituent des cibles privilégiées. Dans un communiqué du 22 septembre, Al Qaïda, au Maghreb islamique, menace, pour la première fois, le sol français.

La menace existe également pour les Français qui voyagent ou qui travaillent à l'extérieur ; l'attentat de Bombay, où deux de nos compatriotes ont péri, nous l'a tragiquement rappelé.

Aussi nos services veillent-ils, notamment en détectant les filières de recrutement et en surveillant internet. La direction centrale du renseignement intérieur est un maillon essentiel de cette protection préventive. L'an passé, 89 activistes islamistes ont été interpelés sur notre sol et 65 l'ont été sur les dix premiers mois de cette année ; nous avons démantelé un réseau de financement du Jihad et mis fin à des entraînements militaires jihadistes qui avaient lieu sur notre territoire.

Les Français doivent aussi être protégés contre d'autres attentats : ceux perpétrés en Corse, même si leur nombre a diminué de moitié ; ceux de l'ETA, organisation qui a tué deux gardes civils à Arcachon, ou ceux de certains groupes anarcho-autonomes ; l'action de nos services doit être saluée car elle est indispensable.

Les services de police n'oublient pas pour autant le passé : l'arrestation cette année d'un responsable présumé de l'attentat de la rue Copernic en 1980 démontre que la police n'oublie jamais et qu'elle est déterminée à retrouver, chaque fois que c'est possible, les responsables des crimes.

La lutte contre la délinquance quotidienne est également une priorité. Les résultats de la période 2003-2007 ont été exemplaires et la tendance se poursuit : entre novembre 2007 et octobre 2008, la délinquance de proximité a diminué de 8,2 %, ce qui représente 140 000 victimes de moins, ce qui est considérable.

Les statistiques de la délinquance et les enquêtes sur la victimisation sont complémentaires, monsieur Charles Gautier : les premières, qui utilisent les mêmes critères depuis trente ans, permettent une analyse dans la durée ; les secondes, qui portent sur 22 000 personnes, nous en apprennent beaucoup sur le contexte des agressions mais aussi sur le fait que de nombreuses victimes ne portent pas plainte. En effet, des victimes estiment que la plainte n'est pas utile au regard de l'agression qu'elles ont subi ; d'autres sont gênées ou refusent de se plaindre, en particulier pour les agressions au sein de la famille, en raison des conséquences de la plainte. Or, nous constatons que si les violences aux personnes diminuent en général, celles qui ont lieu au sein de la famille augmentent : c'est une conséquence de la meilleure écoute et de l'accueil des victimes.

La délinquance générale recule, malgré la hausse des délits révélés par l'initiative accrue des services, notamment la lutte contre le trafic de stupéfiants. Le taux d'élucidation a été porté à 37,7 % contre 35,7 % l'an dernier, et il atteint même 40,7 % en octobre ; on peut, sans commentaire, rapprocher ces chiffres à celui de 2001 : 25 % ! Les gardes à vue progressent de 3 %, le nombre de personnes mises en cause, de 4,2 %. Les objectifs fixés par le Président de la République pour deux ans ont donc été atteints en dix-huit mois.

Cependant, je veux aller plus loin, sans camoufler les chapitres moins favorables du bilan, en particulier la hausse des violences gratuites et des escroqueries.

Les violences dites crapuleuses, les vols à main armée et vols avec violences ont reculé de 9,6 %, ce qui représente 11 000 victimes de moins. Mais les violences dites gratuites, qui se produisent en particulier dans le cercle familial, progressent de 5,3 %. Il y a certes une tendance à davantage signaler, grâce à l'amélioration de l'accueil, mais il faut renforcer la prévention.

Les escroqueries ont touché 30 000 victimes de plus cette année ; c'est considérable, en particulier les escroqueries par internet. Je proposerai en tout début d'année un plan d'action en direction des plus vulnérables, notamment des personnes âgées.

L'insécurité routière est également un défi majeur. Sur les dix premiers mois de cette année, le nombre de tués baisse de 7 %, soit 267 personnes et celui de blessés baisse de 9,2 %, soit 7 906 personnes. Ce n'est pas suffisant. Les mesures contre la vitesse au volant ont divisé par deux le nombre de morts sur la route mais l'alcool y demeure la première cause de mortalité. Aussi j'ai demandé aux constructeurs automobiles de préparer des éthylotests anti-démarrage, dont l'équipement sera une peine complémentaire obligatoire. Pour mieux lutter contre la conduite sous l'influence de stupéfiants, j'ai doté les forces de l'ordre de tests salivaires plus performants.

La Loppsi renforcera également notre action avec des sanctions plus dissuasives, notamment la confiscation des véhicules en cas de récidive de grand excès de vitesse, de conduite sous l'influence de l'alcool ou de stupéfiants et en cas de conduite sans permis.

Ce budget nous donne les moyens de relever les défis. Mes crédits progressent de 2 %, mais de 2,5 % pour la mission « Sécurité », ce qui traduit bien la priorité que je lui accorde.

La RGPP n'a pas pour premier objectif d'économiser des moyens mais d'améliorer le service, de moderniser l'action publique, en utilisant mieux chaque euro pour la sécurité des Français.

Je regrette, monsieur de Montesquiou, que des éléments que vous avez demandés à mon ministère ne vous aient pas été communiqués, notamment ceux qui concernaient également le ministère du budget. La Direction générale de la police nationale et la Direction générale de la gendarmerie nationale ont toujours eu pour instruction de coopérer en pleine transparence avec le Parlement. Nous n'avons rien à gagner à dissimuler de l'information au Parlement, nous voulons tous améliorer la protection des Français.

Nous modernisons les moyens des forces de sécurité ; je suis très attachée à cette orientation nouvelle de sécurité. Nous consacrons 100 millions d'autorisations d'engagement et 40 millions de crédits de paiement à l'extension de la police technique et scientifique. Je veux une police scientifique de masse, qui participe pleinement à l'élucidation des faits relevant de la délinquance quotidienne. La police scientifique fait qu'aujourd'hui, 85 % des crimes sont élucidés : je voudrais qu'elle ait la même importance pour les vols et les cambriolages, par exemple. Le fichier national des empreintes génétiques comportait 3 000 traces en 2002 et 500 000 au printemps 2007 ; nous en sommes à 960 000 traces. Ce fichier a permis 42 300 rapprochements de traces génétiques dans des enquêtes judiciaires et d'identifier des milliers d'auteurs ou de leur attribuer plusieurs faits : c'est essentiel pour les victimes ! Le fichier automatisé des empreintes digitales comportait moins de 1,6 million d'individus en 2002, 2,5 millions d'individus au printemps 2007 ; 3 millions d'individus y sont inscrits aujourd'hui.

Il faut moderniser ces deux fichiers et prévoir des modalités simples d'utilisation pour les infractions. C'est l'enjeu de mon plan « Police technique et scientifique de masse », dont ce budget constitue une première étape.

Monsieur Courtois, nous devons effectivement disposer de laboratoires dignes de ce nom en Ile-de-France. La situation actuelle n'est pas acceptable : des personnels de haut niveau travaillent avec des matériels de grande qualité dans un environnement qui n'est pas du tout adapté. Aussi, nous faut-il trouver le site le plus approprié, pour ne pas augmenter le coût d'une opération évaluée à des dizaines de millions d'euros, et disponible rapidement. Plusieurs pistes sont en cours d'examen, notamment des terrains, pour certains construits, à Ivry-sur-Seine, à Vélizy et à Rueil-Malmaison. Tant que le choix n'aura pas été arrêté, je ne pourrais indiquer la date à laquelle sera terminée l'opération car celle-ci dépendra de la nature du site retenu : un terrain nu ou construit.

S'agissant de la vidéo-protection, elle constitue un outil efficace d'élucidation comme de prévention. Pour s'en convaincre, monsieur Gautier et madame Klès, il suffit de retenir l'exemple de Strasbourg : la délinquance y a diminué de 13 % et, en moyenne, de 50 % dans les quartiers équipés de vidéo. Le mécanisme psychologique en jeu est relativement simple : on hésite à agir si l'on est sûr d'être repéré...

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial.  - Bien sûr !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - A Orléans, ville qui se distingue par des installations vidéo très développées, la délinquance a baissé de 60 % entre 2001 et 2007 et de 10 % cette année, preuve que la baisse de la délinquance perdure, et même s'intensifie, au-delà de la période d'installation des matériels. En m'appuyant donc sur l'expérience, et non sur des études théoriques, j'ai décidé de tripler le nombre de caméras sur la voie publique, de les généraliser dans les transports -n'oublions pas qu'il y a un an à peine une femme était assassinée dans le RER-, de réaliser des raccordements avec la police et la gendarmerie tout en veillant au respect des libertés individuelles. Nos systèmes nous permettent, en effet, de garantir que les caméras ne pénètrent pas dans les lieux privés. A ce propos, madame Klès, si vous aviez lu le rapport sur la vidéo-protection au Royaume-Uni jusqu'au bout, vous auriez constaté que l'on n'y remet pas en question la vidéo-protection mais que l'on s'y plaint de la vétusté du matériel et de la non-centralisation du système.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis.  - Exact !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Les 30 millions consacrés à la vidéo-protection financeront le plan « 1 000 » du préfet de police, notamment l'installation très attendue de caméras dans le XIXe arrondissement de Paris et les raccordements entre les centres de supervision urbains et les services de police ou de gendarmerie. Cela n'amputera en rien sur les autres actions de prévention, dont les budgets ne diminuent pas.

Moderniser les forces de l'ordre, c'est aussi les doter d'équipements adaptés aux nouvelles menaces. Nous en avons constaté l'importance à Villiers-le-Bel. Pas moins de 11 millions et 14 millions sont consacrés à équiper respectivement policiers et gendarmes en lunettes de protection, gilets tactiques et nouvelles tenues.

S'agissant de l'organisation des forces, je ne peux, madame Escoffier, anticiper sur la loi relative à la gendarmerie et répondre à des questions portant sur la discipline ou la réquisition. Toutefois, soyez assurée que le statut militaire des gendarmes sera maintenu, mais adapté aux récentes évolutions juridiques. Les forces de sécurité doivent être recentrées sur leur coeur de métier, j'en suis d'accord. Les remarques de MM. Montesquiou et Courtois sur les transfèrements sont pleinement justifiées. Le développement de la vidéo-protection sur la voie publique permettra de diminuer les gardes statiques. Nous y travaillons avec chacun des ministères concernés et la Chancellerie pour le palais de justice de Paris. Il s'agit de réduire très sensiblement ces gardes, sans aller jusqu'à leur suppression.

Le report des programmes d'équipements portant sur les véhicules blindés et les hélicoptères de la gendarmerie -et non l'abandon, comme M. Faure l'a fort justement rappelé- ne portera pas atteinte à la capacité opérationnelle des unités, contrairement à ce que craignait M. de Montesquiou, et permettra d'économiser 15 % du budget annuel de maintien en condition des hélicoptères.

L'immobilier de la gendarmerie n'est pas oublié, contrairement à ce qu'affirment M. Laménie et Mme Klès. Ce sont 141 millions qui serviront à la construction de 141 logements et locaux de service associés. Au reste, si l'on avait consenti davantage d'efforts entre 1997 et 2001 pour la construction et l'entretien, nous n'en serions pas là aujourd'hui... (Exclamations sur les bancs socialistes)

M. Paul Blanc.  - Eh oui !

M. Jean-Louis Carrère.  - C'est la faute du Front populaire !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Au total, 13 millions ont été débloqués pour couvrir les dépenses de loyers de locaux construits par les collectivités territoriales. Par ailleurs, je visite suffisamment de postes de gendarmerie chaque semaine pour savoir que tous ne sont pas dans un état déplorable. En effet, nous disposons de casernes de grande qualité grâce à l'effort conjoint de l'État et des collectivités territoriales...

Voix sur les bancs socialistes.  - Surtout des collectivités territoriales !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Je vous en donne acte. Le problème est que les loyers soient payés complètement et en temps utile.

De même, monsieur Couderc, un effort pour les programmes immobiliers de la police s'impose : 154 millions y sont consacrés. Sur les quatre projets relatifs au commissariat de Béziers, l'extension par acquisition d'une agence bancaire contigüe semble le plus intéressant, mais son coût est tout de même estimé à environ 7,5 millions... Je veillerai à ce que la question fasse l'objet d'une étude de faisabilité en 2009, tout comme je serai attentive à ce que l'on accompagne l'ouverture du nouveau centre pénitentiaire fin 2009 par des renforts.

S'agissant des questions de personnel, j'en reviens aux transfèrements, qui mobilisent plus de 3 500 policiers et gendarmes. Avec la Chancellerie, nous souhaitons développer la visioconférence pour limiter les déplacements. En outre, monsieur de Montesquiou, gageons que leur facturation, dont nous étudions la mise en place dès l'an prochain, permettra de les diminuer.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis.  - Très bien !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - De même, les personnels en uniforme formés à la sécurité ne doivent pas occuper de postes administratifs et techniques. Après 500 policiers cette année, il est prévu de remplacer 600 sous-officiers de gendarmerie l'an prochain.

Moderniser l'organisation, c'est également agir sur les structures. Le rapprochement de la police et de la gendarmerie permettra de favoriser les mutualisations. Dans le projet de Loppsi est notamment prévu, outre des mutualisations locales, le rapprochement des formations pour les plongeurs, les équipes cynophiles, le perfectionnement du maintien de l'ordre, de certaines fonctions de soutien telles que la réparation des véhicules ou des armes. Monsieur de Montesquiou, conformément à votre souhait, la fonction immobilière sera progressivement regroupée au sein d'une seule sous-direction du ministère. La mise à disposition de la police des hélicoptères de la gendarmerie ou de la sécurité civile évitera de créer une nouvelle flotte, dont je sais, pour avoir occupé d'autres fonctions, qu'elle est très coûteuse. Les fichiers Stic et Judex seront regroupés dans l'application Ariane et des convergences en police technique et scientifique seront recherchées. J'emploie à dessein les termes de convergences et de rapprochements car, j'y insiste, je proscris toute fusion des deux forces. Nous avons besoin de deux forces de sécurité, l'une civile, l'autre militaire, de leurs savoir-faire...

M. Jean-Louis Carrère.  - Paroles, paroles !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre  - ...et nous tenons à leurs identités différentes.

M. Jean-Louis Carrère.  - C'est comme pour le deuxième porte-avions !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Simplement, des ajustements sont nécessaires pour recentrer les forces sur leur mission première.

Monsieur Madrelle, vous avez courtoisement rappelé que j'ai reçu tous les élus concernés par les fermetures d'écoles de gendarmerie et désigné un expert pour aider aux reconversions. J'ai donc répondu par avance et de manière positive à toutes les questions soulevées dans votre intervention destinée à justifier un vote négatif...

Mais je vous laisse la responsabilité de votre vote...

M. Jean-Louis Carrère.  - Mais vous aviez aussi promis deux porte-avions ! Promesse de Gascon ! (Sourires)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Tout cela sera mené sans porter atteinte à la capacité opérationnelle des unités de gendarmerie. Je ne doute pas que vous soyez tous de bonne foi (sourires) mais les rumeurs de fermeture de centaines de brigades sont totalement sans fondement. Vous connaissez mon attachement à la présence de l'État sur l'ensemble du territoire, en particulier dans les zones les plus fragiles. Le maillage sera maintenu, ce qui n'est pas incompatible avec des ajustements destinés à améliorer l'efficacité, je songe à la délimitation des zones de police et de gendarmerie.

S'agissant du rapprochement entre police et gendarmerie, les redéploiements sont à présent réalisés ; dans l'avenir, seuls des ajustements resteront à opérer, pour consolider les logiques d'agglomération autour de la police et transférer les petites circonscriptions à la gendarmerie. Une vingtaine d'ajustement sont envisagés pour l'an prochain, mais ces projets feront d'abord l'objet d'une concertation avec les élus locaux.

Le recentrage de la gendarmerie sur ses métiers sera sans incidence sur le maintien de l'ordre outre-mer ; il n'est donc pas nécessaire d'envisager la participation des CRS.

La gendarmerie n'est pas organisée en directions fonctionnelles comme la police et il n'existe pas de direction de la gendarmerie mobile. Dés lors, aucun regroupement n'est possible avec la direction centrale des CRS. Néanmoins, l'emploi de ces deux forces est organisé par un bureau commun au sein de la direction générale de la police nationale. Les cantonnements utilisés par la gendarmerie mobile, en Ile-de-France surtout, ne suffisent déjà pas : les partager avec les CRS n'est pas envisageable !

La création de compagnies de sécurisation au plan départemental garantira la présence de professionnels bien entraînés et connaissant parfaitement leur territoire d'intervention. En Seine-Saint-Denis, puis à Marseille et Toulouse, et finalement dans vingt villes, la police pourra compter sur une unité formée à des situations difficiles et maîtrisant son terrain.

La direction centrale du renseignement intérieur a été créée pour renforcer l'efficacité en économisant les moyens. Le préfet de police exerce une responsabilité dans une zone, à l'égard des services d'information générale de l'Ile-de-France. Quant au renseignement sensible, des protocoles précis existent entre la préfecture et la DCRI.

J'en viens à l'adaptation des ressources humaines : le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux ne saurait s'appliquer aux forces de sécurité. C'est pourquoi le taux de non-remplacement sera seulement de 41 % au sein du ministère et de 36 % parmi les forces opérationnelles, soit 1 432 policiers et 771 gendarmes. Ce qui importe, monsieur Gautier, c'est la réalité des chiffres.

M. Charles Gautier.  - Exactement.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Ceux que vous avez cités englobent le mouvement d'effectifs lié au transfert de certaines missions vers d'autres programmes ainsi que l'application de mesures antérieures en année pleine. Je procède aussi au recrutement de personnel administratif, afin de libérer les policiers pour des tâches opérationnelles, ainsi qu'au recrutement d'agents de sécurité ; et je récupère des gradés grâce à l'accord signé avec le syndicat Alliance. Les capacités opérationnelles de la police augmentent !

En contrepartie du non-remplacement de tous les départs, les rémunérations sont améliorées, en fonction du taux de retour des économies réalisées. Je veillerai, monsieur Madrelle, au strict respect de la parité entre policiers et gendarmes.

Le protocole « Corps et carrières » de 2004 sera intégralement mis en oeuvre. Pour les gradés et gardiens, l'encadrement intermédiaire sera renforcé, avec la création de postes supplémentaires de brigadiers, de brigadiers-majors, de responsables locaux d'unités de police. J'ai signé deux protocoles additionnels qui tendent à octroyer 20 % d'augmentation de l'allocation de maîtrise et deux points d'ISSP supplémentaires. En contrepartie, des changements sont apportés au régime horaire, notamment la comptabilisation exacte du temps supplémentaire travaillé : auparavant, l'heure commencée n'était pas sécable...

Des efforts particuliers sont consentis au profit des agents d'Ile-de-France. Un concours à vocation francilienne est prévu l'an prochain : contre un engagement de présence de dix ans, les agents auront droit à des primes plus avantageuses, un avancement accéléré, des aides renforcées pour le logement, l'emploi du conjoint, la crèche.

En 2009, 920 contrats d'adjoints de sécurité ne seront pas reconduits. Mais ce sera une parenthèse car ces emplois, adaptés à des missions d'exécution ne nécessitant pas de formation poussée, sont utiles. Et ils constituent un ascenseur social pour des jeunes sans aucun diplôme qui peuvent par la suite présenter le concours de gardien de la paix sans baccalauréat. Dés 2010, le nombre des adjoints de sécurité recommencera à augmenter. Le statut sera revu, pour allonger la durée des contrats et les ouvrir à des personnes plus âgées.

Ce budget 2009 me donne les moyens nécessaires pour atteindre mes objectifs et mettre en place un grand ministère moderne de la protection des Français. Il inclut par anticipation la première tranche de la future Loppsi, ce qui est logique. La loi de finances ne comporte pas de mesures normatives. Le vote du budget ne saurait conduire à geler la dynamique que nous voulons. Du reste, il n'y a pas là de précédent et je ne vous ai pas entendu protester dans le passé en pareilles circonstances !

M. Jean-Louis Carrère.  - Faut-il nous excuser de protester aujourd'hui ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Mon budget comporte des signes forts à l'égard des policiers et des gendarmes, il traduit la reconnaissance de chacun d'entre nous. Je ne doute pas que vous aurez cela à l'esprit lors de votre vote. (Applaudissements à droite et au centre)

Examen des crédits

Les crédits de la mission sont adoptés.

Article additionnel après l'article 73

M. le président.  - Amendement n°II-84, présenté par M. Faure, au nom de la commission des affaires étrangères.

I. - Après l'article 73, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les frais occasionnés par les transfèrements et les extractions judiciaires effectués par la police nationale ou la gendarmerie nationale, y compris les dépenses de personnels affectés à ces tâches, font l'objet d'un rapport comprenant une évaluation chiffrée transmis aux commissions compétentes des deux assemblées. Ce rapport comprend également l'examen des modalités d'un transfert progressif de cette charge au ministère de la justice.

II.- En conséquence, faire précéder cet article de la mention :

Sécurité

M. Jean Faure, rapporteur pour avis.  - Les extractions et transfèrements mobilisent sur une année 1 000 à 1 100 équivalents temps plein dans la gendarmerie.

Pour la police, ce serait le double !

Nous devons disposer de chiffres précis, et encourager la justice à recourir à des méthodes plus modernes, comme la visioconférence. Selon la règle du prescripteur-payeur, il serait légitime de transférer cette charge à la justice, mais celle-ci n'a pas les moyens de se substituer à la police et à la gendarmerie, ni de rembourser le ministère de l'intérieur... Nous demandons donc un rapport pour chiffrer ces opérations et étudier les modalités de transfert de charges. Dans le cadre de la RGPP, il faut savoir qui fait quoi !

M. le président.  - Sous-amendement n°II-178 à l'amendement n°II-84 de M. Faure, au nom de la commission des affaires étrangères, présenté par M. Rebsamen et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. - Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'amendement n° II-84, remplacer les mots :

effectués

par les mots :

ainsi que les charges consécutives aux gardes statiques assurées

II. - A la fin de la seconde phrase du même alinéa, remplacer les mots :

au ministère de la justice

par les mots :

aux services consommateurs

M. François Rebsamen.  - Cet amendement étend le champ du rapport demandé aux gardes statiques afin de faire la lumière sur la question lancinante des charges indues. Selon les principes de la RGPP, l'action de la police et de la gendarmerie doit être recentrée sur leur « coeur de métier » ; les missions annexes seraient donc supprimées, ou mises à la charge des donneurs d'ordre.

Un premier amendement conjoint de la commission des lois et de la commission des affaires étrangères déplaçant les crédits de la mission « Sécurité » à la mission « Justice » ayant été rejeté par la commission des finances, nous nous limitons à demander un rapport... La Lolf promeut pourtant une culture de l'évaluation et du contrôle ! J'espère que l'interprétation restrictive de la commission des finances ne fera pas jurisprudence.

Nous actons la première année d'exécution de la Loppsi 2, finalisée depuis un an et demi, sans en connaître le contenu : c'est un contresens, et un manque de considération pour la représentation nationale ! Le ministre nous a répondu sur le plan de la technique budgétaire, mais c'est une question de principe : alors que la réforme constitutionnelle est censée renforcer les droits du Parlement, la clarté des débats ne semble pas être une priorité...

Nous sommes tous favorables à un outil moderne d'investigation, mais les gardes statiques relèvent de la même problématique que les transfèrements et extractions. Vous mettez en avant la modernisation de l'action de la police, et le nécessaire recours aux nouvelles technologies, mais pour masquer la compression des dépenses d'investissement ! La vidéosurveillance permettra-t-elle aux policiers d'être plus présents sur la voie publique ? L'offre de sécurité doit venir avant les économies de personnel. Malgré le développement de la vidéosurveillance devant les préfectures, les gardes statiques sont tout aussi nombreuses !

M. le président.  - Amendement n°II-98, identique à l'amendement II-84, présenté par M. Courtois, au nom de la commission des lois.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis.  - Les tâches liées aux transfèrements et extractions détournent les policiers et gendarmes de leurs principales missions. Peu valorisantes et très consommatrices d'ETPT, elles nourrissent l'agacement des personnels à l'encontre des magistrats, au moment où les moyens de la police et de la gendarmerie vont être contraints.

Les établissements pénitentiaires et les tribunaux sont pourtant équipés en moyens de visioconférence, mais il n'en est pas fait usage... Il faudrait également revoir la liste des actes qui doivent être notifiés en présence d'un magistrat. Une meilleure coordination entre magistrats d'un même tribunal permettrait des économies sur les transfèrements et extractions.

Le principe prescripteur-payeur devrait être appliqué conformément à l'esprit de la Lolf, en responsabilisant financièrement des magistrats. Après conclusion d'une convention entre le ministère de la justice et le ministère de l'intérieur, un droit de tirage pourrait être défini au profit du ministère de la justice, lequel le répartirait ensuite entre les juridictions. En cas de dépassement, chaque juridiction rembourserait au ministère de l'intérieur tout ou partie des frais correspondants.

J'avais envisagé initialement un amendement prévoyant que les deux ministères concernés définissent par convention les modalités de ce remboursement. Toutefois, la commission des finances a rejeté un amendement semblable de la commission de la défense, estimant qu'il équivaudrait à un transfert de crédit entre deux missions, ce que la Lolf interdit. Cette interprétation me semble très stricte, mais j'en prends acte.

En conséquence, en concertation avec Jean Faure, je vous propose simplement de demander au Gouvernement un rapport sur ce sujet, ce qui l'obligera à réfléchir enfin à une responsabilisation financière du ministère de la justice.

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial.  - Le sous-amendement n°II-178 est imprécis : à mélanger les gardes statiques et les transfèrements et extractions, on risque la confusion. Avis défavorable.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Nous avons commencé à réduire les gardes statiques pour plusieurs ministère ; pour les nouveaux ministères sensibles, d'autres formules sont mises en oeuvre. Je vous communiquerai tous les éléments chiffrés ; nous en reparlerons lors de l'examen de la Loppsi et de la loi sur la gendarmerie. Retrait ?

M. François Rebsamen.  - Je prends acte de cet engagement. Nous y reviendrons.

Le sous-amendement n°II-178 est retiré.

M. Jean Faure, rapporteur pour avis.  - Je comprends le souci de faire jour sur l'ensemble des charges indues, mais les gardes statiques ne sont pas de même nature que les transfèrements et extractions. Je rappelle en outre qu'elles protègent les deux assemblées !

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Je remercie M. Rebsamen d'avoir retiré son sous-amendement. Le rapporteur spécial est très attentif à la richesse de l'information que communique le ministère. Nous souhaitons disposer d'une évaluation réaliste du nombre d'heures consacrées aux gardes statiques, qui fera l'objet d'une discussion dans le cadre de la loi de règlement.

Je remercie M. Faure et M. Courtois d'avoir manifesté autant de compréhension envers la commission des finances.

A l'origine, cet amendement prévoyait un transfert de crédits entre missions, ce qui n'est pas dans les prérogatives du Parlement. Dès lors, nous risquions de réduire les moyens de la mission « Sécurité » sans augmenter ceux de la justice. C'est pourquoi nous avons demandé le retrait de cet amendement dans sa rédaction initiale. La commission des finances est en revanche totalement solidaire de votre préoccupation, car nous avons évalué le coût des transfèrements à environ 150 millions par an. Les magistrats devraient disposer de ce budget pour le gérer au mieux et en tirer bénéfice s'ils réalisent des économies. Ils pourraient ainsi décider de s'équiper de moyens de visioconférences et réduire certains transfèrements parfois un peu formels. Ils doivent donc gérer ce budget, ce qui permettrait sans doute de faire moins appel à vos services.

J'invite donc les deux ministères à passer rapidement une convention, d'autant que nous savons que les magistrats sont de bons gestionnaires : ils l'ont démontré avec les frais de justice. Ils doivent désormais relever ce défi de la question des transfèrements. Il faut donc passer rapidement à l'acte car, aujourd'hui, les magistrats vous demandent des transfèrements sans que cela leur coûte et vous devez les exécuter sans avoir un pouvoir de régulation : c'est la négation même de la maitrise de la dépense publique. Nous comptons donc sur vous, madame la ministre.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - J'approuve les amendements de MM. Faure et Courtois qui tirent les conséquences d'un rapport. Comme le président Arthuis, j'estime que ceux qui disposent des crédits peuvent faire des économies : c'est une incitation à la vertu. Aujourd'hui, la façon dont ils sont répartis pousse au gaspillage.

Je vous ai entendue, madame la ministre, et vous connaissez l'amitié et la confiance que je vous porte, eu égard à votre action, d'abord à la défense, et, aujourd'hui, à l'intérieur. Je sais que vous ne voulez pas remettre en cause l'indépendance de la police ni celle de la gendarmerie. Pourtant, au-delà de votre personne, je m'inquiète de la logique des systèmes : à un moment ou à un autre, on finira par rapprocher les deux corps, qui ne deviendront plus qu'une seule force de sécurité, ce qui serait dangereux pour la République ! Pour ma part, je suis très attaché au maintien de deux forces de sécurité. Quel que soit le goût de certains hauts responsables à écrire de petits carnets et, parfois, à faire de la politique, il est heureux que les deux soient séparés. Je vous fais confiance, madame la ministre, car je connais vos convictions de professionnelle sur la sécurité et de républicaine sur la protection des grands équilibres.

Je veux attirer l'attention de mes collègues sur le malheureux ralentissement des efforts en faveur de la formation dans la gendarmerie, là où se forge sa culture. Je sais bien que l'on va me rétorquer que mes paroles sont dues à la fermeture de l'école de gendarmerie de Châtellerault. Certes, cette fermeture est une erreur, mais je m'inquiète de cette perte générale de formation. Quand les écoles se rassembleront, les corps feront de même.

M. Jean-Louis Carrère.  - C'est la fronde à l'UMP !

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Cela dépasse les clivages partisans, monsieur Carrère !

Dans cette assemblée, il y a une volonté politique claire pour éviter que les systèmes et les procédures ne l'emportent sur les convictions, et nous y serons vigilants ! (Applaudissements sur divers bancs à droite et au centre)

Mme Nathalie Goulet.  - Nous avons reçu le général Gilles en commission qui nous a dit que le Conseil constitutionnel prenait à sa charge ses gardes statiques. Les autres institutions devraient suivre cet exemple. Mme Dati semblait d'accord hier lorsque nous l'avons interrogé sur ce point. Je voterai donc les deux amendements.

M. Alain Fouché.  - J'ai longtemps été avocat et j'estime que le coût des transfèrements doit effectivement être payé par la Chancellerie. Comme le président Raffarin, je pense que notre pays devrait conserver deux forces de sécurité et deux formations distinctes et je regrette la suppression de l'école de Châtellerault alors que M. le Premier ministre s'était engagé à la maintenir. C'est pourquoi je n'ai, tout à l'heure, pas voté les crédits.

M. Jean-Louis Carrère.  - Nous voterons ces amendements et nous sommes sensibles aux arguments de M. Raffarin, car notre pays doit disposer de deux forces sécurité distinctes. C'est pourquoi nous voterons contre la loi d'annexion de la gendarmerie par le ministère de l'intérieur et j'invite nos collègues de l'UMP à en faire de même si, comme M. Raffarin, ils veulent aller au bout de leur logique.

Les amendements identiques nosII-84 et II-98 sont adoptés.

Ils deviennent un article additionnel.

Organismes extraparlementaires (Nominations)

M. le président.  - La commission des affaires économiques a proposé plusieurs candidatures pour deux organismes extraparlementaires.

La Présidence n'ayant reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du Règlement, ces candidatures sont ratifiées et je proclame : MM. Hérisson, Sido, Teston et Darniche membres de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques ; MM. Poniatowski et Courteau, membres titulaires, et MM. Merceron et Daniel Raoul, membres suppléants du Conseil supérieur de l'énergie.

Loi de finances pour 2009 (Deuxième partie - Suite)

Sécurité civile

M. le président.  - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurité civile ».

Interventions des rapporteurs

M. Claude Haut, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Je tiens tout d'abord à féliciter tous les acteurs de la sécurité civile : la saison des feux n'a touché que 6 440 hectares, soit un quart de la moyenne des dix dernières années. Je relève également l'efficacité de la sécurité civile, comme en témoignent une nouvelle fois ses nombreuses interventions à l'étranger : missions d'évacuation au Tchad et envoi de détachements en Inde et en Chine à la suite de catastrophes naturelles. Je me félicite aussi de la mise en place d'indicateurs nationaux des Sdis en 2007 qui permettront, dès 2009, la mise en place d'une stratégie transversale de la performance au sein des Sdis.

Je regrette une nouvelle fois que le périmètre de la mission reste inchangé, malgré la RGPP. La mission continue à être artificiellement divisée en deux programmes très imbriqués et son périmètre budgétaire reste étroit avec moins de 500 millions de crédits. Le montant des crédits de la mission doit être comparé avec les dépenses des Sdis, qui s'élèvent à 5,3 milliards en 2008. En hausse prévisionnelle de 6,15 %, le budget des Sdis représente ainsi plus de dix fois celui de la mission.

La part relative des départements dans les recettes de fonctionnement des Sdis tend à s'accroître pour représenter en 2008 un peu plus de 2 milliards, soit 53,4 %, ce qui représente près de 5 % des dépenses de fonctionnement des départements. C'est pourquoi je regrette vivement la nouvelle diminution de 12,8 % des crédits du fonds d'aide à l'investissement des Sdis. En trois ans, les crédits du FAI auront été divisés par trois.

Les Sdis sont demandeurs de davantage d'aides à l'investissement, notamment pour la mise en place du réseau Antarès. L'argument selon lequel les Sdis ne consomment pas la totalité des crédits du FAI n'est pas recevable ; il convient plutôt de modifier les règles d'utilisation des crédits du FAI afin qu'ils profitent réellement aux Sdis.

Les crédits de la mission diminuent de 38,4 % en autorisations d'engagement et augmentent de 1,6 % en crédits de paiement, ce qui traduit un retour à la normale : les autorisations d'engagement pour 2008 avaient été augmentées en vue de la passation de nouveaux marchés pluriannuels de maintenance des aéronefs. Les marchés concernant les deux derniers lots ont été passés le 31 octobre dernier, comme me l'a indiqué le directeur de la défense et de la sécurité civile.

Je me félicite de la vente de l'ancien site de l'École nationale des officiers de sapeurs-pompiers à Nainville-les-Roches. J'avais évoqué, à l'occasion d'un contrôle sur pièces et sur place, les difficultés rencontrées dans la cession de ce site au regard des coûts de maintenance particulièrement élevés, et j'en avais préconisé la vente rapide. Sa cession, pour 3,5 millions, est satisfaisante, même si l'on aurait peut-être obtenu davantage en vendant plus tôt. Dans quelle mesure cette cession aidera-t-elle à résoudre les problèmes fonciers rencontrés à Aix-les-Milles ?

La programmation triennale 2009-2011 prévoit une rationalisation des flottes d'hélicoptères de la sécurité civile. La mutualisation avec la gendarmerie et la police nationales pourrait être élargie au Samu.

Sous réserve des réponses aux questions qu'elle a formulées, notamment sur les crédits du FAI, la commission des finances vous propose l'adoption des crédits de la mission « Sécurité civile ». (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Catherine Troendle, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Je rends tout d'abord hommage à tous les agents de la sécurité civile, aux sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, à tous les secouristes, qui, tous, sont fortement sollicités et paient chaque année un lourd tribut dans l'exercice de leurs missions. Je pense tout particulièrement aux six sapeurs-pompiers qui ont perdu la vie au cours de l'année 2008.

Je ne reviendrai pas sur les éléments strictement budgétaires qui ont été très précisément exposés par l'excellent rapporteur spécial.

M. Jean Arthuis, président de la commission  - Très bien !

Mme Catherine Troendle, rapporteur pour avis.  - Je m'arrêterai d'abord sur l'encadrement de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Permettez-moi, au préalable, de rendre en particulier hommage à cette brigade à statut militaire, créée en 1811, dont l'activité est, en matière de secours à personnes, cinq fois plus importante que celle des Sdis de première catégorie. Le cap des 500 000 interventions va être dépassé.

La structure de l'encadrement de la Brigade a peu évolué depuis 1967, quand les trois départements de la petite couronne ont été intégrés à sa zone d'intervention. L'activité opérationnelle de la Brigade explose et les tâches administratives mobilisent des effectifs toujours plus nombreux, et son taux d'encadrement est insuffisant, avec 3,98 % d'officiers et 18,32 % de sous-officiers. Les nouveaux concepts opérationnels ont changé la donne depuis que, suite aux attentats de Madrid et de Londres, le préfet de police a demandé à la Brigade de quadrupler sa capacité dans les contextes d'attentats terroristes afin d'assurer une capacité opérationnelle des secours dans l'hypothèse de quatre attentats simultanés touchant la capitale, avec une capacité supplémentaire de gérer au moins un site touché par un risque NRBC. Si la Brigade est en mesure de répondre à ces contraintes, grâce au recrutement de spécialistes NRBC, la partie commandement ne peut être assurée, faute de moyens financiers.

J'en viens à l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés dans la fonction publique territoriale pour les métiers soumis à des conditions d'aptitudes physiques particulières, ce qui est le cas des sapeurs-pompiers. La loi du 11 février 2005 instaure une différence de traitement entre les entreprises privées et publiques dans l'application de cette disposition. Compte tenu du critère d'aptitude physique particulière, les Sdis ne peuvent atteindre le taux de 6 % et sont donc assujettis au versement d'une contribution au fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. Mais les entreprises privées peuvent, elles, bénéficier d'un coefficient de minoration au titre de certains métiers exercés au sein de leurs établissements. C'est notamment le cas lorsqu'elles comptent des sapeurs-pompiers dans leurs effectifs ! Cette distorsion est choquante et les cotisations compensatoires grèvent lourdement le budget de nombreux Sdis. Fin 2006, dans une réponse à une question écrite de M. Bordier, M. Jacob, alors ministre de la fonction publique, avait souligné l'opportunité de dresser un tel bilan. Deux ans après, où en est-on ? Envisage-t-on de modifier cette loi ?

Pour avoir accompagné le rapporteur spécial lors d'une visite de l'école d'Aix-les-Milles, je ne peux que partager ses inquiétudes quant aux difficultés que rencontre l'école pour attirer des formateurs et pour lancer la construction de ses bâtiments de formation et d'hébergement. Elle mérite tous nos encouragements car elle doit devenir incontournable dans le futur réseau européen des instituts de formation de sécurité civile.

La loi du 13 août 2004 a posé une obligation de formation scolaire à la prévention des risques et aux missions des services de secours. Vous connaissez, madame la ministre, mon attachement au principe de cette formation scolaire. Or, quatre ans après le vote de cette loi, cette obligation n'est toujours pas respectée partout. Il est urgent de rendre effective cette obligation, en particulier dans les établissements scolaires situés dans des bassins à risques.

Ces observations effectuées, je vous indique que la commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

Intervention des orateurs

M. Jean-Claude Peyronnet.  - Nous sommes dans un cas d'école de délestage de l'État au détriment des collectivités locales. Ce n'est pas nouveau, mais cela prend une acuité accrue en raison du contexte général très défavorable aux finances des collectivités territoriales.

Depuis longtemps, je dénonce les risques du double pilotage de la sécurité civile en France : l'État édicte et impose des normes qui ne sont pas toujours pertinentes. Madame le rapporteur pour avis, j'ai été intéressé, lors d'une visite à vos côtés dans un établissement prestigieux de Paris, d'apprendre que les vêtements en tissu ignifugé, dont nous avons doté à grand prix nos sapeurs-pompiers, ne sont guère plus protecteurs, voire quelquefois moins, voire quelquefois plus dangereux que les vêtements en cuir qu'ils portaient auparavant et que ce nouvel équipement a été imposé parce que les États-Unis l'avaient adopté et ce, sous la pression du lobby textile...

Il y a là matière à réflexion pour notre État et pour les institutions européennes. Il y a surtout matière à trouver une instance où les élus soient partie prenante afin que leur avis soit pris en compte, notamment sur le rapport coût/efficacité des mesures proposées, et en particulier des nouvelles normes.

Concernant le budget de cette année, l'augmentation de 1,66 % des crédits alloués à la mission me semble largement en trompe-l'oeil. D'abord, ils sont nettement inférieurs à l'inflation. Ensuite, les exigences de nos concitoyens en termes de secours aux personnes sont exponentielles ; cette évolution, qui n'avait pas du tout été prévue lors de la départementalisation des Sdis, grève lourdement les budgets des collectivités pour une mission dont on peut difficilement dire qu'elle ne soit pas d'intérêt national. Enfin, la part de l'État a tout d'une goutte d'eau comparée aux 4,2 milliards dépensés pour les Sdis. Et la part des collectivités dans ce financement a augmenté de 50 % depuis 2000.

On sait à quoi est due cette situation : à la croissance incontrôlée du secours à personnes qui, désormais, représente 65 % des interventions. Avec 8 % des sorties consacrées au feu, voire moins de 2 % consacrés aux incendies d'immeubles, les « soldats du feu » portent de moins en moins bien leur nom et sont de plus en plus des auxiliaires de santé qui devraient être financés par la sécurité sociale.

Il est, de ce point de vue, satisfaisant de constater que le travail de la commission quadripartite mise en place en début d'année a été très positif pour fixer les responsabilités de chacun et reconnaître les services de la sécurité civile comme maillon indispensable de la chaîne sanitaire. En clair, s'ils n'existaient pas dans nombre de départements, les Samu ne pourraient pas fonctionner.

Dans le même temps, le montant versé par les établissements de santé au titre du défaut de disponibilité des transporteurs sanitaires reste fixé à 105 euros, ce qui est très inférieur au tarif des ambulanciers privés. L'indemnisation des Sdis par les hôpitaux pour les interventions médicales d'urgence à domicile appelle un financement adapté. Il est heureux qu'un référentiel de l'organisation des secours ait été adopté, mais l'oeuvre ne sera achevée que lorsque les collectivités territoriales seront justement indemnisées pour cette tâche.

Passons sur le désengagement de l'État dans les investissements. Depuis deux ans, le FAI est essentiellement orienté vers les investissements liés au réseau de transmission Antarès, tandis que les dotations annuelles en autorisations d'engagement ne cessent de diminuer.

Je terminerai en évoquant une incongruité. L'administration et les entreprises ont l'obligation d'employer au moins 6 % de travailleurs handicapés. Les Sdis sont également assujettis à cette règle, alors que les pompiers doivent être aptes à l'exercice physique ; si l'on voulait faire porter le poids de cette obligation aux seuls services administratifs et techniques, on aboutirait à des pourcentages déraisonnables, de l'ordre de 40 % dans mon département. Or, dans le secteur privé, certaines professions, comme les maçons, les couvreurs, etc., ne sont pas soumises à cette obligation. Pourquoi diable les pompiers professionnels employés par les Sdis ne bénéficient-ils pas d'une semblable dérogation ? Cette anomalie coûteuse doit être corrigée de toute urgence.

Mme Éliane Assassi.  - Je m'associe à l'hommage rendu par mes collègues aux femmes et aux hommes qui assurent des missions de sécurité civile, à l'intérieur comme à l'extérieur du territoire.

La sécurité civile est une mission régalienne de l'État, mais son budget reste modeste comparé à celui de la mission « Sécurité », qui s'élève à 16,6 milliards d'euros, ou à celui des Sdis, avec 4,2 milliards d'euros.

Loin de reconnaître l'effort consenti par les collectivités territoriales qui financent une part des missions de secours beaucoup plus importante que celle de l'État, le Gouvernement leur reproche de trop dépenser. Depuis 2001, date de l'achèvement de la départementalisation, les dépenses des Sdis ont augmenté de 45,8 % alors que le nombre de leurs interventions a progressé de 8,4 %. Le budget primitif des Sdis dépasse 5 milliards d'euros pour l'année 2007, ce qui représente une hausse de 20 % par rapport au compte administratif pour 2006 et une hausse cumulée de près de 40 % par rapport à 2004. N'est-ce pas la conséquence de la loi de 1996 relative à la départementalisation des services d'incendie et de secours, de la loi du 13 août 2004 relative à la modernisation de la sécurité civile et du désengagement de l'État qui se décharge de ses obligations sur les collectivités territoriales sans compensation suffisante ? Ce dernier a cependant le devoir d'assurer ses missions régaliennes de sécurité civile sur tout le territoire de manière équitable.

Pour faire des économies, vous envisagez, madame la ministre, de regrouper des casernes, des Sdis, voire des centres de formation. Mais qui dit regroupements dit fermetures. Si l'on y ajoute la suppression de casernes militaires, de tribunaux et d'hôpitaux de proximité, cela augure mal de la prochaine réforme des territoires...

Près de 65 % des actions des Sdis vont au secours aux victimes et à l'aide aux personnes hors incendie : cela résulte de l'insuffisance de la présence médicale dans certaines régions de France plutôt que de la multiplication d'appels abusifs. C'est la réforme de la permanence des soins qui conduit les gens à appeler systématiquement les services d'urgence, en particulier dans les campagnes où la démographie médicale est en chute libre. Il est à craindre que cette situation ne perdure, malgré la mise en place d'un référentiel commun.

Le FAI, créé par la loi de finances pour 2003 afin de soutenir les Sdis dans leur effort d'investissement en équipement et en matériel, est doté pour 2009 de 24,4 millions d'euros en autorisations d'engagement. Prenant prétexte de la faible consommation des crédits de ce fonds, de la libération tardive des montants perçus, de l'absence de transparence et du saupoudrage des crédits, le Gouvernement diminue, année après année, cette dotation.

Le rapport de Mme Troendle dresse un tableau assez noir de la situation de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris. (Mme Catherine Troendle conteste une appréciation excessive) Quant aux sapeurs-pompiers volontaires, qui représentent près de 80 % des effectifs, leur nombre ne cesse de baisser alors que leurs interventions se multiplient. Il faut encourager le volontariat en améliorant le statut, la formation et la disponibilité des agents.

Les sénateurs du groupe CRC-SPG voteront contre les crédits de cette mission, qui ne répondent pas aux attentes de nos concitoyens, attachés à l'existence d'un service public performant et gratuit.

M. Éric Doligé.  - Étant donné le peu de temps dont je dispose, je serai direct et j'insisterai sur quelques thèmes qui me paraissent importants si l'on veut que notre système de sécurité civile ne dérape pas. L'État supporte 415 millions d'euros de dépenses liées à la sécurité civile ; si l'on y ajoute les crédits de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris, de la Brigade des marins-pompiers de Marseille et des autres ministères, on aboutit à un total de 1,365 milliard d'euros, à comparer aux 3,3 milliards dépensés par les Sdis.

Malgré l'importance de leur contribution, l'État refuse de reconnaître les Sdis comme des partenaires majeurs. Je me fais ici l'écho des récriminations des élus des conseils généraux et des présidents de conseils d'administration des Sdis. Les collectivités financent la majeure partie des actions de sécurité civile et doivent avoir leur mot à dire sur les décisions. Voici quelques exemples de ce qu'il ne faut plus faire : lancer l'idée d'un texte réglementaire revalorisant la fonction de sapeur-pompier volontaire avec un impact financier important sans qu'il y ait eu d'échange prospectif et technique avec les élus ; rendre des arbitrages confidentiels sur les contingents communaux ; négocier des référentiels relatifs au secours aux personnes sans aucune concertation avec les collectivités. Il faut en finir avec la prolifération des textes statutaires et des normes, fournir des études d'impact financier pour les mesures envisagées, cesser de méditer dans le secret des cabinets la création de « généraux civils ». Sans concertation, cette dernière mesure ne passera pas : nous connaissons trop les dérives pyramidales et leur impact financier. Si l'État veut des généraux civils, qu'il les finance !

Les commissions de sécurité, indépendantes des Sdis et placées sous l'entière responsabilité de l'État, doivent être prises en charge financièrement par l'État. Actuellement, le Sdis paye, l'État dispose. Le FAI doit devenir transparent. Aujourd'hui, il fond comme neige au soleil sous prétexte que les collectivités l'emploieraient mal. Mais la règle qui nous impose de consommer ces crédits dans l'année d'attribution est irréaliste puisque les contraintes des marchés publics font que les achats ne peuvent se solder dans l'année.

Il faut en finir avec l'anomalie d'un service bicéphale : les élus assurent le financement et la gestion mais l'État prend la main dès que les pompiers quittent leur caserne. Pour un esprit cartésien, à l'heure de la RGPP, ce système est absurde. Sur des millions de sorties, combien de fois les préfets ou les maires ont-ils pris la tête des opérations ? Peut-être une fois sur cent mille, ou sur un million.

L'État doit choisir son interlocuteur direct : l'employeur ou l'employé. Actuellement, il s'adresse à l'employeur après avoir décidé des réformes avec les employés. C'est inacceptable. Dans la mesure où la loi nous a confié la responsabilité des Sdis, il doit nous fournir des analyses de prospective qui nous permettent d'anticiper les évolutions des métiers. La Direction de la sécurité civile doit jouer auprès des élus des Sdis le rôle qu'elle jouait auprès de l'État avant la départementalisation. Les dossiers liés aux pompiers doivent être traités transversalement au niveau de l'État afin d'éviter les effets collatéraux des dispositions de portée générale.

Si l'État considère qu'il doit garder la main, les élus sont prêts, malgré les efforts financiers consentis au cours des dernières années, à lui confier la responsabilité pleine et entière des Sdis.

M. Jean-Claude Peyronnet.  - Absolument !

M. Éric Doligé.  - N'est-ce pas le cas à Paris ?

Cela étant, je voterai les crédits de la mission. Peut-être seront-ils portés à 5 milliards d'euros l'année prochaine, si l'État décide de reprendre à son compte l'ensemble des dépenses.

M. Albéric de Montgolfier.  - Ce serait une bonne idée !

M. Éric Doligé.  - Étant donné les difficultés budgétaires qu'elles rencontrent, les collectivités aimeraient ne plus être soumises de la part de l'État à une pression financière insupportable. (Applaudissements à droite)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.  - Les menaces sur la sécurité de nos concitoyens sont aujourd'hui globales, multiples et protéiformes.

Les forces de sécurité civile ont pour mission de protéger les Français en tout temps et en tout lieu, contre tous les risques, quotidiens et exceptionnels, naturels ou industriels. Les moderniser pour leur permettre de répondre aux nouvelles formes de menace relève de ma responsabilité de ministre de l'Intérieur, en charge de la protection des Français.

Ce budget, en même temps qu'il répond aux préconisations du Livre blanc, qui place la sécurité civile au coeur de la nouvelle stratégie nationale de sécurité, au même titre que la sécurité intérieure, vise à mieux coordonner les moyens de secours.

Mais je n'ai pas attendu le Livre blanc pour réorganiser les services du ministère de l'intérieur. C'est ainsi que j'ai créé la délégation à la prospective et à la stratégie, qui doit renforcer nos capacités d'anticipation et d'adaptation face à l'évolution des grands enjeux nationaux et internationaux.

La direction de la planification de sécurité nationale aura, quant à elle, pour mission d'élaborer, d'actualiser et de suivre les plans qui relèvent de ma responsabilité directe. Outre la planification de défense civile, la sécurité des systèmes d'information du ministère et l'intelligence économique, cette nouvelle direction animera le réseau des préfets de zone, appelés à intervenir en cas d'accidents majeurs, comme les inondations récentes dans le sud-est ou la tornade qui a frappé le nord du pays cet été.

Un centre interministériel de crise sera mis en place à la fin de l'été 2009, susceptible d'accueillir en permanence toutes les composantes interministérielles concernées et les plus hautes autorités de l'État.

Ce budget nous donne les moyens opérationnels nécessaires. Il permettra l'acquisition de moyens de protection contre les menaces nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC) pour une mise à disposition aux Sdis. Les capacités de décontamination seront triplées et un parc de seize véhicules de détection, de prélèvement et d'identification biologique et chimique sera constitué. Les équipements des services opérationnels de la direction de la sécurité civile en matière de lutte contre la menace NRBC seront renforcés.

Les moyens classiques, comme le transport héliporté, sont eux aussi confortés : trois hélicoptères pour la Martinique et la Réunion et deux pour la Polynésie française permettront d'accompagner le désengagement de nos forces. Pour la lutte contre les feux de forêts, les flottes de camions-citernes seront progressivement renouvelées et dimensionnées en fonction du terrain d'emploi, je pense notamment à la Corse.

Ce budget nous donne des moyens immobiliers. Je poursuivrai les efforts engagés de réhabilitation et de sécurisation des infrastructures immobilières de la direction de la sécurité civile. Cinq opérations de mise aux normes et de sécurisation des sites de stockage de munitions récupérées avant destruction sont prévues, tandis que le bâtiment d'hébergement de l'unité d'instruction et d'intervention de la sécurité civile de Nogent-le-Rotrou sera, quant à lui, restructuré.

La loi de modernisation de la sécurité civile de 2004 charge l'État de garantir la cohérence de la sécurité civile au plan national, d'en définir la doctrine et de coordonner ses moyens. Pour mieux coordonner les moyens de secours relevant de la politique interministérielle de sécurité civile, de nouvelles interventions structurantes sont prévues. Ainsi est engagée la modernisation de l'alerte aux populations, tandis qu'un centre régional d'alerte aux tsunamis dans l'Atlantique nord et la Méditerranée occidentale est créé, qui lui sera connecté.

La migration de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris vers l'infrastructure nationale partagée de transmission Antarès renforcera l'interopérabilité de cette unité avec l'ensemble des Sdis de France, dont 25 % lui sont déjà rattachés. Je partage l'attention que vous portez, madame Troendle, à cette brigade très sollicitée, en faveur de laquelle des efforts de rattrapage ont été consentis dans le cadre du plan de modernisation, puisque 750 militaires, dont 20 officiers et 144 sous-officiers, ont été recrutés.

Le volontariat est au coeur de notre dispositif de sécurité civile : 8000 conventions ont été signées avec les employeurs et 2 millions de crédits d'impôt ont été affectés à l'application de la loi Mécénat. J'ai, en outre, décidé de créer une commission « Ambition volontariat », chargée de mener une réflexion prospective : n'oublions pas que les volontaires assurent trois interventions sur cinq.

Pour assurer une meilleure coordination, des outils de pilotage ont été mis en oeuvre par la loi de finances pour 2007. Ils portent aujourd'hui leurs fruits. Ainsi, les élus locaux ont pu ramener à 2 % l'an dernier la progression des budgets des Sdis.

L'État, quant à lui, assume ses responsabilités. Financièrement, par les crédits du Fonds d'aide à l'investissement des Sdis, qui s'ajoutent à ceux consacrés à la réalisation d'Antarès, la prestation fidélisation reconnaissance, le régime d'indemnisation des sapeurs-pompiers, la participation au financement de l'École nationale des officiers de sapeurs-pompiers. Au-delà, par la prise en charge des renforts interdépartementaux et les crédits des autres programmes ministériels, qui portent son engagement à plus de 972 millions. Avec les brigades de Paris et de Marseille, l'effort total représente 1,35 milliard.

En outre, avec la pérennisation des contingents communaux, c'est le lien des Sdis et des collectivités territoriales, en particulier les communes, qui se trouve réaffirmé. Je comprends les préoccupations qui se sont exprimées quant à l'évolution des financements des Sdis. Mais je rappelle que le devoir de compensation de l'État ne va pas au-delà du montant des crédits qu'il consacrait à la mission au moment de ce transfert : telle est la règle constitutionnelle. Si la volonté de perfectionnement de certains départements, que je salue, a pu entraîner une augmentation des dépenses, il n'en reste pas moins que la compensation a bien eu lieu à l'euro près. L'État ne souhaite pas voir son financement évoluer au-delà de l'inflation pour accompagner la rationalisation engagée.

Je souhaite rassurer M. Doligé, que je félicite pour sa réélection à la présidence de la Conférence nationale des services d'incendie et de secours : l'État entend donner un nouveau souffle au dialogue qui s'est engagé, depuis 2004, avec les élus des départements. Pour ce faire, je souhaite que tout projet normatif soit étudié le plus en amont possible de son application.

Mme Troendle a évoqué la difficulté pour les Sdis de respecter l'obligation d'employer au moins 6 % de travailleurs handicapés. J'ai demandé à mon collègue de la fonction publique d'examiner la possibilité d'étendre l'exonération qui existe dans le privé ; une exonération plus globale est à l'étude pour les trois fonctions publiques.

L'installation de l'école nationale sera achevée fin 2009, comme prévu ; le cadre budgétaire sera respecté et nous acquérons l'emprise foncière pour la seconde phase des travaux prévue dans le contrat d'établissement.

Vous estimez que nous pourrions faire davantage pour mieux former la population à la sécurité civile : sachez que mes services sont pleinement mobilisés. Ils participent en particulier à de très nombreuses rencontres avec les populations, dans un cadre national aussi bien que local : je vous renvoie au succès de la journée nationale de la sécurité intérieure ou encore aux 8 500 élèves rencontrés par le Sdis du Haut-Rhin. De nouveaux produits pédagogiques seront bientôt disponibles, nous les diffuserons.

Ce budget renforce nos capacités d'action pour garantir des secours de qualité, au service des Français, en particulier des plus vulnérables ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Dans un contexte de crise financière, économique et bientôt sociale, les budgets sont nécessairement serrés, mais le Gouvernement ne néglige aucun moyen pour les sapeurs-pompiers : c'est satisfaisant. Cependant, pour parler régulièrement à des responsables de Sdis, je m'inquiète des textes réglementaires en préparation, qui paraissent tous devoir alourdir les charges des Sdis. Madame la ministre, j'en appelle à une pause, nous ne pouvons continuer comme cela : j'espère que votre engagement de retenue sera durable !

Le recrutement de personnes handicapées dans les Sdis n'est pas chose aisée. Cependant, les services continuent de rémunérer des sapeurs-pompiers d'un certain âge qui n'ont plus la condition physique pour participer à toutes les missions du service. Pourquoi ne pas en tenir compte ? Hier, M. Mercier a attiré l'attention sur ce problème, soulignant que son conseil général devait payer 1 million pour défaut d'emploi de personnes handicapées dans les Sdis : cela fait beaucoup, surtout quand cette somme s'ajoute au salaire des sapeurs-pompiers qui ne participent plus à toutes les missions du service !

Enfin, il faut veiller aux coûts de fonctionnement de l'école nationale de formation des officiers sapeurs-pompiers, car ils ne manqueront pas d'incomber aux Sdis eux-mêmes. Madame la ministre, je souhaite que la gestion de cette école soit particulièrement saine !

Les crédits de la mission sont adoptés.

La séance est suspendue à 13 h 10.

présidence de M. Roger Romani,vice-président

La séance reprend à 15 h 15.

Solidarité, insertion et égalité des chances

M. le président.  - Le Sénat va maintenant examiner les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Interventions des rapporteurs

M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances.  - La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » rassemble près de 11,2 milliards répartis en cinq programmes de poids très différents. En effet, le plus petit programme, consacré à l'égalité entre les hommes et les femmes, mobilise 29,2 millions alors que le programme « Handicap et dépendance » en rassemble plus de 8,6 milliards.

L'architecture de cette mission a évolué depuis l'année dernière : le programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » est transféré vers la mission « Ville et logement » tandis que le programme « Protection maladie » est désormais rattaché à la mission « Santé ». De la sorte, cette mission perd largement son caractère interministériel et est placée sous la responsabilité du ministre du travail, même si le programme consacré au revenu de solidarité active (RSA) relève du Premier ministre et du Haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

D'autre part, le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » constitue le programme support de plusieurs missions, en particulier de la mission « Santé ». C'est un programme à part, qui rassemble la quasi-totalité des crédits de personnel et mobilise plus d'un milliard d'euros, mais les crédits concourant à des actions propres se limitent à un peu moins de 119 millions, tout le reste étant utilisé au soutien d'autres programmes.

La dynamique des dépenses est aussi très différente suivant les programmes. En particulier, on observe un rééquilibrage entre le programme « Actions en faveur des familles vulnérables » et le programme « Revenu de solidarité active et expérimentations sociales », qui s'explique par le remplacement de l'allocation de parent isolé par le RSA.

Des priorités budgétaires apparaissent également, comme l'allocation aux adultes handicapés, qui fera l'objet d'une revalorisation de 25 % en cinq ans, ainsi que l'a annoncé le Président de la République. En contrepartie, on note une stagnation ou une diminution de crédits jugés moins essentiels.

Les crédits budgétaires ne donnent pas une vision exhaustive de cette mission parce que les dépenses fiscales, qui contribuent à titre principal aux actions menées dans ces programmes, sont de même ampleur et atteindraient 11,8 milliards en 2009. (Applaudissements à droite)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Le programme « Lutte contre la pauvreté, revenu de solidarité active et expérimentations sociales », qui mobilise 582,4 millions, sert désormais essentiellement à financer la contribution de l'État au financement du « RSA chapeau ». Cette contribution passe par une dotation au Fonds national des solidarités actives, fixée à 555 millions en 2009. Elle est supérieure aux besoins prévus mais s'intègre dans une perspective d'équilibre triannuelle de ce fonds.

A contrario, les crédits en faveur du Fonds d'innovation et d'expérimentation sociale sont réduits de 5 millions, ce qui apparaît d'autant plus justifié que le projet annuel de performances reste lacunaire sur l'intérêt des actions menées dans ce cadre.

On observe une diminution des crédits du programme « Actions en faveur des familles vulnérables », qui supporte essentiellement le financement de l'allocation de parent isolé (API) qui sera remplacée à compter du 1er juin 2009 par le RSA. Je souhaite, madame la ministre, que vous justifiiez davantage les hypothèses d'évolution du nombre de bénéficiaires retenues pour 2009.

Des besoins de financement complémentaires sont apparus en 2007 et 2008, les crédits inscrits en loi de finances initiale s'étant révélés insuffisants. Le projet de loi de finances rectificative prévoit l'ouverture de 36,5 millions au titre de l'API, ce qui permettra de couvrir les dettes 2007 mais ne devrait pas suffire à couvrir l'ensemble des besoins. Je souhaite que vous nous précisiez ce point.

Par ailleurs, ce budget rationalise certaines dépenses, comme celles de « Soutien à la parentalité ». Enfin, l'entrée en vigueur de la loi portant réforme de la protection juridique des majeurs allégera les dépenses supportées par l'État au titre des tutelles et curatelles de près de 55 millions. Le collectif prévoit 5,5 millions à ce titre, ce qui devrait permettre d'apurer les dettes de l'État.

Le programme « Handicap et dépendance » est le plus lourd de la mission puisque l'allocation aux adultes handicapés (AAH) représente à elle seule 5,8 milliards. Un effort significatif est consenti, qui découle du plan annoncé de revalorisation de l'AAH : 114,6 millions supplémentaires financeront les deux revalorisations prévues en 2009. Si les crédits prévus pour 2009 paraissent correctement évalués, je souhaite, madame la ministre, que vous précisiez les mesures concrètes permettant de réaliser certaines économies intégrées dans les prévisions de dépenses. C'est d'autant plus important qu'on a régulièrement constaté des dérapages ces dernières années : en 2008, par exemple, les besoins complémentaires s'élevaient à 148,5 millions. Le projet de loi de finances rectificative pour 2008 prévoit 236 millions supplémentaires au titre de l'AAH, qui devraient permettre d'assainir la situation.

Le programme « Égalité entre les hommes et les femmes » est de loin le plus faible de la mission, avec 29,2 millions. Notre commission des finances s'est souvent interrogée sur l'efficacité de certaines dépenses, compte tenu de la faiblesse des sommes prévues par rapport aux enjeux, mais également par rapport aux moyens engagés par d'autres acteurs, comme la Caisse nationale d'allocations familiales. Les crédits d'intervention diminueront en 2009, sur l'ensemble des actions, même si les principales associations nationales verront leurs subventions maintenues.

Quant au programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales », il sera marqué par une diminution des emplois qui va au-delà du simple remplacement d'un départ à la retraite sur deux. Cela traduit des efforts de gestion qu'il convient de saluer.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose d'adopter les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » pour 2009. (Applaudissements à droite)

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.  - Le périmètre de la mission a été sensiblement modifié, deux de ses programmes ayant été transférés vers d'autres missions. A périmètre constant, les crédits augmentent de 6 %, pour atteindre 11,2 milliards d'euros, auxquels s'ajoutent 11,8 milliards d'exonérations et de déductions fiscales accordées aux familles modestes, aux personnes âgées et handicapées. Cette progression permettra la généralisation du RSA, la réforme des tutelles, la revalorisation de l'AAH et la mise en oeuvre du pacte national pour l'emploi des personnes handicapées.

Le principal objectif du programme « Lutte contre la pauvreté » est bien sûr la mise en oeuvre du RSA, qui sera généralisé au second semestre de 2009. En ajoutant le produit de la nouvelle taxe de 1,1 % sur les revenus du capital, celui du plafonnement des niches fiscales et la dotation de l'État au Fonds national des solidarités actives, c'est plus de 2 milliards qui seront injectés dans l'économie dès le 1er juin, contribuant ainsi à la politique de relance souhaitée par le Président de la République.

Les expérimentations du RSA seront poursuivies et un fonds d'expérimentations en faveur de l'insertion professionnelle des jeunes en difficulté sera créé, abondé en 2008 de 10 millions d'euros, puis de 4 en 2009 et 2010. La commission, qui y est favorable, aimerait connaître plus précisément les actions que va financer ce fonds.

Les crédits consacrés aux familles vulnérables sont en forte baisse, ce qui est logique puisque l'API va disparaître au profit du RSA ; la mise en oeuvre de la loi du 5 mars 2007 réformant les tutelles permettra en outre de contenir l'augmentation du nombre de mesures de protection. La commission s'interroge, en revanche, sur les raisons de la réduction des crédits consacrés à l'accompagnement des familles. Les actions menées dans ce domaine doivent être mieux évaluées et faire l'objet de recommandations pour 2010.

Le bilan de la politique en faveur du handicap, qui me tient particulièrement à coeur, est contrasté. Le budget permet de tenir les engagements pris par le Président de la République lors de la Conférence nationale du handicap du 10 juin dernier : revalorisation de l'AAH de 25 %, création de 50 000 places en établissement d'ici à 2012 et diverses mesures incitatives à l'activité des personnes handicapées. La commission soutient la double démarche tendant à favoriser l'emploi des personnes handicapées en mesure de travailler et à garantir la dignité de celles qui sont durablement éloignées de l'emploi. Je regrette néanmoins que la nouvelle participation du Fonds « Fonction publique » au financement des CAP emplois se traduise par une diminution de la contribution de l'Agefiph. Quid en outre de la prestation de compensation du handicap (PCH) ? La modestie de son succès me conduit à suggérer que la contribution versée à chaque département par la CNSA soit modulée en fonction de la dépense constatée et que la prestation intègre une part forfaitaire pour mieux prendre en compte les aides ménagères.

Autre sujet d'inquiétude, les dysfonctionnements des maisons départementales des personnes handicapées. Leurs effectifs et la formation de leurs personnels sont insuffisants pour traiter les demandes dans des délais raisonnables. Il est nécessaire de simplifier les procédures et d'envisager une évolution de leur statut, ainsi que de celui des personnels mis à disposition par l'État, qui bénéficient encore d'un droit d'option préjudiciable à la qualité du service. La commission déplore enfin que, pour la deuxième année consécutive, aucun crédit ne soit versé au Fonds interministériel pour l'accessibilité des personnes handicapées, alors que l'échéance de 2015 approche.

La présentation budgétaire des mesures en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes est trop dispersée pour être facilement compréhensible. Il serait plus lisible de regrouper certains crédits dans l'action « Égalité professionnelle » ; je souligne au passage les actions remarquables menées en faveur de la lutte contre les violences faites aux femmes, que ce budget permet heureusement de poursuivre en 2009.

Le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » regroupe les moyens humains et matériels des administrations de la santé et du secteur médico-social, dont l'organisation devrait être profondément bouleversée par la révision générale des politiques publiques et la prochaine mise en place des agences régionales de santé (ARS) -le médico-social n'apparaît pas dans leur dénomination, ce qui est dommage. De nombreuses associations s'inquiètent à juste titre des conséquences de cette restructuration pour le secteur médico-social. Les conditions d'application du principe de fongibilité asymétrique devront garantir une préservation des places en établissements sociaux et médico-sociaux ; le passage à la logique d'appels à projets ne doit pas se traduire par des contraintes trop lourdes pour les associations qui gèrent les établissements et font la richesse du secteur ; l'équilibre des instances chargées de piloter les ARS devra inclure des représentants du secteur médico-social ; il faudra enfin être vigilant sur les conséquences de l'application aux établissements et services médico-sociaux du principe de convergence tarifaire.

Sous réserve de ces observations, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission et aux articles 74 à 76 bis qui lui sont rattachés. (Applaudissements à droite)

Interventions des orateurs

Mme Christiane Demontès.  - La crise sociale et économique s'aggrave, chacun le sait, la croissance ayant commencé à baisser dès la fin de 2007. Malgré cette situation, Gouvernement et majorité ont choisi d'accentuer la dérèglementation, la précarisation des services publics et la remise en cause des acquis sociaux après s'être privés de marges de manoeuvre avec le bouclier fiscal -nous aurions plutôt besoin d'un bouclier social. Le bilan est sans appel, l'activité est étouffée et le déficit augmente si dangereusement que nous n'avons rien de bon à attendre des années qui viennent.

M. Alain Vasselle.  - Vous ne parlez pas de l'effet désastreux des 35 heures ! (Protestations à gauche)

Mme Christiane Demontès.  - Heureusement que les RTT sont là ! Dans mon territoire, toutes les entreprises vont fermer entre Noël et le jour de l'An : elles demandent à leurs salariés de récupérer leurs jours de RTT ! Merci les 35 heures ! (Applaudissements à gauche)

M. Alain Vasselle.  - Ne vous étonnez pas que nos entreprises perdent en compétitivité !

Mme Christiane Demontès.  - L'effondrement de l'activité pèse sur le marché de l'emploi, 45 000 personnes ont perdu leur travail en octobre, pas un jour sans qu'on n'annonce licenciements massifs dans les grandes entreprises et fermetures dans les plus petites. La barre des 2 millions de chômeurs a été franchie, celle des 2,5 millions si l'on prend en compte l'ancienne définition du chômage. Le taux de 7,5 % sera dépassé fin 2008. Je regrette que M. Woerth ne soit pas là pour m'entendre, lui qui avait relevé en commission que le nombre de demandeurs d'emploi était largement inférieur à ce qu'il était il y a trois ans ; la situation se dégrade pourtant à grande vitesse. La droite, qui soutenait que la réglementation et la puissance publique freinaient la croissance, la liberté et la création d'emplois, découvre aujourd'hui que la toute puissance des marchés mène à la catastrophe !

Dans cette situation, l'insertion est plus que jamais un impératif. Or l'architecture des missions a été revue, l'insertion relevant désormais de la mission « Travail et emploi ». Nous avons donc deux catégories de Français, ceux qui sont en situation de reprendre rapidement un emploi, qui relèvent de cette dernière mission, et les autres. On est loin d'une politique d'insertion transversale, le budget occultant toutes les dimensions autres que l'emploi alors que la lutte contre l'exclusion passe aussi, par exemple, par le logement. Le programme « Accès et retour à l'emploi » perd 300 millions... Et que dire de la formation, facteur pourtant déterminant de l'insertion ? Où en est le projet de loi relatif à la formation professionnelle, promis par Mme Lagarde pour cet automne ? Nous ne voyons rien venir dans un avenir proche.

Près de 98 % des crédits du programme 304, soit 555 millions en crédits de paiement, sont consacrés au RSA -parler d'insertion dans ces circonstances est au mieux restrictif, au pire trompeur. D'autant que ces crédits regroupent ceux d'autres dispositifs tels que l'API. Ceux de la prime pour l'emploi se contractent. Si on note que 150 millions d'économie sont réalisés au titre de l'exonération de la taxe d'habitation et de la redevance télévisuelle, l'augmentation de crédit, qualifiée d'exceptionnelle par M. Woerth, devient résiduelle, voire virtuelle.

La presse s'est fait l'écho d'une mise en oeuvre du RSA sous forme d'à-valoir dès le 1er janvier. Si tel est le cas, qui sera concerné ? Les Rmistes, les allocataires de l'API et les bénéficiaires des allocations logement ?

M. Guy Fischer.  - Les Rmistes !

Mme Christiane Demontès.  - Selon quels critères ? Quid du financement, estimé à 300 millions, qui proviendrait d'un surplus de recettes de la taxe RSA ?

Qu'en est-il de cette prime de 100 euros qui serait allouée pendant un semestre à 2 ou 3 millions de nos concitoyens ? Le haut-commissaire a annoncé la fin des contrats aidés, aussitôt contredit par le Président de la République qui étend les contrats de transition professionnelle (CTP) à 25 bassins d'emploi. Le budget n'en porte aucune traduction. Qui paiera ? Les crédits de l'emploi chutent brutalement !

Le Gouvernement et le chef de l'État, pris de court par la violence de la crise, procèdent dans la précipitation et l'improvisation. Les crédits prévus pour le RSA et pour l'insertion seront largement insuffisants. La situation se dégrade sans cesse. Et 7,8 millions de personnes, dont 2 millions d'enfants, vivent en dessous du seuil de pauvreté.

Nous ne sommes pas dupes : les hausses de crédits proviennent de redéploiements budgétaires, tandis que vous procédez à des coupes claires, dans l'API ou les subventions aux associations d'insertion. Nous en verrons rapidement les effets, hélas. Vous vantez votre « pragmatisme » pour justifier le revirement de votre politique. Les Français savent très bien que votre socle idéologique reste intact et que, pour diminuer le coût du travail, vous précarisez la condition des salariés et diminuez le pouvoir d'achat. Telle est la variable d'ajustement de votre politique libérale désastreuse. Dès lors, parler d'insertion est une supercherie.

M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.  - Vous allez fort...

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille.  - Très fort !

Mme Christiane Demontès.  - Nous la dénonçons et nous voterons contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Muguette Dini.  - Le programme consacré aux actions publiques en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes, le plus modeste de cette mission, est en baisse. Mais le rapport de la Cour des comptes nous apporte de plus amples renseignements et l'audition de Mme la ministre nous a éclairés sur le cadre interministériel et transversal de cette politique comme sur le redéploiement des crédits vers les associations « Tête de réseau » et les grandes structures nationales.

La politique relative aux droits des femmes et à l'égalité ne se résume pas à ce seul programme. Plusieurs ministères -santé, sport, éducation nationale, enseignement supérieur, ville- y contribuent, ainsi que les collectivités locales, les organismes de sécurité sociale, les partenaires sociaux, les associations et les entreprises. Deux actions illustrent ce cadre interministériel et transversal.

La première est la promotion de la mixité dans le choix des filières scolaires. Une convention pour la promotion de l'égalité des chances entre les filles et les garçons a été signée pour la période 2006-2011, associant les efforts de huit ministères. La nécessité d'une approche globale est affirmée. C'est à l'école et très tôt que s'apprend l'égalité entre les sexes. Ainsi pourrons-nous voir les stéréotypes s'estomper. Basée sur le respect de l'autre sexe, l'éducation à l'égalité doit privilégier la prévention des comportements et violences sexistes. La convention affiche l'objectif ambitieux de sortir de tout déterminisme sexué de l'orientation. Filles et garçons continuent à se conformer dans leur orientation scolaire et professionnelle à des schémas archaïques. Ainsi 80 % de filles sont en filière littéraire ; à niveau égal en mathématiques en fin de collège, elles sont moins nombreuses que les garçons à aller en terminale S. Elles se détournent donc de branches professionnelles porteuses d'emploi et la société se prive de ressources précieuses !

L'un des indicateurs de performance retenu fixe à l'enseignement scolaire un objectif ambitieux : la proportion de jeunes filles en terminale scientifique ou technologique devra augmenter de 20 % avant 2010, pour atteindre alors 44,6 %. La progression a été de 2,6 % entre 1997 et 2003 : il reste bien du chemin à parcourir. Cette convention sera-t-elle bien mise en oeuvre et suivie d'effets ?

L'information sur la contraception est un autre exemple d'action transversale. Avec 14,6 avortements pour 1 000 femmes, la France dépasse largement la moyenne européenne de 11,2. Le nombre des IVG chez les 15-17 ans a augmenté de 32 % en quatorze ans. Mais il est encore plus élevé chez les 20-24 ans. Or, nous savons qu'une communication sur la diversité de l'offre contraceptive et qu'une meilleure éducation sexuelle dans le cadre scolaire auraient une réelle efficacité. Mme la ministre a annoncé un document de politique transversale, qui retracera l'ensemble des mesures. Des objectifs communs seront définis, associés à des indicateurs précis. Je salue cette initiative car les parlementaires auront enfin la possibilité d'évaluer correctement l'effort financier global et les résultats.

Madame la ministre, vous avez décidé de concentrer les crédits sur les associations « Tête de réseau » et les grandes structures nationales. Décision très attendue ! La Cour des comptes, comme l'Igas avant elle, dénonce en effet la dispersion des actions et le saupoudrage des crédits. Elle recommande une hiérarchisation des actions et une planification de leur mise en oeuvre. Elle recommande aussi de définir une politique claire de financement des associations. La remise en cause des subventions « historiques » reconduites sans mesure de performance et la généralisation des conventions d'objectifs et de moyens me paraissent essentielles.

Votre budget apporte réponse à toutes ces observations. Le nombre de subventions de faible montant diminue fortement. Et la rationalisation des crédits d'intervention, qui privilégie la relation avec les associations « Tête de réseau » et les grandes structures nationales, s'accompagne de priorités claires : égalité professionnelle, lutte contre les violences faites aux femmes. Les conventions pluriannuelles d'objectifs se généralisent. Les associations y gagnent des garanties financières, sous réserve d'évaluation de leur action.

Le groupe de l'Union centriste se réjouit, madame la ministre, de votre détermination. Nous voterons vos crédits. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Isabelle Pasquet.  - (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG) Le tribunal de police de Paris vient de condamner l'association Droit au logement à 12 000 euros d'amende pour dépôt sur la voie publique d'objets non autorisés : des tentes, des sacs de couchage, des couvertures pour protéger du froid les familles réunies pour obtenir un logement !

M. Alain Vasselle.  - Vous n'êtes pas dans le budget du logement !

Mme Isabelle Pasquet.  - La formidable mobilisation a contraint la ministre du logement à signer un accord de relogement des intéressés. Le Gouvernement a ainsi reconnu implicitement la légitimité de cette action ! L'amende infligée au DAL, la sanction qui affecte les Enfants de Don Quichotte s'apparentent à une criminalisation du mouvement associatif. Comme l'a demandé le haut-commissaire, passez l'éponge, admettez qu'une telle amende est anormale !

Ce propos liminaire n'est pas sans lien avec votre budget.

M. Alain Vasselle.  - Ah bon ?

Mme Annie David.  - Exactement !

Mme Isabelle Pasquet.  - La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » se limite à trois actions : généralisation du RSA, crédits du handicap et de la dépendance, crédits alloués à l'égalité entre hommes et femmes. Tous les crédits sont en chute, sauf ceux du RSA. La baisse atteint 32 % sur certaines actions du programme « Actions en faveur des familles vulnérables ». L'accompagnement des personnes dans leur rôle de parents, l'aide à l'apprentissage des enfants pour les familles victimes d'accidents de la vie, l'information sur l'IVG dans les établissements scolaires sont affectés.

La lutte contre l'enfance maltraitée connaît, hélas, le même sort. Cette compétence est partagée avec le ministère de la justice et les départements, lesquels devront une fois encore combler le désengagement de l'État...

Comment ne pas faire le lien entre la baisse des crédits et l'annonce récente, par Mme Dati, d'autoriser les sanctions à l'égard des mineurs de plus de 12 ans ?

M. Guy Fischer.  - Scandaleux !

Mme Isabelle Pasquet.  - On sait pourtant que la violence appelle la violence...

Mme Annie David.  - Eh oui !

Mme Isabelle Pasquet.  - Le programme « Égalité entre les hommes et les femmes » voit ses crédits diminuer bien que son objectif, vous en conviendrez, n'ait pas été atteint, notamment sur le plan professionnel, en raison de la persistance de préjugés sexistes et de l'organisation de la garde d'enfants qui rend parfois difficilement conciliable vie professionnelle et vie privée. Mieux aurait donc valu renforcer ces moyens, en privilégiant les associations.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis.  - Pour vous, c'est toujours plus !

Mme Isabelle Pasquet.  - Par ailleurs, la disparition programmée du service des droits des femmes et de l'égalité, venant d'un gouvernement qui n'a même pas jugé bon de réserver un secrétaire d'État aux droits des femmes, est un mauvais signal : si l'État ne montre pas l'exemple, pourra-t-il vraiment exiger des entreprises publiques et privées ainsi que des médias qu'ils accordent davantage de place aux femmes ?

S'agissant du programme « Handicap et dépendance », l'augmentation de ses crédits couvre à peine l'inflation constatée en 2008. Elle ne suffira pas à couvrir les besoins des maisons départementales du handicap. De surcroît, lors de l'examen de la mission « Travail et emploi », vous avez ponctionné 50 millions sur l'Agefiph...

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis.  - Encore !

Mme Annie David.  - Il faut que cela se sache !

Mme Isabelle Pasquet.  - La contribution de l'État à la rémunération des stagiaires handicapés en sera diminuée.

En fait, les moyens de la mission sont d'abord consacrés à la généralisation du RSA, autre façon, pour le Gouvernement, d'indiquer clairement que les aides de l'État seront désormais conditionnées à la reprise d'une activité professionnelle.

M. Martin Hirsch, haut-commissaire.  - Ce n'est pas tout à fait ça...

Mme Isabelle Pasquet.  - Cette politique est-elle viable en ces temps de crise ? Le nombre de chômeurs devrait bientôt atteindre 2 millions et le chômage partiel se multiplie... Pourquoi ne pas avoir plutôt supprimé le bouclier fiscal...

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis.  - Encore !

Mme Isabelle Pasquet.  - ...pour le remplacer par le bouclier social ? Mais, depuis l'élection du Président de la République, la solidarité s'exerce à l'égard de tous ceux qui n'en ont pas besoin, les plus riches !

Mme Annie David.  - Eh oui !

M. Guy Fischer.  - On n'a jamais vu ça ! (M. Éric Doligé proteste)

Mme Isabelle Pasquet.  - Sans revenir sur les raisons de notre opposition au RSA, nous regrettons qu'il soit financé par une taxation sur l'épargne, et non sur la spéculation, quand la justice sociale commandait de faire contribuer les plus riches qui peuvent, de plus, s'abriter derrière le bouclier fiscal. Au total, l'effort est porté sur le seul RSA, encore que sa mise en place soit l'occasion de réaliser des économies sur les droits connexes telles les exonérations de la taxe d'habitation et de la redevance audiovisuelle. Les départements en supporteront le coût, l'État prenant en charge les rares cas de RSA complémentaires. Au nom d'une autre conception de la solidarité, le groupe CRC-SPG ne votera pas les crédits de cette mission. (Applaudissements à gauche)

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis.  - Quelle surprise !

M. Guy Fischer.  - Et maintenant, avec M. Vasselle, place au grand capital ! (Rires)

M. Alain Vasselle.  - (Applaudissements à droite) Compte tenu de la qualité des rapports, on pourrait s'étonner de ce qu'un membre de l'UMP veuille intervenir sur les crédits de cette mission. C'est que l'occasion m'était donnée d'obtenir des réponses des ministres présents sur des points qui n'ont pu être éclaircis en commission.

Commençons par M. Hirsch qui pèse le plus lourd (sourires), soit 10 milliards pour financer le RSA. Sur ces 10 milliards, 6,7 milliards proviendront de la Tipp, le reste étant assumé par l'État via le Fonds national de solidarité active, FNSA, et l'instauration d'une taxe de 1,1 % sur le revenu du capital, dont vous savez tout le bien que je pense... Le RSA étant promis au succès, ces recettes suffiront-elles à couvrir les besoins ?

M. Guy Fischer.  - Eh non !

M. Alain Vasselle.  - La question doit être posée quand M. Borloo, pour répondre à la crise actuelle, cherche à accroître les économies d'énergie, donc à réduire l'emploi du pétrole, ce qui réduira d'autant le produit de la Tipp. Si tel est le cas, la solution de facilité consisterait à porter la taxe sur les revenus du capital à 1,5 %, voire 2 %. Monsieur Hirsch, pouvez-vous nous rassurer sur ce point ?

Madame Létard, s'agissant de l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH, je me pose nombre de questions sur le reste à vivre. Celui-ci doit normalement correspondre à 20 % de l'allocation. Comment est-il calculé ? Sur une base mensuelle ou annuelle ? Qui est responsable de ce calcul et qui déclenche l'attribution de l'allocation ? Par ailleurs, prend-on en compte l'allocation au logement, l'APL, ou la seule AAH dans le calcul du reste à vivre ? Il faut harmoniser la situation avec la CMU-c.

Ensuite, je m'interroge sur l'égalité de traitement entre handicapés physiques et mentaux. Si les premiers sont autorisés à cumuler l'AAH avec le revenu de leur activité dans la limite de 104 % du Smic, ne peut-on pas prévoir que les seconds perçoivent une prestation de compensation qui leur assure un pouvoir d'achat égal ?

J'en viens aux maisons départementales des personnes handicapées auxquelles la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, apportera un concours complémentaire de 180 millions. Ne faudrait-il pas utiliser ces crédits pour renforcer les moyens humains et la formation, dont l'insuffisance explique bien souvent, dans les établissements d'accueil, une certaine forme de maltraitance passive dont sont victimes les handicapés ?

Enfin, le financement des foyers de vie et des foyers occupationnels, dont le coût est de 8 millions, est assuré par l'Ondam à hauteur de 7,7 millions et la CNSA pour le reste. A quoi correspondent les dépenses assurées par l'Ondam et la CNSA ? Est-il cohérent que l'assurance maladie finance des foyers de vie, d'hébergement et des foyers occupationnels ? Dans ces 8 milliards, quelles parts sont réservées à la perte d'autonomie et aux établissements pour handicapés ?

Madame Morano, les contrats « Petite enfance » signés par les collectivités territoriales, surtout les intercommunalités, seront bientôt remplacés par de nouveaux contrats plus larges, concernant notamment les adolescents qui, par leur grande fragilité, ont besoin d'un encadrement fort par leur famille mais aussi par l'éducation nationale et les intervenants sociaux.

La communauté de communes que je préside est touchée : le soutien financier de la CAF aux nouveaux contrats est bien moindre que pour les contrats petite enfance ! Nous devons investir, si nous voulons éviter que les adolescents ne tombent dans la petite délinquance.

J'attends vos réponses. Toutefois, n'ayez aucune inquiétude sur le soutien du groupe UMP. (Exclamations ironiques à gauche ; applaudissements à droite)

M. Daniel Marsin.  - La pauvreté est un véritable fléau. Plus de 7 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté. La crise frappe de plein fouet les plus démunis et paupérise ceux qui, jusqu'alors, étaient épargnés. Le Président de la République se veut rassurant mais nos concitoyens sont inquiets. Afin de réduire la pauvreté d'un tiers en cinq ans, comme promis, vous avez promu d'importantes mesures, notamment le RSA et le pacte national pour l'emploi des personnes handicapées. Nos compatriotes ultramarins attendent beaucoup de ces valeurs de solidarité, d'insertion et d'égalité des chances, car l'outre-mer souffre d'un chômage quasi endémique et la situation risque de s'aggraver.

L'élaboration budgétaire pluriannuelle permet une approche plus constructive. Votre budget a vu son périmètre évoluer : sur sept programmes en 2008, deux ont été transférés vers d'autres missions. La vision de la globalité de l'action de l'État s'en voit restreinte. Les crédits sont en hausse de plus de 6,2 % en crédits de paiement, à plus de 11,17 milliards, et la prévision de croissance annuelle est de 4,89 % jusqu'en 2011. C'est appréciable mais je crains qu'il ne faille très vite se donner des moyens beaucoup plus massifs pour répondre aux besoins, en métropole et outre-mer...

Le RSA, qui regroupe le RMI et l'API, relève de deux programmes : « Actions en faveur des familles vulnérables » et « RSA et expérimentations sociales ». L'outre-mer connaît un taux de chômage deux à trois fois plus élevé qu'en métropole -22,7 % en Guadeloupe- et compte 17,8 % de Rmistes, contre 3,1 % dans l'hexagone. Quand et comment comptez-vous mettre en place le RSA outre-mer ? Devrons-nous attendre 2011 ? Allons-nous d'abord nous acquitter des taxes avant la mise en oeuvre de ce dispositif ? Envisagez-vous de réduire la pauvreté d'un tiers en cinq ans outre-mer aussi ? Nos compatriotes sont particulièrement attentifs à votre engagement.

Les crédits du programme « Handicap et dépendance » progressent de 7 %. Lors de la Conférence nationale du handicap, en juin dernier, le Président de la République s'est engagé à revaloriser l'AAH de 25 % d'ici 2012, à créer 1 400 places dans les établissements et services d'aide par le travail, 50 000 places dans des établissements et services spécialisés pour personnes handicapées et 4 100 places pour les autistes. Combien seront réservées à nos territoires ultramarins, où presque tout reste à faire ?

Quelles formes prendra la « réorganisation des administrations de santé et de solidarité », notamment outre-mer ?

Enfin, je regrette que les crédits du programme « Égalité entre les hommes et les femmes » soient limités à 29,2 millions. Quels sont les objectifs du Gouvernement dans ce domaine où il reste tant à faire, en métropole et outre-mer ?

Votre budget est sans doute en deçà de ce que vous auriez souhaité mais, connaissant votre engagement, je veux vous encourager dans votre mission : je le voterai donc, mais j'attends vos réponses sur l'outre-mer. (Applaudissements sur les bancs du RDSE)

M. Martin Hirsch, haut-commissaire.  - Elles vous satisferont.

Mme Gisèle Printz.  - Avec seulement 29 millions, le budget du programme « Égalité entre les hommes et les femmes » n'est pas à la hauteur des attentes. En France, 10 % des femmes sont victimes de violences au sein du couple ; une femme meurt tous les deux jours sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint. Le plan global 2008-2010, présenté en novembre 2007, tarde à se mettre en oeuvre, notamment en ce qui concerne l'image de la femme dans les médias -je pense au porno chic et aux magazines qui poussent les adolescentes à l'anorexie. L'Espagne lutte contre la récidive en contrôlant les déplacements d'hommes violents grâce à un bracelet électronique doté d'un GPS. Ne pourrions-nous imiter ce dispositif ? Le 25 novembre, journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, le mouvement « Ni putes, ni soumises » a demandé que la lutte contre les violences faites aux femmes soit décrétée grande cause nationale. Nous soutenons cet appel.

Il faut poursuivre l'effort en direction des associations qui promeuvent la contraception et le suivi de l'IVG : deux grossesses non prévues sur trois surviennent chez des femmes qui déclarent utiliser un moyen contraceptif ! Les pilules de troisième génération ne sont pas remboursées. Il faut une réflexion d'ensemble sur le sujet, pour une meilleure utilisation de la contraception. L'information dans les collèges et les lycées doit également être améliorée.

L'accès des femmes aux responsabilités professionnelles et sociales est appelé à s'améliorer grâce à la disposition inscrite lors de la dernière révision constitutionnelle.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis.  - Que vous n'avez pas votée...

Mme Gisèle Printz.  - Dans l'immédiat, nous regrettons l'absence de référence à la représentation des femmes dans les manuels scolaires qui, selon la Halde, continuent de véhiculer des stéréotypes qui peuvent être à l'origine de discriminations.

La parité au sein des filières de formation initiale scientifique et technique est essentielle pour parvenir à une réelle égalité professionnelle. Les indicateurs de performance prévoient que la proportion de filles en terminale STI passe de 9 % en 2007 à 9,6 % en 2010... A ce rythme, il faudra deux siècles pour arriver à 50 % !

La loi du 23 mars 2006 sur l'égalité salariale présentait des objectifs louables mais se limitait à des mesures incitatives. J'avais dénoncé à l'époque son caractère non persuasif et l'absence de sanctions dans le cas où les négociations n'aboutiraient pas à la réduction des écarts de rémunération.

Avec moins de 200 000 euros de dépenses d'intervention, l'articulation des temps de vie est le parent pauvre de ce programme. Pourtant, l'enjeu est important, d'autant que les schémas traditionnels évoluent peu. Les femmes consacrent toujours deux fois plus de temps que les hommes aux tâches domestiques. Les droits et les devoirs entre les hommes et les femmes dans la vie privée doivent être identiques, notamment pour la prise en charge des enfants. Hier, Ségolène Royal (exclamations ironiques à droite) avait montré la voie avec le congé de paternité qui devrait évoluer vers un véritable congé parental alterné, comme en Suède. Bien entendu, cela n'empêcherait pas l'ouverture de nouvelles crèches au financement desquelles l'État devrait participer.

Pour mener une politique volontariste en faveur des femmes, il faut se donner les moyens financiers, ce qui n'est pas le cas avec ce budget, mais aussi les moyens politiques avec la création d'un secrétariat d'État dédié aux droits des femmes. Nous nous interrogeons sur le rattachement opéré par la RGPP des déléguées régionales aux droits des femmes aux secrétariats généraux pour les affaires régionales. Faire des économies ne signifie pas forcément gagner en efficacité, bien au contraire.

Nous ne voterons donc pas ce budget qui manque réellement d'ambition. (Applaudissements à gauche)

Mme Jacqueline Chevé.  - La nouvelle organisation de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » ne manque pas de nous inquiéter car elle laisse à penser que l'emploi est le remède unique et ultime à toutes les pathologies sociales. Celui-ci doit être un objectif accessible et pas un impératif catégorique.

De même, le renversement de la logique de financement en fonction des modes de ressources et des besoins des publics accompagnés pose de sérieux problèmes en termes de gouvernance et de prise en compte de la diversité des demandes.

En outre, la baisse des crédits qui touche deux actions relatives aux familles vulnérables est inquiétante. Les crédits du conseil conjugal et familial vont en effet baisser de 40 %, et ceux du soutien à la parentalité de près de moitié. Cette réduction de moyens menace les dispositifs préventifs mis en place par les réseaux d'appui et d'accompagnement des parents, qui ont pourtant montré toute leur efficacité au fil des années. Il faut avoir le courage de reconnaître que la question sociale est complexe et que son traitement peut prendre du temps. Les mécanismes curatifs vont nécessairement de pair avec les mesures préventives. En ne prenant pas en considération ces éléments, les politiques menées pour les plus démunis risquent d'être inefficaces et même contreproductives. En matière de politique sociale, l'adage « mieux vaut prévenir que guérir » garde tout son sens.

J'en viens au programme « Handicap et dépendance » qui représente plus des trois quarts des crédits de la mission. Doté de 8,6 milliards, son financement augmente, suivant en cela les conclusions de la Conférence nationale du handicap. Deux enjeux sont décisifs : le financement des Maisons départementales pour les personnes handicapées (MDPH) et l'insertion professionnelle des personnes en situation de handicap. Créées par la loi du 11 février 2005, ces maisons sont chargées d'offrir un accès unifié aux droits et prestations des personnes handicapées sur la base d'une évaluation personnalisée des besoins et des capacités des intéressés. Elles jouent donc un rôle pivot pour les politiques du handicap. Mais quatre ans après leur création, le financement des MDPH est toujours problématique. Dans mon département, les Côtes-d'Armor, la MDPH suit près de 15 000 adultes en situation de handicap. Entre 2006 et 2007, elle a enregistré une augmentation de 7 % du nombre des dossiers en instruction, et cette tendance ne risque pas de s'inverser puisque la structure est encore relativement jeune et gagne en notoriété d'année en année. Quelque 14 millions sont prévus pour ces structures, niveau inchangé par rapport à 2008 alors que cette dotation s'est avérée très insuffisante depuis 2005.

La prise en charge des besoins de compensation des personnes en situation de handicap pose un problème encore plus grave : le Fonds départemental de compensation est censé y remédier. Or, les fonds départementaux de compensation ne peuvent tenir leurs engagements puisqu'ils reposent sur le principe d'une participation facultative alors que leur champ d'intervention est obligatoire. Seuls l'État et les conseils généraux les abondent régulièrement. Les autres contributeurs apportent leurs financements au cas par cas. Aussi, face aux lourdeurs administratives du traitement des dossiers et devant la complexité du dispositif de prise en charge de la compensation, les MDPH ne peuvent, par manque de moyens humains, élaborer les plans personnalisés de compensation. Comme les contributeurs appliquent des critères de prise en charge spécifiques, le dispositif va à l'encontre de toute logique de mutualisation, d'universalité et d'égalité de traitement.

J'en viens à l'action 2 « Incitation à l'activité professionnelle ». Il s'agit d'une urgence alors que le taux de chômage des personnes handicapées est quatre fois supérieur à celui de la population active valide. Cette action, dotée de 2,5 milliards, représente 29 % des crédits du programme. Elle s'appuie également sur le programme « Accès à l'emploi » de la mission « Travail et emploi », sur l'Association nationale de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) et sur le Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP). Cette action poursuit deux objectifs : le financement des établissements et services d'aide par le travail (Esat), qui mobilise 1,3 milliard et devrait permettre de créer 114 000 places d'accueil, et le financement de l'aide au poste dans la cadre de la Garantie de ressources pour travailleurs handicapés (GRTH), entrée en vigueur le 1er janvier 2007. Mais en conditionnant l'attribution des ressources à l'employabilité, le Gouvernement compromet l'avenir des personnes handicapées qui souffrent souvent de leur faible niveau de qualification et des réticences des employeurs. Cette logique est pour le moins contreproductive.

Le secteur protégé représente, surtout en cas de crise, le milieu optimal pour l'accès à l'emploi des personnes handicapées. Mais le constat est alarmant : en dépit des efforts accomplis par des structures telles que l'Agefiph depuis vingt ans, près de 200 000 personnes handicapées restent aujourd'hui sans travail ni perspectives de formation.

Au-delà de leur vocation médico-sociale, les Esat ont une importance majeure pour l'insertion : ils permettent aux personnes handicapées d'être plus autonomes et responsables et donc plus aptes à assurer une activité. Malheureusement, la progression des crédits sera inférieure à l'inflation, ce qui ne permettra pas de financer les 1 400 places nouvelles qui seront créées en Esat en 2009 ni d'améliorer la qualité d'accueil. Les Esat seront d'autant plus fragilisés qu'il manquera plus de 130 millions pour financer l'aide au poste, dont l'objectif est de permettre aux travailleurs handicapés de bénéficier d'une garantie de ressources. C'est inacceptable.

Le développement de l'emploi en milieu ordinaire, qui était déjà l'un des objectifs de la loi du 11 février 2005, est indispensable. La mobilisation des partenaires sociaux doit être totale. L'augmentation des cotisations prélevées sur les entreprises assujetties à l'obligation d'emploi de 6 % de travailleurs handicapés et sur les employeurs publics va dans le bon sens. Je regrette néanmoins que la nouvelle participation du FIPHFP au financement de ce réseau se traduise dans le même temps par la diminution de la contribution de l'Agefiph.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis.  - Ça, je l'ai déjà dit !

Mme Jacqueline Chevé.  - L'emploi des personnes handicapées se détériore. Je demande donc au Gouvernement, en collaboration avec la Halde, d'accroître les sanctions pour toutes les entreprises qui ne respectent pas les critères fixés par la loi.

Enfin, je m'associe aux propos de Mme Printz concernant l'égalité entre les hommes et les femmes. Il est essentiel que l'État s'engage dans la lutte contre toutes les formes de discrimination de manière transversale. Il est plus que temps de passer d'une égalité de droit à une égalité de fait, comme cela est le cas en Bretagne. (Applaudissements à gauche)

Mme Claire-Lise Campion.  - Alors que nous pouvions espérer une mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » à la hauteur de la situation économique et sociale actuelle et permettant de faire face aux risques de détérioration de la situation des personnes et des familles vulnérables, ce budget ne traite vraiment que du RSA.

Les politiques sociales ne peuvent se résumer au seul retour à l'emploi. En fait, le RSA masque l'ampleur du désengagement de l'État dans les autres programmes. Ainsi, l'action « Accompagnement des familles dans leur rôle de parents », relevant du programme, diminue-t-elle d'un tiers. Faut-il rappeler l'importance des Points infos familles et des réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents ? Ils sont autant de soutiens, d'aides et de lieux d'échanges et d'informations pour les familles. Ces structures légères sont relativement bien réparties sur le territoire, tant dans les zones urbaines que rurales. En pratiquant ainsi, vous mettez en jeu leur survie. Une telle rationalisation des dépenses aurait au moins nécessité une évaluation préalable des besoins.

La protection des enfants et des familles est dotée de 221 millions, soit une diminution de 12 %. Avec l'entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007, le Gouvernement mise sur une baisse du coût des tutelles et des curatelles et sur un gain de 90 millions en 2011. Mais la charge des départements s'en trouvera accrue.

Avec 6 millions, le soutien apporté par l'État à la protection de l'enfance est d'autant plus marginal que la loi sur la protection de l'enfance du 5 mars 2007 estimait à 150 millions le montant global des seules mesures nouvelles qu'elle instaurait. Or, à ce jour, aucun financement n'est prévu pour alimenter le Fonds national de la protection de l'enfance. Certes, la prévention et la lutte contre la maltraitance des enfants, que la loi du 5 mars 2007 a renforcées, relève de la responsabilité partagée des départements, qui assument l'essentiel de la dépense, et de l'État. Mais le Fonds national doit compenser l'ensemble des mesures nouvelles prévues par la réforme et qui sont à la charge des départements. La mise en oeuvre de la loi est donc compromise. Il ne suffit pas de légiférer, encore faut-il aller jusqu'au bout du parcours en publiant les décrets et en prévoyant les financements.

Je déplore donc l'absence de publication du décret portant création du fonds. Un avant-projet de décret a été soumis au Comité des collectivités locales qui a rendu son avis le 8 février. Cela fait maintenant dix mois que nous attendons. Peut être le Gouvernement va-t-il nous annoncer une bonne nouvelle ? En 2007, la Cnaf devait participer au financement de ce fonds à hauteur de 30 millions. Depuis, ces crédits ont été redéployés. Contrairement à ce qu'avait affirmé Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité en 2008, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, l'État n'est toujours pas au rendez-vous ! Nous n'avons que trop perdu de temps. Nous attendons donc avec impatience votre réponse, madame la ministre. (Applaudissements à gauche)

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité  - En ce qui concerne les personnes handicapées, ce projet de budget doit donner un contenu aux mesures annoncées par le Président de la République lors de la Conférence du handicap du 10 juin dernier.

Vous avez été plusieurs à saluer le respect de l'engagement pris sur la revalorisation de l'AAH. Cet effort sans précédent de la solidarité nationale représente 1,4 milliard en cinq ans, à quoi nous ajouterons 236 millions en collectif, car cette revalorisation entraine des besoins supplémentaires. Mais revaloriser l'AAH ne suffit pas si une personne handicapée qui accède à l'emploi y perd financièrement. C'est pourquoi nous améliorons le mécanisme de cumul entre allocation et salaire pour faire plus simple, plus équitable et plus incitatif. Une personne handicapée qui touche un salaire de 400 euros conservera une AAH de 573 euros ; celle qui touche le Smic conservera une AAH de 213 euros alors qu'aujourd'hui, elle perd tous ses droits.

Nous allons mettre en place les conditions d'un véritable accompagnement des bénéficiaires de l'AAH vers l'emploi. Dès 2009, ils bénéficieront systématiquement d'un bilan professionnel et ceux qui sont en capacité d'accéder à l'emploi seront automatiquement reconnus travailleurs handicapés. Sur ce dernier point, je veux dissiper un malentendu : il ne s'agit pas là d'exclure ces demandeurs du bénéfice de I'AAH ; l'existence d'un handicap et un niveau de ressources faible resteront les seuls critères d'accès à l'AAH. Il s'agit seulement de mieux orienter les personnes, en fonction de leur projet de vie.

Ce n'est d'ailleurs qu'une première étape : nous avons lancé une mission d'experts pour concevoir un nouvel outil d'évaluation de la situation des personnes handicapées au regard de l'emploi. Elle aboutira à une réforme des compléments d'AAH, qui viendront désormais abonder en priorité les revenus des personnes dans l'incapacité complète de travailler.

J'ai bien entendu la question de M. Vasselle sur les financements par la CNSA. La section IV de son budget permet d'aider les établissements à envoyer leurs professionnels en formation. S'agissant du financement des établissements, l'Ondam, renforcé par une partie des rentrées du « jour de solidarité », ne finance bien que les soins ; foyers de vie et d'hébergement restent bien à la charge des conseils généraux. Soucieuse de sa mise en oeuvre dans les départements d'outre-mer, je me rends la semaine prochaine aux Antilles (murmures flatteurs sur de nombreux bancs) pour proposer un plan de rattrapage de l'offre médico-sociale.

Les maisons départementales des personnes handicapées ont effectivement un rôle capital ; il nous faut à tout prix éviter que leurs difficultés actuelles ne viennent jeter un doute sur leur utilité. Ces difficultés sont liées à la révolution culturelle que nous avons demandée aux équipes de réaliser en un temps record. L'État s'est engagé à compenser financièrement les postes devenus vacants à la suite de départs en retraite ou de mutation ; cet engagement sera tenu, les 7,6 millions correspondants ont été notifiés cette semaine. Depuis leur fondation, elles auront ainsi reçu 380 millions.

Des évolutions statutaires seront nécessaires. La solution retenue devra respecter quatre principes : confirmer le département dans son rôle de responsable et lui donner toute la souplesse de gestion nécessaire ; permettre à l'État de remplir son rôle de garant de l'équité territoriale et mettre fin aux difficultés liées aux mises à disposition ; préserver l'innovation que constitue la participation des associations de personnes handicapées à la gouvernance des maisons ; poser les bases pour une évolution vers des maisons départementales de l'autonomie, dans le cadre du cinquième risque.

Je suis tout comme vous attachée au respect des objectifs que nous nous sommes fixés en matière d'accessibilité. La mise aux normes des bâtiments est une obligation qui s'impose à tous. Pour 2009, nous souhaitons changer de braquet et mettre l'accent sur les locaux professionnels. C'est pourquoi nous allons demander au FIPHFP, comme le fait déjà l'Agefiph pour le secteur privé, de cofinancer les travaux d'accessibilité des employeurs publics qui s'engagent dans un plan pluriannuel de recrutement.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis.  - Y compris les collectivités territoriales !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - J'ai bien entendu vos interrogations sur la prestation de compensation du handicap et ses évolutions possibles dans la perspective du Cinquième risque. Avec un montant de 1 100 euros, elle représente le double de ce à quoi les personnes handicapées pouvaient prétendre avec l'ACTP. C'est un acquis essentiel mais certains de ses aspects doivent être ajustés. Sur la question des aides ménagères, nous voulons engager une concertation, dans le cadre du cinquième risque, avec les associations et les conseils généraux. Il nous faut certainement réfléchir à une meilleure répartition des dotations attribuées aux départements par la CNSA, en fonction de l'effort qu'ils consentent.

Je connais les inquiétudes du monde médico-social quant à sa place dans les futures ARS, et je tiens à les dissiper. L'inclusion du médico-social dans le champ des ARS est une occasion unique de décloisonner les politiques. Cette approche commune est indispensable pour reconvertir à plus grande échelle les lits d'hôpital en lits médico-sociaux, chaque fois que nécessaire. Une des premières tâches des ARS sera de mettre en oeuvre le principe de fongibilité asymétrique qui veut que les moyens aillent du secteur sanitaire vers le médico-social et non l'inverse. Les ARS doivent permettre d'améliorer et d'accélérer les procédures de création de places nouvelles. La procédure actuelle est trop lourde et le CROSMS ne joue pas son rôle de filtre : la grande majorité des projets recueille un avis positif, le filtre réel ne jouant que plus tard avec l'attribution des financements. Nous allons donc supprimer les CROSMS dans leur format actuel et les remplacer par une procédure d'appels à projet. Et nous calibrerons cette procédure pour que les projets innovants puissent être pris en compte. Les associations participeront à la définition de ces appels à projet.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis.  - Très bien !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Je voudrais enfin m'arrêter sur la question du droit des femmes. Je veux d'abord rassurer sur l'avenir du service du droit des femmes et de ses déléguées au plan local. La meilleure preuve que nous voulons continuer à avoir une politique interministérielle ambitieuse en la matière, c'est que nous allons créer une délégation interministérielle aux droits des femmes et que les déléguées régionales seront placées directement auprès des Sgar, pour conserver ce regard transversal au plan local.

Nous allons lutter contre les stéréotypes sexistes dès l'école. En la matière, ce n'est pas l'importance du budget qui compte mais la volonté et la dimension interministérielle de l'action.

Un an après le lancement du plan de lutte contre les violences faites aux femmes, la plupart des mesures ont été réalisées : référents locaux, interlocuteurs uniques de proximité pour garantir l'accompagnement des victimes de violences. Le 2 octobre a été lancée la campagne de communication à destination des victimes, des témoins et des auteurs, ainsi que la création d'une plate-forme internet. L'année prochaine, le Premier ministre l'a annoncé le 25 novembre, la lutte contre les violences faites aux femmes bénéficiera du label « Campagne d'intérêt général ». Les associations ont été invitées à s'organiser en comité pour ouvrir la voie à une grande cause nationale en 2010.

Faut-il un secrétariat d'État aux droits des femmes ? Les autres pays de l'Union européenne n'en ont pas.

Mme Christiane Demontès.  - Ce n'est pas une raison.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Il faut que tous les ministères se sentent impliqués par le droit des femmes. Ce doit être une question transversale.

Mme Gisèle Printz.  - Cela ne sert à rien.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Nous allons agir, avec M. Darcos, pour que les jeunes filles se dirigent davantage vers les filières scientifiques.

En dépit des difficultés économiques, ce budget est ambitieux et volontariste. Il s'inscrit dans une véritable feuille de route pour l'accompagnement des plus fragiles de nos concitoyens. Loin d'être oubliés, ceux-ci bénéficient d'un effort amplifié. Le Gouvernement est animé d'une vraie détermination. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille.  - Avec 837,7 millions pour les familles vulnérables, ce budget est un budget de transition. D'abord parce que nous avons décidé de ne pas nous satisfaire de la situation des familles Rmistes mais de mobiliser le principe de la solidarité active. Certains m'ont fait valoir que mon ministère allait perdre une ligne budgétaire dans l'opération ; je leur ai répondu que les lignes budgétaires n'appartiennent pas aux ministères mais au peuple français ! (On approuve à droite ; on s'offusque à gauche)

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis.  - Très bien !

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État.  - Lorsque nous avons créé le RSA, nous nous sommes vite accordés avec M. Hirsch pour y inclure les allocataires de l'API, car c'est logique !

M. Martin Hirsch, haut-commissaire.  - Absolument !

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État.  - La réforme de la tutelle et de la curatelle est dictée par notre souci d'efficacité mais aussi par nos devoirs particuliers de solidarité nationale. Mon programme comprend trois actions : 15,5 millions pour l'accompagnement des familles, 601,5 millions pour les familles monoparentales et 220,8 millions pour la protection de l'enfance et de la famille. L'État conserve toute sa place dans le financement de ces programmes à destination des familles les plus faibles, nous impulsons même une nouvelle dynamique à notre intervention ! (Exclamations à gauche)

L'accompagnement des parents est une tâche très importante à mes yeux. Les réseaux d'écoute et d'aide à la parentalité bénéficieront de 7,1 millions. Depuis 2002, ces réseaux ne consomment pas l'intégralité des crédits mis à leur disposition, nous en tenons compte : les crédits ont atteint 11 millions l'an passé, un doublement qui était lié à la promotion de la loi relative à la protection de l'enfance. Si les crédits s'avèrent insuffisants, nous les augmenterons, à condition que les actions soient évaluées. La prochaine convention d'objectifs et de gestion entre l'État et la Cnaf sera l'occasion de renouveler notre intervention. L'État n'est pas le seul financeur puisque la branche famille de la sécurité sociale intervient également pour la médiation familiale.

M. Vasselle m'interroge sur les adolescents en difficulté. Environ 900 000 adolescents sont en souffrance psychologique, moins d'un sur huit d'entre eux fait appel à un médecin pour l'aider. Nous voulons développer les Maison des adolescents : 2 millions leur sont consacrés pour aider au démarrage. Les crédits de la médiation familiale sont maintenus, à 2,4 millions.

Nous mobilisons 601,5 millions pour l'API. Fin 2007, cette allocation servait 218 500 familles monoparentales. Nous ajusterons les moyens aux besoins. L'an prochain, l'API sera intégrée au RSA : celui-ci sera majoré d'autant, il n'y aura aucun perdant ! (Exclamations sur les bancs socialistes) Je me félicite de cette intégration, qui traduit notre conception de la solidarité : une aide pour repartir plutôt qu'un piège où s'enferrer !

La protection des enfants et des familles bénéficiera de 220 millions. L'aide à l'adoption disposera de 3,75 millions : qu'elle ait lieu en France ou à l'étranger, elle doit d'abord se faire dans l'intérêt de l'enfant, l'Agence française de l'adoption doit y veiller. Les crédits seront ajustés si cela s'avère nécessaire. Nous voulons mener à bien la réforme de l'adoption, le Président de la République y est très attentif.

Je salue l'action du Conseil national d'accès aux origines personnelles : 2 538 dossiers ont été constitués, entrainant 897 révélations d'identité des parents. Je suis très attachée au maintien des financements de ce Conseil.

L'État doit protéger les personnes les plus faibles en mobilisant la solidarité nationale, c'est l'objet de la loi du 5 mars 2007 relative à la protection de l'enfance. Je viens de signer un deuxième décret d'application pour la création d'observatoires départementaux de la protection de l'enfance ; je compte signer un troisième décret d'ici la fin de l'année, sur la formation des intervenants.

Nous consacrons 2,18 millions au groupement d'intérêt public « Enfance en danger », qui accueille l'observatoire national de l'enfance en danger et qui assure un service téléphonique ouvert en permanence et recevant plus de 4 000 appels par jour.

L'an prochain, 214 millions iront à la protection des majeurs. La loi du 5 mars 2007 accorde la plus grande importance à la volonté des personnes, avec un examen du dossier tous les cinq ans, avec la création d'un mandant pour la protection future et avec une procédure de placement qui est véritablement contradictoire. Une procédure a été placée sous la responsabilité des conseils généraux pour aider les personnes qui ont des difficultés pour gérer leur budget, mais sans altération mentale.

Ce budget est sincère, pragmatique, il tient compte de notre volonté d'optimiser les dépenses publiques pour un système de protection sociale plus juste et plus équitable. Le Gouvernement sera particulièrement vigilant sur la protection des plus faibles ! Merci pour votre soutien ! (Applaudissements à droite et au centre, exclamations à gauche)

Mme Claire-Lise Campion.  - Où sont passés les 30 millions de la Cnaf ?

M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.  - Le RSA passant l'an prochain de l'expérimentation à la généralisation, le programme qui lui est consacré bondit de 45 millions à 582 millions. La fusion du RMI et de l'API dans le RSA avait été recommandée par l'excellent rapport de MM. de Raincourt et Mercier il y a trois ans, mais personne n'osait y croire : on redoutait des obstacles administratifs insurmontables. Cette réforme protège les parents isolés : Bercy brûlait de rogner l'API, nous avons sauvegardé ces crédits en les sanctuarisant !

M. Guy Fischer.  - On verra !

M. Martin Hirsch, haut-commissaire.  - Nous en avons discuté avec deux anciens Premiers ministres, M. Rocard qui a créé le RMI, M. Raffarin qui l'a décentralisé, et aussi avec M. Méhaignerie qui l'a expérimenté. Vingt ans après, le principe du RMI est accepté par tous. Et on n'aurait pas le droit de le transformer pour que ceux qui reprennent un travail ne soient pas pénalisés ? Cela ne signifie pas, madame Demontès, que nous misons tout sur le retour au travail : il y a aujourd'hui des départements où 25 % des Rmistes ont un travail ! Ceux-là travaillent pour des prunes.

M. Guy Fischer.  - Il y a l'intéressement.

M. Martin Hirsch, haut-commissaire.  - Oui, mais cela ne dure qu'un an. Les avantages fiscaux seraient valables toute la vie et le retour à l'emploi ne serait reconnu que pendant un an ! Il n'y a là aucune idéologie du travail !

Le coût global du RSA est de 10 milliards, dont 6,6 pour les départements et le reste pour l'État, via le Fonds national de solidarité active. Ce fonds présente l'intérêt de pouvoir être alimenté par différents tuyaux mais de ne faire sortir ses crédits que par un seul canal, pour le RSA. Il prendra en charge 100 millions de frais de gestion des CAF et de la Mutualité sociale agricole, ainsi que l'Aide personnalisée à la reprise d'emploi, laquelle sera plus souple que la formule actuelle et adaptée au plus près des besoins des bénéficiaires.

M. Vasselle s'est inquiété de l'impact sur les dépenses des départements. Ceux-ci ont en charge le socle de la dépense, l'État en gardant le « chapeau ». A partir de juin 2009, dès qu'un Rmiste trouvera un travail, contrairement à ce qui se passait avec l'intéressement, l'économie sera directe et immédiate pour le département.

M. Paul Blanc s'est interrogé sur le Fonds d'expérimentation pour les jeunes -doté de 10 millions en 2008, de 4 en 2009. Nous avons regardé les débats d'il y a vingt ans, lors de la création du RMI. Le problème des 18-25 ans se posait déjà et, vingt ans après, nous ne sommes pas plus avancés. C'est pourquoi, dès le début de 2009, je lance un programme dans des départements volontaires afin de revenir devant vous vous proposer une solution et cela, sans attendre... deux décennies. Certains programmes, concernant les jeunes très désocialisés, seront montés avec les évaluateurs et les collectivités locales.

Mme Pasquet nous a accusés de nous financer sur le dos des bénéficiaires des droits connexes. Il n'en est rien : lors du basculement de droits liés au statut vers des droits liés au revenu, le différentiel sera de 80 millions sur un total de plus d'un milliard. C'est minime, surtout lorsqu'il s'agit de passer d'un système injuste à un système plus juste.

M. Vasselle s'est aussi inquiété du financement. Le vase va-t-il déborder ? Pas forcément. D'abord parce que nous n'avons jamais tenu compte, dans nos calculs, des économies envisageables. Dans les départements expérimentateurs, nous observons 30 % de plus de retours au travail. C'est autant de dépenses de RMI en moins. Si nous extrapolons à la France entière, nous économisons des centaines de millions. Mais nous avons été prudents... Ensuite, le plafonnement des niches fiscales pourra abonder le Fonds. Dans ce cas, peut-être pourra-t-on réduire la taxe... Nous créons un droit et un fonds pour le financer : il sera honoré, n'ayez aucune inquiétude.

Si les partenaires sociaux réduisaient les allocations chômage, cela aurait des répercussions sur le RSA. Mais cela ne lui serait pas imputable... Nous avons alerté les départements et les partenaires sociaux pour que les uns ne prennent pas de décision qui aurait des conséquences sur le budget des autres.

A M Vasselle et à Mme Chevé, je signale que nous avons reconduit au même niveau les crédits du Fonds pour l'insertion.

La taxe étant prélevée dès janvier et le RSA n'entrant en vigueur qu'en juillet, il y aura un excédent.

M. Marsin s'est dit prêt à voter le texte si j'y apportais quelques clarifications. Voulons-nous attendre la fin de 2010 ? Non ! Dès que les départements d'outre-mer seront prêts, le RSA y entrera en vigueur. J'ai missionné un parlementaire afin qu'il fasse des propositions dans les six mois et nous nous réunissons avec tous les présidents de conseils généraux pour étudier la question. Quant à la taxe de 1,1 %, elle ne sera pas prélevée outre-mer tant que le RSA n'y sera pas en vigueur.

La mission n'est pas dominée par le RSA, madame Campion, 580 millions sur 11,2 milliards. Rien de machiste dans notre démarche ! (Sourires)

Nous avons construit cette réforme avec vous. Comme l'ont fait, il y a vingt ans, les créateurs du RMI, nous entendons concilier la préoccupation du retour à l'emploi et les autres dimensions sociales. En 1988, il n'y avait pas de travailleurs pauvres et les bénéficiaires du RMI étaient moins concernés par l'emploi. Il faut en tenir compte.

Un dernier mot sur l'application éventuelle du RSA à compter du 1er janvier. Nous pensons qu'il faut peaufiner le dispositif pour qu'il soit bien appliqué à partir de juin 2009, ce qui n'interdit pas d'envisager des mesures particulières en direction des plus modestes si le premier semestre 2009 était difficile. (Applaudissements au centre et à droite)

Examen des crédits

Article 35 (État B)

M. le président.  - Amendement n°II-183, présenté par le Gouvernement.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Cet amendement de pure coordination tire les conséquences de la compensation due au titre des transferts de personnels vers les départements et les régions dans le secteur médico-social. Ces transferts, qui se traduisent par une réduction de 432 emplois équivalents temps plein, n'avaient pu être pris en compte lors de l'élaboration du projet de loi de finances, eu égard notamment aux délais d'exercice du droit d'option. La réunion récente de la commission d'évaluation des charges a permis d'arrêter ce nombre en accord avec les représentants des collectivités territoriales. Il est ainsi proposé une annulation des crédits sur le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » pour un montant total de 13,9 millions d'euros.

J'ajoute que les conséquences financières de la décentralisation ont été traduites dans l'équilibre du budget de l'État.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial.  - Le Gouvernement peut-il nous assurer que la compensation sera intégrale ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - C'est l'objet même de l'amendement. La compensation est intégrale.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial.  - Avis favorable.

L'amendement n°II-183 est adopté.

M. le président.  - Je mets aux voix les crédits de la mission.

Mme Isabelle Pasquet.  - D'autres pistes existent que celles que propose le Gouvernement, il faut d'autant plus les explorer que la crise va aggraver la situation des plus faibles. Ce budget traduit la logique du Gouvernement, l'abandon de programmes bénéficiant aux plus faibles et le bouclier fiscal pour des riches qui n'ont rien donné en retour. L'État se désengage de nombreuses actions dans le domaine de la solidarité ; en témoigne la forte baisse des crédits en faveur de l'égalité hommes-femmes, alors que les schémas sexistes perdurent comme les inégalités sur le lieu de travail. Nous aurions plutôt souhaité un renforcement des compétences et des moyens de la Halde. Nous ne pouvons pas plus cautionner ce qui se passe dans le secteur médico-social.

Nous avons une autre conception de la solidarité nationale. Nous voterons contre ce budget. (Applaudissements à gauche)

Les crédits de la mission, modifiés, sont adoptés.

Article 74

Le deuxième alinéa de l'article L. 314-4 du code de l'action sociale et des familles est complété par une phrase ainsi rédigée :

« A cet effet, un arrêté interministériel fixe, annuellement, les tarifs plafonds ou les règles de calcul desdits tarifs plafonds pour les différentes catégories d'établissements sociaux et médico-sociaux mentionnés au premier alinéa, ainsi que les règles permettant de ramener les tarifs pratiqués au niveau des tarifs plafonds. »

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je ne partage pas l'optimisme du rapporteur sur le programme « Handicap et dépendance ». Le nombre de places en établissements et services d'aide par le travail (Esat) reste très insuffisant : on n'en créera que 1 400 en 2009 alors que, selon la Direction générale de l'action sociale, il faudrait en créer 2 500 par an pour faire face aux besoins. Un certain nombre de projets de création ou d'extension d'établissement ne pourront voir le jour. Mme Bricq m'a signalé le cas d'un projet d'Esat en Seine-et-Marne, dont le dossier est complet depuis fin 2006, qui a reçu toutes les autorisations et avis favorables nécessaires mais qui est bloqué faute de places affectées à l'établissement. Cette situation n'est pas unique, qui porte avant tout préjudice aux personnes handicapées et à leurs familles. Il n'y a donc pas lieu de se réjouir de la « hausse » annoncée des crédits.

De plus, l'article 74 prévoit de fixer par arrêté un tarif plafond pour la dotation globale de fonctionnement des Esat, ce qui entraîne une économie de 4 millions d'euros par le biais d'un écrêtement des établissements considérés comme sur-dotés ; mais rien n'est prévu pour augmenter la dotation des établissements sous-dotés, qui sont pourtant légion. Nous ne disposons plus d'aucune information sur ces tarifs : le Gouvernement peut-il nous éclairer ?

M. le président.  - Amendement n°II-159, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Isabelle Pasquet.  - Cet article 74 poursuit le mouvement engagé depuis plusieurs années ; le secteur médico-social est maintenant touché par la tarification à l'activité. D'après l'exposé des motifs, le Gouvernement entend rationaliser les coûts des établissements. Mais, comme nous l'avons déjà dénoncé, il s'agit de faire des économies sur le dos du secteur, 4 millions pour être précis. Jusqu'à présent, le financement des établissements médico-sociaux était calculé à partir de leurs besoins ; désormais, la participation de l'État sera modulée en fonction des ressources qu'ils dégagent. Cela les conduira à sélectionner les publics qu'ils accompagnent. Vous signez ainsi la mort de la loi de la loi du 2 janvier 2002 en faisant fi de toute réponse individualisée.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial.  - Avis défavorable.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Depuis plusieurs années, nous essayons de réduire les écarts de coût à la place injustifiés entre établissements. Nous l'avons fait pour les établissements qui relèvent de l'Ondam. L'article 74 étend le mécanisme au secteur médico-social, ce qui ne veut pas dire qu'il y aura un tarif uniforme. Il sera tenu compte de la diversité des besoins d'accompagnement, des types d'activité et de la plus ou moins grande complexité des dépenses d'entretien des bâtiments. Une enquête est en cours pour apprécier la composition des coûts, ce qui permettra de fixer les tarifs plafond.

Notre but est une harmonisation sur l'ensemble du territoire. Pour les établissements les moins bien dotés, 4 millions sont prévus pour une mise à niveau. Avis défavorable.

L'amendement n°II-159 n'est pas adopté.

L'article 74 est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°II-160, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'article 74, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Après le troisième alinéa de l'article L. 7232-4 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

bis) Les régies de quartier ;

II. Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.

III. Les pertes de recettes pour l'État et les organismes de sécurité sociale résultant du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Isabelle Pasquet.  - L'aide fiscale accordée aux contribuables qui emploient un salarié à domicile s'applique sur les sommes versées à l'employé ou à des associations, des entreprises ou des organismes agréés par l'État ayant pour objet essentiel la fourniture de services à la personne.

Les structures qui interviennent auprès des plus fragiles doivent être agréées par l'État. Les CCAS et les centres intercommunaux d'action sociale reçoivent un agrément dérogatoire puisqu'ils n'ont pas pour objet exclusif une activité de services à la personne. Notre amendement tend à autoriser les régies de quartier à solliciter le même agrément dérogatoire. Je rappelle que participent à ces régies des collectivités locales, des logeurs sociaux, des habitants. Levons un obstacle au développement des services à la personne dans des territoires qui en ont grand besoin.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial.  - La mesure est intéressante mais nous en ignorons le coût. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Défavorable. Les régies de quartier ne sont pas définies juridiquement et l'attribution du label par le Conseil national de liaison des régies de quartier échappe au contrôle des pouvoirs publics. En outre, si nous acceptions cette extension, il faudrait en faire bénéficier toutes les structures d'insertion par l'économique. Or le Gouvernement veut au contraire que celles-ci se rapprochent du droit commun afin d'éviter des effets de concurrence déloyale. Un plan de développement des services à la personne est en cours d'élaboration : je vous renvoie à un débat ultérieur, plus large, sur l'ensemble de ces questions.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Il me semble que les pratiques de certains CCAS présentent beaucoup de similitudes avec celles des régies.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Des régies municipales, oui !

M. Martin Hirsch, haut-commissaire.  - Les régies de quartier sont des entreprises d'insertion.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Alors nous nous rangeons à l'avis du Gouvernement.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°II-160, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

Article 75

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L'article L. 523-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'allocation de soutien familial est ouverte de plein droit aux bénéficiaires de l'allocation de parent isolé qui assument la charge effective et permanente d'un ou plusieurs enfants remplissant l'une des conditions précédemment mentionnées. » ;

2° A la première phrase du premier alinéa de l'article L. 552-1, après les mots : « allocation de parent isolé, », sont insérés les mots : « de l'allocation de soutien familial versée dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l'article L. 523-1, » ;

3° Après l'article L. 524-7, il est inséré un article L. 524-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 524-8.  -  Tout paiement indu d'allocation ou de la prime forfaitaire mentionnée à l'article L. 524-5 peut, sous réserve que l'allocataire n'en conteste pas le caractère indu, être récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de primes forfaitaires à échoir ou par remboursement de la dette selon les modalités fixées aux premier et troisième alinéas de l'article L. 262-41 du code de l'action sociale et des familles ainsi qu'au 2° de l'article L. 262-22 du même code.

« La créance de l'organisme peut être réduite ou remise en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manoeuvre frauduleuse ou de fausses déclarations. »

M. le président.  - Amendement n°II-58 rectifié bis, présenté par le Gouvernement.

Après le 1° de cet article, insérer un1° bis ainsi rédigé :

1° bis A compter du 1er juin 2009 et au plus tard au 1er janvier 2011 pour les départements d'outre-mer et les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, à l'article L. 523-1 tel qu'il résulte du 1° ci-dessus, les mots : « de l'allocation de parent isolé » sont remplacés par les mots : « du revenu de solidarité active visés à l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles, dont les ressources n'excèdent pas le montant forfaitaire majoré mentionné au même article, » ;

M. Martin Hirsch, haut-commissaire.  - Coordination avec la loi sur le RSA !

L'amendement n°II-58 rectifié bis, accepté par la commission, est adopté.

L'article 75, modifié, est adopté.

Article 76

I.  -  Après l'article L. 821-7-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 821-7-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 821-7-3.  -  Une procédure de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé mentionnée à l'article L. 5213-2 du code du travail est engagée à l'occasion de l'instruction de toute demande d'attribution ou de renouvellement de l'allocation aux adultes handicapés. »

II.  -  L'article L. 5213-2 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 5213-2.  - La qualité de travailleur handicapé est reconnue par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L. 241-5 du code de l'action sociale et des familles. Cette reconnaissance s'accompagne d'une orientation vers un établissement ou service d'aide par le travail, vers le marché du travail ou vers un centre de rééducation professionnelle. L'orientation vers un établissement ou service d'aide par le travail, vers le marché du travail ou vers un centre de rééducation professionnelle vaut reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. »

III.  -  Le 2° de l'article L. 821-2 du code de la sécurité sociale est abrogé. Le 3° devient le 2°.

IV.  -  Après l'article L. 821-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 821-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 821-3-1.  -  Le montant de l'allocation aux adultes handicapés est fixé par décret.

« Le coefficient annuel de revalorisation de l'allocation est au moins égal à l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation hors tabac prévue dans le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances pour l'année considérée.

« Ce minimum de revalorisation est réajusté si l'évolution constatée des prix à la consommation hors tabac, mentionnée dans le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances pour l'année suivante, est différente de celle qui avait été initialement prévue.

« Le minimum de revalorisation mentionné au deuxième alinéa peut être assuré au moyen de plusieurs révisions du montant de l'allocation dans l'année. »

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Le montant des crédits « Handicap » n'est pas satisfaisant ; la nature des mesures ne l'est pas non plus. Nous reconnaissons vos efforts de revalorisation de l'AAH mais ils ne sont pas aussi importants que vous voudriez nous le faire croire ! La revalorisation est exprimée en euros courants et non en euros constants ! En 2008, l'allocation a augmenté de 5 %, mais l'inflation est de 3 %... Et l'inflation pèse plus lourd, comme l'ont démontré certains experts, sur la consommation d'un ménage à faible revenu. Pour 2009, la prévision d'inflation se situe autour de 2 %, peut-être 2,5 % selon le secrétaire d'État à la consommation, Luc Chatel.

S'agissant de l'insertion professionnelle des personnes handicapées, nous avons de sérieux doutes sur l'orientation de vos mesures. Il n'est guère pertinent de lier attribution de l'AAH et retour à l'emploi. Vous annoncez une forte progression des aides au poste et des aides financières spécifiques pour les entreprises adaptées (EA) : mais elles avaient cette année fortement baissé ! La « subvention spécifique » n'augmente pas. Elle est destinée à soutenir l'accompagnement social et professionnel des travailleurs handicapés et aider l'entreprise adaptée à faire face aux mutations économiques en se modernisant. Dans les circonstances actuelles, ce soutien est indispensable ! (Mme Gisèle Printz applaudit)

L'article 76 est adopté.

Article 76 bis

I.  -  Après le 12° du I de l'article 128 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, il est inséré un 13° ainsi rédigé :

« 13° Politique de l'égalité entre les femmes et les hommes. »

II.  -  L'article 132 de la loi des finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999) est abrogé. 

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - La révision générale des politiques publiques menace l'approche transversale -recommandée par l'Union européenne- en faveur des droits des femmes. Mme Morano souligne que la promotion des droits des femmes est essentiellement interministérielle et elle avait annoncé un document transversal.

La réalité, c'est que le Service des droits des femmes et de l'égalité (SDFE) est abandonné. La révision des politiques s'y applique sans aucun dialogue social. Nous soutenons les syndicats, qui protestent. Au niveau déconcentré, dans les départements, le risque est grand d'une dilution dans les autres missions et d'une suppression des postes. Au niveau central, il en va de même : après la disparition du site internet et du centre de documentation, le service central est directement menacé. Le pilotage de la politique de l'égalité deviendra impossible.

Ces choix ne permettront pas une réelle prise en compte de l'égalité dans toutes les politiques publiques car les missions assurées par le Service seront désormais segmentées, confinées dans des approches thématiques.

Madame la ministre, puisse votre réponse être plus positive que je ne suis fondée à le croire ! (Applaudissements à gauche)

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Madame Borvo Cohen-Seat, je veux vous rassurer sur l'avenir de la politique en faveur des droits des femmes et de l'égalité. Dans le cadre de la RGPP, le Gouvernement, avec le remplacement du Service des droits des femmes et de l'égalité par une délégation interministérielle, cherche à garantir le caractère transversal de cette politique, qui sera matérialisé par son inscription dans un document de politique transversale dès le prochain budget. Ce dernier document sera un outil pour appliquer les orientations définies par l'Union européenne.

S'agissant des territoires, nous avons envoyé une circulaire aux préfets afin que les délégués régionaux aux droits des femmes soient rattachés aux secrétariats généraux pour les affaires régionales.

Mme Christiane Demontès.  - C'était déjà fait !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Non, pas partout. Au reste, cette évolution satisfait une demande venant de tous les bancs. Enfin, pour le niveau départemental, nous cherchons avec les délégués régionaux la bonne solution afin de garantir le caractère interministériel de cette politique.

L'article 76 bis est adopté.

La séance, suspendue à 18 h 5, reprend à 18 h 15.

Outre-mer

M. le président.  - Le Sénat va maintenant examiner les crédits de la mission « Outre-mer ».

Intervention des rapporteurs

M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Mon intervention portera sur les crédits de la mission en général et le programme « Emploi outre-mer » ; M. Doligé, l'autre rapporteur spécial, se chargeant du programme « Conditions de vie outre-mer » et des articles rattachés 64 et 65.

La mission, avec 1,97 milliards en autorisations d'engagement pour 2009, représente moins de 15 % de l'effort budgétaire en faveur de l'outre-mer.

Elle ne donne donc qu'une vision parcellaire de l'effort de l'État en direction de l'outre-mer, qui s'élève au total à 13,3 milliards, auxquels il convient d'ajouter 3,3 milliards de dépenses fiscales, en hausse de 17 % par rapport à 2008. Au regard de cette augmentation incontrôlée, le projet de loi de finances réforme le régime des exonérations de cotisations patronales et plafonne les réductions d'impôt sur le revenu résultant des opérations de défiscalisation en outre-mer, tandis que le projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer (Lodeom) recentre sur le logement social la défiscalisation des investissements en matière de logement.

Au sein du secrétariat d'État, une délégation générale à l'outre-mer a remplacé les deux directions préexistantes afin de réorienter le secrétariat d'État vers des missions de coordination, d'expertise et d'évaluation, comme le souhaitait votre commission. Nous serons attentifs aux effets de cette réorganisation. Il faudrait notamment que le secrétariat d'État dispose d'informations plus complètes et plus fiables sur l'efficacité des nombreux dispositifs spécifiques en faveur de l'outre-mer.

Le budget de la mission « Outre-mer » augmente de 19 % en autorisations d'engagement et de 16 % en crédits de paiement. Les crédits du programme « Emploi outre-mer » augmentent de près de 20 %, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, afin de compenser aux organismes de sécurité sociale les exonérations de charges sociales spécifiques à l'outre-mer. En 2008, seuls 867 millions étaient prévus pour la compensation alors que le coût des exonérations était estimé à plus de 1,15 milliard. La hausse de 16,6 % de ces crédits mettra fin aux sous-budgétisations récurrentes.

Enfin, je salue l'augmentation des crédits en faveur de l'insertion des jeunes éloignés de l'emploi, à travers le projet initiative jeune « Création d'entreprise » et la formation individualisée en mobilité. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Éric Doligé, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Les crédits du programme « Conditions de vie outre-mer » augmentent de 17 % en autorisations d'engagement et de 10 % en crédits de paiement. En matière de logement, le montant des autorisations d'engagement a fortement augmenté, prenant acte des besoins des collectivités d'outre-mer, mais l'écart entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement passe de 36 millions en 2008 à 49 millions en 2009. Cette hausse inquiétante risque de générer des factures impayées et l'accumulation d'une dette auprès des bailleurs sociaux.

La hausse de 13 % des crédits consacrés au financement des opérations contractualisées entre l'État et les collectivités d'outre-mer est très satisfaisante et met fin à la sous-budgétisation récurrente en la matière.

Ce programme met en oeuvre le fonds de continuité territoriale et le passeport mobilité formation, prévus par la Lodeom, afin de mettre fin aux dérives de l'ancien passeport mobilité, dont le coût a triplé entre 2003 et 2008.

Je regrette que l'évolution des dotations spécifiques aux collectivités d'outre-mer manque de clarté. Peu d'informations nous sont fournies, par exemple, sur la dotation globale de développement économique de la Polynésie française, qui représente 151 millions, tandis que d'autres sont manifestement insuffisantes, comme la dotation de premier numérotage de Mayotte, de 150 000 euros.

L'article 64 proroge jusqu'en 2011 deux dotations spécifiques à Mayotte : la dotation exceptionnelle liée à la réforme de l'état civil, de 300 000 euros par an, et la dotation spéciale de construction et d'équipement des établissements scolaires, qui sera abondée à hauteur de 4,5 millions en 2009. Où en est-on de l'instauration d'un état civil ?

L'article 65 réforme le dispositif spécifique d'exonérations de cotisations patronales outre-mer, qui prévoit actuellement une exonération totale pour l'ensemble des salariés, jusqu'à une limite qui varie entre 1,3 et 1,5 Smic selon le degré d'exposition à la concurrence. L'exonération n'étant pas dégressive, les entreprises sont exonérées même pour les salariés les mieux payés. L'article 65 harmonise les plafonds à 1,4 Smic et rend l'exonération dégressive jusqu'à 3,8 Smic afin de concentrer les aides sur les bas salaires. L'exonération sera plus importante pour certains secteurs prioritaires. Enfin, le droit à exonération est conditionné au paiement effectif des cotisations et à l'absence de travail illégal, ce qui avait été supprimé par la loi Girardin de 2003. Au total, c'est une réforme efficace et équilibrée, qui permettra de réaliser une économie de 138 millions sur une année, consacrés au financement des dispositifs prévus par la Lodeom.

La commission des finances vous proposera toutefois un amendement prévoyant que cette réforme n'entrera en vigueur qu'une fois la Lodeom promulguée. Elle vous proposera donc d'adopter les articles 64 et 65, ainsi modifiés, ainsi que des crédits de la mission « Outre-mer ».

M. Georges Patient, en remplacement de M. Claude Lise, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.  - Je vous prie d'excuser M. Lise qui a dû rentrer en Martinique à la suite d'un décès dans sa famille.

Le projet de budget pour l'outre-mer anticipe un certain nombre de mesures prévues par la Lodeom. Il croît à périmètre constant de 9,2 % en crédits de paiement, mais cette augmentation servira, pour l'essentiel, à combler les dettes de l'État auprès des organismes de sécurité sociale et ne financera en aucun cas des dépenses nouvelles.

La présentation des crédits de la mission « Outre-mer » est encore perfectible. Notre commission avait recommandé au Gouvernement d'établir deux documents, l'un récapitulant l'ensemble des crédits destinés aux collectivités d'outre-mer provenant de chaque ministère et des fonds d'intervention européens, l'autre présentant les crédits par collectivité destinataire. A ce jour, nous n'avons rien reçu...

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Le voici ! (M. le ministre brandit un document)

M. Georges Patient, rapporteur pour avis.  - Les collectivités d'outre-mer sont une chance pour la France. Outre la diversité culturelle et la biodiversité, elles lui offrent une présence sur quatre océans et des opportunités d'échanges, notamment économiques, avec de nombreuses régions. Elles doivent toutefois relever d'importants défis.

Les économies ultramarines sont fragilisées par les contraintes d'éloignement, le dynamisme démographique, les pressions migratoires et, surtout, le différentiel de coût du travail avec les pays voisins. Le taux de chômage est plus de deux fois plus élevé qu'en métropole ; dans les seuls DOM, il est de 26 % !

Face à une telle situation, qui risque de s'aggraver sous l'effet de la crise, le dispositif d'exonération de cotisations patronales, instauré en 2000 par la loi d'orientation pour l'outre-mer et amélioré par la loi Girardin en 2003, permet de restaurer la compétitivité du travail. La réforme envisagée par l'article 65 risque non seulement d'alourdir les charges pour nos entreprises mais aussi de créer une trappe à bas salaires en incitant au recrutement de salariés rémunérés à 1,4 Smic, ce qui n'est pas de nature à favoriser les emplois qualifiés pourtant indispensables dans de nombreux secteurs.

Les dépenses fiscales permettent de compenser nos handicaps de compétitivité. Or le Gouvernement s'est engagé dans une vaste réforme des niches fiscales. Même si leur actualisation peut sembler nécessaire, la réforme de la défiscalisation outre-mer prévue par l'article 43 du projet de loi de finances touche trop brutalement à nos territoires. Le plafonnement risque d'y rendre beaucoup moins attractifs les investissements. La défiscalisation outre-mer n'est pas un avantage indu mais un outil indispensable à l'investissement, au développement et à l'emploi dans des territoires structurellement sous-capitalisés.

S'agissant des crédits consacrés aux conditions de vie outre-mer, la priorité reste au logement, du fait de l'insuffisance de l'offre dans le logement social, de l'habitat insalubre, de la prolifération de l'habitat spontané, des risques sismiques et climatiques et de la cherté du foncier. Or, les moyens sont, cette année encore, trop insuffisants. Je regrette, en particulier, la diminution de 40 % de l'effort en faveur de l'accession à la propriété. Je constate également que persiste l'épineux problème de la dette de l'État envers les entreprises du BTP qui oeuvrent dans le domaine de l'amélioration de l'habitat et de la construction très sociale. Cette année encore, le budget fait apparaître un écart de près de 50 millions entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement consacrés au logement.

Les crédits destinés à la coopération régionale sont encore modestes au regard de ce qui pourrait être entrepris.

J'en viens à la création du Fonds exceptionnel d'investissement, destiné à soutenir le développement des infrastructures et des équipements indispensables pour assurer la croissance de nos territoires. Compte tenu des objectifs envisagés, les 16 millions inscrits sont nettement insuffisants.

Les besoins en matière d'emploi et de logement sont encore considérables. L'État ne doit donc pas relâcher son effort en faveur des populations ultramarines. Or les réformes programmées en matière de défiscalisation ou d'exonération de charges sociales constituent de réels sujets de préoccupations. C'est pourquoi le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques n'a pas émis d'avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Outre-mer » ; la commission, en revanche, s'est prononcée en faveur de leur adoption. (Applaudissements à gauche)

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.  - Cette mission démontre que l'engagement financier de l'État en faveur de l'outre-mer est d'autant plus appréciable qu'il intervient dans un contexte budgétaire contraint. Les crédits affectés à cette mission ne représentent cependant qu'une part modeste des 13,2 milliards consacrés par l'État à l'outre-mer, sans compter la dépense fiscale évaluée pour l'année prochaine à 3,3 milliards, en augmentation de 17,4 %.

Cet effort financier intervient alors qu'un nouvel élan doit être donné au développement des territoires ultramarins. Malgré la croissance réelle de leurs économies, la situation reste d'autant plus fragile que la crise mondiale se confirme. Il convient donc de renforcer les outils juridiques et budgétaires pour que l'outre-mer puisse rattraper la métropole en matière d'emploi. Il faut également relancer la politique du logement outre-mer, tant les besoins sont nombreux et insatisfaits malgré tous les dispositifs mis en place.

Vous avez déclaré récemment, monsieur le ministre, vouloir mettre à disposition des collectivités d'outre-mer, pour un euro symbolique, des terrains appartenant à l'État pour la construction de logements sociaux. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Il est enfin nécessaire d'améliorer la santé publique car la situation y est très spécifique et bien moins prise en charge par la collectivité publique. La commission des affaires sociale présentera d'ailleurs trois amendements destinés à limiter l'accès au tabac outre-mer.

Les crédits proposés répondent de façon relativement satisfaisante à ces défis et ils devraient permettre le financement d'un certain nombre de mesures figurant dans le projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer que nous examinerons en début d'année. La compensation aux organismes sociaux des exonérations de charges sociales patronales devrait s'améliorer. Au cours de 2009, celles-ci devraient obéir à deux régimes juridiques successifs : d'abord celui prévu par la loi de programme de 2003 puis celui recentré sur les exonérations de charges prévues à l'article 65 de ce projet de loi de finances, qui devrait entrer en vigueur le 1er avril.

Les crédits destinés à l'insertion et à la qualification professionnelle, qui financent notamment le service militaire adapté, augmentent. Ce dispositif est exemplaire car il réussit à qualifier des jeunes sans diplôme et à en insérer 80 % d'entre eux dans la vie professionnelle. Pourquoi ne pas l'étendre à davantage de volontaires ?

Ce projet de loi de finances prévoit également une augmentation sensible de la dotation de la ligne budgétaire unique. Pourtant, l'objectif de la loi Dalo de construire 37 500 logements sociaux d'ici fin 2009 a été reporté à 2012. Je regrette, à cet égard, l'écart entre le montant des autorisations d'engagement et celui des crédits de paiement, soit 49 millions. Si cet état de fait devait perdurer lors des prochaines lois de finances, nous risquerions d'en revenir à la situation comptable dégradée de 2006.

Enfin, je déplore que la fusion des actions « Sanitaire et sociale » et « Culture, jeunesse et sport » du programme « Conditions de vie outre-mer » se traduise par une baisse de 2,2 millions des mesures sanitaires et sociales, tant cette question est essentielle.

La particularité de la mission « Outre-mer » est qu'elle s'accompagne d'un article rattaché qui modifie le régime d'exonérations de charges sociales patronales qui s'applique dans les quatre Dom et à Saint-Pierre-et-Miquelon depuis 2003. Cet article reprend le dispositif figurant dans le projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer afin de concentrer le dispositif actuel d'exonérations sur les salaires pour lesquels leur impact sera le plus fort. Cette réforme va incontestablement dans le sens d'une meilleure efficacité de la dépense publique. Pour autant, la commission des affaires sociales a adopté deux amendements destinés à renforcer son effet positif sur l'emploi.

Si la qualité de ce budget doit être saluée, ces mesures m'inspirent trois interrogations : la première porte sur la réforme du dispositif de mobilité, notamment celle de l'Agence nationale pour la promotion et l'insertion des travailleurs d'outre-mer. La seconde a trait à la revalorisation des paramètres du financement du logement social outre-mer. La dernière, enfin, tient à la formation des personnels médicaux outre-mer. La Réunion est véritablement sous médicalisée : nous avons un étudiant en médecine pour 24 800 habitants contre un pour 8 700 en métropole. Sans doute certains de ces points feront-ils l'objet de dispositions de la future loi pour le développement économique de l'outre-mer ou la loi « Hôpital, patients, santé, territoires ». Mais ils dépendent également de cette loi de finances. C'est pourquoi je souhaiterais connaître les orientations du Gouvernement, à court et moyen termes.

Ces questions ne font pas obstacle à l'avis favorable de la commission des affaires sociales pour l'adoption des crédits 2009 de la mission « Outre-mer », ainsi que de l'article 65 rattaché, sous réserve de l'adoption des amendements que je vous présenterai tout à l'heure. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Le développement de l'outre-mer est non seulement un devoir de solidarité vis-à-vis de nos compatriotes ultramarins mais également un investissement utile à la France toute entière.

M. Jean-Paul Virapoullé.  - Tout à fait !

M. Christian Cointat, rapporteur pour avis.  - N'oublions pas que 95 % de la surface maritime de notre pays est due à l'outre-mer, ce qui nous place au deuxième rang mondial des puissances maritimes et nous permet d'être présents dans les instances internationales couvrant l'Atlantique, l'océan Indien et le Pacifique, sans compter l'océan Antarctique et d'autres mers du globe.

En dépit d'une conjoncture difficile, l'augmentation de 3,4 % des crédits de la mission doit donc être saluée. Avec 16,5 milliards, les crédits globaux, tous ministères confondus, sont loin d'être négligeables. Toutefois, la mission « Outre-mer » proprement dite se limite à 14 % du financement prévu pour l'outre-mer. De plus, comme les années précédentes, le périmètre de cette mission a été modifié, ce qui rend les analyses et les comparaisons plus difficiles. Il serait temps d'arrêter une bonne fois pour toutes le cadre de cette mission budgétaire, soit en la recentrant clairement et définitivement sur la seule coordination des politiques ultramarines, soit en se tournant, ainsi que le permet la Lolf, vers une mission interministérielle. Certes, les documents de politique transversale sont de mieux en mieux faits mais au pays de Descartes, un minimum de logique et de cohérence s'impose, d'autant plus que de nouvelles modifications du périmètre de cette mission sont annoncées pour l'avenir.

L'effort de l'État pour l'outre-mer s'amplifie donc. On peut s'en féliciter. Encore faut-il veiller à ce qu'il permette de développer les économies ultramarines et le niveau social des territoires concernés. Il est donc essentiel de mesurer régulièrement les effets de chacun des instruments retenus. Cet effort doit également se fonder sur la sincérité des marchés et des coûts de distribution, faute de quoi il perdrait en efficacité pour une charge financière plus élevée, génératrice d'effets d'aubaine.

Aussi nous ne pouvons qu'approuver vos déclarations devant la commission, monsieur le ministre : selon vous, les maîtres mots de votre action seront : «  transparence et concurrence ». Outre-mer, la plupart des prix sont anormalement élevés et ne se justifient ni par le surcoût du transport ni par l'étroitesse du marché. II est donc essentiel de favoriser la vérité des prix pour répondre à l'attente des populations ultramarines et favoriser le développement économique et social de ces territoires. II en est de même pour la continuité territoriale : les tarifs doivent être compétitifs et le nombre de sièges passagers suffisant.

Votre commission a procédé à un tour d'horizon des différents territoires d'outre-mer. Elle regrette ainsi que l'immigration clandestine, malgré les mesures prises, reste aussi préoccupante, notamment en Guyane, en Guadeloupe, à Saint-Martin et à Mayotte. Elle regrette également la dégradation persistante de la situation carcérale avec des taux de surpopulation que l'on n'ose indiquer : 251 % à Saint-Denis de la Réunion et 285 % à la prison Nuutania à Tahiti. La visite de ces établissements est une épreuve mais elle permet de comprendre que seuls le dévouement et le pragmatisme du personnel de la pénitentiaire sont à même d'éviter le pire. Quant aux nouvelles constructions, elles sont souvent dépassées, comme en Martinique, par l'augmentation du nombre de détenus. Votre commission ne cache pas non plus ses préoccupations quant aux conditions auxquelles doit faire face la justice dans les différents territoires, avec parfois un manque crucial de moyens.

La jeunesse mérite toute notre attention et l'outil « enseignement » est fondamental. L'État ne ménage pas son engagement mais la démographie galopante, éventuellement liée à une immigration massive, a raison des efforts d'équipement et de fonctionnement. Tel est le cas, par exemple, à Mayotte où le nombre élevé d'enfants scolarisés est sans commune mesure avec la population de la collectivité.

Votre commission souhaite donc que les financements soient adaptés aux réalités du terrain.

La question du désenclavement de Saint-Pierre-et-Miquelon est liée à un développement de la coopération avec le Canada, ainsi que le préconise notre collègue Detcheverry. Il serait temps que des mesures concrètes d'envergure voient enfin le jour.

Les deux nouvelles collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy prennent leur essor et votre commission se félicite que leurs statuts soient désormais applicables presque en totalité. Elle se félicite également de la poursuite des transferts de compétences en Nouvelle-Calédonie dans le respect des accords de Nouméa mais aussi des positions exprimées par les membres du comité des signataires : sur des sujets aussi sensibles, seul le consensus est gage de succès.

La question des compétences et des moyens des communes de Polynésie est toujours ouverte et mérite des avancées prochaines pour que la réforme statutaire de ce territoire prenne tout son sens.

Votre commission se réjouit de l'inauguration de la piste aérienne de Futuna, qu'elle réclamait sans relâche depuis de longues années afin de permettre un désenclavement de cette île qui est la plus éloignée de la métropole. Elle s'inquiète, cependant, de la baisse démographique qui touche la collectivité de Wallis-et-Futuna, qui est passée en cinq ans de 15 000 à 13 500 habitants. Il y a plus de Wallisiens en Nouvelle-Calédonie qu'à Wallis-et-Futuna !

Enfin, un dernier mot, alors que se termine bientôt l'année polaire internationale, pour me réjouir que Clipperton entre dans la Constitution aux côtés des Terres australes et antarctiques françaises. Tous les territoires de la République sont consacrés par notre loi fondamentale.

Sous ces réserves et observations, votre commission des lois vous invite à approuver ces crédits. (Applaudissements à droite et au centre)

Interventions des orateurs

M. Adrien Giraud.  - La discussion du projet de loi de finances est toujours un moment essentiel du travail législatif, qui engage des choix capitaux pour l'avenir de notre pays. C'est aussi un temps de réflexion et de bilan, qui nous invite tous à réfléchir sur les décisions passées. Pour nous, parlementaires de l'outre-mer français, il s'agit d'un événement fondamental même si le budget du secrétariat d'État ne représente qu'une fraction du total des crédits publics destinés à l'outre-mer français. Le débat budgétaire demeure l'occasion, encore trop rare, d'une réflexion d'ensemble sur la situation financière de nos collectivités et sur leurs priorités.

La départementalisation de Mayotte a cessé d'être un voeu pieux, un appel sans réponse. Après cinquante années, les Mahorais voient enfin consacrée leur volonté de rester français, c'est-à-dire de pouvoir revendiquer pleinement leur attachement aux institutions et aux valeurs fondamentales de notre République ainsi que leur détermination à être reconnus à part entière dans le droit européen.

On nous dit que la départementalisation n'est pas la panacée. Nous le savons mieux que personne mais nous savons aussi que c'est, avec toutes les adaptations requises, la meilleure réponse aux multiples problèmes qui freinent nos progrès. Il ne s'agit pas seulement d'obtenir la départementalisation de Mayotte mais de la réussir en termes d'étapes à franchir, de concours à obtenir, mais aussi d'obstacles à surmonter par nos propres efforts.

La revendication mahoraise, cette longue marche qui remonte aux premiers temps de la Ve République, n'a jamais été aussi proche de son aboutissement. Les Mahorais souhaitent connaître la question qui leur sera posée lors de la consultation prévue en mars 2009. Cette question devra être simple et claire ; ce pourrait être : « Voulez-vous que la collectivité départementale de Mayotte devienne un département d'outre-mer ? »

La départementalisation de Mayotte est une revendication qui date d'un demi-siècle et dont il faut rappeler la portée, qui ne se réduit pas à un simple changement de dénomination. Mayotte devra tout d'abord entrer, progressivement mais pleinement, dans le droit commun. Cela impliquera donc d'y étendre les six domaines où s'applique encore le principe de spécialité législative, même si nous demeurons acquis au principe d'une départementalisation adaptée ce qui, dans notre esprit, ne signifie nullement départementalisation au rabais.

Surtout, il faudra donner à Mayotte les moyens de son développement. Trop longtemps, nous nous sommes heurtés à une curieuse logique qui exigeait que nous ayons rattrapé les autres départements d'outre-mer pour devenir département, alors même que les moyens de ce rattrapage résultent justement du statut départemental. Mayotte devra recevoir une dotation spéciale d'équipement pour combler, au moins partiellement, ses importants retards : c'est seulement par une véritable politique d'investissement que Mayotte progressera sur la voie du développement.

A cet égard, je dois vous signaler qu'une part importante des crédits d'État, prévus dans le cadre du contrat de projet 2008-2014 n'ont toujours pas été délégués. C'est ainsi que sur les 24 millions de crédits publics d'État destinés à la politique du logement, il n'y en a eu que 15 de délégués. De tels retards pèsent lourdement sur les finances de notre collectivité départementale. Nous avons été contraints d'ouvrir un lycée en préfabriqué, alors même que les besoins en constructions scolaires sont connus depuis longtemps ! Comment mener une vraie politique de rattrapage quand les retards dans les paiements de l'État nous contraignent à ouvrir, dans l'urgence, des structures éphémères ?

Si la Guyane a reçu 388 millions d'euros de subventions européennes entre 2000 et 2006, Mayotte, dont le poids démographique est comparable, n'a reçu que 15 millions entre 2004 et 2008, soit 25 fois moins ! Une telle inégalité de traitement confine à l'injustice. Alors que Mayotte présente tous les traits caractéristiques des « régions ultrapériphériques » de l'Union, elle est classée parmi les « pays et territoires d'outre-mer. A ce titre, elle ne reçoit que les fonds européens d'aide au développement, comme les territoires indépendants associés à l'Europe. Il est urgent que nous ayons accès aux fonds structurels, ce qui sera possible avec la départementalisation. Cette décision dépend exclusivement de l'État français ; il ne tient qu'au Gouvernement de faire cesser ce fâcheux paradoxe, qui voit l'Europe aider moins ceux qui ont le plus besoin.

La départementalisation renvoie également aux problèmes de sécurité, résultant d'une immigration étrangère encore trop mal maîtrisée. J'ai déjà maintes fois abordé cette question, liée à l'arrivée massive et parfois dramatique d'immigrés, d'origine comorienne pour la plupart. L'État doit se saisir de ce problème avec la plus grande fermeté. Les patrouilles de la police aux frontières ont déjà été renforcées et un radar supplémentaire a été installé. C'est bien, mais ne nous leurrons pas : tant que la France n'aura pas pris une position ferme vis-à-vis des autorités comoriennes, dans le cadre d'un dialogue d'État à État, et affirmé que le choix des Mahorais ne peut être remis en cause, rien de ce que nous ferons ne pourra suffire.

J'en suis sûr : 2009 devra être, pour les Mahorais, l'année de l'ancrage définitif et volontaire au sein de la République française, celle d'une politique de développement économique et social ambitieuse, celle de la paix retrouvée dans notre environnement régional.

Recevant à l'Élysée les élus d'outre-mer, le Président de la République a affirmé qu'il respecterait la parole donnée à Mayotte. Un tel engagement est pour nous essentiel et, au nom de la population mahoraise, je lui en exprime notre profonde gratitude. C'est dans cette perspective, et en signe de confiance, que je voterai ce budget. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Gélita Hoarau.  - La Réunion est l'un des départements qui connaît la plus forte croissance démographique. Dans une vingtaine d'années, elle atteindra le million d'habitants. Elle est donc au carrefour des chemins.

Si rien ne change, ses difficultés s'aggraveront. Je parle du chômage qui repart à la hausse pour atteindre à nouveau 30 %, des 65 000 Rmistes, des 30 000 demandeurs de logements sociaux, des 120 000 illettrés, des 300 000 personnes relevant de la CMU et, plus généralement, des 52 % de la population qui vivent sous le seuil de pauvreté.

Il faut s'orienter vers des solutions innovantes, en rupture avec celles qui ont prévalu jusqu'à présent et qui ont inspiré tous les plans gouvernementaux avec les résultats que l'on connaît. C'est dans cet esprit que la majorité régionale de la Réunion a élaboré un plan de développement, en concertation avec les partenaires sociaux et les autres collectivités locales.

Ce plan propose des solutions aux problèmes de la Réunion, le chômage, les déplacements, le logement, la protection de l'environnement et de la biodiversité, tout en tenant compte du changement climatique, de la crise énergétique, de la mondialisation des échanges et de l'évolution technologique.

C'est ainsi qu'un programme de grands travaux a été élaboré pour une période allant jusqu'en 2014, portant sur plus de 3 milliards : route des Tamarins, tram-train, nouveau tracé de la route du littoral. Ce programme a fait l'objet d'un accord de principe et de financement en 2007 à Matignon. Ces grands travaux maintiendront en activité des milliers de travailleurs dans le bâtiment et régleront le problème des déplacements à la Réunion et, avec le tram-train, dans le respect de l'environnement.

Le plan régional de développement durable vise aussi l'autonomie énergétique du département en 2025. De ce point de vue, sous l'impulsion de la région, la Réunion se distingue par ses initiatives. Cet objectif, en plus d'offrir une alternative énergétique non polluante et renouvelable aux énergies fossiles, est aussi un gisement d'emplois.

Toutefois, la fin du chantier de la route des Tamarins et l'attente du début des autres grands chantiers font craindre une période de récession. De plus, l'arrêt ou le report de certains travaux ainsi que les interrogations quant au nouveau dispositif de défiscalisation nourrissent les plus vives inquiétudes. Des milliers de travailleurs craignent pour leur emploi, pendant que des dizaines d'entreprises s'inquiètent pour leur survie.

C'est pour ces raisons qu'en octobre dernier, des centaines de patrons ont, pour la première fois, manifesté à la Réunion devant la préfecture pour exprimer leur désarroi. Depuis, la réforme de la défiscalisation a été votée. Ce vote n'a pas pleinement rassuré les chefs d'entreprise qui attendent plus de garanties de la future loi programme.

Pour tenter de maintenir le secteur du BTP à un niveau d'activité plus acceptable, le conseil régional, le conseil général, l'association des maires et les représentants de la Réunion économique se sont réunis en « Comité de suivi » afin d'inventorier les travaux en étude, faire sortir les projets, définir les priorités et accompagner autant que possible leur réalisation. Des engagements ont été pris par tous les partenaires, ce qui devrait éviter toute diminution importante d'activité dans ce secteur. Le préfet de la Réunion a pris une initiative identique en y associant les banquiers. Pour le logement, qui n'est pas moins pourvoyeur d'emplois, l'engagement de l'État, qui en a la compétence, est décisif.

La crise financière et économique exacerbe tous ces problèmes. Il est primordial de maintenir le cap sur les objectifs du plan régional qui porte également sur la recherche et l'innovation dans les domaines aussi variés que l'agriculture, la pêche et la forêt, la santé, les télécommunications, etc. Cette crise fait ressortir plus que jamais l'impérieuse nécessité d'apporter une réponse à ceux qui sont le plus dans l'attente, c'est-à-dire les chômeurs et les demandeurs de logements sociaux.

Pour les premiers, l'entrée en vigueur du RSA doit être l'occasion de satisfaire les besoins de la Réunion, principalement dans les domaines de l'environnement et des services à la personne, et de créer ainsi des dizaines de milliers d'emplois.

La Réunion dispose encore d'une biodiversité unique au monde et l'Union européenne a souligné l'urgence de préserver ce patrimoine gravement menacé. Sa sauvegarde nécessite la création de milliers d'emplois, notamment dans le Parc national de la Réunion et dans le Parc marin. II en est de même pour la collecte, le tri systématique et la valorisation des déchets. Nous proposons de créer dans ce domaine un véritable service public qui mobiliserait des milliers de jeunes qui pourraient prétendre au RSA.

Nous proposons ensuite la création d'un autre service public pour l'aide à la personne. A la Réunion, les offres d'accueil pour les personnes âgées, handicapées ou la petite enfance sont dramatiquement insuffisantes et les besoins en emplois se chiffrent par milliers. Seul un service public permettrait de satisfaire les demandes et de ne laisser personne sur le bord du chemin.

La réalisation de ces deux grands services publics, qui créeraient de manière pérenne plusieurs dizaines de milliers d'emplois, suppose des actions de formation adéquate, une gestion transparente et paritaire de ces services, afin d'éviter ce que le préfet de la Réunion a appelé « les emplois-magouilles ». C'est cela, la rupture avec les pratiques jusqu'ici en vigueur.

Elle nécessite également la mobilisation de tous les outils financiers existants : ceux du RMI, des emplois aidés, des emplois verts, les crédits supplémentaires prévus au RSA, etc. A ces crédits peuvent s'ajouter, pour le service d'aide à la personne, une contribution de la caisse d'allocations familiales, de la caisse de sécurité sociale et, éventuellement, des bénéficiaires de ce service en fonction de leur capacité financière.

La création de ces deux grands services publics est une expérience qui mérite d'être menée à la Réunion, en vertu du droit constitutionnel à l'expérimentation. Elle répond à des besoins urgents de notre population et elle peut atteindre l'objectif que se fixe le Gouvernement : une perspective d'insertion avec un revenu décent pour le plus grand nombre. On peut trouver les moyens de la réaliser, sans un effort financier exorbitant de l'État, même s'il doit être raisonnablement sollicité, puisqu'il s'agirait surtout d'un redéploiement des fonds déjà existants.

L'état d'urgence dans lequel se trouve l'emploi à la Réunion ne nous permet pas d'attendre 2011, comme le prévoit l'article 15 de la loi sur le RSA. Expérimentons dès maintenant cette création de ces deux services publics. Accepteriez-vous que nous introduisions cette demande lors de la discussion sur la loi programme outre-mer ? Il n'y a pas d'autres solutions si l'on veut éviter la catastrophe.

Sur le logement social, monsieur le secrétaire d'État, votre budget ne peut faire face aux besoins des Réunionnais. Il comportera 258 millions en autorisations d'engagement et 209 en crédits de paiement. Ces chiffres, supérieurs à ceux de 2008, sont inférieurs au montant moyen de la période 2005-2007, qui est de 270 millions. En outre les promoteurs sociaux éprouvent des difficultés à utiliser ces crédits. L'augmentation des coûts de production et les nouvelles exigences réglementaires créent un écart de l'ordre de 30 % entre les paramètres financiers de la ligne budgétaire unique et les coûts réels de production. Avec un même budget, on finance de moins en moins de logements. Nous sommes aujourd'hui à une moyenne de 2 800 logements par an, y compris le locatif social et très social, contre 5 000 auparavant. Vous êtes en train de réévaluer ces paramètres financiers : vos propositions sont, certes, des améliorations mais elles ne répondent pas suffisamment aux attentes de la profession.

L'État a signé avec les 24 communes des contrats d'objectifs fonciers qui fixent des perspectives de construction de logements sociaux. Ce projet de budget 2009 est présenté dans le cadre d'une programmation triennale 2009-2011. Nous ne voyons pas, dans les chiffres annoncés, les moyens de répondre aux ambitions fixées par ces contrats d'objectifs.

Monsieur le secrétaire d'État, votre budget sera voté avant celui de la loi programme. C'est en quelque sorte un budget sous embargo, puisque la plupart des dispositions qu'il doit financer, c'est-à-dire le fonds exceptionnel d'investissement, les aides à la mobilité, la continuité territoriale, le nouveau système d'exonérations de charges, le nouveau dispositif de défiscalisation, etc., seront applicables après le vote de la loi programme. Autrement dit, elles entreront en vigueur avec trois, voire six mois de retard. Cette discussion sur le projet de loi de finances pour 2009 ne donne, au mieux, qu'un avant-goût du futur débat auquel nous ajouterons, notamment, les préoccupations de nos producteurs vis-à-vis de l'entrée en vigueur des accords de partenariat économique l'année prochaine et celles des agriculteurs à propos de la fin des accords sucriers européens en 2014. Quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre face à ces nouvelles menaces ? (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG)

Mme Lucette Michaux-Chevry.  - A partir de 2009, le contenu de la mission « Outre-mer » traduit un changement de la politique gouvernementale dans nos régions. La programmation des dépenses publiques est désormais pluriannuelle grâce à la réorganisation de l'administration chargée de l'outre-mer et elle vise le développement des secteurs les plus dynamiques et l'affirmation économique dans l'environnent régional. La nouvelle délégation se voit confier un rôle de conception et de coordination de l'action de l'État envers les collectivités territoriales de l'outre-mer. L'objectif est de faire du secrétariat d'État une administration non de gestion mais d'expertise et d'évaluation.

Dans l'actuel contexte budgétaire, l'effort financier de l'État en faveur de l'outre-mer est significatif. L'emploi outre-mer est un problème permanent et, depuis des années, le budget s'efforce de lutter contre les handicaps structurels de nos régions. Cette année encore, je note l'effort fait au programme « Emploi outre-mer » avec, d'une part, l'abaissement du coût du travail par des exonérations de charges sociales et, d'autre part, l'instauration et la pérennisation de dispositifs encourageant la formation professionnelle. L'exonération de charges sociales favorisera la production de biens et de services et elle créera des emplois. L'action « Soutien aux entreprises » voit sa dotation augmenter de 21 %, ce qui résulte notamment d'une aide publique nouvelle aux entreprises au titre de l'aide au fret.

Le programme « Emploi outre-mer », avec une hausse des crédits du soutien aux entreprises, doit faciliter la création d'emplois et l'accès au monde du travail, dans des régions ultramarines marquées par un taux de chômage toujours plus élevé qu'en métropole : 22 % pour la Guadeloupe, où il touche surtout les jeunes et résulte de l'aménagement inéquitable du territoire, s'agissant de Basse-Terre. Le chômage frappe tous les jeunes, tant ceux qui ont reçu une formation que ceux qui sont en échec scolaire. Tous rentrent, hélas, dans le cycle de l'assistanat qui prédomine dans la région de Basse-Terre, totalement appauvrie.

Ces jeunes se marginalisent car ils s'estiment de plus en plus exclus de toute possibilité de travail et ils ne trouvent refuge que dans la rue, avec son cortège de dérives.

Malgré les efforts, la petite délinquance reste très présente et l'on voit des jeunes désoeuvrés qui déambulent en groupes, fouillent les poubelles devant les supermarchés pour récupérer de la nourriture. Que sont devenus les objectifs de la départementalisation ? Dans ma ville de Basse-Terre, on voit ces jeunes au mode de vie différent, qui refusent de s'insérer. J'espère que les effets positifs de l'action « Aide à l'insertion et à la qualification professionnelle » se feront rapidement sentir. Je crois à l'efficacité du service militaire adapté (SMA), qui reste un moyen indispensable de resocialisation.

Le manque de développement de la région de Basse-Terre explique le chômage qui y règne et l'exode d'une partie de la population vers le centre urbain Pointe-à-Pitre, les Abymes, Gosier, Baie-Mahault, qui bénéficie d'importants financements de l'État -au détriment d'autres territoires. Y sont concentrées les infrastructures, le port, l'aéroport, une importante zone économique. Quid de la Guadeloupe profonde et des zones rurales, qui sont en voie de dévitalisation ? Ma ville de Basse-Terre voit disparaître des pans entiers de son économie avec la perte des administrations ; la douane s'en va, La Poste réduit ses activités, l'offre judiciaire se restreint. S'il est indispensable que Saint-Martin et Saint-Barthélemy disposent d'une administration judiciaire, la compétence administrative du tribunal administratif aurait pu être préservée.

Aucun projet structurant ne s'appuie en outre sur la vitalité du port de Basse-Terre, qu'on laisse complètement à l'abandon. J'en viens à me demander s'il est bien nécessaire de tant batailler pour que Basse-Terre soit membre du port autonome de la Guadeloupe ; le dossier est pendant depuis 1995... Dans le cadre du nouveau contrat de plan, l'État doit jouer un rôle d'arbitre pour impulser une autre politique au bénéfice de Basse-Terre autour de l'emblématique Fort Delgrès. Pointe-à-Pitre capitale économique, Basse-Terre capitale administrative et culturelle, voilà qui rééquilibrerait le territoire en tenant compte de la réalité géographique et historique de la Guadeloupe.

J'en viens au programme « Conditions de vie outre-mer ». Je note qu'un effort important est fait pour le logement, particulièrement pour le logement social ; il doit être soutenu car les besoins sont considérables. Mais l'aspect financier des choses n'est pas tout. Il faut veiller au respect de l'architecture traditionnelle car notre modèle antillais disparaît ! J'ose le dire : moins de logements sociaux, mais mieux ! Nous en avons assez de ces blocs sans âme où la vie devient insupportable parce que les jeunes ne peuvent s'amuser que dans les cages d'escalier, parce que les aménagements extérieurs sont médiocres, parce que les espaces de convivialité n'existent plus, parce que les espaces verts sont réduits au strict minimum ! Veut-on continuer à défigurer les paysages de la Guadeloupe ?

La construction de logements sociaux doit en outre prendre en compte la gestion des problèmes liés à la pénurie en eau potable et en assainissement. Il est inadmissible que la Guadeloupe, autrefois dite « l'île aux belles eaux », connaisse de telles difficultés ! Certes la collectivité régionale aurait pu apporter son soutien financier aux investissements nécessaires, mais elle ne le fait qu'en fonction, disons, de certaines connotations... La région de Basse-Terre, la plus pluvieuse, est complètement oubliée.

Si le Gouvernement a mis en place des dispositifs utiles pour résorber les « dents creuses », je m'inquiète de la situation des vieilles maisons coloniales qui perdent peu à peu leur charme parce que leurs propriétaires âgés n'ont plus les moyens de les entretenir.

La création du fonds exceptionnel d'investissement prévu par le projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer est une excellente idée ; ce fonds permettra à l'État de veiller à l'équité du développement entre les territoires. Je me félicite qu'il soit doté dès la première année de 40 millions en autorisations d'engagement et de 16 millions en crédits de paiement.

Les modifications apportées au passeport mobilité ont créé quelques secousses ; elles répondent à plus de justice et mettent fin à la politique démagogique de certaines collectivités.

Le dossier de la défiscalisation a donné lieu à nombre d'interventions peu compréhensibles et plutôt contradictoires de la part de ceux qui prétendent défendre les défavorisés. Le Gouvernement a défini une politique plus démocratique et plus territorialisée ; on s'était en effet aperçu que les plus malins cumulaient les défiscalisations au point de ne plus payer l'impôt. Et on voyait des gens venus d'ailleurs, qui ne savaient même pas où était la Guadeloupe, construire chez nous au détriment de nos enfants et petits-enfants qui ne trouvaient plus de terrain. Le Gouvernement a fait preuve de courage.

Il a la volonté de permettre à l'outre-mer de se moderniser par l'excellence et la performance, de permettre aux élus de prendre leurs responsabilités pour faire face aux grands défis de notre société et donner à nos territoires leur place dans leurs espaces régionaux respectifs. Je voterai les crédits de la mission. (Applaudissements à droite)

M. Daniel Marsin.  - Le vote des crédits de cette mission est chaque année l'occasion de rappeler que l'outre-mer n'est pas un boulet pour la France mais un atout précieux grâce à sa diversité culturelle, son potentiel de ressources naturelles, son environnement et les opportunités qu'il offre au plan géostratégique.

Monsieur le ministre, vous avez su, dès votre prise de fonction, reprendre les dossiers importants, y compris celui des mesures d'urgence qu'impose une crise dont les effets peuvent être encore plus dévastateurs outre-mer qu'en métropole.

A périmètre constant, les autorisations d'engagement sont en hausse de 19,2 %, à 1,97 milliard, et les crédits de paiement de 16 %, à 1,88 milliard. L'effort est appréciable, sachant qu'il ne retrace pas entièrement l'effort global de l'État en faveur de l'outre-mer, qui s'établit à 13,4 milliards d'euros en 2009 -en petite augmentation de 1 %. Si l'on prend toutefois en compte les 3,3 milliards d'exonérations fiscales par rapport aux 2,8 de 2008, la hausse globale est de 6 %, ce qui est significatif.

Je prends acte de votre volonté de rationaliser les politiques publiques. On ne peut que souhaiter que la révision générale des politiques publiques, qui a déjà conduit à la mise en place de la délégation générale, ne compromette pas l'efficacité de l'action de l'État.

J'en viens au contenu de la mission. Les ajustements de périmètre, pour judicieux qu'ils soient, rendent difficile l'appréciation de l'évolution des crédits. Nous espérons que ce périmètre finira par se stabiliser. Le programme « Emploi outre-mer », qui représente 63,4 % de l'ensemble progresse de 19,42 % en crédits de paiement et de 20,26 % en autorisations d'engagement. Je m'en félicite. Les crédits de l'action « Soutien aux entreprises » augmentent de plus de 21,1 % ; il faut noter l'abondement opportun d'une ligne de crédit de soutien au fret.

En matière d'exonérations de charges sociales, quelques interrogations subsistent. Je regrette que le vote de l'article 65 intervienne avant l'examen du projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer et je vous soumettrai deux amendements, l'un pour conditionner l'application de l'article à l'entrée en vigueur de la future loi, l'autre pour prendre en compte l'existence de zones franches urbaines outre-mer.

Je m'inquiète des butoirs et des paliers retenus pour les exonérations de charges sociales : l'emploi qualifié risque d'en souffrir, alors que nous voulons promouvoir les secteurs à forte valeur ajoutée, comme les nouvelles technologies, l'environnement,...

Les petits entrepreneurs ultramarins, jusqu'alors, bénéficiaient de la défiscalisation dite « en interne », pour autofinancer leurs investissements et assurer leur trésorerie en refinançant leurs créances sur l'État. Cette disposition est-elle remise en cause ? Les crédits de l'insertion et la qualification professionnelle augmentent de près de 9 %, essentiellement pour financer le SMA, un véritable succès ! Mais les aides à la qualification ou à la formation me semblent bien en deçà des énormes besoins. Y aura-t-il un délai de mise en oeuvre du RSA outre-mer ? Monsieur le ministre, rassurez-nous, laissez les départements se préparer !

Le programme « Conditions de vie outre-mer », près de 40 % des crédits de la mission, connaît une hausse substantielle. Je m'en réjouis. Les crédits du logement progressent légèrement mais les dotations ne suffiront pas à éponger entièrement la dette de l'État envers les bailleurs sociaux, alors que ceux-ci ont à envisager d'importants programmes de construction -dont nous espérons beaucoup pour l'activité économique et pour l'emploi. J'ajoute que les paramètres retenus pour le financement du logement social, figés depuis longtemps, ne sont plus en phase avec la réalité des coûts de production.

La création du fonds exceptionnel d'investissement est une excellente chose : il y a tant à faire en matière d'équipements publics ! Mais les 16 millions d'euros paraissent bien modestes en regard des énormes besoins. Les demandes afflueront. Peut-on espérer un abondement en cours d'année ? Enfin, les crédits de la continuité territoriale baissent légèrement. Nous sommes pourtant très attachés à ce principe fondamental. Le passeport mobilité et les actions du « Projet initiative jeunes » sont essentiels pour les étudiants et les jeunes en parcours d'insertion. Et quid des tarifs aériens low cost ? Le quasi-monopole d'Air France va-t-il prendre fin ? Si les négociations échouaient, ne serait-il pas judicieux d'envisager des « tarifs résidents », comme en Corse ?

Dans le dossier de la pollution des sols par le chlordécone, le Gouvernement a promis la transparence -je songe aux risques pour l'agriculture et la santé- et un soutien pour rétablir l'image de la Martinique, de la Guadeloupe. Où en est-on ?

Faire de l'outre-mer un pôle d'excellence et de croissance économique, c'est une mission difficile, mais pas impossible. Je vous y encouragerai en votant votre premier budget, qui s'inscrit dans une programmation pluriannuelle plutôt rassurante. Mais j'attends avec impatience vos réponses ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Gaston Flosse.  - J'ai été très intéressé par la présentation d'un budget pour l'outre-mer en forte augmentation. J'apprécie le message ainsi adressé aux Français ultramarins : dans la conjoncture économique et financière difficile, le gouvernement de la République veut leur montrer qu'ils sont une véritable priorité. L'effort en leur faveur augmente de plus de 9 % ! J'ai eu envie d'applaudir vigoureusement -et j'aurais dû le faire immédiatement, avant de réfléchir, avant de lire le texte. Parce qu'après, plus question de battre des mains : ce sont les dents qui grincent sourdement d'amertume et d'impuissante colère ! Ce budget n'est qu'une opération de communication visant à masquer le recul des engagements de l'État. Ceux qui ont lu, comme moi, le compte rendu des débats à l'Assemblée nationale savent que les députés n'ont pas été dupes des artifices de présentation. Les sénateurs ne seront pas plus naïfs. Notre rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, malgré sa grande mansuétude, avoue qu'il« ne peut passer sous silence le fait que la progression affichée ne correspond pas à la réalité », parce que les crédits servent à combler les dettes de l'État ! L'augmentation affichée de 9 % n'a aucune signification.

En Polynésie française, les pensions des retraités constituent un soutien très important à l'économie. La réduction drastique de cette ressource est une perte considérable, qu'une hausse de 9 % ne compensera bien sûr pas. L'argent sera-t-il réinvesti chez nous ? Pas du tout ! L'Assemblée nationale, sous la pression de Bercy, a déjà transféré 10 millions d'euros ainsi économisés vers une autre ligne. Je le répète, la présentation du budget n'est pas sincère, la hausse des crédits est artificielle.

Les dépenses pour l'outre-mer incluent les pertes de recettes liées à la défiscalisation. Mais le niveau de ces dernières est calculé sur la base de 2008, sans prendre en compte les restrictions qui seront adoptées la semaine prochaine et qui seront en vigueur en 2009 ! C'est nous tromper que prévoir une forte progression des sommes défiscalisées au moment même où l'avantage est plafonné...

Une part importante des dépenses affichées est constituée par le paiement de dettes de l'État, notamment aux organismes de sécurité sociale. Ce sont des dépenses déjà affichées dans les budgets précédents et qui n'ont pas été honorées : on nous les sert aujourd'hui comme une preuve de l'effort de l'État à notre endroit !

Ces constats seuls suffiraient à justifier ma décision de voter contre ce budget. Mais je dois évoquer aussi des problèmes spécifiques à la Polynésie française : elle est touchée comme les autres par le plafonnement de la défiscalisation et plus que les autres par la suppression de l'indemnité temporaire de retraite (ITR). A quoi s'ajoute le désengagement de l'État. La Polynésie française n'a jamais bénéficié du RMI ni des bourses scolaires. Elle a construit son propre système de protection sociale. Pendant quinze ans, l'État a participé à l'équilibre de notre régime de solidarité envers les personnes sans ressources : cette aide est désormais supprimée. L'État devait nous aider à achever la construction d'un hôpital indispensable : cette aide nous est désormais refusée. Le ministère de la défense ne se faisait pas prier pour s'installer chez nous pendant les essais nucléaires : il nous considère aujourd'hui comme dépourvus d'intérêt pour la défense nationale. Les effectifs militaires sont réduits et nombre de civils polynésiens perdent leur emploi. Le commandement supérieur des forces armées du Pacifique est transféré à Nouméa ; la Polynésie n'est plus un enjeu stratégique.

Et indéfiniment, on repousse la reconstruction de la prison qui détient pourtant le triste record de France de la surpopulation carcérale. Dans les archipels les plus éloignés, les Australes et les Marquises, les gendarmeries, celle de Raivavae, celle de Rimatara ou d'autres, sont fermées alors que la délinquance est en nette progression et que, dans ces îles éloignées, les plantations de pakalolo, c'est-à-dire de cannabis, gagnent de la surface ? Allez-vous fermer ces brigades ?

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Non !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.  - La décision n'est pas encore prise !

M. Gaston Flosse.  - Partout, l'on constate le désengagement de l'État, les faits sont là. (On le nie au banc du Gouvernement)

Soyons juste : il est un domaine où l'État se montre plus présent, celui des conseils, des remontrances, des leçons... (Exclamations aux bancs de la commission et du Gouvernement) On nous impose un observatoire des prix qui relève des compétences du pays, on nous dit ce que nous devons faire, pour qui nous devons voter (même mouvement) ; le tout au nom de la stabilité. Le plus triste, c'est que la Polynésie française, plus que les autres collectivités d'outre-mer, aurait les moyens de résister à ces ingérences. Malheureusement, son président actuel est totalement soumis à l'État central. En tant que sénateur, je ne peux m'opposer à cette politique, mais je dois la vérité aux Polynésiens. Inutile de gémir sur notre sort, nous devons apprendre à nous débrouiller seuls, nous devons mobiliser toutes nos énergies pour que la Polynésie française devienne véritablement autonome, nous devons prendre nos responsabilités. La France a-t-elle conscience de ce qu'elle nous doit ? A-t-elle conscience de tout ce que nous lui avons apporté ? Grâce à nous, elle est plus grande, plus indépendante et plus belle. Faut-il croire que la France ne veut plus de nous tels que nous sommes ? Il est vrai que l'outre-mer est passé de mode à Paris. (M. Yves Jégo, secrétaire d'État, s'exclame) On nous exhorte à devenir des bons métropolitains sans quoi nous sortirons de la République. Mais nous ne voulons pas renoncer à notre langue, à notre culture...

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.  - Personne ne nous le demande !

M. Gaston Flosse.  - Les déclarations apaisantes du Gouvernement et du ministre de l'outre-mer, que j'ai bien notées, ne peuvent nous rassurer devant l'étendue du désengagement de l'État.

Peut-être nous trompons nous. Ce serait tant mieux car les Polynésiens, pour la plupart d'entre eux, même s'ils sont, hélas, moins nombreux, restent très attachés à la France. Toute ma vie, je me suis battu pour arrimer la Polynésie à la France. Aujourd'hui, je doute non du désir des Polynésiens mais de celui de la France. Si la France ne veut plus de nous, qu'on nous le dise clairement. Même si le pire n'est jamais certain, mieux vaut se poser la question. Les Polynésiens doivent-ils se préparer à assumer seuls leur destin de peuple ? Le pacte qui nous lie à la France a toujours été librement consenti et voulu. Nous ne nous résignerons jamais à l'indifférence et à l'oubli (marques d'agacement à gauche) car ce n'est pas l'idée que nous avons de la France. Je mesure la gravité de la question que je pose devant vous et les Polynésiens. Je sais qu'elle me vaudra des mesures de rétorsion, mais je l'assume car j'aime la Polynésie française comme j'aime la France !

Parce que ce budget confirme mes craintes, je voterai sans hésitation contre !

M. Bernard Frimat.  - Après M. Patient, je veux excuser l'absence de M. Lise, contraint de nous quitter précipitamment mardi dernier en raison d'un décès dans sa proche famille. Il m'a fait l'honneur de me confier la charge non de le remplacer, car cela est impossible, mais de vous faire part de ses observations sur le budget de l'outre-mer.

Depuis quelques années, le périmètre du budget « Outre-mer » varie au gré d'incessants transferts de crédits pour mieux afficher des taux de progression enviables, signe de la priorité que la France accorderait à ses territoires ultra-marins. En réalité, à périmètre constant, ce budget augmente de 9,2 %, voire de seulement 0,3 % si l'on exclut l'abondement du programme « Emploi outre-mer » destiné à une plus juste compensation par l'État des exonérations de cotisations patronales. Que ce budget ne soit pas en hausse n'a rien de regrettable. En revanche, pourquoi chercher à répandre dans l'opinion publique l'idée que le budget de l'outre-mer bénéficierait d'une hausse de ses moyens de 16 % dans un contexte budgétaire particulièrement contraint ? De surcroît, le budget de la mission « Outre-mer » représente à peine 14 % de l'effort global de l'État en faveur de l'outre-mer ; effort global qui augmente de 2 %, soit une hausse comparable à celle du budget de l'État.

En outre, on peut s'inquiéter de ce que ce budget restreint soit présenté comme le support financier essentiel du projet de loi sur le développement économique de l'outre-mer, hors mesures fiscales. Cela confirmerait les craintes des élus ultra-marins, d'autant que l'augmentation des dépenses fiscales -on prévoit une hausse de 500 millions dans ce budget pour 2009- dépendra de la réforme du dispositif de défiscalisation, adoptée par l'Assemblée nationale. Malgré son juste objectif, on peut craindre que la réforme n'amoindrisse l'attractivité d'un dispositif dont l'utilité est reconnue.

Toutefois, il faut tenir compte des engagements triennaux d'augmenter les crédits de cette mission de 11,5 % d'ici 2011. Malheureusement, ces engagements, qui sont pris au conditionnel, ne permettront pas de faire face à la crise qui affectera durement en 2009 les économies de l'outre-mer qui, malgré le dynamisme de leurs acteurs, restent structurellement fragiles. Ainsi, le département de Martinique, présidé par M. Lise, n'a pas fini de panser les plaies du cyclone Dean et du séisme de novembre 2007 que l'on enregistre un fléchissement de l'activité dans les secteurs du BTP, du tourisme et de l'hôtellerie, un recul de l'investissement et une baisse des importations de biens d'équipement depuis le début de l'année. Résultat : d'octobre 2007 à octobre 2008, le nombre de demandeurs d'emploi a augmenté de 3,5 % alors qu'il était en baisse depuis 2000. Encore faut-il tenir compte de la situation des collectivités territoriales de la Martinique, qui, comme toutes celles de l'outre-mer, sont particulièrement pénalisés par des transferts de compétences mal compensés, des modalités de calcul des dotations inadaptées, sans compter que l'État n'honore pas ses dettes pour des montants insupportables. Ces collectivités, face à une demande sociale croissante, n'auront d'autre choix que de réduire leurs dépenses d'investissement et d'équipement, pourtant nécessaires au développement de l'île. Pour parer à cette inévitable dégradation, M. Lise observe qu'il aurait fallu redonner aux collectivités ultra-marines leurs moyens d'intervention, mais ce budget ne comporte nulle trace de ces indispensables mesures de soutien. Il était également essentiel de relancer la politique des emplois aidés, mais les crédits qui y sont consacrés dans la mission « Travail et emploi » diminuent de 74 % en autorisations d'engagement et de 38 % en crédits de paiement. Enfin, il aurait fallu soutenir l'activité des entreprises du BTP oeuvrant dans le secteur de l'amélioration de l'habitat et de la construction de logements sociaux, ce qui supposait que l'État apure sa dette envers les organismes de sécurité sociale sans utiliser les crédits destinés à cette action.

On peut également vivement regretter que le débat à venir sur la loi pour le développement économique de l'outre-mer soit réduit à un exercice formel, puisque tout se joue dans ce projet de loi de finances. Encore une fois, Bercy n'a pas pris la mesure des enjeux, les attentes des populations d'outre-mer seront déçues et les économies réalisées aujourd'hui paraîtront dérisoires au regard des conséquences d'une telle politique ! (Applaudissements à gauche)

La séance est suspendue à 20 heures.

présidence de M. Guy Fischer,vice-président

La séance reprend à 22 h 5.

M. Jean-Paul Virapoullé.  - Je tiens d'abord à remercier chaleureusement le Président de la République qui, à l'heure où la France, l'Europe et le monde traversent une grave crise financière et économique, a su présider avec intelligence et pertinence aux destinées de l'Europe. Il a remis tout le monde à sa place : les experts, qui se sont trompés et nous ont trompés -Mme Merkel le reconnaît elle-même d'après Le Figaro de ce matin- mais aussi les banquiers spéculateurs à qui il a enjoint de faire leur métier, c'est-à-dire d'investir dans l'économie réelle et non pas virtuelle. Espérons que le pouvoir démocratique retrouvera en avril le rôle qui est le sien, à savoir de créer les conditions d'une mondialisation loyale et d'une économie de marché régulée.

C'est dans ce contexte que nous sommes appelés à nous prononcer sur la mission « Outre-mer ».

Depuis que j'ai été élu député en 1986, j'ai eu l'occasion d'assister à de nombreuses discussions budgétaires. Voici ce que j'ai constaté : selon que l'on appartient à la majorité ou à l'opposition, on vote pour ou contre des budgets à peu près équivalents.

La France de droite, du centre ou de gauche n'a pas à rougir de son oeuvre outre-mer, ni les habitants des territoires ultramarins de l'utilisation des crédits provenant de la solidarité nationale et européenne. Certes, il y a encore 30 % d'échec scolaire, une jeunesse désabusée, une carence de logements. Mais comparons avec les autres îles et pays des Caraïbes, de l'Océan indien et d'ailleurs, en proie au désespoir ! L'appartenance à l'ensemble national et européen est un facteur de progrès dans les domaines de la santé, de l'éducation, du logement et de l'équipement. (Applaudissements à droite)

M. Charles Revet.  - C'est vrai !

M. Christian Cointat.  - Très bien !

M. Jean-Paul Virapoullé.  - Merci la France et merci l'Europe !

Merci aussi à M. le ministre, qui a bien travaillé dans un contexte difficile. Peut-être ne devrais-je pas le dire : il pourrait s'endormir sur ses lauriers... (Sourires) Les réformes envisagées s'articulent autour de trois axes : le présent budget, le projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer (Lodeom) et un projet stratégique de croissance qui nous paraît satisfaisant, même si nous l'amenderons.

Il faut changer le regard de la France sur l'outre-mer, et le regard de l'outre-mer sur la France. La période de rattrapage entamée en 1946 est presque terminée. Un long chemin a été accompli. A présent, il nous faut tirer parti de nos atouts endogènes et des capacités scientifiques et technologiques de la France et de l'Europe pour franchir une nouvelle étape sur la voie de la croissance.

Je veux dire au Gouvernement : banco ! Oui, nous sommes prêts à adhérer à votre projet stratégique de croissance, si c'est un jeu gagnant-gagnant. Mais je veux dire aussi à la représentation nationale : prenez conscience de ce que représente l'outre-mer pour la France et pour l'Europe ! L'avenir passe par la maîtrise de la mer, la conquête spatiale, l'exploitation et la préservation des forêts, les énergies renouvelables. Dans tous ces domaines, l'outre-mer offre à l'Europe des atouts extraordinaires. La mer constitue un espace stratégique indispensable et offre des ressources précieuses à notre industrie ; la seule station de lancement de fusées spatiales de l'Union européenne est en Guyane.

Si j'avais un conseil à formuler sur le projet stratégique, ce serait de lui donner une dimension européenne. De l'audace ! Dans le domaine de la santé par exemple, qu'est-ce qui empêche l'Europe de créer un CHU tripolaire, comme le disaient MM. Hyest et Gélard. Qu'est-ce qui empêche l'Europe de créer une université basée dans l'Océan indien, à la Réunion, à l'île Maurice, à Madagascar, aux Comores ? Un tel établissement serait la vitrine des capacités scientifiques de l'Europe et de la France. Sa création serait un acte de solidarité avec les pays qui nous entourent, et un moyen de créer une recherche puissante dans la région.

La Russie produit des lanceurs de satellites moins chers que les nôtres. Pourquoi l'Europe et la Guyane ne collaboreraient-elles pas pour créer, autour de Kourou, une zone d'activité économique dédiée à la conquête spatiale, en usant d'incitations fiscales et de moyens suffisants ?

Nous ne quémandons pas, nous ne tendons pas la main : nous avons les manches retroussées. Nous voulons prendre notre place dans la compétition internationale grâce à notre expérience, à notre travail, à notre culture, à nos savoirs et à notre savoir-faire. Ne soyons pas frileux, lorsque nous avons la chance d'appartenir à une communauté aussi puissante que l'Europe ! L'outre-mer doit en finir avec un modèle de développement fermé sur lui-même et entrer enfin dans la compétition mondiale par la grande porte des exportations.

Je vous ai déjà interrogé, monsieur le ministre, sur la taxe de 1,1 % destinée au financement du RSA. Je vous suggérerai à présent de prendre, dans le cadre du futur plan de relance, une mesure qui soutiendrait l'économie agricole de la Guadeloupe et de la Réunion : l'énergie électrique produite à partir de la biomasse de la canne doit être valorisée à son juste prix. Le dossier a déjà été transmis à M. Borloo, et je compte sur votre soutien. D'une pierre vous ferez ainsi trois coups : vous aiderez au développement des énergies renouvelables à la Réunion et à la Guadeloupe, vous sauverez la canne et vous permettrez à ces territoires de traverser sans trop de mal une période de crise, tout en leur ouvrant des perspectives heureuses.

L'outre-mer est une partie intégrante de la République.

Nous avons des atouts à la disposition de la communauté nationale et européenne. N'ayez pas peur en pensant aux dépenses : les investissements préparent l'avenir de l'outre-mer, de la France et de l'Europe. (Applaudissements chaleureux à droite et au centre)

M. Serge Larcher.  - J'ai déjà eu l'occasion de dire qu'il était impossible de mesurer les conséquences de la crise. J'éviterai donc les comptes d'apothicaire : si vous les torturez assez, les chiffres, comme les gens, finissent par dire n'importe quoi. (Sourires) Je serai donc constructif, mais sans taire les insuffisances d'un budget qui anticipe une Lodeom maintes fois repoussée. Ses crédits sont en sensible augmentation : 1,8 milliard contre 1,62 en crédits de paiement, fort bien, mais seulement 11,4 % de l'effort global en faveur de l'outre-mer estimé à 16,5 milliards avec la dépense fiscale. Cette évolution résulte essentiellement de transferts liés aux contrats entre l'État et les collectivités territoriales et du début d'une tentative d'apurement de la dette envers les organismes de sécurité sociale mais la dotation, apparemment significative, reste insuffisante par rapport aux besoins réels de compensation et l'endettement se creusera de 76 millions.

Le soutien aux entreprises par le fret vise à abaisser le coût des matières premières ; cependant, cette aide se substitue à un dispositif plus avantageux, la TVA non perçue et récupérable. Saluons le fonds exceptionnel d'investissement et regrettons l'insuffisance notoire de ses crédits : 16 millions en crédits de paiement et 40 millions en autorisations d'engagement. Les besoins sont massifs... Avouerai-je mon scepticisme sur son financement ? D'après les documents budgétaires, il proviendrait d'un redéploiement de l'économie dégagée par la réforme de l'ITR. Or, lors du vote de la mission « Enseignement scolaire » à l'Assemblée nationale, un amendement, accepté par le Gouvernement, a réaffecté 10 millions aux dépenses pédagogiques et, le 30 novembre, vous annonciez sur l'antenne de RFO un prélèvement de 10 millions pour la Guyane : 10 millions plus 10 millions, voilà 20 millions pour 16 millions disponibles. (M. le secrétaire d'État marque son désaccord) Cela ne se peut et j'attends avec impatience vos explications.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Vous en avez besoin : vous mélangez les torchons et les serviettes !

M. Serge Larcher.  - Je ne vous ai rien dit quand ne m'écoutiez pas mais je vous prie de respecter les élus du peuple français ! (Applaudissements à gauche)

Je vous répète mon inquiétude grandissante car j'entends la grogne des élus qui voient, au fil des ans, se réduire leur marge budgétaire, se tarir les compensations et les financements. Le recul de l'activité économique dû à la crise n'annonce rien de bon.

Le logement se trouve dans une situation très délicate, pour ne pas dire plus, surtout après le passage du cyclone Dean et le séisme. Les crédits progressent de manière significative cette année, 19 % en crédits de paiement pour le logement locatif mais cette augmentation, autorisée par la Lodeom, sera malgré tout insuffisante pour couvrir les dettes envers les bailleurs sociaux. La fuite en avant résultant de l'écart entre crédits de paiement et autorisations d'engagement se poursuivra. Il n'y aura donc pas d'impulsion nouvelle en faveur du logement social. Les modalités de financement retenues sont déconcertantes puisque la Lodeom n'a toujours pas été débattue. L'effort se réalisera au détriment du secteur locatif libre. En revanche, je constate avec satisfaction que vous avez repris ma proposition d'un GIP Indivision pour résoudre le lancinant problème qui gêne la construction en milieu diffus comme la rénovation en centre-bourg.

Nos agriculteurs subissent de plein fouet le plan chlordécone qui fixe un maximum de résidus à 20 microgrammes par kilo de produit végétal. Cette décision prise en application du principe de précaution prive 450 petits maraîchers de revenus depuis le mois de juillet. Des solutions avaient pourtant été prévues pour les petits agriculteurs antillais. Ils n'ont pas de perspective d'avenir : faites appliquer les plans et compenser leur préjudice.

L'hôpital du Carbet est au bord de l'asphyxie : il manque quatre pneumologues sur cinq depuis plus de trois ans.

Je souhaite enfin rappeler la nécessité de renforcer la coopération avec nos voisins de la Caraïbe : il faut rétablir de bonnes relations en matière de justice, de pêche et de protection des milieux marins. (Applaudissements à gauche)

M. Soibahadine Ibrahim Ramadani.  - Disons-le d'emblée, l'effort de l'État envers l'outre-mer est globalement soutenu malgré les contraintes qui pèsent sur les fiances publiques, la crise internationale et le ralentissement de l'activité économique. L'ensemble des dotations de l'État à l'outre-mer passe de 15 milliards à 16,5 milliards et les crédits de la mission « Outre-mer », qui représentent 15 % de l'ensemble, atteignent 1,97 milliard, soit une augmentation de 9,3 % en crédits de paiement. Le programme « Emploi outre-mer », avec 1,191 milliard, mobilise 60 % des crédits de paiement et constitue le premier poste de dépenses de la mission. Le programme « Conditions de vie outre-mer » augmente pour atteindre 680 millions en crédits de paiement. Ce projet de budget s'inscrit dans une programmation pluriannuelle 2009-2011.

Mayotte participe à l'effort national et la tendance générale à la baisse ou, au mieux, à la stagnation, inquiète fortement les Mahorais, à quelques mois d'un choix important pour leur avenir institutionnel.

L'agriculture et l'aquaculture appellent une relance des exportations. Il faut également réconforter les agriculteurs victimes de la tempête Fame pour laquelle une première tranche d'indemnisation vient d'être débloquée. Les préoccupations majeures restent la mise en place d'une retraite agricole et l'extension des prêts à taux bonifiés

Les transferts de crédits aux collectivités territoriales sont en hausse, à 68,9 millions, dont 63,2 de prélèvements sur recettes. Ces sommes serviront-elles à éponger la dette de l'État envers la collectivité départementale de Mayotte, notamment au titre des arriérés du contrat de plan État-Mayotte et de la convention de développement ?

Les crédits de l'écologie, de l'aménagement et du développement durable chutent de 50 %, alors que le Grenelle prônait une nouvelle donne énergétique pour Mayotte, et le plan d'aménagement et de développement durable n'est toujours pas validé.

La dotation de rattrapage et de premier équipement des communes passe de 9,2 à 8,8 millions, alors que les besoins augmentent. En l'absence de fiscalité locale et du bénéfice de l'octroi de mer, il faut compenser le manque à gagner des communes en abondant le fonds intercommunal de péréquation.

La dotation de premier numérotage des voiries communales passe de 450 à 150 000 euros et la dotation exceptionnelle pour la réforme de l'état civil stagne à 300 000 euros par an. Ces baisses ne sont pas justifiées, d'autant que ces dotations financent des outils préalables à la mise en place d'une fiscalité de droit commun. Quels crédits sont prévus pour la formation et le travail des agents communaux chargés de recenser les 50 000 personnes qui n'ont pas déposé de dossier d'état civil ou ne possèdent pas de documents d'identité ?

Les crédits de l'enseignement scolaire -50 % du budget de Mayotte- stagnent autour de 384 millions. L'évolution démographique et l'immigration clandestine justifient pourtant la solidarité de l'État envers nos communes, qui n'ont pas de ressources fiscales propres, pour financer le plan de rattrapage des constructions scolaires.

Finalement, le budget de Mayotte passe de 655 à 635 millions. Le revenu moyen par habitant passe de 3 517 à 3 405 euros, loin derrière Saint-Pierre-et-Miquelon ou Wallis-et-Futuna. Les grands chantiers sont soit en phase d'achèvement, soit en phase d'étude, et la Lodeom ne sera adoptée que début 2009 : l'année 2009 sera donc une année blanche, propice aux agitations de toute nature. Le taux de croissance, de 10 % au premier semestre 2008, risque de baisser ; l'emploi, de se dégrader ; le Smic, de connaître une évolution plus modérée ; le plan de rattrapage des minima sociaux, d'être compromis, d'autant que l'extension des allocations pour personnes âgées et pour adultes handicapés n'est pas à l'ordre du jour.

Les instituteurs de Mayotte réclament toujours le paiement rétroactif de la dotation spéciale des instituteurs et le rétablissement de l'indexation des salaires à 2,15 %, sachant que l'inflation est de 5,5 % contre 1,7% en métropole.

Sous le bénéfice de ces observations, et de vos réponses, je voterai le budget de la mission « Outre-mer ». (Applaudissements à droite et au centre)

M. Charles Revet.  - Très bien !

M. Jacques Gillot.  - La crise financière et économique n'épargnera pas l'Outre-mer. Je me suis déjà exprimé sur ses conséquences sur l'investissement des collectivités. Sachant les difficultés que rencontrera le conseil général pour financer l'APA et le RMI, comptez-vous réviser les bases du calcul des dotations affectées dans la perspective de l'entrée en vigueur du RSA ? Par ailleurs, la création des collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin risque de se traduire par une réduction des dotations du département. Madame la ministre, pouvez-vous préciser votre réponse sur ce point ? Seules les charges compensées par l'État doivent être transférées. Confirmez-vous que des corrections interviendront, maintenant que la Commission d'évaluation des charges a rendu son avis ?

Au-delà de la transformation du secrétariat à l'outre-mer en une administration de coordination et non plus de gestion, vous nous présentez un budget dont l'augmentation doit être relativisée. En dépit d'une hausse affichée de 3 % des crédits, vous poursuivez le démantèlement des emplois aidés, dont le financement diminue de 52 millions. Au lieu de renforcer la compétitivité en abaissant le coût du travail, la réforme des exonérations de cotisations patronales créera une trappe à bas salaires tout en augmentant les charges des entreprises ! Afin de permettre à ces dernières de s'y préparer, je souhaite que les mesures Girardin, plus avantageuses, s'appliquent jusqu'à la fin 2009. J'y reviendrai lors de l'examen de l'article 65, dont l'opportunité est contestable...

Ce projet de budget anticipe certes sur les dispositions de la Lodeom, mais surtout sur les économies que vous prévoyez de réaliser, au mépris de la stabilité du cadre de l'action économique apportée par la loi Girardin. Ces économies sont-elles opportunes, à un moment où nos collectivités seront fragilisées ?

Ainsi, la politique du logement nous propose de puiser dans les crédits destinés aux actions nouvelles pour régler le stock de dette. La ligne budgétaire unique augmente de 9 millions, mais c'est en partie grâce aux reports de crédits. En Guadeloupe, à peine 10 % des crédits ont pu être consommés par les bailleurs sociaux, confrontés à une crise de trésorerie due aux délais de paiement insupportables, aux dettes de l'État et aux critères de financement de la LBU. Cette année encore, l'écart entre crédits de paiement et autorisations d'engagement se creuse, passant de 36 à 49 millions, au risque de générer des factures impayées qui viendront augmenter la dette de l'État. En métropole, on inscrit des crédits de paiement supérieurs de 315 millions aux autorisations d'engagement pour résorber la dette ; outre-mer, les mêmes causes ne produisent pas les mêmes effets... Face à l'immensité de nos besoins, ce projet de budget annonce le remplacement du financement public du logement social par un système de défiscalisation sans garantie de stabilité et de pérennité de la ressource.

Pourquoi avoir choisi une défiscalisation sur le logement social pour répondre à la crise outre-mer alors qu'ailleurs, ce sont le plan Borloo et la loi Boutin qui ont été retenus ? J'ai vraiment du mal à croire à une politique volontariste pour résorber la crise du logement social outre-mer. Les crédits prévus devraient permettre la construction de 4 500 logements dans tout l'outre-mer, alors que la Guadeloupe compte, à elle seule, plus de 20 000 demandes non satisfaites !

Quant au plafonnement de l'aide à l'investissement prévu à l'article 43, il se traduit déjà, en Guadeloupe, par d'importants reports d'investissements. Je partage, bien sûr, votre souci d'une plus grande justice fiscale, mais vous mettez en péril un dispositif de soutien qui concourait au développement de nos territoires.

Il est encore temps de réviser les plafonds de l'avantage fiscal, si vous ne voulez pas tarir une source de capital vitale pour les petites entreprises d'outre-mer. Enfin, vous avez opportunément créé un fonds d'investissement pour rattraper le retard des DOM en équipements structurants, que les élus de la Guadeloupe avaient d'ailleurs réclamé. Cependant, doté de 16 millions pour tout l'outre-mer, ce fonds n'aura pas l'effet de levier escompté. Pour la seule Guadeloupe, il manque ainsi 300 millions pour mettre à niveau les équipements de traitement de déchets ménagers. Au surplus, cet effet de levier sera encore diminué car vous allez ponctionner 10 millions de ce fonds pour répondre à la crise des prix pétroliers en Guyane, en contrepartie d'une baisse de 10 % de la taxe relative au Fonds d'investissement routier et du transport perçue par les collectivités.

Tout comme mes collègues de Martinique et de Guyane, je désapprouve cette politique aventureuse qui remettrait en cause l'autonomie financière de nos collectivités en leur demandant de renoncer à une recette dynamique pour une recette ponctuelle et incertaine. Nous demandons donc solennellement à l'État de faire toute la lumière sur les conditions de fixation des prix du carburant dans les Antilles et en Guyane et de garantir un même pouvoir d'achat pour tous les citoyens ultramarins.

Pour toutes ces raisons, je ne puis voter les crédits de cette mission. (Applaudissements à gauche)

M. Robert Laufoaulu.  - Merci, tout d'abord, aux rapporteurs pour leur excellent travail qui nous apporte un éclairage précieux. Permettez-moi d'adresser des remerciements particuliers à notre collègue Christian Cointat, qui consacre chaque année un chapitre bien renseigné à Wallis-et-Futuna, territoire qu'il connaît bien.

Depuis votre nomination, vous avez, monsieur le ministre, visité l'ensemble de l'outre-mer et vous avez pu appréhender la diversité de nos collectivités. Il y a à peine trois semaines, vous êtes venu à Wallis et à Futuna, où votre visite a été appréciée. Les ministres de l'outre-mer ne peuvent réellement comprendre l'étendue de nos difficultés, et parfois les cris d'alarme que nous lançons, qu'une fois qu'ils ont été confrontés à la dure réalité de notre quotidien : un hôpital qui ressemble à un dispensaire de brousse, un lycée construit en dépit du bon sens, l'internet haut débit qui n'existe qu'en rêve... Nous sommes à des années lumière de la qualité d'équipement de la métropole. Je sais, monsieur le ministre, que vous avez mesuré notre désarroi et nos problèmes : nos îles se vident de leurs habitants les plus jeunes faute de filières de formation adéquates et de débouchés professionnels. Quel avenir pour nous si le renouvellement des générations n'est pas assuré ?

Permettez-moi de remercier le Gouvernement pour l'effort en faveur de l'outre-mer : un budget en hausse, dans la situation économique actuelle, mérite d'être salué. Hélas, je note une nette diminution des crédits par habitant consacrés à Wallis-et-Futuna, qui passent de 8 500 euros en 2008 à 6 241 euros l'année prochaine. Pour le territoire le moins avancé de l'outre-mer, cette baisse est malvenue, et la population s'interroge sur la pérennité de l'engagement de l'État. Pouvez-vous la rassurer ?

J'en viens à la répartition de certaines sommes dans plusieurs territoires. Ainsi, il est envisagé de consacrer plus de 6 millions aux programmes « Cadres » en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna. Vous savez que, durant les deux dernières années, Wallis-et-Futuna a été complètement oubliée dans l'attribution des financements nécessaires pour un fonctionnement normal de ce programme. Or, même s'il est perfectible, ce dispositif a porté ses fruits et nous souhaitons son maintien, vital pour le territoire. Comment veiller, monsieur le ministre, à ce que les sommes utiles à la pérennisation de ce programme nous soient effectivement versées ? Vous avez évoqué une modification du dispositif actuel, mais comme cela n'apparaît pas dans les documents budgétaires, je vous serais reconnaissant de me confirmer le processus que vous souhaitez mettre en place pour faire redémarrer le programme « 40 cadres » dans de bonnes conditions.

D'une manière générale, nous aimerions pouvoir connaître, pour chaque action des programmes 138 et 123, pour laquelle Wallis-et-Futuna est concernée, les montants destinés à notre territoire. Si nous voulons offrir un avenir à notre jeunesse et éviter notre dépeuplement, il faut évidemment créer les conditions de développement économique et d'emplois sur le territoire.

Je tiens, monsieur le ministre, à vous remercier pour les efforts de l'État en faveur du désenclavement de Futuna. Ainsi, lors de votre visite, vous avez inauguré la nouvelle piste de Vele et lancé l'utilisation du deuxième Twin-Otter qui assure la liaison entre nos deux îles et qui a été loué par l'État pour cinq ans. Ce deuxième avion, que nous souhaitions depuis longtemps tant notre vieux Twin tombait en panne fréquemment, induit des frais de fonctionnement supplémentaires. L'État les prendra-t-il à sa charge pour les cinq ans à venir ?

J'en viens à la desserte extérieure du territoire : le monopole exercé par Air Calédonie International (ACI) permet à cette compagnie de pratiquer des tarifs que vous avez qualifiés de scandaleux.

M. Christian Cointat.  - C'est exact !

M. Robert Laufoaulu.  - C'est un frein évident au désenclavement du territoire, et donc à son développement. Or, Air Caraïbes, Corsair, Air France, ont passé des conventions avec l'État sur la question de la continuité territoriale. Pourquoi ne pas faire de même avec ACI ? Vous avez aussi évoqué une concurrence aérienne : nous y adhérons avec d'autant plus d'enthousiasme que les perspectives de drainer une partie du flux touristique des îles Fidji, qui sont à peine à 600 kilomètres, sont réelles. Si le Twin-Otter était remplacé par un appareil plus gros, de type ATR 42, ce que permet la nouvelle piste de Vele, nous pourrions établir des liaisons Wallis-Futuna-Fidji. Le désenclavement du territoire est la condition de son développement touristique et commercial.

Le transport maritime est également très onéreux et j'espère que nous repartirons sur les bases du rapport qui avait été rédigé sur le sujet il y a une dizaine d'années. Le coût du transport maritime est-il une des raisons de la cherté de la vie à Wallis-et-Futuna ? J'espère que nous le saurons bientôt, si l'enquête prévue est menée. Pouvez-vous nous le confirmer, monsieur le ministre ? Les DOM et Saint-Pierre-et-Miquelon vont bénéficier de l'aide au fret. Ne pourrait-on envisager d'étendre cette mesure intelligente à Wallis-et-Futuna ?

Le développement et la création d'emplois passent aussi par la formation, clé de l'insertion professionnelle. A cet égard, je me réjouis, monsieur le ministre, du passage de 3 000 à 4 000 personnes formées dans le cadre du service militaire adapté, et tout particulièrement de votre volonté d'en implanter une unité à Wallis-et-Futuna, que j'attendais depuis des années. Les chefs coutumiers de Futuna ont d'ailleurs déjà donné leur accord. Savez-vous quelles formations pourraient y être délivrées ?

Le développement passe aussi par l'arrivée du haut débit à Wallis-et-Futuna, et j'espère que le dossier du câble sous-marin avance. Notre archipel bénéficiera-t-il du premier bouquet TNT mis en place outre-mer courant 2010 ?

Chaque année, je vous interroge sur l'aide technique à la réalisation des infrastructures par la collectivité. Vous vous êtes rendu compte, monsieur le ministre, des grandes difficultés que rencontrent nos services techniques pour le wharf de Léava à Futuna. Vous avez proposé l'an passé une mission pour examiner cette question, comme cela fut fait à Mayotte. Le préfet aurait décliné cette offre, ce que je regrette. Ne pourrait-on pas la relancer ? Le besoin est tel que la Commission européenne met à la disposition de la collectivité une assistance technique pour les projets financés par le Fonds européen de développement. Or l'État met à notre disposition des sommes bien plus élevées, d'où la nécessité d'une aide technique importante.

Bien entendu, je voterai les crédits de cette mission. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Georges Patient.  - A l'heure où je vous parle, 20 centimes d'euros paralysent la Guyane, bloquée maintenant depuis dix jours par tous ses habitants et même vos compagnons de l'UMP, monsieur le secrétaire d'État, font partie du front commun. Contrairement à vos allégations, il ne s'agit pas d'un mouvement de contestation manipulé par la gauche ou par les opposants au Gouvernement. Les consommateurs de Guyane veulent que le prix du carburant, le plus cher de France, baisse encore. Hier, il se montait à 1,77 euro par litre, contre une moyenne de 0,98 euro dans les stations-service hexagonales. Or vous demandez aux collectivités de Guyane, toutes asphyxiées financièrement, de prendre cette réduction à leur charge en réduisant le montant de la taxe sur les carburants. En échange, vous leur proposez 10 millions que vous prélèveriez sur le Fonds exceptionnel d'investissement.

Je salue l'apparition de ce fonds mais je m'interroge sur son utilisation. Comment allez-vous compenser la perte de recettes de fonctionnement des collectivités de Guyane par un fonds réservé au financement d'investissements ? Que prévoyez-vous pour compenser leurs pertes de recettes qui interviendront après les trois mois de votre mission vérité des prix ? Comment parviendrez-vous à affecter dès cette année 10 millions de ce fonds à la seule Guyane, quand ce fonds n'est pas encore créé, qu'il ne disposera que de 16 millions de crédits de paiement en 2009 et qu'il s'adresse à toutes les collectivités ultramarines ? Pouvez-vous nous assurer que la procédure d'attribution des concours financiers à l'intérieur de ce fonds sera transparente et que toutes les communes de Guyane pourront en bénéficier ? Ne risque-t-on pas de se retrouver dans le même cas de figure que pour les prêts de restructuration annoncés pour toute les communes de Guyane et dont seulement quatre en bénéficient pour l'heure ? Enfin, êtes-vous prêt à signer une convention avec un organisme financier qui pourrait, avec la garantie de percevoir cette somme, faire des avances à taux zéro aux différentes structures percevant le produit de la taxe sur le carburant ? A ces questions précises, je veux, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, des réponses précises.

L'heure n'est plus aux déclarations d'intention ni aux belles promesses. Vous refusez de prendre la mesure de ce mouvement de grande ampleur qui est la manifestation d'un malaise grandissant au sein de la population guyanaise et qu'à maintes reprises nous avons, nous les élus, porté à votre connaissance. Monsieur le secrétaire d'État, vous n'avez pas daigné recevoir les quatre parlementaires et les présidents des deux collectivités venus en octobre dans votre ministère pour discuter de ce problème du carburant. Si vous nous aviez entendus à l'époque, très certainement ce conflit aurait été évité. De même, vous avez au tout dernier moment renoncé à vous rendre en Guyane à l'occasion de la Conférence des régions ultrapériphériques en novembre.

Il faut néanmoins vous rendre à l'évidence : la Guyane traverse une crise profonde. Elle est à la limite de l'explosion. Aussi arrêtez de la voir uniquement au travers du prisme de la base spatiale de Kourou ou de la considérer comme un joyau de biodiversité. La Guyane, c'est aussi et surtout une terre de plus en plus sinistrée qui cumule tous les mauvais records, en termes de chômage, d'insécurité, de délinquance, d'immigration clandestine, d'accidents de la route, de sida... « Une terre où l'on continue à lancer des fusées sur fond de bidonvilles »pour reprendre la phrase de François Mitterrand. Dans ce département français où le taux de pauvreté est le plus élevé des DOM, un Guyanais sur quatre vit sous le seuil de pauvreté et le taux de chômage, supérieur à 24 %, touche majoritairement les jeunes qui représentent plus de la moitié de la population. Leur désarroi est grand. Il s'exprime d'ailleurs actuellement à travers cette crise.

Je pourrai parler des problèmes liés à la santé, au logement social, à l'éducation, à l'orpaillage clandestin, à l'énergie, à l'insécurité, mais ce sur quoi je voudrais insister, c'est qu'en dépit de ce tableau de la situation guyanaise, nous maintenons notre exigence de dignité. Nous ne quémandons pas, nous demandons que nous soit restitué ce qui nous est dû, comme par exemple les 17 millions de dotation superficiaire qui échappent à nos communes en raison d'un plafonnement qui ne frappent qu'elles. Nous réclamons aussi les 27 millions d'octroi de mer dont elles sont privées, autre fait unique dans les DOM. Ce sont donc 44 millions que nos communes perdent annuellement Rétrocédez-nous cette somme et non seulement nos finances locales seront ajustées mais aussi, très rapidement, nous saurons enclencher un véritable développement endogène.

Ce n'est pas le cas car dans votre budget, je ne trouve pas de réponse à ces demandes incessantes. Bien au contraire, le document de politique transversale qui établit la réalité de l'effort budgétaire en crédits d'intervention des différents ministères se traduit pour la Guyane, comme par hasard, par une diminution de 9 000 euros. Aussi, confirmez-nous que les 10 millions annoncés sur les ondes figurent bien dans le Fonds exceptionnel d'investissement.

En l'état, je ne peux que voter contre votre budget. (Applaudissements à gauche)

Des circonstances exceptionnelles m'obligent à vous lire ce jour l'intervention du sénateur Jean-Etienne Antoinette, retenu en Guyane par une crise sociale d'une haute gravité :

« Oui, en Guyane, département de la République française, la paupérisation a conduit les citoyens dans la rue. Tous les points stratégiques de circulation sont soumis à leur contrôle, certes de manière pacifique, mais avec une détermination qui demande à être entendue au plus haut niveau de l'État. Le coût du carburant, le plus cher du monde à la pompe, en a été le facteur déclenchant. Mais au-delà, la Guyane, enclavée et isolée des circuits commerciaux, subit bien plus que les séquelles de son passé de colonie sous-équipée et sous-développée.

« Ce sont les termes des échanges commerciaux qui se retrouvent aujourd'hui sur le banc des accusés, avec des monopoles démesurés, et des prix sur les denrées de base que ne supportent plus les revenus des ménages tant ils sont élevés, jusqu'à deux ou trois fois les prix nationaux. Ce sont aussi les transferts de compétences non accompagnés des moyens appropriés, ou le reliquat de moyens même conventionnés, qui n'est transféré en partie qu'après des délais intolérables, au même titre d'ailleurs que les transferts réglementaires constituant l'essentiel des recettes des collectivités. Et justement, ces recettes sont structurellement déficitaires, non seulement en raison des surcoûts dus à l'enclavement de la Guyane mais aussi parce que son potentiel fiscal propre est soit non optimisé dans les secteurs spatial et environnemental soit faible pour les petites communes, tandis que celles de plus de 10 000 habitants reçoivent des dotations de fonctionnement inférieures à celles de la métropole.

« Alors, puisqu'à situation exceptionnelle il convient d'apporter des réponses exceptionnelles, je me suis permis d'utiliser la tribune de la Haute assemblée, afin de faire entendre la voix de la Guyane mais aussi de demander qu'une mission parlementaire puisse donner un avis autorisé et envisager des issues pérennes à un problème de fond car la crise déclenchée par le prix du carburant n'est que le symptôme de fractures sociales de plus en plus insoutenables pour la population de ce département. Fractures que le budget 2009 ne réduira pas, bien au contraire !

« Le Gouvernement se félicite d'une augmentation de 12 % du budget de la mission « Outre-mer », 9 % si on parle en crédits de paiement -la présentant comme la preuve de son intérêt tout particulier pour nos territoires, dans une période de rigueur budgétaire nationale. Vu ainsi, les ultramarins pourraient apparaître comme les enfants chéris et privilégiés de la Nation, alors qu'ils ne demandent qu'une place juste et équitable au sein de la République. Or, loin de préfigurer la politique volontariste de développement économique ultramarin, que la future Lodeom devrait traduire, ce budget 2009 est essentiellement un budget de régularisation comptable pour les arriérés d'impayés de l'État envers les organismes de sécurité sociale, les collectivités territoriales et les bailleurs sociaux. Cela doit être dit.

D'autre part, si j'examine les deux programmes de la mission à l'aune des deux priorités du budget national -le bien-être social et l'efficacité économique-, je reste véritablement inquiet pour l'évolution prochaine de nos territoires dans un contexte de récession mondiale. En effet, si le programme 123 « Conditions de vie en outre-mer » a pour finalité le bien-être social, alors ni les crédits pour le logement, simple mise à jour comptable, ni le provisionnement pour l'aménagement du territoire, relevant d'obligations contractuelles pluriannuelles, ni le désengagement amorcé de l'État sur le financement de la continuité territoriale, déjà compromis, entre autres, par le prix du carburant, ni la baisse de plus de 6 %des crédits de l'action sanitaire et sociale, pourtant fusionnée avec la culture et le sport, ne sont à la mesure des enjeux sociaux auxquels nous devons faire face. Et je ne parle pas des conséquences sur l'outre-mer des décisions budgétaires de droit commun à l'échelle nationale, comme la diminution des crédits de la politique de la ville ou de ceux consacrés à l'intégration des migrants, ou encore la suppression -non pardon, il faut dire transfert- des 3 000 postes d'enseignants spécialisés des Rased. En Guyane, ces équipes précieuses sont en sous-effectif chronique et ne peuvent déjà pas accueillir tous les enfants qui leur sont signalés : enfants ne parlant pas le français, enfants scolarisés tardivement sur le territoire, enfants de familles acculturées ou en détresse sociale et économique, enfants sans parents connus des autorités, pour ne citer que ces situations et pas les pires, là où l'éducation devrait être une priorité fondamentale...

« Et quant à l'efficacité économique... Si le budget 2009 du programme 138 en était un exemple, alors les réformes proposées en matière de fiscalité et d'exonérations se seraient appuyées sur les principes élémentaires de pertinence, d'opportunité, de cohérence, d'efficacité et de transparence. Or, le Gouvernement veut plafonner des avantages fiscaux destinés à booster l'investissement productif dans l'outre-mer français, en plein début de récession économique. Où est la pertinence ? Le Gouvernement nous demande de croire a priori dans l'adéquation entre l'article 65 rattaché du budget 2009 et la future Lodeom, dont on n'est même pas en mesure de nous dire précisément et avec certitude quand elle sera réellement examinée, mais dont on sait déjà que cet examen fera débat ! Où est la cohérence ? Le Gouvernement a reconnu lui-même les effets positifs de la défiscalisation et des exonérations sur les économies et sur l'emploi en outre-mer toutes ces dernières années. Cependant, face aux demandes pressantes d'évaluation de ses inquiétantes réformes, il nous demande d'avoir la foi dans ses certitudes autoproclamées ! Où est le gage d'efficacité ? On pourrait soupçonner un désir secret du Gouvernement de contenir le développement des territoires ultramarins tout en faisant semblant de les perfuser, une volonté d'éviter tout à la fois les désastres sociaux menaçant pour la sécurité nationale et la réelle autonomie économique de ces territoires, qu'il doit, en réalité, redouter, mais à laquelle il se fait un malin plaisir d'exhorter les élus, au nom des vertus du développement endogène.

« Est-il permis d'attendre du Gouvernement un peu plus de respect pour nos territoires, nos populations et nos élus ? Pour toutes ces raisons, je vote contre ce budget. » (Applaudissements à gauche)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Lequel des deux applaudissez-vous ? (Sourires)

M. Michel Magras.  - Je ne résiste pas au plaisir de vous dire l'immense bonheur que je ressens à m'exprimer pour la première fois à cette tribune au nom de la collectivité de Saint-Barthélemy dont j'ai l'honneur d'être le premier sénateur. (Applaudissements à droite et au centre) Je suis heureux de voir s'exprimer ici cette France d'outre-mer qui apporte à notre Nation sa richesse et sa diversité. Monsieur Virapoullé, j'ai apprécié votre vision de l'outre-mer et je ne crois pas exagérer en affirmant que l'outre-mer est l'avenir de la France. (Mêmes mouvements)

La question de la circonscription législative de Saint-Barthélemy a été l'objet d'une actualité brûlante et je tiens à redire toute ma confiance en la parole donnée par le Gouvernement en dépit des assauts répétés pour modifier ce qui reste une disposition acquise dans la loi organique. Votre soutien, madame la ministre, monsieur le ministre, témoigne de la prise en compte de la situation particulière de la collectivité.

En effet, les choix de développement économique de la collectivité ont permis à Saint-Barthélemy d'atteindre un équilibre avec notamment un taux de chômage qui s'établit à seulement 3,3 %. Bien sûr, nous en sommes fiers, mais cela ne doit pas être interprété comme la marque d'une désolidarisation du reste de l'outre-mer, ni davantage d'une incompréhension de ses problèmes.

L'examen du projet de loi de finances est pour moi un exercice particulier, la collectivité de Saint-Barthélemy ne percevant aucune dotation au titre de l'enveloppe normée ; son autonomie budgétaire est en quelque sorte le corollaire de son autonomie statutaire. Nous n'attendons pas de l'État un concours financier mais la validation des projets d'actes qui lui sont soumis.

Ce projet de budget donne une visibilité sur trois ans, tient compte des besoins spécifiques de chacune des collectivités d'outre-mer et est en parfaite cohérence avec la future loi de développement. Je souhaite que les entreprises de Saint-Barthélemy continuent de bénéficier du dispositif d'exonérations créé par la loi de 2003 et modifié par l'article 65 -il n'est pas pour rien dans le niveau du taux de chômage de ma collectivité. Je déposerai un amendement en ce sens. Si l'article 65 était adopté en l'état, elles en seraient exclues et subiraient une distorsion de concurrence par rapport à leurs voisines.

Il serait d'autre part opportun que la mission d'inspection chargée de se pencher sur le prix des carburants se rende aussi à Saint-Barthélemy ; l'augmentation des prix est difficile à supporter pour certains professionnels comme les pêcheurs. Notre collectivité, n'en déplaise à Bruxelles, doit à nouveau pouvoir s'approvisionner sur le marché libre.

Je ne m'étendrai pas sur le dispositif de défiscalisation, dont j'aurais préféré qu'il ne s'appliquât pas à Saint-Barthélemy. Ce n'est pas le choix qu'a fait le Gouvernement ; quelles modalités a-t-il retenues pour la consultation de la collectivité sur les décisions portant agrément des opérations d'investissement ouvrant droit à déduction fiscale ?

Il n'est pas un article de presse qui, évoquant la défiscalisation, n'épingle Saint-Barthélemy et ne l'érige en paradis fiscal. Une telle assimilation est abusive, impropre, dénotant une méconnaissance totale de notre statut, de notre politique, qui visent au contraire à freiner l'attractivité fiscale de l'île. En aucun cas nous ne souhaitons attirer des investissements d'opportunité fiscale. La faible pression fiscale de l'île est le résultat d'une gestion rigoureuse. L'appellation de paradis fiscal est un cliché ; la loi organique statutaire et bientôt la convention fiscale qui liera la collectivité à l'État prévoient la transmission des informations afin de lutter contre la fraude et l'évasion fiscale. Pas plus le secret bancaire que le secret commercial n'a cours à Saint-Barthélemy. Je regrette que les membres du Gouvernement interpellés sur le sujet se contentent d'esquiver d'une phrase ; ce n'est pas Saint-Barthélemy qu'ils doivent défendre mais la France, la République qui n'a pas accepté de faire d'un de ses territoires un paradis fiscal.

Un mot enfin de la réforme du dispositif de continuité territoriale ; une attention particulière devra être portée aux étudiants de Saint-Barthélemy qui, à partir du secondaire, doivent quitter l'île pour être scolarisés en Guadeloupe, à Saint-Martin ou en métropole, avec les contraintes financières que l'on imagine pour les familles. La collectivité ne souhaite pas la délégation de la gestion du futur fonds de continuité territoriale mais que sa mise en place tienne compte en priorité de cette situation particulière.

En dépit de la situation particulière de Saint-Barthélemy, je me sens solidaire de l'avenir de l'outre-mer. C'est sans réserve que je voterai les crédits de cette mission. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.  - Je salue le travail des rapporteurs et, au-delà de nos différences d'appréciation, la qualité des interventions des orateurs. Tous ont fait preuve d'un grand sens des responsabilités et montré leur profond attachement, qui est aussi le nôtre, pour leurs collectivités.

Le Gouvernement veut donner un nouvel élan à l'outre-mer, valoriser les atouts spécifiques à chacun des territoires, leur permettre de mieux affronter les défis d'aujourd'hui et de demain, faire en sorte que chacun de leurs habitants aient un rôle à jouer pour les autres et pour la France. Telle est l'ambition de ce budget.

La protection des personnes et des biens outre-mer est une de mes priorités personnelles ; le développement économique est une des priorités du Gouvernement. Hier engagements de campagne de M. Sarkozy, ils entrent dans les faits. Alors que le budget de l'État évolue dans des limites extrêmement strictes, les moyens de la mission « Outre-mer » connaissent une augmentation très significative ; je remercie ceux qui l'ont souligné. Élaborer une nouvelle stratégie pour l'outre-mer nécessite une analyse objective des situations car ce n'est pas en rêvant qu'on fera avancer les choses. Personne ne nie les difficultés auxquelles l'outre-mer est confronté, l'éloignement, l'insularité parfois, la taille limitée du marché domestique, la proximité de pays dont les normes sociales et juridiques sont moins élevées, sans oublier les trafics, la violence ou le risque de catastrophe naturelle. Je ne dis pas que rien n'a été fait avant nous ; certains résultats sont là, mais le taux de chômage y demeure plus élevé qu'en métropole, notamment celui des jeunes, en effet, madame Michaux-Chevry ; le logement social y est insuffisant, en quantité comme en qualité, les prix à la consommation y sont trop élevés. Il faut en tirer les conséquences, les rapporteurs spéciaux l'ont dit avec justesse.

Mais les collectivités d'outre-mer, vous avez raison, monsieur Marsin, ont aussi de vrais atouts dans la compétition mondiale. Si elles s'inscrivent dans une dynamique, si la sécurité y est mieux assurée, elles peuvent devenir exemplaires, les modèles d'un développement durable respectueux des identités qu'a évoquées M. Virapoullé. Et nous voulons y parvenir avec les élus et les acteurs économiques, dans le souci de l'intérêt général, dans le dialogue, en recherchant le consensus. C'est ce qui a été fait en Guyane pour le prix du carburant ; M. Jégo a dialogué avec les pétroliers et une baisse de 30 centimes a pu être obtenue. J'ai lancé parallèlement une mission d'inspection sur la formation des prix du carburant outre-mer, qui fera prochainement des propositions pour plus de transparence.

Le dialogue, nous l'avons aussi mené en préparant le projet de loi de développement. Ce sont les collectivités et les professionnels qui ont défini eux-mêmes les secteurs stratégiques prioritaires. Reconnaissez que la méthode est nouvelle ! La nouvelle stratégie doit être réaliste et équilibrée. L'État, qui renforce ses concours financiers, a le devoir de remettre à plat certaines situations.

Les crédits de la mission augmentent de 16 %, à 1,8 milliard d'euros.

Les crédits du logement -car il y a un vrai problème, de nombre et de qualité- augmentent de 9 %. En matière de sécurité également, l'effort est sensible, car j'ai conscience des difficultés liées à la violence, à l'immigration illégale, aux accidents de la route, à l'éloignement des secours. Les premières commandes d'hélicoptères pour la gendarmerie et la sécurité civile sont passées, pour équiper en particulier la Guyane et la Polynésie. Le centre d'alerte aux tsunamis sera créé. Les GIR seront à même de lutter contre les trafics de l'économie souterraine. Nous sommes loin de la caricature faite par M. Flosse !

Les concours de l'État progressent de 200 millions d'euros. Mais il convenait aussi de remettre à plat des situations qui handicapent les économies locales. L'ITR a été instaurée il y a un demi-siècle, à une époque où les communications étaient moins développées ; le système a peu à peu donné lieu à des excès et des attitudes opportunistes. Le Gouvernement l'a donc réformé dans la dernière loi de financement de la sécurité sociale. Les incitations fiscales, les allégements de charges n'ont pas toujours produit le bénéfice attendu. Monsieur Gillot, vous soutenez aujourd'hui un dispositif que vous n'avez pas voté...

M. Jacques Gillot.  - Et pour cause : je n'étais pas là !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Les détournements constatés sont contraires aux intérêts des économies ultramarines. La responsabilité politique, c'est aussi savoir reconnaître que des situations ont changé, que des politiques n'ont pas donné les résultats attendus et rechercher en conséquence de meilleures solutions. Le plafonnement des aides fiscales était nécessaire, et l'outre-mer doit participer à l'effort en ce domaine ; mais nous avons aussi le devoir de lui apporter les financements dont il a besoin.

Les exonérations de charges patronales ont été recentrées sur les bas salaires et les salaires intermédiaires car c'est dans cette catégorie qu'elles démontrent une réelle efficacité. Mais, j'en ai pris l'engagement, la réforme s'appliquera seulement après la promulgation de la loi sur le développement économique de l'outre-mer.

Le Gouvernement privilégie l'écoute. J'ai même rouvert la concertation sur la loi de programme en juin dernier, constatant que des incompréhensions demeuraient. M. Jégo a parcouru des centaines de milliers de kilomètres pour aller à la rencontre de chacun. Nous avons adapté la réforme des ITR ; elle se déploiera sur vingt ans. Nous avons tenu compte de vos réflexions pour fixer finalement à 40.000 euros après rétrocession, ou 6 % du revenu net, le plafonnement des avantages fiscaux. Les économies ultramarines ont besoin d'un flux d'investissement : nous avons modifié les modalités de l'appel à l'épargne afin d'élargir le nombre des investisseurs potentiels.

La parole donnée doit être tenue, telle est bien mon intention et je confirmerai à MM. Gillot et Laufoaulu, par écrit s'ils le souhaitent, l'envoi d'une mission que le préfet nous a simplement demandé de décaler -elle se déroulera au cours du prochain semestre.

Notre ambition est que les économies d'outre-mer aient les moyens de leur propre développement. Je crois en ces territoires et leur population, en leurs talents, leur volonté d'agir, leur refus de la fatalité, leur fierté d'appartenir à l'outre-mer en même temps qu'à la France. Je crois en leurs atouts. Et les acquis de la présence sur l'ensemble de la planète sont incontestables. L'outre-mer est une chance pour la France, pour l'Europe. Telle est ma conviction. A nous tous d'agir, ensemble, pour l'outre-mer : ainsi nous agissons pour la France. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Neuf mois de travail au sein du Gouvernement, vingt-deux déplacements, 400 000 kilomètres parcourus en avion : j'ai acquis la certitude que l'outre-mer est une chance exceptionnelle pour notre pays, dans une époque de mondialisation et de défis économiques et écologiques. Cette diversité géographique et culturelle est l'histoire de la France et son honneur. Il nous revient de l'inscrire dans notre avenir.

J'adresserai une réponse écrite à chacun des orateurs : qu'ils soient donc assurés qu'aucune de leur question ne restera sans réponse, même si je ne peux ici entrer dans tous les détails.

Je comprends que l'opposition s'oppose et cherche à démontrer que le verre est aux trois-quarts vide... Mais il est plein ! Sur l'ensemble du budget de l'État, les crédits de l'outre-mer progressent de 15 à 16,7 milliards d'euros : l'on n'avait pas vu pareille hausse depuis de longues années. Simple rattrapage technique ? Bien sûr que non. Nous apportons à l'outre-mer les moyens de répondre aux divers défis économiques et sociaux.

J'en viens à la « dette » de l'État : celle que vous relevez à l'égard de la sécurité sociale est une bonne nouvelle ! Plus les entreprises embauchent, plus la compensation des exonérations due par l'État s'élève. Et tant mieux si nous avions sous-estimé l'effet positif de cette politique.

M. Charles Revet.  - Excellente politique.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Quant à la dette relative au logement social, elle n'existe pas : il n'y a pas de factures non réglées dans les préfectures d'outre-mer sur des programmes de logements sociaux. C'est même le contraire : en Martinique, en Guadeloupe, des millions d'euros de crédits n'ont pas été consommés. Quant au chiffre cité pour Mayotte, il ne correspond nullement à la réalité, ce ne sont pas 43 millions mais 11 qui doivent être prochainement payés. J'invite les parlementaires qui le souhaitent à venir au ministère rencontrer les responsables des dossiers concernés et vérifier par eux-mêmes !

Je ne puis laisser dire que nous ne donnons pas à l'outre-mer les moyens de construire des logements sociaux. La LBU passe de 190 à 253 millions d'euros, garantis sur trois ans comme l'ont demandé les opérateurs. Le projet de loi de développement économique comportera deux autres mesures nouvelles traduites ici. Je suis au demeurant surpris que nos amis de gauche rejettent un outil fiscal supplémentaire au service de la construction de logements sociaux. Pour la première fois, nous allons chercher des financements également auprès des particuliers et des entreprises : nous en attendons un complément de 170 millions d'euros.

Par ailleurs, le Gouvernement s'est engagé, en particulier dans les secteurs concernés par les restructurations, à mettre à disposition des maires des terrains au moyen d'une simple convention, ce qui représente un apport non négligeable compte tenu de la cherté du foncier. Quant aux paramètres, ils devaient effectivement être revus en raison du renchérissement du coût de la construction, en outre-mer comme en métropole. Ce sera chose faite avec la parution d'un décret dans quelques jours.

Nous avons le devoir de construire les 50 000 logements sociaux qui manquent en outre-mer. Prenons la Martinique, 400 logements sociaux seulement y ont été construits l'an passé pour une population de 400 000 habitants, non en raison d'une insuffisance de moyens, monsieur Larcher, car des crédits n'ont pas été consommés, mais par manque d'opérateurs et, dans certains cas, de volonté politique. Enfin, des crédits supplémentaires pour le logement social sont prévus dans le projet de loi pour le développement économique pour l'outre-mer. J'aurais préféré, comme nombre d'orateurs, discuter ce texte avant la loi de finances mais son examen a été repoussé en raison d'un calendrier parlementaire...

M. Charles Revet.  - ...pour le moins chargé !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - ...bousculé par la crise financière. Je me réjouis que les membres de la Haute assemblée, en particulier ceux venant de l'opposition, déclarent attendre avec impatience ce débat. Il semble qu'ils aient enfin compris l'intérêt de ce projet de loi, qu'ils tenaient auparavant pour mauvais. Pour ma part, je forme le voeu que le débat parlementaire, qui commencera au Sénat, soit l'occasion de le rendre plus opérationnel.

S'agissant de la défiscalisation, qui a fait l'objet de nombreux commentaires, j'ajoute aux propos de Mme Alliot-Marie que je suis surpris que les sénateurs de l'opposition refusent son plafonnement. Empêcher ainsi les 1 200 foyers les plus riches de notre pays d'échapper à l'impôt n'est ni une honte ni une atteinte à un quelconque ordre moral... D'ailleurs, les mêmes nous reprochaient il y a quelques mois de faire des cadeaux aux riches ! Soyons fiers de moraliser ce dispositif tout en lui conservant son caractère opérationnel. Si nous avions voulu le « tuer », comme cela a été dit, pourquoi aurions-nous porté ses crédits de 500 à 800 millions ? Avec gravité, je veux dire que ces campagnes de dénigrement (M. Bernard Frimat proteste), qui relèvent du jeu politique, donnent l'image d'un outre-mer en panne se refusant à la réforme quand ses chefs d'entreprise et les acteurs locaux font montre d'un grand dynamisme, comme je l'ai constaté durant mes déplacements. Attention, donc, de ne pas ternir l'image de l'outre-mer auprès de nos concitoyens qui en ont souvent une représentation caricaturale.

J'en viens à la compensation des exonérations de cotisations patronales, pour laquelle 1 milliard est prévu dans ce budget. Le manque à gagner de 150 millions sera largement rattrapé par des aides fiscales, dont le montant sera supérieur à 300 millions, prévues dans le projet de loi Lodeom. Il est notamment prévu que les entreprises, installées dans ces nouvelles zones franches, bénéficient d'une exonération comprise entre 50 et 80 % sur l'impôt sur les sociétés, la taxe professionnelle et le foncier non bâti et de 80 % pour tous dans les départements les plus en difficulté. Il ne s'agit donc pas de baisser les crédits mais de réorganiser le dispositif. Comment pourrait-il en être autrement dans un monde en constante évolution ? Ce dispositif, parce qu'il a été voté il y a huit ans, serait figé à jamais ? Non, il doit être adapté pour répondre aux nouveaux enjeux économiques.

Concernant les problèmes de desserte et la politique de continuité territoriale, les moyens qui y sont consacrés dans ce budget sont globalisés, nous travaillons à faire avancer ce dossier.

Concernant Mayotte, monsieur Giraud, je ne partage pas votre analyse. L'État ne réduit pas son effort financier et nous venons de signer un contrat de développement pour 550 millions, dont environ 350 millions à la charge de l'État. Le lycée en préfabriqué, auquel vous avez fait allusion, n'a pas été construit par manque de moyens mais parce que le terrain ne pouvait supporter une construction en dur. Pour ne pas pénaliser les élèves, nous avons préféré recourir à des préfabriqués, au reste, de grande qualité, modernes et climatisés. Mayotte a l'ambition de s'engager dans la voie de la départementalisation. Si les Mahorais, par leur vote en mars prochain, confirment cette volonté unanime des élus, Mayotte deviendra le 101e département français dans le cadre d'une feuille de route progressive et adaptée. Nous devrons répondre aux attentes des Mahorais et les Mahorais s'engager à transformer leurs habitudes en matière d'impôts locaux, d'état civil, de cadastre et la justice religieuse devra laisser la place à la justice de la République. Ce cheminement vers la départementalisation prendra vingt à trente ans -ne mentons pas aux Mahorais !-, ce qui n'empêchera pas que des décisions soient prises dès l'an prochain.

La Guyane connaît une situation préoccupante. Depuis neuf jours, elle est bloquée par un mouvement mené par les transporteurs et les consommateurs pour obtenir une diminution du prix de l'essence de 50 centimes. Le Gouvernement, afin de répondre à cette revendication, a envoyé une mission qui, dès la semaine prochaine, sera chargée de remettre à plat le système de formation du prix de l'essence. C'est le plus élevé non du monde mais de France : avec un prix de 1,77 euros le litre, on peut comprendre la colère des Guyanais. Outre des raisons géographiques, le coût de l'essence y est renchéri de 30 % depuis que le syndicat des concessionnaires automobiles y a obtenu une essence aux normes européennes. De plus, outre-mer, les taxes sur le carburant ne sont pas prélevées par l'État mais par les départements qui en ont fixé librement le taux, compris entre 30 et 50 %.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - C'est excessif !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - A court terme, que peut-on faire ? Comme vous, monsieur Patient, je ne veux ni discours ni annonces, mais du concret. D'abord, obtenir des pétroliers une baisse du prix à la pompe, ce qui n'était pas si simple puisque les élus n'y sont pas parvenus. (M. Georges Patient s'exclame) Le Gouvernement a négocié avec les pétroliers une diminution de 30 centimes le litre, et ce dès lundi matin.

M. Charles Revet.  - Très bien !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Comment réduire de 20 centimes le prix à la pompe pour satisfaire la revendication portée par les élus d'une baisse de 50 centimes ? Restent les taxes...

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Il faut les diminuer !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - C'est le seul moyen de faire lever immédiatement les barrages. Mais la diminution de ces taxes, m'a-t-on dit, placera les élus en difficulté pour boucler leur budget. En tant qu'élu, je comprends cette préoccupation. Nous avons décidé d'affecter 10 millions du fonds exceptionnel d'investissement pour l'outre-mer à ces collectivités, alors que la perte de recettes due à la baisse de 20 centimes représente 7 à 8 millions.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Donc, un bonus !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - J'entends dire que ce fonds exceptionnel n'existerait pas... Son existence sera pourtant entérinée par l'adoption des crédits de cette mission et de son programme 123. Je veux dire solennellement que les factures présentées au secrétariat d'État à l'outre-mer seront honorées dès janvier prochain et l'enveloppe de 10 millions répartie selon les modalités proposées par les collectivités bénéficiaires.

J'en ai pris l'engagement solennel, et j'ai d'ailleurs envoyé trois lettres au président de la région pour lui expliquer les modalités de cette mesure.

Si vous voulez répondre aux attentes des Guyanais, prenez vos responsabilités ! L'État a pris les siennes. Mais peut-être votre position est-elle déterminée par des arrière-pensées politiciennes... (Protestations sur les bancs socialistes) Dans la presse guyanaise de ce matin, les élus UMP exprimaient le sentiment que le Gouvernement avait fait un effort et que c'était désormais à la région de prendre ses responsabilités. (Marques d'approbation sur les bancs UMP) Je suis disponible autant que vous le voudrez pour répondre à vos questions et vous confirmer de nouveau nos intentions. Cela fait neuf jours que les enfants sont privés d'école, que les commerces sont fermés et de nombreux chefs d'entreprise craignent à présent la faillite. Il faut savoir terminer un conflit, et en sortir par le haut, c'est-à-dire en satisfaisant tout le monde sans grever nos budgets.

Monsieur Cointat, nous allons inaugurer prochainement une nouvelle prison à la Réunion. Par ailleurs, nous sommes évidemment très soucieux de l'amélioration de l'enseignement à Mayotte.

Madame Michaux-Chevry, nous sommes très attentifs au secteur de Basse-Terre : j'ai demandé au nouveau préfet qui prendra ses fonctions lundi prochain d'en faire une cible prioritaire de son action. Basse-Terre pourra devenir un pôle culturel dans votre région.

M. Marsin m'a interrogé sur le chlordécone. Un plan national de 32 millions d'euros a été mis en place, dont l'application est confiée au directeur général de la santé. Nous veillerons à ce que la population soit informée, et nous aiderons les agriculteurs à se reconvertir.

Je ne répondrai pas aux propos excessifs de M. Flosse. Je dirai simplement que l'État ne se désengage nullement de Polynésie ; la réorganisation de la gendarmerie n'entraîne aucune baisse d'effectifs.

En ce qui concerne les collectivités locales, monsieur Frimat, nous sommes conscients qu'un certain nombre de choses doivent être remises à plat en Martinique. Nous travaillons en collaboration avec Claude Lise. J'indique que le conseil régional de Martinique boucle chaque année son budget avec un excédent de 16 millions d'euros (M. Jean-Paul Virapoullé le conteste) qui pourraient utilement être investis dans l'économie du département.

Monsieur Virapoullé, votre enthousiasme en faveur de l'outre-mer n'a d'égal que le mien ! J'ai suggéré à Valérie Pécresse, comme vous le demandiez, de réfléchir à la création d'une université de médecine francophone dans l'Océan Indien. (On s'en félicite à droite) Je me rendrai prochainement à la Réunion avec le directeur d'EDF pour les énergies renouvelables et nous ferons en sorte que la bagasse soit payée à un juste prix. (M. Jean-Paul Virapoullé s'en réjouit)

En ce qui concerne Wallis-et-Futuna, j'ai annoncé hier, lors de la réunion des premiers états généraux du service militaire adapté, que je souhaitais une implantation de ce service à Futuna. Pour ce qui est de la TNT, notre objectif est d'offrir dès 2010 dix chaînes de télévision diffusées en même temps dans tout l'outre-mer.

Monsieur Magras, j'ai été heureux d'entendre pour la première fois dans cet hémicycle un représentant de Saint-Barthélemy. Le Gouvernement considère que toutes les collectivités d'outre-mer doivent être représentées dans les deux chambres du Parlement : une collectivité ne peut être représentée dans une assemblée et pas dans l'autre. (Applaudissements à droite)

M. Gérard Larcher, président du Sénat.  - Très bien !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - La distance géographique ne donne pas moins de droits mais davantage pour ce qui est de la représentation.

J'apporterai par écrit des réponses plus détaillées à vos questions. Ce budget favorisera un développement exceptionnel de l'outre-mer. Il répond aux attentes des habitants en matière de logement et d'aide sociale. En Guyane, il pourrait débloquer la situation, si chacun consent à jouer son rôle et si l'on renonce aux oppositions factices entre la droite et la gauche, le Gouvernement et la population.

Beaucoup de travail nous attend mais nous sommes enthousiastes et motivés. A nous de montrer que l'outre-mer est une chance pour la France, et la France une chance pour l'outre-mer. (Applaudissements au centre, à droite, ainsi qu'au banc des commissions)

M. le président.  - Monsieur Loueckhote, vous avez cédé votre temps de parole tout à l'heure. Vous pouvez intervenir maintenant, si vous le souhaitez.

M. Simon Loueckhote.  - Je vous remercie de déroger à la règle. Je voulais faire remarquer une chose : depuis seize ans que je siège au Sénat, c'est la première fois que je vois autant de sénateurs assister à la discussion de la mission « Outre-mer ». Je m'en réjouis ! (On s'en félicite également au centre et à droite) Je remercie tout particulièrement le Président Larcher : c'est la première fois que je vois un Président du Sénat assister à ce débat, à une heure aussi tardive ! (On applaudit à droite)

Examen des crédits

Les crédits de la mission sont adoptés.

L'article 64 est adopté.

Article 65

M. Jean-Paul Virapoullé.  - Je souhaite clarifier la position des entreprises d'outre-mer sur ce sujet. Sur le fond, après de longues discussions, nous sommes tombés d'accord. Mais sur le timing, nous ne sommes pas d'accord. La Lodeom, comprenant ce nouveau barème d'exonérations de charges sociales, aurait dû être discutée au mois d'octobre. Aujourd'hui, on nous demande de mettre la charrue avant les boeufs, en votant l'article 65 du projet de loi de finances avant la loi Lodeom.

Lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, Mme la ministre de l'intérieur et vous-même, monsieur le ministre, avez assuré que cet article entrerait en application au moment de la publication de la Lodeom. Acceptez-vous de transcrire dans la loi cet engagement ? Cela apaiserait les inquiétudes et clarifierait le débat. (Applaudissements à droite)

M. Jacques Gillot.  - Monsieur le ministre, si vous ne voulez pas débattre, dites-le ! Quant à nous, nous sommes parfois en désaccord avec le Gouvernement mais nous sommes ouverts à la discussion. Nous ne sommes pas conservateurs ! Mais le projet de Lodeom ne nous satisfait pas. Dire, comme vous le faites, que nous attendons maintenant cette loi avec impatience alors que nous n'en voulions pas, c'est manquer de respect aux parlementaires que nous sommes.

Nous vous avons posé une question simple. Un fonds de 16 millions d'euros a été mis en place pour l'outre-mer, et nous nous en réjouissons. Mais vous comptez prélever sur cette somme 10 millions d'euros pour la Guyane. Il ne reste que 6 millions pour les équipements structurants. Le fonds a-t-il changé de destination ? Dans le cas contraire, comment comptez-vous l'abonder ? Voilà notre question : elle est simple. Nous sommes prêts à avancer ensemble, dans l'intérêt de la population.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Je ne comprends pas votre réaction. Je n'ai pas pu apporter de réponse détaillée à chacune de vos questions : je vous répondrai plus longuement par écrit. Rien dans ce que j'ai dit ne manque au respect dû aux parlementaires.

Mais je me réjouis de voir qu'après avoir critiqué la Lodeom, et organisé contre elle des manifestations, vous vous plaigniez qu'elle n'arrive pas assez vite !

Je me réjouis qu'elle soit attendue. Le fonds qui vient d'être voté comporte 40 millions en autorisations d'engagement et 16 millions en crédits de paiement ; sur les 40 millions d'autorisations d'engagement, 10 millions iront à la Guyane tandis que nous paierons les factures qui arriveront sur les 16 millions de crédits de paiement. Ces crédits sont suffisants pour répondre aux attentes de la Guyane et aux autres demandes et si le fonds était très sollicité, nous l'abonderions, c'est aussi simple que cela. Quand j'ai dit que l'on mélangeait les torchons et les serviettes, c'était pour dire que l'important était que le fonds fût alimenté. Il est à la disposition des territoires et j'attends les dossiers, à commencer par ceux de la Guyane. Si c'est un succès, je m'en réjouirai, car mon métier de ministre consiste à faire avancer les dossiers et je suis preneur de projets porteurs de développement économique. Ne commençons pas à dire que le fonds est épuisé alors que nous le créons.

M. Jacques Gillot.  - Si nous discutons maintenant de cet article, la discussion sera-t-elle close lorsque nous aborderons la Lodeom ? Il y a là un problème de cohérence formelle, et c'est pourquoi la commission des finances propose de reporter la mise en oeuvre de cet article après le vote de la Lodeom. Il s'agira alors de définir une stratégie globale et l'on ne peut examiner aujourd'hui une mesure séparément. La Lodeom est déposée depuis le 8 juillet sur le bureau du Sénat et sa mise en discussion a été retardée ; vous nous dites que c'est en raison de la crise, j'en prends acte.

Sur le fond, mieux vaut que la loi Girardin s'applique jusqu'à fin 2009 car les économies que vous voulez réaliser aujourd'hui peuvent coûter bien cher demain. Évitons les incohérences, ne créons pas de trappes à bas salaires et prenons le temps d'ajuster le dispositif.

M. Serge Larcher.  - Cet article 65 anticipe sur la Lodeom et tout le problème vient de ce qu'il définit le champ d'application de l'exonération sociale patronale et en unifie le plafond. Après une expérimentation avec la loi Perben, ce dispositif avait été développé par la loi de 2000 afin de soutenir la compétitivité des entreprises et, même s'il y a eu des effets d'aubaine, il a été incitatif car l'emploi salarié a progressé de 13 % outre-mer. Les entreprises d'outre-mer sont exonérées de cotisations pour la fraction du salaire inférieure à 1,3 Smic, mais à 1,4 Smic pour les secteurs des industries renouvelables, de la communication, de la pêche et de l'agriculture, 1,7 Smic pour celles du tourisme, de l'hôtellerie et de la restauration. Le nouveau dispositif unifie l'exonération à 1,4 Smic (1,5 pour les secteurs prioritaires) mais supprime l'exonération à 100 %. Les entreprises bénéficiant des taux les plus élevés entreront dans le champ des futures zones franches globales d'activité, ce qui aboutira à alourdir le coût du travail dans les secteurs qui sont au coeur d'une économie moderne et les entreprises du tourisme subiront une augmentation de 12 % de leurs charges. Selon le Gouvernement, environ 40 % des exonérations concernent des salaires inférieurs à 1,6 Smic. Cette réforme est motivée par la recherche d'économies : l'État pourrait dégager 138 millions.

L'article 65 anticipe sur la Lodeom et Mme Alliot-Marie a pris l'engagement à l'Assemblée nationale de ne pas l'appliquer avant la promulgation de cette loi. La commission des finances a de même repoussé son application à la publication de la future loi. Il aurait été normal de ne pas préjuger de celle-ci.

Le projet de Lodeom est très loin d'avoir l'assentiment des élus et des socioprofessionnels. La concertation doit se poursuivre. Je demanderai la suppression de l'article.

M. le président.  - Amendement n°II-164, présenté par M. Lise et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Serge Larcher.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-50 rectifié, présenté par MM. Magras, Virapoullé, Mme Michaux-Chevry et M. Fleming.

I. - Dans le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, après les mots :

à la Réunion

insérer les mots :

, à Saint-Barthélemy

II. -  Dans le premier alinéa du c) du 3° du II du même texte, après les mots :

de la Réunion

insérer les mots :

, de Saint-Barthélemy

III. - Dans le dernier alinéa du 3° du II du même texte, après les mots :

ces départements

insérer les mots :

, à Saint-Barthélemy

IV. - Dans le 4° du II du même texte, après les mots :

de la Réunion

insérer les mots :

, de Saint-Barthélemy

M. Michel Magras.  - Lorsque la loi Girardin a été votée, Saint-Barthélemy était une commune de la Guadeloupe et le fait qu'elle ait bénéficié de cette loi n'a pas été sans conséquence puisque nous connaissons quasiment le plein emploi. Or ma collectivité a été oubliée dans la Lodeom. Ne pas y figurer lui coûterait 300 à 400 emplois sur une population de 8 000 personnes, soit l'équivalent de 3 millions d'emplois pour une population de 60 millions. Chaque entreprise qui embauche devrait payer 400 à 500 euros de plus pour un salaire de 2 000 euros. La Lodeom s'appliquant à Saint-Martin, une entreprise de transport aérien qui y serait basée pourrait proposer des prix plus que compétitifs, de même qu'une entreprise de cette île pourrait venir soumissionner à des conditions proches de la distorsion de concurrence. Mon amendement y remédie tout en répondant au souci du secrétaire d'État. La nouvelle approche ne doit pas coûter plus cher à l'État car nous vivons actuellement sous le bénéfice de la loi Girardin.

M. le président.  - Amendement n°II-163, présenté par M. Marsin.

I. - Dans le premier alinéa du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, après les mots :

à la Réunion et à Saint-Martin,

insérer les mots :

sauf dispositions plus favorables applicables au titre de la loi n°96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville,

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les pertes de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale de l'application des dispositions législatives plus favorables prévues par la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 précitée sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Daniel Marsin.  - Le dispositif de l'article 65 se superposera à celui des zones franches urbaines, comme celle créée dans ma commune des Abymes, et qui n'est pas remis en cause. C'est pourquoi mon amendement prévoit l'application du dispositif le plus favorable.

M. le président.  - Amendement n°II-97 rectifié bis, présenté par M. Fleming, Mme Bout, M. Virapoullé, Mme Michaux-Chevry et MM. Jean-Paul Fournier et Magras.

I. - Dans le 4° du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots :

ou de Saint-Martin

par les mots

, de Saint-Martin ou de Saint-Barthélemy

II. - Compléter le même 4° par un alinéa ainsi rédigé :

« Seuls sont pris en compte les personnels de ces entreprises concourant exclusivement à ces dessertes et affectés dans des établissements situés dans l'un de ces départements ou à Saint-Martin.

III. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour la sécurité sociale de l'extension du nouveau régime d'exonérations de cotisations patronales en faveur de l'outre-mer est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux tarifs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-Paul Virapoullé.  - Les sociétés basées à Saint-Martin et assurant le transport entre Saint-Martin et Saint-Barthélemy doivent bénéficier des exonérations prévues à l'article 65. C'est un geste d'équité et d'efficacité, qui ne coûtera pas cher. Le Gouvernement poussera-t-il la générosité jusqu'à lever le gage ?

M. le président.  - Amendement n°II-96 rectifié bis, présenté par M. Fleming, Mme Michaux-Chevry, M. Virapoullé, Mme Bout et MM. Magras et Jean-paul Fournier.

I. - Dans le premier alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots :

ou à la Réunion

par les mots :

, à la Réunion ou à Saint-Martin

II. - Dans le 2° du IV du même texte, après les mots :

à l'article 199 undecies B du code général des impôts

insérer les mots :

, ou de même nature dans les cas des entreprises domiciliées à Saint-Martin,

III. - Dans le b) du 4° du IV du même texte, remplacer les mots :

et en Guadeloupe

par les mots :

en Guadeloupe et à Saint-Martin

IV. -  Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour la sécurité sociale de l'extension à Saint-Martin du nouveau régime d'exonérations de cotisations patronales en faveur de l'outre-mer est compensée à due concurrence par la création de droits additionnelles aux tarifs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-Paul Virapoullé.  - Cet amendement des élus UMP d'outre-mer, coordonnés par Mme Michaux-Chevry, étend à Saint-Martin les exonérations prévues pour les autres départements. Cette île en pleine expansion souhaite en effet mettre en oeuvre un politique en faveur des énergies renouvelables et de la protection de l'environnement, principal atout touristique. Nous comptons sur la compréhension du Gouvernement.

M. le président.  - Amendement n°II-106, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales.

I. - Remplacer les 4° et 5° du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale par dix alinéas ainsi rédigés :

 « 4° À l'exception des entreprises situées en Guyane, dans les îles des Saintes, à Marie-Galante, et à la Désirade :

« a) Soit exercer leur activité principale dans l'un des secteurs suivants :

 « - Tourisme ;

« - Agro-nutrition ;

« - Environnement ;

« - Énergies renouvelables ;

« b) Soit avoir réalisé l'une des opérations suivantes :

« - Avoir signé avec un organisme public de recherche ou une université une convention, agréée par l'autorité administrative, portant sur un programme de recherche dans le cadre d'un projet de développement portant sur la Guadeloupe, la Martinique ou la Réunion si les dépenses de recherche, définies aux a à g du II de l'article 244 quater B du code général des impôts, engagées dans le cadre de cette convention représentent au moins 5 % des charges totales engagées par l'entreprise au titre de l'exercice écoulé ;

« - Avoir réalisé des opérations sous le bénéfice du régime de transformation sous douane défini aux articles 130 à 136 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire si le chiffre d'affaires provenant de ces opérations représente au moins un tiers du chiffre d'affaires de l'exploitation au titre de l'exercice écoulé.

« Les conditions prévues aux 1° et 2° s'apprécient à la clôture de chaque exercice. »

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - La perte de recettes pour l'État et les organismes de sécurité sociale résultant de l'élargissement des secteurs d'activité bénéficiant de l'exonération prévue au premier alinéa du IV de l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux tarifs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.  - Cet amendement clarifie le dispositif du régime d'exonération renforcé et élargit les secteurs concernés en instituant quatre catégories qui bénéficieront indifféremment à la Martinique, la Guadeloupe, la Réunion et Saint-Martin : tourisme, agro-nutrition, environnement et énergies renouvelables.

M. le président.  - Amendement n°II-107, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales.

Remplacer le 7° du II de cet article par cinq alinéas ainsi rédigés :

7° Le V est ainsi rédigé :

« V. - Le bénéfice de l'exonération prévue au présent article est subordonné au fait, pour l'entreprise ou le chef d'entreprise, de ne pas avoir fait l'objet d'une condamnation pénale passée en force de chose jugée soit pour fraude fiscale, soit pour travail dissimulé, marchandage ou prêt illicite de main-d'oeuvre, en application des articles L. 5224-2, L. 8224-1, L. 8224-3, L. 8224-4, L. 8224-5, L. 8224-6, L. 8234-1 et L. 8234-2 du code du travail.

« Lorsqu'un organisme chargé du recouvrement est avisé, par la transmission du procès-verbal établi par un des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 8271-1 du code du travail, de la commission d'une des infractions mentionnées à l'alinéa précédent, il suspend la mise en oeuvre des exonérations prévues par le présent article jusqu'au terme de la procédure judiciaire. » ;

8° Après le V, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« V bis. - Le bénéfice de l'exonération prévue au présent article est subordonné au fait, pour l'employeur, d'être à jour de ses obligations déclaratives ou de paiement à l'égard de l'organisme de recouvrement. La condition de paiement est considérée comme remplie dès lors que l'employeur a, d'une part, souscrit et respecte un plan d'apurement des cotisations restant dues et, d'autre part, acquitte les cotisations en cours à leur date normale d'exigibilité. »

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.  - Cet amendement aligne le dispositif applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon sur le nouveau dispositif, en conditionnant les exonérations de charges au respect par les employeurs de leurs obligations à l'égard des organismes de recouvrement, et en reprenant le nouveau dispositif sanctionnant une fraude fiscale ou certaines infractions en matière de droit du travail.

M. Charles Revet.  - Bien.

M. le président.  - Sous-amendement n°II-184 à l'amendement n° II-107 de Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi le troisième alinéa de l'amendement n° II-107 :

« V. - Le bénéfice de l'exonération prévue au présent article, ainsi que de tous autres allègements et exonérations de cotisations patronales prévus par le présent code, est subordonné au fait, pour l'entreprise ou le chef d'entreprise, de ne pas avoir fait l'objet d'une condamnation pénale passée en force de chose jugée soit pour fraude fiscale, soit pour travail dissimulé, marchandage ou prêt illicite de main-d'oeuvre, en application des articles L. 5224-2, L. 8224-1, L. 8224-3, L. 8224-4, L. 8224-5, L. 8224-6, L. 8234-1 et L. 8234-2 du code du travail.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Nous reprenons pour Saint-Pierre-et-Miquelon la même rédaction exactement que pour les autres départements.

M. le président.  - Amendement n°II-8, présenté par M. Doligé, au nom de la commission des finances.

A la fin de la première phrase du III de cet article, remplacer les mots :

du 1er avril 2009

par les mots :

du mois suivant celui au cours duquel a lieu la publication de la loi pour le développement économique de l'outre-mer, dont le projet a été déposé au Sénat le 28 juillet 2008

M. Éric Doligé, rapporteur spécial.  - Nous reportons l'entrée en vigueur de ce dispositif au mois qui suit la publication de la Lodeom, comme Mme Alliot-Marie s'y était engagée à l'Assemblée nationale.

M. le président.  - Amendement n°II-55 rectifié, présenté par M. Marsin.

A la fin de la première phrase du III de cet article, remplacer les mots :

à compter du 1er avril 2009

par les mots :

à compter du premier jour du mois suivant l'entrée en vigueur de la loi pour le développement économique de l'outre-mer, dont le projet a été déposé sur le Bureau du Sénat le 28 juillet 2008.

M. Daniel Marsin.  - Même préoccupation, avec une nuance : la date de publication n'est pas la même que la date d'entrée en vigueur.

M. le président.  - Amendement n°II-94, présenté par M. Virapoullé.

I. - A la fin de la première phrase du III de cet article, remplacer les mots :

du 1er avril 2009

par les mots :

du 1er juillet 2009 sous réserve de la publication de la loi pour le développement économique de l'outre-mer, dont le projet a été déposé au Sénat le 28 juillet 2008

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du report de l'entrée en vigueur du présent article aux salaires dus à compter du 1er juillet 2009 est compensée à due concurrence pour la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-Paul Virapoullé.  - Il est défendu.

M. Éric Doligé, rapporteur spécial.  - Défavorable à l'amendement de suppression, qui ne profiterait pas aux départements d'outre-mer.

Le premier amendement de M. Magras, qui rectifie un oubli et rééquilibre les choses entre Saint-Barthélemy et Saint-Martin, recevra peut-être un avis favorable du Gouvernement.

Le nouveau dispositif de l'article 65 sera plus favorable que celui des ZFU : je suggère de retirer l'amendement n°II-163. Qu'en pense le Gouvernement ?

L'amendement n°II-97 rectifié bis sera satisfait par l'adoption de l'amendement n°II-50 rectifié.

L'amendement n°II-96 rectifié bis devrait être satisfait dans le cadre de la Lodeom : quel est l'avis du Gouvernement ?

S'agissant de l'amendement n°II-106, les secteurs prioritaires doivent être définis en concertation avec les départements concernés. Par ailleurs, l'extension du régime préférentiel d'exonérations risquerait de s'accompagner d'une extension parallèle des secteurs éligibles aux zones franches globales d'activité. Qu'en pense le Gouvernement ?

Favorable à l'amendement n°II-107, qui étend deux dispositifs de contrôle à Saint-Pierre-et-Miquelon, ainsi qu'au sous-amendement n°II-184, qui apporte une précision rédactionnelle.

L'amendement n°II-55 rectifié sera satisfait par l'amendement n°II-8 de la commission. Nous suivrons l'avis du Gouvernement. Idem pour l'amendement n°II-94.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Défavorable à l'amendement de suppression n°II-164 : si nous incluons cette mesure dans le projet de loi de finances, c'est que les entreprises ont besoin de savoir dès maintenant le taux de charges qui sera applicable l'année prochaine. On ne peut appliquer de nouvelles charges en milieu d'année !

C'est au nom de cette réalité que nous avons introduit cet article dans la loi de finances.

Je tiens à revenir sur quelques points : toutes les entreprises d'outre-mer ne paieront plus aucune charge sociale sur tous les salaires jusqu'à 1,4 Smic, ce qui est le salaire moyen en outre-mer. Entre 1,4 et 3,8 Smic, les charges seront rétablies de façon progressive. En métropole, certaines entreprises sont exonérées de charges jusqu'à 1,6 Smic mais, au-delà, elles ne bénéficient plus d'exonérations. Nous allons bien au-delà pour l'outre-mer. En outre, les secteurs prioritaires comme le tourisme, l'environnement ou l'agro-nutrition ne supporteront plus aucune charge jusqu'à 1,6 Smic et leur pente de rétablissement ira jusqu'à 4,5 Smic, soit environ 5 000 euros par mois. Nous vous proposons un dispositif très raisonnable qui permettra au secteur économique de trouver des réponses à la hauteur de ses attentes. Le Gouvernement s'engage sur la date d'application de cette mesure et il va créer un groupe de suivi avec la Fédération des entreprises d'outre-mer qui se réunira toutes les six semaines et qui examinera tous les dossiers. J'étais à l'assemblée générale de cette fédération et un chef d'entreprise m'a dit qu'avec ce système il serait obligé de payer 40 000 euros de charges supplémentaires. Certes, mais à l'avenir, il ne payera plus que 20 % des 70 000 euros de taxe professionnelle qu'il acquitte aujourd'hui. Au bout du compte, ce chef d'entreprise y gagnera. Dans la loi de finances pour 2010, le Gouvernement réajustera ce dispositif s'il apparaissait qu'un secteur rencontrait des difficultés. Si nous avons inscrit ces mesures avant la Lodeom, c'est pour des raisons de prévision comptable, afin que les entreprises ne se sentent pas piégées dans cette affaire. C'est pourquoi je suis défavorable à l'amendement n°II-164.

Je suis heureux de donner satisfaction au sénateur Magras pour son premier amendement alors qu'il est le premier parlementaire de Saint-Barthélemy. Avis d'autant plus favorable sur l'amendement n°II-50 rectifié (applaudissements à droite) qu'une erreur rédactionnelle nous a fait oublier Saint-Barthélemy.

Je veux rassurer M. Marsin : compte tenu des modifications des zones franches urbaines, les zones franches globales d'activité seront plus favorables. C'est donc bien le meilleur système qui s'appliquera. Votre amendement n°II-163 est donc satisfait.

L'amendement n°II-97 rectifié bis sera satisfait si l'amendement n°II-50 rectifié est adopté.

Je souhaite le retrait de l'amendement n°II-96 rectifié bis car il trouvera mieux sa place dans la Lodeom. Même demande sur l'amendement n°II-106 car les secteurs prioritaires sont définis dans chaque territoire par une expression des collectivités et des forces vives. Cela m'ennuierait de fixer ce soir, pour la Martinique et la Guadeloupe, des secteurs prioritaires alors qu'on n'a pas entendu les forces vives du territoire. En revanche, cet amendement pourra être examiné lors de l'examen de la loi d'orientation.

Avis défavorable sur l'amendement n°II-107 au profit du sous-amendement qui le satisfait.

Je voudrais bien accepter l'amendement n°II-8 sur la date d'application des charges, mais il y a un risque d'inconstitutionnalité. Je ne veux pas prendre ce risque. Je redis solennellement que le Gouvernement n'appliquera pas les mesures de calcul des charges avant que la loi ne soit promulguée. Je souhaite que nous l'examinions avant février : je demande donc le retrait de cet amendement.

Même demande sur les amendements nosII-55 rectifié et II-94.

L'amendement n°II-164 n'est pas adopté.

L'amendement n°II-50 rectifié est adopté.

M. Charles Revet.  - A l'unanimité ! (Applaudissements à droite)

L'amendement II-163 est retiré.

L'amendement n°II-97 rectifié bis devient sans objet.

M. Jean-Paul Virapoullé.  - M. le ministre ayant pris l'engagement de donner satisfaction à notre collègue Fleming dans la Lodeom, je retire l'amendement.

L'amendement n°II-96 rectifié bis est retiré.

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.  - Les déclarations de M. le ministre sont un peu contradictoires car il a souhaité rattacher cet article 65 à la mission « Outre-mer » et maintenant, il veut reporter la discussion à l'examen de la Lodeom. J'accepte pourtant de retirer mon amendement.

L'amendement n°II-106 est retiré.

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.  - Je suis favorable au sous-amendement du Gouvernement.

Le sous-amendement n°II-184 est adopté.

L'amendement n°II-107, sous-amendé, est adopté.

M. Éric Doligé, rapporteur spécial.  - M. le ministre n'a peut-être pas remarqué que j'étais le premier sénateur du Loiret et qu'à ce titre, il aurait pu accepter mon amendement. (Sourires) Je vais néanmoins le retirer.

L'amendement n°II-8 est retiré.

M. Daniel Marsin.  - Compte tenu des assurances données par M. le ministre, je retire mon amendement.

L'amendement n°II-55 rectifié est retiré.

L'amendement n°II-94 est retiré.

L'article 65, modifié, est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°II-108, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales.

Après l'article 65, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Après l'article 568, il est créé un article 569 ainsi rédigé :

« Art. 569.- Par dérogation à l'article 568, dans les départements d'outre-mer, seuls peuvent vendre du tabac au détail les personnes ayant la qualité de commerçants, titulaires d'une licence accordée au nom du département par le président du conseil général.

« Cette licence ne peut être accordée pour la vente au détail du tabac dans un magasin de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 200 mètres carrés ou dans un magasin de vente en gros ouvert aux particuliers.

« La délivrance de cette licence est soumise au versement, au profit du département d'outre-mer concerné, d'une redevance annuelle dont le montant est fixé par délibération du conseil général.

« Les conditions d'application du présent article, notamment le nombre de licences susceptibles d'être créées dans chaque département, ainsi que les modalités de cessation d'activité, au plus tard le 1er janvier 2011, des points de vente dépourvus de licence, sont définies par décret. »

2° Dans l'article 574, la référence : « 568 » est remplacée par la référence : « 570 ».

II. - Après l'article L. 3511-2-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3511-2-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 3511-2-2.- Le représentant de l'État dans le département détermine, par arrêté, les distances auxquelles les débits de tabac, en France métropolitaine, et les commerces pourvus d'une licence de vente au détail du tabac, dans les départements d'outre-mer, ne peuvent être établis autour des édifices et établissements suivants :

« 1° Établissements d'instruction publique et établissements scolaires privés ainsi que tous établissements de formation ou de loisirs de la jeunesse ;

« 2° Stades, piscines, terrains de sport publics ou privés.

« Ces distances sont calculées selon les règles mentionnées aux dixième et onzième alinéas de l'article L. 3335-1.

« L'existence des débits de tabac régulièrement installés ne peut être remise en cause pour des motifs tirés du présent article. »

Mme Anne-Marie Payet.  - En métropole, la vente au détail du tabac est assurée dans le cadre d'un monopole défini à l'article 568 du code général des impôts. Lors de la départementalisation de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion, le législateur n'a pas souhaité appliquer, à titre provisoire, ce régime de monopole à ces territoires.

Il en résulte que les ventes de tabac s'y effectuent librement par tout commerçant, sans agrément quelconque de l'administration. L'accès au tabac est donc, dans les départements d'outre-mer, particulièrement aisé, alors qu'il est très réglementé en métropole.

Dans la rue principale de mon village, qui fait quelques centaines de mètres, il existe sept points de vente et la plupart ne sont pas des débits « secs », comme dit le rapport de Bercy, car ils vendent aussi de l'alcool.

Le Gouvernement s'est engagé l'an dernier à expertiser les modalités d'extension du monopole d'État à l'outre-mer. Le rapport est enfin disponible depuis quelques jours et mes amendements tiennent compte de ses conclusions. L'extension du monopole n'est pas envisageable, selon ce rapport, compte tenu des spécificités des économies locales. J'ai donc accepté d'atténuer la portée de mon amendement : je ne propose plus l'extension pure et simple du monopole mais un encadrement plus strict de la vente au détail du tabac.

Votre commission vous demande de réserver la vente au détail du tabac aux seules personnes qui bénéficieront d'une licence délivrée, contre redevance, par les conseils généraux des départements d'outre-mer. Elle prévoit également l'extinction pure et simple, au plus tard le 1er janvier 2011, des points de vente dépourvus d'une telle licence. Ces licences ne pourront toutefois être délivrées dans des zones d'exclusion fixées par arrêté préfectoral, aux abords des établissements d'enseignement et des équipements sportifs, c'est-à-dire les lieux de rassemblement des jeunes. Ces zones d'exclusion s'appliqueront également en métropole, sans remettre en cause l'implantation existante des débits de tabacs.

Il est rassurant de se dire que le tabagisme des jeunes est moins important dans les DOM qu'en métropole mais vous connaissez le surnom de la Réunion, monsieur le ministre : c'est « l'île intense » et c'est également l'île aux paradoxes. Nous avons une faible proportion de fumeurs, mais la plupart d'entre eux sont des fumeurs excessifs. Près de 600 décès par an sont liés au tabac, soit six fois plus de morts que sur les routes. Le taux de mortalité due au tabac chez les femmes a augmenté de 13 % en quelques années.

Nous ne pouvons rester insensibles à cette situation. Les représentants de la Direction générale des douanes ont été dans les DOM étudier la question et la concertation a été la plus large possible.

M. le président.  - Sous-amendement n°II-197 à l'amendement n° II-108 de Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales, présenté par le Gouvernement.

I. - Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le 1° du I de l'amendement n° II-108 pour l'article 569 du code général des impôts, après les mots :

mètres carrés

insérer les mots :

, à l'exclusion des surfaces réservées à la distribution de carburants,

II. - Supprimer le II du même amendement.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Ce sous-amendement propose de ne pas prendre en compte dans le calcul de la surface de vente les espaces réservés à la distribution des carburants lorsqu'ils existent. Il permet aux stations-service possédant moins de 200 mètres carrés de vente en magasin de solliciter une licence de vente de tabac indépendamment de leur surface extérieure réservée à la distribution de carburants. Il supprime l'instauration d'une distance minimum entre les débits de tabac et les édifices et établissements mentionnés à l'article L.3511-2-1 du code de la santé publique. Cette mesure supposerait une concertation étroite entre le Gouvernement, la confédération nationale des buralistes de France et les organismes représentatifs de la profession dans les Dom, qui n'a pas encore eu lieu. Ce sous-amendement donne en grande partie satisfaction à Mme Payet, tout en évitant certaines difficultés de son amendement.

M. Éric Doligé, rapporteur spécial.  - Avis favorable à cet amendement qui ne crée pas de charges pour l'État et qui est dans l'intérêt de la santé publique. Sur le sous-amendement, que nous n'avons pas eu le temps d'examiner, nous nous en remettons à la légendaire sagesse du Sénat.

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.  - Sur les dossiers délicats, il faut avancer pas à pas. Ce sous-amendement supprime deux points forts de mon amendement auxquels j'étais très attachée. Je voudrais qu'on s'engage à y réfléchir. A force de se réfugier derrière des considérations économiques, on en arrive à commettre des erreurs monumentales comme celle de la chlorodecone. Souvenez-vous des déclarations du professeur Belpomme. Les considérations économiques doivent-elles faire oublier les impératifs de santé publique ? Je ne le crois pas. Je représenterai plus tard l'intégralité de mon amendement d'origine.

Le sous-amendement n°II-197 est adopté.

L'amendement n°II-108, sous-amendé, est adopté et devient article additionnel.

M. le président  - Amendement n°II-109, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales.

Après l'article 65, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les troisième et quatrième alinéas du 1 de l'article 268 du code des douanes, le pourcentage : « 100 % » est remplacé par le pourcentage : « 110 % 

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.  - Dans les départements d'outre-mer, les conseils généraux fixent l'assiette du droit de consommation qui s'applique au tabac vendu sur leur territoire. Ils ont ainsi la possibilité de moduler cette assiette en fixant un pourcentage supérieur à 66 % et au plus égal à 100 %  soit du prix de vente au détail des produits du tabac qui font l'objet d'une homologation en France continentale, soit de la moyenne pondérée pour les produits non homologués en France continentale. Cet amendement propose de donner aux conseils généraux d'outre-mer une marge de manoeuvre supplémentaire en fixant le seuil maximal à 110 %. Ainsi, les conseils généraux qui le souhaitent pourront, dans une optique de santé publique, renchérir le prix du tabac sur leur territoire afin d'en réduire l'accès, notamment aux plus jeunes. C'est une préconisation du rapport précité.

M. Éric Doligé, rapporteur spécial.  - Avis favorable.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Même avis, cela permettra d'augmenter ce prélèvement. Si les représentants de la Guyane étaient encore là, je leur dirais que cela permettra à la collectivité départementale de Guyane d'augmenter ses prélèvements et de trouver des recettes ; la santé des Guyanais n'en sera que meilleure.

L'amendement n°II-109 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°II-110, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales.

Après l'article 65, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les 1° et 2° de l'article 302 F bis du code général des impôts sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les voyageurs en provenance ou à destination d'un département d'outre-mer, l'exonération ne s'applique que dans la limite de quarante cigarettes, vingt cigarillos, dix cigares et cinquante grammes de tabac à fumer ; »

Mme Anne-Marie Payet.  - Cet amendement transpose aux départements d'outre-mer -qui sont en dehors du territoire fiscal communautaire en ce qui concerne les droits d'accises- les dispositions de l'article 8 de la directive du 20 décembre 2007 qui abaisse les contingents de produits du tabac bénéficiant d'une franchise de TVA et de droits d'accises. Pour des raisons de santé publique outre-mer, il importe de fixer les contingents applicables au minimum autorisé par la directive, soit : 40 cigarettes, 20 cigarillos, 10 cigares et 50 grammes de tabac à fumer.

Je salue cette initiative européenne, adoptée un 20 décembre, jour de fête à La Réunion et où l'on commémore la fin de l'esclavage. Adopter cet amendement, c'est lutter contre un esclavage moderne plus difficile à combattre que celui qu'a aboli Victor Schoelcher. En plus, la perte fiscale actuelle est de plus de 6 millions par an...

M. Éric Doligé, rapporteur spécial.  - Avis favorable mais quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. D'abord parce qu'une directive européenne est en cours de transposition et qu'il convient d'attendre. Ensuite parce qu'il n'y a eu aucune étude d'impact. La perte fiscale est modeste et les duty free attirent les touristes.

Mme Lucette Michaux-Chevry.  - Je ne comprends pas bien. Quand je viens de Saint-Martin, par exemple, on va compter combien j'ai de cigarettes dans ma valise ? Alors que nous sommes à un quart d'heure de vol de La Barbade ou de Trinidad ! On subit déjà des contrôles de sécurité, on aura en plus des contrôles de cigarettes ! Cela portera tort au tourisme, surtout que Saint-Domingue et Cuba n'observeront pas les mêmes règles.

M. Jean-Paul Virapoullé.  - J'ai milité contre le tabagisme et j'ai voté le doublement de la taxe sur le tabac. Mais il faut de la mesure en toute chose. En outre, les DOM étant entourés de zones à duty free, ce serait complètement inefficace contre le tabagisme. Enfin se posent des problèmes de conditionnement : les cigares se vendent par boîtes de 25 ! Il faut être raisonnable et attendre la transposition pour harmoniser cela sur tout le territoire. Je voterai contre cet amendement.

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.  - Ce n'est pas dans l'avion qu'on comptera les cigarettes, c'est le commerçant qui ne pourra pas en vendre davantage que le contingent. Quant à la directive, elle date du 20 décembre 2007 et elle est applicable depuis hier.

L'amendement n°II-110 n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°II-124, présenté par Mme Michaux-Chevry.

Après l'article 65, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - Le deuxième alinéa de l'article 49 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l'octroi de mer est ainsi rédigé :

« Les ressources disponibles du fonds régional pour le développement et l'emploi sont affectées, chaque année, à une part communale et à une part intercommunale. »

II - Le cinquième alinéa (2°) du même article est ainsi rédigé :

« La part intercommunale est constituée de 20 % des ressources annuelles du fonds régional pour le développement et l'emploi. Cette ressource est affectée à la section d'investissement des budgets des syndicats mixtes ou d'établissements publics nécessaires au développement, notamment en matière de traitement des déchets. Cette ressource est répartie entre les différents établissements concernés au prorata de la population des communes membres. »

III. - 1. Les pertes de recettes résultant pour les régions du transfert de l'affectation du solde du produit de l'octroi de mer sont compensées à due concurrence par la création d'une dotation additionnelle à la dotation globale de fonctionnement.

2. Les pertes de recettes résultant pour l'État de la création d'une dotation additionnelle à la dotation globale de fonctionnement sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts

Mme Lucette Michaux-Chevry.  - Le fonds régional pour le développement et l'emploi, créé en 1992, est affecté aux régions qui reversent les sommes collectées aux communes ayant des projets de développement. Après qu'on eût constaté une sous-consommation de ces crédits, la loi du 2 juillet 2004 a défini un nouveau mode de répartition, soit une part communale pour 80 % et une part régionale pour 20 %. Mon amendement propose que les communautés de communes bénéficient de ces 20 %.

M. Éric Doligé, rapporteur spécial.  - Il paraît plus sage de laisser aux régions la liberté de financer les projets de développement qu'elles souhaitent. Avis défavorable.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Il faut certes faire en sorte que chacun puisse s'y retrouver et que le jeu politique ne prive pas certaines collectivités de recettes.

M. Charles Revet.  - Ça existe pourtant !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Aucune collectivité ne peut exercer de tutelle sur une autre. Mais une concertation s'impose avant de modifier la répartition du fonds. Je m'engage à la lancer. Je souhaite le retrait.

L'amendement n°II-124 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-161, présenté par Mme Michaux-Chevry.

Après l'article 65, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - A la première phrase du premier alinéa du D de l'article L. 4434-3 du code général des collectivités territoriales, les mots : « dépasse 50 000 habitants » sont remplacés par les mots « dépasse 30 000 habitants ».

II. - La perte de recettes résultant pour l'État de l'abaissement du nombre d'habitant pour bénéficier du fonds routier est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux tarifs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Lucette Michaux-Chevry.  - Je souhaite que les EPCI et les communes qui organisent les transports bénéficient des fonds routiers. Ce sont les habitants qui paient la taxe à la région et c'est elle qui en répartit le produit ; mais cette répartition est tout sauf équitable.

M. Éric Doligé, rapporteur spécial.  - La masse disponible restant inchangée, l'aide sera diluée si on multiplie les collectivités bénéficiaires. En l'absence d'expertise préalable, la commission des finances est réservée, sinon défavorable.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Je souhaite le retrait. Le Gouvernement envisage, dans le cadre de la future loi de développement, de faciliter la mise en place d'une autorité unique d'organisation des transports dans certains territoires. Nous pourrons reprendre le débat à cette occasion.

Le Gouvernement s'associe à l'angoisse des familles de Saint-Pierre-et-Miquelon, où quatre Saint-Pierrais ont disparu à la suite du chavirage de leur bateau. Les recherches sont en cours ; nous espérons tous qu'elles aboutiront.

M. le président.  - Le Sénat partage, comme vous, l'inquiétude des familles.

L'amendement n°II-161 est retiré.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 3 décembre 2008, à 10 h 30.

La séance est levée à 1 h 20.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du mercredi 3 décembre 2008

Séance publique

A DIX HEURES TRENTE, A QUINZE HEURES ET LE SOIR

Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l'Assemblée nationale (n°98, 2008-2009)

Rapport (n°99, 2008-2009) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation

Examen des missions :

- Enseignement scolaire

MM. Gérard Longuet et Thierry Foucaud, rapporteurs spéciaux (rapport n°99, annexe n°13)

M. Jean-Claude Carle, Mmes Françoise Férat et Brigitte Gonthier-Maurin, rapporteurs pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n°100, tome V)

- Aide publique au développement (+ articles 59 quinquies et 59 sexies)

Compte spécial : accords monétaires internationaux

Compte spécial : prêts à des états étrangers

M. Michel Charasse, rapporteur spécial (rapport n°99, annexe n°4)

M. Edmond Hervé, rapporteur spécial (Compte spécial : accords monétaires internationaux, rapport n°99, annexe n°4)

M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n°100, tome II)

MM. Christian Cambon et André Vantomme, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (avis n°102, tome III)

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales (+ articles 59 A à 59 D, 59, 59 bis, 59 ter et 59 quater)

Compte spécial : développement agricole et rural

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial (rapport n°99, annexe n°3)

MM. Gérard César, Daniel Soulage, Jean-Marc Pastor et François Fortassin, rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques (avis n°101, tome I)

_____________________________

DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :

- M. Jean-Paul Fournier, Mme Marie-Thérèse Bruguière, M. Gérard Cornu, Mmes Marie-Hélène Des Esgaulx, Sylvie Desmarescaux, M. Alain Dufaut, Mme Catherine Dumas, MM. Jean-Léonce Dupont, Jean Faure, Alain Fouché, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Gisèle Gautier, MM. Alain Gournac, Adrien Gouteyron, Michel Houel, Mme Lucienne Malovry, MM. Alain Milon, Robert Navarro, Louis Pinton, Hugues Portelli et François Zocchetto une proposition de loi visant à rendre permanent le principe de parité au sein du tableau des adjoints au maire des communes de 3 500 habitants et plus ;

- M. Alex Türk et Mme Sylvie Desmarescaux une proposition de loi relative à l'inscription d'une initiation à l'utilisation du défibrillateur cardiaque entièrement automatique dans le déroulement de la Journée d'appel de préparation à la défense.