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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Échec d'une CMP

Questions orales

Difficultés d'accès au crédit des collectivités locales

Filière aluminium en France

Emprunts toxiques de Dexia

Situation de l'hôpital de Manosque

Offre publique de soins dans les Hauts-de-Seine

Statuts d'auto-entrepreneur et d'artisan

Échangeur sur l'A26

Remise en service de matériel ferroviaire

Métro transmanche

Mesures agro-environnementales territorialisées

Hébergement d'urgence en Île-de-France

Emplois de la vente à distance

Centre hospitalier d'Évry

Syndicats mixtes et aménagement touristique

Achat en ligne par les collectivités territoriales

Fouilles corporelles intégrales abusives

Bilan de la législation sur les violences faites aux femmes

Elections à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à la Cour de justice de la République

Mineurs délinquants (Procédure accélérée -Nouvelle lecture)

Discussion générale

Elections à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à la Cour de justice de la République (Suite)

Mineurs délinquants (Procédure accélérée  -  Nouvelle lecture) (Suite)

Discussion générale (Suite)

Elections à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à la Cour de justice de la République (Suite)

Mineurs délinquants (Procédure accélérée  -  Nouvelle lecture) (Suite)

Question préalable

Sécurité sanitaire du médicament (Nouvelle lecture)

Discussion générale

Elections à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à la Cour de justice de la République (Suite)

Sécurité sanitaire du médicament (Nouvelle lecture - Suite)

Compétitivité (Questions cribles thématiques)

Organisme extraparlementaire (Candidature)

Proposition de résolution

Dépôt d'une question orale avec débat

Sécurité sanitaire du médicament (Nouvelle lecture - Suite)

Discussion générale (Suite)

Explications de vote

Conventions internationales (Procédure simplifiée)

Organisme extraparlementaire (Nomination)

Projet de loi de finances rectificative pour 2011

Discussion générale

Question préalable




SÉANCE

du mardi 13 décembre 2011

40e séance de la session ordinaire 2011-2012

présidence de M. Jean-Patrick Courtois,vice-président

Secrétaires : M. Jean Boyer, M. Alain Dufaut.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Échec d'une CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2012 n'est pas parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle des questions orales.

Difficultés d'accès au crédit des collectivités locales

M. Michel Teston.  - Les collectivités territoriales peinent à accéder au crédit, ce qu'atteste un rapport de l'Association des maires de France du 7 octobre 2011. Résultat, pour certaines, l'investissement est devenu impossible. En outre, l'application des règles prudentielles de Bâle III risque d'accroître ces difficultés, incitant les banques à se détourner de ce marché.

Certes le Premier ministre a annoncé une enveloppe de 3 milliards, voire 5 milliards si nécessaire. Cependant, malgré cette annonce, la Caisse des dépôts et consignations a rejeté des demandes de collectivités. Et la nouvelle activité de prêts aux collectivités locales par la Banque postale ne devrait pas voir le jour avant la fin du premier trimestre 2012, comme MM. Wahl et Bailly l'ont indiqué lors de leur audition par la commission de l'économie.

Quant au projet de création d'une agence pour les collectivités territoriales, il est au point mort, faute de soutien des pouvoirs publics. Que compte faire le Gouvernement ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. le ministre de l'économie. Les effets de Bâle III sont encore difficiles à mesurer, d'autant que certaines modalités d'application ne sont pas encore déterminées, notamment pour la liquidité.

De surcroît, les difficultés actuelles s'expliquent par des tensions conjoncturelles dues à la situation de Dexia. D'où l'enveloppe de 3 milliards, qui pourra être portée à 5 milliards, et, à plus long terme, la création d'un nouvel acteur autour de la Banque postale et de la Caisse des dépôts et consignations pour, à terme, équilibrer l'offre et la demande sur ce marché.

M. Michel Teston.  - L'enveloppe de 3 milliards est une bonne nouvelle. Pour autant, les conditions d'octroi du crédit sont si strictes que l'enveloppe pourrait ne pas être entièrement consommée : quant aux prêts de la Banque postale, selon ses dirigeants, auditionnés par la commission de l'économie, leur taux serait modulé en fonction de la solvabilité des collectivités territoriales. Attention à ne pas pénaliser les collectivités locales pauvres !

Enfin, pourquoi cette timidité envers l'excellente idée d'une agence publique de financement aux côtés des banques et du pôle public ? La garantie de l'État ne serait pas sollicitée. J'appelle le Gouvernement à préciser sa position sur ce point.

Filière aluminium en France

M. Thierry Repentin.  - Les deux dernières usines d'aluminium, une filière dont on sait l'importance pour notre balance commerciale, sont menacées par la fin de leur contrat en approvisionnement d'énergie. Celui de l'usine de Saint-Jean-de-Maurienne de Rio Tinto Alcan arrive à terme en 2013. Les négociations avec EDF sont difficiles.

Rio Tinto Alcan, qui s'était d'abord engagée dans une procédure contentieuse, privilégie désormais la négociation avec EDF. Cependant, aucune entreprise au monde, dans ce secteur, particulièrement électro-intensif, n'achète d'énergie au prix du marché. Le dossier doit avancer, sans quoi cet outil stratégique pour la France disparaîtra. Un avenir bien sombre pour la vallée de la Maurienne ! Voilà une occasion pour l'État actionnaire de mettre en oeuvre le discours de Tricastin et de passer de la parole aux actes !

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - L'Union européenne interdit désormais les contrats préférentiels dont bénéficiait l'usine emblématique de Saint-Jean-de-Maurienne. Le Gouvernement, mobilisé, s'emploie au renouvellement du contrat de fourniture en énergie en 2014 et les discussions sur la phase II du contrat Exeltium sont très avancées. Grâce au nucléaire, la France peut offrir des prix plus bas : les industries électro-intensives paient leur électricité 60 % moins cher -c'est un élément clef pour elles. Abandonner le nucléaire, ce serait mettre en péril 2 millions d'emplois. On ne peut pas, en même temps, vouloir sortir du nucléaire et offrir une énergie peu coûteuse aux industriels.

M. Thierry Repentin.  - Je n'avais pas l'intention de lancer ce matin un débat sur le nucléaire. Si des décisions ne sont pas prises avant la fin de l'année, si EDF ne fait pas un geste, Rio Tinto Alcan, multinationale pour laquelle cette activité ne représente pas 2 % du chiffre d'affaires, tirera un trait sur une industrie historique dans notre pays. Ce serait incompréhensible. Quel que soit notre choix sur l'énergie, dont nous débattrons le moment venu, le curseur doit être mis sur l'emploi industriel. Plus de mille emplois sont ici en jeu. Un gouvernement proactif doit faire bouger les choses !

Emprunts toxiques de Dexia

Mme Nathalie Goulet.  - J'avais déjà interrogé le Gouvernement, le 26 mai dernier, sur ce sujet. On est passé de l'insouciance à une prudence excessive, dommageable pour les collectivités territoriales. Vingt-deux millions d'emprunts toxiques en cours, 1 800 communes de moins de 10 000 habitants, voilà les conclusions du passionnant rapport de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale. Dans mon département de l'Orne, les contrats précisaient en grosses lettres que les collectivités ne couraient aucun risque, malgré des taux ô combien exotiques. Le Gouvernement va-t-il suivre les recommandations de l'Assemblée nationale et proposer une solution globale pour sortir ces 1 800 communes de cet imbroglio juridique et financier ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Il est faux de dire qu'aucune suite n'a été donnée à votre question du 26 mai 2011 sur les emprunts structurés. Le Gouvernement a su réagir. Dès 2009, une charte de bonne conduite a été élaborée et la mission du médiateur du crédit, qui bénéficie désormais de l'appui de la Banque de France, a été prolongée.

S'agissant de Dexia, le plan de restructuration n'affecte pas la situation des collectivités territoriales. Ces dernières restent débitrices. La création d'une structure de défaisance ne fait pas l'objet d'un consensus : ce serait, le débat sur le projet de loi de finances pour 2012 l'a montré, donner une prime aux collectivités territoriales les moins vertueuses. Enfin, toutes les collectivités territoriales ne sont pas dans la même situation face aux prêts structurés.

Mme Nathalie Goulet.  - J'ai seulement précisé que j'avais déjà posé une question à ce sujet. Merci de cette réponse que je transmettrais aux collectivités territoriales. Quoi qu'il en soit, cette affaire est une excellente leçon pour l'État et les collectivités territoriales.

Situation de l'hôpital de Manosque

M. Claude Domeizel.  - Les élus s'inquiètent de la situation financière des hôpitaux, en particulier de l'hôpital de Manosque et celui de Digne-les-Bains, qui connaissent, avec la T2A, de graves difficultés. Que compte faire le Gouvernement ? En outre, le Premier ministre s'était engagé à prendre en compte la demande de création d'un service de réanimation à l'hôpital de Manosque, dont l'activité a crû de 25 %. Sera-t-elle examinée indépendamment de la situation financière ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Comme dans le reste du pays, les hôpitaux de Digne-les-Bains et de Manosque voient leur situation s'améliorer. D'après un rapport de l'Igas de début 2011, l'activité dans le département ne justifie pas la création d'un deuxième service de réanimation dans les Alpes-Maritimes. Elle suffit à peine à occuper le service de Digne... Si la conférence territoriale de santé souhaite un transfert de la réanimation de Digne à Manosque, l'ARS étudiera ce projet. Toutefois, celui-ci pourrait compromettre le retour à l'équilibre financier de l'hôpital de Manosque.

M. Claude Domeizel.  - Manifestement, nous ne disposons pas des mêmes informations. Je me réjouis de ces perspectives rassurantes. S'agissant de la réanimation, la réponse du Gouvernement, si elle ne me satisfait pas, a le mérite d'être claire : un service de réanimation, pas deux. J'en ferai part aux intéressés...

Offre publique de soins dans les Hauts-de-Seine

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Les projets de restructuration de l'ARS mettent en péril l'accès aux soins dans les Hauts-de-Seine. Un regroupement de l'hôpital Antoine-Béclère à Clamart, qui dispose d'un service de fécondation in vitro et de pneumologie, avec les hôpitaux Bicêtre et Paul Brousse, tous deux situés dans le Val-de-Marne, laissera 500 000 personnes face à des inégalités accrues. Tout cela signe votre projet de privatisation galopante de la santé, à l'oeuvre depuis la loi HPST. De Louis Mourier à Colombes et Max-Fouretier à Nanterre, en passant par Beaujon, à Clichy, intégré dans le groupe 3BLM, je pourrais multiplier les exemples. Stoppez donc ces projets pour garantir à tous un accès de qualité à la santé.

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Je vous prie d'excuser l'absence du ministre de la santé. L'ARS des Hauts-de-Seine mène un projet de restructuration pour améliorer le pilotage de l'APHP et assurer l'accès aux soins tout en les articulant avec la recherche et l'enseignement. Concernant Clamart, un regroupement est à l'étude, conformément aux souhaits du service de pneumologie. Tout en maintenant une consultation à Béclère, cela permettrait une remise aux normes et l'ouverture de lits sans remettre en cause le volume d'activité aux urgences.

Le dialogue entre l'hôpital Louis-Mourier à Colombes et l'hôpital Max-Fourestier à Nanterre, encouragé par l'ARS, améliorera le service rendu aux usagers, en permettant à ces deux hôpitaux, déjà liés par un dialogue quotidien, d'exister dans une offre de soins de plus en plus concurrentielle.

Enfin, l'hôpital Beaujon est de trop petite taille et la multiplicité de structures de petite taille n'est pas propice à la sécurité. La création de pôles de compétence et de mutualisation des fonctions support -la restauration et la blanchisserie par exemple-, qui ne signifie en rien le regroupement sur un même site, autorisent des projets médicaux durables et pérennes.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Je rappelle l'objectif affiché par la loi HPST : réduire les inégalités de soins et augmenter l'efficience -ce qui signifie supprimer des postes ! Rendez-vous compte : une ville-préfecture comme Nanterre, de 90 000 habitants, qui accueille chaque jour 95 000 travailleurs et 30 000 étudiants, pourrait se voir priver de son hôpital de proximité ! Heureusement, un peu partout, se forment des comités de défense et la mobilisation s'organise contre des restructurations inacceptables. Écoutez donc leurs propositions alternatives !

Statuts d'auto-entrepreneur et d'artisan

M. Jacques Mézard.  - Le statut d'auto-entrepreneur, créé par la LME du 4 août 2008, visait à encourager l'entreprenariat individuel par une série de facilités sur lesquelles est revenue, en partie, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Pour autant, cela n'a pas suffi : les artisans, touchés par la rigueur se plaignent d'une distorsion de concurrence, particulièrement dans le secteur du bâtiment, déjà touché par le relèvement de la TVA à 7 %. Dans mon département du Cantal, ces auto-entrepreneurs sont au nombre de mille, et cela va croissant : rien qu'en septembre quatorze auto-entrepreneurs se sont inscrits au répertoire des métiers, contre dix nouveaux artisans. Il s'agit le plus souvent de salariés qui quittent leur entreprise pour bénéficier de ces conditions plus favorables ! Quelles réponses le Gouvernement compte-t-il apporter sur ce dossier ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Veuillez excuser l'absence de M. Lefèvre. Pour répondre aux demandes des artisans, le régime de l'auto-entrepreneur a été aménagé : contribution de 0,1 à 0,3 % selon leur chiffre d'affaires pour la formation, déclaration systématique du chiffre d'affaires, inscription obligatoire au registre entre autres. D'autres textes règlementaires destinés à assurer la transparence vont être mis en consultation sur ce sujet qui a fait l'objet d'un rapport de Pierre Morel-A-l'Huissier.

Ce régime connaît un vrai succès -celui de la liberté d'entreprendre : un milliard de chiffre d'affaires déclaré en 2009, 3,2 milliards en 2010 et 2 milliards au premier semestre 2011. Pour le Gouvernement, il a atteint sa maturité.

M. Jacques Mézard.  - Peut-être mais pas dans des conditions saines ! Ce régime doit constituer un tremplin vers le régime de droit commun dans l'artisanat, non permettre une concurrence déloyale ! Des aménagements sont encore à prévoir.

Échangeur sur l'A26

M. Antoine Lefèvre.  - L'A26 relie Calais à Troyes en traversant l'Aisne. Les élus des communes sises entre les sorties 13 et 14 souhaitent la construction d'un échangeur à proximité de Saint-Erme-Outre-et-Ramecourt, avec la D18. Cela faciliterait le trafic dans l'Aisne et le covoiturage, pourvu que l'on aménage des parkings. Je n'ignore pas le coût de cet investissement estimé à 10 millions. Néanmoins, quelles sont les perspectives pour ce projet essentiel à deux groupements de communes rurales aux moyens limités ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Vous avez raison de souligner l'importance du réseau routier national pour l'aménagement du territoire. Une première étude en 1997 avait conclu à un coût trop important. Le projet a donc été abandonné, par sagesse. Même observation concernant les nouvelles études de trafic de juin 2007 : le bilan est négatif à moins que les groupements de communes ne participent à l'investissement. M. Mariani a demandé à la Sanef de transmettre les études aux collectivités concernées : leur apport conditionne la suite du projet.

M. Antoine Lefèvre.  - Merci de cette réponse qui me déçoit un peu... Les collectivités territoriales étudieront précisément les études de la Sanef.

Remise en service de matériel ferroviaire

M. Thierry Foucaud.  - La situation à Sotteville-lès-Rouen est particulièrement choquante : depuis plus de trois ans, 361 locomotives, dont 51 modèles récents, sont à l'arrêt. C'est de la gabegie.

En outre, 320 wagons restent inutilisés. Tous ces matériels se dégradent ; ils sont l'objet d'actes de vandalisme. C'est pourtant la propriété de la Nation, l'argent des usagers et le travail des salariés que l'on gaspille ainsi. Affectons-les plutôt là où on en a besoin. Faut-il y voir un hasard ? Une bâche dissimule désormais locomotives et wagons aux yeux des automobilistes...

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Je ne répondrai pas à votre dernière remarque. Cette situation est la conséquence immédiate de la réduction du fret ferroviaire. C'est un fait -on peut le regretter, pas le contester. En juillet dernier, la SNCF a engagé une société pour surveiller le site 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. Le réemploi est privilégié pour 52 locomotives, tandis que 48 seront affectées à d'autres activités et quitteront le site avant la fin 2011. Quant aux autres, elles doivent faire l'objet d'un désamiantage. Ce chantier a déjà été confié à une entreprise. Enfin, le Gouvernement a demandé la SNCF un bilan précis sur l'ensemble de ces opérations.

M. Thierry Foucaud.  - Pour lutter contre la diminution du fret, appliquons plutôt les objectifs du Grenelle : nous avons largement de quoi donner du travail aux salariés de la SNCF et faire rouler nos matériels de fret. Merci de ce début de réponse.

Métro transmanche

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Lancées le 15 septembre 2011, les assises du ferroviaire ont abordé le ferroviaire européen. Une infrastructure peu coûteuse reliant Calais-Fréthun à Ashford mettrait la côte d'Opale à 30 minutes du Kent -un bassin d'emplois qui recrute. L'investissement, qui ne serait pas trop lourd, redynamiserait le nord de la France. Le tunnel sous la Manche n'est utilisé que pour la moitié de ses capacités. La mise en place pourrait intervenir avant les Jeux olympiques de Londres.

Quel calendrier prévisionnel pour ce projet transfrontalier ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Veuillez excuser M. Mariani. Ce projet présente un potentiel important pour développer l'emploi. Des Eurostar seraient disponibles. Le travail est encore en cours et je veux vous apporter le soutien du Gouvernement en la matière. A la région Nord-Pas-de-Calais de négocier -mais elle n'a pas d'homologue britannique. M. Mariani prépare, pour contourner cette difficulté, un projet de loi permettant des groupements européens de coopération territoriale. Il faut aussi tenir compte des problèmes de sécurité et de contrôles d'identité car la Grande-Bretagne n'est pas membre de l'espace Schengen : le ministère de l'intérieur a créé un groupe de travail afin d'y réfléchir. Enfin, Eurotunnel est prêt à diminuer ses tarifs de péage pour apporter une aide au démarrage.

Les Jeux olympiques de Londres ? L'objectif est très ambitieux, mais le Gouvernement veut encourager à mobiliser les acteurs et vous apporte tout son soutien.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Merci de ces précisions et de ces avancées. En période de crise, le Gouvernement doit être réactif et promouvoir ce projet de bon sens. Je vous suggère une réunion des bonnes volontés pour avancer.

Mesures agro-environnementales territorialisées

M. Michel Doublet.  - Au terme de cinq ans, de 2007 à 2012, les contrats « mesures agro-environnementales territorialisées » (MAE-T) concernent nos exploitations en Charente-Maritime, pour 26 290 hectares, dont 17 000 en contrats 2 et 3. L'ensemble des marais charentais fait l'objet de démarches Natura 2000 et l'activité agricole contribue à leur entretien.

Le dispositif connaît toutefois des limites : retards de paiement, lourdeurs administratives, difficultés d'instruction des dossiers liées au logiciel Osiris.

Le financement est préoccupant, dans un contexte de sécheresse et à la suite de Xynthia ; la poursuite de ces contrats MAE-T conditionne la poursuite de l'élevage pour nombre d'exploitants. La durée des contrats sera-t-elle réduite ? Les acteurs de la Charente-Maritime sont mobilisés pour obtenir la pérennité de ce dispositif ; il en va d'enjeux environnementaux et socio-économiques. Que compte faire le Gouvernement ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Veuillez excuser M. Le Maire. Le Gouvernement partage votre intérêt pour les MAE-T. Les mesures sont ciblées sur la biodiversité et la qualité de l'eau. En 2011, 120 millions ont été engagés ; cet effort se poursuivra en 2012. Plus de 18 000 exploitants sont concernés, pour 341 millions. Les financements prennent en compte la totalité des demandes. Le paiement des dossiers sera accéléré ; au plus tard le 31 mars 2012, quand il y a eu changement, au 31 décembre dans les autres cas.

Il ne faut pas rompre la dynamique des MAE-T : les contrats pourront être prolongés.

M. Michel Doublet.  - Je prends acte de ces engagements, qui ne m'étonnent pas : chaque fois que j'interroge le Gouvernement, il me répond que l'affaire est en cours de règlement. Je fais confiance à M. Le Maire.

Hébergement d'urgence en Île-de-France

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - L'hébergement d'urgence est notoirement insuffisant : 62 % des demandes du « 115 » ne donnent pas lieu à l'octroi d'un logement, faute de places. Le projet de loi de finances pour 2012 prévoit une baisse des crédits de 14,4 %.

En Île-de-France et à Paris, la situation est dramatique -on est loin de répondre aux exigences du Dalo et de l'accueil inconditionnel des migrants. A Paris, 28,9 % des personnes hébergées ont moins de 30 ans ; 16 % des jeunes vivent sous le seuil de pauvreté. Or on prévoit de supprimer des places d'hôtel. Il manque 13 000 places en Île-de-France. La ville de Paris tente de pallier les carences de l'État. Ce dernier va-t-il enfin assumer ses responsabilités, au-delà d'une gestion saisonnière du problème ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Nous avons évoqué le sujet lors de l'examen du budget. Je vous ferai les mêmes réponses. Des restrictions budgétaires ? Des réductions de places ? Il n'y en a aucune ni en Île-de-France, ni ailleurs ! C'est l'inverse : 116 000 places d'hébergement, soit 30 % d'augmentation depuis 2007 ; en Île-de-France, c'est 65 % de places en plus !

Une remise en cause de l'accueil inconditionnel ? C'est faux. Le Gouvernement a toujours rappelé à l'ordre les préfectures dans les deux départements concernés. Il manquerait 13 000 places en Île-de-France ? Ce chiffre est-il fondé ? C'est l'addition de toutes les demandes des associations...

Le budget du Samu social de Paris a augmenté de 100 % par rapport à 2007 et augmente encore cette année. Enfin, l'hébergement n'est pas une fin en soi ; l'hôtel n'est pas une solution adaptée. Nous louons 12 000 chambres en Île-de-France ; la durée de séjour moyenne est de dix-huit mois, sans accompagnement social. Nous voulons remplacer ces chambres par des logements. Le Gouvernement reste totalement mobilisé pour sortir de la rue ceux qui y vivent encore.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - On ne va pas pouvoir s'entendre, monsieur le ministre ! Heureusement qu'il y a des associations -sans elles, ces personnes mourraient. Faut-il citer cette femme qui a accouché d'un enfant mort-né sur le trottoir à Paris ? Or, les subventions aux associations baissent !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - C'est faux !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Les chiffres ont augmenté depuis 2007, certes, mais le nombre de personnes à la rue encore plus ! L'hôtel n'est pas une solution, j'en suis d'accord, mais en attendant des logements, il faut faire face aux besoins et vous diminuez les moyens !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - C'est faux !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - L'État n'assume pas ses responsabilités, je le regrette.

Emplois de la vente à distance

M. Éric Bocquet.  - Le secteur de la vente à distance pèse lourd dans le Nord et surtout à Lille : la moitié des emplois du secteur ont été détruits depuis dix ans. Le chiffre d'affaires des entreprises, qui sont connues, est encore de 11 millions, mais le chômage croît : 500 suppressions annoncées début 2011. Les salariés paient les erreurs stratégiques de leurs dirigeants, qui n'ont pas su anticiper le tournant du numérique. Je rappelle que le salaire d'une travailleuse est de 1 022 euros après 30 ans d'ancienneté ! Comment l'État va-t-il aider les salariés, légitimement inquiets, à préserver leur emploi ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Veuillez excuser M. Bertrand, retenu par la signature d'une charte avec le secteur de la restauration rapide qui doit créer 9 000 emplois d'ici 2014.

Les entreprises de vente à distance, qui relèvent de grands groupes, n'ont pas sollicité le ministère pour du chômage partiel. Le Gouvernement reste vigilant. Un accord-cadre national a été signé en juin 2009 pour accompagner 8 325 salariés vers la formation ; 200 entreprises y ont adhéré. Il vise à sécuriser les parcours professionnels. L'État y consacre 5 millions d'euros. L'accord est géré par la direction régionale du Nord-Pas-de-Calais.

M. Éric Bocquet.  - Au-delà de l'urgence, dans le Nord, un département malheureusement plus frappé par le chômage, les salariés veulent voir ce secteur préservé. A l'heure où l'on vante beaucoup la réindustrialisation, il faut investir dans l'emploi, la formation et l'amélioration de l'outil.

Centre hospitalier d'Évry

M. Michel Berson.  - Le nouveau centre hospitalier sud-francilien doit ouvrir le 23 janvier prochain. Or son avenir est très incertain. Construit par le groupe Eiffage sur la base du PPP -contrat inapproprié pour un hôpital-, il va devoir faire face, pendant 30 ans, à un loyer exorbitant : 42 millions en 2012, financé à 50 % seulement par l'ARS, alors que les comptes de l'hôpital sont dans le rouge !

Eiffage réclame 115 millions de préjudice et 60 millions de loyer supplémentaire.

A peine né, l'hôpital n'est pas viable. Au nom de quoi devrait-il assumer les conséquences financières d'un bail qui ne profite qu'à Eiffage ? La chambre régionale des comptes estime que la maîtrise d'ouvrage publique aurait été préférable. Il faut sortir du PPP, passer par la Caisse des dépôts et consignations. Cela coûtera moins cher que 30 ans de contentieux ! Nous devons défendre l'intérêt général, pas celui d'un groupe privé. La négociation doit se faire à l'échelon du ministère. Avez-vous la volonté politique de l'engager ?

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.  - Veuillez excuser M. Xavier Bertrand. Ce nouveau centre hospitalier joue un rôle majeur : 1 000 lits, dont 700 en MCO. Son ouverture, le 23 janvier, se fera en toute sécurité. Des difficultés avaient été identifiées, comme pour toute fin de chantier. Les réserves ont été levées. L'agrément devrait être donné ; la mise en service sera échelonnée sur trois mois.

Xavier Bertrand se soucie du bon usage des ressources publiques, monsieur le sénateur. L'IGF a rendu son rapport, qui ne confirme pas la position de la chambre régionale des comptes.

Le coût des travaux a été identique à celui d'une maîtrise d'ouvrage traditionnelle, si l'ont veut tenir compte de tous les coûts liés à l'emprunt. Idem pour les loyers : ils intègrent les frais de maintenance et de gros entretien. La construction a été rapide : cinq ans seulement. En outre, le bâtiment est certifié HQE, ce qui autorise de nombreux gains en consommation d'énergie. Les loyers sont de facto intégrés dans le coût du bail emphytéotique mais ne l'ont pas été dans l'estimation de maîtrise d'ouvrage. Enfin, les prestations de très bonne qualité nous garantissent que le bâtiment sera en très bon état lorsqu'il reviendra dans le patrimoine public.

M. Michel Berson.  - Votre réponse est décevante et surprenante. Le Gouvernement recule. Le ministre avait reconnu que le problème nécessitait des mesures urgentes et vous me dites que tout va bien !

Je maintiens que cet établissement n'est pas viable : il faut renégocier au moins les conditions de maintenance et de loyers. L'établissement ne peut pas supporter les charges que lui impose le PPP. Votre réponse ne peut qu'inquiéter les personnels, les élus, les usagers. Nous n'en resterons pas là !

Syndicats mixtes et aménagement touristique

M. Rachel Mazuir.  - Aux termes de l'article L. 342-1-1 du code du tourisme, un syndicat mixte ne pourrait pas être compétent en matière d'aménagement touristique si l'un de ses membres est un groupement de communes. Or cette situation est très fréquente en zone de montagne ! Si un tel syndicat peut organiser des remontées mécaniques, pourquoi pas des opérations plus vastes ?

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.  - L'article L.342-1-1 du code du tourisme est clair : un syndicat mixte comprenant un groupement de collectivités perd sa compétence. Cette situation ne doit pas entraîner la multiplication de structures de gestion diverses. Dès lors que l'EPCI exerce la compétence en matière d'aménagement, le Gouvernement n'est pas opposé à une réflexion sur une évolution de la législation en matière touristique dans le cadre de la récente loi sur les collectivités territoriales.

M. Rachel Mazuir.  - J'entends qu'une ouverture se profile. Je m'en réjouis car il faut mettre fin à cette ambigüité.

Achat en ligne par les collectivités territoriales

M. Hervé Maurey.  - Les réponses du Gouvernement viennent bien lentement : j'ai déjà posé cette question par écrit à deux reprises ! L'absence de réponse est une forme de mépris pour le Parlement et une entrave à son pouvoir de contrôle.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Hervé Maurey.  - Quand la réponse ne se contente pas de paraphraser la question...

Le e-commerce se développe mais les collectivités sont privées de cette facilité car très peu de sites acceptent les mandats administratifs. Les collectivités, notamment rurales, ont pourtant une forte appétence pour l'achat en ligne. Quelles mesures compte proposer le Gouvernement pour régler ce problème simple mais important ?

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.  - Veuillez excuser Mme Pécresse. L'instruction du 24 janvier 2005 a élargi les domaines dans lesquels sont autorisées les dépenses publiques sur internet, et encadré cette pratique. Le paiement des dépenses des organismes publics locaux peut se faire sans virement, en deçà de 750 euros. Le code des marchés publics s'impose. Aux termes de l'article L.1617-11 du code général des collectivités territoriales, le seuil est de 1 500 euros pour les achats de fonctionnement, fixé par l'acte constitutif de la régie. La réglementation en vigueur vous donne satisfaction, monsieur le sénateur.

M. Hervé Maurey.  - Merci de ces précisions. Si j'ai posé la question, c'est que la situation n'est pas satisfaisante. Le Gouvernement pourrait au moins engager une réflexion avec l'AMF et les représentants de l'e-commerce.

Fouilles corporelles intégrales abusives

Mme Maryvonne Blondin.  - Au centre de détention de Salons-de-Provence, un détenu sexagénaire était systématiquement soumis à fouille au corps à l'issue de chaque visite au parloir. Il a obtenu gain de cause de la part du tribunal administratif de Marseille. Ces fouilles sont dégradantes et leur emploi systématique est interdit par l'article 57 de la loi pénitentiaire de 2009 et divers textes internationaux.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

Mme Maryvonne Blondin.  - Or le représentant du ministère de la justice devant le tribunal administratif de Marseille les estime justifiées. Un tel déni de la loi est dramatique de la part de la Chancellerie ! Faut-il rappeler la décision du Conseil d'État du 9 septembre 2011 ? Certains surveillants dénoncent le caractère dégradant et souvent inutile des fouilles corporelles intégrales. L'Observatoire international des prisons est intervenu à plusieurs reprises. Quelles sont les intentions du Gouvernement sur ces pratiques ?

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.  - Veuillez excuser M. Mercier. La recherche d'un équilibre entre le respect de la dignité des détenus et la sécurité est un objectif majeur de l'administration pénitentiaire. L'évolution normative récente tient compte de la jurisprudence de la CEDH et du Conseil d'État. L'article 57 de la loi pénitentiaire et le décret du 23 décembre 2010 énoncent la nécessité d'adapter la fréquence de la fouille à la personne et aux nécessités de la sécurité.

Une circulaire, diffusée le 14 avril, rappelle les principes de nécessité et de proportionnalité. Les chefs d'établissement veillent à sa mise en oeuvre et à l'actualisation des pratiques. La mise à jour des règlements intérieurs est en cours. L'administration vérifie que les dispositions prises au plan local respectent le nouveau cadre juridique.

Mme Maryvonne Blondin.  - Le droit évolue, certes, mais des règlements intérieurs prévoient encore une fouille systématique au retour du parloir ! Le 27 avril 2010, M. Mattei a affirmé devant le comité contre la torture de l'ONU que la systématicité des fouilles est désormais proscrite, ce qui ne se traduit pas toujours dans la réalité. Les conditions de détention, déjà difficiles, s'aggravent, comme le souligne le récent rapport de l'Observatoire international des prisons.

Les fouilles systématiques sont une cause de la recrudescence des suicides : 97 suicides pour les dix premiers mois de 2011 !

Bilan de la législation sur les violences faites aux femmes

M. Roland Courteau.  - Deux textes ont été adoptés sur les violences faites aux femmes : le premier est la loi du 4 avril 2006, que vous avez présentée au Sénat ; le deuxième est la loi du 9 juillet 2010, issue de ma proposition de loi. Quel bilan en tirez-vous ? Qu'en est-il des rapports prévus à l'article 13 de la loi de 2006 et aux articles 13, 21 et 29 de la loi de 2010 ? Quid de l'accès des victimes au logement social ? Des dispositions prévues sur les séances d'information à l'école ?

Une meilleure application de ces dispositions, encore trop insuffisamment connues, hélas, améliorera la protection des femmes. Peu d'ordonnances de protection sont prises, et dans un délai trop long ; c'est très fâcheux car, dans ces situations, il y a urgence et il faut être réactif.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.  - Les chiffres sont terrifiants : une femme décède tous les deux jours et demi sous les coups de son conjoint. Une femme sur dix -soit 3 millions de femmes- est victime de violences au cours de sa vie. Face à cet enjeu majeur, l'application des deux lois que vous avez citées a été engagée : 600 ordonnances de protection ont été prises depuis 2010. Le Gouvernement a lancé un troisième plan interministériel doté de 31,6 millions, soit 30 % de moyens supplémentaires. Nous agissons sur la formation des professionnels, l'information et la sensibilisation dans les écoles. La lutte contre ce fléau passe aussi par la sensibilisation ; d'où la campagne du 25 novembre dernier...

M. Roland Courteau.  - ...prévue par la loi !

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État.  - ... incitant les femmes à oser en parler en appelant le 3919. Je remercie les élus qui ont bien voulu porter le ruban blanc, symbole de cette cause depuis 1991.

La violence faite aux femmes, c'est aussi la prostitution, que Mme Bachelot propose d'abolir. C'est une atteinte à la liberté et à la dignité de la femme.

M. Roland Courteau.  - Juste !

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État.  - Nous oeuvrons pour une société respectant hommes et femmes dans leur égale dignité. A cet égard, bien du chemin reste à accomplir.

M. Roland Courteau.  - S'agissant de la prostitution, il faut aussi revoir la loi de 2003 sur le racolage passif et actif. Dans la plupart des cas, les prostituées sont victimes.

Qu'en est-il des rapports demandés par les deux lois de 2006 et 2010 ? Je ne lâcherai jamais sur ce dossier. Trop de souffrances sont à déplorer. Quid du délai des ordonnances de protection ? Il faut le réduire. Ne pouvez-vous pas en parler au ministre de la justice ? Peut-être le Sénat adoptera-t-il bientôt une proposition de résolution à ce sujet.

La séance est suspendue à 11 h 40.

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présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

La séance reprend à 14h 30.

Elections à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à la Cour de justice de la République

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle les scrutins pour l'élection de six membres titulaires et de six membres suppléants représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, et le scrutin pour l'élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République.

Pour les scrutins relatifs à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, en application de la loi du 23 juillet 1949, la majorité absolue des votants est requise. Les bulletins de vote ne doivent pas comporter plus de six noms, sous peine de nullité.

Pour le scrutin relatif à la Cour de justice de la République, la majorité absolue des suffrages exprimés est requise pour être élu ; les bulletins ne peuvent pas comporter plus de six noms pour les juges titulaires et pour les suppléants, le nom de chaque titulaire devant être obligatoirement assorti du nom de son suppléant. La radiation de l'un entraîne la nullité du vote pour l'autre. Les juges titulaires et les juges suppléants à la Cour de justice de la République nouvellement élus seront immédiatement appelés à prêter serment.

Les deux scrutins auront lieu simultanément, dans la Salle des Conférences, en application de l'article 61 du Règlement. Je prie MM. Boyer, Daunis, Dufaut, Fortassin, Mme Herviaux et M. Humbert, secrétaires du Sénat, de bien vouloir superviser les opérations de vote et de dépouillement. Je déclare ouverts ces scrutins.

Mineurs délinquants (Procédure accélérée -Nouvelle lecture)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle une nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, visant à instaurer un service citoyen pour les mineurs délinquants.

Discussion générale

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.  - La CMP n'a pas trouvé de compromis sur ce texte, ce qui ne surprendra personne. Comme lors de la première lecture, vous déposez une motion de question préalable.

Ce texte combine l'exigence de sanction et de réinsertion du jeune, il ne remet nullement en cause la philosophie de l'ordonnance de 1945. En donnant la primauté à l'éducatif, le service citoyen inscrit le jeune dans un parcours de réinsertion. Il ne concerne que les plus de 16 ans, et s'appuie sur le volontariat. Il faut adopter la réponse pénale à la diversité des profils et ne se priver d'aucun outil. L'autorité judiciaire dispose déjà d'une large palette de mesures ; ce texte la complète, pour des jeunes désorientés qui ne sont pas encore de vrais délinquants. Ceux-là représenteront au plus 10 % des effectifs. Je suis convaincu que les majeurs auront un effet d'entraînement positif sur eux. Ces mineurs délinquants bénéficieront d'un suivi adapté, avec une réflexion sur l'acte de délinquance commis.

L'Epide (Établissement public d'insertion de la défense) sera conforté : trois centres accueilleront ces nouveaux pensionnaires dès janvier 2012, quinze dès juin 2012. Il est prêt à accueillir et former des encadrants ; la montée en charge sera progressive jusqu'en octobre 2012. Merci à son directeur général pour son implication.

Mme la rapporteure s'étonne de n'avoir trouvé aucune indication de financement. C'est que le dispositif n'a pas encore d'existence légale. Il ne tournera à plein régime qu'en 2013.

Le texte met, en outre, notre droit en conformité avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur la composition des juridictions pour mineurs, en en renforçant l'indépendance. S'agissant des modalités de saisine, la requête devant le juge des enfants est conforme à l'exigence de rapidité.

Le service citoyen est un nouveau moyen de prévenir la récidive en privilégiant la réinsertion. Ne nous privons pas de cet outil. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Virginie Klès, rapporteure de la commission des lois.  - En dépit de son intitulé, cette proposition de loi n'a pas seulement pour objet de créer 166 places en Epide pour des mineurs délinquants : s'y ajoute un cavalier chargé de transcrire des décisions du Conseil constitutionnel -ce qui n'urgeait nullement et n'a pas grand-chose à voir avec le service citoyen. Au reste, qu'a-t-il de citoyen ? Aucun amendement n'a été déposé à droite -c'est étonnant quand la majorité gouvernementale estimait ce texte digne d'être amendé par le Sénat.

Il s'agit de placer les mineurs délinquants, quel que soit le délit commis, en Epide : il s'agit pourtant d'internats mixtes ouverts... Surprenant, et dangereux !

L'Epide est prêt à accueillir des mineurs délinquants ? Oui, à condition d'en avoir les moyens. Il faut 40 à 45 ETP supplémentaires. Sans formation, sans encadrement, sans moyens, elle ne pourra assumer cette nouvelle mission.

Où sont les 8 milliards promis ? La décision n'est pas prise, dîtes-vous. Mais la rumeur enfle...

Mme Nathalie Goulet.  - Il ne faut pas se fier aux rumeurs ! (Sourires)

Mme Virginie Klès, rapporteure.  - ... selon laquelle on préparerait l'arrivée en grande pompe du premier jeune, à grand renfort de communication !

M. Louis Nègre.  - Les voies du Seigneur sont impénétrables !

Mme Virginie Klès, rapporteure.  - Les crédits de l'Epide baissent !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - C'est faux !

Mme Virginie Klès, rapporteure.  - Moins 3,4 millions par rapport à 2010. Vous ne pouvez dire que c'est un budget constant...

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Vous ne voulez pas que je vous interrompe pour rectifier, libre à vous.

Mme Virginie Klès, rapporteure.  - Quand bien même je me serais trompée dans mes calculs, ces 166 places viennent-elles en sus ou seront-elles prises sur les places destinées aux majeurs non délinquants ? On sacrifie un dispositif qui fonctionne pour se lancer dans une aventure aux résultats plus qu'incertains.

Nous nous étions déjà opposés à ce texte en première lecture, par respect pour l'Epide dont le budget ne cesse de baisser, comme celui de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) d'ailleurs. On confond rééducation de jeunes délinquants et réinsertion de jeunes volontaires majeurs, on ajoute un cavalier... Tout cela nous invite à réitérer notre motion de question préalable. (Applaudissements à gauche)

Mme la présidente.  - Pour tenir compte du déroulement des scrutins, je vais appeler M. Pillet à la tribune dès maintenant.

M. François Pillet.  - Après l'impossible entente entre l'Assemblée nationale et le Sénat sur cette proposition de loi, notre position n'a pas varié.

« Lorsque les pères s'habituent à laisser faire les enfants, lorsque les fils ne tiennent plus compte de leurs paroles, lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter, lorsque finalement les jeunes méprisent les lois parce qu'ils ne reconnaissent plus au-dessus d'eux l'autorité de rien et de personne, alors, c'est là, en toute beauté et en toute jeunesse, le début de la tyrannie. » Cette hantise était déjà celle de Platon, dans la République.

Notre ambition est d'assurer la protection de nos concitoyens contre une insécurité grandissante due aux mineurs, et de prendre en compte l'avenir de ces derniers. Il ne s'agit nullement de les stigmatiser mais de leur faire prendre conscience du délit commis. Depuis l'ordonnance du 2 février 1945, le droit pénal des mineurs est fondé sur la conviction profondément humaniste que le mineur est un être en construction, à protéger, qui ne doit pas être traité comme un adulte.

La violence des mineurs est de plus en plus grave, elle touche les biens et les personnes, de façon de plus en plus barbare et dégradante. Déshérence, ignorance, misère sociale sont autant de causes. Même les filles n'hésitent plus à commettre l'indicible. Face à cette situation, l'urgence était d'améliorer les délais de la réponse pénale et l'efficacité de la sanction. Pour les mineurs multirécidivistes, les centres éducatifs fermés (CEF) sont une réussite et doivent être pérennisés. Mais il faut aussi donner aux primo-délinquants les moyens de ne pas s'enferrer eux-mêmes. Les aider -car nous les respectons-, tel est l'objet de la proposition de loi Ciotti.

Le mineur donnera son accord avant d'intégrer un Epide. L'encadrement s'inspirera du modèle militaire. La qualité du travail est attestée par les résultats d'insertion de l'établissement : 80 % des jeunes volontaires sont réinsérés dans la vie active, sachant que 30 % des volontaires viennent de quartiers difficiles.

Le sport et l'instruction civique font partie intégrante du programme. Redonner des repères, réveiller la volonté, restaurer l'estime de soi, mens sana in corpore sano ; voici les buts louables de l'Epide. L'expérience s'avérant concluante, ne pas offrir cette chance aux primo-délinquants serait irresponsable de notre part. Ce ne sera en tout état de cause qu'un outil supplémentaire.

Une déstabilisation des Epide ? Le consentement du mineur accueilli, allié à la prévision d'ouverture de places, garantit que ce ne sera pas le cas. Du reste, les problèmes de marginalisation sont souvent identiques entre les volontaires actuels et nos primo-délinquants.

L'article 6 n'est nullement un cavalier : il interdit que le juge des enfants qui a instruit l'affaire préside la juridiction de jugement.

La réforme n'aurait pas été préparée ? La création de 166 places a été annoncée dès le début de l'année et les 8 millions d'euros seront répartis entre les ministères concernés : défense, emploi, justice, ville.

Nous refusons de céder aux incantations et voterons le texte issu de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Éliane Assassi.  - Le Gouvernement vient à peine de bouleverser le droit pénal des mineurs que voici la proposition de loi Ciotti. Il ne s'agit nullement d'un service citoyen, mais de flatter l'opinion publique en invoquant la rigueur militaire. (Protestations sur les bancs UMP) M. Ciotti assume d'ailleurs son caractère ouvertement populiste. (Même mouvement) Les militaires, les magistrats, les professionnels de la jeunesse ne sont guère convaincus et dénoncent cet affichage. M. Ciotti oublie que l'Epide vise avant tout la réinsertion de jeunes marginalisés et repose sur le volontariat. Les pensionnaires délinquants seront stigmatisés, au détriment de l'efficacité.

Cette proposition de loi s'inscrit dans une orientation idéologique constante : les parents seraient démissionnaires, la délinquance de jeunes s'aggraverait. Mensonges ! La part de la délinquance des mineurs stagne, voire baisse. On oublie que ces mineurs sont des enfants en danger.

Plutôt que de s'attaquer aux causes réelles du malaise, le Gouvernement détricote l'ordonnance de 1945. L'aspect éducatif, la spécificité des procédures et des juridictions : voilà ce que vous sapez, année après année ! En sept ans, sept rapports ont été commandés sur la délinquance des mineurs, sans concertation avec les acteurs. Mieux aurait valu consacrer cette énergie à mettre en oeuvre l'ordonnance de 1945. Ce texte n'est qu'un nouvel aveu d'impuissance. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Jean-Marie Bockel.  - La procédure accélérée a son intérêt sur ce sujet, comme la décision du Premier ministre du 22 septembre de créer 166 places en Epide. Il faut que les budgets suivent, c'est une priorité.

Comme M. Zocchetto en première lecture, je regrette l'abus de la procédure par la majorité, qui veut interdire tout débat. C'est dommage : nous aurions sans doute pu faire converger nos positions, proposer des sections spécialisées au sein des Epide, encadrer le nombre de délinquants mineurs par établissement... Le sujet méritait une discussion de fond. L'idée d'accueillir des mineurs délinquants en Epide n'est pas mauvaise en soi mais elle appelle une vraie préparation quand le nombre de places est déjà limité.

Auteur d'un des nombreux rapports sur la prévention de la délinquance des mineurs, je sais que le sujet est complexe. Les propositions sont nombreuses ; il faut des moyens adaptés et pérennes. Ce texte a le mérite d'amorcer la discussion avec tous les acteurs, dont les collectivités territoriales.

Fondés en 2005, les Epide sont une réussite. J'y étais favorable dès le départ et voulais en accueillir un à Mulhouse. On n'accueille encore que 2 000 jeunes : c'est trop peu. Il faut aller plus loin.

L'accueil des mineurs primo-délinquants, même non volontaires, mérite réflexion. Le dispositif est certes coûteux, mais moins que les conséquences de la délinquance. Pourquoi ne pas prévoir des mesures incitatives ?

Je suis très favorable à cette mesure dans son principe. Il faut progresser, avec des mesures simples et peu coûteuses : trinômes dans les lycées, rôle du juge des enfants. J'espère, monsieur le ministre, que vous tracerez des perspectives. (Applaudissements sur les bancs UCR)

Elections à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à la Cour de justice de la République (Suite)

Mme la présidente.  - Je vous rappelle que se déroulent en Salle des Conférences les deux scrutins pour l'élection des représentants de la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et des juges à la Cour de justice de la République. Il vous reste quinze minutes pour voter.

Mineurs délinquants (Procédure accélérée  -  Nouvelle lecture) (Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Jean-Pierre Michel.  - Le groupe socialiste s'est demandé s'il allait de nouveau déposer une question préalable. C'est sans regret que nous le faisons cette fois, ce qui ne préjuge pas notre attitude sur d'autres textes. Le Parlement est là pour légiférer mais cette proposition de loi n'est que d'affichage et, qui plus est, de nature largement réglementaire. L'ordonnance de 1945 permettait déjà de placer des mineurs délinquants en Epide. Mais M. Ciotti voulait attacher son nom à un texte -qui n'a aucune utilité !

M. Alain Gournac.  - Comme le vote des étrangers !

M. Jean-Pierre Michel.  - D'où la question préalable -que vous avez aussi déposée à cette occasion.

Devant l'avalanche de tels textes, les magistrats n'arrivent plus à assurer l'application de la loi. Raison supplémentaire pour voter cette motion.

Reste l'article 6, le seul qui aurait pu nous inciter à examiner le texte. Il traduit de façon scandaleuse les décisions du Conseil constitutionnel. Mais j'ai l'espoir -même si les espoirs sont souvent déçus en politique- que nous remettrons sur le tapis l'ordonnance de 1945, qui mérite d'être réformée. Nous y reviendrons. Il n'y avait pas urgence à voter cet article 6.

Le Conseil constitutionnel a-t-il fait preuve d'indépendance en jugeant que la suppression de juridictions financières avait un lien avec la proposition de loi de simplification, mais que des petites simplifications de formalités que tout le monde souhaite n'en avaient pas. Son attitude est intolérable. (Protestations à droite)

M. Philippe Bas.  - Respectez les institutions de la République ! (M. André Reichardt renchérit)

M. Patrice Gélard.  - Le Conseil constitutionnel applique la Constitution.

Mme Sylvie Goy-Chavent.  - Écoutez le doyen Gélard !

M. Jean-Pierre Michel.  - Si le Conseil constitutionnel persiste dans cette attitude, il devra s'attendre à une réforme constitutionnelle. (Exclamations à droite) C'est la seule institution à statuer ultra petita.

M. Louis Nègre.  - Donnez l'exemple : revenez au sujet qui nous occupe.

M. Jean-Pierre Michel.  - Je le prends comme je l'entends ! (Sourires) Le sujet, c'est la charge de cavalerie des trois quarts des procureurs -évidemment pas celui de Paris ni celui de Nanterre dont on connaît l'indépendance d'esprit !- contre ces lois contradictoires votées incessamment sans étude d'impact, et pour demander des moyens et réclamer une réforme constitutionnelle qui leur assure des garanties statutaires. Monsieur le ministre, vous dû attacher votre nom à la rédaction d'un tel texte, plutôt qu'à la défense de celui-ci qui ne sert à rien. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. André Reichardt.  - Ce n'est pas le sien !

Mme Catherine Tasca.  - Quelle lassitude que de voir notre ordre du jour encombré par des textes de pur affichage.

M. Philippe Bas.  - Et la scolarité obligatoire à 3 ans ?

M. André Reichardt.  - Et le droit de vote des étrangers ?

Mme Catherine Tasca.  - Il ne s'agit souvent que de répondre à l'émotion née d'un fait divers. « La France a peur » proclame M. Ciotti dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi qui ne vise pas la grande délinquance. « Militaire », ce dispositif ne l'est nullement mais on croit bon de rappeler le bon vieux temps où les jeunes délinquants étaient matés à coups de discipline !

Les dispositions de l'article 6 n'ont fait l'objet d'aucune concertation avec les professionnels. Le paragraphe 2 autorise la saisine rapide du tribunal correctionnel pour mineurs alors que le Conseil constitutionnel dénonce ce type de saisine.

La présidence du tribunal des enfants ? Un vrai casse-tête en termes d'organisation ! Si l'on comprend bien vos motivations politiques à faire voter le service citoyen pour mineurs, pourquoi compliquer ainsi la vie des magistrats ? D'autant qu'il n'y avait pas urgence ; Pourquoi ne pas avoir pris le temps de discuter avec les acteurs ? Des propositions alternatives existent.

Le sort des mineurs, notamment ceux qui sont en rupture avec la société, est un sujet délicat. L'instrumentalisation que vous en faites est insupportable. M. Guéant déclare qu'il faut réformer en profondeur l'ordonnance de 1945 : quel aveu d'échec !

Mme Michelle Meunier.  - Très bien !

Mme Catherine Tasca.  - Il y a urgence à tourner la page. (Applaudissements à gauche)

M. Louis Nègre.  - (Applaudissements à droite) Cette proposition de loi de notre excellent collègue Ciotti est un texte fondateur...

Mme Christiane Demontès.  - Pas de provocation !

M. Louis Nègre.  - ... pour une réponse véritablement efficace à la délinquance des mineurs ! (Marques d'amusement à gauche) En tant qu'élus, nous n'avons pas à faire l'autruche devant l'urgence à répondre aux préoccupations quotidiennes des Français. Je veux dire ma totale incompréhension devant le refus de la rapporteure de débattre. Ainsi l'immobilisme aux dires de Mme Ségolène Royal elle-même, serait devenu la marque de fabrique du socialisme français. (Protestations à gauche) Cette attitude dénature le rôle, essentiel pour les libertés fondamentales, du Sénat. Considérez-vous qu'il constitue une « anomalie démocratique » ? Cela dit...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - ....Ouf !

M. Louis Nègre.  - ... nous ne détricotons pas l'ordonnance de 1945... Nous tricotons de nouvelles mesures !

M. Jean-Pierre Michel.  - Vous tricotez une cote de maille !

Mme Catherine Tasca.  - Mal taillée !

M. Louis Nègre.  - Cette proposition de loi comporte un important volet éducatif voulu par les magistrats. Pour nous, le sens de l'effort, la citoyenneté sont des valeurs...

Mme Catherine Tasca.  - Que les adultes montrent l'exemple !

M. Louis Nègre.  - Comme dans la fédération socialiste du Nord ou des Bouches-du-Rhône...

M. Alain Anziani.  - Quelle caricature !

M. Louis Nègre.  - Les arguments de Mme la rapporteure sont aussi virtuels qu'inopérants...

Mme Virginie Klès, rapporteure.  - Ce sont les moyens qui sont virtuels !

M. Louis Nègre.  - Ils sont prévus dans les ministères concernés. La loi est nécessaire pour créer des places en Epide pour les mineurs délinquants, madame la rapporteure. Quant aux moyens, ils seront au rendez-vous dès la proposition de loi votée : les arbitrages budgétaires seront opérés au sein de chaque ministère. Je voterai contre la question préalable car cette proposition de loi est utile. (Applaudissements à droite)

Elections à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à la Cour de justice de la République (Suite)

Mme la présidente.  - Il est 15 h 35 et je déclare clos les deux scrutins pour l'élection de six membres titulaires et de six membres suppléants représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et le scrutin pour l'élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République.

Mineurs délinquants (Procédure accélérée  -  Nouvelle lecture) (Suite)

Mme Esther Benbassa.  - (Applaudissements à gauche) J'ai dit, à l'occasion de la proposition de loi sur le droit de vote des étrangers, mon opposition au texte de M. Ciotti, texte d'affichage déjà retoqué par le Sénat, mais que la majorité présidentielle et le Gouvernement veulent faire passer aux forceps, quitte à recourir à la procédure accélérée, nouvelle lecture... Un tel chantier législatif aurait dû être plus respectueux du Parlement.

Guérir au lieu de prévenir ? A dose homéopathique, car le texte concernera 166 places seulement. En ces temps de rigueur, 8 millions, cela paraît beaucoup.

Les sénateurs Verts, eux, défendent une vision globale de la lutte contre la délinquance juvénile, ainsi qu'une révision en profondeur de l'ordonnance de 1945 : la sanction est parfois nécessaire, mais ce texte n'est qu'un replâtrage quand les Français sont en quête de projets ambitieux.

Refusant ce « prêt à consommer » législatif, les sénateurs écologistes voteront la question préalable ! (Applaudissements à gauche)

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Monsieur Michel, menacer ainsi le Conseil constitutionnel n'est pas acceptable. Cela dit, le Constituant, qui ne tient pas en une seule chambre, peut toujours modifier la loi fondamentale. Les magistrats, que cela plaise ou non, sont là pour dire le droit et appliquer la loi...

M. Gaëtan Gorce.  - Dites-le à M. Courroye !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - L'affirmation est générale... Ensuite, tout en étant attaché à la culture parlementaire, je vous rappelle l'enseignement de Carré de Malberg. La loi est l'expression de la volonté générale, mais c'est aujourd'hui à la condition de respecter le corpus constitutionnel et conventionnel.

La décision du Conseil constitutionnel s'impose à tous, je vous renvoie à l'article 62 de la Constitution. C'est ce que le Gouvernement a fait. Certes, la décision du Conseil constitutionnel nous laissait jusqu'au 31 décembre 2012 mais, quel que soit le résultat des élections de 2012, la nouvelle majorité aura bien d'autres urgences que modifier le mode de saisine du tribunal correctionnel pour enfants ! (Applaudissements à droite)

La discussion générale est close.

Question préalable

Mme la présidente.  - Motion n°1 présenté par Mme Klès au nom de la commission des lois.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture après engagement de la procédure accélérée, visant à instaurer un service citoyen pour les mineurs délinquants.

Mme Virginie Klès, rapporteure.  - On me fait un mauvais procès : le débat a eu lieu, aujourd'hui comme en première lecture. La question préalable ? Avons-nous un autre choix ? Pour amender l'article 6, il aurait fallu une longue concertation avec les acteurs. Le Premier ministre aurait garanti les moyens de l'Epide... Mon Dieu ! L'histoire de l'établissement est pavée de bonnes intentions...

Au reste, un détail : il n'y a qu'un Epide, non « des » Epide, un établissement où les anciens militaires ne représentent que 40 % de l'encadrement. Alors, monsieur Bockel, ne rêvez pas des beaux uniformes des officiers et sous-officiers ! Il ne faut pas mentir : il est faux d'affirmer que le taux de réinsertion atteint 80 % quand il est de 50 %, et c'est déjà beaucoup.

Ensuite, qu'est-ce que 166 places pour lutter contre la délinquance des mineurs ? Plutôt que de mélanger mineurs délinquants et majeurs non délinquants, augmentons les moyens de la PJJ, des centres ouverts.

L'Epide, c'est 2 000 places -l'équivalent d'un lycée-, loin des 20 000 promises en 2005 ! Cessons ce saupoudrage et défendons cette belle idée qu'est l'Epide ! (Applaudissements à gauche)

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - L'avis est défavorable.

M. André Reichardt.  - Je ne voterai pas cette question préalable. Pour avoir participé à la CMP, je sais qu'elle a duré une minute. Quel est l'intérêt ? J'avais une autre idée du travail du Sénat. Nous ne sommes pas à la hauteur des attentes de nos concitoyens.

Sur le fond, j'aurais aimé que l'on parle du texte, non de l'intérêt qu'il y avait à discuter de la proposition de loi.

Mme Virginie Klès, rapporteure.  - Où sont les amendements ?

M. André Reichardt.  - Depuis deux mois, nous sommes inutiles. En vertu de quoi n'aurions-nous pas le droit de modifier l'ordonnance de 1945 ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Elle a été modifiée 25 fois !

M. André Reichardt.  - La jeunesse a changé !

M. André Reichardt.  - Nous aurions pu travailler ensemble, au service de l'Epide. Il n'y a pas d'un côté les bons et de l'autre les méchants. Cet outil offrait une chance supplémentaire de réinsertion. Permettez au sénateur néophyte que je suis de déplorer ce refus du débat parlementaire. (Applaudissements à droite)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - J'ai connu, moi, un temps où les CMP échouaient pour une virgule ! Certes, la jeunesse a changé mais elle n'est pas la seule. L'ordonnance de 1945 a été modifiée 25 fois...

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Quarante-trois !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - ... par vos amis sans, à aucun moment, que ne soit engagé un débat de fond sur la prévention de la délinquance. La jeunesse a changé, dîtes-vous ? En 65 ans, d'autres choses aussi !

M. Louis Nègre.  - Pas la gauche !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Toujours des sanctions ! Toujours de l'affichage !

M. Louis Nègre - Et le projet éducatif ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Monsieur le ministre, ce n'est pas en transformant le Conseil constitutionnel en cour constitutionnelle que vous le rendrez plus indépendant et démocratique ; à cet égard, seul compte le mode de désignation. Je le dirai et le répéterai à chaque occasion ! (Applaudissements à gauche)

M. Jacques Mézard.  - Comme en première lecture, la majorité de notre groupe votera la question préalable : 200 places pour 216 000 interpellations l'an dernier, cette proposition de loi ne résout rien.

Depuis dix ans, l'ordonnance de 1945 a été modifiée 25 fois par affichage. Or, ce texte non seulement ne règle rien mais créera des difficultés sur le terrain, dans les Epide.

Quant à dire que le Sénat est inutile depuis deux mois, j'avais le même sentiment lorsque j'étais dans l'opposition. Vous verrez, on s'y habitue (sourires), d'autant que l'on n'est pas toujours plus satisfait, même dans la majorité.

Mme Catherine Tasca.  - Nous voterons la motion. Nous sommes tout aussi attachés que vous au dialogue parlementaire. En l'occurrence, c'est le Gouvernement qui a décidé l'urgence sur ce texte, élaboré sans concertation aucune. (Applaudissements à gauche)

A la demande du groupe socialiste, la question préalable est mise aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 346
Majorité absolue des suffrages exprimés 174
Pour l'adoption 175
Contre 171

Le Sénat a adopté.

La séance, suspendue à 16 h 5, reprend à 16 h 10.

Sécurité sanitaire du médicament (Nouvelle lecture)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament.

Discussion générale

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.  - Tout aurait été dit sur ce texte ? Pas encore... Votre commission des affaires sociales défend une motion tendant à opposer la question préalable pour, soutient-elle, marquer clairement son désaccord avec le texte issu de l'Assemblée nationale. Ce texte est vital pour notre système de santé. Il y aura un avant et un après Mediator.

Il y aura également des décrets, une refonte de l'organisation de l'Agence de sécurité du médicament, une dimension européenne.

Je souhaite une clause de rendez-vous dans deux ou trois ans pour vérifier que cette loi importante fait bien l'objet d'« un service après-vote ».

Tout n'aurait pas été dit sur la déclaration des liens d'intérêts. Contrairement à l'Assemblée nationale, le Sénat voulait interdire ceux-ci durant trois ans pour les postes de direction de certaines grandes agences. Ne confondons pas liens et conflits d'intérêts. Si une telle disposition existait, nous n'aurions pas pu nommer M. Maraninchi, ce qui serait bien dommage. A chacun d'apprécier la situation des candidats lors de l'audition parlementaire... Avec votre système, il faudrait que les candidats viennent de la planète Mars pour pouvoir concourir !

Je ne veux pas donner trop d'importance à la sémantique, mais après le Mediator, tout doit changer, y compris le nom de l'agence en charge du médicament. Le symbole est important.

Pourquoi maltraiter les associations de patients au nom de la transparence ? Vous introduisez entre elles et les professionnels de santé une inégalité de traitement ! La transparence étant à la base de la confiance, vous provoqueriez un recul de la démocratie sanitaire.

Le décret prévu à l'article 9 bis préserve le dispositif ; il n'en modifie nullement la portée. Les essais cliniques devront être réalisés contre comparateurs actifs.

L'autorisation temporaire d'utilisation (ATU) doit bénéficier largement aux patients. Ne les privons pas d'une chance de guérir !

Sur les actions de groupe, le débat n'est pas mûr. Enfin, le fameux article 19 sur la visite médicale... Je ne veux pas stigmatiser une profession mais celle-ci doit profondément changer. La visite collective est déjà une réalité à l'hôpital dans 30 à 40 % des cas. Certes, elle est difficile à mettre en oeuvre dans les petits hôpitaux, mais le collectif commence à deux personnes.

Une position partisane sur un tel texte est exclue : la santé est l'affaire de tous ! (Applaudissements à droite)

M. Bernard Cazeau, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - Notre approche, dénuée d'a priori politique, s'appuyait sur les conclusions, auxquelles nous avions unanimement souscrit, de la mission Mediator et de la mission conduite par M. Barbier en 2006 sur le médicament.

A l'Assemblée nationale, la gauche avait souhaité laisser une « seconde chance » à ce texte au Sénat. Tel a été ici le sens du vote du groupe UCR. La majorité gouvernementale a malheureusement fait voler en éclat ce beau consensus et fait échouer la CMP.

Quelque 51 articles restaient en discussion. L'Assemblée nationale a repris notre rédaction sur dix-sept articles, sous réserve du nom de la nouvelle agence, auquel nous n'attachons d'ailleurs pas autant d'importance que vous. Nous pensons simplement que la qualifier de française plutôt que de nationale a davantage de sens dans les instances internationales.

L'Assemblée nationale a accepté des propositions émanant du groupe UMP, et quelques miettes du groupe CRC ou des Verts...

M. Ronan Kerdraon. - Allez savoir pourquoi...

M. Bernard Cazeau, rapporteur.  - Cela n'étonnera personne. Je déplore que l'Assemblée nationale ait refusé les apports du Sénat en matière de liens d'intérêts, que nous ne confondons pas avec les conflits d'intérêt dont ils sont la cause. Il en est de même du financement des associations de patients, un corps indépendant d'experts.

Qui plus est, ce texte marque un recul sur les avancées adoptées en première lecture à l'Assemblée nationale : je pense à l'important article 9 bis. Le risque d'entraver le développement de médicaments innovants protègera les me too. En fait, ce texte se résume à la transposition de la directive européenne sur la pharmaco-vigilance.

M. Jacky Le Menn.  - Eh oui !

M. Bernard Cazeau, rapporteur.  - Le flou qui entoure ses dispositions inhibera la future agence. Pourquoi refuser d'harmoniser la procédure de contrôle des déclarations d'intérêts avec celle du projet de loi Sauvé ? En vous contentant de comités internes, vous rendez le système totalement inefficace.

Quant à l'interdiction de liens d'intérêts durant trois ans, votre argument ne tient pas : ces éminents professeurs, à défaut de prendre la direction d'une agence, peuvent en devenir des experts ou, mieux oeuvrer directement pour les soins et la recherche au sein des services hospitaliers.

L'Assemblée nationale a supprimé le site public regroupant les informations sur les liens d'intérêts. Autrement dit, Google tiendra lieu de transparence...

Quant aux ATU, je persiste à croire qu'il faut distinguer les ATU de droit commun des ATU dérogatoires pour répondre à des cas très isolés... Les campagnes sur la vaccination, je le répète, doivent relever de la seule puissance publique. Sur la visite médicale, que reste-t-il de votre article 19 ?

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Grâce à vous, pas grand-chose ! Et M. Hollande, qui avait vu les visiteurs médicaux ! Double langage du parti socialiste !

M. Bernard Cazeau, rapporteur.  - Vos propositions ont été censurées par votre majorité ! Vous n'avez pas su la convaincre, elle qui est prompte à défendre les intérêts particuliers.

Selon un haut responsable de notre système sanitaire, le prochain Médiator sera un dispositif médical. Il n'y a rien dans le texte !

« Le doute doit désormais bénéficier au patient », disiez-vous, monsieur le ministre. L'Assemblée nationale est revenue sur les articles mettant en cause la responsabilité des produits défectueux.

L'article 17 bis alignait leur régime juridique sur celui des produits issus du corps humain. L'article 17 ter allégeait la charge de la preuve qui pèse sur les requérants. Il n'en reste rien.

L'article 30 bis introduisait l'action de groupe pour les victimes d'interactions médicamenteuses. Il fallait profiter de ce texte symbolique. Mais l'Assemblée nationale a préféré le statu quo et renvoyé tout cela aux calendes grecques avec votre complicité, monsieur le ministre !

M. Ronan Kerdraon.  - Cela a fait pschitt !

M. Bernard Cazeau, rapporteur.  - Vos propos vigoureux, monsieur le ministre, perdent au fil des mois de leur fermeté et de leur originalité. Nous ne pouvons nous acharner à convaincre : d'où la question préalable. (Applaudissements à gauche)

M. André Reichardt.  - Encore !

Mme Chantal Jouanno.  - Quel esprit constructif !

Elections à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à la Cour de justice de la République (Suite)

Mme la présidente.  - Voici le résultat du scrutin pour l'élection de six délégués titulaires du Sénat représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

Nombre de votants : 277

Majorité absolue des votants : 139

Ont obtenu :

- M. Jean-Marie Bockel : 242 voix

- M. Eric Bocquet : 239 voix

- Mme Josette Durrieu : 239 voix

- M. Jean-Claude Frécon : 244 voix

- M. Jean-Louis Lorrain : 248 voix

- M. Philippe Nachbar : 251 voix

Ayant obtenu la majorité absolue des suffrages des votants, je les proclame délégués titulaires du Sénat représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. (Applaudissements)

Voici le résultat du scrutin pour l'élection de six délégués suppléants du Sénat représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

Nombre de votants : 264

Majorité absolue des votants : 133

Ont obtenu :

- Mme Maryvonne Blondin : 237 voix

- Mme Bernadette Bourzai : 238 voix

- M. Bernard Fournier : 246 voix

- M. Jacques Legendre : 247 voix

- M. Jean-Pierre Michel : 236 voix

- M. Yves Pozzo di Borgo : 246 voix

Ayant obtenu la majorité absolue des suffrages des votants, je les proclame délégués suppléants du Sénat représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. (Applaudissements)

Voici le résultat du scrutin pour l'élection de six juges titulaires à la Cour de justice de la République et de leurs six juges suppléants :

Nombre de votants : 268

Suffrages exprimés : 264

Majorité absolue des suffrages exprimés : 133

Ont obtenu :

- M. François-Noël Buffet, titulaire, et Mme Catherine Troendle, suppléante ; 263 voix

- M. Yves Détraigne, titulaire, et M. Jean-Paul Amoudry, suppléant ; 262 voix ;

- Mme Josette Durrieu, titulaire, et Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, suppléante ; 255 voix ;

- M. Jean-Pierre Michel, titulaire, et M. Jean-Yves Leconte, suppléant : 255 voix ;

- M. Bernard Piras, titulaire, et M. Gilbert Roger, suppléant : 257 voix ;

- M. Bernard Saugey, titulaire, et M. Alain Fouché, suppléant : 264 voix.

Ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, ils sont proclamés juges à la Cour de justice de la République. (Applaudissements)

MM François-Noël Buffet, Yves Détraigne, Bernard Saugey, Mmes Catherine Troendle, Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Alain Fouché prêtent successivement serment.

Mme la présidente.  - Acte est donné par le Sénat du serment qui vient d'être prêté devant lui.

M. Jean-Paul Amoudry, Mme Josette Durrieu, MM. Jean-Pierre Michel, Bernard Piras, Jean-Yves Leconte et Gilbert Roger, qui n'ont pu prêter serment aujourd'hui seront appelés ultérieurement à le faire devant le Sénat.

Sécurité sanitaire du médicament (Nouvelle lecture - Suite)

Mme Isabelle Pasquet.  - Ce projet de loi est un paradoxe. Alors que la CMP était sur le point de parvenir à un accord, les députés UMP sont revenus sur ce consensus pour faire preuve, sans doute, de leur fidélité ! Nous avions soutenu la motion de question préalable dès la première lecture. Ce texte est loin de ce dont a besoin notre pays pour lever la méfiance de nos concitoyens envers le système. La porosité entre les laboratoires et les agences s'est révélée lors du Médiator et de la grippe H1N1.

Je ne comprends pas que les députés UMP aient supprimé l'article demandant un simple rapport sur la création d'un corps d'experts indépendants -préconisation de la mission sénatoriale présidée par M. Autain, dont le rapport a été adopté à l'unanimité.

Le lien d'intérêt précède souvent le conflit d'intérêts. D'où la position du Sénat. Pourquoi limiter la portée du Sunshine Act à la française ? Le Gouvernement a étendu les zones d'ombre. Il faudra rechercher les liens d'intérêts éventuels des professionnels sur une multiplicité de sites internet : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

Quant aux visiteurs médicaux, il fallait transformer leur mission de fond en comble. Loin de ce faire, le groupe UMP a étendu la visite collective aux dispositifs médicaux à l'hôpital... Les chefs de service ne seraient-ils pas suffisamment informés sur la pharmacopée actuelle ?

L'information des citoyens, pourtant essentielle, fait défaut. Nous voterons la motion.

La séance est suspendue à 16 h 50.

*

*          *

présidence de M. Didier Guillaume,vice-président

La séance reprend à 17 h 10.

Compétitivité (Questions cribles thématiques)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle des questions cribles thématiques sur la compétitivité. J'invite les orateurs à respecter leur temps de parole...

Mme Isabelle Pasquet.  - La compétitivité est un moyen pour améliorer la qualité de vie et procurer emploi et cohésion sociale. Dixit le Medef, dans un document signé par la CFDT, la CFTC et la CGE-CFE. Nous pourrions être d'accord si cette déclaration n'était une charge contre les droits des travailleurs. Pour eux, modernisation rime avec précarisation. Ils dénoncent aujourd'hui votre plan d'austérité qui accroît les inégalités. Nos entreprises sont rentables -mais Unilever délocalise le site de Fralib Géménos en Pologne et met ses profits en Suisse !

Que proposez-vous à ces travailleurs de la région de Marseille dont le plan social a été annulé par la justice et qui se battent à votre place pour préserver l'emploi industriel ? Allez-vous enfin les rencontrer ? (Applaudissements à gauche)

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.  - Veuillez excuser mon retard : j'étais auprès des acteurs économiques. Le site d'Unilever, dans le bassin marseillais, est historique. Le Gouvernement est mobilisé depuis novembre 2010 et a réuni tous les acteurs pour trouver des alternatives à la fermeture. Certaines pistes -comme la cession de la marque Éléphant aux salariés- n'étaient pas envisageables. Nous avons demandé à Unilever de proposer un accompagnement à la hauteur de ses moyens et des mesures de reclassement adaptées dès la décision de justice connue.

Mme Isabelle Pasquet.  - Les salariés n'ont pas été reçus. Leurs droits sont bafoués. L'annulation du plan social aurait dû avoir d'autres suites ! On voit bien de quel côté est le Gouvernement. Alors que certains salariés ont reçu des fiches de paie négative, le Gouvernement n'est même pas prêt à les recevoir pour enfin écouter leurs propositions ! (Applaudissements à gauche)

M. Alain Bertrand.  - En zone hyper-rurale, difficile de faire du chiffre d'affaires. L'hyper-ruralité, en Lozère, c'est l'absence de grandes villes, de facultés, d'infrastructures...

Les prix y sont plus élevés qu'à Paris ou Marseille : le carburant, les études, les denrées alimentaires...

Malgré les ZRR, et les pôles d'excellence ruraux, c'est un sacerdoce que d'entreprendre en zone rurale. Il faut des aides spécifiques, un dispositif favorisant l'initiative. Qu'envisagez-vous pour que ces territoires défavorisés retrouvent leur compétitivité et participent à la richesse nationale ? (Applaudissement à gauche)

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - J'aime la Lozère, comme la Haute-Loire, que je connais bien.

M. Alain Néri.  - Et le Puy-de-Dôme ?

M. Ronan Kerdraon.  - ... ou la Bretagne ?

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - J'y étais récemment. Je fais trois déplacements par semaine...

Je rappelle que le logement coûte moins cher dans ces zones qu'en ville et qu'elles bénéficient de vrais avantages : évitons le misérabilisme !

Ce n'était, d'ailleurs, pas votre propos... Les retours financiers au titre de la politique européenne de cohésion, la restructuration de la carte militaire, la couverture numérique et l'accès au multicanal, l'accès aux services de santé sont des sujets majeurs.

La compétitivité passe par les synergies, via la politique des pôles et des grappes. Le dernier appel à projet s'est conclu fin 2011 : ce sont en tout 652 projets, financés à hauteur de 475 millions depuis 2006. Les grappes d'entreprises, de TPE et PME, permettent d'améliorer la performance : 126 ont été sélectionnées, pour 24 milliards sur deux ans. Par ces actions concrètes, nous engageons notre pays sur la voie de l'innovation.

M. Alain Bertrand.  - Merci. La couverture a haut débit pour tous, très bien. Mais nous voulons une discrimination positive pour les zones rurales et hyper-rurales. Nous pouvons créer des emplois dans nos petits villages qui, placés côte à côte, forment la plus grande ville de France !

M. Jean Bizet.  - Les nouvelles tensions économiques mondiales annoncent une conjoncture très dégradée. Seule une compétitivité durable de nos entreprises contribuera au rétablissement. Nos PME doivent pouvoir faire face à la concurrence.

Or les indicateurs sont dans le rouge : coût du travail, manque de flexibilité du marché du travail, complexité de la fiscalité. J'y ajouterai l'accès au crédit des PME, qui sont les plus vulnérables. Que compte faire le Gouvernement pour améliorer le financement de l'économie ?

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Au cours de mes trois déplacements par semaine, je rencontre les acteurs économiques. J'ai demandé à la Banque de France un indicateur sur les petits crédits. L'encours des crédits aux entreprises s'élève à 267 milliards : il n'a jamais baissé durant la crise, grâce à la mobilisation du Gouvernement, notamment à la création du médiateur du crédit. J'ai mis en place un numéro Bleu Azur pour mettre les PME en contact direct avec le médiateur ou avec le correspondant PME du département. On en est à 100 appels par jour ; des solutions sont trouvées dans 60 % des cas. J'ai annoncé que, à chaque publication des statistiques de la banque de France, le réseau bancaire le plus performant et le moins performant, auraient à expliquer leurs résultats.

M. Jean Bizet.  - Je m'en félicite. La convergence avec l'Allemagne doit être fiscale, mais aussi sociale. C'est la seule solution, à terme, pour un marché unique performant.

M. Vincent Delahaye.  - La compétitivité de la France s'érode, la croissance est nulle, la balance commerciale déficitaire. L'instabilité fiscale pèse lourd, on l'a vu notamment avec le photovoltaïque.

M. Roland Courteau.  - C'est bien vrai !

M. Vincent Delahaye.  - Les TPE peinent à devenir des PME. Que comptez-vous faire pour leur simplifier la tâche ?

Le coût du travail est trop élevé en France, par rapport à l'Allemagne notamment. Une solution serait d'adopter la TVA sociale, une mesure souvent évoquée mais jamais concrétisée. Elle permettrait, en outre, de lutter contre les délocalisations et de financer la protection sociale. Que compte faire le Gouvernement ? (Applaudissements au centre)

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Effectivement, depuis 30 ans, les gouvernements successifs ont choisi la voie facile de l'endettement.

M. Roland Courteau.  - Certains plus que d'autres !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Je vois que vous le revendiquez !

Le Gouvernement a travaillé, avec constance, à diminuer le niveau des prélèvements obligatoires, qui pèsent sur la compétitivité des entreprises. D'où la suppression de la taxe professionnelle, qui leur a rendu 17 milliards.

Vous me permettrez de prendre des distances avec le terme de TVA sociale...

M. Alain Néri.  - Elle est antisociale !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Le président de la République a installé un haut comité chargé de réfléchir au financement de la protection sociale. Redresser les finances tout en préservant la compétitivité a été l'engagement courageux de ce gouvernement : le CIR a été maintenu quand il aurait été plus simple de couper dans les investissements.

M. Vincent Delahaye.  - Le mot « TVA sociale » n'est peut-être pas le meilleur ; on peut préférer parler de « TVA « emploi » comme Manuel Valls, ou de « TVA anti-délocalisation ». L'important est de favoriser le développement de l'emploi industriel et de chercher plus à réduire les dépenses qu'à accroître les recettes. Il est possible que des mesures drastiques mènent à la récession mais quitte à avoir la récession, autant avoir pris des mesures drastiques.

M. Martial Bourquin.  - Faisons un sort à quelques idées reçues : d'après l'Insee, en 2011, le coût du travail est, en France, de 33,16 euros et de 33,37 euros en Allemagne. Le temps de travail est équivalent. En revanche, notre taux de chômage est de 9,7 % contre 6,9 % en Allemagne, et notre déficit du commerce extérieur bien plus élevé. La faute au coût du travail ? C'est plus compliqué. Le Gouvernement a tout misé sur les grands groupes. Et nos PME et nos TPE ? Elles travaillent dur et créent de la richesse. (Applaudissements à gauche) C'est en clustérisant nos territoires qu'on y arrivera ; le Gouvernement fait fausse route ! Il n'a pas de politique industrielle ! (Applaudissements à gauche)

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - J'attends toujours la question...

M. Roland Courteau.  - Qu'avez-vous fait en dix ans : voilà la question !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - J'étais avec le président de la République à Sallanches. Je vous invite à rencontrer, comme je le fais quotidiennement, les acteurs économiques. Nous avons agi : je pense à Oséo, dont on avait rêvé, et à toutes les autres mesures de soutien.

M. Roland Courteau.  - Sans beaucoup de résultats.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Nous n'avons pas les mêmes chiffres. Selon l'Insee, le coût salarial a progressé en France de 7,5 % de 2000 à 2010 quand il reculait de 3,5 % en Allemagne. Le débat doit s'ouvrir, dans toutes les formations politiques, sur le poids des charges et des 35 heures, qui ont une lourde responsabilité... (Exclamations à gauche)

M. Roland Courteau.  - Vous êtes au pouvoir depuis dix ans !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Et vous voulez supprimer les heures supplémentaires.

M. Michel Vergoz.  - Vous savez bien que c'est de leur fiscalité qu'il s'agit !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Écoutez les acteurs économiques, les artisans, les employeurs, les salariés !

M. Martial Bourquin.  - En tant qu'élus, nous avons des contacts réguliers avec les entreprises. (Applaudissements à gauche) Nous avons la volonté de les aider. Mais que dire quand on voit 4 000 suppressions d'emplois à Sochaux, alors qu'on embauche chez Volkswagen...

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Sans les 35 heures !

M. Michel Vergoz.  - Où est la convergence ?

M. Martial Bourquin.  - Les Français paient très cher l'absence de toute stratégie industrielle et de tout patriotisme économique. Les fabricants français de scooters sont au chômage et La Poste achète des scooters à Taïwan ! C'est révoltant !

M. François-Noël Buffet.  - L'innovation est un enjeu majeur. Pas moins de 8 milliards pour la recherche dans le Grand emprunt, maintien du CIR et création de pôles de compétitivité : le Gouvernement se donne les moyens de ses ambitions. La crise va-t-elle affecter cet engagement ? Quid du fonds pour l'innovation prévue dans le Grand emprunt ? (Marques d'ironie à gauche)

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Il n'est pas question de revenir sur le soutien à l'innovation. Le Gouvernement fait le choix du courage : lui ne met pas sous le tapis la réforme des retraites. (Exclamations à gauche) La France est le pays des savoir-faire ; promouvons-les, le « fabriqué en France » est plus important que le « consommé français ».

Le fonds que vous évoquez est opérationnel depuis juillet 2011 avec 400 millions, dont 200 millions ont déjà été engagés. Je pourrais développer sur le plan de soutien à l'innovation dans les services, le télétravail. La maîtrise des finances publiques concourt aussi à la croissance. L'innovation est la clé de l'avenir !

M. François-Noël Buffet.  - Merci de ces précisions. S'il faut des mesures conjoncturelles face à la crise, l'action en matière d'innovation est bien de nature structurelle.

Mme Christiane Demontès.  - En pleine tourmente, le Gouvernement n'a qu'une réponse à la crise : la rigueur. Les entreprises se battent sur nos territoires, surtout les PME et les TPE. Soutenons-les davantage en recentrant le CIR et en transformant les prêts d'Oséo en avances de trésorerie, en les accompagnant dans les méandres de la vente à l'export. Au-delà des annonces, que va faire le Gouvernement pour la compétitivité ? (Applaudissements à gauche)

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Un recentrage du CIR sur les PME ? Cet outil créé en 2007 est efficace, vous le reconnaissez donc, et 80 % des nouveaux entrants sont des PME ! Je me souviens du débat sur le CIR : fallait-il exclure de son bénéfice les grands groupes ? Je ne le crois pas, car ils tirent notre croissance vers le haut. De nombreux pays voisins nous envient ce dispositif.

Concernant l'export, nous restructurons UBI France, nous identifions des PME « pépites » à fort potentiel, nous avons nommé 246 correspondants pour des ETI, des « entreprises de taille intermédiaire ». Nous sommes donc proactifs. Je pourrais également citer l'action de M. Ricol, ancien médiateur du crédit, sur le Grand emprunt... Nous croyons à l'industrie française !

M. Alain Néri.  - Et nous, on ne croit plus au Père Noël !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Des entreprises françaises relocalisent après des aventures à Taïwan. Voilà le résultat de notre politique ! (Applaudissements à droite)

Mme Christiane Demontès.  - Le CIR bénéficierait principalement aux PME ? C'est faux : c'est avant tout une aubaine pour les grands groupes. J'ajouterai, comme membre des affaires sociales, la fermeture des formations dans de nombreuses filières industrielles. Vous choisissez de ne pas former d'ouvriers qualifiés, voilà la réalité de votre politique ! (Applaudissements à gauche)

M. Ronan Kerdraon.  - Les difficultés de vente du Rafale sont tout un symbole. Ce quinquennat aura d'ailleurs connu surtout une rafale d'échecs... (Sourires à gauche) Pas moins de 750 000 emplois industriels détruits en dix ans et vous ne pourrez pas éternellement vous dispenser de toute réflexion en ressassant vos slogans sur les 35 heures -d'autant que vous avez vidé cette loi de sa substance. La compétitivité est compatible avec une amélioration du niveau de vie de la Nation, avec une protection sociale élevée. En revanche, et les conclusions du Conseil économique, social et environnemental rejoignent là-dessus les travaux de la mission menée par M. Bourquin, elle requiert une formation professionnelle approfondie. Quelles mesures allez-vous prendre à cet égard ? (Applaudissements à gauche)

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Airbus, Alsthom gagnent de grands contrats à l'export. Pourquoi cette maladie, bien française, consistant à ne jamais voir nos succès ? Je partage votre enthousiasme pour l'innovation. Selon le baromètre Ernst & Young, la France accueille, après la Grande-Bretagne, le plus de centres de recherche grâce au CIR. Nous n'avions pas engagé d'investissements aussi ambitieux depuis des dizaines d'années. Voilà comment on construit l'avenir industriel de la France ! Je vous invite à aller à la rencontre des acteurs économiques.

M. Alain Néri.  - Qu'est-ce que vous croyez ? Nous le faisons !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Demandez-leur quel est, parmi les facteurs de compétitivité, l'atout de la France. Ils vous répondront : le prix de l'énergie.

M. Louis Nègre.  - Grâce au nucléaire ! (Applaudissements à droite)

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Cela vous permettra de rectifier certains jugements que j'entends ça et là dans l'hémicycle.

M. Ronan Kerdraon.  - Aucune réponse à ma question sur les CFA. Vous sacrifiez les ouvriers sur l'autel du capitalisme. Il y a loin de la coupe aux lèvres. Plutôt que nous imposer une litanie de phrases creuses auxquelles plus personne ne croit, agissez !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État.  - Faux ! On n'a jamais tant fait pour l'apprentissage !

M. Ronan Kerdraon.  - Avec une dramatique absence de crédits.

M. Alain Néri.  - La seule chose qui augmente, c'est la TVA !

La séance, suspendue à 18 heures, reprend à 18 h 10.

Organisme extraparlementaire (Candidature)

M. le président.  - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir désigner le sénateur appelé à siéger au sein de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages. La commission de la culture propose la candidature de M. Vincent Eblé.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

Proposition de résolution

M. le président.  - En application de l'article 50 ter de notre Règlement, M. François Rebsamen, président du groupe socialiste-EELVr, a demandé l'inscription à l'ordre du jour de la proposition de résolution n°95, présentée en application de l'article 34-1 de la Constitution, relative au séjour des étudiants étrangers diplômés, qu'il a déposée le 14 novembre 2011. Cette demande a été communiquée au Gouvernement dans la perspective de notre Conférence des présidents qui se tiendra demain.

Dépôt d'une question orale avec débat

M. le président.  - J'ai été saisi d'une question orale avec débat de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat sur l'état des prisons françaises et l'application de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009.

Conformément aux articles 79 et 80 du Règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la date de la discussion sera fixée.

Sécurité sanitaire du médicament (Nouvelle lecture - Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament.

Discussion générale (Suite)

Mme Françoise Laborde.  - En première lecture, le groupe du RDSE s'était réjoui des nombreuses avancées que ce texte comporte ; parmi elles, la pharmacovigilance. Il nous inspirait toutefois des réserves : insuffisante transparence des travaux des comités, multiplication des agences. Notre groupe avait donc soutenu la commission des affaires sociales dans sa volonté de l'améliorer.

A l'heure d'une nouvelle crise sur les prothèses mammaires, l'urgence n'est pas de débattre sur le nom de la nouvelle agence. Nous ne pouvons adhérer au texte qui nous revient de l'Assemblée nationale après l'échec de la commission mixte paritaire. Absence de contrôle réel des liens d'intérêt et d'implication véritable de l'industrie pharmaceutique, retour sur le sort des visites collectives, encadrement insuffisant des ATU. J'arrête là : ce texte est trop loin des préconisations de la mission du Sénat sur le Mediator.

Dans sa grande majorité, le groupe du RDSE votera la question préalable. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Louis Lorrain.  - Après l'échec de la CMP, le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale, tout en maintenant des apports du Sénat, est plus équilibré et il correspond aux attentes de l'UMP. C'est un texte fondamental pour restaurer la confiance des Français dans le système du médicament. Sur la pharmacovigilance, le texte comble un manque réel. Il apporte également un plus pour la formation des professionnels de santé. Nous le soutiendrons.

Interdire tout lien d'intérêt dans les trois ans précédant la prise de fonctions à la tête de certaines agences ? Cette mesure était inapplicable. L'Assemblée nationale a bien fait de récrire l'article premier. Ne confondons pas liens et conflit d'intérêt. Entretenir un lien d'intérêt ne signifie pas être inféodé à l'industrie.

A l'article 2, le texte de l'Assemblée nationale améliore la transparence. Pourquoi cette suspicion à l'égard des associations de patients ? Celles-ci ont voix au chapitre.

Un renouvellement annuel des ATU ? Cela aurait été au détriment des patients. Inverser la charge de la preuve pour les victimes d'accidents médicamenteux ? Un tel bouleversement de la loi de 1998 exige, à tout le moins, une concertation avec les acteurs.

Mieux vaut un régime d'autorisation encadrée de la publicité sur les vaccins que son interdiction pure et simple.

Sur la visite médicale collective, M. Bruno Gilles avait défendu l'intérêt de maintenir des exceptions. Nous pourrons y revenir lors du bilan de l'expérimentation.

Enfin, la création de l'action de groupe à la française ne saurait être instaurée au détour d'un amendement.

Mme Nathalie Goulet.  - Quand, alors ?

M. Ronan Kerdraon.  - Aux calendes grecques !

M. Jean-Louis Lorrain.  - Parce que ce texte répond aux besoins, nous le voterons ! (Applaudissements à droite)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Le texte est emblématique d'une dérive politicienne que nous ne pouvons pas cautionner. (Marques d'étonnement à droite) La CMP a échoué à cause du refus de l'Assemblée nationale de s'ouvrir au point de vue du Sénat qui avait travaillé dans un esprit non partisan. La base de notre réflexion était le rapport de la mission sur le Mediator, adopté à l'unanimité le 28 juin dernier.

Mme Nathalie Goulet.  - Absolument !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Je me réjouis du maintien de l'article 9 bis. Cela dit, le texte actuel, sans faire de procès d'intention, est plus restrictif : le dispositif est conditionné à un décret en Conseil d'État. Je ne veux pas croire que ce serait pour en limiter les effets.

Après le rapporteur, je soulignerai trois reculs. D'abord, l'absence d'harmonisation avec le projet de loi Sauvé sur la prévention des conflits d'intérêt. Recul encore sur les ATU, dont les députés ont assoupli le cadre législatif. Concernant l'expérimentation de la visite médicale collective, le détricotage a été minutieux. Le dispositif est vidé de son contenu.

M. Bernard Cazeau, rapporteur.  - Très juste !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - La visite médicale pour les dispositifs médicaux n'était pas une panacée, mais une première garantie... Sur l'action de groupe, je serai plus réservé : il faudrait créer une action de groupe générale, non sectorielle. Le projet de loi sur les droits des consommateurs devait nous en fournir l'occasion.

La décision du rapporteur est sage : le Sénat n'a pas de temps à perdre. Le groupe UCR ne prendra pas part au vote de la question préalable. (Applaudissements sur les bancs UCR)

Mme Aline Archimbaud.  - Je remercie M. Cazeau pour son travail sur ce texte. Je partage ses arguments. Merci également à nos collègues de la commission : nos échanges ont été de qualité. Je remercie également nos collègues de la majorité qui se sont mobilisés pour défendre certains amendements. Après tout ce travail, quelle tristesse, quelle colère ! Le Sénat avait fait des propositions, s'était efforcé de juguler les liens d'intérêts, de défendre les droits des victimes, de promouvoir la sécurité sanitaire, de servir l'intérêt général.

Ce travail a été taillé en pièces par les députés, qui n'ont guère fait preuve d'esprit d'ouverture, annonçant en CMP que certains points étaient « non négociables ». Je regrette cette intransigeance. En tant qu'écologiste, je suis déçue par le manque d'ambition sur les visiteurs médicaux.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - A qui le dites-vous !

Mme Aline Archimbaud.  - Heureusement, le Sénat va constituer un groupe de travail. Quelle déception aussi que l'on revienne sur l'action de groupe ! Vous laissez les malades seuls face à leur souffrance. C'est inadmissible !

Ce texte est un acte de démission : dans la santé comme ailleurs, les lobbies privés savent obtenir gain de cause. Je me battrai toujours contre ces pratiques.

Notre travail n'est pas perdu : ne nous décourageons pas. Il revient à la nouvelle majorité sénatoriale de dessiner ce que nous mettrons demain en oeuvre. Le Sénat aura au moins envoyé un message fort à tous ceux qui ne veulent pas voir se renouveler les affaires Mediator, Distilbène, Vioxx ou hormones de croissance...

Le texte de l'Assemblée nationale n'est que de façade. L'actualité brûlante rappelle combien l'industrie pharmaceutique est encore influente. Servier vous adresse un véritable pied-de-nez à vous et aux victimes du Mediator en demandant le regroupement à Paris des procédures. Et dire qu'un ancien de Servier a failli être nommé à l'Afssaps ! La situation exige autre chose qu'une loi alibi ! (Applaudissements à gauche)

M. Ronan Kerdraon.  - Ce texte a vécu de nombreuses péripéties. En juin, monsieur le ministre, vous redoubliez de volontarisme, promettant une réforme en profondeur n'ayant pour seul objectif -louable s'il en est- que de protéger le patient. Nous attendions, peut-être naïvement, un texte ambitieux, courageux et efficace. En août, nous découvrions un projet de loi mièvre, bien en deçà des préconisations des parlementaires de tous bords.

Avez-vous cédé aux pressions des lobbies pharmaceutiques ?

Mme Chantal Jouanno.  - Trop facile !

M. Ronan Kerdraon.  - Vous vous êtes contenté d'une loi a minima, écartant d'emblée les réformes nécessaires.

Lors de la première lecture au Sénat, il nous a donc fallu réviser en profondeur votre texte pour faire primer les intérêts des patients sur ceux des laboratoires. Obligation de déclaration publique d'intérêts pour les membres des cabinets ministériels...

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Nous n'avons pas attendu la loi pour le faire !

M. Ronan Kerdraon.  - ...entre autres avancées, dont l'action de groupe.

Mais les députés UMP ont fait avorter, et même capoter, la CMP : chronique d'un échec annoncé... Est-il possible d'aller trop loin dans la protection sanitaire et dans la réparation du préjudice des victimes ? Dans un pays normal, non. En Sarkozie, oui. (Soupirs à droite)

Il nous faut nous en remettre au décret -ce n'est guère rassurant. Exit les apports sur les liens d'intérêt, régression sur la gouvernance du médicament, reculade sur l'octroi des ATU, suppression des mesures visant à protéger les droits des patients, recul sur la formation des professionnels médicaux. Au total, toutes les avancées du Sénat ont été supprimées. Pourquoi une telle défiance ? C'est une grande déception, une grande frustration, une colère mêlée d'amertume qui m'animent aujourd'hui.

Les conclusions de la mission sur le Mediator étaient pourtant consensuelles. Nous pouvions restaurer la confiance de nos concitoyens dans le médicament. Au lieu de cela, vous culpabilisez les victimes, comme me l'a encore confié hier une victime dans ma commune. Nous ne nous prêterons pas à un simulacre de débat démocratique : nous voterons la motion. (Applaudissements à gauche)

La discussion générale est close.

Question préalable

M. le président.  - Motion n°1, présentée par M. Cazeau, au nom de la commission.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat,

Considérant que l'Assemblée nationale n'a retenu aucune des rédactions approuvées par la commission mixte paritaire sur les articles relatifs aux liens d'intérêts, aux avantages consentis par les entreprises et à la gouvernance des produits de santé ;

Considérant que les dispositions tendant à renforcer les droits des victimes d'accidents médicamenteux ont été supprimées et que, tant l'Assemblée nationale que le Gouvernement, ont manifesté leur volonté de reporter sine die toute avancée dans ce domaine ;

Considérant que les dispositions du texte, par leur imprécision ou le renvoi à des textes d'application réglementaire, le vident en grande partie de sa portée ;

Considérant que cette entrave à l'application directe des mesures votées par le législateur porte en particulier sur l'obligation d'essais contre comparateurs actifs pour l'admission au remboursement des médicaments prévue à l'article 9 bis ;

Considérant que toute réflexion sur la question de la création d'un corps d'experts indépendants, sur le financement des associations d'usagers et sur l'avenir des visiteurs médicaux a été écartée ;

Considérant, dans ces conditions, que ce projet de loi n'est pas de nature à empêcher la survenance d'une nouvelle affaire comme celle du Mediator alors que des conclusions unanimes avaient été adoptées en mission sénatoriale d'information ;

Décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.

M. Bernard Cazeau, rapporteur.  - Lorsque l'Igas a remis, en janvier, son rapport sur le Mediator, le ministre de la santé disait : « Notre responsabilité, ma responsabilité, mon devoir, c'est de rebâtir un nouveau système du médicament, un nouveau système de sécurité sanitaire pour qu'il n'y ait pas demain un nouveau Mediator ». Belle et vigoureuse ambition. Vous avez semé l'espoir, vous récoltez la déception. L'occasion était pourtant là pour trouver un consensus. Vous avez préféré l'affichage. Le Sunshine Act à la française ? « Sans transparence totale, point de confiance totale » disiez-vous, monsieur le ministre. Mais l'Assemblée nationale en a décidé autrement -renvoyant au décret et ne jugeant pas la déclaration utile sur des avantages... tels que les cafés et les stylos.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Mensonge ! C'est tout le contraire.

M. Bernard Cazeau, rapporteur.  - Nous essayons de dire la vérité.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Difficile quand on n'a pas l'habitude !

M. Bernard Cazeau, rapporteur.  - Soyez poli ! Vous n'arriverez pas à me faire déraper. Vous avez accepté sans broncher que dès leur formation initiale, les praticiens reçoivent des cadeaux des laboratoires.

Après l'échec de la CMP, l'Assemblée nationale n'a repris qu'à la marge nos propositions. Nous prenons acte de l'échec de la navette avec cette motion.

Sur les articles 1 à 5, la CMP était parvenue à un accord : l'Assemblée nationale n'en a rien retenu et préféré revenir à son texte initial. L'article 9 bis aura des conséquences importantes : l'Assemblée nationale avance sa mise en oeuvre à 2012 -tout en s'en remettant au pouvoir réglementaire ! La position du Sénat était plus honnête.

Nous ne pouvons cautionner le mauvais coup porté aux droits des patients par l'Assemblée nationale qui supprime trois articles majeurs, dont l'action de groupe, préférant l'immobilisme au dialogue. Je vous demande donc d'adopter cette motion.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Chassez le naturel, il revient au galop ! A l'Assemblée nationale, le groupe socialiste n'a pas voté contre. Pourquoi ? Parce que ce texte propose des avancées incomparables. Faut-il voir dans ce refus un mouvement de mauvaise humeur, ou le retour à un vieux réflexe politicien ? (Vives exclamations à gauche)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Allons, allons !

Mme Chantal Jouanno.  - Vous avez exigé du respect ; écoutez le ministre !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Ce texte protecteur, issu du rapport de l'Igas, sera la loi de la République. Vous instillez le doute car, en définitive, vous n'en avez pas été à l'initiative. Ceux qui nous regardent n'ont qu'une préoccupation : la sécurité des médicaments ! Certains points, vous le savez parfaitement, relèvent des articles 34 et 37 de la Constitution. D'où le décret sur la déclaration des avantages. Que chacun prenne ses responsabilités.

M. Bernard Cazeau, rapporteur.  - Nous le faisons, plus que vous !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Reconnaître les avancées, même quand on est dans l'opposition, cela donne de la crédibilité, messieurs. A l'Assemblée nationale, des socialistes ont eu la bonne attitude. Mais au Sénat, la gauche a retrouvé ses vieilles postures politiciennes. Tout cela ne fait pas du bien à la démocratie ; ce texte, lui, fera du bien à la santé des Français ! (Applaudissements à droite)

M. Bernard Cazeau, rapporteur.  - Il est vide !

Explications de vote

M. Dominique Watrin.  - C'est avec regret que nous nous apprêtons à voter la motion. Le choix des députés UMP ne nous laisse pas d'autre choix. Le texte n'est pas à la hauteur des enjeux. Sur les conflits d'intérêts, nous étions pourtant d'accord à l'issue de la mission sénatoriale ! L'ancienne majorité était sans doute pour des mesures qui seraient restées lettre morte...

La majorité présidentielle a vidé notre travail de toute substance. Je regrette que l'Assemblée nationale soit revenue sur nos amendements, qui renforçaient les droits des patients, et l'indemnisation des victimes. Enfin, la procédure d'action de groupe était elle aussi une préconisation de la mission de l'Assemblée nationale sur le Mediator !

M. Roland Courteau.  - Stupéfiant !

M. Dominique Watrin.  - L'Assemblée nationale refusant le débat, nous en tirons les conséquences et voterons cette motion. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Monsieur le ministre, pourquoi tant d'agressivité envers les sénateurs, qui ne font que leur travail ? Ne méritent-ils pas le respect ? Mais il est vrai que vous avez superbement ignoré le travail de notre mission sur le Mediator en convoquant une conférence de presse avant qu'elle rende son rapport. Il n'y a pas l'épaisseur d'un papier à cigarette entre vous et votre majorité à l'Assemblée nationale qui a fait et défait sans rien vous refuser. Mais les sénateurs n'ont accompli que leur devoir.

Qu'en est-il, objectivement, de la formation, initiale et continue, des médecins, notamment généralistes, en zone rurale ? Je regrette que le texte fasse l'impasse sur ce sujet majeur. En toute légitimité, nous sommes fondés à voter, sans appréhension, cette motion. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Louis Lorrain.  - Je me félicite que la pharmacovigilance devienne une véritable préoccupation. La France sera exemplaire en la matière.

La refonte des institutions était indispensable. Les résultats de la mission du Sénat sur le Mediator -j'y ai participé- n'ont pas été ignorés, loin de là.

Il faut affiner la définition du lien d'intérêt, en évitant la diabolisation. Lisez donc le livre de M. Hirsch, qui dit certaines vérités.

C'est vrai qu'il y a du mésusage, mais aussi des avancées. Le médecin généraliste de campagne, à l'écart de tout, c'est un mythe. J'ai été ce médecin de campagne, rat des champs, je ne crois pas avoir porté préjudice à mes patients !

M. Claude Léonard.  - Oui, ces propos étaient inadmissibles !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Je n'ai jamais dit ça !

La motion n°1 est adoptée.

Conventions internationales (Procédure simplifiée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'approbation suivant la procédure simplifiée du projet de loi autorisant la ratification de l'accord de passation conjointe de marché en vue de la désignation par adjudication de plates-formes d'enchères communes, et du projet de loi autorisant la ratification de l'accord de passation conjointe de marché en vue de la désignation par adjudication d'une instance de surveillance des enchères.

Ces projets de loi sont adoptés.

Organisme extraparlementaire (Nomination)

M. le président.  - La commission de la culture a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire. La présidence n'ayant reçu aucune opposition dans le délai d'une heure, je proclame M. Vincent Eblé membre de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages.

La séance est suspendue à 19 h 15.

*

*          *

présidence de M. Jean-Claude Carle,vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

Projet de loi de finances rectificative pour 2011

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2011.

Discussion générale

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.  - Le 7 novembre, le Premier ministre présentait le plan de redressement financier du Gouvernement : 7 milliards en 2012, 65 milliards d'ici 2016. Dans quel pays un tel effort a-t-il été entrepris si vite ? Sérieux et réactivité sont nos meilleures armes dans la bataille de la crédibilité.

Avec ses partenaires, la France a pris toutes ses responsabilités. Je suis consciente des contraintes qui ont pesé sur la commission des finances. Merci pour la qualité des débats au Sénat, malgré ce contexte difficile.

Cette année a commencé sous le signe de la reprise -1 % de croissance au premier trimestre, qui s'en souvient ?- mais depuis lors, l'économie mondiale a ralenti avec la crise des dettes souveraines. Face aux incertitudes, le Gouvernement a abaissé à 1 % sa prévision de croissance pour 2012. Quoi qu'il arrive, nous ferons en sorte de revenir à l'équilibre budgétaire en 2016.

Le chemin parcouru est considérable. L'an dernier, M. Baroin promettait de réduire le déficit de 50 milliards d'euros : cet engagement est tenu. L'objectif de baisse des dépenses de l'État est respecté dès 2011 : j'en veux pour preuve le niveau extrêmement bas -1,7 milliard d'euros- des ouvertures de crédit en fin d'année, destinés à financer les opérations extérieures et les allocations sociales.

La réserve de précaution est une ceinture de sécurité. Pour 2012, nous avions voulu l'augmenter à 6 milliards par prudence. Bien nous en a pris ! Ensemble, nous avons imaginé une marge de manoeuvre de 600 millions au sein du FCTVA. Nous n'en utiliserons que 400, le reste allant à la réduction du déficit. Face à l'imprévu, nous avons pris de saines décisions.

Lors du vote du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement a déjà fait prévaloir la baisse des dépenses de l'État.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Question de responsabilité ! (On ironise à gauche)

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Mais le Sénat a voté 32 milliards d'impôts supplémentaires : ce choc fiscal serait fatal pour notre économie. (Protestations à gauche)

M. Jean-Pierre Caffet.  - Ça devient risible !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Les économies que nous avons voulues permettent de limiter les hausses d'impôts, concentrées sur les grandes entreprises et les ménages aisés. La majoration exceptionnelle de l'impôt sur les sociétés ne pèsera pas sur les PME. Équité aussi entre les ménages puisque nous alignons la fiscalité du capital sur celle du travail, en portant le prélèvement libératoire forfaitaire à 21 % pour les dividendes et à 24 % pour les intérêts. Je rappelle que la fiscalité du patrimoine est de dix points plus élevée en France qu'en Allemagne.

Le gel du barème de l'impôt sur le revenu en 2012 et en 2013 pèsera sur les seuls contribuables de cet impôt ; or les 10 % les plus aisés en paient plus des trois quarts.

L'équité nous a aussi conduits à exclure du relèvement du taux réduit de TVA les produits alimentaires, l'énergie et les services destinés aux handicapés. Les plus fragiles ne seront donc pas touchés.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Faux !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Nous avons veillé à ne déséquilibrer aucune filière : pour ce qui est du livre, le Gouvernement proposera de reporter de deux mois l'entrée en vigueur du nouveau taux.

Le désendettement est une nécessité nationale. Chacun doit y prendre sa part.

C'est aussi pourquoi il faut lutter contre la fraude, spécialement fiscale, à laquelle nous avons consacré pas moins de 23 mesures. Mise en place d'un registre des évadés fiscaux, de la police fiscale du droit de communication sur les transferts à l'étranger, ce combat contre la fraude, nous sommes en train de le gagner. En 2010, nous avons récupéré 16 milliards de plus que l'an passé ! A elle seule, la cellule de régularisation a rapporté 1,2 milliard d'euros. Au nom des principes républicains, nous refusons l'amnistie, autant que l'accord proposé par la Suisse.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Enfin une bonne nouvelle !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Le Gouvernement a porté de trois à dix ans le délai de prescription, s'agissant des avoirs à l'étranger, car l'administration doit disposer de temps.

Ce collectif parachève l'effort entrepris depuis trois ans. Avec la crise, aucun pays ne peut faire du redressement des finances publiques un objectif de deuxième ordre. La règle d'or s'impose : elle n'est ni de droite ni de gauche.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Elle est de bon sens !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - C'est l'intérêt général. La France serait plus forte si on la reconnaît sur tous les bancs de cet hémicycle. Que la Haute assemblée, dont la sagesse est légendaire, se montre à la hauteur des circonstances ! (Applaudissements sur les bancs UCR et UMP)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - N'en doutez pas !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Je commencerai par le patchwork budgétaire : les textes se succèdent et par une fuite organisée, on nous annonce aujourd'hui un cinquième collectif pour janvier 2012 ? (M. Jean-Pierre Caffet marque son étonnement) Pour la fin de l'année prochaine, le Gouvernement veut réduire le déficit à 4,5 % du PIB : c'est le minimum pour que le Gouvernement issu des élections du printemps puisse tenir l'objectif de 3 % en 2013. Jamais on n'a diminué le déficit d'1,5 point en un an !

Le Gouvernement n'a pas entendu nos mises en garde sur le ralentissement de la croissance. Les mesures proposées aujourd'hui sont animées par une logique de rendement. D'où la levée de plusieurs tabous : relèvement du taux réduit de TVA...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Je m'en réjouis !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - ...hausse généralisée de la fiscalité. Avec le gel du barème de l'impôt sur le revenu, certains deviendront contribuables ! Lorsque le Sénat nouveau a voulu revoir l'assiette de l'impôt sur les sociétés, le Gouvernement l'a accusé de casser la croissance. Et le même argument ne vaudrait pas ici ? Quand le Sénat nouveau a voulu soumettre au barème de l'impôt sur le revenu les revenus du capital, le Gouvernement lui a opposé le coût de trésorerie ; mais il veut aujourd'hui relever le prélèvement libératoire forfaitaire, qui aura un coût aussi et qui ne rendra pas la fiscalité plus progressive !

La politique du Gouvernement manque de cohérence. Cette année encore, les hypothèses de croissance sont fantaisistes. Le plan Fillon n'explique pas comment les dépenses seront réduites : on renvoie à l'après-présidentielle...

La réserve de précaution est considérée comme un matelas destiné à réaliser des économies quand elle doit empêcher les dérapages ! La majorité gouvernementale est-elle prête à admettre que le Gouvernement décide seul, par voie réglementaire, d'une économie de 8 milliards d'euros ?

Le calcul du déficit -avec une baisse de 53 milliards affichée- est biaisé par la débudgétisation des 35 milliards du Grand emprunt.

J'en viens à la déclaration du 9 décembre des chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne. Ne nous emballons pas. Au reste, les marchés ont réagi avec prudence avant d'accuser une baisse. Quid de la coordination budgétaire ? Le président du Conseil devra remettre au mois de mars un rapport sur l'approfondissement de l'intégration budgétaire. Il est donc permis d'espérer.

Sur la mutualisation des dettes, sur le soutien à la croissance, sur tout sauf la discipline budgétaire, l'accord est muet. Quant à l'aide aux pays fragiles, la question de l'effet de levier n'est toujours pas réglée.

On reporte à mars le débat sur le plafond global du Fesf et du MES. Pour la mise en oeuvre du MES, les règles de majorité sont assouplies, mais dans des cas très limités. Quand les parlements seront-ils consultés ? Mars, c'est demain. Quid du refus britannique ? Dans quelles conditions seront versées les contributions françaises ?

On parle de « nouveau pacte budgétaire » : pacte de stabilité et « règle d'or ». Des sanctions automatiques seront prononcées -le Gouvernement jusque là les refusait- et les projets de budget seront soumis à la Commission européenne. Mais l'avis sera rendu après le débat de l'examen à l'Assemblée nationale ! Il faudra intégrer les corrections de Bruxelles.

Les hypothèses économiques sur lesquelles seront fondés les budgets nationaux devront être élaborées par des instances indépendantes.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Cela devrait vous réjouir !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Mais lorsque je les réclame au niveau français, je n'ai jamais de réponse !

Quant à la règle d'or voulue par l'accord, la commission Camdessus l'avait jugée impraticable. Tous les principes du projet de révision constitutionnelle voté par la droite sont caducs ! D'où le déplacement du débat sur le terrain national : en affirmant que les socialistes ne jouent pas le jeu, Mme la ministre s'évite de formuler ses propositions !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est vous qui êtes dans le virtuel !

M. Charles Revet.  - Je dirai même plus : dans l'irréel !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Le Sénat s'attache à dissiper les écrans de fumée car nos concitoyens doivent pouvoir choisir en toute connaissance de cause. (Applaudissements sur les bancs CRC, socialistes et RDSE)

M. Vincent Eblé, rapporteur pour avis de la commission de la culture.  - La commission de la culture a voulu se saisir pour avis de ce projet de loi de finances rectificative dont plusieurs articles la concernent.

A l'article 9, le Gouvernement propose 44,9 milliards pour financer le déménagement de RFI et de Monte-Carlo Doualiya, dont le coût est estimé à 20,5 millions, ainsi que le plan de départ de salariés consécutif à la fusion de RFI et de France 24. La commission de la culture s'est opposée tant au déménagement coûteux de RFI qu'à la fusion hasardeuse des institutions de l'audiovisuel extérieur de la France : d'où notre amendement de suppression.

La projet de Centre national de la musique a vocation, je le rappelle, à rassembler tous les acteurs du secteur et à compléter les aides allouées aux professionnels. Nous souhaitons attendre les résultats de la mission de préfiguration avant d'engager de nouveaux financements.

La hausse de la TVA, à l'article 11, pèserait lourdement sur la filière du livre et le report de deux mois n'y changera rien. Cette hausse pose aussi des problèmes techniques. Il faut encourager l'accès à la culture ! Le même argument vaut pour le spectacle vivant. Pour le cinéma, l'effort est évalué à 18,5 milliards d'euros. L'amendement de suppression de la commission des finances nous satisfait donc pleinement. A l'article 16, l'Assemblée nationale a supprimé l'ajustement de la CVAE destiné à tenir compte des spécificités du secteur cinématographique ; nous demanderons son rétablissement. Il y a un an, l'amendement de la commission avait été rejeté...

Quand aux dations en paiement, elles sont précieuses car elles enrichissent le patrimoine de l'État. L'article 17 vise à rationaliser le dispositif pour éviter effets d'aubaine et déconvenues -souvenez-vous de la dation Claude Berry qui a échappé au Centre Pompidou ! Notre commission y est favorable.

L'archéologie de sauvetage est devenu préventive, sujet qu'aborde l'article 22. Mais le financement est chroniquement insuffisant. Les besoins sont estimés à 125 milliards d'euros par l'IGF. Chaque année, l'État doit ouvrir des crédits en catastrophe : 154 milliards depuis 2002, 62 milliards dans ce collectif.

Le contrat de performance de l'Inrap permettra de rationaliser sa gestion. Le projet de loi de finances rectificative propose d'adosser la taxe d'archéologie préventive à la taxe d'aménagement. L'assiette sera élargie et le rendement augmenté. Dans un deuxième temps, un compte d'affectation spéciale améliorera la gouvernance. Mais ce dispositif a été modifié à l'Assemblée nationale et les maisons individuelles exonérées, ce qui pose un problème de justice sociale, réduit le rendement et favorise l'étalement urbain. Nous nous rallions à la position de la commission des finances.

L'article 30 vise à rendre effectif le droit à la formation professionnelle continue des artistes auteurs. Notre commission le soutient fortement. Mais ce droit doit bénéficier à tous les artistes auteurs ; la répartition des fonds et des sièges au conseil de gestion doit dépendre de l'effort contributif des secteurs ; validation et définition de critères d'éligibilité devront dépendre des commissions sectorielles. Nous demandons que le Gouvernement tienne les commissions compétentes du Parlement informées de l'impact de ce dispositif.

Enfin, la commission est très favorable à l'inscription des spectacles musicaux et de variétés sur la liste des activités culturelles pouvant être exonérées de cotisations foncières des entreprises par les collectivités territoriales. Il semble que les producteurs de spectacle avaient été oubliés. (Applaudissements à gauche)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Ce collectif, le dernier de l'année 2011 avant que nous n'examinions le premier de l'année 2012...

M. Jean-Pierre Caffet.  - On prend l'habitude !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - L'exercice ne doit pas nous attrister : il est de vérité et témoigne de notre réactivité face à un environnement par nature imprévisible. Ce collectif, disais-je, a donné lieu à des affirmations de la rapporteure générale que je veux commenter pour engager le dialogue. Improvisation ? Non, réactivité ! Une posture fondée sur les fausses certitudes du début 2011 aurait été pulvérisée par l'environnement économico-financier. Je peine à comprendre ce procès en improvisation, et encore plus le procès en crédibilité. D'après le rapporteur général de l'excellente commission de la culture, il faut renoncer à la mesure la plus productive du plan Fillon, modeste cependant, le second taux réduit de TVA.

M. Vincent Eblé, rapporteur pour avis.  - C'est aussi la mesure la plus injuste !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Et il relaie les doléances d'honorables corporations...

M. Jean-Pierre Caffet.  - Vous ne les aimez pas !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - A croire que la culture majoritaire, vous ne l'avez pas encore digérée...

M. Marc Daunis.  - Pas d'inquiétude ! On apprendra vite dans quelques mois...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Que la gauche caricature notre président de la République, notre candidat (exclamations amusées à gauche) se comprend. Il est de l'honneur des politiques d'exposer leurs convictions...

M. Maurice Vincent.  - Qui paie ses meetings ?

M. Vincent Eblé, rapporteur pour avis.  - Aux frais de l'État.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous aussi avez un candidat ; c'est naturel en politique. (On s'amuse, à gauche) Au niveau européen, c'est le président de la République qui a voix au chapitre. Et comment dénigrer l'accord de Bruxelles conclu à 26 ?

M. Jean-Pierre Caffet.  - Parlez-nous plutôt du collectif !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Cet accord du 9 décembre, loin des chimères fédéralistes, est un bon accord.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Dites-le aux analystes !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Il ne me paraît pas conforme à la culture de la gauche d'aller chercher des cautions du côté des marchés financiers.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Et votre AAA, dont vous avez tant parlé !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - La clarification avec le Royaume-Uni intervient enfin. Tant mieux ! C'en est fini de la contrainte de l'unanimité et les 26 États devront s'atteler à définir ensemble un frein à l'endettement, une expression que je préfère à celle de « règle d'or ».

M. Alain Néri.  - Très bien !

M. Marc Daunis.  - Nous finirons par tomber d'accord.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Nous devons en passer par une révision constitutionnelle et sans doute une loi organique, pour nous adapter à cette nouvelle gouvernance budgétaire. Je forme le voeu que nous sachions l'adopter ensemble. Il y va de notre intérêt national et de la monnaie que nous avons en partage...

M. Alain Néri.  - Il faudrait conclure.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Peut-être le débat vous semble-t-il trop technique et préférez-vous les vaines promesses. ..

Cet accord des 8 et 9 décembre signe, en outre, le retour des banques centrales nationales, qui prêteront au FMI pour que celui-ci prête aux États. Il n'y faudra pas d'accord spécifique de la BCE.

Reste le dernier aspect le plus délicat pour compléter le pare-feu : les modes d'action de la BCE. Peut-être une communication plus active lui aurait-elle évité des interventions répétées qui l'ont amenée à inscrire 200 milliards à son bilan. On peut au moins se poser la question.

Pour autant, ne dénigrons pas les décisions qui ont été prises pour sauver l'euro. Si l'euro disparaît, quelle Europe restera-t-il ?

M. Alain Néri.  - Nous la voulons sociale !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Je vous ai davantage parlé du texte que du contexte...

M. Marc Daunis.  - C'était un prétexte ! (Sourires)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Nous aurons l'occasion de revenir sur le texte dans les jours prochains lors de la discussion des articles -que le rapporteur pour avis de la commission de la culture a déjà amplement exposés pour ce qui le concerne. Pour ma part, je salue l'action du Gouvernement et la refonte de l'architecture de la TVA réduite pour le bâtiment et la restauration. Ce coup de rabot de 10 % est indolore, à la différence de ce que serait une suppression de l'exonération de charges sociales sur les heures supplémentaires. (M. Albéric de Montgolfier approuve)

Enfin, nos amis libraires ne disposent-ils pas d'ordinateurs pour opérer la correction ? (Applaudissements à droite)

M. Vincent Eblé, rapporteur pour avis.  - C'est plus compliqué que cela !

M. Thierry Foucaud.  - Le président de la commission des finances nous a livré un discours militant. Soit, nous ne l'avons pas choisi...

Ce collectif montre que la politique du Gouvernement n'est pas couronnée de succès. Une fois de trop ! Un chômage de 9,7 %, une baisse de l'activité du commerce de gros de 1,6 %, un repli dans l'activité de détail, les chiffres de 2011 sont peu encourageants : les ferments d'une récession durable sont là. Le relèvement du taux réduit de TVA aggravera la situation.

Vous gelez les salaires des agents publics, au nombre de 5 millions. Sans eux, que seraient les recettes de l'impôt sur le revenu ? Sans eux, que sera la trésorerie des banques ? Après la RGPP, la loi de finances pour 2012 gèle certaines de leurs allocations. Ces lois de finances qui se succèdent sont conçues comme un rasoir jetable à deux lames. Et voici la deuxième !

Vous évitez de frapper à la porte des plus riches tout en doublant la taxe sur la mutuelle. Une majoration de 5 % sur l'impôt sur les sociétés ? Elle est un peu chichiteuse. En 1995, le gouvernement Juppé avait décidé une surtaxe de dix points pour rattraper les comptes publics dégradés par le gouvernement Balladur-Sarkozy. Cette année, cinq points seulement et uniquement pour les entreprises présentant un chiffre d'affaires de plus de 250 millions. Une mesure qui égratigne plus qu'elle ne blesse. Surtout, elle vise à faire passer la pilule de la nouvelle TVA réduite de 7 %. Qui paie en dernier ressort ? Le consommateur ! La TVA, chacun la paie en achetant sa baguette, en faisant réparer ses chaussures, dans tous les actes de la vie quotidienne.

Vient ensuite le gel du barème de l'impôt sur le revenu, une décision que vous avez prise sans avoir l'air d'y toucher quand elle représente 100 euros par an et par ménage pour les contribuables. Elle aura des effets pervers sur le calcul des allocations. Ce sont avant tout les salariés et les retraités qui en subiront les effets, puisqu'ils paient près de 90 % de l'impôt sur le revenu. Au total, les plus modestes seront les premières victimes de votre politique.

Ce collectif entérine le déficit, dont 462 millions pour les opérations en Libye. Mesures ponctuelles, mesures bouche-trou, mesures antisociales, nous ne pouvons pas voter ce collectif. (Applaudissements à gauche)

M. Yvon Collin.  - A peine sortis du projet de loi de finances pour 2012, voici venir le quatrième collectif pour 2011, témoin de la difficulté du Gouvernement à juguler l'endettement de la France. Au vu du contexte économique, nous ne sommes pas au bout du tunnel : crise des dettes souveraines, crise des liquidités -et bientôt récession ?

Les accords intergouvernementaux, malgré un certain volontarisme, n'ont pas rétabli la confiance : l'agence Standard & Poor's a mis sous surveillance la note de quinze pays de la zone euro. Est-ce à dire que les marchés perçoivent les limites des plans successifs ? Le risque de contagion après le défaut de la Grèce n'est pas exclu, Mme Bricq le rappelle à juste titre. Le FESF ne couvre pas les besoins de financement de l'Espagne et de l'Italie pour les deux prochaines années. L'accord du 9 décembre marque, certes, une étape. Difficile de s'opposer au rétablissement budgétaire quand la France affiche un solde négatif de 95,3 milliards en 2011 !

M. Aymeri de Montesquiou.  - Très bien !

M. Yvon Collin.  - Je veux rappeler mon engagement précoce pour une politique budgétaire et fiscale plus coopérative en Europe. Il faudra oeuvrer à la convergence économique, faire que l'épargne et les investisseurs se rencontrent. Mais l'urgence est de rendre soutenable les dettes nationales. D'où le collectif qui traduit le plan Fillon II.

Avons-nous d'autres choix ? Non. Depuis 2007, vous n'avez pas su ou pas pu répondre au défi. Peut-être vous êtes-vous trop contentés de brandir la RGPP...

Enfin, la norme de dépenses est respectée grâce aux collectivités territoriales. Ce n'est pas le cas de l'État car l'effort porte d'abord sur les recettes, Mme la rapporteure générale l'a montré.

En conclusion, avec ce budget qui concrétise la rigueur, comment comptez-vous soutenir la demande et la croissance ? La majorité du RDSE ne votera pas ce quatrième collectif budgétaire. (Applaudissements à gauche)

M. Aymeri de Montesquiou.  - La perspective de la présidentielle pèse sur nos débats. Nous devrions avoir pour objectif de faire coïncider nos convictions et l'intérêt général. Le débat budgétaire a été dominé par des considérations politiciennes, comme si la nouvelle majorité du Sénat considérait que tout ce qui avait été voté depuis cinq ans était désormais nul et non avenu. Pour avoir connu l'Assemblée nationale, je souhaite que le Sénat reste le Sénat.

Ce texte comporte de bonnes mesures, entre autres le taux intermédiaire de TVA, recommandé par la Cour des comptes, qui participe de la convergence franco-allemande. En revanche, les Sunset laws ne sont pas de bon aloi. Plutôt qu'une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ou une surtaxe de l'impôt sur les sociétés, il aurait fallu un débat de fond. Quid du CAS qui remplace le fonds d'amortissement des charges d'électrification (Facé) ?

La compétitivité doit être l'aiguillon de notre politique : notre balance commerciale accuse un déficit de 75 milliards !

La part des dépenses publiques est de 54 %. J'ai connu un temps où l'on disait que, passé le seuil de 40 %, la France aurait basculé dans le système soviétique.

Le stoïcien Epictète enseigne que « notre salut et notre perte sont en nous-mêmes ». Soyons stoïques mais soyons aussi entreprenants et optimistes : stimulons l'initiative privée par la compétitivité. Mettons en avant nos atouts comme le luxe dans cette mondialisation où la différence dans le coût du travail est de un à cinquante entre la France et le Pakistan. Il est exclu d'aligner nos salaires sur ceux du Pakistan, mais nous pouvons baisser les charges et les faire porter sur la consommation, en faisant en sorte que ce transfert soit à somme nulle pour le consommateur.

La règle d'or n'est pas le remède mais elle freine la propagation de la maladie. (On approuve à droite) Cessons les querelles picrocholines pour faire primer l'intérêt général. Dix ans après une politique économique et sociale difficile, le chancelier Schröder apparaît comme l'homme qui a permis à son pays de tenir un rang envié pour la solidité de son économie et pour son consensus social. Les solutions proposées par le futur président ne pourront guère différer de celles qu'aurait mises en oeuvre son rival malheureux.

Il faut agir, les agences de notation nous surveillent. On peut d'ailleurs s'interroger sur leurs connivences avec les banques. Il y a un mois, une agence annonçait à tort la perte de notre AAA ; combien de spéculateurs en ont profité ? Des sanctions sont-elles envisageables ? Une crise auto-réalisatrice, a affirmé Mme la rapporteure générale. N'est-ce pas le signe qu'il y a un accord sur la règle d'or et le retour aux critères de Maastricht en 2013 ?

Han Seung-Soo, ancien Premier ministre coréen, rappelait qu'en chinois, le mot « crise » a deux sens : danger et chance à saisir. Comme M. Schröder, la France doit saisir l'opportunité plutôt que de céder aux sirènes de Merlin l'enchanteur. Le groupe UCR votera ce texte.

M. Francis Delattre.  - Comme Gambetta en 1876, il faudrait saluer la victoire historique de la nouvelle majorité au Sénat, lequel deviendrait un laboratoire d'idées. C'est oublier, dans l'euphorie, que Gambetta voulait aussi un Sénat modérateur des pouvoirs publics et des pulsions, et plus encore un Sénat des Républiques qui veulent persister et durer.

Votre posture consistant à démolir des budgets légitimes vous donne-t-elle un surcroît de crédibilité ?

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Il faut le croire !

M. Francis Delattre.  - Voter 30 milliards d'impôts dont 20 milliards sur les entreprises, créer une soixantaine de taxes, c'est faire du clientélisme de bas étage au risque d'amoindrir la plus-value du Sénat.

M. Albéric de Montgolfier.  - C'est vrai...

M. Francis Delattre.  - Peut-être seriez-vous plus crédibles en tenant un langage de vérité aux Français : mensonges sur les heures supplémentaires de la loi Tepa, mensonges sur la réforme des successions ! Elles profitent aux plus modestes ? (Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances, s'esclaffe) 75 milliards de cadeaux aux riches d'après le site du parti socialiste. Mme la rapporteur générale a dû rectifier le tir : 49,8 milliards !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Ce n'est pas rien ! Au moins, vous lisez Le Parisien !

M. Francis Delattre.  - La réforme de la taxe professionnelle, c'est vous qui l'avez commencée en supprimant la part assise sur les salaires...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'était le ministre Strauss-Kahn !

M. Francis Delattre.  - Le saut qualitatif a été franchi avec Michel Sapin...

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Parlez-nous de nous et pas des absents !

M. Francis Delattre.  - La dette dans l'Espagne du socialiste Zapatero et dans les États-Unis d'Obama a explosé.

M. Vincent Eblé, rapporteur pour avis.  - Et Poutine, c'est de notre faute aussi ?

M. Francis Delattre.  - Ce gouvernement, qui ne travaille que pour les riches, a créé le RSA, consolidé les minima sociaux, construit trois fois plus de logements sociaux que le gouvernement Jospin sans oublier les 500 millions du « plan Banlieue »...

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Dites tout cela aux Français, c'est eux qu'il faut convaincre !

M. Francis Delattre.  - C'est ce gouvernement qui a encadré retraites chapeau et parachutes dorés. Assez de vos larmes de crocodile sur la pénibilité du travail !

Ni M. Rocard, ni M. Jospin n'ont voulu toucher au système des retraites car cela pouvait faire tomber cinq gouvernements. Mais, solution miracle, on a créé un fonds alimenté par les privatisations... ou plutôt par 10 % de leur produit. C'est pourquoi il ne peut aujourd'hui financer les pensions !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Vous l'avez siphonné ! C'est délirant !

M. Francis Delattre.  - Vous trichez encore, en promettant la retraite à 60 ans, contribuant ainsi à déconsidérer le monde politique. Quant aux 60 000 postes d'enseignants, vous vous gardez bien de dire comment ils seront financés...

Où est le big bang annoncé ?

Mme Michèle André.  - Qui gouverne ?

M. Francis Delattre.  - Les interventions de la gauche sénatoriale lors du débat budgétaire ont montré le vide de vos propositions. Nous aurions pu parler de l'indépendance énergétique, du contrôle du gaz par M. Poutine !

M. Jean-Vincent Placé.  - Vous êtes au Sénat, pas au café du commerce !

M. Francis Delattre.  - Nous nous souvenons, pour notre part, de de Gaulle et Adenauer, d'Helmut Kohl et François Mitterrand et nous faisons confiance à M. Sarkozy et à Mme Merkel pour poursuivre le chemin. En toute bonne foi, nous faisons confiance au Gouvernement pour trouver le bon équilibre et tout en réduisant la dette, éviter de nuire à la croissance.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Enfin, il revient au sujet !

M. Francis Delattre.  - Les promesses fiscales du parti socialiste ne visent qu'à satisfaire des clientèles.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - C'est vous les sortants, pas nous !

M. Francis Delattre.  - Je vous mets au défi de trouver dans les programmes du parti socialiste la moindre mesure de justice fiscale. A nous, élus de la droite et du centre, de relever le beau drapeau de la France applaudi par les insurgés de Benghazi ! (Applaudissements à droite)

M. François Marc.  - M. le président de la commission a parlé de tout, sauf de ce projet de loi. Mme la ministre s'est surtout occupée de critiquer la gauche.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - A critique, critique et demie !

M. François Marc.  - Quant à la diatribe que l'on vient d'entendre, l'auteur en porte la responsabilité...

M. Francis Delattre.  - Aucun problème !

M. François Marc.  - Le Premier ministre a annoncé, en septembre, des économies de 17,7 milliards d'euros. L'atonie de la croissance nécessitera sans doute des mesures supplémentaires. Mais le Gouvernement oublie que, pour juger de la capacité d'un pays à rembourser sa dette, les marchés considèrent aussi son potentiel de croissance.

Je n'insiste pas sur le procédé qui consiste à proposer des mesures lourdes pour l'an prochain alors que le projet de loi de finances pour 2012 n'est toujours pas voté définitivement. Faut-il parler de dissimulation ? La présentation est contestable : la réduction du déficit tient, pour l'essentiel, à la non-reconduction de mesures exceptionnelles comme les investissements d'avenir, et non à des économies qui restent imaginaires.

Contrairement aux engagements du président de la République, qui dénonçait la folie qui consisterait à augmenter les impôts, qu'il ne commettrait pas parce qu'il n'avait pas été élu pour cela, le Gouvernement les accroît : 20 milliards lors du premier plan, 8 milliards ici. Pourquoi ne pas être revenu sur les cadeaux consentis en début de mandat ? Depuis 2002, la droite a créé ou élargi plus de 230 niches fiscales...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - On verra ça avec vos amendements.

M. François Marc.  - Le Conseil des prélèvements obligatoires a identifié 538 dispositifs dérogatoires dont la moitié, d'après un récent rapport de Bercy, sont inefficaces : cela représente 50 milliards.

L'augmentation de la TVA, l'impôt le plus injuste qui soit, réduit la demande intérieure et pénalise les plus modestes. Un nouveau taux réduit, d'1,5 point supérieure au premier, n'obéit à aucune logique. On ne gagnera pas plus ainsi qu'on n'a perdu en diminuant l'ISF : 2 milliards d'euros.

M. Roland Courteau.  - Exactement !

M. François Marc.  - La gauche tient à la progressivité de l'impôt, principe républicain. Le Gouvernement, lui, développe les impôts proportionnels. Qu'il s'agisse de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, la fiscalité est devenue régressive. Ce soir encore, M. Marini vantait la TVA.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Plus on dépense, plus on paie !

M. François Marc.  - Depuis 2002, la part de la TVA est passée de 44 % des recettes fiscales à plus de 50 % : le tableau de la France, dressé par l'Insee, prend tout son sens.

Nous proposerons de nombreux amendements pour introduire plus d'équité dans notre système fiscal. En l'état, nous ne pouvons pas accepter ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. François Fortassin.  - Monsieur Delattre, vos intonations censément gaulliennes m'ont plutôt rappelé le général Boulanger... Le réalisme serait à droite, l'utopie à gauche. J'en passe et des meilleures !

Mme la ministre a parlé d'équité. Mais c'est ce qui a le plus manqué dans le quinquennat Sarkozy ! Depuis dix ans...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Il n'est là que depuis 2007, mais on veut bien en reprendre pour cinq ans supplémentaires !

M. François Fortassin.  - L'UMP était déjà aux affaires.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Il y a eu la rupture...

M. François Fortassin.  - Un brouet a remplacé la tête de veau... Depuis dix ans donc, les inégalités se creusent.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Moins qu'ailleurs...

M. François Fortassin.  - On trouvera toujours en Asie du sud-est des gens qui travaillent pour moins cher. Faut-il les prendre pour modèles ?

M. Francis Delattre.  - Non, mais comme une contrainte !

M. François Fortassin.  - L'important est de restaurer la confiance. Pourquoi l'économie japonaise est-elle saine, malgré une dette publique abyssale ? Parce que les Japonais ont confiance en leur gouvernement. Nous essaierons de restaurer cette confiance que vous avez dilapidée en héritage ! (Applaudissements à gauche)

M. François Patriat.  - J'ai été surpris d'entendre M. Delattre vanter Pierre Mendès-France : lorsqu'il était au pouvoir, à quelle hostilité se heurtait-il de la part de la droite ! Il en a été de même pour Pierre Bérégovoy.

M. Francis Delattre.  - Bérégovoy ? Les nouveaux pauvres ! Le RMI, c'est nous...

M. Vincent Eblé, rapporteur pour avis.  - Et la CMU aussi peut-être ?

M. François Patriat.  - Sous le gouvernement Jospin, les comptes publics étaient sains, la croissance était au rendez-vous et le commerce extérieur excédentaire.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Il a perdu les élections !

M. François Patriat.  - Il ne suffit pas de nous annoncer une prévision de croissance de 1 % pour qu'elle s'avère. La compétitivité de nos entreprises s'est dégradée. Rien dans ce projet de loi sur l'investissement. Votre politique fiscale depuis 2007 ne l'a jamais favorisé. Le régime des jeunes entreprises innovantes a été raboté en 2011 ; il a fallu une loi de finances rectificative pour rectifier le tir. Pas moins de 80 % des entreprises ont réduit leurs dépenses de recherche et développement !

On ne nous propose que des mesures d'austérité, qui pèsent aux deux tiers sur les ménages quand seule une politique macroéconomique restaurera l'équilibre des finances publiques ! En coupant dans les dépenses, ce projet de loi aggravera la récession.

Après avoir abandonné notre souveraineté aux mains des agences de notation, nous abdiquerions notre souveraineté budgétaire au profit d'instances supranationales ? C'est inacceptable.

Comme M. Delattre, je serai manichéen : nous ne retiendrons des cinq années de sarkozysme que la hausse du chômage et la baisse de la croissance ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Vincent Placé.  - L'enchevêtrement et l'accumulation des textes budgétaires donnent une impression d'impréparation. Le Gouvernement s'est toujours fondé sur des hypothèses de croissance, systématiquement et, donc délibérément surévaluées. En septembre, l'hypothèse d'une croissance de 1,75 % était trop optimiste. Alors que nous avions en octobre retenu un chiffre de 0,8 %, votre prévision reste trop optimiste

M. Sarkozy s'était engagé à baisser les impôts ; les prélèvements ont augmenté de 20 milliards. Il prétendait réduire la dépense publique, elle a atteint un niveau record.

Vous augmentez le taux de l'impôt sur les sociétés, c'est oublier que beaucoup échappent à son assiette. Vous relevez le taux du prélèvement libératoire, sans soumettre les revenus du capital au barème de l'impôt sur le revenu. Vous gelez indistinctement celui-ci et relevez cet impôt injuste qu'est la TVA. La justice fiscale serait-elle devenue un luxe des pays riches ?

Cette crise n'est pas seulement financière : elle est aussi liée à l'aggravation des inégalités de richesse. Les baisses d'impôt des néo-libéraux ont aggravé la précarité et alimenté la spéculation. Pour en sortir, il faudra mieux répartir la valeur ajoutée, entre capital et travail.

La crise est aussi écologique. Les émissions de CO2, loin d'avoir baissé, ont atteint un milliard de tonnes... L'empreinte écologique mondiale est de 1,3 : cette année, c'est le 27 septembre que nous avons outrepassé la limite au-delà de laquelle le renouvellement des ressources naturelles n'est pas assuré. Nous vivons à crédit écologique. Étrange qu'aucune agence de notation ne nous en tienne rigueur quand cette dette est loin d'être une abstraction. Comme la crise sociale, la crise écologique est un soubassement de la crise financière. Les matières premières et agricoles sont devenues des valeurs refuges. Même le prix du pain a considérablement augmenté !

Mais le Gouvernement estime les considérations sociales et écologiques comme des suppléments d'âme...

Au groupe SOC-EELVr, nous savons depuis longtemps que la solution à la crise sera européenne. Cependant, alors que vous ne nous ne savez proposer que la contrainte budgétaire, par un mécanisme intergouvernemental, nous appelons de nos voeux une intégration fiscale, et un budget fédéral.

Nous ne vous suivrons pas sur le chemin de l'austérité. Ne vous laissez pas obnubiler par le AAA des agences de notation pour vous souvenir de celui de Danton : « De l'audace, de l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace ! » (Applaudissements à gauche)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Belle chute ! Mais Danton a mal fini...

La discussion générale est close.

M. Patrick Ollier, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement.  - Les débats budgétaires ont montré la profondeur des divergences entre le gouvernement et la Haute assemblée.

Madame la rapporteure générale, la prévision est difficile. Au printemps dernier, tout le monde s'attendait à une reprise. Les crises sont soudaines et brutales. Le Gouvernement a pris la mesure de celle-ci avec lucidité. Dans l'histoire récente de la France, une attitude aussi responsable est rare. M. le président Marini a parlé à raison du collectif comme d'un exercice de vérité et de réactivité.

Nos objectifs de réduction du déficit restent constants. Constance aussi dans la méthode, qui repose principalement sur des économies en dépenses. Pour la première fois, la dépense de l'État baisse, grâce à la RGPP engagée dès 2007, au non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, à la réforme des cartes militaires en 2008 et judiciaire en 2009, à la réforme des retraites, toutes mesures que vous avez combattues une à une. On attend de la clarification de votre candidat : comptez-vous oui ou non revenir à la retraite à 60 ans ?

La crédibilité du Gouvernement est le fruit de cinq ans d'action. Pour la première fois, la masse salariale de l'État hors pensions diminue.

Vous avez créé 40 milliards d'euros de taxes dans le cadre du projet de loi de finances... Nous préférons les prélèvements ciblés et justes. Seules les grandes entreprises seront touchées par la majoration de l'impôt sur les sociétés. Rien à voir avec la hausse généralisée que vous avez votée ! L'augmentation du prélèvement libératoire forfaitaire ne concerne que les ménages aisés et s'inscrit dans un rapprochement historique entre fiscalité du capital et du travail.

Les leçons de justice fiscale, c'est nous qui sommes en mesure de les donner ! Le plafonnement des niches sur l'impôt sur le revenu, c'est nous qui l'avons établi ! Un ménage gagnant un million d'euros pouvait ne rien payer en 2000 ; il paie désormais au moins 340 000 euros d'impôt.

Nous avons veillé à ce que le nouveau taux réduit de TVA ne déséquilibre aucun secteur, d'où le report de deux mois pour le livre.

Le Gouvernement a toujours pris les mesures qui s'imposaient. On ne peut prétendre redresser les finances publiques et refuser tout engagement contraignant !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Et vous, quels engagements prenez vous ?

M. Patrick Ollier, ministre.  - La règle d'or fait consensus partout en Europe, y compris chez les socialistes allemands et espagnols. Ralliez vos amis et, dans un esprit de responsabilité, dépassons les clivages partisans ; cela honorerait le Parlement !

M. François Marc.  - Le déficit, c'est vous !

M. Patrick Ollier, ministre.  - Faites un effort ! Alors que l'Europe se rassemble, vous semez la division. Que 26 pays se soient mis d'accord marque un progrès considérable.

Les marchés nous observent, ils observent vos réactions car ils savent que nous voulons réduire les déficits. Dans les circonstances exceptionnelles que nous vivons, oublions les divergences quelques mois pour bâtir ce consensus national voulu par M. de Montesquiou afin de sauver l'euro, l'Europe et notre pays ! (Applaudissements à droite)

Question préalable

M. le président.  - Motion n°195, présentée par M. Foucaud et les membres du groupe CRC.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances rectificative pour 2011.

M. Éric Bocquet.  - Le déficit moyen des pays de la zone euro sera de 40 % en 2012, contre 9 % aux Etats-Unis et au Japon. L'économiste Henri Sterdyniak, de l'OFCE, appelait dès l'été le Gouvernement à ne pas vivre dans l'angoisse des agences de notation et la BCE à acheter de la dette publique.

Depuis la semaine dernière, on veut nous faire croire à une refondation de l'Europe. C'est nier l'évidence. La démocratie est le cadet des soucis des auteurs de l'accord. Les parlements seront placés sous tutelle de la Commission européenne et de la CJUE. La BCE garde pour objectif principal de lutter contre l'inflation et de limiter la création monétaire, assurant ainsi le monopole des banquiers auxquels elle prête au taux de 1 %. En revanche, il est toujours interdit à la banque de financer toute politique d'investissement public qui relancerait la croissance. Quels progrès pour la construction européenne dans ces circonstances ? La BCE prête à une banque privée à un taux de 1 %, laquelle pour ne pas laisser l'argent dormir achète des titres... Autrement dit, on alimente la spéculation !

Tel Diafoirus, on administre la saignée à des patients déjà anémiés. Partout en Europe ou presque, les dirigeants ont été débarqués pour être remplacés par des techniciens ou des adversaires de l'austérité. J'invite la droite à voter cette motion pour s'éviter ce sort...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Nous ferons notre travail jusqu'au bout !

M. Éric Bocquet.  - La Grèce, à qui l'on a affublé le bonnet d'âne européen, connaît une récession plus dure encore depuis l'austérité. Dans notre pays, un ménage sur six renonce désormais à se chauffer à cause du renchérissement des prix de l'énergie...

Le projet de loi de finances pour 2012 a été l'occasion pour la nouvelle majorité sénatoriale de revenir sur votre dogme fiscal et budgétaire. Comment croire à l'impôt sur le revenu, à l'impôt sur les sociétés et à l'ISF mités par les niches et les exonérations ? Comment accepter le maintien du dispositif d'heures supplémentaires, trappe à bas salaires ? Nous aurons ce débat lors de la présidentielle. Il faut changer de braquet et mettre fin à ces années de politique libérale qui se concluent par une dette publique inégalée en temps de paix, un déficit historique du commerce extérieur dans toute la Ve République.

Le projet de PPP pour la construction du Pentagone à la française conclu en faveur de Bouygues montre qu'il est temps de mettre fin au gaspillage des deniers publics.

Une réforme fiscale de grande ampleur est nécessaire, ainsi qu'une reconsidération de la dépense publique. Encore heureux qu'il existe des millions de fonctionnaires qui perçoivent un revenu assuré et régulier ! Certains se gaussent de la proposition de création de 60 000 postes dans l'éducation nationale. Mais maintenir 60 000 jeunes sur les bancs de l'école, cela a aussi un coût !

Pour toutes ces raisons, nous invitons le Sénat à voter la motion. (Applaudissements sur les bancs CRC)

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - La discussion générale a montré qu'il y avait lieu de poursuivre le débat. Avec 200 amendements, nous avons de quoi montrer qu'il existe un autre chemin. L'avis est défavorable.

M. Patrick Ollier, ministre.  - Il y a urgence à délibérer pour augmenter les recettes de 5,2 milliards d'euros et pour assurer le fonctionnement normal de l'État et de la protection sociale jusqu'à la fin de l'année : 250 millions pour les APL, 137 millions pour l'allocation adulte handicapé, 52 millions pour les demandeurs d'asile... Allez-vous pénaliser les plus fragiles ? Le Gouvernement est contre la motion.

La question préalable est mise aux voix par scrutin public de droit

M.le Président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 344
Majorité absolue des suffrages exprimés 173
Pour l'adoption 21
Contre 323

Le Sénat n'a pas adopté.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 14 décembre 2011, à 14 h 30.

La séance est levée à minuit cinquante.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du mercredi 14 décembre 2011

Séance publique

À 14 HEURES 30 ET LE SOIR

Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2011 (n°160, 2011-2012).

Rapport de Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances (n°164, 2011-2012).

Avis de M. Vincent Eblé, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (n°163, 2011-2012).