EXAMEN DES ARTICLES
TITRE IER
POLITIQUE DE LA VILLE ET RÉNOVATION URBAINE
CHAPITRE IV
DISPOSITIONS RELATIVES À LA SÉCURITÉ
DANS LES IMMEUBLES COLLECTIFS À USAGE D'HABITATION
ET AUX
COPROPRIÉTÉS EN DIFFICULTÉ
Article 15
(art. L. 129-1 à L. 129-6 nouveaux
du code de la
construction et de l'habitation)
Sécurité des immeubles
collectifs à usage
d'habitation
Cet
article tend à introduire un chapitre IX, intitulé
« Sécurité des immeubles collectifs à usage
d'habitation », dans le titre II du livre premier du code de la
construction et de l'habitation.
Ce nouveau chapitre comprendrait six articles, numérotés
L. 129-1 à L. 129-6.
I. Le nouveau dispositif prévu par le présent projet de loi
Le régime institué par le présent article ne
revêtirait qu'un
champ d'application réduit, puisqu'il ne
concernerait que les immeubles collectifs à usage d'habitation.
Il ne serait donc pas applicable aux immeubles à usage d'habitation qui
ne serviraient qu'à un occupant unique, de même qu'aux immeubles
collectifs à usage professionnel de bureaux ou de commerces. En
revanche, les dispositions concerneraient indistinctement tous les immeubles
susmentionnés, qu'ils soient une copropriété ou la
propriété d'une seule personne. En pratique, néanmoins,
ce système devrait essentiellement concerner les immeubles en
copropriété.
Outre sept amendements rédactionnels, l'Assemblée nationale a, en
première lecture, opportunément adopté un amendement
présenté par le rapporteur de la commission des Affaires
économiques, tendant à préciser que le
présent
dispositif s'applique aux immeubles à usage
«
principal
» d'habitation.
En effet,
dans sa rédaction initiale, le projet de loi pouvait sembler ne
concerner que les immeubles collectifs à usage exclusif d'habitation.
Auraient ainsi été exclus du dispositif les immeubles comportant
à la fois des locaux d'habitation et, accessoirement, des locaux
professionnels ou commerciaux. Cette exclusion n'apparaissait pas
justifiée et aurait conduit à interdire à un nombre en
définitive important d'immeubles de bénéficier des
dispositions du présent article.
Article L. 129-1 nouveau
Arrêté prescrivant la remise en
état
ou le remplacement d'équipements communs
Le texte
proposé par l'article 15 du présent projet de loi pour
insérer un article L. 129-1 dans le code de la construction et de
l'habitation accorde au maire - sous réserve de l'application des
dispositions de l'article L. 129-5 nouveau dudit code - la
possibilité de prescrire par arrêté la remise en
état ou le remplacement d'équipements communs d'un immeuble
collectif à usage d'habitation
.
Le régime qu'il prévoit présente de fortes similitudes
avec celui retenu par la législation sur les édifices
menaçant ruine et insalubres.
1. Les conditions du prononcé de l'arrêté
Ce dispositif ne concernerait que les « équipements
communs » de l'immeuble
.
La formulation employée par le projet de loi est déjà
présente dans la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le
statut de la copropriété des immeubles bâtis
13(
*
)
.
Cette expression est également utilisée par l'article
1
er
du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour
l'application de la loi précitée du 10 juillet 1965 qui
prévoit que le règlement de copropriété comporte un
état qui «
définit les différentes
catégories de charges et distingue celles afférentes à la
conservation, à l'entretien et à l'administration de l'immeuble,
celles relatives au fonctionnement et à l'entretien de chacun des
éléments d'équipement communs et celles
entraînées par chaque service collectif
».
La notion d'« équipements communs »
n'est pas
équivalente à celle de partie commune. Elle
permet
d'appréhender certaines installations telles que les installations de
distribution d'eau et de chauffage collectif, l'électricité ou
certains dispositifs de sécurité
, tels que ceux visant
à lutter contre les incendies.
Pour que le maire puisse prendre l'arrêté prévu par le
présent article,
trois conditions
cumulatives
doivent
être satisfaites :
- la
carence du ou des propriétaires
: le ou les
propriétaires doivent avoir manqué d'entretenir les
équipements communs ;
- cette carence doit avoir entraîné un
fonctionnement
défectueux ou un défaut d'entretien de ces
équipements
;
-
des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou
des conditions d'habitation gravement compromises doivent
résulter
de ce fonctionnement défectueux ou de ce défaut d'entretien.
La dernière condition exigée par cet article est donc plus large
que celle imposée par l'article L. 511-1 du code de la construction et
de l'habitation qui exige, pour que le maire puisse agir, que le bâtiment
concerné menace ruine et compromette, par son effondrement, la
sécurité ou n'offre pas les garanties nécessaires au
maintien de la sécurité publique.
Toutefois,
le caractère particulièrement vague de cette
condition n'est pas sans susciter certaines difficultés
.
La notion de risque sérieux pour la sécurité des occupants
peut présenter un caractère relativement objectif : on peut
penser, par exemple, à une installation électrique à ce
point défectueuse qu'elle constitue un danger pour ceux qui s'y
raccordent. L'utilisation du terme « sérieux »
pourrait cependant générer certains contentieux, dans la mesure
où ce mot n'est guère connu du vocabulaire juridique
traditionnellement employé par notre législation.
Dans le même ordre d'idées, la notion de «
conditions
d'habitation gravement compromises
» s'avère difficile
à définir. Au surplus, on peut s'interroger sur la question de
savoir si l'existence de conditions d'habitation gravement compromises
n'implique pas nécessairement l'existence de risques pour les occupants
de l'immeuble à usage d'habitation. Dans ce cas, les deux cas
d'ouvertures de la procédure sont particulièrement proches, si ce
n'est identiques.
L'intervention du juge sera, en tout état de cause, nécessaire
pour déterminer, au cas par cas, si les conditions sont remplies. A
cette fin, il importera que l'arrêté municipal soit suffisamment
motivé.
L'intervention du juge - qui sera le juge administratif, l'arrêté
municipal constituant un acte administratif unilatéral - interviendra de
ce fait à deux niveaux : d'une part, au stade de l'expertise de
l'immeuble, conformément à l'article L. 129-2 nouveau issu du
présent projet de loi ; d'autre part, lors de l'examen de la
légalité de l'arrêté, dans le cadre d'un
éventuel recours pour excès de pouvoir.
2. Les mesures susceptibles d'être prononcées
Aux termes du présent article, deux types de mesures peuvent être
prononcés par le maire :
la remise en état ou le
remplacement des équipements concernés
.
On rappellera, à cet égard, que le Conseil d'Etat
considère comme illégal un arrêté de péril,
pris sur la base de l'article L. 511-2 du code de la construction et de
l'habitation, qui ne serait pas suffisamment explicite et précis sur la
nature des mesures à prendre.
14(
*
)
Une telle jurisprudence devrait
également s'appliquer par analogie au régime institué par
l'article L. 129-1 nouveau du même code.
Le maire fixera lui-même, dans l'arrêté, le délai au
terme duquel ces travaux devront être exécutés par le ou
les propriétaires. Il devra s'agir, en tout état de cause, d'un
délai raisonnable, déterminé
in concreto
, en
fonction de l'importance des travaux à remplir et des risques encourus
par les occupants.
3. La notification de l'arrêté constatant la carence
Il importe d'assurer la publicité de l'arrêté municipal
prescrivant la remise en état des équipements communs de
l'immeuble à l'égard des propriétaires, dans la mesure
où cette obligation est mise à leur charge par ce texte. En
effet, cette notification doit s'analyser juridiquement comme une mise en
demeure de procéder aux travaux sur l'immeuble exigés par
l'arrêté ; elle fait courir le délai fixé par
l'arrêté pour l'exécution des travaux.
En conséquence, il est précisé que l'arrêté
est notifié aux propriétaires et aux titulaires de droits
réels immobiliers sur les locaux tels qu'ils figurent au fichier
immobilier de la conservation des hypothèques.
Les modalités de notification varient cependant selon la qualité
du propriétaire de l'immeuble en cause. Sur ce point, le dispositif
retenu par le présent article est assez proche de celui prévu par
les alinéas 2 et 3 de l'article L. 511-1-1 du code de la
construction et de l'habitation, tel que rédigé par la loi
n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la
solidarité et au renouvellement urbain.
Ainsi, l'alinéa 2 du texte prévu pour l'article L. 129-1 du
code de la construction et de l'habitation prévoit que, lorsque les
mesures prescrites ne portent que sur les parties communes d'un immeuble en
copropriété, la notification doit être adressée au
syndicat des copropriétaires. De plus, afin que la méconnaissance
de l'identité ou de l'adresse du propriétaire ou des
copropriétaires de l'immeuble ne constitue pas une entrave à
l'exercice des travaux imposés par la détérioration de
l'immeuble, le dernier alinéa du texte prévoit que la
notification est, dans cette hypothèse, valablement effectuée par
un double affichage : d'une part, à la mairie de la commune - ou,
à Paris, Lyon et Marseille, à la mairie de l'arrondissement
où se situe l'immeuble - et, d'autre part, sur la façade de
l'immeuble concerné.
En revanche, il convient de relever deux différences avec le dispositif
relatif aux édifices menaçant ruine.
D'une part, lorsque l'immeuble est la propriété d'une
société civile dont les parts donnent droit ou non à
l'attribution ou à la jouissance en propriété des locaux,
la notification est faite au gérant, tel qu'il est désigné
au registre du commerce et des sociétés, alors que l'article
L. 511-1-1 susvisé impose la notification de l'arrêté
aux titulaires de parts donnant droit à l'attribution ou à la
jouissance des locaux concernés. D'autre part, cette dernière
disposition impose la notification de l'arrêté aux occupants de
l'immeuble et, le cas échéant, à la personne qui
l'exploite, ce que ne prévoit pas le texte proposé pour l'article
L. 129-1.
Ces différences peuvent s'expliquer par le fait que les mesures offertes
au maire par le présent dispositif ont un caractère moins radical
que celles qu'il est autorisé à prendre sur la base de l'article
L. 511-1-1. De plus, dans la mesure où les travaux que peut
prescrire le maire ne concernent que les équipements communs des
immeubles, la notification à chaque copropriétaire
n'apparaît pas indispensable.
Article L. 129-2 nouveau
Opération
d'expertise
L'article 15 du présent projet de loi insérerait
un
article L. 129-2 nouveau dans le code de la construction et de
l'habitation tendant à
instaurer une opération d'expertise
postérieurement à l'adoption de l'arrêté municipal
visé à l'article L. 129-1 et à permettre, le cas
échéant, l'exécution d'office de travaux
.
Le dispositif retenu est, une fois encore, calqué sur celui figurant
à l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation.
1. La contestation des motifs de l'arrêté ou des mesures
prescrites
Le texte proposé pour l'article L. 129-2 offre aux
propriétaires d'un immeuble collectif ayant fait l'objet d'un
arrêté sur le fondement de l'article L. 129-1 la
possibilité d'en contester les motifs ainsi que les mesures prescrites.
Dans cette hypothèse
, les propriétaires ont la faculté
de demander à ce qu'une expertise contradictoire soit menée, afin
de déterminer si les motifs de l'arrêté ou les mesures qui
y sont prescrites sont légitimes.
L'intervention de l'expert désigné par les propriétaires
doit se faire, selon le texte, «
au jour fixé par
l'arrêté
», ce qui implique que ce dernier devra
obligatoirement informer ses destinataires de la possibilité de
contester l'arrêté en nommant un technicien. On doit estimer que,
conformément à la solution dégagée par la
jurisprudence pour l'article L. 511-2 du code de la construction et de
l'habitation, le défaut de mention sur ce point entraînera la
nullité de l'arrêté.
15(
*
)
Le deuxième alinéa du texte proposé pour cet article vise
néanmoins l'hypothèse dans laquelle aucun expert n'aurait
été désigné, alors même que les
propriétaires persisteraient à contester l'intervention du maire
sur leur bien.
Dans ce cas, il est procédé à une expertise non
contradictoire effectuée par le technicien nommé par le maire.
Bien que le texte ne le précise pas, il faut comprendre que l'expert
examinera alors l'état des équipements pour lesquels
l'arrêté a été pris et fera état de ses
constatations, le cas échéant, dans un rapport qui pourra
être produit en justice par le maire.
2. L'intervention du juge administratif
L'arrêté pris au titre de l'article L. 129-1 susvisé
ne revêt un caractère exécutoire qu'après que le
juge administratif a statué.
Le juge administratif, statuant contradictoirement, peut en effet être
saisi afin d'
ordonner les mesures à réaliser sur
l'immeuble
et de déterminer le délai dans lequel elles
devront être exécutées.
Il peut, en outre,
ordonner
l'exécution d'office des mesures qu'il prescrit
si ces
dernières n'ont pas été accomplies par le
propriétaire dans le délai fixé. Cette exécution
d'office intervient aux frais du propriétaire.
Si la juridiction administrative devant laquelle le litige administratif est
porté n'est pas précisée par le texte du projet de loi, il
faut déduire des règles générales de
répartition des compétences juridictionnelles définies par
le code de justice administrative, que le tribunal administratif dans le
ressort duquel est situé le bâtiment devra être en principe
saisi.
Article L. 129-3 nouveau
Mesures
provisoires
L'état de détérioration de certains
immeubles
collectifs à usage d'habitation peut justifier le prononcé par le
maire de mesures d'urgence à caractère provisoire. Selon un
dispositif très proche de celui prévu à l'article L. 511-3
du code de la construction et de l'habitation s'agissant des édifices
menaçant ruine, le texte proposé pour l'article L. 129-3 nouveau
du même code prévoit une procédure d'urgence.
1. Les conditions d'ouverture de la procédure
La mise en oeuvre de cette procédure est soumise à
trois
conditions cumulatives
:
- l'existence d'une
urgence ou d'une menace grave et imminente.
L'appréciation de cette condition par le maire - tout comme par le
juge - se fera au cas par cas, en fonction des données propres à
chaque situation ;
- un
avertissement adressé aux propriétaires
de
l'immeuble ;
- la
saisine du juge d'instance
,
aux fins d'obtenir la
nomination d'un expert
chargé d'examiner l'état des
équipements communs.
L'intervention du juge d'instance, à la place du juge administratif, est
déjà prévue par la législation sur les
édifices menaçant ruine. La préférence du
législateur a été de confier cette compétence
à un juge proche des administrés, qui peut être saisi
rapidement et selon des règles de procédure
allégées. Cette préférence est confirmée par
le présent projet de loi.
La saisine du juge d'instance a un caractère indispensable : le
maire ne saurait désigner lui-même l'expert chargé de
constater l'état de l'immeuble, contrairement au régime
prévu par le texte proposé pour l'article L. 129-2 du code de la
construction et de l'habitation. Néanmoins, l'intervention du juge
d'instance apparaît, en la matière, simplement formelle. Il ne
semble disposer d'aucun pouvoir d'appréciation sur la
nécessité de procéder ou non à la nomination d'un
expert.
Votre commission rappelle d'ailleurs que, dans le cadre de la procédure
prévue à l'article L. 511-3 du code de la construction et de
l'habitation, le juge d'instance saisi ne peut refuser de déférer
à la réquisition du maire et que l'ordonnance par laquelle est
nommé l'expert, constituant un simple acte d'administration judiciaire,
est insusceptible de recours.
Saisi, le juge d'instance nomme l'expert qui doit, dans les vingt-quatre heures
de sa désignation, examiner l'état des équipements
communs. Il va sans dire que cette nomination par le juge devra intervenir dans
les plus brefs délais, dès lors qu'il existe une urgence ou une
menace imminente.
2. Les mesures susceptibles d'être prononcées
Des mesures destinées à parer à la menace grave et
imminente résultant de l'état de l'immeuble ne peuvent être
prises par le maire qu'après que l'expert a constaté la
réalité de l'urgence et de la menace. L'intervention du
technicien est donc, dans le cadre de cette procédure,
déterminante. Il résulte de l'économie du texte que le
maire ne dispose pas d'un pouvoir d'appréciation sur ce point : il
ne pourrait ainsi prescrire aucune mesure dont la nécessité
n'aurait pas été au préalable constatée par
l'expert.
Le maire peut alors ordonner «
les mesures provisoires
nécessaires pour garantir la sécurité des
occupants
». Ses prérogatives sont donc doublement
encadrées.
D'une part, il ne saurait prescrire que des
mesures à
caractère provisoire
. D'autre part, ces mesures doivent être
proportionnées aux nécessités de la
sécurité des occupants de l'immeuble
. Par analogie avec le
régime des édifices menaçant ruine, il convient de
souligner que des travaux excédant ceux qui sont nécessaires pour
faire face à l'urgence de la situation ne sauraient être prescrits
sur le fondement de l'article L. 129-3 nouveau du code de la construction et de
l'habitation.
16(
*
)
A titre illustratif, le projet de loi, dans sa version initiale,
prévoyait que le maire pouvait « notamment »
prescrire dans ce cadre, l'évacuation de l'immeuble. A l'initiative du
rapporteur de sa commission des Affaires économiques, l'Assemblée
nationale a, en première lecture, tenu à préciser que
cette mesure ne devait être prononcée que si elle revêtait
un caractère «
nécessaire
», ce qui
découlait déjà, au demeurant, de l'économie du
présent texte.
Le présent article prévoit en outre la
possibilité pour
le maire de faire exécuter d'office
et aux frais des
propriétaires
les travaux d'urgence
nécessités par
l'état du bâtiment. Contrairement à la procédure de
droit commun visée par le texte proposé pour l'article
L. 129-2 du code de la construction et de l'habitation,
l'intervention
du juge administratif n'est ici pas exigée.
La dernière phrase du second alinéa du présent article du
projet de loi, tel qu'adopté par l'Assemblée nationale, dispose
qu'«
il est ensuite procédé conformément
à l'article L. 129-2
». En effet, seul le recours à
la procédure prévue à ce dernier article permet au maire
de prescrire des mesures présentant plus qu'un caractère
provisoire. Cependant, dans ce cas, le litige est directement porté
devant le juge administratif qui déterminera les mesures à
réaliser et les délais d'exécution. Le cas
échéant, il pourra autoriser le maire à exécuter
d'office les travaux dépassant le caractère de travaux d'urgence,
rendus nécessaires par l'état de l'immeuble.
Article L. 129-4 nouveau
Avance et recouvrement des frais
afférents à l'exécution d'office de
travaux
L'article L. 129-4 nouveau du code de la construction et
de
l'habitation préciserait les
modalités de financement des
travaux effectués d'office par le maire sur les équipements
défectueux
.
L'exécution d'office des travaux sur les équipements communs peut
intervenir à deux stades : lorsque des travaux sont prescrits
conformément à l'article L. 129-2 nouveau du code de la
construction et de l'habitation ou lorsqu'ils sont ordonnés sur la base
de l'article L. 129-3 nouveau du même code. Selon ces deux dispositions,
les frais occasionnés par cette exécution d'office sont mis
à la charge des propriétaires.
L'article L. 129-4 prévoit que les
frais afférents
à l'exécution d'office des mesures prescrites sont avancés
par la commune et recouvrés comme en matière d'impôts
directs
. La procédure de recouvrement des produits communaux par le
comptable public, en vertu d'un état rendu exécutoire par le
maire,
17(
*
)
serait donc
applicable.
Cette solution est déjà celle retenue par l'article L. 511-4
du code de la construction et de l'habitation relatif aux bâtiments
menaçant ruine.
Article L. 129-5 nouveau
Dispositions particulières applicables
à Paris
Cet
article tend à prendre en compte la spécificité de la
répartition des compétences en matière de police
administrative à Paris. Les compétences en la matière y
sont en effet partagées entre le maire de Paris et le préfet de
police.
Le présent article prévoit, en conséquence, que
les
compétences attribuées au maire par les articles L. 129-1
à L. 129-4 sont exercées, à Paris, par le préfet de
police.
Cette disposition conforte d'ailleurs, au niveau législatif, la
jurisprudence du Conseil d'Etat en matière d'édifices
menaçant ruine, aux termes de laquelle ce pouvoir de police
spéciale relève à Paris de la compétence du
préfet de police agissant au nom et pour le compte de la ville de
Paris.
18(
*
)
Article L. 129-6 nouveau
Renvoi à un décret en Conseil
d'Etat
Cet
article, après amélioration rédactionnelle de
l'Assemblée nationale, prévoit que les conditions d'application
de l'article L. 129-1 du code de la construction et de l'habitation seront
précisées par un décret en Conseil d'Etat.
En outre, le texte prévu pour cet article énonce, à titre
purement illustratif, que ce texte de nature réglementaire
précisera notamment la nature des équipements communs
concernés.
La formulation retenue implique que les équipements communs qui pourront
faire l'objet de l'intervention de l'autorité municipale ou, le cas
échéant, préfectorale, au titre du présent
chapitre, seront limitativement énumérés par ce
décret d'application.
Lors de la rédaction du décret, il conviendra que les
dispositions réglementaires soient insérées dans la partie
réglementaire du code de la construction et de l'habitation.
II. La position de votre commission des Lois
Votre commission constate que
notre législation comportait
déjà un certain nombre de dispositifs visant à assurer la
sécurité des immeubles et permettant l'intervention des pouvoirs
publics
dans le but de restaurer les conditions d'un habitat correct pour
les occupants d'immeubles dégradés.
Ainsi qu'il l'a été précédemment souligné,
le présent article du projet de loi vise ainsi à créer
un nouveau dispositif dont le champ d'application se limite aux immeubles
à usage principal d'habitation
, en reproduisant presque à
l'identique la procédure actuellement prévue aux articles L.
511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation relatifs aux
édifices menaçant ruine.
Votre commission comprend l'intention du gouvernement ayant guidé la
création de cette nouvelle procédure, et partage la même
volonté de garantir une meilleure sécurité des immeubles
à usage d'habitation.
Toutefois, dans la mesure où le dispositif prévu au
présent article s'appliquerait à l'ensemble des immeubles
collectifs à usage principal d'habitation et que lesdits immeubles ne
sont pas tous nécessairement recensés, il apparaît utile de
réserver cette procédure aux cas pour lesquels le conseil
municipal a constaté, par une délibération motivée,
l'existence d'immeubles collectifs à usage principal d'habitation dont
certains équipements communs présentent un fonctionnement
défectueux ou un défaut d'entretien de nature à
créer des risques sérieux pour la sécurité des
occupants. Votre commission des Lois vous propose par conséquent un
amendement
à cet effet.
Votre commission des Lois a donné un
avis favorable à
l'adoption de l'article 15, ainsi modifié.
Article 16
(art. 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965
fixant le statut de la copropriété des immeubles
bâtis)
Assistance de l'administrateur provisoire de
copropriété
par un tiers pour l'exercice de ses
fonctions
Le
présent article a pour objet de préciser l'article 29-1 de la loi
n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la
copropriété des immeubles bâtis afin d'
autoriser
l'administrateur provisoire de la copropriété à se faire
assister par un tiers lors de l'accomplissement de sa mission
.
L'Assemblée nationale a apporté, en première lecture, des
précisions rédactionnelles à cet article.
Lors de l'adoption de la loi n° 94-624 du 21 juillet 1994 relative
à l'habitat, le législateur a souhaité instituer un
mécanisme d'administration provisoire au profit des
copropriétés en difficulté. Le dispositif a
été partiellement modifié par la loi
n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la
solidarité et au renouvellement urbain.
Le régime de l'administration provisoire des copropriétés
est ainsi désormais fixé par les articles 29-1 à 29-6 de
la loi précitée du 10 juillet 1965. Il est propre aux
copropriétés, les règles relatives à la
prévention et au règlement des difficultés des
entreprises, ainsi que celles relatives au redressement et à la
liquidation judiciaire des entreprises ne leur étant pas
applicables
19(
*
)
.
Le président du tribunal de grande instance, saisi par le syndic de la
copropriété, le procureur de la République ou des
copropriétaires représentant ensemble au moins 15 % des voix
du syndicat, peut désigner un administrateur provisoire
«
si l'équilibre financier du syndicat des
copropriétaires est gravement compromis ou si le syndicat est dans
l'impossibilité de pourvoir à la conservation de
l'immeuble
».
Cependant, l'administrateur provisoire nommé est, en principe, un
administrateur judiciaire qui seul peut, en vertu des articles L. 811-1 et
L. 811-2 du code de commerce, être désigné en justice
pour administrer les biens d'autrui ou exercer des fonctions d'assistance ou de
surveillance dans la gestion de ces biens. Or, comme le relevait le rapport du
Conseil économique et social sur les copropriétés en
difficulté, rendu en septembre 2002,
les administrateurs judiciaires
ne maîtrisent pas nécessairement tous les problèmes
spécifiques des copropriétés
20(
*
)
.
L'alinéa 2 de l'article L. 811-1 du code de commerce autorise
certes les tribunaux à désigner, « à titre
exceptionnel » et par décision motivée, des personnes
physiques ayant une expérience ou une qualification particulière.
Mais cette possibilité apparaît particulièrement
restrictive.
Le présent article ne renforce pas les règles de
compétence des administrateurs judiciaires pouvant être
nommés administrateurs provisoires de copropriétés. Il
précise seulement les conditions d'exécution par l'administrateur
provisoire de la mission qui lui a été confiée par le
tribunal, en posant le
principe de l'exécution personnelle, par
l'administrateur, de sa mission.
Toutefois, l'article 16 du présent projet de loi donne à ce
principe une portée toute relative, en permettant à
l'administrateur provisoire de se faire assister par un tiers. Cette nouvelle
disposition offre donc à
l'administrateur la
possibilité de se faire assister par une personne dotée de
compétences particulières en matière de
copropriété.
Par ce biais, le travail de l'administrateur
dans la gestion d'une copropriété en difficulté sera
facilité.
Le recours de l'administrateur à un tiers est cependant encadré.
Deux conditions
doivent être satisfaites :
- d'une part, une condition de fond :
le bon déroulement de la
mission de l'administrateur provisoire doit requérir l'intervention
d'un assistant
;
- d'autre part, une condition de forme :
la faculté pour
l'administrateur de se faire assister par un tiers doit être
autorisée
par le président du tribunal de grande instance,
qui statue par décision motivée.
Sur ce point, la présente disposition donne au président du
tribunal de grande instance saisi un pouvoir d'appréciation sur la
nécessité de ce concours. Il faut cependant conclure de
l'économie du dispositif retenu que le juge sera enclin à
autoriser la nomination d'un tiers chargé d'assister l'expert lorsque
les difficultés rencontrées par la copropriété sont
particulièrement complexes et exigent, de ce fait, l'intervention d'une
personne bénéficiant d'une compétence spécifique.
En tout état de cause, le choix laissé à l'administrateur
sur l'identité de son assistant apparaît tout à fait
discrétionnaire. Or, votre commission des Lois estime qu'il devrait
revenir au juge de déterminer l'identité de la personne
chargée d'assister ce mandataire.
Elle vous soumet, en conséquence, un
amendement
tendant à
prévoir que le juge désigne la personne assistant
l'administrateur de copropriété, sur proposition de ce dernier.
Le texte précise, en outre, que le tiers que peut s'adjoindre
l'administrateur provisoire est rétribué directement par ce
dernier, sur sa propre rémunération.
Votre commission vous propose d'
adopter l'article 16 ainsi
modifié
.
Article 17
(art. L. 615-6 et L. 615-7 nouveaux
du code de la
construction et de l'habitation)
Etat de carence dans la gestion
d'un
immeuble collectif à usage
d'habitation
Cet
article tend à compléter le chapitre V du titre Ier du livre VI
du code de la construction et de l'habitation par deux articles L. 615-6
et L. 615-7. Ce chapitre, inséré par la loi
n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du
pacte de relance pour la ville, institue des mesures de sauvegarde visant
à restaurer le cadre de vie des occupants et usagers d'immeubles ou de
groupes d'immeubles bâtis.
Dans ce cadre, les articles L. 615-1 à L. 615-5 du code de la
construction et de l'habitation permettent la création de plans de
sauvegarde ayant notamment pour objet de clarifier et simplifier les structures
et les règles d'administration des immeubles concernés et de
réaliser des travaux de conservation ou des travaux tendant à
réduire leurs charges de fonctionnement.
L'article 17 du présent projet de loi complète ce dispositif en
prévoyant la possibilité de constater l'état de carence
de l'entité gestionnaire d'un immeuble collectif à usage
principal d'habitation, en vue de procéder à son expropriation
pour cause d'utilité publique
.
Article L. 615-6 nouveau
Etat de carence dans la gestion d'un immeuble
collectif
à usage principal
d'habitation
La
constatation d'une carence grave dans la gestion d'un immeuble collectif
à usage principal d'habitation est un préalable indispensable
à l'intervention publique.
1. L'état de carence dans la gestion de l'immeuble collectif à
usage principal d'habitation
Aux termes du
premier alinéa
du texte proposé par cet
article, l'état de carence peut être
déclaré
à l'égard des personnes morales chargées d'assurer la
gestion d'immeubles collectifs à usage principal d'habitation.
En
vertu du premier alinéa du texte proposé pour l'article
L. 615-6 du code de la construction et de l'habitation, il s'agirait :
- d'un
syndicat de copropriétaires
, régi par les
dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut
de la copropriété des immeubles bâtis ;
- d'une
société d'attribution
. Une telle
société, régie par les articles L. 212-1 et suivants
du code de la construction et de l'habitation, a pour objet la construction ou
l'acquisition d'immeubles en vue de leur division par fractions
destinées à être attribuées aux associés en
propriété et en jouissance. L'objet social comprend
nécessairement la gestion et l'entretien des immeubles concernés,
jusqu'à la mise en place d'une organisation
différente ;
21(
*
)
- d'une
société coopérative de construction
. Ce
type de société, régi par les articles L. 213-1 et
suivants du code de la construction et de l'habitation, par les dispositions
non contraires du titre III de la loi du 24 juillet 1867 et de la loi
n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la
coopération ainsi que par les articles L. 212-2 et L. 212-6 du
code susmentionné, a pour objet la construction d'un ou plusieurs
immeubles en vue de leur division par lots ou d'un ensemble de maisons
individuelles groupées à usage professionnel et d'habitation
destinées à être attribués ou vendus aux
associés. Son objet inclut également la gestion et l'entretien
des immeubles jusqu'à la mise en place d'une organisation
différente.
22(
*
)
Il convient donc de noter que l'état de carence ne pourrait être
constaté à l'égard d'une personne physique, unique
propriétaire d'un immeuble à usage collectif d'habitation, qui
serait dans l'incapacité d'exercer ses missions de gestion. Cette
exclusion peut s'expliquer par le fait que l'objet essentiel du projet de loi
est d'offrir un dispositif destiné à
« sauver » des immeubles ayant plusieurs
propriétaires, soit dans le cadre d'une copropriété
régie par la loi précitée du 10 juillet 1965, soit par
l'une des sociétés susmentionnées.
Aux termes du présent article, dans sa rédaction
antérieure à la première lecture du projet de loi par
l'Assemblée nationale,
l'état de carence consistait seulement
en l'incapacité d'exercer des missions de gestion
. Cette formulation
était susceptible de diverses interprétations mais était
éclairée par la suite de l'alinéa premier qui
énonçait qu'un expert peut être chargé de
«
constater la nature et l'importance des travaux à mettre
en oeuvre ainsi que le grave déséquilibre financier du
syndicat
».
L'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des
Affaires économiques, a cependant reformulé les conditions du
déclenchement de la procédure prévue à cet article.
Désormais,
pour qu'il y ait incapacité d'exercer les missions
de gestion au sens de cet article, il est nécessaire de
constater
:
- l'incapacité pour le syndicat des copropriétaires, la
société d'attribution ou la société
coopérative de construction
d'assurer ses missions de gestion et la
conservation de l'immeuble
;
-
ou que la sécurité des occupants de l'immeuble est
gravement menacée.
Aux termes de l'article,
ces conditions sont satisfaites lorsque sont
relevées des «
difficultés financières ou de
gestion »
et compte tenu de la «
nature et
l'importance des travaux à mettre en oeuvre
» dans
l'immeuble.
Pour votre commission,
cette énumération est inutile :
préciser que des difficultés de gestion entraînent une
incapacité d'exercer des missions de gestion ou que, compte tenu de
l'importance des travaux à mettre en oeuvre, la conservation de
l'immeuble ou la sécurité des occupants n'est pas assurée,
relève de la tautologie. La précision concernant le niveau
d'endettement des propriétaires de l'immeuble n'apparaît, quant
à elle, guère convaincante, dans la mesure où cet
endettement n'est pas caractérisé et que,
ce qui importe est
l'état financier de la personne chargée de la gestion de
l'immeuble
(syndicat ou société)
et non celui de
l'ensemble des propriétaires
.
Il reviendra, en tout état de cause, à l'expert
désigné par le juge de constater l'état financier du
syndicat ou de la société assurant la gestion de l'immeuble ainsi
que la nature et l'importance des travaux à accomplir.
2. La déclaration de l'état de carence
La constatation de la carence dans la gestion de l'immeuble est soumise
à
l'intervention de l'autorité judiciaire
.
Pour ce faire,
le président du tribunal de grande instance doit
être saisi aux fins de voir nommer un expert
.
Les personnes susceptibles de saisir le juge sont limitativement
énumérées par le texte. Il s'agit, avant tout, du maire ou
du président de l'établissement public de coopération
intercommunale (EPCI) sur le territoire duquel est implanté l'immeuble.
Un tel établissement peut en effet avoir reçu de ses membres
compétence en matière de logement.
Votre commission des Lois estime cependant nécessaire de préciser
que seul un établissement public de coopération intercommunale
compétent en cette matière peut saisir le juge.
Le préfet, le procureur de la République, le syndic de
copropriété de l'immeuble concerné ou des
copropriétaires représentant au moins 15 % des voix du
syndicat peuvent également saisir le président du tribunal de
grande instance aux mêmes fins. Néanmoins, dans cette
hypothèse, le présent article prévoit que cette saisine ne
sera recevable que si elle a été effectuée avec l'accord
du maire ou du président de l'établissement public
concerné.
Ce régime d'autorisation s'explique par le fait que, en vertu du texte
proposé pour insérer un article L. 615-7 dans le code de la
construction et de l'habitation, seuls la commune et l'établissement
public de coopération intercommunale peuvent poursuivre
l'opération d'expropriation après que l'état de carence a
été constaté.
Compte tenu de l'économie du texte,
le président du tribunal
de grande instance se voit donner une faculté d'appréciation sur
la nécessité de l'expertise.
Le juge statuera «
comme en matière de
référé ou sur requête
». Il faut en
déduire que le président du tribunal de grande instance rend un
jugement au fond en la matière, et non une simple décision
provisoire. Un choix entre la procédure de référé
et la procédure sur requête est donc offert : dans un cas, la
procédure sera contradictoire, alors que dans l'autre, le juge rendra sa
décision non contradictoirement.
Compte tenu des observations qu'elle vous a présentées sur le
premier alinéa du texte proposé par cet article, votre commission
des Lois vous soumet un
amendement de réécriture
de la
première phrase de cet alinéa afin de préciser :
- que la procédure de déclaration de l'état de
carence peut être entamée lorsque le syndicat des
copropriétaires, la société d'attribution ou la
société coopérative de construction est dans
l'incapacité d'exercer ses missions de gestion et d'assurer la
conservation de l'immeuble en raison de son grave déséquilibre
financier ou lorsque la sécurité des occupants est gravement
menacée,
et que l'expert désigné a pour mission de
constater la nature des travaux à accomplir ainsi que l'état
financier du syndicat ou de la société assurant la gestion de
l'immeuble ;
- que, outre le maire,
seul un établissement public de
coopération intercommunale compétent en matière de
logement
peut saisir le juge dans le cadre de la présente
procédure.
Le deuxième alinéa
du texte proposé pour l'article
L. 615-6 précise que
les résultats de l'expertise sont
notifiés
au syndicat des copropriétaires, le cas
échéant, à l'administrateur provisoire de la
copropriété ou au gérant de la société
d'attribution ou de la société coopérative de
construction, avec mention du délai dans lequel le rapport de
contre-expertise peut être présenté.
Votre commission des Lois vous propose un
amendement
tendant à
prévoir que la notification est faite, non au gérant de la
société d'attribution ou de la société
coopérative de construction, mais à son représentant
légal dans la mesure où ces sociétés peuvent
revêtir toute forme de société prévue par la loi.
Or, les sociétés anonymes, par exemple, ne disposent pas,
à proprement parler, d'une gérance.
En second lieu, aux termes du troisième alinéa du texte
prévu pour l'article L. 615-6, «
en cas de
désaccord
»,
le
président du tribunal de
grande instance statue sur les conclusions de l'expertise, après avoir
entendu les parties dûment convoquées et peut, au terme de cette
procédure, déclarer l'état de carence
du syndicat de
copropriétaires, de la société d'attribution ou de la
société coopérative de construction.
On peut s'étonner que l'intervention du juge ne soit prévue qu'en
cas de désaccord. La constatation de l'état de carence doit
nécessairement se faire par la voie judiciaire et sur la base des
rapports déposés par les experts commis, quand bien même il
n'y aurait aucun désaccord entre les parties concernant les conclusions
de l'expertise. Votre commission vous soumet, en conséquence, un
amendement
de clarification rédactionnelle à cet
alinéa.
Le quatrième alinéa du texte prévoit que la
décision du président du tribunal de grande instance est
notifiée :
- au syndicat des copropriétaires, à l'administrateur provisoire
ou au gérant de la société d'attribution ou de la
société coopérative de construction. Par cohérence
avec l'amendement qu'elle vous a présenté au deuxième
alinéa de ce texte, votre commission des Lois vous soumet un
amendement
visant à remplacer le terme gérant par les mots
«
représentant légal
» ;
- à chacun des copropriétaires ;
- au maire de la commune ou au président de l'établissement de
coopération intercommunale ;
- ainsi qu'à «
la personne à l'origine de la
saisine
». Votre commission des Lois vous soumet
un
amendement
afin de substituer la notion d'
« auteur » de la saisine.
En première lecture, l'Assemblée nationale, sur proposition du
rapporteur de sa commission des Affaires économiques, a
précisé qu'en cas d'impossibilité d'identifier ou de
déterminer l'adresse des personnes susmentionnées, cette
notification était valablement effectuée par un double
affichage : sur l'immeuble lui-même, d'une part ; à la
mairie de la commune ou, à Paris, Lyon et Marseille, à la mairie
de l'arrondissement concerné, d'autre part.
Article L. 615-7 nouveau
Expropriation de l'immeuble
pour lequel
l'état de carence a été
déclaré
Cet
article vise à tirer les conséquences de la déclaration de
l'état de carence par le président du tribunal de grande
instance.
Une fois l'état de carence déclaré, une
procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique peut
être engagée
.
Ainsi peut être assurée la maîtrise publique de
bâtiments collectifs à usage d'habitation, lorsque seule cette
solution permet de remédier à leur détérioration
continue.
L'expropriation sera effectuée sur la base des dispositions du code de
l'expropriation pour cause d'utilité publique qui prévoit une
phase administrative au cours de laquelle l'utilité publique d'un projet
est déclarée et une phase judiciaire - devant le juge de
l'expropriation - qui assure le transfert de propriété du bien
soumis à expropriation et l'indemnisation de la personne
expropriée.
Toutefois, deux différences doivent être relevées par
rapport au droit commun de l'expropriation.
En premier lieu, aux termes du texte proposé par le projet de loi,
le
bénéficiaire de la procédure
d'expropriation ne peut
être que «
la commune ou l'établissement public de
coopération intercommunale
».
En second lieu, l'utilité publique est ici perçue restrictivement
puisque l'opération d'expropriation ne peut avoir pour objet que de
«
mettre en oeuvre des actions ou opérations concourant
à la réalisation d'objectifs de rénovation urbaine et de
politique locale de l'habitat
».
Les personnes publiques susmentionnées ne pourront, en
conséquence, entreprendre l'expropriation qu'en vue de satisfaire
à cet objet unique. Elles ne pourront poursuivre d'autres
finalités que celle prévue par le texte qui leur laisse cependant
une marge d'appréciation relativement large pour déterminer, en
pratique, ce qui peut constituer une action ou opération concourant
à la réalisation d'objectifs de rénovation urbaine et de
politique locale de l'habitat.
Votre commission des Lois a émis un
avis favorable à
l'adoption de l'article 17, ainsi modifié.
Article 18
(art. L. 21-1 du code de l'expropriation pour cause
d'utilité publique)
Cession ou concession des immeubles
expropriés pour cause d'utilité publique à la suite d'une
déclaration d'état de
carence
Cet
article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en
première lecture, vise à modifier l'article L. 21-1 du code
de l'expropriation pour cause d'utilité publique afin de prévoir
que
les immeubles expropriés pour lesquels l'état de carence a
été déclaré
en application de l'article
L. 615-6 du code de la construction et de l'habitation
peuvent faire
l'objet d'une cession de gré à gré ou d'une concession
temporaire
.
L'article L. 21-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité
publique donne en effet à la personne publique expropriante la
faculté d'exproprier des biens immobiliers pour le compte de personnes
auxquelles la qualité d'expropriant n'appartient pas, par le biais de
deux techniques juridiques :
- d'une part, la cession de gré à gré du bien
exproprié. Dans ce cadre, la transmission de la propriété
du bien de la collectivité expropriante à l'acquéreur se
fait sans formalité ou procédure particulière ;
- d'autre part, la concession temporaire de ce bien. Il s'agit d'un contrat par
lequel l'administration - concédante - confère, pour une
durée limitée, à une personne privée -
concessionnaire - des droits et avantages spéciaux sur le domaine de la
personne publique, moyennant le respect de certaines obligations
particulières.
Dans les deux cas, les contrats de cession ou de concession sont assortis d'un
cahier des charges énumérant les obligations et contraintes qui
pèsent sur les personnes cessionnaires ou concessionnaires des biens
expropriés lors de l'utilisation de ces derniers. Les cessionnaires et
concessionnaires doivent respecter le cahier des charges sous peine de voir le
contrat résolu pour inexécution.
23(
*
)
Ce mécanisme, initialement défini par la loi n° 53-683
du 6 août 1953 tendant à accorder des facultés
supplémentaires en vue de l'expropriation de terrains nécessaires
à la construction d'habitation et à l'aménagement de zones
affectées à l'habitation ou à l'industrie a
été étendu à plusieurs types d'opérations
d'expropriation limitativement énumérées à
l'article L. 21-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité
publique.
Plus particulièrement, la loi n° 2000-1208 du 13
décembre 2000 relative à la solidarité et au
renouvellement urbain a inséré dans cet article un paragraphe
2° bis permettant l'utilisation de la procédure de cession ou
de concession susvisée, entre autres, aux «
immeubles
expropriés et situés dans un ensemble immobilier faisant l'objet
d'un plan de sauvegarde en application de l'article L. 615-1 du code de la
construction et de l'habitation
».
L'article 18 du présent projet de loi complèterait ce dispositif
en
ajoutant la faculté de recourir au mécanisme de cession ou
de concession prévu par l'article L. 21-1 du code de
l'expropriation à l'égard des immeubles pour lesquels
l'état de carence a été déclaré en
application de l'article L. 615-6 du code de la construction et de
l'habitation
.
Grâce à cet ajout, la personne expropriante sera ainsi en mesure
de confier la réhabilitation des immeubles expropriés
après déclaration d'un état de carence à des
personnes privées qui pourront rapidement effectuer les travaux
nécessaires à l'amélioration de l'habitat.
Votre commission des Lois vous propose
d'adopter l'article 18 sans
modification.
Article 19
(art. 2 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991
relative à l'aide juridique)
Octroi du bénéfice de
l'aide juridictionnelle
aux syndicats de
copropriétaires
Cet
article vise à
faire bénéficier certaines
copropriétés en difficulté des dispositions de la loi
n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
L'article 2 de cette loi dispose qu'une aide juridictionnelle peut être
octroyée aux personnes «
dont les ressources sont
insuffisantes pour faire valoir leurs droits en justice
». Si
cette possibilité a été spécialement conçue
au bénéfice des personnes physiques, des personnes morales sont
également susceptibles de profiter de ce dispositif.
L'alinéa 2 de l'article 2 de la loi précitée
prévoit en effet que le bénéfice de l'aide
juridictionnelle «
peut être exceptionnellement
accordé aux personnes morales à but non lucratif ayant leur
siège en France et ne disposant pas de ressources
suffisantes
».
Selon les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, en 2002, sur
689.000 dossiers admis par les bureaux d'aide juridictionnelle au titre de
l'article 2 de la loi susvisée, seuls 20.600, soit environ 3 %, ont
concerné des personnes morales, la plupart émanant d'associations
dans le cadre de procédures de constitution de partie civile.
Face à cet état de fait, il convenait donc de s'interroger sur la
possibilité offerte aux copropriétés en difficulté,
en l'état actuel du droit, de bénéficier du dispositif de
l'article 2 de la loi du 10 juillet 1991. En réponse à une
question écrite, le ministre du logement avait estimé, dès
septembre 1996, que cette base juridique permettait aux
copropriétés en difficulté de bénéficier du
régime de l'aide juridictionnelle.
24(
*
)
En l'état actuel du droit, les copropriétés en
difficulté, comme toutes les personnes morales, sont donc susceptibles
de bénéficier du dispositif prévu par l'article 2 de la
loi du 10 juillet 1991.
Toutefois, certains acteurs souhaitaient aller plus loin dans la reconnaissance
expresse du bénéfice de l'aide juridictionnelle aux
copropriétés en difficultés. Le Conseil économique
et social, notamment, dans un avis adopté le 24 septembre 2000 sur les
copropriétés en difficulté, s'était
déclaré favorable à la reconnaissance expresse du droit
à l'aide juridictionnelle pour le syndicat de copropriétaires
reconnu en difficulté
25(
*
)
.
L'article 19 du présent projet de loi s'inscrit dans cette
problématique et tend à faciliter l'accès des
copropriétés en difficulté à l'aide
juridictionnelle en précisant expressément que certaines d'entre
elles pourront bénéficier de ce dispositif
. Il s'agit :
-
des copropriétés d'immeubles faisant l'objet d'un plan de
sauvegarde en application de l'article L. 615-1 du code de la construction
et de l'habitation
. Un plan de sauvegarde peut en effet, en vertu de cette
disposition, être proposé au préfet par une commission en
vue de restaurer le cadre de vie des occupants ou usagers d'un groupe
d'immeubles bâtis, lorsque celui-ci est dégradé ;
- des copropriétés faisant l'objet d'une administration
provisoire, en application de l'article 29-1 de la loi n° 65-557 du
10 juillet 1965 précitée
. En première lecture à
l'Assemblée nationale, après des débats sur
l'utilité même de la présente disposition, le Gouvernement
a, par amendement, opportunément substitué ce cas d'ouverture
à celui initialement prévu par le projet de loi qui accordait le
bénéfice de l'aide juridictionnelle aux
copropriétés d'immeubles faisant l'objet d'une opération
programmée d'amélioration de l'habitat, en application de
l'article L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation. Une
convention peut en effet être conclue, sur la base de cet article, entre
la commune ou l'établissement public de coopération
intercommunale compétent en matière d'habitat, et l'agence
nationale pour l'amélioration de l'habitat ainsi que l'Etat, afin
d'améliorer l'offre de logements et de maintenir ou développer
les services de voisinage.
Enfin, à la suite de l'amendement présenté par le
Gouvernement, il découle du texte proposé que le
bénéfice de l'aide juridictionnelle pourra être
accordé «
pour l'exercice des actions de recouvrement des
créances, tant en demande qu'en défense
».
L'ajout opéré par l'article 19 du présent projet de loi ne
fait, en tout état de cause, que confirmer une faculté qui
s'offrait déjà aux copropriétés. Cependant,
la
rédaction actuellement retenue par cet article est ambiguë.
D'une part, le caractère exceptionnel de l'accès de ces
copropriétés au bénéfice de l'aide juridictionnelle
paraît ne plus être exigé. D'autre part, les
copropriétés concernées ne semblent pas tenues de
démontrer qu'elles ne disposent pas de ressources suffisantes pour leur
permettre d'exercer les actions en justice nécessaires pour obtenir le
respect de leurs droits.
Votre commission des Lois estime cependant que ces deux conditions,
exigées pour l'ensemble des personnes morales, en vertu du second
alinéa de l'article 2 de la loi précitée du 10 juillet
1991 doivent également être satisfaites pour que les
copropriétés visées par l'article 19 du présent
projet de loi bénéficient de l'aide juridictionnelle. Elle vous
soumet, en conséquence,
un amendement
à cet effet.
Votre commission des Lois vous propose
d'adopter l'article 19 ainsi
modifié
.